We're Broken People Now

C’était étrange, absurde, comment les choses pouvaient m’apparaître sous un jour aussi neuf alors qu’elles n’étaient jamais que la continuation de ce que j’avais déjà connu depuis longtemps. Mais je m’étais arrêté depuis tant de mois, sinon d’années, que mon point de vue avait forcément changé ; j’avais eu le temps d’oublier pour me faire une opinion neuve… Et Lou m’y aidait. Lou, et plus sergent Williams. Pour le meilleur comme pour le pire, on avait passé cette étape… Ou plutôt, on l’avait pulvérisée à coups de pied. Je savais que ce n’était pas si rare entre collègues, et encore moins dans les unités les plus spécifiques des forces de police, qui étaient soumises aux plus grandes périodes de stress et aux enquêtes les plus exigeantes. La jeune femme a répondu favorablement à tout ; aux regards, aux baisers, aux caresses, à l’union de nos corps… Elle gémit plus fort que jamais, et c’est fini, nous retombons l’un contre l’autre. Elle sourit, alors que nous peinons tous deux à reprendre notre souffle. Je souris, l’embrassant doucement.


| Ok, mais il est quoi ? 5H ? 6H ? Demain, on est auditionné. Et on n’était pas sensé faire ça… |


Et surtout, qu’allait-il se passer, maintenant ? On avait bravé un interdit important dans notre profession. En théorie, on n’était plus sensé bosser ensemble, à terme. On devait le signaler, affronter la rumeur et la disgrâce s’y afférant, tandis qu’il faudrait aussi se réaccoutumer à quelqu’un d’autre en tant que partenaire. Est-ce que le jeu en valait bien la chandelle ? Rien n’était moins sûr, sincèrement. Mais si nous devions recommencer… La question se poserait-elle ? Je n’en savais rien. Son corps, nu et chaud, contre moi, me donnait déjà des idées. Le plaisir et la communion avait au moins eu l’avantage de chasser un peu les ténèbres nées de cette nuit affreuse presque jusqu’au bout, jusqu’à ce que je me retrouve dans cette chambre avec elle. Le bout de ses doigts sur ma joue m’électrice, et elle vient m’embrasser en complimentant nos échanges. Elle reprend ses caresses et se love contre moi. J’aimais cette sensation ; celui de ce corps chaud, abandonné contre moi, confiant.


Je comprends ce qu’elle veut dire, et je ne peux pas vraiment la contredire. Et son regard… Je l’embrasse sur le front.


| Tu crois que… Tu réussirais à dormir, là ? |


Impayable, vraiment.

Je suis épuisé mais ça fait plaisir malgré tout, c’est assez satisfaisant comme sensation. Je sens bien que j’ai fait une bêtise mais c’est sans aucun doute la plus délicieuse de ma vie, dans ce cas. Lou est une très belle femme. Petite, assez menue, mais indubitablement attirante. J’avais de la chance, quelque part. Même si ça risquait de détruire nos carrières respectives. Même si nos vies personnelles étaient de toute évidence déjà compliquées. Maintenant, je n’avais plus vraiment le choix que d’assumer. Et je n’arrivais que difficilement à me sortir son corps de la tête, alors que je le sentais tout contre moi, sa poitrine pressant contre mon bras et le côté supérieur de mon corps. Ses cheveux me chatouillent doucement et je sens son souffle contre mon cou. Sa jambe par-dessus la mienne, me donnant envie de la déplacer un peu pour rendre la position plus agréable… Mais à cet endroit, cela permettait de refaire déjà lentement monter en pression, en tension, alors que tant de proximité nourrissait le désir d’en vouloir plus. Toujours plus. La jeune femme m’explique qu’il est très tard. Et elle assume totalement ce que nous venons de faire. Et elle ne veut pas pour autant que notre proximité nuise à notre relation professionnelle. Je lui jette un regard un peu surpris.


Ca voulait forcément dire quelque chose, ce qu’elle m’expliquait.


| Et donc, si demain –enfin, tout à l’heure- on ne perd pas trop de plumes, je te dis que j’aimerais bien qu’on remette ça, ça t’intéresserait ? |


Je l’embrasse doucement, dans une espèce de tendresse un peu malhabile, mais sincère néanmoins. Je ne voulais pas non plus changer de partenaire. Pas maintenant. Encore moins avec ce que nous venions de traverser et de surmonter ensemble. Je la sens se réveiller plus encore quand je l’embrasse sur le front. Et elle semble bien partie pour un second round. Je vais basculer nos corps alors qu’elle cherche ma langue de la sienne, ma main sur sa joue, mes yeux dans les siens.


| Moi non plus, je ne veux pas changer de partenaire… |


Et nous basculons à nouveau. Ensemble. Mes mains serrant les siennes, alors que mon corps passe au-dessus du sien.