"Fermeture" de London Calling
Après cinq années sur la toile, London Calling ferme ses portes. Toutes les infos par ici uncover the lover you cannot replace (elmas) - Page 2 2979874845 uncover the lover you cannot replace (elmas) - Page 2 1973890357
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uncover the lover you cannot replace (elmas)

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() message posté Mar 1 Mar 2016 - 19:53 par Invité
Je sentais en moi deux pôles opposés se rapprocher dangereusement et je craignais de ne pas supporter l’impact. Je la voyais souffrir comme si les marques de ces maux étaient tracées en lettres rouges sur son front par mes mains tremblantes. Mais ces mains ne m’appartenaient plus. Tout comme mon corps entier que je voyais tanguer devant elle, cracher des paroles comme un flot noir et impétueux puis se taire et rester immobile face à sa silhouette chétive et malade. Mais elle ne resta pas muette. Elle laissa ma colère se déverser contre sa poitrine, ses côtes grandes ouvertes pour que les mots atteignent son cœur, puis un rire léger, décalé et étrange résonna d’entre ses lèvres et je fronçai les sourcils, serrant les mâchoires pour que sa réponse s’écrase sur le mur d’acier qui entourait mes pensées. « Je suis heureuse d’avoir raison. Il m’en faut si peu, si tu savais. Tu n’as pas volé mes rêves, Tom. C’est toi mes rêves et c’est ma lâcheté qui m’a tout pris. Je ne t’en veux pas d’être parti. Jamais je ne t’aurais empêché de poursuivre tes études. J’ai grandi maintenant, je ne peux pas t’en vouloir pour une raison aussi stupide. Je t’en veux de m’avoir fait croire que tu resterais avec moi. Je m’en veux parce que je t’ai attendu. » Ses lèvres se refermèrent sur ces derniers mots et mes poings se crispèrent autour du vide, mes doigts se changeant en pierre. Mes ongles se plantèrent dans ma paume mais je forçai encore pour réprimer la créature qui s’était éveillée en moi. De quoi ai-je l’air, Elsa ? Je le savais déjà. Je me regardais dans le miroir chaque matin et j’avais de plus en plus de mal à en supporter la vision. Je ressemblais à un épouvantail rapiécé et difforme, dont le squelette de bois rongé par les termites avait été rafistolé par les mains d’un aveugle. Mes boucles étaient de mauvais augure, comme des milliers de crochets auxquels les âmes de mes victimes pendaient. Combien de corbeaux s’étaient juchés sur mes épaules ? Je ne les comptais plus. Aujourd’hui, on me déracinait pour me laisser choir sur le sol grouillant d’insectes et sentant l’humidité. J'étais encore plus effrayant une fois mort. Je voulus répondre à Elsa mais les paroles que je prononçai ne furent pas les bonnes. Elles restèrent acerbes et corrosives. Quinze ans, oui. Quinze ans durant lesquels elle apprendrait à écrire un testament vide car nous n’avions rien à léguer à personne. Tout restait en désordre parmi mes livres et mon dédain, piégé dans un appartement qui avait déjà vu bien trop de choses. Je n’étais pas ses rêves. C’était impossible. Ce mot n’existait pas ici pour la simple et bonne raison que l’on ne rêvait que de mort. J’ai agonisé pendant de longues minutes à l’endroit où tu te tiens mais tu ne le sais pas. Mes mains m’échappaient, certes, mais elles étaient encore capable de broyer ses espoirs car au fond, je commençai à croire que je ne voulais pas qu’elle en ait. Ma noirceur parlait à ma place et elle se hérissait à chaque fois qu’elle entendait une mélodie trop claire, trop juste, trop entraînante.

Je m’immobilisai au sol, mes jambes se dépliant sans aucune synchronisation comme une machine cessant de fonctionner. Le métal qui la composait avait rouillé et les articulations cédaient à force d'avoir été malmenées. J’avais du mal à respirer. Mon souffle était haletant et il ponctua mon ordre comme pour me vider un peu plus de la vitalité qu’Elsa m’avait insufflé, l’espace de quelques secondes. « Alors ne le fais pas. Arrête si te plaît. Tu n’es pas malade. Tu te rends malade. Arrête ça. » Je détournai le regard et fermai les yeux, tentant vainement de me calmer. Sa voix était douce et protectrice. Elle laissait faire ses pouvoirs de fée car j’avais enfin compris qu’elle en était une. C’était le son de l’eau de mon enfance, du feu de mon adolescence, du vent de mes désillusions et de la terre sous laquelle j’avais enterré mes regrets. J’étais incapable d’arrêter. On n’éteignait pas une machine en route car elle pouvait exploser. Moi, j’avais toujours l’impression d’exploser, immobile ou non. J’entendais une horloge tiquer dans ma poitrine mais je ne savais pas ce qu’elle annonçait, alors je me préparais au pire. Je ne suis pas malade. Je me rends malade. Vraiment ? Ne l’étais-je donc pas encore devenu ? Mais que faisait-elle des maux que les médicaments ne pouvaient pas soigner ? Que faisait-elle du sommeil que la morphine avait égaré ? Que faisait-elle du vide qui creusait mon estomac un peu plus chaque jour, faisant luire mes côtes d’un éclat blafard car on voyait distinctement ma carcasse sous la peau de mon corps nu et qu’on en oubliait le reste : voici l’histoire d’un homme qui est devenu charogne, mais on écrit toujours des vers à son sujet. Voilà que tout était mon dessein, ma responsabilité, ma fascination malsaine pour la décomposition de la chair, pour la déconstruction de l’esprit. J’étais né entier et j’avais voulu savoir en combien de morceaux je pouvais me diviser moi-même, jusqu’où l’on pouvait aller avant de basculer dans le monde des morts. Des milliers, Elsa. Des milliers de morceaux, une infinité, même. On pouvait scinder l’être en autant de fragments que le Temps. Je n’étais pas hier celui que je suis aujourd’hui, et je changerai encore demain. C’était donc la mort qui mettait un terme à ces mathématiques lugubres, qui se donnait raison pour nous faire taire. Je gardai les yeux rivés vers le plancher. La voix d’Elsa ne cessait pas d’être douce et conciliante. Elle ramassait enfin les morceaux pour tenter de comprendre, et elle comprenait, me révélant des vérités que je me cachais à moi-même. « Je comprends. Je te comprendrai toujours, mais tu ne peux pas mourir dans quinze heures pour accomplir une prophétie que tu as créée de toute pièce. Tu n’es pas supposé souffrir. Tu ne peux pas avoir peur des gens que tu aimes. Je veux que tu sois heureux, pas amoureux parce que j’ai des principes, mais je le veux vraiment. C’est ma condition pour cesser de t’aimer. C’est bien pensé. Je gagne à tous les coups. » Oui. Elle gagnait, cette fois. Elle gagnait en me transperçant d’une flèche de vérité, d’évidence, de sentiment pur et plein d’extase. Elle me disait qu’elle m’aimait en me donnant le moyen de la faire cesser. Et cela me brisait le cœur, car elle pointait du doigt celui-ci en plongeant ses mains dans ma poitrine béante et le saisissant pour l’aider à battre, ignorant le sang chaud et gluant qui salissait ses mains de fée : elle voulait simplement me prouver que j’en avais encore un. Je l’imaginai ainsi, se penchant au-dessus de moi, de mon corps disséqué, à l’air libre, frôlant délicatement mes organes un à un pour leur redonner la force qu’ils avaient perdue, que j’avais moi-même égarée par mauvaise volonté. Mes poumons perforés au goût de cendres. Mon foie fragile et tuméfié. Mes intestins noueux, tendus, crispés comme un étau autour de mon estomac vide et acide, brûlant de l’intérieur. Ma gorge calcinée comme l’écorce des arbres après un incendie. Mes veines bleues et froides, canaux de mon mépris glacial. Mes artères bouchées par les échecs d’une vie passée à ne plus rien attendre. Et, au milieu, comme un roi déchu de ses fonctions, mon cœur qu’Elsa malaxait entre ses mains, avec une délicatesse étrangement couplée de fermeté. Elle ne me faisait pas mal. Je m’étais fait ces maux tout seul, elle avait raison à nouveau. Non, au contraire, elle débloquait des conduits condamnés, ceux de mes espérances biaisées mais également celui de mon désespoir, car il était unique et grimpait jusqu’à mes prunelles pour y laisser le sang s’y injecter. Le blanc de mes yeux rougit et, alors que j’imaginais encore ce même sang couler de mes lèvres suite à l’opération mystique, ce fut une larme qui se forma sur mes cils, qui perla au coin de ma paupière et qui glissa sur mon visage émacié et creux. Elle disparut quelques part dans mon cou et je la lassai partir comme on oubliait un rêve, car apparemment, c’était de ça qu’il s’agissait. C’était de ça dont Elsa me parlait avec tant de ferveur, tant de détermination.

Le silence retomba en même temps que le vide sur mes épaules et je ne pris pas la peine de regarder Elsa pour lui répondre. Elle ne voulait pas voir la perdition sur mes traits. J’ignorais si elle avait vu cette larme étrange, celle qui ne coulait jamais sur mes joues car je lui avais interdit, mais qui pourtant était née comme un bourgeon au printemps pour se faner immédiatement contre ma peau automnale. Elsa sentait les fleurs de l’été. Cependant, elle me l’avait avoué : elle comprenait. Que comprenait-elle ? Pourquoi comprenait-elle quelque chose que je peinais moi-même à saisir ? « J’ai essayé de dormir. » Et ce, avec toute la volonté du monde, car c’était une malédiction terrible que de ne plus pouvoir guérir naturellement et d’être obligé de panser ses plaies ailleurs que dans ses rêves. « J’ai essayé de manger. » A nouveau, je ne mentais pas. La sincérité était la fille du désespoir et il était trop flagrant pour qu’elle doute de ma franchise. Mais les aliments ont un goût de cendre sur mon palais, et tes sourires n’y changent rien. Je hoquetai : mon cœur venait de manquer un battement car l’émotion était beaucoup trop douloureuse. « J’ai essayé de prendre mon médecin au sérieux. » Car ce n’était plus un problème que de suivre ses conseils. Il fallait déjà que je les entende avant de pouvoir les considérer. Mais j’avais échoué, à nouveau, et la liste était encore longue. Je relevai finalement le menton et braquai mes prunelles noires sur elle : j’étais mort et elle ne le savait pas encore. Il était temps que je lui apprenne la nouvelle. « J’ai essayé de sauter du toit d’un immeuble, mais ça non plus, je n’ai pas réussi à le faire. » Puis, un soupir. Un simple soupir sur un aveu macabre. Je ne suis pas malade. Je veux simplement mourir. Je me moquais de sa réaction car la tentative de suicide avait été truquée dès le départ, mais l’effet du vide sur l’esprit humain restait le même : je vivais un perpétuel vertige depuis cette nuit que je ne parvenais pas à oublier. « Regarde-moi, Elsa. » Mon ton, quoiqu’autoritaire, vibrait d’une mélodie résignée. « Je me suis rendu malade. Mais je n’ai pas le courage de guérir. » Les causes n’avaient plus d’importance car les conséquences se ressemblaient. J’allais mourir. J’étais déjà en train de mourir, semant derrière moi l’odeur âpre de la perte et de l’absence partout où j’allais. Elle n’était pas capable de me ranimer. J’effleurais la silhouette de mon père et acceptais ses décisions un peu plus chaque jour. Je pouvais bien tout abandonner pour pousser un dernier soupir paisible, marquant le début d’une longue trêve que lui et moi attendions depuis que j’avais su penser, depuis que j’avais dû grandir.
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() message posté Jeu 3 Mar 2016 - 0:26 par Invité

“You are terrifying and strange and beautiful. Something not everyone knows how to love.”   C'était une sensation terrible. Thomas était un spasme du cœur et de la pensée. Je ne tremblais pas. J'avais mal. J'étais rongée par le souvenir d'un baiser qui avait effleuré ma conscience. Il avait réveillé quelque chose en moi. Il m'avait ouvert les yeux sur la réalité de mes sentiments. J'étais en suspens depuis des années. Je l'avais attendu sur le perron, les yeux rivés sur le ciel et ses arcs majestueux. J'avais chantonné en balançant mes jambes au gré du vent. Tout ce temps, je n'avais fait que l'attendre. J'avais peur de grandir. J'avais peur qu'il m'oublie si, par malheur, je prenais une allure de femme aguicheuse. J'étais encore là, je me cachais derrière l'apparence d'une noblesse révolue. Mais j'étais toujours une petite sœur. Je répondais à l'extase de nos retrouvailles en m'inclinant, en choisissant d'accomplir la mission qui m'avait été accordé. Ma légende personnelle. Ma seule ambition. Et toi, Tomtom. Que vois-tu maintenant? Mon visage immaculé, mes lèvres fébriles, la pointe de ma langue, les vibrations de ma poitrine, parce que j'en avais une, j'avais des courbes, des cuisses et un corps infecté. Quelle créature pouvais-je devenir maintenant que mes cris se mêlaient aux rires des farfadets et que ces derniers me rejetaient. Je ne brillais pas dans l'ombre. Je ne faisais qu'aspirer son haleine vespérale afin de miroiter l'étincelle espiègle d'une étoile. La certitude que nous allions tout les deux disparaître me serrait la gorge. Je relevai la tête en esquissant un faible sourire. Dans quinze ans, je me lèverais à l'aube pour ranger mes affaires et quitter la pénombre de la chambre. Je descendrais les marches. Je tituberais dans les couloirs tortueux de nos mémoires effacées et je porterais mon petit cartable d'écolière. Je laisserais Thomas derrière moi afin de rejoindre le quotidien morose de ces personnes malades qui chancelaient de douleur. Je m'habituerais aux pertes d'équilibre et de conscience. Et il resteras en moi comme une image fixée sur un médaillon doré. Je le garderais parce qu'il était l'accomplissement de mon rêve improbable. Il avait toujours été différent. Depuis son plus jeune âge. Sa relation avec son père constituait un complexe imparfait, mais j'étais résignée à voir de l'amour dans ses rébellions, ses piques et son attitude cruelle. Il cherchait une révélation que je lui offrais tous les jours. Mais j'étais insuffisante. Je n'étais pas William. Je n'étais pas la rivière. Je n'étais qu'un rayon de lumière qui se brisait dans le silence. Je me redressai lentement. Mes articulations étaient rouillées par une rotation que je n'arrivais pas à compléter. J'étais immobile, les jambes repliées contre le visage, les cheveux recouvrant les larmes qui séchaient au coin de mes yeux opalins. Je sentais une odeur particulière. Les émotions se matérialisait sous mon regard vitreux comme des filaments d'une poussière qui flottait entre les parois de notre prison sinistre. Je n'arrivais pas à m'en saisir. Je ne parvenais pas à tendre les bras. Mais je capturais cet onguent en battant énergétiquement des cils. Je l'envoyais vers la silhouette de Thomas comme un baiser, comme une caresse qu'il ne pouvait plus ignorer. J'avais l'impression de dépérir. Je ne savais pas vivre sans lui. Un poignard s'enfonçait dans ma poitrine à chaque fois qu'il prenait une direction opposée. A chaque fois qu'il quittait les vastes plaines de Glastonbury pour s'évanouir entre les vapeurs des moteurs et les bâtisses grises de la capitale. Je sacrifiais mes derniers souffles. Je lui accordais toutes mes pensées et les souvenirs de cette plénitude qu'il avait oublié. L'ardeur de ses sentiments rapetissait dans la distance qu'il imposait au monde. Mais l'ardeur de ses sentiments était aussi accrue, elle existait dans mon corps, elle faisait trembler mes os et ma chair. Elle se consumait dans ma gorge avant de me noyer dans un magma brouillonnant de rage. J'étais fatigué de vivre pour deux. J'étais fatiguée d'être seule. J'étais aussi en colère. Je me détestais à cet instant. J'étais finalement parvenue à le ramener. Je le voyais dans l'éclat métallique de son regard. Je pouvais le ramener. Mais les symptômes dépassaient ma résistance. J'étais malade et je n'avais pas le temps de le sauver. Je le fixais au loin. Une larme perla au coin de mon œil affligé. Une larme si épaisse qu'elle prenait forme de l'autre côté du miroir, sur l'expression fanée de Tom, au creux de sa joue et sur son cou. Je soupirai en essayant de me lever. Mes poignets s'inclinaient alors que je rampais sur le sol encore poussiéreux. Je traînais au milieu des mégots de cigarettes et des reliures de livres. J'avais toujours peur. Je laissais des traînées de cendre dans mon sillage. Je les appelais perles de follet et Thomas ne voyait que l'hydrogène sulfuré. Il ne s'agissait que de réactions chimiques, des composantes qui s'entassaient dans un fond combustible avant de noircir sous l'effet de l'air. Je m'arrêtai à plusieurs mètres. Pouvait-il entendre la chanson ? Cette mélodie qui rasait les murs dans le silence assourdissant. L'apparence n'était plus qu'une réalité agonisante qui brûlait dans sa propre ironie. Le sarcasme n'était pas une arme fatale. Tom l’utilisait comme un rempart. Il prenait de la hauteur, toujours et encore. Mais quelle était la limite du ciel si on ne croyait pas au nom des divinités ? Les nuages étaient lassants. Les anges étaient ennuyeux. Je haletai doucement avant de reprendre ma marche disgracieuse. Mes genoux s'enraillaient contre le parquet. Mes ongles se pliaient, accumulant tous les vices qu'il versait dans cette chambre. Je ne voulais pas le voir pleurer. Je ne voulais même pas imaginer le crissement de ses sanglots. Je suffoquais en atteignant ses jambes. C'était le premier fragment et il y en avait encore d'autres. Une infinité de morceaux. Je tâtonnai sa cheville, aveuglée par le silence. Je ne l'entendais plus. Sa respiration avait disparu. Je me redressai, affolée par son absence de réactivité. Je saisis son pouls contre ma paume fébrile. Je me concentrai un instant, puis les lentes cadences de son cœur méprisant vinrent vibrer contre ma peau. Je plissai les yeux en laissant échapper un rire enfantin. Il avait un pouvoir lui aussi. Il me faisait croire que la lune dansait lorsque les malades chantaient. Il me faisait croire que la beauté se cachait dans les recoins les plus sombres de ce monde, qu'il était beau après ses chutes et qu'il le serait encore demain, lorsque sa poitrine affaissée glissera sur le rebord du lavabo après avoir ingurgité une dose létale d'anti-dépresseurs. « J’ai essayé de dormir. » J’acquiesçai en recoiffant nerveusement ma frange. Il me manquait. Pas à cause du baiser, des souvenirs ou de son agonie. Il me manquait, c'est tout. Je frémis en lui adressant un sourire blafard. J'essayais de dormir aussi. Cela nous faisait un point en commun, comme les vrais amoureux. « J’ai essayé de manger.  » Je m'inclinais, bercée par les sonorités de sa voix enraillée. Ma tête se posa sur le mur. Sa fraîcheur sinistre se rajoutait à l'agitation de mon esprit ravagé par la dopamine. Le son était devenu filiforme. La mélodie survenait dans un égarement insignifiant. Il le ressentait lui aussi. L'émotion qui germait au cœur du cœur, celle qui coulait dans ses veines ischémiques. C'était beau, n'est-ce pas ? Un autre genre de chaos. « J’ai essayé de prendre mon médecin au sérieux. » Je soufflai entre mes doigts glacés. Les chants continuaient de battre contre mes tympans. L'essence enivrante des champs sauvages et de l'herbe boueuse. La liberté. La possibilité de choisir la mesure de chaque souffrance. Il avait essayé et j'étais reconnaissante.  « J’ai essayé de sauter du toit d’un immeuble, mais ça non plus, je n’ai pas réussi à le faire.  » Je fronçai les sourcils en couinant. Je sentais le choc contre la surface du bitume. L'échec, le mal et le tintement de son squelette pulvérisé au bout de la nuit. J'enfermais mes sanglots dans une petite boite. J'oubliais mes angoisses afin de me concentrer sur ce deuxième morceau qu'il me faisait découvrir. Je tendis mon pouce vers son épaule mais je ne le touchais pas. Ce n'était pas les blessures physiques que je pouvais à soigner. La magie ne s'accordait que dans l'invisible. J'étais inutile s'il devenait suicidaire. « «Regarde-moi, Elsa. » Il m'impressionnait toujours. Je baissai les yeux afin de lui obéir. Mes prunelles saignaient au contact de son visage. Mon souffle se mouvait sur ses traits saillants. « «Je me suis rendu malade. Mais je n’ai pas le courage de guérir.  » Je comprenais. Je réalisais. Maintenant, il me fallait accepter. Je chancelai au dessus de son profil. Ses boucles noires ondulaient dans la pénombre. Il était entouré de ces éléments nocturnes et inextricables. Thomas était une créature des ténèbres et je ferais mieux de m'écarter de son ombre. Il voulait exploser en portant avec lui le péché suprême. Je ne pouvais pas gérer sa décadence. Je devais la stopper à son origine. « Tu n'es pas obligé de guérir. Je ne vais pas guérir. » Annonçai-je avec candeur. Il n'y avait pas de miracle pour les parkinsoniens. Ils étaient juste malades. S'il ne guérissait pas, cela nous faisait une autre similitude. Mais cette fois, nous n'étions plus de vrais amoureux. Nous étions devenus les étoiles déchues. Les constellations maudites. « On peut vivre ou mourir. Mais ce n'est pas bien de faire semblant. Tu es mon héros, tu n'es pas supposé sauter des toits et te sacrifier pour ta cause. Tu es mon héros, tu dois penser à moi. » Je frissonnai en effleurant sa joue.  Je sentais à nouveau la rage broyer mes entrailles. Mon humeur basculait. Mon venin perlait au bout de ma langue engourdie. «Tu es ma famille. Si tu me laisses je n'ai personne. Ce n'est pas un crime d'aimer les choses qu'on explique pas. Ce n'est pas un crime de t'aimer comme ça.» Le dévouement ce n'était pas ouvrir la fenêtre et sauter pour le rejoindre au fond du trou. Le vrai amour, c'était la main frémissante que je posais sur son cou pour le remonter vers la lumière. Mes soupirs alourdissaient l'atmosphère. Ma voix grinçait entre mes dents. Je ne réalisais même pas que les larmes roulaient sur mes joues. «Tu ne perds rien. Si tu sautes tu ne perds rien du tout ! Tu me rend orpheline mais tu ne perds rien. Est-ce que tu peux, toi, me regarder ?Tu es tellement injuste. Et si tu me sors une phrase de Machiavélique ou n'importe quelle réplique du siècle des lumières je jure que je vais te taper !» Je le secouai légèrement. Je le suppliais en froissant les plis de son t-shirt. Je ne pouvais pas abandonner. «Tu as dis que tu voulais me voir heureuse et amoureuse. Je le ferais. Mais tu peux pas me laisser avant que j'y arrive! Tu ne veilleras jamais sur moi d'en haut. Tu es trop con. Si tu meurs je ne te le pardonnerais jamais! Si tu me laisses je te déteste !» J'étais sérieuse. Il ne s'agissait plus qu'une simple allusion. Je pouvais le maudire pour l'éternité. Je me forcerais à me souvenir de toutes ses paroles et chaque jour je cracherais sur sa tombe. J'étouffais dans mes ressentiments. «Tu me prendrais dans tes bras si je le demandais ?» Parce que je le demandais. Je le voulais. Mais il n'avait pas la force de bouger. Après tout, il était pathétique comme moi.
 
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() message posté Sam 19 Mar 2016 - 16:15 par Invité
Les aveux m’écorchèrent la gorge. Ils étaient trop nombreux, se pressant contre mes lèvres pour sortir et contre mes prunelles pour laisser cette larme couler, discrète et pourtant si présente. J’étais incapable de bouger pour l’essuyer, tout comme j’étais incapable de guérir. Je sentis ma maigreur étouffer mon esprit un instant, tandis qu’Elsa se rapprochait lentement de moi, muette car découvrant enfin le revers de la médaille. Elle s’était bornée à l’occulter si longtemps qu’il la frappait aujourd’hui de plein fouet. Nos cœurs saignaient à l’unisson. Je voyais ma blessure s’ouvrir et laisser glisser mon âme qui s’enroulait malicieusement autour de mes doigts pour leur échapper. Je n’entendis pas ses gémissements, car comme d’habitude, je ne les prenais pas en compte. Pourtant, ses sanglots sonnaient comme des accords évidents, des cadences à mes mots trop sévères, à ces vérités que j’avais peintes devant elle. Ai-je vraiment tenté de me suicider ? Cela me paraissait à la fois profondément juste et terriblement faux. J’avais tenté de brasser les ténèbres pour savoir si je pouvais leur résister, mais j’avais été confronté à l’échec cuisant de ma manœuvre, crachant des paroles acerbes et dédaigneuses à l’attention d’un corps que je ne considérais plus que comme celui d’un malade. Je suis presque vivant. Pas tout à fait, tu vois. Etait-ce cette nuance qui avait eu raison de moi ? J’étais à présent apathique et éreinté, gisant sur le sol devant la femme qui n’avait jamais cessé de m’aimer, ne serait-ce que l’espace d’une seconde, car elle avait peur que ce sentiment de plénitude ne revienne jamais si elle le laissait tomber. Elle était une enfant à mes côtés. Une enfant dont le frère, le seul parent, mourrait sous ses yeux sans qu’elle ne puisse remédier à sa chute. On ne soignait pas la mort elle-même. Trop d’idiots avaient tenté avant nous pour que nous nous abstenions aujourd’hui de le faire. Je voyais la couleur fade de ma peau dans les pétales fanés des fleurs qui trépassaient à l’automne, et Elsa les ramassait pour en faire des colliers, leur redonner un éclat tendre et juvénile que je refusais de voir. Je soupirai. Je pouvais tant lui dire. J’avais déversé tant d’injures sur sa poitrine fragile qu’elle avait fini par polir pour laisser glisser les suivantes. Elle avait déjà tout entendu, tout vu. Et elle observait cette larme sur ma joue comme naissant dans mon cœur pour mourir dans le sien. C’était d’un romantisme macabre. N’étions-nous donc que deux amants gothiques et lugubres, ne se familiarisant qu’avec une infinie souffrance, contemporaine des amours interdits ? Je refusais d’aimer. C’était le poison de trop, l’injection létale dans le corps d’un patient qui ne serait jamais prêt. Je ne voulais infliger cela ni à moi, ni à l’autre, et même si la distance ne servait qu’à cacher des vices pour mieux les assumer ensuite, Elsa n’avait jamais attendu que je lui manifeste le moindre signe de cet amour hybride pour le ressentir en elle. J’aimais de loin. Je lui avais assez répété pour qu’elle se braque, le refuse et m’embrasse. Voilà qu’elle se pressait contre mes jambes et cherchait à atténuer la douleur en pansant des plaies avec des bandages déchirés, déjà sanguinolents de mépris et de rancœur. Je finis par sentir ses mains qui glissaient maladroitement sur ma peau et je tressaillis, des frissons parcourant ma colonne vertébrale pour mourir dans mon cou. A nouveau j’étais immobile et muet. Je l’entendais haleter, je l’entendais pleurer, mais ces sons me paraissaient si familiers que je la laissai simplement faire. Je regrettais déjà mes aveux. Toute vérité ne semblait pas bonne à dire et je lui avais menti trop de fois déjà : elle savait reconnaître ma sincérité mieux que personne.  

« Tu n’es pas obligé de guérir. Je ne vais pas guérir. » Elle semblait en pâtir mais vivre avec, bien mieux que je ne réussissais à le faire. Elle existait malgré la douleur. A l’inverse, je me définissais comme un réprouvé piégé dans une géhenne qu’il avait fondé lui-même. Je souffrais pour souffrir. Il n’y avait plus aucune logique brodée à mes actes car j’avais trop mal pour y réfléchir. « On peut vivre ou mourir. Mais ce n’est pas bien de faire semblant. Tu es mon héros, tu n’es pas supposé sauter des toits et te sacrifier pour ta cause. Tu es mon héros, tu dois penser à moi. » Sa voix était forgée dans la plainte et la colère. Elle incendiait les fameuses vérités qui fusaient entre ces quatre murs. Elle y croyait mais ne les acceptait pas. Elle se rendait compte brutalement qu’elle était à deux doigts de me perdre et s’accrochait subitement à mon corps en lambeaux en effleurant ma joue avec une tendresse mélancolique. Je n’étais pas le chevalier de ses rêves, mais ce n’était pas grave. Elle ne voulait pas que je fasse semblant de l’être, après tout. Et tout le quiproquo se tenait dans cette nuance : je pensais devoir prétendre alors qu’elle me demandait d’être. Mais je ne suis pas, Elsa. J’ai l’impression d’être vide. Il avait fallu ces trente longues années pour l’admettre et la lande que foulait à présent mon esprit à l’intérieur de ma carcasse était stérile. Plus rien ne voulait y repousser. Je m’étais vanté du feu qui m’animait bien trop longtemps, bien après l’avoir laissé me consumer. Une terre brûlée – voilà sur quoi mon âme marchait et elle ressentait en elle une horrible fierté, celle d’un exilé mourant dans le désert, la gorge sèche et la rétine encombrée de mirages. Les illusions avaient été vaines et leurs contraires trop violent. Je n’avais rien aperçu dans ce ciel opaque, assis sur ce rebord fatal : les étoiles s’étaient cachées derrière les nuages pour ne pas éclairer mon visage et les démons qui habitaient mes traits comme les anguilles s’emparaient de l’abysse. « Tu es ma famille. Si tu me laisses je n’ai personne. Ce n’est pas un crime d’aimer les choses qu’on explique pas. Ce n’est pas un crime de t’aimer comme ça. » Mais pourquoi ressentais-je une si grande peine alors ? Pourquoi le visage de ma mère me laissait-il si indifférent et celui de mon père si morose ? Pourquoi le sien ne m’évoquait que des injures à la beauté alors qu’elle pouvait rendre heureux n’importe quel homme ? Pourquoi le mien me faisait-il si peur lorsque je fermais les yeux et qu’il me regardait en rêve ? Ce n’était pas un crime mais j’avais l’impression d’avoir les paupières bandées et les pieds sur l’échafaud. Je voulais sauter pour mourir moi-même, comme pour me contrôler une dernier fois et choisir avant de disparaître à jamais. Ce n’était pas un crime de m’embrasser mais mes lèvres avaient un goût de cendres et mon haleine l’odeur du soufre – autant voler un baiser sulfureux à un cadavre. Ce n’était pas un crime de m’aimer. C’était simplement une grave erreur que je ne voulais pas qu’elle fasse, mais il était trop tard à présent. Sa main fébrile posée sur ma joue me prouvait qu’elle était déjà tombée dans le piège et qu’il se refermait sur elle à mesure qu’elle approchait. Je la laissai faire. C’était si agréable que je n’avais plus la force de réprimer ses attentions. Ne sentait-elle pas le bout de ses doigts brûler ? Elle ne se voyait même pas pleurer. Elle souffrait pour moi sans se soucier d’elle-même. Sois égoïste, Elsa. Lève-toi, laisse-moi et vis pour toi-même. Je n’avais pas encore saisi l’enjeu du problème : elle ne savait vivre que pour les autres. « Tu ne perds rien. Si tu sautes tu ne perds rien du tout ! Tu me rends orpheline mais tu ne perds rien. Est-ce que tu peux, toi, me regarder ? Tu es tellement injuste. Et si tu me sors une phrase de Machiavélique ou n’importe quelle réplique du siècle des Lumières je jure que je vais te taper ! » Son innocence aurait dû m’arracher un sourire mais je restai silencieux, confiné dans un mutisme douloureux auquel elle ne voulait plus prendre part. Je ne lui accordai pas le regard qu’elle me demandait. Elle avait l’habitude, de toute façon, puisque c’était l’excuse que j’énonçais à chaque fois. Puisque je n’avais ni honneur, ni dignité. Puisqu’elle aimait un traître qui laissait la morale fermenter sur le sol pour qu’elle ne devienne qu’une sombre maxime oubliée. Elsa flamboyait d’une colère que je ne lui connaissais pas. Elle me paraissait si violente et pourtant si justifiée. Elle semblait s’écraser sur moi comme une vague qui déferlait sur un récif sauvage et isolé, sans relâche ni succès. « Tu as dit que tu voulais me voir heureuse et amoureuse. Je le ferai. Mais tu peux pas me laisser avant que j’y arrive ! Tu ne veilleras jamais sur moi d’en haut. Tu es trop con. Si tu meurs je ne te le pardonnerai jamais ! Si tu me laisses je te déteste ! » J’entrouvris les lèvres, les yeux rivés vers les lattes sales du plancher usé par nos ressentiments. Car malgré tout, elle ne me détestait pas encore mais elle pouvait toujours cracher sur mon cadavre sans aucune satisfaction. Je ne la libérais pas dans la mort. Je doutais même de pouvoir m’y libérer moi-même, mais c’était une expérience qu’il me fallait tenter pour le savoir. Elsa était un ange : elle refusait cette mort car il n’y avait que la vie pour sublimer l’éternité. Elle me le disait dans ses soupirs endormis, la nuit, au creux de mon oreille trop attentive. Elle soufflait les mots espoir et liberté avec cette insouciance qui la caractérisait tant. N’avais-je donc pas fait assez d’efforts ? Elle avait évité les écueils de ma pensée avec adresse car elle savait se protéger de mes ténèbres. Elle vivait avec moi. Mais elle était la seule à vivre.      

« Tu me prendrais dans tes bras si je le demandais ? » Sa voix était certes plus douce, mais son agressivité s’y agrippait toujours pour la rendre autoritaire. Elle me l’ordonnait. Elle m’intimait de le faire avec toute sa force et imposait enfin son droit. Nous avons le droit d’aimer. Et si je ne voulais pas en jouir de mon côté, elle n’allait pas s’en priver en l’honneur de ma mauvaise humeur. Je fermai les yeux et fronçai les sourcils, laissant échapper un sourire. Elle avait gagné, cette fois. Et probablement toutes les fois qui suivraient celle-ci aussi, puisqu’elle avait le courage de vivre et qu’elle n’avait plus à se battre contre un homme déjà mort. C’était une alliance, plutôt. Un remède. Un élixir pour me ressusciter. Ils semblaient se presser à ma porte pour y parvenir mais Elsa était sûrement la seule à en être capable. Mes doigts s’ébranlèrent et je me redressai avec difficulté, écartant les bras pour l’accueillir, résigné. Je posai mon menton sur son épaule et laissai ma tête se relâcher au creux de son cou. Mes muscles ne se crispèrent pas. L’étreinte était si étrange mais si salvatrice. Pouvait-elle sentir le poids de mes remords déferler sur ses clavicules de poupée ? Je ne prononçai pas le moindre mot. J’accordai simplement ma respiration à la sienne, devinant sa douceur alors que mes paumes glissaient lentement sur sa peau, et puis, tout simplement, je me figeai comme le marbre pour m’imaginer ressentir quelque chose. J’essayai avec force et volonté : son parfum sucré et entêtant était comme une traînée dorée que je devais suivre, mais mes pieds s’enlisaient dans la boue et j’avais l’impression d’étouffer. Que sommes-nous devenus, Elsa ? Qu’étais-je devenu, la question s’arrêtait là, puisqu’elle était manifestement restée le même farfadet espiègle et caractériel que j’avais connu si jeune, si innocente. J’inspirai l’air qui nous entourait mais il avait son odeur fruitée, ses teintes douces et claires malgré la pénombre et le tabac froid. Voilà. Mes bras sont froids et secs mais tu peux t’y perdre. Mon corps est maigre et malade mais tu as eu l’étreinte que tu voulais. J’ignorais si je la décevais. Peut-être que ma larme avait un pouvoir à présent que sa peau l’avait séchée. Pourtant, je ne savais pas quoi dire. La tristesse me nouait toujours la gorge et la colère d’Elsa m’avait surpris d’une manière si singulière que j’étais incapable de prononcer le moindre mot. Incapable de lui rétorquer qu’elle avait tort, qu’elle se leurrait ou bien qu’elle espérait des choses qui ne viendraient jamais. Elle venait de me prouver le contraire, il fallait simplement que je prenne au sérieux le seul rôle qu’elle me demandait de jouer : celui d’un être vivant. Et si je ne pouvais pas vivre pour moi, autant vivre pour elle. Ma mâchoire trembla un instant avant de se relâcher pour souffler les seuls mots qui me vinrent à l’esprit. Les seuls mots que sa clarté m’inspirait, puisqu’au lieu de s’opposer à mon ombre, elle s’y mariait avec grandeur pour rendre le tableau plus riche, plus réel, plus vivant. « Je suis désolé. » Et c’était d’une sincérité poignante. Je m’excusais pour le passé et pour le futur, comme un héros, comme un traître, comme un frère, comme un inconnu, parce que je la décevais et l’injuriais, parce qu’elle brûlait par ma faute et que j’étais finalement subjugué par le mouvement de ses ailes déployées vers le ciel lorsqu’elle passait outre mes jugements, outre mon acrimonie. Je flamboyais, mourrais et elle renaissait de mes cendres pour me tirer vers la lumière.
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Anonymous
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() message posté Sam 28 Mai 2016 - 17:02 par Invité

“You are terrifying and strange and beautiful. Something not everyone knows how to love.”   Les mots étaient difficiles à écorcher. Mon esprit vacillait sans cesse, perdu dans un tourbillon de pensées. Je n’avais aucun sentiment, puis tout à coup, je ressentais toutes ces émotions versatiles. Il n’y avait personne à blâmer. Mon cœur trônait comme une pièce précieuse au milieu de la pièce. Je voyais les serpentins qui s’enroulaient autour de nos silhouettes déchirées. Un symbole festif, une dernière attention. Thomas ne le remarquait plus, mais il y avait de la joie entre nous. Les souvenirs étaient faits de lumière. Je pinçai les lèvres en m’allongeant à ses côtés. Mes mains étaient libres de le toucher. Mes doigts effleuraient les bords de sa mâchoire saillante. Pendant une fraction de secondes, je n’étais plus une sœur, je n’étais plus la gamine ou le reflet de la rivière. Le farfadet de ses contes enfantins se noyait dans le silence. Les fleurs des champs se fanaient sous son regard ténébreux. Je le décevais certainement, mais je voulais comprendre. Je désirais tellement de choses. Le voile glissait lestement sur mes côtes, il tombait sur mes chevilles avant de s’écraser sur le parquet. On aurait pu être magnifiques. Je souris en fixant l’expression de Thomas. Malgré ses remarques acerbes, je demeurais persuadée que nos éléments se chevauchaient afin de mieux se compléter. Il détenait notre sort tout entier. Il choisissait de mourir et je devinais entre ses soupirs discrets et la larme singulière qui perlait au bord de son iris, qu’il souffrait de façon inexorable. Je possédais bien plus de vitalité que je ne le méritais. Mon corps était gorgé de vie, de mouvements volontaires et d’autres incoordonnées. La maladie devenait une extension de mon âme. Je n’étais plus prisonnière de ses chaînes. Je n’étais plus comprimée dans cet espace morose et triste. Je papillonnai des yeux afin de découvrir une nouvelle place. Les parois des murs tremblaient entre mes cils. J’observais les décorations imposées par mon excentricité, la petite veilleuse fluorescente au coin du matelas, le parfum de lilas et de lavande … Ce n’était qu’un mensonge. Je n’étais qu’une menteuse. Ma gorge se serra brusquement. Je lui faisais du mal. Depuis mon arrivée, je n’avais fait que l’oppresser. Il y avait une mesure à respecter, une distance à maintenir. Mais est-ce réellement l’image de la famille ? Mes ongles ondulaient autour de sa chevelure ébène. Je sentais mon poignet se courber face à sa couronne ombrageuse, comme pour prêter allégeance à sa chute. Je ne voulais plus le retenir. Maintenant, je voulais l’accompagner. C’était étrange. J’avais besoin d’aimer ce démon. Ma bouche gardait encore la marque de sa morsure. Le baiser corrosif, la chair brûlante sur la peau calcinée. Il y avait un goût d’amertume sur ma langue. Je n’étais pas déçue de l’avoir touché. J’étais triste parce que nos retrouvailles revêtaient toujours ces allures de départs. Je revenais immanquablement vers ses promesses déchues. Je relevais ma petite tête vers la fenêtre et la voiture n’était plus là. Ne t’en vas pas, s’il te plaît. Je me tenais sur la corde raide. Je m’accrochais aux bords tranchants du plafond. La lutte était interminable mais je rêvais de protection. Et lorsque j’ouvrais les yeux, les effluves du tabac enlaçaient ma poitrine. Le spectre de nos espoirs était encore là. Il s’agitait autour du monde que je peignais de mille couleurs. Je ne savais pas exister dans la solitude. Papa était parti. William était mort. Thomas n’avait pas le droit de me quitter. La colère coulait dans mes veines comme une poudre cristalline. Je me sentais grandir entre ses pulsations frénétiques. Il ne me répondait plus. Mais je l’entendais. Je l’écoutais encore. Ma quête était inachevée. Mes rêves étaient inachevés. Mon amour était une ébauche. Et le phénix ne revenait pas. Nous étions entourés de cendres mais l’oiseau de feu n’était qu’une légende. Ici, je ne voyais que des fantômes, des illusions grotesques et le plumage sépulcral du corbeau. Celui qui posait ses griffes sur mes épaules. Celui qui effleurait mon cou avec la pointe de son bec. Je n’étais pas de plan. Je courrais simplement, parcourant les sentiers et les ruelles qui s’allongeaient sous mes yeux. Il suffisait de vivre. Il n’y avait pas d’énigme ou philosophie. La clé n’existait pas. Je sentis un frisson traverser mon échine. L’affection était un échange d’étreintes. Un besoin de nœuds, de complications physiques. Il aurait pu me prendre à cet instant. Me tenir comme une créature fragile et me briser contre les stalles métalliques de son antre secret. Pourtant, il ne faisait que se conformer à l’image que je lui indiquais. Il répondait à ma requête sans excès. Son souffle chatouillait mes clavicules. C’était le poids de ses chagrins oubliés, le cadeau qu’il m’offrait pour tous les Noel à venir. Je souris en m’agrippant à sa nuque. Les arcs de sa cage thoraciques se comprimaient entre mon cœur et le sien. « Je suis désolé.» Je me redressai, surprise, par le ton suave de sa voix. Je ne sentais plus mes larmes. J’ignorais si mon expression était douce, convenable, ou si au contraire, elle trahissait mon courroux et ma tristesse. Je restai stoïque, le souffle suspendu sur son menton. J’avais assez pleuré. J’avais assez exigé des hommes. D’un geste maladroit, j’essuyais mes pommettes. J’avais déjà abandonné mes utopies. Parkinson était une bénédiction. Il m’avait rendu plus réceptive à la douleur. Il m’avait appris à aimer à contrecourant. Je souris en me penchant doucement. Ma main était engourdie, ses phalanges se tordaient comme des brindilles d’herbe sous le vent. J’avais apprécié ce spectacle un million de fois à Glastonbury. Les feuillages qui dansaient sur l’horizon. Les rayons du soleil qui transperçaient les brumes nuageuses et le givre éternel de la ville. Un éclat de rire filtra entre mes lèvres. Il suffisait de si peu pour être heureux. «Je sais. » Il ne formulait jamais ses excuses mais je les imaginais pour nous. J’entendais ses complaintes et ses confessions. Parfois, je voyais son visage dans la nuit. Je posais un sourire sur ses lèvres. Une expression sur ses prunelles. Un sentiment sur son cœur. Il ressentait tellement au travers de mes gestes. Je déglutis en jouant avec ma franche. «Je t’homes. Je sais que tu n’as rien demandé. C’est un fardeau de m’avoir sur les pattes mais on est une famille. Je voulais te changer. Je pensais que je te sauvais en t’imposant mes fantaisies. Mais si tu veux juste être comme ça. Ce n’est pas grave.» Je haussai les épaules en esquissant une moue adorable. J’étais assez égoïste pour rester. J’étais assez égoïste pour l’accepter, car mon équilibre dépendait de ses lubies. Je me redressai lentement. Mes jambes s’arquaient sous ma démarche instable. L’apathie me guettait. Mais pour l’instant, j’avais tous les pouvoirs sur mes muscles. Je tendis mes bras vers lui. «Et si on dormait encore ?» Murmurai-je dans un soupir. Ma flamme brûlait toujours. Je savais, que mes sentiments étaient précieux. Thomas Knickerbadger était un homme. Un grand. Sa stature imposante se pliait gracieusement. Il échappait au ciel mais il s’enfonçait dans la terre, dans les entrailles de la rivière qui avaient tué les garçons imprudents. Il ne s’était pas noyé. A dix ans, il avait marché en lisière, les ailes étendues à la surface de l’eau. Mais son tour venait. Son tour était là. Les sirènes l’appelaient de l’autre côté. Il pouvait les suivre. Je crispai ma prise sur son poignet. J’étais paniquée par l’éventualité de son départ. Peut-être devais-je m’en aller en premier. Peut-être devais-je tourner le dos et faire semblant. Je l’entraînais vers le matelas. Le drap était glacé, il retombait sur nos visages affligés comme les rideaux d’une scène déserte. Il n’y avait aucun spectateur. Ce soir, nous étions uniques.  


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