"Fermeture" de London Calling
Après cinq années sur la toile, London Calling ferme ses portes. Toutes les infos par ici for the night is dark and full of terrors ♦ (olive) 2979874845 for the night is dark and full of terrors ♦ (olive) 1973890357
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for the night is dark and full of terrors ♦ (olive)

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() message posté Sam 10 Jan 2015 - 12:26 par Invité


for the night is dark and full of terrors
olivia et blake

do monsters make war? or does war make monsters? ✻✻✻  Le sommeil refusait de l’emporter, et ce n’était pas faute d’avoir essayé. Elle se retourna une nouvelle fois dans son lit, soupirant, attrapant son téléphone afin d’avoir une idée de l’heure qu’il était. 2h57. Quelle heure était-il chez elle ? Elle n’eut pas l’envie d’y réfléchir, à quoi bon ? Elle était là, maintenant, il était 2h57 et elle n’arrivait pas à dormir. 2h58. Elle soupira une nouvelle fois et se dégagea ensuite de ses draps afin de s’asseoir sur son lit. Avec la lumière diffusée par son écran, elle parvenait à voir sa chambre plus ou moins distinctement. Les habits qui traînaient un peu partout il y a quelques jours de cela avaient été soigneusement rangés, la pièce était un peu plus chaude qu’à son habitude, et le lit auparavant défait dans lequel elle passait ses nuits semblait plus confortables que d’habitude. Olivia était sans doute passée par là, et un sourire se dessina sur le visage de la jeune femme à cette pensée. Etait-ce là sa façon à elle d’accepter finalement la présence de sa petite sœur dans sa vie ? Petite sœur. Elle ne l’avait plus été pour Olivia pendant de longues années, mais la perspective que peut-être, les choses allaient redevenir comme avant réussissait à lui réchauffer le cœur. Elle jeta un nouveau coup d’œil sur l’écran de son téléphone, hésitant un instant à répondre au SMS qu’elle venait de recevoir de la part de son fiancé. S’il savait. Comment réagirait-il s’il apprenait que sa future épouse ne s’était pas montrée fidèle à leur amour. S’il apprenait qu’elle avait brisé leur mariage avant même de se retrouver devant l’autel. Cette pensée aurait du la terrifier, mais tristement, elle lui apportait également autre chose, un certain sentiment de liberté. Elle ne pouvait pas dire qu’elle regrettait ce qu’elle avait fait car au fond, elle n’était pas certaine que ce soit réellement le cas.
Ce qu’elle regrettait pourtant, c’était l’après.
Mais ça, elle se refusait d’y penser.
Un nouveau soupire, et cette fois, Blake décida de se lever enfin. De toute façon, elle ne parvenait pas à trouver le sommeil alors pourquoi lutter plus longtemps ? Elle enfila un gilet et des chaussettes chaudes, et quitta enfin sa chambre. L’appartement était plongé à la fois dans le noir de la nuit, mais également dans un silence ininterrompu. Sa sœur était probablement en train de dormir maintenant, et Blake s’arrêta un instant dans le couloir, observant de loin la porte qui la séparait d’Olivia. L’espace d’un instant, elle eut envie de traverser les quelques mètres qui la séparaient de sa chambre, sentant comme l’envie, ou le besoin de parler à quelqu’un mais elle se retint. La réveiller n’était probablement pas une bonne idée, et Blake avait terriblement peur de briser tous les efforts qu’elles avaient faits en franchissant une limite qu’elle ne devait certainement pas franchir. Silencieuse, elle reprit son chemin et se dirigea cette fois vers la cuisine. L’idée de taper dans le pot de glace qui lui faisait de l’œil depuis quelques jours maintenant était vraiment tentante, mais elle dut se faire violence afin de ne pas se laisser emporter par sa gourmandise. Elle savait pertinemment comment elle se sentirait après. Et elle avait suffisamment de raisons de se détester à cet instant précis pour ne pas en rajouter une sur le tapis. Je n’en ai pas besoin. Se répétait-elle dans son esprit. Je n’en ai pas besoin. Et c’était vrai, elle en avait envie, mais elle n’en avait pas besoin. Parfois, dans ces moments là, il lui suffisait de penser à son frère et à sa voix grinçante qui lui avaient répété toute sa vie à quel point elle était énorme pour trouver le courage de ne pas céder. La voix de ce dernier résonna dans son esprit, et une grimace de dégoût se dessina sur son visage. Elle eut soudainement envie de lui envoyer un SMS pour l’insulter. Il ne saurait probablement pas d’où venait cet élan soudain de vulgarités mais c’était comme ça entre eux. Leur haine mutuelle avait toujours pris le dessus sur tous les autres sentiments qui les habitaient, et ils n’avaient jamais vraiment besoin de se demander pourquoi. C’était comme ça. Simplement comme ça. Ca l’avait toujours été et ça le serait probablement toujours.
Elle referma la porte du placard qu’elle avait ouvert afin d’y prendre un bol qu’elle remplirait de céréales avant de s’avancer vers le centre de la pièce. Elle était toujours perdue dans ses pensées, et ne portait qu’une attention distraite à ce qui l’entourait.
Peut-être aurait-elle pu l’entendre si elle s’était montrée plus attentive.
Peut-être aurait-elle pu lui dire que ce n’était qu’elle, et qu’il n’y avait rien à craindre.
Peut-être.
Mais c’était trop tard.
Elle se souvint simplement s’être retournée au dernier moment, elle avait crié, et un bruit sourd suivi d’une douleur atroce au niveau de la tête l’avait mise à terre.


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() message posté Sam 10 Jan 2015 - 14:28 par Invité
we all have our horrors and our demons to fight, but how can i win, when i'm paralyzed? they crawl up on my bed, wrap their fingers around my throat. is this what i get for the choices that i've made? god forgive me, for all my sins. god forgive me, for everything. don't go, i can't do this on my own. save me from the ones that haunt me in the night. i can't live with myself, so stay with me tonight. don't go. ✻✻✻ Je m’effondrais sur mon lit sans même prendre la peine de fermer les volets. Je m’effondrais, épuisée, vidée de toute énergie, alors que l’horloge n’avait pas encore eu le temps d’annoncer qu’il était huit heures du soir. Je savais, au fond de moi, que j’aurais pu tenir un peu plus. Mais j’avais rendu les armes. J’avais rendu les armes tant la fatigue me piquait les yeux et rongeait mes veines ; j’avais rendu les armes parce que j’avais la sensation de ne plus être bonne à rien. Je me demandais, parfois, si mon corps finirait par connaître des limites. Je me demandais, parfois, si je ne parviendrais plus, un jour, à ne pas dormir pendant plus de quarante-huit heures. Parce que c’était ainsi. Je passais bien souvent plus de deux jours sans me faufiler sous ma couette. Je passais bien souvent plus de deux jours à boire des cafés pour me maintenir active, revenant chez moi pour simplement me changer et repartir. Je ne pouvais pas me permettre de perdre du temps à dormir. Je ne pouvais pas me permettre de laisser mes cauchemars m’envahir. Je ne pouvais pas me permettre de laisser libre cours à mon esprit, généralement occupé par d’autres choses pendant la journée. A l’hôpital, il n’était pas rare que je mente sur mes horaires de travail ; je dépassais trop souvent au goût de mes supérieurs les quotas autorisés, mais le manque de personnel les contraignait de me garder quand même. J’adorais travailler. J’adorais m’occuper des autres, leur être utile, les aider dans ces heures les plus difficiles de leur existence. Par-dessus tout, cela me permettait de ne pas penser au reste ; de ne pas penser à cet appartement vide qui m’attendait, chez moi, de ne pas penser à la tombe d’Isaac qui s’était sans doute faite envahir par la nature depuis son enterrement.
A l’hôpital, je mettais tout de côté.
A l’hôpital, je n’étais plus Olivia, mais infirmière, et cela me convenait amplement. Je ne parvenais plus à vivre avec ce que j’étais, après tout. Je ne parvenais plus à supporter l’idée d’être une survivante.
Ma conscience m’échappa, et je perdis le fil de mes pensées. Comme à chaque fois, je me souvins d’avant. Je me souvins de mon existence lorsqu’Isaac était encore en vie. Je me souvins de La Nouvelle Orléans. De la Californie, quand j’étais encore étudiante. De mon mariage. De la maison familiale où les cris fusaient sans cesse de toute part. De l’armée.
De l’Afghanistan.
Je les entendais encore, les bombes. Je la sentais encore, l’horreur qui m’envahissait les veines lorsqu’il y avait un code rouge et que nous étions tous intimés de nous mettre à l’abri. J’avais cent fois vu les horreurs de la guerre mais cela était ce qui me hantait le plus ; la sensation de ne pas savoir si l’on verrait le lendemain. La peur. Cette peur constante qui ne nous quittait jamais. Dans mon sommeil, je poussai un gémissement, avant de me faire rattraper par les assauts du camp adverse. Des morts, des blessés, des bombes, des attaques. Je n’avais jamais été en sécurité. Je n’avais jamais pu m’assoupir en étant calme et sereine. J’avais sans cesse était agitée par la crainte de mourir. Par la crainte de le voir partir, lui, sans qu’il ne me revienne.
Et cela s’était produit. Il était mort. Il était mort et je n’avais pas pu le sauver.
Après tout, nous n’avions jamais été en sécurité.
Je me réveillais en sursaut, tous mes sens alertes, les souvenirs des premières lignes hantant encore ma vision troublée. Je mis une poignée de secondes avant de réaliser ce qui m’avait réveillé ; avant d’entendre des pas étouffés, des mouvements guère assurés. Et je la ressentis une nouvelle fois. La crainte. La peur. Je n’étais pas en sécurité. Je ne le serais plus jamais. Mon corps tout entier se mit à trembler ; sans un bruit, ma main se referma sur le club de golf que j’avais soigneusement caché sous mon lit. Parce que j’étais ainsi. J’avais peur. J’étais effrayée. Sans cesse et pour toujours.
Et je ne serais jamais plus en sécurité.
J’ouvris la porte de ma chambre en silence. Mon appartement était plongé dans le noir et les bruits continuaient de chatouiller mes oreilles. Quelqu’un était là. Quelqu’un était là et je n’étais pas en sécurité. Isaac n’était plus de ce monde pour me protéger. Alors, je devais le faire toute seule.
Alors, je devais survivre. Parce que c’était le rôle que l’on m’avait attribué. Celui de la survivante.
J’étais paniquée. Lorsque j’entraperçus une ombre, mon cœur s’affola dans ma poitrine et je dus me faire violence pour ne pas pousser un cri. Je focalisai mon esprit sur ma respiration, tentant, tant bien que mal, de contrôler ce qui m’agitait au fond de mon cœur. La peur. La panique. La crainte. Et, sans réfléchir, je fis un dernier pas pour me retrouver face à mon agresseur, et je levai les bras pour le frapper à la tête. Il y eut un cri féminin, mais cela ne fut pas le mien. La silhouette s’effondra à Terre. Et, avant que je n’éprouve aucun soulagement, je compris qu’il y avait une chose qui n’allait pas.
Je ne serais jamais plus en sécurité. Mais, peut-être, au fond, peut-être n’avais-je pas réellement été en danger.
Je me précipitai vers l’interrupteur pour allumer la lumière de la cuisine. Et, lorsque la lumière m’aveugla, mes yeux se posèrent sur la chevelure blonde qui recouvrait le visage. Et j’eus un hoquet d’horreur. Un hoquet d’horreur parce que j’étais devenue, moi, le danger.
Je ne m’étais pas défendue. J’avais attaqué.
J’avais attaqué ma sœur.
La peur. La panique. La violence.
Je lâchai le club de golf, désorientée, avant de m’agenouiller à ses côtés. J’écartai les mèches de son visage pour l’encadrer avec mes mains, tremblante. J’avais attaqué ma sœur. Je l’avais attaqué sans même y réfléchir à deux fois. « Blake ? Tu m'entends ? » murmurai-je doucement, la gorge serrée. « Oh, mon Dieu, Blake, je suis si désolée. » J’étais désolée, oui. Désolée de ne pas me sentir en sécurité. Désolée d’être traumatisée, traumatisée par ce que j’avais pu voir et vivre, traumatisée par la guerre et la violence. Traumatisée par ce que j’avais pu faire. « J’ai cru que… J’ai cru que ce n’était pas toi et… » Et j’ai attaqué. J’ai attaqué parce que cela était ce que la violence m’avait appris. Riposter. Et blesser les autres à mon tour.
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() message posté Sam 10 Jan 2015 - 15:41 par Invité


for the night is dark and full of terrors
olivia et blake

do monsters make war? or does war make monsters? ✻✻✻  Une seconde. C’était sans doute le temps supplémentaire qui lui aurait permis d’échapper à la situation. Si elle s’était retournée une seconde plus tôt, elle aurait pu l’arrêter. Si elle s’était retournée une seconde plus tôt, elle aurait pu permettre à Olivia d’échapper à la culpabilité que son geste allait surement provoquer en elle. Mais comment aurait-elle pu savoir ? Elle s’était crue en sécurité ici, mais peut-être était-ce là la première erreur qu’elle avait faite depuis qu’elle était arrivée à Londres. Pour elle, Blake était simplement chez sa grande sœur. Mais à aucun moment elle n’aurait pu se douter qu’elle se trouvait en réalité piégée dans les cauchemars que cette dernière revivait sans cesse, dont elle faisait maintenant également partie. De la même façon qu’elle n’aurait pu se douter un seul instant de l’ampleur du traumatisme d’Olivia, et du pouvoir que les démons de son passé pouvaient avoir sur elle. Elle n’aurait pas pu s’en douter, car on ne le lui avait jamais vraiment dit. Blake savait que sa sœur était partie dans un pays en guerre, elle savait que c’était ainsi que son beau-frère était mort, et il lui était déjà arrivé par le passé de tenter d’imaginer l’horreur que sa sœur avait pu vivre. Mais elle ne l’avait pas vécue, elle. Et c’était bien pour cette raison que Blake ne saurait jamais vraiment à quel point cela pouvait changer une vie entière, et ce, du tout au tout.
La douleur était telle qu’elle avait l’impression qu’on venait de lui broyer une partie de son visage. Blake était encore consciente, mais tellement sonnée que sur le coup, elle fut incapable de se redresser ou de faire le moindre mouvement, trop occupée à être ensevelie sous la douleur du choc. Elle ne se souvenait pas avoir eu un jour aussi mal qu’à cet instant précis, et elle eut bien besoin d’un long moment avant de parvenir à se remettre les idées en place. Une lumière éclaira soudainement la pièce, et par reflexe, Blake se recroquevilla un peu plus sur elle, protégeant son œil déjà suffisamment endolorie de la violence de ces quelques rayons. Une voix féminine s’éleva et elle sentit quelqu’un lui attraper le visage tandis qu’elle laissa un grognement de douleur s’échapper. Blake se sentit prise d’une envie soudaine de dormir, mais la voix insista, et un nouveau grognement s’échappa.
Damn. Elle n’était pas certaine d’avoir réussi à articuler suffisamment bien ou si ses paroles avaient fini perdues dans un nouveau flot de grognement qui ne souhaitait que se transformer en sanglot. Ca faisait mal, terriblement mal, et cette douleur ne semblait pas près de s’apaiser. Il lui fallut un long moment avant de comprendre que c’était Olivia qui était à côté d’elle, elle en avait même fini par oublier qu’elle n’était plus en Louisiane.
« Ca fait maaaal. » Grogna-t-elle, ne parvenant pas à ouvrir les yeux alors qu’une nouvelle envie de pleurer la traversa. Elle ne comprenait pas, elle avait beau tenter désespérément de réfléchir à ce qui aurait pu provoquer cet élan de violence de la part d’Olivia, elle ne trouvait rien. Etait-ce parce qu’elle avait fait trop de bruit ? Ou bien avait-elle fait une autre bêtise dont elle ne se souvenait pas ? Elle ne comprenait tout simplement pas.
Mais Olivia prit à nouveau la parole, et soudainement, elle comprit. Ce n’était pas elle qui avait été visée mais quelqu’un d’autre. Qui ? Blake n’en avait absolument aucune idée, tout ce qu’elle savait c’était que la douleur qui ne la quittait plus depuis un long moment maintenant était mélangée à un autre sentiment, un sentiment de peur. Et un peu de colère peut-être. Qui attaquait quelqu’un de façon aussi violente sans prendre le temps d’abord de vérifier de qui il s’agissait ? Un frisson la traversa, et elle se surprit à dégager soudainement les mains de sa sœur de son visage.
« Ne me touche pas. » Tenta-t-elle d’articuler difficilement avant de réussir à rouler sur ses genoux afin de se redresser. Elle avait l’impression qu’on allait lui arracher la tête à tout instant, elle aurait préféré rester là où elle était, mais elle avait surtout eu le besoin soudain de mettre de la distance entre elle et sa sœur.
« Mais ça va pas ou quoi ? » Ajouta-t-elle, toujours partagée entre la terreur, la colère, et l’incompréhension. Blake ne réussissait pas à reconnaitre la personne qu’elle avait devant elle, car l’Olivia qu’elle avait connue toute son enfance n’avait rien à voir avec l’Olivia qu’elle avait sous les yeux à cet instant. Sa sœur ne l’aurait jamais agressée de cette façon, sa sœur aurait été incapable de faire du mal à une mouche. Elle se souvenait encore de cette Olivia qui passait son temps à la séparer de son jumeau quand les deux se disputaient encore, de cette Olivia qui n’hésitait jamais à apaiser les tensions, car c’était comme ça qu’elle était.
Ce n’était pas Olivia devant elle, à cet instant précis.
C’était une inconnue, et cette réalisation eut comme l’effet d’une claque pour elle, peut-être bien plus douloureuse que le coup qu’elle venait de recevoir.


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() message posté Sam 10 Jan 2015 - 18:10 par Invité
we all have our horrors and our demons to fight, but how can i win, when i'm paralyzed? they crawl up on my bed, wrap their fingers around my throat. is this what i get for the choices that i've made? god forgive me, for all my sins. god forgive me, for everything. don't go, i can't do this on my own. save me from the ones that haunt me in the night. i can't live with myself, so stay with me tonight. don't go. ✻✻✻ La peur. Sentiment paralysant, sentiment empreint de détresse et d’horreur. La peur, encore la peur. Elle était capable de ronger un être tout entier ; elle était comme un parasite, se nourrissant des pires craintes de l’Homme, incapable de vivre sans hôte et sans raison d’être. Elle m’habitait, moi, sans que je ne le désire, sans que je ne le veuille vraiment. Elle m’habitait et je ne pouvais m’en débarrasser, puisqu’elle s’appuyait sur mes souvenirs prenants, sur mes souvenirs intolérables. Elle m’habitait et elle resterait là. Toujours. Pire encore, j’avais presque la sensation d’être tombée dans les pires retranchements ; j’étais animée par la peur d’avoir peur. Je ne supportais pas l’angoisse. Je ne supportais pas l’anxiété. Je me braquais dans mes sentiments et mes ressentis. Et je me perdais dans les situations, tout en me demandant s’il existait réellement une alternative censée possible. Tout en me demandant si j’étais dans un songe ou dans la réalité.
J’avais peur. J’avais toujours peur. Et j’aurais à jamais peur.
J’avais réagi trop vite. Je m’en étais rendu compte à l’instant même où mon club de golf avait heurté la personne en face de moi et qu’un cri de détresse s’était échappé de ses lèvres. Cela avait été comme si j’étais revenue sur Terre et que je m’étais souvenue que, non, je n’étais plus seule. Et que, non, je n’étais plus en danger.
L’Afghanistan était loin. Pourtant, mes souvenirs me répétaient sans cesse que j’y étais encore.
Peut-être y avais-je laissé mon être. Peut-être y avais-je laissé mon âme.
Je m’étais précipitée à genoux auprès de Blake. Je pouvais le voir à ses traits tirés qu’elle souffrait ; elle pressait presque avec désespoir son œil et je sentis la panique m’envahir. Je ne parvenais pas à savoir quand est-ce que j’avais perdu le fil. Je ne parvenais pas à me souvenir à quel moment est-ce que j’avais arrêté de dissocier mes rêves et la réalité. Tout ce qui me restait était la peur. Cette peur qui m’avait habitée. Cette peur qui continuait de couler dans mes veines à mesure que je me rendais compte de l’ampleur de mes gestes et ce dont j’étais capable. J’étais dangereuse. J’étais devenue un monstre, un monstre comme ceux qui avaient bien pu m’effrayer lorsque j’avais encore été en première ligne, là-bas. Je ne valais pas mieux que tous ces autres qui blessaient sans cesse. J’étais devenue leur égale. Ils m’avaient perdu, moi, au beau milieu de mes angoisses nocturnes qui ne me quittaient jamais.
Et qui ne me quitteraient dorénavant plus. C’était trop tard. Trop tard pour eux, trop tard pour moi. Trop tard pour tout. « Ca fait maaaal. » se plaignit Blake et je me mordis la lèvre inférieure avec force. Je l’avais blessé. Je lui avais fait du mal. Je ne l’avais pas désiré mais cela était du pareil au même dans mon esprit perturbé. J’aurais aimé lui demander quel genre de douleur elle ressentait. J’aurais souhaité qu’elle me laisse l’observer pour juger si sa blessure était grave ou si je m’en faisais pour rien. Mais je demeurais muette. Muette dans mes intentions médicales.
Parce que, dans toute la peur que je ressentais, je percevais également de la culpabilité qui venait gronder au fond de mon être.
Blake se débattit presque. Elle chercha à se débarrasser de mon emprise et je ne la forçai pas à supporter mon contact ; je lâchai son visage en l’observant, presque blessée par la manière dont j’étais rejetée. Puis, je me souvins. Je me souvins que je ne pouvais pas prétendre lui vouloir du bien. Je me souvins que j’étais un monstre, un monstre qui blessait les autres, un monstre qui blessait même les personnes partageant son sang. Je déglutis avec difficulté, presque démunie. Les sanglots de ma sœur résonnaient dans tout mon appartement et je ne pouvais rien faire. Rien du tout.
Après tout, j’en avais sans doute déjà trop fait. « Ne me touche pas. » m’intima-t-elle avec difficulté avant de se redresser sur ses genoux. Elle s’éloignait de moi. Elle s’éloignait de moi parce que, maintenant, elle aussi avait peur. Ma gorge se serra. « Mais ça va pas ou quoi ? » Je demeurai silencieuse. Muette. Je ne savais pas quelle réponse lui donner. Je ne savais pas ce qui m’était autorisé d’admettre ou de clamer. J’avais cent fois envie de pleurer et, pourtant, les larmes ne coulèrent pas sur mes joues. Je n’esquissai pas un seul mouvement vers ma petite sœur. A vrai dire, je ne fis rien. Rien du tout.
La peur était un sentiment paralysant. Mais, étrangement, la culpabilité l’était encore bien plus.
Je me sentis dériver. Je me sentis partir dans mes souvenirs quand des patients, soldats, avaient hurlé des insanités en pensant être attaqué. Certains m’avaient pris pour une menace. Certains avaient cru voir que j’étais une personne dangereuse. Dans leurs délires les plus fous, ils m’avaient accusé de trahison. De sorcellerie. Ils m’avaient soupçonné de vouloir leur mort et de tenter de les empoisonner lorsqu’ils avaient le dos tourné. Peut-être, au fond, avaient-ils eu raison. Peut-être étais-je réellement dangereuse. Peut-être étais-je une sorcière. Un monstre. « Je suis désolée, Blake. » répétai-je d’une voix presque suppliante. « Je ne suis pas tranquille, la nuit. Ca fait des années que je vis seule et j’ai toujours eu peur d’être cambriolée… Je ne sais pas ce qu’il m’a pris. » Peur. Mensonge. J’avais la sensation que cela était plus simple de cette manière, plus simple d’atténuer la vérité pour pas qu’elle ne songe réellement que j’étais dérangée. Doucement, je posai mes mains sur ses bras pour l’aider à se relever, et je lui indiquai un siège de la cuisine pour qu’elle s’y asseye. Je fis quelques pas vers le congélateur avant d’ouvrir la porte ; j’attrapai un bac à glaçons, avant de prendre dans un placard une serviette en tissu. Je fis glisser les glaçons à l’intérieur avant de la refermer soigneusement et la tendre à ma sœur. « Applique ça sur ton œil, ça sera mieux que d’y mettre tes doigts. » lui dis-je avec douceur. « Quand tu pourras l’ouvrir il faudra que je le regarde pour voir s’il faut qu’on aille à l’hôpital ou pas. » Ma voix se brisa à la fin de ma phrase mais je conservai la tête haute, le dos droit, comme si je maîtrisai parfaitement la situation.
Mais, au fond, je savais que je n’avais rien en contrôle. Je savais que tout m’échappait. Je savais que je n’allais pas bien et que cette peur qui me rongeait n’était pas anodine. Je savais que j’aurais sans doute mieux fait de lui dire. De lui admettre.
Mais je n’avais pas pu. Je ne pouvais pas.
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