"Fermeture" de London Calling
Après cinq années sur la toile, London Calling ferme ses portes. Toutes les infos par ici There is always something left to lose (Julenia)  2979874845 There is always something left to lose (Julenia)  1973890357
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There is always something left to lose (Julenia)

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() message posté Jeu 3 Déc 2015 - 19:45 par Invité

“It is hard enough to remember my opinions, without also remembering my reasons for them! ”   Je me penchai vers la vitre du balcon d'un air maussade. Mes yeux glissaient sur les façades grisonnantes de l’hôpital mais je ne parvenais pas à discerner les formes qui ondulaient au bout des allées fleuries. Dehors, tout le monde était malade mais à l'intérieur j'avais peur. Mon esprit s'épandait sur les battants de ma poitrine comme une nuée de fumée sombre. Je n'avais plus aucune pensée. Mes sentiments étaient complètement biaisés. Comment était-il possible d'aimer une personne jusqu'à la déraison ? Comment prononcer les mots justes lorsqu'on s'apprête à retirer la vie ? Je calai le filtre de ma cigarette entre mes lèvres frémissantes. Je pouvais entendre les pas pressés des infirmières dans le couloir et les sirènes des ambulances au loin. Ils claquaient dans mon dos comme les messagers d'un malheur imminent. Je crispai ma prise sur mon briquet en m'adossant contre le rebord. On devrait vraiment laisser tomber, Ginny. J'allumai la flamme d'un geste fébrile avant de me consumer entre les senteurs âpres du tabac. Elle était enceinte. Eugenia était réellement enceinte. Et je ressentais cette nouvelle comme une tragédie. Je ne voulais pas oublier les paroles du médecin. Je ne supportais pas toutes ses éventualités et ses possibilités de guérison. Je ne comprenais pas. Elle était trop fragile. Son corps souffrait des séquelles d'un accident qui l'avait rendu inapte. Voilà, ce qu'on me répétait lorsque je m'installais devant le bureau du Dr Collins. J'avais parfois l'impression que les louanges de la mort criaient encore le prénom de Ginny, comme une âme-sœur perdue qu'il fallait absolument ramener de l'autre côté. Elle pouvait partir à n'importe quel instant. Pendant son sommeil. Entre mes bras. En accouchant d'un enfant que je ne désirais pas. Je fronçai les sourcils en inhalant une énième bouffée de poison. La nicotine avait un effet étrange sur ma conscience. Elle apaisait mes douleurs avant d'éveiller mes impulsions les plus violentes. Il y avait une certaine folie dans ma passion. Je n'étais pas préparé à la perdre. Je n'étais pas préparé à embrasser une réalité différente maintenant que nous étions mariés. Eugenia constituait l'équilibre entre mes démons et ma sainteté. Sa disparition était un signe de chaos. Je baissai la tête vers le carrelage luisant avant de soupirer. « Cela ne vous engage à rien. L'avortement est une option sûre dans certains cas. Une grossesse est toujours risquée dans la situation de Madame Fitzgerald.  » C'était le prix à payer pour l'amour. Je voulais ce sacrifice. Je me languissais de ses étreintes glacées dans la nuit, lorsque nous pleurerons à deux, le destin de ces parents qui ne connaissaient jamais les rires de leurs enfants. Je restai immobile sous les reflets de la brume. Je me perdais dans mes convictions acharnées. Je trouvais une certaine logique dans les choix du deuil, puis j'esquissai un mouvement vers la porte. La pièce était plongée dans le silence, comme si les échos meurtris de mon cœur avaient fini par emporter toutes les sources de lumière.  Je me sentais honteux et égoïste lorsque les semelles de mes chaussures mouillées s'écrasaient sur le sol. Je me sentais horriblement seul lorsqu'il fallait prendre une décision. «  Les résultats des analyses sanguines montrent déjà quelques anomalies. Les taux augmentés de HCG et les signes d'anémie peuvent être occasionnés par une grossesse double mais il est trop tôt pour se prononcer. Les dangers peuvent être statistiquement décuplés. Je parle de risques de viabilité. » Je me raidis en analysant chacune de ses révélations. Ces mots étaient effrayants. Ils me tranchaient la gorge comme une lame acérée. Je déglutis en me tâtant vers l’accueil.  L'hôtesse me fixa étrangement mais je ne rétorquai pas. Je lisais les posters accrochés sur le mur d'un air absent comme si la réponse se trouver entre ces inscriptions. Mais je n'avais nul part ou aller. «  Les délais de l'IVG médicamenteuses peuvent être prolongées jusqu'à la 7ème semaine. Nous sommes justes si nous voulons garder la patiente dans les essais cliniques auxquelles elle participe. Les dernières recherches de régénération de cellules nerveuses sont très concluantes. Je vous encourage à continuer dans cette voie. » De quoi me parlait-il ? Je n'avais pas besoin des jambes d'Eugenia pour l'aimer. Je n'avais pas besoin de miracles et de fausses promesses. Je voulais simplement la protéger des versants dramatiques de l'univers. Je secouai les épaules. «  Il existe aussi l'IVG instrumentale si vous désirez prendre le temps de réfléchir. Mon collègue du département de gynécologie pourra vous présenter toute la documentation nécessaire. » Je frissonnai en m'éloignant. Pourquoi sa voix continuait-elle à hanter mon esprit ? Il y avait des risques. Il y avait trop de risques. La condition particulière de la patiente. Anémie. Déficience. Dosages augmentés. Statistiques. Je suffoquais entre les parois livides du hall avant de rejoindre la salle des visites. Mes prunelles étaient ternes lorsque je les posais sur le profil d'Eugenia. Elle m'avait attendu, à ma demande, le temps d'une cigarette. Le temps que je prenne une décision injuste. Je me postai à ses côtés en silence, mes bras tendus sur les cuisses. Mon expression avait perdu l'éclat taquin qui caractérisait nos rencontres complices. Je passai la main dans ma frange avec anxiété avant de me tourner vers elle. « Je ne veux pas que tu prennes des médicaments. Les saignements peuvent durer dix jours, mieux vaut en finir en une fois. » Je m'interrompis pendant quelques secondes et observai une petite fille s'accrocher aux jambes de son père en couinant jovialement. Ses joues empourprées captivaient mon attention alors que je m'apprêtais à rompre ce lien magique qui unissait deux parents. «Je resterais dans la salle. On m'a dit que je pouvais. Tout ira bien. » Soufflai-je en me redressant. J'essayais de prendre la hauteur, d'honorer mes responsabilités et mes promesses envers Eugenia. Jusqu'à ce que la mort nous sépare.
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() message posté Jeu 3 Déc 2015 - 21:15 par Invité

Julian & eugenia — when they told her her story was written in the stars, she went to the heavens and crushed each one with her bare hands, stars have no power over her, the night sky is hers now, and she will carve it with constellations of her own. ✻ ✻ ✻  Ma main aurait pu se poser sur mon ventre, en cet instant. Ma main aurait pu effleurer ma peau encore bien loin d’être tendue. Cela aurait pu être le cas, oui. Mais je n’avais pas encore ces réflexes maternels qui me paraissaient bien loin de ma réalité. Mes doigts préféraient jouer avec mon alliance, la tournant, inlassablement, autour de mon annuaire, à mesure que mes pensées se bousculaient entre elles dans un désordre grandiose, dans une symphonie discordante.
J’étais devenue plusieurs choses, au cours de ce dernier mois. Orpheline de mère. Femme. Et, maintenant, porteuse de vie. Tous ces mots étaient étranges, dans mon monde, comme s’ils ne correspondaient pas réellement à mon quotidien. Comme s’ils ne me correspondaient pas très bien, à moi.
Maman, j’aurais tellement aimé pouvoir te demander conseil. Je fermais les paupières en sentant un frisson parcourir mes bras. Elle aurait sans doute trouvé les mots justes. Je n’en doutais pas une seule seconde. Mais, à vrai dire, en cet instant, j’éprouvais simplement le besoin d’entendre le ton rassurant de sa voix. Je n’avais pas besoin de ses vérités, je n’avais pas besoin de son avis, j’avais juste besoin d’elle, d’elle et sa sollicitude, d’elle et sa bienveillance. Elle et toutes ses paroles que je prenais pour vraies simplement parce qu’elle avait été celle à les prononcer. Maman, j’aurais tellement aimé que tu sois encore là. Mais elle ne l’était plus. Le monde tout entier portait encore le deuil de sa disparition. Au fond, c’était l’ordre des choses. Les enfants étaient censés survivre à leurs parents. Les enfants étaient censés voir leurs parents s’en aller. Oui. C’était l’ordre des choses.
Mais c’était arrivé beaucoup trop vite.
Beaucoup trop tôt.
Ma mère était morte avant de pouvoir me confier les mille-et-uns secrets du monde. Ma mère était morte avant de pouvoir rencontrer son premier petit-fils, Charles, le fils de Scarlet. Ma mère était morte avant de pouvoir assister à mon mariage, avant de finalement avoir l’autorisation d’arrêter de s’en faire pour moi parce que j’étais finalement heureuse. Ma mère était morte avant de pouvoir voir sa petite dernière grandir. Ma mère était morte alors qu’elle avait eu encore beaucoup trop de choses devant elle.
Ma mère s’en était allée trop vite.
Beaucoup trop tôt.
Mes paupières étaient humides, alors que je relevai les yeux vers Julian qui revenait vers moi. C’était la première fois qu’il assistait à mes examens médicaux et, quelque part, j’étais heureuse de ne pas avoir été celle à lui annoncer ma grossesse. Cela m’avait épargné bien des peines, bien des angoisses. Il avait été à mes côtés et je lui étais reconnaissante d’avoir finalement réussi à franchir le pas, d’avoir finalement réussi à être à mes côtés même dans les instants moins faciles de mon existence. Cependant, je n’avais pas aimé l’expression qui s’était peinte sur ses traits à mesure que l’on m’avait parlé, à mesure que l’on m’avait prévenue des risques. Il avait eu la mine sombre, les traits tirés, et j’aurais aimé lui faire comprendre que si les médecins étaient des spécialistes cela ne faisait pas d’eux des personnes honnêtes. Qu’au cours de mon existence, ils avaient passé bien plus de temps à s’acharner sur mon cas au lieu de me laisser véritablement prendre mes propres décisions.
Finalement, il s’assit à mes côtés et il prit quelques instants avant de se pencher vers moi. Je tournai la tête vers lui, la gorge serrée, les lèvres incapables de s’étirer en un sourire. « Je ne veux pas que tu prennes des médicaments. Les saignements peuvent durer dix jours, mieux vaut en finir en une fois, » me dit-il finalement. Ses paroles s’écrasèrent sur ma poitrine et je fus incapable de respirer. Incapable de bouger. Incapable de réagir. Mes pensées suffoquaient alors que mon corps tout entier demeurait paralysé.  « Je resterais dans la salle. On m'a dit que je pouvais. Tout ira bien. » Je l’observai, figée. Mes doigts ne bougeaient plus au niveau de mon alliance ; l’intégralité de mon corps semblait coincé dans un autre espace-temps, loin, si loin.
Je ne savais pas ce que j’avais imaginé, à vrai dire. Sans doute pas ça. Sans doute pas une décision prise sans attendre mon avis, sans l’ombre d’un débat ou d’une longue discussion. Je sentis les larmes monter à mes yeux et je clignai plusieurs fois les paupières pour tenter de ne pas les laisser m’échapper. Pour tenter de ne pas lui montrer à quel point cela me touchait. A quel point cela me blessait. Maman, j’aurais tellement aimé entendre ta voix. Maman, j’aurais tellement aimé t’entendre me dire que tout irait bien. « Quand… Quand on a arrêté de se protéger, je pensais que c’était parce que… Parce que tu n’étais pas contre l’idée d’avoir des enfants, »  finis-je par articuler dans un murmure. « Je comprends pas, Jules. »  Je levai les yeux vers lui, le regard plein d’espoir, le regard embué par toutes ces larmes que je ne voulais pas laisser m’échapper. Je levai les yeux vers lui, le regard plein d’espoir, parce que je voulais réellement qu’il m’apporte une explication logique et rationnelle à son comportement. Maman, j’aurais tellement aimé pouvoir te parler en cet instant. J’aurais aimé pouvoir te dire que je ne sais plus quoi faire. J’aurais aimé te dire que je suis perdue. J’aurais aimé me confier, me confier et t’admettre que j’ai l’impression que Julian m’échappe de plus en plus.
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() message posté Ven 4 Déc 2015 - 11:57 par Invité

“It is hard enough to remember my opinions, without also remembering my reasons for them! ”   La fraîcheur de l'hiver s'infiltrait sous ma peau comme une petite gorgée de poison. Je ne pouvais plus capituler. Cette pièce où s'agitaient les silhouettes malades et chétives du monde me semblait particulièrement hostile. Nous avions le droit de tomber. Et si la noirceur de mes pensées me poussait à abandonner avec impuissance les idéaux d'Eugenia, mon cœur lui, se complaisait dans une forme étrange de certitude : la garder auprès de moi pour toujours. Je soupirai en croisant nerveusement les bras. Mes yeux écarquillés observaient la scène déchirante de notre rupture. Ma prise de position était lâche et égoïste mais j'essayais d'aborder mes sentiments de la meilleure manière qui soit. J'attendis un instant, la tête baissée vers les rainures du sol. La bouche auréolée par toutes les vérités que je refusais d'énoncer. A trop se donner, on fini par s’abandonner. Ma voix se brisait au fond de ma gorge, piégée dans une lutte acharnée contre ma raison. Je ne voulais pas prononcer ces mots. Je ne voulais pas chanter les mélodies macabres de ces décisions cruelles et injustes. Les senteurs du tabac se mélangeaient à l'amertume de ma bouche avant de se verser sur ma poitrine comme les volutes déferlantes de la nuit. Pouvait-elle me sentir tomber sur ses cuisses immobiles et prier pour qu'elle réponde à ma requête ? Je me tournai lentement vers la baie vitrée. J'étais figé dans l'évidente douleur de mes décisions. Cet enfant, quelque soit la couleur de ses yeux, l'allure espiègle de son visage ou l'éclat harmonieux de son rire n'existait pas. Je plissai le front alors que les lumières ternes du jardin recouvraient mon visage. J'anticipais déjà les réactions d'Eugenia. Je connaissais son engouement pour le risque, le sacrifice, les autres. Je connaissais tous les versants de sa personnalité altruiste et atypique. Et cela peinait encore une fois, de réaliser à quel point nous étions différents. « Quand… Quand on a arrêté de se protéger, je pensais que c’était parce que… Parce que tu n’étais pas contre l’idée d’avoir des enfants, »   Je me redressai silencieusement. J'écoutais son souffle trembler entre ses lèvres mais je ne m'opposais pas à ses réflexions. Elle était libre d'exprimer ses doutes. Et j'étais libre de ne pas y répondre tout de suite. «  Je comprends pas, Jules.»  Elle leva son regard larmoyant vers moi. Ses espoirs n'étaient que des fantaisies. Sa naïveté ne faisait que la retenir loin de ma réalité. Je frottai mon menton avec anxiété avant de serrer mes cigarettes contre ma main. Je ne parvenais pas à me rappeler comment nous étions arrivés à l’hôpital. Quelles étaient les routines ennuyeuses qui s'étaient installées dans notre couple, le matin, autour de la table du petit déjeuner et dans le trajet depuis Hammersmith. J'avais marché comme un funambule guettant la chute. J'étais ici et on m'avait annoncé que je pouvais perdre ma femme à cause d'une grossesse que je ne désirais pas. Je soupirai tristement. « Parce que … Je te choisis toi ... » Mon cœur se brisait entre deux pulsations fébriles avant de s'éteindre au creux de ma conscience. « Tu as promis de rester pour toujours. Tu as promis. » Marmonnai-je en fermant les yeux. Je m'accrochais à l'absolu. Je voulais la tenir contre ma poitrine et souffler dans ses cheveux jusqu'à ce que la douleur soit plus supportable. Jusqu'à ce qu'elle me rejoindre dans ma folie passagère. Mes doigts se posèrent délicatement sur son épaule. « Je ne peux pas Ginny… Je ne peux pas te perdre et vivre dans l'ombre de ton souvenir … » Je laissai ma phrase en suspens et vins me blottir contre son bras sans saisir son étreinte. Je n'avais plus aucune force. Je mourrais pendant une fraction de secondes avant de rejaillir de mes cendres, encore plus sombre et ténébreux qu'avant. Le regard glacé de George Fitzgerald se dessinait derrière mes paupières tremblantes. Il me fixait avec cette lueur un peu étrange, à la fois douce et violente, celle qui précédait ses accès de colère. Je ne pouvais pas m'empêcher de faire l'amalgame. Je me revoyais dans ses traits creusés par la tristesse. Je me reconnaissais dans l'ivresse de ses gestes et la brutalité de sa déchéance. Si je perdais Eugenia, et qu'elle me laissait seul avec son enfant, j'étais condamné à suivre les pas de mon père. Je me raidis au contact de son cou. « S'il te plaît, choisis-moi … » Murmurai-je en glissant mon pouce sur sa joue. Je déposai un baiser furtif sur sa tempe avant de m'éloigner. Les arabesques de mes cheveux troublaient l'harmonie de mes pensées. Les lettres s’entremêlaient autour de ma vision avant de s'écraser contre les murs blancs de la salle d'attente. Je clignai de l’œil avant de hocher la tête. « Laisse nous passer à autre chose… » Mon ton était implorant. Je mendiais sa compassion. Je lui demandais d'oublier et d'avancer simplement à mes côtés.
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() message posté Ven 4 Déc 2015 - 23:39 par Invité

Julian & eugenia — when they told her her story was written in the stars, she went to the heavens and crushed each one with her bare hands, stars have no power over her, the night sky is hers now, and she will carve it with constellations of her own. ✻ ✻ ✻  Maman, j’ai envie de pleurer, mais que se passe-t-il si j’ai déjà usé toutes mes larmes pour toi ? Je ne savais pas si je me voyais mère. A vrai dire, je ne m’étais pas réellement posée la question, pas même lorsque Julian et moi avions cessé de nous protéger, pas même lorsque Scarlet était elle-même tombée enceinte. Plus jeune, je n’avais pas pensé que cela puisse être possible de toutes manières. J’avais été trop étrange pour le monde. J’avais été trop différente pour être aimée. Je n’avais pas songé pouvoir fonder ma propre famille simplement parce que je ne m’étais jamais faite à l’idée qu’un homme puisse vouloir partager ma vie, mon avenir, mon futur. Suite à mon accident, je m’étais renseignée à propos de ma fertilité, à propos de ma capacité à mener à bien une grossesse, mais au fond de moi je n’étais même pas sûre d’avoir envisagé cette possibilité comme étant éventuelle.
Je l’avais sans doute fait. Malgré moi. Sans réellement le vouloir.
Maman, j’ai envie de pleurer, mais je ne sais même pas si j’ai le droit ou non d’être triste. Je suis vivante, après tout. Je suis vivante alors que toi tu ne l’es pas. J’observai Julian sans comprendre comment il avait pu en venir à ces conclusions. Au fond, je me demandais. Je me demandais s’il avait peur d’être trop jeune, s’il avait peur qu’il ne soit pas à la hauteur, s’il craignait que je ne sois pas capable de m’occuper d’un enfant sachant que j’étais incapable de m’occuper de moi. J’attendis une réaction de sa part. J’attendis ses explications, ses mots, ses vérités pouvant m’aider à comprendre la situation.
Maman, j’ai envie de pleurer, mais comment suis-je capable d’être forte et prendre mes propres décisions si je suis incapable d’avancer sans toi ? Je continuai de l’observer. De le regarder droit dans les yeux. Au fond, je ne comprenais sans doute pas la situation. Mon esprit était trop détaché de la réalité pour admettre la réalité qui se profilait sous mes yeux. Mon esprit était trop détaché de la réalité pour comprendre que je portais l’embryon d’une autre vie au creux de mes entrailles, pour comprendre que c’était un morceau de Julian et un morceau de moi qui s’étaient assemblé pour créer un futur petit être. « Parce que… Je te choisis toi... Tu as promis de rester pour toujours. Tu as promis,» me dit-il. Sa main se posa sur mon épaule et je fronçai les sourcils sans réellement comprendre où est-ce qu’il voulait en venir. Je ne dis rien, attendant simplement qu’il poursuive ses propos et, finalement, il posa sa tête au creux de mon cou pour reprendre. « Je ne peux pas Ginny… Je ne peux pas te perdre et vivre dans l'ombre de ton souvenir… » Il sentait le tabac et l’air froid de décembre. Il parlait comme s’il faisait déjà le deuil de ma disparition.
Puis, finalement, les mots de mon médecin me revinrent. Ses avertissements me heurtèrent. Il n’avait jamais spécifié mon possible décès en cas de complications lors de la grossesse mais il avait tourné ses phrases de sorte à ce que Julian puisse interpréter le pire. De sorte à ce que je change d’avis. « S'il te plaît, choisis-moi… Laisse nous passer à autre chose… » Il se détacha de moi alors que je continuais à me remémorer ce qu’il s’était passé. Une grossesse est toujours risquée dans la situation de Madame Fitzgerald. Je serrai les dents. J’avais passé tant de temps dans son bureau à l’écouter arranger la vérité que je ne m’étais même pas donné la peine de retenir ses paroles. Il avait passé tant de temps à briser mes rêves, un à un, pour tenter d’accomplir l’impossible que je ne les avais même pas réellement écouté. Maman, j’ai envie de pleurer, mais maintenant que tu n’es plus là, est-ce que j’ai encore le droit de me comporter en enfant ? « Julian, je ne risque pas de mourir, »  finis-je par dire. « Je… Docteur Collins… Disons qu’il me voit avant tout comme étant son sujet d’études. En voyant que… Que j’étais enceinte, il a songé aux mois de recherches qu’il allait perdre. »  J’expirais doucement. Il n’avait pas l’habitude. Il n’avait pas l’habitude d’être assis dans ce fauteuil à entendre mille-et-une promesses de la part de cet homme probablement plein de bonnes intentions. Il n’avait pas l’habitude de se faire opérer une fois, deux fois, trois fois, quatre fois, en espérant que cela serait enfin concluant. Il n’avait pas l’habitude de faire partie de tout un tas de projet, il n’avait pas l’habitude d’être un rat de laboratoire. Et je ne lui en voulais pas. Au contraire. Je m’en voulais à moi de ne pas m’en être rendue compte un peu plus tôt. Maman, j’ai envie de pleurer, mais si je n’ai plus de mère, est-ce que cela veut dire qu’il faut que je me comporte en grande personne ? « Il ne veut pas que je sois enceinte, Jules. Il est capable de dire n’importe quoi pour nous influencer dans notre décision. Il… »  repris-je. « Il savait quels mots allaient t’inquiéter. Je… Je m’étais déjà renseignée sur la question et une grossesse dans ma condition n’est pas si déconseillée, disons que ce n’est pas facile mais je ne risque pas d’y laisser ma vie… Pas plus que les autres, du moins. »  Ma main vint serrer la sienne et je lui adressai l’ébauche d’un sourire. Maman, j’ai envie de pleurer, mais est-ce que c’est grave si je ne sais même plus pourquoi je suis triste ?
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() message posté Sam 2 Jan 2016 - 18:22 par Invité

“It is hard enough to remember my opinions, without also remembering my reasons for them! ”   Les affirmations du médecin résonnaient en boucle dans ma tête. Je les voyais qui longeaient les couloirs de l’hôpital afin d'y laisser la marque de toutes mes désillusions. Eugenia était trop fragile pour être enceinte. Elle avait subi trop d'interventions et je redoutais, qu'elle souffre afin d'accomplir un miracle dont je n'avais plus besoin. Je serrai les dents en laissant ma main glisser sur son bras. Sa posture était rigide. Elle me fixait avec un air perplexe comme si ma demande lui semblait complètement déplacée. Pourtant, tout me paraissait si simple. Il fallait qu'elle avorte. C'était presque une nécessite médicale. Je soupirai en relevant la tête vers le plafond. Je me sentais oppressé par ses silences, par son attente vaine et désuète. Je n'avais aucun argument à lui présenter. Il s'agissait de logique, d'une loi mathématique. Si notre enfant constituait un danger pour sa santé, il fallait tout simplement faire le deuil de son existence. Mes pensées trottaient autour de ma tête comme une nuée de fumée. Plus je tentais de réfléchir, et plus ma vision s’obscurcissait. Je n'en voyais jamais le bout. Mon attachement pour Eugenia justifiait tous les sacrifices. Il me donnait raison lorsque j'agissais de manière aussi peu conventionnelle. Je fermai les poings en me redressant avec nonchalance. La salle d'attente était presque vide maintenant que nous étions assis l'un face à l'autre. Je fixais son ventre du coin de l’œil : ici, une petite âme fragile se tortillait en entendant le son de ma voix. Ici, mon fils, ma fille, ou peu importait réellement. Je ne voulais pas savoir. La mort d'un embryon pouvait-elle sublimer l'amour immodéré que je portais pour ma femme ? Je retenais encore mes sentiments. Je me murais dans l'apathie afin de prendre position. Mes bras tremblaient sous ma prise. Besoin de nicotine ou de liberté ? Peut-être un peu des deux. Je me mordis la lèvre inférieure en secouant les épaules. «  Julian, je ne risque pas de mourir. Je… Docteur Collins… Disons qu’il me voit avant tout comme étant son sujet d’études. En voyant que… Que j’étais enceinte, il a songé aux mois de recherches qu’il allait perdre. »   Et moi ? A quoi fallait-il que je songe ? Aux années de bonheur que nous n'avions même jamais eu le temps de partager ensemble ? A la magie de nos amours romantiques et pourtant si inutiles ? Ses paroles s'enfonçaient dans ma gorge comme une lame tranchante. Si nous étions tous médecins, les choses seraient moins compliquées. C'était le spécialiste que je croyais. Je frémis en déboutonnant le col de ma chemise. Ma frange retombait tristement sur mon front. Et je ne pouvais pas esquisser le moindre mouvement afin de dégager mon visage. Je n'avais pas cette force. «l ne veut pas que je sois enceinte, Jules. Il est capable de dire n’importe quoi pour nous influencer dans notre décision. Il… Il savait quels mots allaient t’inquiéter. Je… Je m’étais déjà renseignée sur la question et une grossesse dans ma condition n’est pas si déconseillée, disons que ce n’est pas facile mais je ne risque pas d’y laisser ma vie… Pas plus que les autres, du moins.  .»  Je quittais mes réflexions, mais une fragrance d'incertitude auréolait encore le contour de ma mâchoire grimaçante. Je penchai la tête en serrant sa main. Un sourire un peu triste se dessinait sur ma bouche à la vue de son expression où les reflets de la lampe illuminaient parfois l'ombre d'un doute. J'avais tellement à lui dire. Je la considérais comme une personne entière et courageuse. Ce n'était pas ses qualités que je déplorais. Ce n'était pas son manque de répartie ou son obstination. Le chaînon manquant, c'était moi. Je pouvais à peine garder la tête haute. Je me sentais profondément seul et détaché. « Je t'écoute Ginny mais tout ce que je parviens à comprendre c'est « il ». D'accord, le Docteur Collins est un idiot. Moi, je te parle de nous. » Je me détachai de sa prise d'un geste fébrile. Je frottai mes mains contre ma barbe naissance en soupirant. J'avais du mal à refréner mes pulsions. Un frisson de dégoût traversa ma poitrine, puis il se transforma en colère. « Tu ne peux pas faire en sorte qu'il s'agit de ce qu'il a dit … Je ne veux pas avoir d'enfant si ça signifie qu'il va falloir te surveiller pendant neuf mois... Si tu aimes les sensations fortes on ira faire du parachute, mais je ne peux pas me lever chaque matin avec la peur au ventre ... » J'avais mal en prononçant ces paroles. Voile-toi dans la nuit, elle apaise ton désir. Et guérit la douleur, comme les flots glacés du Léthé. C'était un extrait d'un poème. Le baiser en rêve. Mais le baiser en rêve pouvait-il suffire à combler la distance qui s'instaurait peu à peu entre nous ? Je crispai le menton en fulminant. Mon dos s'enfonçait maladroitement contre le dossier de ma chaise. Eugenia me suivait avec ses yeux débordants de soleil. Sa lumière m'empêchait de me voiler dans la nuit. Elle me gardait toujours en suspens dans une réalité parallèle. Je soupirai. « Je veux avoir une famille avec toi. Tu le sais. Mais je ne suis pas prêt à risquer notre équilibre, maintenant. » Murmurai-je d'une voix presque inaudible. Je voulais me réveiller et oublier ce cauchemar. Je voulais me retrouver dans notre appartement, sur le canapé, entouré de miettes de crackers et de chips devant le pilot d'une série policière dont je ne connaissais même pas l'intrigue. Je voulais tout simplement être avec elle, dans notre petite bulle.
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() message posté Ven 29 Jan 2016 - 11:40 par Invité

Julian & eugenia — when they told her her story was written in the stars, she went to the heavens and crushed each one with her bare hands, stars have no power over her, the night sky is hers now, and she will carve it with constellations of her own. ✻ ✻ ✻ Nous étions si différents, comme si nous n’appartenions même pas à la même galaxie. Nous étions si différents, comme des étoiles, des étoiles qui brillaient de l’autre côté du ciel sans parvenir à se toucher l’une et l’autre autrement que par des rayons qui s’effleurent, perdus dans le vide interstellaire. Nous n’avions pas connu les mêmes épreuves non plus ; Julian avait été battu par son père tandis que cela avait été la vie elle-même qui s’était occupée de m’achever. Il avait eu un brillant parcours alors que je m’étais confortée dans mes différences et ma médiocrité. Nous n’interprétions pas les évènements de la même manière ; nos esprits eux-mêmes fonctionnaient de deux façons différentes. Nos pensées n’analysaient pas selon les mêmes critères, selon les mêmes schémas, selon les mêmes raisonnements. Nous étions deux individus profondément contraires mais je n’avais jamais vu cela comme un problème ; j’avais peut-être mis du temps avant de me rendre compte que cela ne nous empêchait pas de nous chérir et, justement, nous nous aimions dans nos contradictions, dans tous ces détails incompatibles qui faisaient de nous deux êtres à des milliers d’années lumières l’un de l’autre.
Mais, en cet instant, je regrettais presque de ne pas parvenir à réfléchir comme il pouvait bien le faire. Mais, en cet instant, nos différences pesaient sur mes épaules tant elles creusaient ce fossé qui apparaissait sous nos pas pour nous éloigner l’un de l’autre.
Je savais que ses craintes et sa détermination partaient de bonnes intentions mais mes mots ne semblaient pas le convaincre. C’était presque légitime, quelque part ; c’était la parole de mon médecin contre la mienne et il préférait croire le spécialiste, croire l’option la plus dramatique. Il accordait plus de crédit à un individu qui s’était appliqué à me rendre la vie impossible au cours de ces dernières années comme s’il ne me faisait pas suffisamment confiance pour savoir ce qui était bon pour mon corps ou non ; j’avais l’impression, quelque part, d’être traitée comme une gamine comme si les épreuves que j’avais connues ne me donnaient aucune légitimité dans ce que j’avançais.
Alors qu’au fond, je vivais avec mon handicap depuis plus de deux ans et demi. Il constituait mon quotidien. J’avais déjà eu affaire à plusieurs spécialistes, plusieurs associations, et ce n’était pas la première fois qu’on m’évoquait le sujet d’une grossesse. « Je t'écoute Ginny mais tout ce que je parviens à comprendre c'est « il ». D'accord, le Docteur Collins est un idiot. Moi, je te parle de nous, » finit par reprendre Julian. Bien entendu qu’il s’agissait de nous, mais cette conversation n’était même pas encore possible tant son avis était biaisé par les paroles d’un médecin. J’esquissai un faible sourire, l’observant dans les yeux, attendant qu’il poursuive. Je pouvais sentir sa colère et, dans mes excès de naïveté, j’espérais qu’elle n’était pas réellement dirigée vers moi. « Tu ne peux pas faire en sorte qu'il s'agit de ce qu'il a dit… Je ne veux pas avoir d'enfant si ça signifie qu'il va falloir te surveiller pendant neuf mois... Si tu aimes les sensations fortes on ira faire du parachute, mais je ne peux pas me lever chaque matin avec la peur au ventre... » reprit-il. « Je veux avoir une famille avec toi. Tu le sais. Mais je ne suis pas prêt à risquer notre équilibre, maintenant. » J’eus envie de lui prendre la main une nouvelle fois mais je me retins ; je plaçai mes doigts sur mes genoux, tandis que Julian s’était enfoncé dans le dossier de la chaise. J’avais conscience qu’il y avait sans doute des oreilles qui traînaient autour de nous et j’aurais préféré avoir cette conversation ailleurs ; cependant, je ne voulais pas abréger nos paroles dans cet intérêt, principalement pour ne pas brusquer Julian. « Tu n’auras pas à me surveiller pendant neuf mois, »  dis-je doucement. « C’est pour ça que je te parle de il. Parce qu’il t’a mis des idées fausses dans la tête. Tu n’auras pas à te réveiller tous les matins avec la peur au ventre parce que je ne risque pas ma vie. »  J’avais l’impression de lui répéter, encore et encore, les mêmes paroles, les mêmes mots, sans qu’il ne veuille les croire. J’avais l’impression de m’épuiser à le faire et c’était sans doute le cas ; si l’annonce de cette grossesse avait rempli Julian de craintes, cela avait principalement réveillé la douleur du décès de ma mère dans ma poitrine et j’avais hâte de rentrer pour me perdre sous mes couvertures. Me perdre sous mes couvertures et pleurer. Me perdre sous mes couvertures et ne plus penser à la vie qui grandissait dans mon ventre avant le lendemain. « Si ça peut te rassurer, on peut voir un autre spécialiste. Quelqu’un qui n’est pas concerné par le programme que je suis et qui sera complètement neutre, » repris-je finalement. « Mais je te promets, Jules. Je te promets que je ne risque rien. Fais-moi confiance. »  Je passai une mèche de cheveux derrière mon oreille en le regardant droit dans les yeux.
J’aurais voulu qu’il me croit. J’aurais voulu qu’il me fasse confiance. J’aurais voulu qu’il sache qu’il ne risquait pas de me perdre.
Parce qu’en cet instant, je ne voulais pas débattre sur ce sujet-là. Parce qu’en cet instant, je voulais principalement pleurer ma mère et la présence de cet enfant. Pleurer.
Pleurer, parce que je n’étais bonne qu’à ça.
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() message posté Sam 30 Jan 2016 - 2:20 par Invité

“It is hard enough to remember my opinions, without also remembering my reasons for them! ” Je restai silencieux, le cœur serré par cette sensation oppressante de culpabilité. Mon esprit était suspendu au milieu de mes sentiments contradictoires, mélangé dans une symphonie furibonde de pensées. Elle ne comprenait certainement pas que mon amour était malsain. Que je ne parvenais plus à faire la part des choses lorsqu'elle m'adressait son regard larmoyant et son expression maussade. Le discours du médecin me revenait sans cesse dans la tête. Il glissait derrière mes paupières et se dessinait sur les murs de la salle d'attente comme une fatalité. Ses conceptions étaient peut-être erronées. Il surjouait pour préserver son étude sur la régénération des cellules nerveuses ou n'importe quelle autre lubie scientifique. Mais je m'en fichais complètement. Cette décision pouvait bouleverser le cours de notre existence. Il avait amplifié les risques mais je doutais qu'il ait inventé toute une liste de pathologies susceptibles de troubler le cours de cette grossesse. Je déglutis en plaçant mes mains sur le rebord de mon siège. Mes doigts tremblaient fébrilement contre l'acier glacé, portés par des frissons toujours plus forts. La colère quant à elle me rendait un peu plus indifférent à la douleur, un peu plus insouciant dans ma consommation de tabac. Je pinçai les lèvres en calant une cigarette au coin de ma bouche. Je n'avais pas le droit de fumer dans une salle d'attente mais rien ne m'empêchait de me créer cette illusion. Je humais les saveurs âpres de mon filtre sans interrompre mes réflexions. Je songeais à ma vie d'avant. A ma jeunesse voilée d'incertitudes et de violences. Puis je revoyais la silhouette étincelante de ma mère traverser le couloir et m'étreindre l'espace d'une éternité. Mes yeux se fixèrent sur le plafond. Je plissai le front en soupirant. En fait, Eugenia ne comprenait pas du tout que mon amour était malsain. Il ne s'agissait pas d'une simple romance ou d'un échange dégoulinant de niaiseries entre deux personnes. C'était l'extension de mon histoire avec Aïda. C'était moi et elle unis, soudés contre le face du monde. Moi et elle, avant tout le reste. Je me tournai lentement vers son profil. Elle semblait perdue. Je sentais son obstination naître au bord de ses prunelles et se diriger vers ma poitrine comme une lame aiguisée. Ginny était assez têtue pour garder ses positions. Et j'étais trop consciencieux lorsqu'il s'agissait de défendre mes idéaux. « Tu n’auras pas à me surveiller pendant neuf mois, c'est pour ça que je te parle de il. Parce qu’il t’a mis des idées fausses dans la tête. Tu n’auras pas à te réveiller tous les matins avec la peur au ventre parce que je ne risque pas ma vie.  »   Je fronçai les sourcils, sans parvenir à imprégner le sens de ses affirmations. Je devais être complètement fou pour me laisser distraire par l'écho de sa voix. Avais-je trop perdu de temps dans les rangées de la bibliothèque pour me sentir aussi éloigné du mode de vie commun, du destin et de la pensée des gens normaux ? Parce qu'il s'agissait de cela à cet instant. De normalité. De mon incapacité à appréhender normalement la situation. Puisque de tout évidence tout allait pour le mieux. Je pressai mes lèvres contre le bout de ma cigarette d'un geste rageur, jusqu'à ce que la tige se rompe dans ma bouche. J'observais le visage de Ginny sans rétorquer. Pourtant, dans mon for intérieur je comprenais parfaitement son opinion. Cette exhortation au risque, à la vie et à l'abandon de soi. J'admirais ses impulsions, ses tendances à la jovialité et le rejet de toutes les inhibitions. Je trouvais ces versants, presque révolus de sa personnalités, très charmants. Sauf que cette fois, je ne partageais pas son engouement. Je ne voulais pas correspondre au schéma qu'elle avait tracé pour nous. Je réalisais parfaitement l'ampleur de la situation, de son deuil soudain et inachevé. Je savais que Beatrice lui manquait car elle marmonnait encore son prénom dans la nuit en frissonnant contre mon torse. Mais je ne pouvais pas capituler. Il en était hors de question pour le moment. « Si ça peut te rassurer, on peut voir un autre spécialiste. Quelqu’un qui n’est pas concerné par le programme que je suis et qui sera complètement neutre, mais je te promets, Jules. Je te promets que je ne risque rien. Fais-moi confiance.  »  Je hochai la tête avec entendement puis je me redressai d'un geste nonchalant. Un deuxième avis, c'était un bon compromis. Tout du moins, sa proposition me semblait équitable. Néanmoins, je me sentais outré par sa remarque. Te rassurer. Elle ne ressentait donc aucune peur. Les avertissements du Doctor Collins ne s'appliquaient pas à son univers apparemment. J'emmêlais les boucles de ma frange sans tiquer. Mon souffle s'embrasait au fond de ma gorge et je n'avais qu'une hâte, rejoindre l'extérieur du bâtiment pour fumer. « Je te fais confiance.» Soufflai-je dans ma barbe en me levant. Je lui tendis la main comme pour l'inviter pour me suivre puis ensemble, nous traversâmes la hall. Je ne lui avais pas menti. Je lui faisais entièrement confiance. C'était la fatalité et ses frasques suicidaires que j'accusais. Je redoutais les flux anarchiques du cosmos qui ne semblait jamais en manque d'imagination lorsqu'il s'agissait de jouer avec nos vies.
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