A twist in our stories ☼ Rikcy

Me dévaloriser, c’était un peu ma seconde nature. J’étais sans cesse en train de dire que je n’étais pas douée pour ceci ou pour cela. Parfois, c’était pour que l’on me plaigne, mais la plupart du temps, je le pensais vraiment. Je suis plutôt mal dans ma peau, et dans ce cas précis je ne sais vraiment pas peindre. Pour la danse, je dois savoir aligner trois pas sans lui planter mon talon dans le pied.

Alors que je n’avais pas eu besoin de beaucoup insister, Rika avait accepté que je paye la moitié de la note. Du coup, je lui redonnais la moitié de ses billets et en déposait à mon tour pour compléter l’addition. C’était bien normal, même s’il était très galant et que j’appréciais beaucoup son geste. Vraiment.

Je m’effondrais sur lui à ce moment, et il posait sa main sur mes épaules comme pour m’aider à rester droite. Je n’étais pas réellement bourrée, et j’espérais qu’il ne le pense pas. J’avais simplement eu un léger déséquilibre dû à mes talons hauts. Mon visage était proche de lui. Je voulais l’embrasser, mais c’était à lui de faire le premier pas. Donc j’attendais. Pour voir.

En sortant de ce café pour nous diriger vers le Barfly, j’étais surprise de voir que nos mains ne s’étaient pas lâchées et que nous marchions, comme un couple le ferait, main dans la main. Ca n’était pas pour me déplaire. Je pouvais sentir son pouls, rapide. Sûrement à cause du stress. Enfin, le mien ne devait guère être plus lent.

« Il n’y a vraiment rien à pardonner. D’autant moins si vous avez toujours dans l’idée que nous travaillions ensemble. »
« Evidemment. Ne doutez surtout pas de cela ! »

Je m’étais arrêtée nette, et même après sa réponse, je restais quelque peu immobile, me sentant ridicule de la vulnérabilité que je laissais paraître. Il me proposait à nouveau son bras et reprenions notre marche en direction du bar. Alors qu’il recevait un message, il m’informa que la programmation du soir était celle d’un pianiste jouant principalement du jazz. Quelque chose de calme donc, pile ce que je voulais ce soir là.

« Très bien ! Je n’avais pas vraiment envie de me casser les oreilles avec une musique trop forte et trash. »

C’était vrai. Même si, à ce moment précis, je ne voulais pas de punk ou de rock, c’était aussi puisqu’en temps normal, ça n’est pas vraiment le genre de musique qui me botte. Moi, ça dépend un peu en fait. Des chansons calmes, des hits de DJ, etc. J’écoute un peu de tout, et cela me convient très bien.

Allait-il être d’accord pour danser avec moi, malgré tout ce que je lui avais fait subir ce soir ? Il fallait que j’espère. Alors qu’une légère brise parcourait mon corps, ma main serra la sienne. Je ne portais que ma robe, et n’avais pas pensé à prendre de veste. En fait, j’étais pas vraiment sensée sortir ce soir. Mais tant pis, danser allait me réchauffer. Et boire aussi.

Après une quinzaine de minutes de marche, nous arrivions dans ce fameux bar et je m’approchais du comptoir, toujours main dans la main avec Rika. Je ne savais pas vraiment quoi commander. Un verre de vin, c’est bien gentil, mais c’est un peu prude. Si je veux qu’il ait une image « jeune » de moi, il faut que je me diversifie un peu.

« Un whisky-coca s’il vous plaît. »

J’avais goûté ce breuvage un jour de déprime, et ça ne m’avait pas déplu donc pourquoi pas ? Avec Rika, nous étions côte à côte et je n’avais qu’une hâte, finir ce verre pour l’emmener danser. Ce besoin de tendresse me dévorait de l’intérieur. C’en était même assez déstabilisant. C’est ce moment précis qu’avait choisi John pour m’envoyer un message. *Tu fais quoi ce soir ? Si tu veux parler c’est maintenant, parce que là c’est le matin ici. Je bosse toute la journée et ce soir je sors. biz.* Non mais ? Pour qui il se prend ? Je détestais les « biz », et il le savait bien. Pour moi, ça n’a rien de tendre. C’est juste une façon déguisée de faire la tête aux gens.

Déjà, de un, il me reprochait de ne pas être dispo pour discuter avec lui sur internet comme quasiment tous les soirs. Ensuite, il ne me demandait même pas si ça allait. Et enfin, lui sortait ce soir et je n’avais pas mon mot à dire. Bah voyons ! Et la marmotte ?

Je ne doute pas que Rika avait dû me voir lire ce message et ranger aussitôt mon portable sans même prendre le temps de répondre. J’était en colère mais encore une fois, c’était la tristesse que je donnais à voir. Je fermais les yeux et une larme en profitait pour couler le long de ma joue. Cette fois, je ne la cachais pas. Je me contentais de rester là, comme ça.