(✰) message posté Dim 24 Aoû 2014 - 18:44 par Invité
Une bonne explication ? Non, ça ne l’était pas. Incrédule, James la dévisagea durant un long moment. Pour sa part, il affichait une mine impassible comme à l’accoutumée. Lire dans ses pensées n’était pas chose aisée et en l’occurrence, il devait faire face à un véritable chaos. Effectivement, il ne comprenait pas trop pourquoi elle s’acharnait à mettre autant de distance entre eux. Certes, c’est une situation dont il s’accommodait depuis un certain temps, mais ce n’était initialement pas son idée. Toute cette mascarade était issue des envies et lubies de Lexie. Il n’avait fait que suivre le mouvement. Parce-que c’était facile. Parce-qu’elle ne lui posait pas de questions. Hélas, James finissait toujours par se lasser de tout. Lexie ne faisait pas exception à la règle. Ou plutôt, leur relation. « Peut-être ne suis-je pas dépassé par ta manière d’agir pour la simple et bonne raison que contrairement à d’autres, j’accepte de te laisser une place. Une vraie. Je ne suis pas de ceux qui aiment nier l’évidence, tu sais, comme toutes ces personnes qui s’efforcent de te faire croire que tu vas bien, que tu n’as pas besoin de mettre ta vie en danger et tout le reste. Moi, je sais parfaitement pourquoi tu fais tout ça. Et jamais je ne me permettrais de penser ou de parler à ta place. Toi seule sais ce que tu ressens. Pour ma part, je ne fais … qu’accepter. T’accepter, toi. Telle que tu es. Lexie. Et non « Lexie, la fille malade ». C’est comme si on disait constamment, « Lexie, la fille blonde. ». Non, t’es Lexie, c’est tout. » James haussa les épaules avec un certain détachement. Il avait déjà été témoin des réactions que Lexie engendrait chez les autres. Tout le monde lui répétait inlassablement qu’elle ne réfléchissait pas aux conséquences de ses actes, qu’il ne fallait pas qu’elle se mette en danger etc… Et passons les clichés stupides du style « mais arrête, la vie vaut le coup d’être vécue ». C’était des conneries tout ça ! N’importe qui à la place de Lexie en aurait fait autant. Voire pire. Alors non, James n’endossait pas ce rôle là. Il l’écoutait et essayait seulement de la comprendre. De percevoir le monde à sa manière. « Quant à savoir si je souhaite ou non connaître les complications de ton existence et bien … je pense être le seul à pouvoir en juger. » Car là-dessus, elle avait tort. James était prêt à savoir, à écouter, à comprendre… ou du moins, essayer. Mais là encore, il ne pouvait pas faire un pas en avant sans qu’elle n’en fasse dix en arrière. « Ce que pensent les autres n’a aucune importance. Je ne suis pas « les autres ». Je trouve cependant fort regrettable que tu sois perpétuellement sur la retenue. Nier les sentiments, qu’ils soient positifs ou non, est une manière évidente de nier la vie. L’existence en générale. Efforce-toi de croire que tu es déjà morte si ça te chante. Mais pour ma part, j’arrête. Tu sais, je n’anticipe jamais les évènements. Je me laisse guider et j’essaie de ne pas trop intellectualiser mes choix ou mes envies. Il n’y a rien de pire. Mais encore une fois, je pense que tout est une question de tempérament et là-dessus, on ne peut pas dire que nous ayons grand-chose en commun. » James lança un rapide coup d’œil par dessus son épaule. Il n’avait pas la moindre envie de retourner se mêler à la foule. Encore moins de rester ici, à discuter dans le vide. Et puisque l’évidente raison de la présence de Lexie à cette soirée était son amie et leur implacable amitié, alors James n’avait plus rien à faire ici. « Si les autres prennent un malin plaisir à te plaindre, sache que ce n’est pas mon cas. » James voulait simplement lui signifier que là où d’autres ne voyaient qu’une jeune femme malade et nécessitant beaucoup d’attention et de protection, lui ne voyait que Lexie. Celle qu’elle était véritablement. « J’aurais pu me mettre à nu, là. Sans masque, sans frontière. Le frein, c’est pas moi Lexie.»
(✰) message posté Dim 24 Aoû 2014 - 23:18 par Invité
James se tient devant moi avec cet air désinvolte qui le quitte rarement. A vrai dire, au fond de moi, je m'étais attendue à me heurter une fois encore à son silence, son inébranlable impassibilité. Que je n'aurais pour réceptacle de mes névroses que son indifférence, la puissance de son sang-froid. Après tout, c'est ce qui le caractérisait le mieux. J'avais appris que ce n'était pas toujours ce qu'il ressentait, mais je ne pensais pas qu’il prendrait tant à cœur que j’en fasse de même ce soir. Pourtant, je vois que quelque chose ne va pas. Je lui ai fourni une réponse enjolivée, sobre, presque politiquement correcte pour ne pas le forcer à devoir gérer mon illogisme sans faille. Je pensais sincèrement que, comme ce que j'attendais de lui, c’était ce qu’il attendait de moi. Je respectais nos règles. « Quant à savoir si je souhaite ou non connaître les complications de ton existence et bien … je pense être le seul à pouvoir en juger. » Je fronce les sourcils, désarmée, tandis qu’il continue sur sa lancée. Je ne m’attendais pas à ce genre de discours de sa part, il me prend au dépourvu, je n’aime pas cette sensation, je ne sais pas quoi en faire. Je suis habituée à ce genre de discours de la part des autres. Toujours prompts à m’assurer qu’ils ne me veulent aucun mal, que rien ne pourrait les éloigner, que les barrières que j’érigeais finiraient par me couper du reste du monde. Tout s’arrêtait toujours à la fin de cette conversation, lorsqu’ils se rendaient compte que rien ne changerait ma manière de fonctionner. Je m’en moquais, d’ordinaire. James avait été le seul à l’entendre et à l’accepter. Tout avait été différent. J’avais cru que lui resterait, malgré tout. Les autres, non. Les autres, j’avais toujours voulu qu’ils partent. Ne rien conserver d’eux. Je voulais oublier ces hommes qui passaient, dont je préférais les étreintes sans joie à ma solitude. Mais ça avait été différent avec lui. Je ne lui avais peut-être jamais explicité mais j’avais cru qu’il l’avait compris. Et ce soir, je l’entendais simplement prendre ses distances. Comme les autres. Encore une fois. Il parle, j’assemble les mots qui semblaient virevolter autour de moi pour en comprendre le sens, et je comprends, qu’une fois de plus, j’avais tout gâché. Je ne suis même pas fichue de faire ça. « J’aurais pu me mettre à nu, là. Sans masque, sans frontière. Le frein, c’est pas moi Lexie. » « James, tu n’es pas sensé … Comment en sommes-nous arrivés à cette conversation ? Je pensais être sur la même longueur d’onde que toi. » Je prends une inspiration et détourne le regard. Créer ces frontières est d'une facilité déconcertante pour moi. Mais il ne s’imagine pas à quel point les faire tomber peut me faire mal. Pour un rien. Très facilement. Comme si je n’avais plus aucun système immunitaire contre les déceptions. « Je ne sais pas faire dans la demi-mesure. Je ne suis apparemment pas comme toi, lorsque je donne, je donne absolument tout. Et c’est à chaque fois un nouvel échec, une nouvelle déchirure lorsque la vie s’en mêle et que les choses ne se passent pas comme prévu. Je ne sais pas ce que tu voulais que je te dise, je ne sais pas ce que je pense, nous n’étions pas sensés nous en préoccuper, tu te souviens ? … Si les choses ont changé de ton côté, que notre accord ne te convient plus, d’accord, ne m’en veux pas de ne pas m’en être immédiatement rendue compte. » T’es Lexie, c’est tout. Qu’est-ce que cela pouvait bien signifier ? Il y avait tellement de Lexie différente, je ne sais plus ce qu’il a réussi à percevoir de moi. Je ne sais plus ce qu’il dit accepter. La Lexie que je montre, ou celle que je suis. Je me surprends à regretter ne pas réussir à m’excuser pour cela. J’ai l’impression que je ne peux pas lutter. Que je ne peux pas lutter si je me laisse aller. J’ai l’impression de ne pas être à armes égales. Je suis d’emblée dans le déséquilibre. J’ai perdu les réflexes. Voilà ce que je me dis. Que cette Lexie là, il ne l’imagine pas. « Tu dis m’accepter tel que je suis, très bien, me voilà. Je ne dépose pas les armes aussi facilement, elles me permettent de rester debout. J’ai suffisamment souffert, le simple fait de te l’avouer est une preuve que j’ai baissé ma garde. Tu me dis que tu arrêtes ? Arrêter quoi ? Le peu que je te montre ne te plaît déjà pas ? Ça aussi, ça me fait plus de mal que je ne le voudrais, déduis-en ce que tu veux. » Je croise les mains sur mes bras nus, reporte mon regard sur lui. J’hésite une seconde avant de lancer plus doucement, « Dis-moi ce que tu penses alors, James. Ou retournes-y », soupirais-je en le voyant déjà regarder au loin.
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(✰) message posté Mar 26 Aoû 2014 - 0:15 par Invité
Les choses ne se déroulent JAMAIS comme prévu… c’est ce qui s’appelle vivre ! Quand diable allait-elle comprendre ça ? Si tout était prévisible, l’existence n’aurait plus aucune saveur. Et bien qu’étant un éternel maniaque du contrôle, James aimait se laisser surprendre. D’ailleurs, c’était sûrement ça, sa plus grande qualité ; cette formidable capacité de tout vivre à fond, comme si chaque instant pouvait être le dernier. « Tu dis m’accepter tel que je suis, très bien, me voilà. Je ne dépose pas les armes aussi facilement, elles me permettent de rester debout. J’ai suffisamment souffert, le simple fait de te l’avouer est une preuve que j’ai baissé ma garde. Tu me dis que tu arrêtes ? Arrêter quoi ? Le peu que je te montre ne te plaît déjà pas ? Ça aussi, ça me fait plus de mal que je ne le voudrais, déduis-en ce que tu veux. » Et voilà !! Une fois encore, il fallait qu’elle en fasse des tonnes. Si vraiment tout ce qu’il connaissait d’elle ne lui plaisait pas, il ne serait pas planté face à elle à essayer de lui faire entendre le contraire. Pourquoi les femmes prenaient-elles toujours un malin plaisir à compliquer les choses de la sorte ? Bref ! Toute cette conversation n’avait probablement pas lieu d’être mais pour une fois, l’éditeur n’avait que faire des conséquences. Il laissait les émotions le guider, et c’était suffisamment rare pour être notable. Il était même prêt à en rajouter une couche, mais s’il laissa le silence s’installer quelques minutes entre eux, c’était dans l’unique but de pouvoir retrouver un minimum de contenance. « Tu recommences … tu me testes pour savoir si je vais ou non prendre la fuite. Comme le font les autres. Ou comme tu parviens à les convaincre de le faire. Sauf que moi, je ne t’abandonnerai jamais Lexie. Non, jamais.» Comme il le lui avait déjà fait remarquer, James n’était pas « les autres ». Oh il était loin d’être un homme exemplaire et ne se présenterait jamais comme un modèle de vertu, mais en aucun cas on ne pouvait lui reprocher de ne pas tenir ses engagements. De quoi avait-elle tellement peur ? « Tu as souffert, j’ai souffert. Et après ? Le monde s’arrête-t-il de tourner pour autant ? Doit-on renoncer à tout par peur d’être blessés à nouveau ? Tu veux te protéger, tu t’accroches, et au final tu n’arrives qu’à être glaçante. On est peut-être différents mais ça ne m’empêche pas d’être littéralement drogué de ta présence. Crois-moi, je ne préfèrerais pas. Mais c’est bien connu, je suis la personne la moins raisonnable de tout le pays.» La situation n’était pas si compliquée que ça à gérer, pour peu que l’on mette son orgueil de côté. Cela n’avait pas été facile pour l’éditeur, mais il avait fini par y arriver. Quant à savoir s’il allait lui ouvrir son cœur ou retourner à la soirée et bien … la question ne se posait même plus. Il lui avait tendu une main qu’elle avait refusé de saisir. Il n’était pas question de retenter une seconde fois. Tout était dit. Tout était parfaitement clair. Toujours aussi calme et posé, James replongea son regard dans celui de Lexie avant d’hausser les épaules avec désinvolture. « Je ne m’attendais pas à ce que tu comprennes, en vérité. Je ne voulais pas gâcher l’ambiance, je voulais juste que les choses soient claires. S’il fallait passer par là pour que tu entendes enfin ce que j’essaye de te dire depuis le début de la soirée, alors très bien, j’ai mis ma fierté aux oubliettes. Cela dit, puisque nous ne sommes pas sensés nous préoccuper de toutes ces choses, je propose que nous en restions là pour ce soir. Pour toujours, même. J’ai tenté d’avoir cette conversation, j’ai échoué. Puisque tu es dotée d’une incroyable capacité à faire abstraction des sentiments, des questions et du reste, je suggère que tu fasses l’impasse sur ce malencontreux échange. » Face à ses propres paroles, James recula d’un pas. « J’imagine que ton … amie … doit s’impatienter. Peut-être devrais-tu y retourner. J’ai du boulot, je vais rentrer.» Pas sûr que ce soit la vérité, mais qu’importe. James avait besoin d’être seul, de réfléchir. Ou plutôt de ne pas réfléchir.
(✰) message posté Mar 26 Aoû 2014 - 13:11 par Invité
« Tu recommences … tu me testes pour savoir si je vais ou non prendre la fuite. Comme le font les autres. Ou comme tu parviens à les convaincre de le faire. Sauf que moi, je ne t’abandonnerai jamais Lexie. Non, jamais. » Jamais. Jamais est un bien grand mot qui ne veut plus rien dire pour moi. Je me révélais incroyablement douée pour mettre à terre les convictions de chacun à mon égard. Incroyablement douée pour repousser et faire fuir les gens autour de moi. Il ne fallait pas me faire ce genre de promesses si l’on n’était pas sûr de les tenir. C’est comme ça que tout avait commencé. Cette peur folle des départs. Cette hantise de l'absence. L'impression que tout glisserait toujours entre mes doigts. Au début, j'arrivais à chasser ces inquiétudes. Mais, peu à peu, elles se sont incrustées. Je fais tout pour ne pas mériter de genre de promesses. Pour éloigner les gens avant qu’ils ne se sentent forcés de me les faire, par pitié ou compassion, ou de les tenir par obligation ou par principe. Pour ne surtout pas me mettre à y croire aussi et à l’espérer, voire à en avoir besoin. Et j’y réussis plutôt bien normalement. « Ne dis pas ça. Tu n’en sais rien, moi non plus. Demain, tu laisseras tout tomber, je ne pourrais pas t’en vouloir, c’est ce qui est prévu. Mais je t’en voudrais de m’avoir promis le contraire, alors pourquoi l’avoir fait ? » De feu et de glace. C’est comme ça que je suis perçue, Sam me le répète inlassablement. Capable des pires explosions. Ici, imprévisible, passionnée, douce. Là, distante, secrète, insensible. Je ne crois pas avoir déjà connu cette situation avec James. Jamais encore, nous nous étions quittés sur un malentendu, un échange avorté, des reproches amers et balancés des deux côtés. Je trouve ça étrange. Je suis condamnée à revivre encore et toujours ce type de scène. D’ordinaire, ça ne me touche pas. D’ordinaire, je l’ai cherché. Sauf que cette fois-ci, je ne crie pas victoire. Je n’ai rien gagné. Il suffirait que je le lui dise. Juste ça, pas besoin de grandes phrases, je pourrais simplement commencer avec cela. Mais rien ne sort. J’aimerais me contenter de ça. Me contenter de cette vie sans peur, sans rien qui brûle à l’intérieur de moi. Peut-être croit-il alors que ce qu’il dit ne me touche pas ? Qu’il peut se permettre de critiquer mes choix, de réprouver la distance que j’instaure sans que cela ne m’atteigne, simplement parce que je ne le montre pas. Mais ce n’est pas le cas. Mon visage est lisse, mon regard est dur et acéré, chacun de ses mots finit de m’emmurer dans ma dénégation. Je voudrais fermer les yeux et ne plus penser à rien, plus envie d'entendre quoi que ce soit. « Cela dit, puisque nous ne sommes pas sensés nous préoccuper de toutes ces choses, je propose que nous en restions là pour ce soir. Pour toujours, même. J’ai tenté d’avoir cette conversation, j’ai échoué. Puisque tu es dotée d’une incroyable capacité à faire abstraction des sentiments, des questions et du reste, je suggère que tu fasses l’impasse sur ce malencontreux échange. » Ce n'est pas non plus comme si je me retrouvais en face d'un homme particulièrement loquace concernant ses sentiments. Je ne sais plus ce qu’il me faut. Lorsqu’il me dit avoir besoin de moi, je ne veux pas l’entendre. Lorsqu’il me dit de l’oublier, je ne le veux pas non plus. Comment puis-je m’attendre à ce qu’il me comprenne lorsque je suis moi-même confrontée à un chaos sans nom ? Renoncer à tout par peur d’être blessée de nouveau. C’est le choix que j’ai fait. Je ne lui demande pas de le juger, pas lui. Ne croit-il pas que je ne me rends pas compte de la faiblesse qui m’habite ? Je sais simplement comment tout ceci fonctionne. Comment les sentiments peuvent vite grandir en moi, prendre toute la place, m’habiter, et comme ils me brisent ensuite. Je n’ai pas envie de continuer, de retenter le sort, je suis intimement persuadés qu’ils me laisseront un jour à terre, sans vie. Inutile de forcer les choses. La médecine s'en chargera très bien avant. « Très bien. » Cela sonne dur. Bien trop peu en comparaison de ce qu’il venait de me dire et tout ce que j’aimerais répliquer. Mais je lui en veux. De nous avoir conduits sur ce chemin. De m’y avoir amenée pour ensuite me laisser livrée à moi-même. Et je m’en veux aussitôt de lui en vouloir. C’est un cercle infernal. Mes yeux parcourent son visage une dernière fois. Il suffirait simplement que je me laisse aller une seconde, il doit bien voir mon hésitation. S’il me connaît si bien. Je fais quelques pas en arrière. « Normalement, il me suffit d’être avec toi pour me sentir en sécurité. Tu peux estimer que ce n’est pas beaucoup, pas assez, mais c’est énorme pour moi. Ça fait bien longtemps que je ne ressentais plus ça, pouvoir faire confiance. Je suis désolée si réussir à te le montrer et pouvoir être moi-même me prend autant de temps. Je t’ai dit que j’avais besoin de toi, James. Plus d’une fois. Je ne sais pas ce qui a pu te faire penser que je prononçais ces mots à la légère. » C’est déjà bien assez à avouer, bien trop. Je tourne les talons, suis son conseil et me laisse guider par les lumières de la demeure. Je veux oublier d’une manière ou d’une autre ce qu’il venait de se passer. Retourner dans la foule.
Un parc. Une fontaine. L’espace d’un instant, James se trouva ridicule. Que faisait-il ici au juste ? Qu’attendait-il exactement ? Plusieurs jours s’étaient écoulés depuis la soirée de remise des prix, soit autant de temps à songer à sa dernière conversation avec la jolie Lexie. S’il ne regrettait en rien cet échange, James savait cependant qu’il n’aurait pas dû tenter de la pousser dans ses derniers retranchements. De toute évidence, elle n’était pas prête à ça. S’en voulait-il d’en être arrivé là ? Sans doute. L’admettrait-il ? C’était une toute autre histoire. Si leur relation n’avait jamais été simple, elle était désormais totalement chaotique. James avait eu le temps d’y songer longuement. Il aurait préféré que les choses se déroulent d’une toute autre manière, que tout soit aussi clair et limpide que dans les romans. Ces satanés romans qui finissaient toujours bien. Il savait qu’en prenant la fuite, il avait une fois encore choisi la solution de facilité. Son orgueil démesuré l’empêchait de faire la part des choses et sa fierté légendaire l’avait clairement empêché d’essayer de rattraper le coup les jours suivants. Pourquoi devrait-il faire le premier pas ? Il n’avait rien à se reprocher, il avait simplement tenté de lui ouvrir les yeux sur une évidence qu’elle semblait nier en bloc. Mais qu’importe. Il n’était nullement question de remonter le temps afin d’y changer quoi que ce soit. Ce qui est fait, est fait. Toujours est-il qu’il n’avait aucune nouvelle de la jeune femme depuis. Bien entendu, James aurait pu lui rendre visite ou ne serait-ce que l’appeler afin de s’assurer que tout allait bien de son côté mais à dire vrai, il ne l’avait même pas envisagé. Le fait qu’il soit extrêmement occupé n’arrangeait rien à l’affaire, cela va sans dire. Se noyer sous une masse de travail était une stratégie comme une autre pour court-circuiter ses pensées. Il était particulièrement doué pour tout ça. Observant autour de lui, James esquissa un sourire dépité. A quoi s’attendait-il au juste ? A rien, en réalité. Ses pas l’avaient menés ici à son insu. Il n’avait pas réfléchi, c’était un automatisme. Il retrouvait Lexie à cet endroit précis tous les mois depuis des années. S’il n’avait pas consciemment anticipé que ses pas le mèneraient ici, il réalisait néanmoins à quel point cela sonnait comme une évidence. Cet endroit, c’était le leur. C’est là qu’ils s’étaient rencontrés la première fois. James avait beau balayer les lieux du regard, il n’y avait aucune trace de Lexie. Seulement quelques promeneurs dont les tenues décontractées détonnaient fortement avec le costume gris extrêmement élégant de James. Il avait parfois l’impression de vivre dans un autre monde. Ce qui n’était pas totalement faux. Il demeura ainsi durant une vingtaine de minutes. « C’est ridicule. » soupira-t-il avant de s’apprêter à partir. C’est à ce moment-là qu’il la vit. Lexie. Juste là, dans sa direction. James se figea un instant, l’observant sans trop savoir comment réagir. Qu’allait-il pouvoir lui dire ? James n’était pas certain d’avoir très envie de s’étendre sur les raisons l’ayant poussé à venir ici. Il en avait des dizaines à lui donner, mais aucune ne lui paraissait suffisamment vraie à côté du fait qu’elle puisse lui manquer. Mais ça, James n’était pas certain qu’elle veuille l’entendre. « Hey. » lança-t-il simplement quand elle fut à sa hauteur. Il avait envie de lui dire à quel point il était désolé pour son comportement navrant de l’autre soir, mais hélas, sa fierté l’en empêchait. Comme toujours.
Une fois de plus, je n’avais pas prévenu l’hôpital. Une fois de plus, j’encaisserais les appels de toute part et les reproches qui les accompagnent. Qu’aurais-je bien pu dire pour excuser mon comportement cette fois-ci ? Sous la douche, je m’étais rendue compte à quel point mon corps était fatigué lorsque chaque goutte d’eau fouettait durement ma peau lisse. Je me réveille au milieu de la nuit, restant jusqu'au matin dans un état indistinct, éveillée et incapable de penser. Je voudrais m'enfouir dans le sommeil mais il demeure continuellement comme au-dessus de moi. Je suis sur la corde raide, de plus en plus. Une fatigue constante qui ne fait que s’amplifier, prend possession de mon être tout entier. Au lieu de l’admettre, je m’efforce chaque jour à la repousser en revêtant mon plus beau sourire, et une simple robe blanche pour aujourd'hui. Je devrais être à ma séance de dialyse en ce moment. Ils m’appelleront pour s’assurer que je vais bien, pour savoir où je suis et alors, que leur dirais-je ? Je dois être quelque part. Je ne suis pas sûre de ce que j’y trouverais mais je dois y être. Si j’avais voulu chercher autour de moi une issue dérobée, n’importe laquelle, qui me permettrait d’échapper à cela, je n’aurais même pas eu à mentir. Mais je n’aurais jamais eu l’audace de me servir de ma maladie pour échapper à James. Il aurait sans doute compris pourtant, si je le lui avais confié. Or, je n’aurais rien dit. Je n’aime pas parler de mes dialyses, de ces heures perdues. La seule chose qu’il aurait alors constaté était que je n’étais pas venue. Je sais qu’il m’en veut déjà. Si je ne le retrouve pas, il laisserait tomber. Si je ne le retrouve pas, il ne me croirait plus. Si je ne le retrouve pas, je laisserais tomber. Et plus les jours passaient, plus je me rendais compte que je n’étais pas prête à prendre cette décision, à en être responsable. Sans doute l’avait-il déjà prise, lui, de son côté. Sans doute était-ce pour cela que je n’avais aucune nouvelle de lui. Je suis en train de rater une dialyse pour lui laisser l’opportunité de me faire faux bond. Je vais me heurter à son absence, à son silence. Cela me ferait sans doute plus de mal que ce que j’étais prête à imaginer. Plus de mal qu’il ne pouvait s’en douter. Je sais que je n’ai pas été à la hauteur l’autre soir. J’aimerais me rattraper d’une manière ou d’une autre, le lui faire oublier d’une manière ou d’une autre. J’aimerais rattraper l’ombre de cette soirée, rafistoler les lambeaux que j’avais laissé moi-même derrière nous. J’aimerais me réconcilier avec mes sentiments qui m’en voulaient de ne pas les avoir saisi au vol alors qu’il m’en laissait l’opportunité, d’avoir douté d’eux. J’aimerais qu’il me pardonne de lui avoir préféré la prudence, la pudeur, le repli alors qu’il m’offrait tout autre chose. Pour la première fois. Même si je ne suis pas encore certaine de ce qu’il m’offrait. Pour cela, il aurait fallu que j’y réflechisse, que j’y repense. Et je m’étais employée à ne pas le faire pendant ces quelques jours. Je n’arriverais à aucune conclusion seule. Je n’en étais plus capable depuis bien longtemps. Et puis, je ne suis pas réellement sûre de vouloir savoir ce qu’il pensait et ressentait pour moi aujourd’hui. Quasi certaine que ça ne doit pas être agréable à entendre. Quasi certaine de n’avoir fait que le repousser un peu plus de moi. Je suis à quelques mètres de notre lieu, je manque de marquer un arrêt lorsque je l’aperçois. Je ne m’y attendais pas. Lui non plus apparemment puisque je le surprends, prêt à s’en aller. Je ralentis, et il me voit. J’aurais été prête à lui laisser l’opportunité de partir, à ne pas le forcer à honorer notre accord, prête à le laisser faire demi-tour sans avoir à culpabiliser de quoique ce soit. Mais il est trop tard à présent. Je le rejoins, réponds à son salut avec mon sourire habituel, sincère. Je n’arrive pas à croire qu’il soit là, je n’arrive pas à percevoir à quel point il m’en veut, je n’arrive pas à m’excuser d’entrée de jeu, pour signifier ma position. « Je suis en retard, excuse-moi. » Je m’autorise enfin à le regarder véritablement, il ne laisse rien paraître comme à son habitude. « Tu es très élégant », glissais-je en réajustant doucement, et inutilement, le pan de sa veste. Ce n’est qu’une manière de diminuer la distance qui s’était instaurée entre nous durant ces derniers jours. Et puis, il l’est. Élegant. Il l’est toujours, il le sait. « Je n’étais pas sûre que tu viennes. Tu allais partir ? » Cela aurait tellement plus simple de ne rien dire, de faire semblant de rien, de ne pas avoir remarqué. Mais je ne me fais cette réflexion qu'après, comme bien trop souvent.
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(✰) message posté Mer 3 Sep 2014 - 11:28 par Invité
Impassible, comme à son habitude, James observa les moindres faits et gestes de la jeune femme. En cet instant plus que jamais, il aurait aimé pouvoir se montrer sincère avec elle et lui faire comprendre combien il avait espéré qu’elle ne manque pas leur rendez-vous. Pour lui, c’était important. Au lieu de ça, James demeura silencieux. L’éditeur n’avait pas peur de ce qu’elle pourrait penser au sujet de tout ce qu’il aurait aimé lui dire, le problème se situait ailleurs. En réalité, il lui était extrêmement compliqué de mettre des mots sur tout ce qu’il ressentait depuis leur dernière conversation. Ce n’est pas comme s’ils étaient tout bêtement deux inconnus attirés l’un par l’autre. Leur relation était bien plus complexe que ça. Et manifestement, elle le serait toujours. Sans compter qu’il était difficile pour ces deux-là de communiquer normalement étant donné que la nature les avait doté d’un caractère pour le moins particulier et d’une manière d’appréhender le monde tout à fait singulière. « Tu es très élégant » Et comme toujours, elle était magnifique. Mais une fois encore, James se garda bien d’émettre ce genre de remarque. Il était bien trop … lui… pour admettre qu’elle le troublait de la sorte. Ce n’était pas seulement les mots qu’elle prononçait qui en étaient la cause, mais également la présence de ses mains contre sa veste. Un instant fugace, un geste anodin, mais qui suffisaient amplement à lui rappeler ô combien cette demoiselle était spéciale à ses yeux. Chaque contact l’électrisait complètement, comme si elle parvenait à lui prendre toute son énergie et sa volonté en un claquement de doigt. Elle avait beau s’être écartée, James la sentait encore extrêmement proche de lui, comme si la pire proximité existence ne serait pas suffisante à calmer ses pulsions. « Je n’étais pas sûre que tu viennes. Tu allais partir ? » Ainsi, il n’était pas le seul à avoir éprouvé pareille crainte. Etrangement, ce constat ne tarda pas à l’emplir d’une certaine satisfaction. « Oui. Enfin non. J’avais … rendez-vous avec un client de l’autre côté de la rue. Comme nous en avons terminé plus tôt que prévu, je me suis dit qu’une petite promenade au grand air ne pourrait pas me faire de mal.» Ils savaient tout deux que c’était faux. James le premier. Il n’avait aucun rendez-vous en dehors de cette rencontre tacite entre eux. Il savait qu’elle savait. Mais qu’importe. Ils n’étaient pas là pour se faire ce genre de confidence. Il avait compris depuis l’autre soir que Lexie y était parfaitement insensible et que ce n’est pas ce qu’elle attendait de lui. Alors pourquoi était-elle venue ? Pourquoi diable ces rendez-vous semblaient-ils avoir autant d’importance pour elle qu’ils pouvaient en avoir pour lui ? Il est vrai que cette attitude le décontenançait totalement et lui prouvait une fois encore qu’il ne comprendrait jamais rien aux femmes. « Ca me fait plaisir de te voir. Pour être honnête, je ne pensais pas avoir de nouveau ce privilège avant … un bon bout de temps. » Il aurait plutôt misé sur l’inverse : il avait cru que Lexie chercherait à le fuir comme la peste noire. En l’occurrence, il s’était totalement fourvoyé puisque sa belle se tenait là, juste devant lui. Par où commencer ? Devait-il lui fournir quelques explications ou bien continuer comme si rien ne s’était passé au cours de leur dernière rencontre ? James opta pour la seconde option. Il lui avait dit qu’il n’en reparlerait pas, alors il allait tenir parole. « Même si ce n’est pas une excuse, j’étais très occupé ces derniers jours. Outre mes habituels rendez-vous et autres réunions, je travaille actuellement sur un nouveau projet : celui d’étendre mon entreprise et pourquoi pas de retourner aux Etats-Unis. Londres était censé être un simple lieu de transition pour moi. Au final, c’est ici que j’ai construit ma vie. Professionnelle tout au moins. La Californie ça me semble pas trop mal. Tu pourras venir passer des vacances au soleil chaque fois que tu en auras assez de la météo anglaise capricieuse.» Il esquissa un léger sourire et observa Lexie du coin de l’œil. Que pouvait-il lui raconter d’autre, sinon qu’il songeait très sérieusement à refaire sa vie ailleurs ? Ce n’était pas une option mais un véritable projet. Après tout, pourquoi aurait-il envie de rester ?
(✰) message posté Mer 3 Sep 2014 - 17:53 par Invité
J’ai le choix. Le choix de simuler un sourire de façade, de l’encourager, de laisser cette nouvelle glisser sur moi. Une de plus. Quitte à le conforter définitivement dans l’opinion qu’il s’était forgé de moi. Il souhaitait partir ? Qu’il le fasse, ce n’était qu’une simple transition. Londres, nous. On s’en remettrait tous les deux bien vite, trop vite. Je te souhaite beaucoup de réussite. Je ne peux pas me laisser aller à adopter cette position, pas avec lui. Cela sonnerait faux. Ou au contraire, peut-être trop vrai. Je crains qu’il me prenne au sérieux, qu’il ne sache pas lire entre les lignes, qu’il ne sache pas percevoir ma déception. « Je ne suis pas sûre que ça puisse se faire. Mes médecins ne me faciliteront pas la tâche, si je leur pose déjà problème à Londres, je te laisse imaginer ce qu’ils penseront de la Californie. Tu devras faire sans moi. » Mon néphrologue pleure sur mon dossier à chacun de nos rendez-vous. Je pense sincèrement qu’il serait capable de me laisser tomber si je lui parlais d’un tel voyage. À quoi bon s’acharner sur une jeune femme décidée à jouer avec la mort, n’est-ce pas ? Sans parler des coûts des dialyses aux Etats-Unis … Doucement, redescend, c’est une plaisanterie. Je ne le sais que trop bien mais mon cerveau s’est emballé tout seul, listant toutes les raisons faisant que tout s'arrêterait s’il s’en allait. Je repense à sa promesse de l’autre soir. Selon laquelle il ne me laisserait jamais. Je ne l’avais pas pris au pied de la lettre. Bien entendu qu’il ne pourrait pas la tenir, qu’il ne la pensait pas réellement. Tout avait toujours été clair pour moi. Mais alors, pourquoi est-ce que cette révélation me laisse sans voix ? Pourquoi est-ce que je n’arrive pas à poser de mots sur ce que je ressens ? Les gens partent. Ce n’est pas la première fois. Ces départs sont devenus des souvenirs désagréables, épineux, auxquels je pense le moins possible. « Les Etats-Unis », reprenais-je. « Tu te rapprocherais de Mackenzie, c’est bien. » Sa sœur me vient à l’esprit immédiatement, la seule chose positive à laquelle je pense instantanément, sans me forcer, pour laquelle je peux être heureuse pour lui, sachant à quel point il y tient.
Il me reste le deuxième choix. Celui de ne pas faire semblant. De ne pas essayer de cacher à quel point cette nouvelle me troublait plus que de raison. Je ne peux pas atteindre le fond, pas une nouvelle fois. Il dépend de moi, et moi seul, de me laisser exister pour une fois. De ne pas me réprimer. De remonter à la surface. Entre le chaud et le froid, il n’y a qu’un pas. Je sais passer de l’un à l’autre très rapidement. C’est très facile pour moi de déraper. Une précipitation, une brimade, une mauvaise nouvelle, et je pique de l’autre côté à une vitesse folle. Ce n’est qu’une manière de me protéger. Ce n’est pas la meilleure, je le conçois. C’est à peine si elle fonctionne pour les choses qui comptent. « Excuse-moi, je devrais me montrer plus intéressée, plus enthousiaste pour toi. Je ne comprends pas, tu y penses depuis quand ? Parce que tu ne m’en as jamais parlé jusqu’à maintenant. Je suis juste surprise. » Les mots glissent soudainement tout seul. « Et déçue. Je me suis habituée à nous, nos rendez-vous, comme celui-ci par exemple. » Habituée n’est peut-être pas le mot que j’aurais voulu employer mais je ne réussis pas à faire mieux. Mon cœur bat anormalement lentement tout d’un coup, tout mon être s’est mis au ralenti, pour me suggérer de faire de même sans doute. De ne rien dire que je ne serais pas capable d’assumer plus tard, lorsque James me remettra en place. Lorsqu’il s’insurgera de mes incohérences. Mais je le fais taire cette fois-ci, je lutte. « C’est bien, je suis certaine que tout se mettra en place très vite. Aussi vite que tu le souhaites, comme pour tout, je n’en attends pas moins de toi. » Je laisse échapper un sourire, je le pense, je n’en doute pas. « Je sais que je ne rentre pas en ligne de compte, encore plus aujourd’hui sans doute, du coup je peux te le dire. Je ne pourrais pas me montrer plus enjouée, j’ai du mal à imaginer Londres sans toi. J’ai du mal à m’imaginer sans toi, tout simplement. » Je devrais me taire maintenant, hausser les épaules et le regarder dans les yeux, l’air de rien. Je suis bien trop difficile à suivre. Il ne saura bientôt plus faire la différence entre ce que je pense, ce que je cache, ce que je m’autorise à dire. Il n’avait pas à le faire, pas à le supporter. Il n’arrivera pas à se rendre compte que je pensais réellement tout ce que je venais de dire. Que là était la vérité. Que celle de l’autre soir n’était qu’une manière de faire marche arrière. « Voilà ce que je voulais te dire. »
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(✰) message posté Mer 3 Sep 2014 - 23:54 par Invité
Une à une, l’éditeur relevait les incohérences dans le discours de Lexie. Comment diable pouvait-elle avoir l’audace de tenir de tels propos après les reproches qu’elle n’avait pas manqué de lui adresser l’autre soir ? Le plus sérieusement du monde, il glissa ses mains dans les poches de son pantalon, s’arrêta et fronça légèrement les sourcils tout en la dévisageant. C’était quoi ça ? Ce retournement de situation, à quoi rimait-il ? « Comment peux-tu dire que tu n’entres pas en ligne de compte alors que fondamentalement, c’est toi qui m’empêche de me forger ne serait-ce qu’une toute petite place dans ton univers ?! » James soupira doucement puis fixa l’horizon l’espace d’un instant. C’était à n’y rien comprendre. S’il n’avait initialement pas prévu de s’aventurer une nouvelle fois sur ce terrain glissant, les propos de Lexie l’incitèrent cependant à faire une nouvelle fois allusion à leur fameuse soirée houleuse. « Pour l’autre soir … c’était stupide de ma part de te dire tout ça, je ne sais pas à quoi je m’attendais. C’était une erreur, j’en conviens et je te prie d’accepter mes excuses. » L’éditeur n’était pas du genre à s’attarder sur ses sentiments, il n’était pas réellement doué pour ça. Toutefois, il se devait de lui fournir quelques explications et les mettre en lien avec son besoin d’évasion. Son départ n’avait strictement rien à voir avec Mackenzie, elle était même la dernière personne au monde à qui il allait signifier son retour aux Etats-Unis ! Remontant le col de sa veste, il secoua doucement la tête et continua sur sa lancée : « Je pensais que certaines choses étaient susceptibles de me retenir ici mais c’est faux. J’y pense depuis… un certain temps. » Nouveau mensonge. Il savait que Lexie comprendrait qu’il était en train de lui mentir mais qu’importe. C’était toujours mieux que d’admettre qu’il avait pris cette décision au lendemain de la remise des prix. « J’ai toujours eu beaucoup de mal à te suivre mais là … j’avoue que je suis totalement perdu. Comment veux-tu que j’affronte des sentiments qui me sont interdits ? Ne sois pas malhonnête avec toi-même, tu sais aussi bien que moi quelle serait ta façon de réagir si je faisais preuve d’une once de sincérité à ton égard. Je sais que ma morale est loin d’être exemplaire mais de là à te faire comprendre qu’aujourd’hui j’éprouve bien plus qu’une étonnante attirance à ton égard serait totalement irrespectueux. Parce que ce n’est pas ce que tu as envie d’entendre. Tu as été suffisamment claire à ce sujet. La vie que tu mènes semble te convenir et je crois que je n’y ai plus ma place. De quel droit pourrais-je avoir l’audace d’essayer de m’y frayer un chemin ? Je ne m’attendais à rien en venant ici, tu peux me croire. » Pour un peu, James se serait étonné de faire preuve d’autant d’honnêteté sans craindre les réactions de Lexie. Après tout, ils venaient d’atteindre un point de non-retour alors autant jouer la carte de la franchise une bonne fois pour toutes. « J’aimais notre relation au début car elle me convenait parfaitement. Pas d’attache, pas de sentiments. Le fait est que désormais, tout a changé. Comment pourrais-je me contenter d’aussi peu alors que j’ai envie de partager tout le reste avec toi ? Et là, je ne suis pas en train de te faire une déclaration enflammée. Je dis juste que je n’ai plus envie de me demander à quel moment tu vas débarquer. Parce-que l’attente devient insoutenable quand tu n’es pas là. » Ce qui au début était loin d’être une évidence devenait peu à peu limpide dans l’esprit de James. Il n’aurait certainement pas du lui dire tout ça mais à quoi bon tergiverser durant des heures ? Puisqu’ils voulaient se montrer honnêtes, alors autant aller jusqu’au bout. Il n’y avait plus rien à perdre. « J’ai toujours été embarrassé et maladroit en ta présence. Troublé sans doute. Le fait est que je maitrise mes émotions mieux que quiconque et que cela peut parfois passer pour de l’indifférence. Ce qui n’est pas le cas bien entendu. Partir, c’est un moyen efficace de tirer un trait sur mon passé. D’arrêter de me demander quand est-ce que je te reverrai, car je sais que tu ne seras pas là.»
(✰) message posté Jeu 4 Sep 2014 - 23:47 par Invité
« Je pensais que certaines choses étaient susceptibles de me retenir ici mais c’est faux. J’y pense depuis… un certain temps. » Ces mots semblent résonner à mes oreilles, bourdonner. C'est ce que je ressens à la suite de ses paroles. Tout paraissait vouloir me blesser. Je ne pouvais affirmer que c'était là son but mais c'était ce que cela me faisait. Une erreur. Il s’excuse. Rien ne le retient ici. Plus sa place. J’ai l’impression qu’il me punit pour tout ce que j’ai pu lui dire lors de notre dernier échange, ou tout ce que je n’ai pas voulu lui dire plus précisément. Je veux tourner les talons, disparaître tant qu’il en est encore temps. La tête haute. Le cœur épargné. Il ne sait pas dans quoi il s’embarque. Je l’écoute faire tomber les barrières une à une. Je ne peux pas me permettre de fortifier les miennes une deuxième fois. Je le perdrais définitivement. « J’aimais notre relation au début car elle me convenait parfaitement. Pas d’attache, pas de sentiments. Le fait est que désormais, tout a changé. » J’aimerais l’embrasser. Maintenant, pour le faire taire, pour ne plus écouter. L’embrasser est cependant la seule chose que j’ai réellement envie de faire pour tout stopper. Ce n’est pas la réaction que je suis sensée avoir face à ce genre de discours. « C’est complètement … » Il ne m’écoute pas, ou peut-être ne m’a-t-il pas entendu. C’est complètement fou. J’essaie de saisir quelque chose dans son attitude. Saisir quoique ce soit qui pourrait me rassurer, une intonation, un regard, n’importe quoi. Je suis complètement handicapée. Handicapée des sentiments. Je ne sais plus comment les entendre, comment les accepter. Je ne comprends pas qu’on puisse me les porter non plus. Je ne comprends pas qu’il puisse les ressentir. James est la dernière personne que j’aurais imaginé face à moi, à se livrer de la sorte. On ne reviendra pas en arrière. J’en serais incapable et il ne le voudra pas. Voilà ce qu’il est en train de me signifier. « Partir, c’est un moyen efficace de tirer un trait sur mon passé. D’arrêter de me demander quand est-ce que je te reverrai, car je sais que tu ne seras pas là. » Je l’arrête, je ne sais pas s’il allait le faire de lui même mais je porte ma main à son bras soudainement pour l’inciter à s’arrêter. Cette même main qui se porte ensuite à mon visage, hésitante. « Tu ne me laisses pas le temps. Tu es prêt à me rayer de ta vie si rapidement parce que je n’ai pas réussi … » Je m’arrête, je ne veux pas qu’il perçoive mes premiers mots comme des reproches. Tirer un trait sur son passé. Je fais donc partie de son passé ? Si facilement, en quelques jours. « Ne crois pas que je ne ressens rien. Je ne me suis pas laissée ressentir. Et maintenant, tout va trop vite. Tu ne peux pas m’en vouloir d’être un peu perdue au milieu de tout ça. Je dois gérer mes sentiments, les reconnaître, essayer de faire le point sur ce que je peux te dire et te révéler, alors que ça va à l’encontre de tout ce que je suis depuis des années. » Je suis tellement fatiguée. Fatiguée de porter un poids partout avec moi. J’ai perdu l’habitude et je n’ai plus que ce poids énorme et écrasant sur la poitrine. Et je suis furieuse aussi. Furieuse d’être prise au dépourvu, furieuse de ne pas réussir à lui montrer, furieuse qu’il ne le voit pas. Ça, pouvait-il le ressentir ? « Le fait est que je sais ce que je ne veux pas. C’est peut-être très égoiste de ma part mais je peux te le dire, du plus profond de mon être aujourd’hui, je sais que je ne veux pas que tu partes. Pas toi aussi, pas après … Non, oublions les autres, ça n’a rien à voir. C’est toi, seulement toi, que je ne veux pas voir partir loin de moi. » Parce que tu es trop présent, trop à l’intérieur de moi. Une boule de vie en moi. Si je lui dis, si je lui expose, je le perdrais. Quoique je dise, ce ne sera pas assez. « Je suis là. Je suis toujours revenue, je reviens à chaque fois. C’est injuste. Parce que tout ce que je veux, c’est peut-être toi, je le sais maintenant, et je ne peux pas l’avoir, je ne pourrais jamais. » Ces mots me font mal à la poitrine, comme si je ne voulais pas les laisser sortir. J’ai à peine le temps de réaliser ce que je ressens que je me surprends à le lui dévoiler, sans réussir à le filtrer autant que je le voudrais. Je ne pourrais m’en prendre qu’à moi-même lorsque tout ceci se retournera contre moi. « Tu as fait plus que te frayer un chemin, d’accord, tu t’y es engouffré complètement et ça me file une peur bleue. Mais c’est comme ça et je le sais maintenant, et je l’accepte. Je ne peux pas te le demander mais je ne veux pas te voir partir. Parce que, que suis-je censée faire de tout ce que tu me fais ressentir si tu n’es plus là ? »