(✰) message posté Jeu 22 Jan 2015 - 12:08 par Invité
“ A lost memory. How can this be love if you’re leaving me ? I can’t see you right now cause I just can’t fake it. I can’t be near you right now, cause I know you’re no longer mine. I can’t see you. We’re strangers in different places though we leave a mile apart. I still think of you I pray that you are safe. I'm still missing you . But it has to be this way 'cause I'm not right for you. I said goodbye because I love you. ” ✻ Je me berçais de douces illusions, mais malgré la pointe amère de la déception, et les flashs de réalité qui m’attendaient au tournant, je me murais dans cette petite boule d’insouciance aux côtés d’Eugenia ; ma meilleure amie, mon amante, et ma femme. Je souris en contenant mon expression de béatitude avant de me tortiller sur mon siège. J’avais oublié mon genou pendant quelques instants. J’avais oublié la douleur, la tristesse et la mélancolie. Je m’étais oublié moi-même au détour d’une ruelle sombre et dangereuse pour enfin réaliser que je ne faisais que stagner sur place. Mon cœur souffrait d’un mal encore plus grand que l’abandon. Mon amour refoulé faisait chavirer tous mes sens et toutes mes réflexions. Eugenia, est-ce perdu d’avance ? Je captais son regard et encore une fois elle me parut différente ; ses longs cheveux bruns s’enroulaient autour de son visage afin de dissimuler son étincelle vermeille de prédatrice. J’étais une proie trop facile quand il s’agissait de ses sourires, ou de ses tics maladroits. Je retins mon souffle en secouant la tête. Rosemary était toujours là, arborant l’expression courtoise et familière du démon. J’avais l’impression que sa présence me poussait vers mes limites, comme si j’essayais de lui prouver ( et à tous les autres présents dans a pièce ) que nous étions réellement un couple, alors qu’en fait, je voulais combler un vide dans ma tête. Foutaises !
Ginny captiva mon attention à nouveau. Son air innocent était l’incarnation d’un romantisme magnifique et pur que je peinais à dépeindre dans mes écrits ; parce qu’elle était unique. Elle était précieuse. « Je l’ai rangé en lieu sûr. Quelque part entre mon cœur et mes souvenirs d’Ecosse.» Avoua-t-elle en haussant les épaules. Je remarquai sa gêne dans chacun de ses gestes, alors dans un réflexe dérisoire je capturai ses doigts avec douceur pour la conforter dans ses doutes. Je lui souris en faisant la moue. « Tu as la manie de me laisser en suspens, petite Lancaster. » Raillai-je en raffermissant ma prise sur sa peau délicate. « Je t’emmènerais en Ecosse, un jour. Pour de vrai. » Promis-je le regard pétillant. Je me sentais si proche d’elle en cet instant, comme si le malheur avait tout à coup cessé d’exister et nous étions réellement deux jeunes gens ordinaires. La folle envie de l’embrasser me serra la gorge, et je me surpris à chercher un prétexte dans mon esprit. Je secouais doucement la tête en me lovant dans mon siège. « La plus intelligente ou la plus chanceuse ? » Argumenta-t-elle tout à coup. Je fus surpris par sa question, je n’osais pas imaginer qu’elle puisse réellement considérer mon rejet comme réel. Je déglutis en me cachant derrière mes faux-airs princiers. « Je ne sais pas. Tu es les deux je présume. Intelligente et chanceuse. »
Je m’étais assoupi quelques instants avant de me réveiller en plein songe. Ginny était toujours là, tandis que je papillonnai des yeux pour réaliser la situation. Je me familiarisais à nouveau avec le décor sobre du diner , et les visages indiscrets des clients. Je souris en m’adressant à Eugenia. « La nuit, ça me rendait folle. Je te réveillais sans cesse parce que ça m’empêchait de dormir. Je paris que ça ne te manque pas. » Souffla-t-elle, me transportant vers mes souvenirs lointains. « Je ne suis pas du genre à chipoter quand on me réveille. Ça ne m’a jamais dérangé. » Je n’étais pas habitué aux longues nuits de sommeil. Mon père faisait trop de bruit en dévalant les marches menant à la salle de bain, ou en claquant la porte pour traverser toutes les pièces à la recherche d’une bouteille d’alcool ou d’une photo d’Aïda. J’haussai les épaules avec désinvolture. « Pourquoi, ça te manque de m’entendre machouiller ? » M’amusai-je.
Je fendis l’air en direction de la salle de bain. L’eau froide coulait le long de mes avant-bras tendus, mais malgré mes concentrations, ou ma démarche pompeuse, je n’arrivais pas à retrouver mon intégrité de journaliste ou ma pause impétueuse. Eugenia me réduisait à néant – comme si ma réussite n’avait jamais existé, comme si je n’avais jamais existé. Toutes mes pensées se dirigeaient inévitablement vers elle. Il n’était question que de son sourire et de sa douceur. Cette sensation était horrible, elle paralysait mon esprit créatif et j’avais tout à coup peur de tout perdre en côtoyant mes faiblesses de trop près. Je me refrognais dans un coin de la pièce en passant une main tremblante dans ma chevelure sauvage. Pourquoi avait-elle cet effet maléfique sur moi ? Je pris une grande inspiration avant de la rejoindre à nouveau. Notre commande était déjà arrivée. Je lui fis un signe de la main en me calant sur mon siège – en face d’elle. « Heureusement que tu es revenu à temps, j’ai failli mourir de faim. Je t’attendais pour commencer. » S’amusa-t-elle. Je l’observai verser le miel sur ses pancakes avec fascination. « On devrait faire ça plus souvent, monsieur Fitzgerald. Passer du temps ensemble sans se prendre la tête, je veux dire. Même si j’adore me faire passer pour ta femme. » Je souris en prenant ma tasse de café fumante entre les mains. Les parois brûlantes du verre, réchauffaient mon corps tout entier. J’acquiesçai d’un simple signe de la tête afin de répondre à son invitation, puis je reportai mon attention sur sa fourchette. « J’adore te regarder manger. » Confessai-je en la sondant presque. Je tentais d’imprimer chacun de ses traits bienveillants dans ma mémoire, comme si elle risquait de disparaitre après mon retour de France. Je bu une lampée de ma boisson avant de faire l’analogie avec nos au revoir à la gare de Londres. Mon sentiment à cet instant était similaire à un départ douloureux, à la différence près que ce n’était pas Liverpool - ce n’était pas qu’une passade. « Quand sommes-nous vu pour la dernière fois ? » M’enquis-je tout à coup. « Avant l’accident et l’année de silence. La dernière fois que nous avons partagé un vrai moment ensemble … »
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(✰) message posté Jeu 22 Jan 2015 - 21:36 par Invité
i will never, ever regret the things i've done. because most days, all you have are places in your memory that you can go to;; sometimes leaving is the only way to be there for someone. ✻✻✻ Parfois, il me semblait que cela était une évidence. Je l’aimais. Je l’aimais de tout mon cœur, autant que mon corps pouvait me le permettre. Je l’aimais avec toutes les nuances qui pouvaient exister sur la Terre ; je l’aimais avec conviction et douceur, avec entêtement et tristesse. C’était ainsi. Je ne pouvais pas me battre contre ma propre personne ; je ne pouvais pas aller à l’encontre de ces sentiments qui m’habitaient depuis des mois, des années. J’avais la tendre sensation que je le portais dans mon cœur depuis que j’avais vu le jour. De mémoire, je ne parvenais pas à me souvenir d’une journée passée sans lui, sans sa présence, sans nos souvenirs. Parce que cela avait été ainsi. Malgré la longue année que nous avions passé chacun de notre côté, il avait été à mes côtés d’une certaine manière. Il avait fait l’objet de mes délires douloureux, il avait habité mon esprit aussi longtemps que j’avais été capable de penser correctement. Il avait été là. Toujours. Et, malgré moi, il était encore là. Dans mes pensées, dans ma tête, dans mon corps, dans mon esprit. Il était présent partout dans mon existence malgré les mots. Malgré ses mots. J’étais suffisamment idiote pour lui pardonner, après tout. Suffisamment attachée pour accepter qu’il puisse me dire des paroles acides en face. J’avais la sensation que là reposait ma plus grande faiblesse ; il constituait, à lui seul, la preuve même que je lui vouais toute mon existence sans même y réfléchir à plusieurs fois. C’était un jeu dangereux. C’était comme marcher sur un fil à une centaine de mètres du sol ; la chute était inévitable et, pourtant, intrépide, je m’élançais quand même dans le vide. Ses doigts trouvèrent les miens avec une aisance qui ne pouvait être qu’à lui ; je levai les yeux vers son regard presque bienveillant et je sentis mes joues rosir. Cependant, je ne retirai pas ma main ; je me délectai presque de ce contact qui me manquait à chaque fois qu’il pouvait être loin de mon corps. « Tu as la manie de me laisser en suspens, petite Lancaster. Je t’emmènerais en Ecosse, un jour. Pour de vrai. » Ses paroles avaient des allures de promesse. Son regard charmeur m’encourageait presque à le croire. Alors, en guise de réponse, j’hochai la tête, me gardant bien de lui avouer qu’il me tardait qu’il m’emmène sur les terres de ses origines. Après tout, il avait connu les territoires de mon enfance ; je n’avais jamais eu l’occasion de m’aventurer là où il avait bien pu vivre. Là où il avait bien pu écrire son histoire, même en étant malheureux, même en étant oublié, même en étant perdu. Nous dansions presque ensemble à coup de mots et de paroles enjouées ; j’avais toujours été moins bonne oratrice que lui mais j’avais calqué certaines de mes réactions sur son art de la répartie. Quelque part, il m’avait appris des choses sans le savoir. Quelque part, il m’avait enseigné toutes ces choses. Il m’avait appris à me redresser et à affronter. Et, le pire dans tout cela, était qu’il ne s’en était sans doute jamais rendu compte. « Je ne sais pas. Tu es les deux je présume. Intelligente et chanceuse. » déclara-t-il avec assurance à mes propres paroles. Je refusai de croire d’être ni l’une, ni l’autre ; je refusai de croire que cela soit l’intelligence ou la chance qui m’ait maintenu hors de sa portée, hors de notre destinée commune. J’envisageais les choses d’une manière différente, presque singulière. Après tout, il le savait sans doute déjà. Je passais mon temps à être en désaccord avec lui. A me dresser contre sa façon de penser. A argumenter sans cesse, sans relâche, sans trouver de limite à mon insolence. Je ne désirais pas lui donner la satisfaction de constater qu’au fond je n’étais rien de plus qu’une gamine effrontée. Rire me semblait si facile. Être en sa compagnie était presque naturel. Je ne pus m’empêcher de céder à l’hilarité lorsqu’il se tira de sa torpeur passagère ; je l’observai presque avec entrain, tirée loin de cette réalité qui était désormais la nôtre. Dans ces instants hors du temps, l’aimer ne me faisait pas mal. Dans ces instants, être en sa compagnie me faisait du bien et apaisait les tumultes qui m’habitaient ; dans ces instants, je me sentais entière. Les souvenirs n’étaient pas blessants. Sa présence ne me mettait pas à l’aise. Nous étions simplement Julian et Eugenia. Le reste ne comptait pas. « Je ne suis pas du genre à chipoter quand on me réveille. Ça ne m’a jamais dérangé. Pourquoi, ça te manque de m’entendre mâchouiller ? » demanda-t-il. Je me mis à rire en haussant doucement les épaules. « Admettre que cela me manque te satisferait beaucoup trop. » lui confiai-je avec un sourire en coin. Pourtant, quoi que je puisse en dire, cela me manquait. Ces instants qui m’avaient rendu complètement folle étaient empreints de nostalgie et de tristesse, désormais, dans mon esprit lasse et désabusé. « Mais je crois que ma partie préférée était de te réveiller… Et parler avec toi pendant des heures au lieu de se rendormir. » Mes pensées papillonnèrent. Le temps avait semblé s’être arrêté, ces nuits-là. Cela avait été comme si la vie toute entière nous appartenait. Mais cela n’avait été qu’un leurre. Je dus contenir ma panique lorsque Julian s’en alla se rafraîchir ; je ne parvins à retrouver le fil de mes pensées que quand il finit par s’installer de nouveau en face de moi. Je lui adressai un sourire avec des paroles peintes d’un entrain feint ; il m’observa m’occuper de mon assiette, les doigts posés sur sa tasse de café. Je finis par enfourner ma première bouchée de pancakes et je rougis en sentant son regard sur moi. Je relevai les yeux vers lui en mâchant avec lenteur. Le goût sucré du miel envahissait ma bouche ; quelque part, cela me réconfortait. « J’adore te regarder manger. » me confia-t-il. Je déglutis en secouant la tête. « Toujours en train de te demander comment je peux manger autant en étant aussi frêle ? Je te jure, je ne sais pas comment est-ce que je peux avoir autant de place. C’est un des plus grands mystères de la nature. » Comme pour ponctuer mes paroles, je portai une nouvelle fois ma fourchette à ma bouche ; son regard semblait me sonder, pénétrer mon âme et explorer ses moindres recoins. Je feignais l’assurance alors que cela n’était pas une chose avec laquelle j’étais à l’aise. Je feignais l’assurance et, pourtant, mon manque de confiance en moi était sans cesse grandissant. « Quand sommes-nous vu pour la dernière fois ? Avant l’accident et l’année de silence. La dernière fois que nous avons partagé un vrai moment ensemble… » me demanda-t-il subitement. Je l’observai avant de froncer les sourcils, fouillant ma mémoire. « C’était à Liverpool. Deux semaines avant l’accident. » lui répondis-je. J’aurais aimé feindre le doute. J’aurais aimé faire comme si ce dernier souvenir ne m’avait pas plus hanté que les autres. Mais je n’y parvenais pas. Je m’étais remémoré chaque instant de notre entrevue avec une obsession non feinte. J’avais chéri ces minutes d’insouciance. Ces derniers instants de répit. « C’était juste avant que l’on commence nos sessions de révisions intensives pour les examens finaux. J’étais venue et on avait globalement passé le week-end entier à… Tout faire sauf parler de nos cours. » dis-je avant d’hausser les épaules. « Tu te souviens à quel point j’étais stressée ? J’avais si peur de rater. T’avais littéralement tout essayé pour me changer les idées. » Cela me paraissait presque dérisoire. J’avais la désagréable sensation d’avoir gâché ces derniers instants en sa compagnie ; mais cela était bien souvent comme cela. Lorsque le destin jouait avec nous, nous ne pouvions jamais réellement savoir quand seraient nos véritables adieux.
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(✰) message posté Ven 23 Jan 2015 - 23:40 par Invité
“ A lost memory. How can this be love if you’re leaving me ? I can’t see you right now cause I just can’t fake it. I can’t be near you right now, cause I know you’re no longer mine. I can’t see you. We’re strangers in different places though we leave a mile apart. I still think of you I pray that you are safe. I'm still missing you . But it has to be this way 'cause I'm not right for you. I said goodbye because I love you. ” ✻ Je ne voulais pas me forcer à retrouver la réalité, pourtant mes instincts se déchiraient à l’intérieur de ma poitrine, implorant ma clémence et ma lucidité. Je devais me réveiller de ma torpeur et retrouver le courage de partir. Je devais me tenir droit et quitter ces lieux maudits pour soigner mes blessures cachées. Je baissai les yeux sur nos mains entrelacées, et dans un élan de désespoir je caressais sa paume écorchée par les roues de son fauteuil. Je voulais imprimer chacune de mes plaintes muettes sur son épiderme, et m’incruster à tout jamais en elle. L’oubli était un fléau pour le cœur et pourtant je la condamnais à me chérir pour l’éternité. Je n’étais pas encore prêt à lâcher prise, ou à abandonner cette part de sentiment que je nourrissais pour elle. C’était inévitable ; je continuais à l’aimer silencieusement, presque par habitude. J’avais besoin de ce qu’il y’avait de pire en moi, pour trouver le meilleur, et même si Eugenia était là et qu’elle représentait la lumière divine, je ne pouvais me résoudre à l’embrasser complètement. J’avais peur de la concrétisation de mes propres désirs. Au fond, je me plaisais dans la douleur. C’était le désespoir qui définissait mon talent et mon charme. Que serais-je sans mon ambition ? Sans ma rage de vaincre ou ma terrible vengeance sur le monde ? Je papillonnai des yeux en redécouvrant ces espaces de perdition et l’odeur lointaine de la mer. Ma tête se pencha presque machinalement vers l’épaule de Ginny, et j’humai son parfum en fermant délicatement les yeux. Elle sentait bon le paradis et l’insouciance. Mon estomac se crispa, traversé par des papillons allègres et excitants. « Admettre que cela me manque te satisferait beaucoup trop. » Souffla-t-elle, et je souris à sa remarque. Elle avait sans doute raison. Admettre que je lui manquais, d’une quelconque manière qui soit, regonflait mon égo démesuré. Je me sentais invisible à chaque fois qu’elle m’accordait une attention ou un sourire. « Mais je crois que ma partie préférée était de te réveiller… Et parler avec toi pendant des heures au lieu de se rendormir. » Je me redressai doucement. « Ah bon ? Je croyais que tu n’arrivais pas à te rendormir à cause de moi. Maintenant que tu le dis, tu grignotais au lit et je détestais ça ! » La taquinai-je en la bousculant légèrement.
Je tranchais l’air en m’avançant vers la table. Eugenia était assise en silence, les mains crispées sur ses cuisses fermées, et pendant une fraction de secondes j’eus l’impression de rencontrer mon destin. Je lui souris avec courtoisie, sans un mot, préférant taire mes divagations puis je pris place en face d’elle. Ce n’était pas sain de l’entrainer dans ma chute funeste. Elle mâcha un bout de pancake avec énergie, appréciant chaque saveur et chaque bouchée. Je retrouvais la gamine innocente et passionnée de mon enfance, et immanquablement je l’aimais à nouveau. Je retins ma respiration avant d’avaler une gorgée de café. « Toujours en train de te demander comment je peux manger autant en étant aussi frêle ? Je te jure, je ne sais pas comment est-ce que je peux avoir autant de place. C’est un des plus grands mystères de la nature. » J’acquiesçai d’un signe de la tête, amusé. « En effet. Je me demande toujours comment une aussi petite bouche peut gober tout ça … » Raillai-je en désignant son assiette.« Mais je pense aussi que j’adore te regarder manger, et que tu ne devrais changer ton appétit pour rien au monde. » Je plissai le front en lui adressant un sourire aguicheur. Mes doigts se fermèrent sur mon croissant chaud, et je pris une petite bouchée sans parvenir à la quitter des yeux. Eugenia me captivait ; elle se muait comme une œuvre d’art, transfigurant l’espace et le temps. Elle était aussi très belle. Je soupirai en faisant la moue. Mes souvenirs remontaient jusqu’aux paysages sauvages de Cardiff, mais je peinais me remémorer notre dernière rencontre. Tout avait basculé à une vitesse vertigineuse.
« C’était à Liverpool. Deux semaines avant l’accident. » Répondit-elle, et j’écarquillai les yeux. Je réalisais que j’étais dans le flou total. « C’était juste avant que l’on commence nos sessions de révisions intensives pour les examens finaux. J’étais venue et on avait globalement passé le week-end entier à… Tout faire sauf parler de nos cours. Tu te souviens à quel point j’étais stressée ? J’avais si peur de rater. T’avais littéralement tout essayé pour me changer les idées. » Je déglutis avec difficulté – j’étais étranger dans ma propre existence. Je crispai la mâchoire dans un effort de concentration dérisoire. Rien. Strictement rien. J’écrasai mon croissant entre mes doigts sans m’en rendre compte, puis dans un geste empreint de lassitude je finis par lâcher prise. « Je … Je ne m’en rappelle pas Ginny. » Confessai-je le visage blême. « Je ne me souviens plus … » Ma voix se brisa en mille morceaux, et je m’éloignai de la table rejetant le monde extérieur et ses illusions. Comment était-ce possible que je l’oubli ? C’était une sensation horrible et paralysante. Je me mordis la lèvre inférieure. « Je n’ai pas passé mes examens finaux. Je suis passé en session de rattrapage. » Tremblai-je avant de passer une main dans ma chevelure en bataille.
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(✰) message posté Sam 24 Jan 2015 - 15:22 par Invité
i will never, ever regret the things i've done. because most days, all you have are places in your memory that you can go to;; sometimes leaving is the only way to be there for someone. ✻✻✻ Je me demandais, parfois, à quoi nous aurions pu avoir l’air en tant que couple. En tant que personnes ensemble. En tant qu’un seul et même tout. Une seule et même âme. Je m’étais toujours peint un tableau idyllique ; j’avais toujours songé que cela aurait été l’accomplissement de ma vie, l’achèvement de longues labeurs, l’objectif final de mon existence imparfaite. Mes penchants romantiques m’avaient donné l’illusion que notre histoire aurait duré jusqu’à la fin des temps. Que nous aurions eu l’occasion de nous marier, d’avoir des enfants, de vieillir ensemble. Que nous aurions eu la vie et le temps devant nous. Une pensée empreinte de pessimiste flotta dans mon esprit. Elle vint assombrir l’éclat bienheureux de ma conscience pour me faire réaliser que je ne savais pas réellement ce qui aurait pu se passer. Peut-être aurions-nous tout gâché. Peut-être aurait-ce été un échec cuisant. Certains individus étaient des fervents défenseurs du dicton tout arrive pour une raison. Et si le destin nous avait sauvés d’une catastrophe ? Et si le destin avait sauvé nos cœurs avant qu’ils ne se déchirent ? Un divorce, des disputes. Je n’avais jamais pensé que les choses puissent mal se dérouler mais cela était une possibilité. J’avais été simplement trop candide pour m’en rendre compte. Mais, à vrai dire, même maintenant en sachant que cela aurait sans doute été une finalité possible, je ne parvenais pas à m’y accrocher. Je préférais croire que tout aurait été pour le mieux. Je préférais croire que nous aurions pu être des âmes sœurs si les évènements s’étaient déroulés en notre faveur. Cela me permettait de pouvoir me lever. Cela me permettait de pouvoir avancer. Et d’y croire. Avec attention, je finis par me verser du thé fumant dans ma tasse ; j’y ajoutai deux cuillères de sucre avant de mélanger avec douceur son contenu. Mes gestes étaient mesurés et doux. Mon esprit, quant à lui, était bien plus tranquille maintenant que Julian était revenu. J’avais eu peur. Peur de perdre pied en son absence. Peur de me perdre tout court. J’avais beaucoup de mal à appréhender l’importance qu’il avait dans mon existence ; il avait installé un voile sur mon cœur et, depuis, j’avais la sensation de lui appartenir. Mes sourcils se froncèrent à mesure que mes yeux se teintaient de tristesse. Je savais que cela était peine perdue. Je savais qu’il ne pourrait jamais rien m’apporter de bon. Cela était comme si notre histoire était déjà perdue. Comme si nous étions déjà perdus. L’aimer à sens unique ne m’avancerait à rien et ne générerait que sa colère ; pourtant, je m’y accrochais. Je m’y accrochais comme je m’y étais toujours accrochée. Je n’avais aucun espoir de rédemption. J’étais condamnée, dans tous les cas et quoi qu’il arrive. « En effet. Je me demande toujours comment une aussi petite bouche peut gober tout ça… » me déclara-t-il en désignant mon assiette. « Mais je pense aussi que j’adore te regarder manger, et que tu ne devrais changer ton appétit pour rien au monde. » J’esquissai un sourire en sentant mes joues rosir ; je plongeai mon regard sur mes pancakes en tentant de me reprendre. J’ai faim était sans doute la phrase que j’avais le plus prononcée au cours de mon existence ; elle avait provoqué des soupirs de la part de ma mère, des regards amusés chez mon père. Julian, lui, avait toujours été étonné par ma capacité à n’être jamais rassasiée ; parfois, même, il s’était moqué de moi. Je savais que cela n’avait jamais réellement été méchant à mon égard. Pourtant, cela n’avait fait qu’accroitre un certain complexe. « Va dire ça à ma mère. » murmurai-je doucement avant de déglutir. « C’était toi qu’elle voulait voir manger. Pas moi. » Le passé. Encore le passé. J’avais la sensation de toujours tout ramener à ce que nous avions bien pu vivre ensemble ; comme si, quelque part, cela continuait de nous hanter. Quelque part, cela était le cas. Durant des mois, certains de mes souvenirs s’étaient logés dans ma mémoire sans que je ne parvienne à m’en défaire. La dernière fois que nous nous étions vus, avant l’accident, en faisant partie. J’avais repassé chaque minute de chaque instant jusqu’à ce que je finisse par me demander si cela était la réalité ou des délires montés par ma conscience ravagée. « Je… Je ne m’en rappelle pas, Ginny. Je ne me souviens plus… » me confessa Julian et mon cœur se serra si fort dans ma poitrine que j’en eus le souffle coupé. Je mis quelques instants avant de parvenir à esquisser un sourire tremblant. Esquisser un sourire comme si cela n’était pas grave alors qu’au fond cela me blessait. « Je n’ai pas passé mes examens finaux. Je suis passé en session de rattrapage. » Je levai les yeux vers lui avant de saisir ma tasse de thé. Ma main tremblait tellement que je ne pus la lever tout de suite pour la porter à mes lèvres ; avec une patience presque obsessive, j’attendis, avant de finalement boire deux gorgées. Le liquide me brûla la bouche. Me brûla la gorge. Mais, quelque part, j’espérais que cela me ramène sur Terre. « Quelque part, je m’en doutais ça s’était passé comme ça. Mais tu as réussi. Regarde où tu es, maintenant. » murmurai-je. « Quant à moi… Eh bien j’aurais bien aimé revenir en arrière pour me dire de ne pas me donner autant de mal. Je n’ai jamais passé mes derniers examens. Même pas aux rattrapages. Tout se stresse pour rien, au final. Ça m’apprendra. » Je bus une nouvelle gorgée brûlante avant de reposer ma tasse. J’observai mon assiette. Mais je n’avais même plus faim. Une boule s’était formée au fond de ma gorge. Je ne savais pas si cela était la tristesse ou la déception qui me pesait le plus ; je me sentais simplement fatiguée. Je me sentais simplement usée. Je constatai à quel point j’avais été faible d’attacher de l’importance à des derniers instants qui n’avaient probablement aucune valeur. « Enfin, ce n’est pas grave si tu ne te souviens pas. Comme je l’ai dit, on n’avait rien fait de particulier. » finis-je par conclure en haussant les épaules. C’était dur, de faire comme si. C’était dur, de prétendre. « C’était juste comme d’habitude. » Je l’avais juste aimé toutes les secondes que nous avions bien pu passer ensemble. Notre séparation, lorsque j’étais repartie, m’avait juste fait mal et j’avais fait le trajet de retour la mort dans l’âme. Il m’avait manqué les deux semaines qui avaient suivi. Nous nous étions appelés presque tous les jours, moi prétextant des bêtises pour simplement entendre sa voix. Puis, après, j’avais eu mon accident. Et je n’avais même pas eu la possibilité de lui dire au revoir comme il fallait.
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(✰) message posté Mar 27 Jan 2015 - 0:08 par Invité
“ A lost memory. How can this be love if you’re leaving me ? I can’t see you right now cause I just can’t fake it. I can’t be near you right now, cause I know you’re no longer mine. I can’t see you. We’re strangers in different places though we leave a mile apart. I still think of you I pray that you are safe. I'm still missing you . But it has to be this way 'cause I'm not right for you. I said goodbye because I love you. ” ✻ Je l’observais en souriant au coin. Peut-être étais-je comme cet héros grec qui avait brûlé de plus de feux qu’il n’en allumait – Je m’embrasais par les méandres d’un sentiment fugace et étrange. Mon amour était à la fois timide et maladroit. A chaque fois que je me dérobais de sa prise, il semblait me rappeler à l’ordre. Quel terrible secret, inadmissible à haute voix ! Eugenia avait capturé mon cœur d’un geste banal. Elle avait fait de moi le pantin défaillant d’un romantisme presque exécrable. Je murmurais quelques poésies dans mon esprit, avant de crisper ma prise sur son poignet. Elle ne s’était pas encore dérobée, pourtant j’espérais qu’elle me libère de cette obsession maladive que je nourrissais pour son corps. Les ombres du passé tournoyaient en boucle autour de ma tête avant de bousculer ma logique infaillible. Le silence qui entourait la table du diner transfigurait chacune de mes divagations. Les mots étaient aussi secs que les lames aiguisées du destin, mais la fragrance de la nostalgie me poussait à défier mon propre malheur. Aurais-je su la combler en l’épousant ? Ou n’étais-ce que la force de mes désillusions qui me forçait à regretter notre histoire ? Je n’étais pas sûr de pouvoir panser ses blessures – il n’y avait rien de bon en moi. Plus maintenant. Son visage croisa mon regard, sublimant l’ambiance morose de cette journée. J’adressais une prière muette aux divinités célestes, mais seul l’écho de ma propre voix me répondait. Sur les portes rouges de la mort je pouvais facilement distinguer son prénom : Eugenia Berenice Lancaster était ma perte – ma seule amie. Je me voilais dans l’obscurité car elle seule, pouvait apaiser mon désir, puis dans un effort surhumain je lui souris avec dégagement. Mes douleurs se succédaient comme les notes d’un piano cassé ; je ne savais plus ou j’en étais. Je fermais les yeux d’un air religieux afin de tromper mon humeur, mais ce n’était pas assez. Ce n’était jamais assez.
Elle versait son thé avec diligence, et je ne pu m’empêcher de l’adorer au-delà de l’attirance physique. Je n’avais plus 17 ans, je ne pouvais plus me cacher derrière mes hormones ou mes faux prétextes d’adolescent en rut – pourtant je n’avais pas assez de bon sens en moi pour admettre la vérité sur mes penchants démesurés. Je n’étais qu’un étranger suffoquant en face de la plus belle merveille du monde. Un putain d’étranger qui sirotait son café avec lenteur afin de se donner un minimum de contenance.« Va dire ça à ma mère. C’était toi qu’elle voulait voir manger. Pas moi. » Railla-t-elle. Je lui adressai un sourire en faisant la moue. « Mais je mange normalement. Tu me fais de l’ombre voilà tout ; quel que soit le nombre de fois où je me resserre tu trouvais toujours le moyen de me battre. » Me moquai-je subtilement avant de me refrogner sur place ; je savais qu’elle ne me tenait pas rigueur pour mes taquineries, mais j’avais un doute sur notre relation à présent. Avais-je toujours le droit de dépasser les limites en sa présence ? Avais-je le droit de blaguer comme bon me semblait ? Je me murais dans un sourire poli en m’éloignant de la table. Je n’avais pas vraiment faim – Je voulais simplement dormir et m’évader.
Ma question était certainement déplacée, j’en payais les conséquences en sentait le sang se glacer dans mes veines. Je ne gardais aucun souvenir de notre dernière rencontre ; peut-être l’avais-je tout simplement effacé de ma mémoire dans un excès de zèle ou de désespoir – peut-être était-ce une nouvelle manœuvre de mon subconscient visant à la punir pour son abandon. Je déglutis en avalant mon croissant avec difficulté. « Quelque part, je m’en doutais ça s’était passé comme ça. Mais tu as réussi. Regarde où tu es, maintenant. Quant à moi… Eh bien j’aurais bien aimé revenir en arrière pour me dire de ne pas me donner autant de mal. Je n’ai jamais passé mes derniers examens. Même pas aux rattrapages. Tout se stresse pour rien, au final. Ça m’apprendra. » J’haussai les épaules avec désinvolture avant de murmurer des excuses sommaires. Je ne savais plus comment gérer ses sautes d’humeurs, ou ses allusions douteuses. Je m’interdisais d’avoir pitié, et dans le feu de l’action, je bafouais la compassion et le pardon. J’avais abandonné mes études afin de sillonner Londres à sa recherche, mais je réalisais avec effroi que je ne m’étais pas appliqué dans la tâche. J’aurais pu débarquer à Cardiff, appeler les hôpitaux, supplier Beatrice … J’avais été assez lâche pour accepter sa décision. Cela m’arrangeait sans doute de prendre un tournant tragique afin de propulser ma carrière et de promouvoir mon image d’écrivain désabusé. Je soupirais en roulant des yeux ; Rosemary passa à côté de la table et je lui demandai plus de serviettes en papier afin d’essuyer mes mains huileuses. « Enfin, ce n’est pas grave si tu ne te souviens pas. Comme je l’ai dit, on n’avait rien fait de particulier. C’était juste comme d’habitude. » Je me tournai vers Eugenia, les yeux écarquillés de stupeur. Ce n’était pas grave, alors. Je pouvais l’oublier à ma guise, cette pensée ne la dérangeait pas le moins du monde. « Je ne sais pas. » Murmurai-je. « Probablement … » Je me braquais, blessé dans mon orgueil. « Nous devrions bientôt rentrer ; mais ça aussi ce n’est pas grave. Je suppose. » Je courbai la bouche dans une expression à mi-chemin entre la grimace et le sourire.
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(✰) message posté Dim 1 Fév 2015 - 21:34 par Invité
i will never, ever regret the things i've done. because most days, all you have are places in your memory that you can go to;; sometimes leaving is the only way to be there for someone. ✻✻✻ Nous ne parvenions plus à nous gérer, à cohabiter. Nous ne parvenions plus à faire correspondre nos réactions aux attentes de l’autre ; cela était comme si nous avancions à contre-courant, obstinés, têtus, bornés. Les évènements semblaient bien se dérouler et nous retrouvions une insouciance d’enfants mais certains faits, certains gestes, me rappelaient que les choses n’étaient sans doute pas si faciles. Je voyais le pli entre ses sourcils s’approfondir lorsque je disais une parole bien malheureuse. Je pouvais noter chacune des moues décorant son visage qui accompagnant mes mots teintés de vérité douloureuse. Nous étions en équilibre au-dessus du sol mais, au lieu d’avoir peur, je continuai d’avancer sans me préoccuper de la chute. Il m’offrait un instant hors du temps, hors de nos vies, hors de nos quotidiens. Je profitai de ses paroles et de ses gestes, de ses regards remplis d’affection et de notre conversation tantôt légère, tantôt plus grave. Je ne pouvais pas me permettre de gâcher cet instant. Je ne pouvais pas me permettre de réduire à néant ses efforts. Nos efforts. Nous avions peut-être grandi ensemble mais nous avions vieilli séparer ; quelque part, j’avais la sensation que cela faisait la différence, que cela nous poussait à ne plus nous entendre. Notre passé nous emprisonnait parce qu’il incarnait cette insouciance qui nous manquait, désormais. Cette insouciance que nous avions perdu et que nous cherchions à retrouver, peu importe son prix, peu importe ce que cela signifiait. Nous avions tant vécu, chacun de notre côté, que cela nous empêchait d’être suffisamment lucide face à la réalité. Notre nouvelle vérité était constituée de désillusions ; les enfants que nous avions un jour été poussaient de longues plaintes au fond de nos cœurs mais nous étions bien trop orgueilleux pour prêter attention à leur désespoir. Nous préférions nous déchirer plutôt qu’admettre pouvoir les entendre. Pouvoir les écouter et leur donner raison de notre malheur. « Mais je mange normalement. Tu me fais de l’ombre voilà tout ; quel que soit le nombre de fois où je me resserre tu trouvais toujours le moyen de me battre. » me dit-il et mon cœur battit difficilement dans ma poitrine. J’avais la sensation qu’il perdait doucement le rythme ; il ne savait plus comment faire pour survivre, comment faire pour aller de l’avant, comment faire pour me permettre de m’en sortir. Cela semblait l’amuser mais cela ne faisait que réveiller mes craintes les plus profondes et mes complexes les plus cachés ; je ne supportais pas l’idée d’être vue comme une gourmande vorace qui ne connaissait absolument aucune limite. Quelque part, j’étais ainsi ; je le savais, je ne faisais rien pour m’empêcher de l’être. Pourtant, j’avais du mal à admettre que cette image dégradante puisse me suivre, même aux yeux de Julian. J’aurais aimé qu’il me voie autrement. Même s’il prétendait adorer me voir manger ; j’aurais aimé être une personne plus retenue et moins excessive, une personne qui ne l’aurait choqué ni dans un sens, ni dans l’autre, à propos de la nourriture. Mais je n’étais pas née ainsi. Je n’avais jamais fait d’efforts pour me poser des limites. J’en subissais les conséquences, d’une certaine manière, et je savais pertinemment que me murer dans des espoirs passés ne me permettraient pas d’aller de l’avant. D’avancer. De me calmer et me rassurer. Avec moins d’entrain, je continuai de manger ; le thé me brûlait la gorge et me permettait de veiller à ne pas mâcher trop vite ni à me précipiter sur mon assiette. Je fixai mes pancakes avec une certaine obsession en pensant encore aux paroles de Julian ; ses mots chatouillaient mon esprit et réveillaient mes complexes d’adolescente. Tu trouvais toujours le moyen de me battre. Mon estomac se serre et je cessai de manger durant un instant comme pour retrouver une certaine contenance et une certain confiance ; augmentant mon malaise, Julian me fit part de ses trous de mémoire vis-à-vis de notre dernière rencontre avant mon accident de voiture. Mon cœur se serra si fort dans ma poitrine que je finis par poser ma fourchette sur le rebord de mon assiette. Mes mains, elles, tremblaient sans que je ne parvienne à les rappeler à l’ordre. Sans que je ne parvienne à les contrôler, à prendre le dessus sur ce corps qui ne m’appartenait même plus. « Je ne sais pas. Probablement… » me répondit-il lorsque je lui assurais que son absence de souvenirs n’était pas grave. Se rendait-il compte à quel point prononcer ces paroles m’avait couté ? Savait-il à quel point cela me blessait ? Je déglutis avec difficulté avant de lui adresser un sourire que j’espérais convaincant ; je ne souhaitais pas le faire culpabiliser ou le mettre mal à l’aise. Je désirais simplement qu’il soit content, en ma compagnie. Qu’il se rende compte que je n’étais pas si difficile à vivre que cela. Mais, quoi que je puisse dire ou faire, cela ne semblait jamais être à la hauteur. « Nous devrions bientôt rentrer ; mais ça aussi ce n’est pas grave. Je suppose. » Je sentis un frisson parcourir ma colonne vertébrale et je me surpris à sonder son expression pour tenter, en vain, de deviner ce à quoi il pouvait réellement penser ; à travers son expression partagée, je devinais qu’il n’avait pas été satisfait par mes paroles. Je sentis un goût amer prendre possession de ma bouche et j’attrapai de nouveau ma fourchette. « Tu parles, ça, c’est grave. Je n’ai même pas eu le temps de finir mes pancakes. » lui répliquai-je avec entrain, un entrain feint qui me coutait encore plus qu’une poignée de mensonges. « Je rigole, c’est bon, je me dépêche, tu peux demander l’addition en attendant. Je sais que tu es fatigué, je ne voudrais pas te retenir plus que tu ne le souhaiterais. » J’haussai vaguement les épaules avant d’enfourner mon avant-dernière bouchée dans ma bouche ; je mâchai avec rapidité avant de déglutir, buvant une longue gorgée de thé avant de m’attaquer à mon dernier morceau. La nourriture n’avait absolument aucun goût sur ma langue désabusée par des paroles que je ne pensais même pas. « Tu penses pouvoir faire le chemin du retour ? » lui demandai-je doucement, observant son regard fatigué. J’aurais tant aimé pouvoir entendre ses pensées, en cet instant. Je savais que cela ne serait pas forcément agréable ; je savais, aussi, que certaines me blesseraient bien plus que nécessaire. Mais, quitte à choisir, je savais que cela aurait valu la peine. Cela m’aurait aidé à me fixer, d’une certaine manière. Me fixer si oui ou non mes sentiments avaient encore raison d’être.
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(✰) message posté Dim 15 Fév 2015 - 1:15 par Invité
“ A lost memory. How can this be love if you’re leaving me ? I can’t see you right now cause I just can’t fake it. I can’t be near you right now, cause I know you’re no longer mine. I can’t see you. We’re strangers in different places though we leave a mile apart. I still think of you I pray that you are safe. I'm still missing you . But it has to be this way 'cause I'm not right for you. I said goodbye because I love you. ” ✻ Eugenia se confondait avec les décors sobres du diner. Elle me souriait avec délicatesse avant de faire vibrer mes émotions au gré des sons de sa voix mélodieuse. Je me penchai au-dessus de la table d’un air concentré. J’avais si peur qu’elle ne se dérobe à mon œil. Son visage était identique à mes songes les plus secrets, et malgré la fatigue ou les quelques ombres de tristesses qui voilaient ses expressions, je pouvais facilement retrouver ma meilleur amie. Ce n’était pas elle ; je m’étais égaré dans les labyrinthes de la vengeance. Il y’ avait tellement de signes annonciateurs de notre imminente séparation mais je refusais de déchiffrer ses paroles pleines de sens. La quiétude de la pièce ne tenait qu’à un fil ; parce que nous ne faisions que nous bercer d’illusions. L’amour était trop las pour revenir. Je déglutis en tentant de retenir mes sentiments pour elle ; je ne l’avais pas oublié. Je n’avais pas réussi à oublier ma Ginny. Notre passé était comme une marque indélébile sur mon cœur. Je réalisais soudainement que derrières les lueurs rouges de l’aube se cachaient les démons de la nuit. Les promesses sublimes que je lui récitais n’étaient que les mensonges d’un homme qui l’avait trop aimé pour être rester raisonnable. Je devais partir en France avec Athénaïs pour soigner mon genou et fuir cette ville où le deuil était éternel. Je soupirai ; l’imagination trompeuse me conduisait à la perte même du réel. Ma respiration laborieuse se faisait ronflante comme si je portais toute la puissance des ténèbres dans ma poitrine. C’était injuste. Je payais le prix fort, pour chaque éclat de bonheur volé pendant ce roadtrip, une éternité de chagrin m’attendait. Je m’éloignai lentement de ma tasse fumante afin de mettre de l’ordre dans mes pensées. Je n’avais pas le droit de lui en vouloir, pourtant mon esprit restait amer lors de l’évocation de sa disparition après l’accident. Eugenia lâchait sa fourchette avant de la saisir à nouveau, se forçant à gober les mets succulents qu’elle avait commandés, mais elle ne pouvait pas me tromper. Je sentis un frisson me traverser l’échine. « Tu parles, ça, c’est grave. Je n’ai même pas eu le temps de finir mes pancakes. Je rigole, c’est bon, je me dépêche, tu peux demander l’addition en attendant. Je sais que tu es fatigué, je ne voudrais pas te retenir plus que tu ne le souhaiterais. » Railla-t-elle avec un mélange d’entrain et de désinvolture que je ne lui connaissais pas. J’arquai un sourcil sans rétorquer, peut-être que mes interventions ne feraient qu’envenimer la situation. Je me mordis la lèvre inférieure en posant mes mains tremblantes sur la table ; elle m’échappait à nouveau. La fulgurante révélation de ses abandons me blessait comme un poignard aiguisé. « Tu penses pouvoir faire le chemin du retour ? » Je fis la moue en me redressant légèrement dans mon siège. « Pardon ? » Balbutiai-je en sortant de ma torpeur. « Oui, je peux conduire. Ne t’inquiète pas. Je ne suis pas très fatigué. » Je scrutai les lieux à la recherche de notre serveuse. J’accrochai son regard pendant quelques secondes avant de lui faire un signe de la main. Je ne voulais pas encore partir – Je ne voulais pas finir sur une note disgracieuse après tous ces efforts. Eugenia me devait un au revoir ; et je lui devais certainement bien plus que ça. Les circonstances pénibles qui m’entouraient m’empêchaient de l’embrasser ou de l’étreindre comme je le désirais, mais l’idée que je puisse bientôt être délivré de ce poids me faisait plaisir. J’avais besoin de la quitter pour mieux revenir. Je papillonnai des yeux avant de lui sourire avec tant de sincérité que j’en aurais presque pleuré. Quoi de plus émouvant que la répétition de cette scène dont j’avais été privé pendant plusieurs mois ? Je demandai l’addition à Rosemary d’un air le plus aimable possible avant de me retourner vers ma fausse femme. « Tu sais ; tout ce que j’ai dis avant. Je le pensais. » Murmurai-je avec lenteur avant de sortir mon portefeuille.
Ma conscience se tenait suppliante derrière mon masque d’arrogance. Le sang chaud jaillissait de mon cœur vers mes muscles engourdis ; et je m’accrochais désespérément à nos instants d’insouciance. Je voulais me souvenir de notre dernière rencontre, du stress des exams, ou de mes paroles réconfortantes – mais ce serait tromper mon instinct de survie. Je ne savais plus défendre ma cause, ni justifier mes lamentations. Je posai un billet de £50 sur l’addition. « Ne te presse pas ; tu peux manger tranquillement. » Finis-je par déclarer en croisant les bras. « Tout comme tu peux t’arrêter de te forcer et te contenter de me parler. » Je me mordis la lèvre inférieure. « Il ne doit pas y avoir de secrets entre mari et femme. Tu penses que j'ai fais exprès d'oublier ? » J’esquissai un fin rictus – Etait-ce trop demander d’avoir un peu d’honnêteté ?
i will never, ever regret the things i've done. because most days, all you have are places in your memory that you can go to;; sometimes leaving is the only way to be there for someone. ✻✻✻ Je ne parvenais pas à réaliser que cet instant ne pourrait pas durer pour toujours. Je finirais par rentrer chez moi, tôt ou tard. Je finirais par s’asseoir dans le canapé du salon et observer la télévision avec un regard vide. Mes yeux finiraient par s’échapper par la fenêtre. Je finirais par regarder le ciel et penser. Regarder le ciel et désirer m’évader, m’évader de ma propre vie, de mon propre corps. Mon quotidien me guettait, d’une certaine manière. Julian m’offrait une trêve dans ma vie monotone mais j’avais peur que mon retour à la normale finisse par me brûler les ailes. Je savais que mon existence était triste. Que mes journées étaient toutes les mêmes. Je me levai après avoir passé soit une très bonne nuit, soit un très mauvaise ; je me tirai de mes couvertures à contre cœur, prenant la peine de sortir de ma chambre simplement pour rassurer ma sœur jumelle et lui donner l’espoir que, oui, j’allais bien. Je déjeunai assise dans le canapé. Je passais la journée assise dans le canapé. Je faisais tout dans ce fichu canapé. Je m’y ennuyais, j’y regardais la télévision, j’y dormais en pleine journée, j’y mangeais. Bartholomew m’accompagnait dans les journées les plus longues, s’asseyant simplement à côté de moi. Et, finalement, lorsque la journée se faisait envahir par la nuit, je retournais dans ma chambre pour me coucher. Les jours se ressemblaient tous. Les jours me paraissaient incroyablement longs. Et Julian m’avait sorti de ma torpeur. Je ne voulais pas retourner chez moi. Je ne voulais pas rentrer et n’avoir que du temps devant moi ; je ne voulais pas me rendre compte que mon existence n’avait absolument aucun impact sur le monde. Je ne voulais pas avoir pour seul rendez-vous ceux chez le médecin ; je ne voulais pas avoir pour seule activité le tennis fauteuil. Je voulais vivre. Vivre comme les autres, vivre des aventures comme celles-ci. Je voulais vivre et regretter des choses. Je voulais vivre et faire des erreurs. Je voulais que cet instant ne se termine jamais ; je voulais me prouver que ma vie avait encore un réel sens. Que ma vie pouvait être bien, elle aussi. « Pardon ? Oui, je peux conduire. Ne t’inquiète pas. Je ne suis pas très fatigué. » me répondit-il et j’hochai simplement la tête. La simple perspective que nous allions sans doute finir par rentrer à Londres me pesait au fond de mon être. Ma gorge était nouée sans que je ne puisse rien y faire ; mon esprit s’égarait, encore et encore, tandis que mon regard se perdait sur les traits apaisés de Julian. Il fit un signe à Rosemary pour qu’elle lui apporte l’addition ; aussitôt, je plongeai mon nez dans ma tasse pour ne pas avoir à trop réfléchir. Mais cela était sans doute bien trop tard. « Tu sais, tout ce que j’ai dit avant. Je le pensais. » finit-il par me dire et je relevai la tête pour l’observer. J’esquissai un vague sourire. « A quel moment, exactement ? » lui demandai-je pour avoir des précisions ; je sentis mes joues rosir doucement et je reportai mon attention sur mon assiette en espérant qu’il ne remarque rien. Toute notre conversation me revint en mémoire et je me retrouvai perdue entre des sentiments de satisfaction et d’enchantement, envahie par des poussées allègres de joie mal contenue. J’avais perdu ma raison quelque part dans l’océan. Sans elle, je ne parvenais plus à résister à Julian. Mon être tout entier semblait être en orbite autour de lui sans y voir le moindre inconvénient. « Ne te presse pas, tu peux manger tranquillement. Tout comme tu peux t’arrêter de te forcer et te contenter de me parler. » poursuivit-il en croisant les bras. Comme pour ponctuer ses paroles, j’enfournai la dernière bouchée de mon petit-déjeuner entre mes lèvres. « Il ne doit pas y avoir de secrets entre mari et femme. Tu penses que j'ai fait exprès d'oublier ? » Je l’observai en fronçant les sourcils, mâchant avec application. Je ne voulais pas répondre à cette question. Pas à celle-là ni même à aucune autre. Je ne voulais pas y repenser. Je ne voulais plus m’en rappeler. Mais je ne pouvais pas. « Je n’en sais rien. » lui répondis-je doucement. Je poussai mon assiette vide avant d’attraper ma tasse de thé à moitié pleine et la poser devant moi. Je poussai un petit soupir. « Je ne pense pas que tu aies fait exprès. Après, peut-être qu’au fond de toi tu ne désirais pas t’en souvenir. » J’haussai les épaules, détaillant son expression du regard. Mon cœur battait trop vite dans ma poitrine. Il battait trop vite parce que je me souvenais. Je me souvenais de tout, absolument tout. Les souvenirs avaient été les seules choses auxquelles j’avais bien pu me raccrocher. Les seules choses qui m’étaient restées dans cette vie monotone que je menais. « Tu veux savoir la vérité ? » lui demandai-je doucement avant de porter ma tasse à mes lèvres et en boire une gorgée. « C’est que je me souviens de ce dernier jour où l’on s’est vu. Je m’en souviens comme si c’était hier parce que je m’y suis raccrochée comme une perdue… Comme si c’était la seule chose qui me restait. » Je lui adressai l’ébauche d’un sourire. J’avais la sensation de me mettre à nue. La sensation de lui admettre des choses qu’il ne désirait pas forcément savoir. Je me sentais vulnérable et faible mais j’étais ainsi. Je lui donnais ce qu’il désirait savoir. Je lui donnais ce qu’il demandait. Je ne pouvais pas me battre contre ce que j’étais ou ce que je ressentais ; j’étais une personne coincée par ses sentiments, une personne qui l’avait dans la peau. J’étais une personne incapable de l’oublier et une personne incapable de lui refuser quoi que ce soit. Je lui offrais tout ce que j’avais. Mon âme comprise.
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(✰) message posté Dim 22 Fév 2015 - 16:33 par Invité
“ A lost memory. How can this be love if you’re leaving me ? I can’t see you right now cause I just can’t fake it. I can’t be near you right now, cause I know you’re no longer mine. I can’t see you. We’re strangers in different places though we leave a mile apart. I still think of you I pray that you are safe. I'm still missing you . But it has to be this way 'cause I'm not right for you. I said goodbye because I love you. ” ✻ « A quel moment, exactement ? » Sa voix vibrait mélodieusement au gré des agitations de mon cœur nostalgique. Comment lui offrir mes rêves fervents ? Comment lui montrer la grâce qui se cache derrière mes excès de zèle ? Je soupirai en m’accrochant aux vestiges d’une réalité illusoire de peur de retomber dans les vices de ma solitude– Je la regardais mais je ne voyais que les reflets de mon propre désespoir au fond de ses yeux fatigués. Eugenia était une poésie incomplète, un fragment magnifique qui s’évanouissait dans un univers morose et austère afin d’ornementer l’espace d’une rencontre la monotonie de mon existence. Ce sentiment était si fragile et si éphémère. Je saignais dans ses longs silences avant de chanceler comme une âme en peine vers les lueurs d’absolution qu’elle miroitait. C’était injuste, je réalisai avec effarement que je ne parvenais toujours pas à dépasser les flux opaques de mon amour pour elle. Malgré la distance douloureuse ou ma rancune mal placée je lui vouais toujours un culte muet. Je soupirai en sentant la peur s’immiscer dans ma poitrine ; cette fois je risquais de la perdre pour toujours. Mon départ en France n’était que le prélude de mon détachement imminent. Ginny, laisse-moi échapper aux flammes maléfiques des braisiers qui m’animent. Laisse-moi fuir ton emprise et les souvenirs de notre amitié révolue. Je crispai mes doigts autour de ma tasse de café encore pleine avant de m’accorder une nouvelle trêve. Je lui souris avec une insouciance mensongère. « Chaque moment. » Raillai-je avant de me pencher vers la table d’un air conspirateur. «Tu n’y crois pas n’est-ce pas ? » Je papillonnai des yeux en tendant la main vers son avant-bras. «J’avoue que je me plais à imaginer la vie qu’on aurait pu avoir ensemble. Mais je ne suis plus sûr de correspondre au profil du journaliste ambitieux et amoureux à présent. Je n’ai pas peur de l’engagement mais je ne l’envisage pas. .» Je crispai la mâchoire ; les échanges sincères étaient devenus si rares entre nous. Je ressentais un certain plaisir à soulever le voile sur mes réflexions. Peut-être avions-nous besoin de plus de vérités au fond. «Je suis sincère lorsque tu me manques ou quand je ris avec toi. Je ne suis pas le mirage du meilleur ami que tu connu auparavant. Parfois je redeviens le gosse de Cardiff en ta présence. » Je la fixai avant de m’éloigner avec douceur. Elle ne comprendrait certainement pas ma sollicitude, ni le combat de vanité qui faisait chahuter ma raison. J’étais perdu entres les nombreuses facettes de ma personnalité. Je ne savais plus qui j’étais. Je m’égarais dans une fausse identité malheureuse le temps de voir plus clair au bout du chemin.
Elle s’appliquait en mâchant son petit déjeuner. Je fixais les mouvements gracieux de ses mâchoires d’un air absent comme hypnotisé par les reliques de ses enchantements. Pourquoi les choses étaient-elles aussi compliquées dès que je tentais de me mettre à nu ? Elle avait promis de rester pour toujours. Elle avait promis et failli à ses paroles. Je ne pouvais pas ignorer la boule de chagrin qui s’était formé au fond de ma poitrine. « Je n’en sais rien. Je ne pense pas que tu aies fait exprès. Après, peut-être qu’au fond de toi tu ne désirais pas t’en souvenir. » Je retins ma respiration. Elle avait sans doute raison, je ne l’avais pas délibérément oublié, tout du moins pas au début. J’avais d’abord essayé de la retrouver en m’accrochant à l’espoir vain qu’il ne s’agissait que d’un écart de conduite de sa part. J’étais prêt à m’excuser pour mes propres tords et ceux de l’humanité si nécessaire. Je voulais qu’elle me revienne avec tellement d’ardeur et de passion que la seule excuse que je pouvais lui pardonner c’était la mort. Eugenia ne pouvait pas m’abandonner à moins d’être morte. Après plusieurs jours de déni et de frustration, je compris enfin qu’elle ne désirait plus être mon amie. C’est là que ma conscience s’est permise d’effacer la fadeur de nos rencontres de ma mémoire. « Tu m’as laissé ; tu désirais que je passe à autre chose. Au fond je n’ai fait que me plier à ta volonté. Tu ne peux pas m’en tenir rigueur. » Je tentai un sourire mais mes muscles crispés refusaient de céder aux supplications de ma volonté. J’étais triste de constater que malgré tous les bons moments qu’on pouvait encore partager, le passé, son abandon, revenait toujours au galop. « Tu veux savoir la vérité ? C’est que je me souviens de ce dernier jour où l’on s’est vu. Je m’en souviens comme si c’était hier parce que je m’y suis raccrochée comme une perdue… Comme si c’était la seule chose qui me restait. » Je secouai la tête d’un air grave. Elle se fourvoyait à nouveau sur mes intentions – Je m’étais accroché aux souvenirs moi aussi. Je continuais probablement à le faire, mais à la place de me laisser bercer par le bonheur simple d’une dernière rencontre je triais mes émotions sur le volet. Je me rappelais du jour où elle avait découvert les violences de mon père et des rumeurs de qu’elle avait endurées par ma faute. Je me souvenais de nos longues balades sur la plage et de ses danses étranges sous les lueurs orangers du soleil couchant. Son rire cristallin me hantait toujours, et son appétit vorace pour les délices sucrés me renvoyait irrémédiablement vers mon enfance à chaque fois que j’entrais dans une pâtisserie. « Tu ne m’as pas jamais accordé d’Adieu. Ce jour-là n’était qu’une mascarade. Je méritais une clôture, Ginny. » Je plissai le front en tentant de contrôler mon expression abattu. « Je ne t’ai pas oublié. J’ai zappé les détails douloureux pour survivre à ton absence. Ne crois pas que je n’étais pas égaré ou que je ne me sentais pas seul. » Rosemary revint avec la monnaie de mon billet, troublant la quiétude de mes pensées, mais je lui adressai à peine un hochement de la tête. J’étais obnubilé par le visage d’Eugenia et l’élan allègre de nos vraies retrouvailles. Elle était réapparu dans ma vie depuis des mois déjà mais c’était la première fois que je me sentais en compagnie de ma meilleure amie – celle que j’avais aimé en secret pendant des années.
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(✰) message posté Dim 1 Mar 2015 - 13:41 par Invité
i will never, ever regret the things i've done. because most days, all you have are places in your memory that you can go to;; sometimes leaving is the only way to be there for someone. ✻✻✻ Je savais qu’il préférait être malheureux plutôt qu’apprécier l’instant présent. Je savais qu’il préférait m’en vouloir plutôt qu’admettre être capable de me pardonner un jour, même dans un futur lointain. Je savais qu’il se perdait, encore et encore, et qu’il le ferait quand même, quoi que je dise, quoi que je fasse, peu importe ce qu’il se passerait. Cela me révoltait, oui. J’avais envie de poser mes mains sur ses épaules pour le secouer et le ramener sur Terre. Je voulais lui monter qu’il pouvait aller mieux et qu’il irait mieux, de toutes manières. Je voulais lui prouver qu’il n’était pas obligé de s’enfermer dans sa rancœur pour être couronné de succès. Il avait toujours eu une certaine tendance au masochisme, d’une certaine façon. Il avait toujours préféré aller mal plutôt qu’aller bien. Ma gorge se serra tandis que mon regard le détaillait avec application. C’était un combat perdu d’avance, j’en avais conscience. Le peu d’espoir qu’il avait pu me donner au cours du temps n’avait été qu’une illusion parmi d’autres. Ses sourires n’étaient que des couteaux déguisés, ses rires n’étaient que des pleurs masqués. Sa rancune et sa rancœur prenaient bien trop de place dans son cœur pour qu’il puisse accepter de m’apprécier, et je ne pouvais rien faire pour arranger les choses. J’étais piégée, d’une certaine manière. Piégée dans sa façon d’être et sa manière d’agir. Cela me blessait, cela me perdait. Je ne savais même plus ce que je faisais encore là ; je me connaissais suffisamment pour savoir que j’aurais eu tendance à rendre les armes plutôt qu’à m’acharner de la sorte. Je n’étais pas fidèle à mon propre caractère en sa présence. Je me bornais à rester en sa compagnie comme si j’espérais qu’il me blesse ; comme si j’espérais qu’un miracle se produise. Mais ce miracle n’arriverait jamais. « Chaque moment. Tu n’y crois pas n’est-ce pas ? » me demanda-t-il et j’esquissai un léger sourire. Il me connaissait suffisamment, encore, pour deviner aisément que j’étais encore particulièrement méfiante. « J’avoue que je me plais à imaginer la vie qu’on aurait pu avoir ensemble. Mais je ne suis plus sûr de correspondre au profil du journaliste ambitieux et amoureux à présent. Je n’ai pas peur de l’engagement mais je ne l’envisage pas. Je suis sincère lorsque tu me manques ou quand je ris avec toi. Je ne suis pas le mirage du meilleur ami que tu connu auparavant. Parfois je redeviens le gosse de Cardiff en ta présence. » Je l’observai en silence. Je savais qu’il ne mentait pas. Je me retrouvais face au Julian que j’avais toujours connu de temps à autre ; j’étais confrontée à son fantôme quand il acceptait de lâcher prise durant une poignée de secondes. Cependant, ce n’était que des illusions. Du moins, cela était ce que je ne cessais de me répéter comme pour me protéger, moi, de la peine qu’il pouvait m’infliger sans même s’en rendre compte. Parce qu’au final il me faisait du mal, mais je n’étais même pas sûre qu’il se rende réellement compte de l’ampleur de la peine que je pouvais ressentir. Je bus une gorgée de ma tasse de thé comme pour m’inciter au silence. J’espérais que mes sourires puissent parler à mal place et lui intimer que je le croyais sur parole ; j’avais trop peur de ses colères que je ne désirais pas me risquer à prononcer les mauvaises paroles. Je sentais la rancœur dans son regard lorsque je lui répondis par rapport aux souvenirs qu’il avait oubliés. Je ne savais pas si cela était parce que j’avais donné la mauvaise réponse ou parce que je m’étais aventurée en terrain dangereux. « Tu m’as laissé. Tu désirais que je passe à autre chose. Au fond je n’ai fait que me plier à ta volonté. Tu ne peux pas m’en tenir rigueur. » me dit-il. J’esquissai un léger sourire, malgré mon cœur qui se serrait dans ma poitrine. « Je n’ai jamais dit que je t’en tenais rigueur. » Non, Julian, je ne t’en veux pas. Cela me blesse juste plus que nécessaire. Je savais que je n’avais pas le droit de prononcer ces paroles à voix haute. Je savais que, quelque part, je n’avais pas le droit d’avoir mal, je n’avais pas le droit de souffrir de ce fossé qui s’était formé entre nous. J’en étais la cause, après tout. J’étais la seule à blâmer dans son esprit, même si je n’étais pas forcément d’accord avec cela. « Tu ne m’as pas jamais accordé d’adieu. Ce jour-là n’était qu’une mascarade. Je méritais une clôture, Ginny. » finit-il par me dire. C’était tout ce qu’il trouvait à répondre à mes confessions. J’avais raison, d’une certaine manière. Dans son esprit, je n’avais pas le droit de souffrir, il n’avait pas le droit de me manquer, je n’avais pas le droit de tenir à notre amitié. Il n’y avait que lui qui était permis de ressentir toutes ces choses. Lui, lui, lui. « Je ne t’ai pas oublié. J’ai zappé les détails douloureux pour survivre à ton absence. Ne crois pas que je n’étais pas égaré ou que je ne me sentais pas seul. » Je me mordis l’intérieur de la joue, tandis que Rosemary venait rendre sa monnaie. Je ne lui adressais un bref sourire avant de reporter mon attention sur lui. « Je n’ai jamais dit de choses pareilles. » répétai-je. Il interprétait mes mots et mes paroles comme bon lui semblait. Et cela me fatiguait, d’une certaine manière. Mais j’étais satisfaite, également. Satisfaite parce que, pour une fois, nous semblions avoir une discussion à cœur ouvert. « N’interprète pas mes mots de cette manière, s’il te plait. » J’étais mal à l’aise, comme j’avais bien pu l’être plus jeune. Je ne me sentais pas à ma place. Je ne m’étais jamais sentie à ma place. Après tout, j’étais quelqu’un d’étrange, quelqu’un de décalé. Quelqu’un d’ailleurs. « Je sais que ce n’était pas volontaire et que tu as dû en souffrir. Je le sais très bien. Mais… J’ai l’impression que tu oublies que ça n’a pas été facile pour moi non plus. » Je traçai les contours de ma tasse du bout de l’index, incapable de relever le regard vers lui. Incapable d’assumer mes mots. Fidèle à moi-même, quelque part. Fidèle à cette gamine que j’avais toujours été. « Tu n’as pas eu d’adieu. Je n’en ai pas eu non plus. Pourtant, j’en méritais un aussi. Je veux dire… Notre relation s’est arrêtée au lieu d’une phrase, d’un chapitre, sans qu’aucun de nous deux ne trouve de réconfort dans cette fin bâclée. Tu peux m’en vouloir… Ou tu peux comprendre que je ressens les mêmes choses, moi aussi. » Mon cœur battait vite, mon cœur battait fort. J’étais malheureuse. Malheureuse de savoir qu’il refusait de me croire.