"Fermeture" de London Calling
Après cinq années sur la toile, London Calling ferme ses portes. Toutes les infos par ici Prop me up, before I black out _ Eleah&James 2979874845 Prop me up, before I black out _ Eleah&James 1973890357
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Prop me up, before I black out _ Eleah&James

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James M. Wilde
James M. Wilde
MEMBRE
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() message posté Dim 25 Fév 2018 - 18:09 par James M. Wilde


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Eleah
& James




Les mains plaquées sur la mosaïque blafarde, le corps noué de ces angoisses que je ne sais plus comment canaliser. Pourtant je n'ai pas réussi à crever. Pourtant je n'ai pas réussi à la détruire non plus. Le reflet de mon visage qui se mire sur la surface glacée, l'eau qui dégouline dans mon cou, aplatissant mes cheveux, délavant mes pensées. Je ne sais plus ce qui commence ou qui est terminé. Échu... Broyé... Ritournelle de mes méfaits, ça recommence. Ça recommence encore une fois, et je ne peux pas l'arrêter. Je ne peux pas m'arrêter. Mes doigts se figent, arcboutés, douloureux dans leur cicatrisation bien trop languide à mon goût. Je veux rejouer. Je dois rejouer. Je dépéris sans son, avec bien trop d'images incrustées dans mes prunelles avides d'en trouver d'autres pour les dévoyer. Trop de peine. Trop de colère. J'ai fini par céder... Je suis rentré chez moi et j'ai dormi. Dormi enfin pendant soixante quinze heures d'affilée, à rêver mon présent dans un abominable passé qui m'a fait geindre des peurs ancestrales, recroquevillé par le manque que je m'étais infligé. Oh oui... Je me suis relevé, comme toujours. Il a bien fallu. Il a bien fallu. J'ai repris une ligne, mais pas trois. J'ai cadencé mes errances pour toutes les ravaler, j'ai recomposé mon visage, les notes stridentes se sont tues, et je suis allé me doucher. Me laver de cette semaine infernale qui a failli tout emporter. Les visages dégringolent, se noient dans des sensations presque iniques, et les murmures de Moira deviennent des chants étranges, impurs, mélancolie d'une naïade qui m'a ensorcelé. Je l'ai abandonnée quelque part... Juste suffisamment de temps pour avoir la force de la retrouver. Encore un peu de temps. Encore un peu...

Le téléphone vibre, il bouscule les produits tous accumulés sur le rebords du lavabo, le fracas d'une vie qui se targue de continuer sans moi. A travers la porte vitrée de la douche, je distingue le nom de mon meilleur ami, qui s'illumine à intervalles réguliers. J'essaye de me souvenir de ce que je ne fais qu'oublier. Les rendez-vous, les interviews, les galas, et autres conneries qui s'accumulent depuis que notre album perce les ventes et les fait s'envoler. Ce succès après lequel j'ai tant couru m'apparaît tel une victoire illusoire, aussi éphémère que la flotte qui s'évacue après avoir gracié ma peau d'un énième frisson. Je fais l'inventaire de mes muscles décharnés par mes récents excès, je vire le dernier bandage de ma main droite, fais jouer les articulations une à une, pour me convaincre que la souplesse légendaire que j'ai acquise au fil acéré des années de travail ne m'a pas tourné le dos à son tour, m'abandonnant dans une ornière, sans plus aucune humanité. Plus de musique et plus d'affects. Rien. Rien.

Rien. Le smartphone de nouveau, à beugler bien trop fort pour ma tête douloureuse, que je peine à porter. Je soupire de la buée qui vient masquer mes traits dans le miroir, je ne veux pas regarder. Je ne peux pas. Je finis par décrocher :
_ Ici James Wilde, veuillez comprendre que si je ne décroche pas, c'est que je n'ai aucune envie d'entendre votre voix de raton-laveur prépubère me rappeler mes devoirs que j'essaie pertinemment d'ignorer. Merci de laisser un énième message inutile que je n'écouterai pas. A jamais. Au revoir. Salut. Fous. Moi. La. Paix.
Le timbre de Greg se précipite dans la brèche, c'est comme le Messie ressuscité, la voix de son dieu de nouveau éveillé et prêt à le châtier comme il se doit. Que je le rembarre l'enchante, il y a un sourire dans les premières syllabes et beaucoup d'inquiétude dans les quelques silences maladroits qui ponctuent ses discours :
"Tu es chez toi ? Oui... Tu es chez toi en fait, c'est ça ? Parce que je ne savais plus... La dernière fois, quand tu es parti, tu avais l'air si démuni, et puis tu ne répondais pas, et puis tu étais incohérent mais là, tu as l'air presque... Presque... Presque..."
_ Débugue-toi, Blondie. Presque quoi ? Normal ?
J'ai un rire sec et tranchant. Si je fais illusion, c'est déjà pas si mal, n'est-ce pas ?
"Bah... Ouais ? Tu... vas mieux ?"
Non. Non. Peut-être. Je ne sais encore ce que cela pourrait vouloir dire que d'aller mieux sachant tout ce que j'ai su écorcher. Les idéaux, les délicatesses et les avenirs. Je n'en ai plus je crois. Je peine à penser à l'heure qui vient, les secondes deviennent toutes des armées inébranlables qui masquent ce champ de bataille qui s'ébattait au futur de mes absences. Futur. Notion abstraite et inutile. Je secoue la tête :
_ Tu appelais pour me demander ça ?
Le ton lui indique la marche à suivre et il souffle aussitôt :
"Non. Non. Pour... ce soir ?"
Ce soir ? J'ai oublié. Putain... Pas une autre soirée à montrer ma gueule de décadent au milieu de ce parterre d'hypocrites, rebelles falsifiés, chanteurs médiocres, musiciens sans talent. Je me sens prêt à dégobiller. Gregory m'explique que ce soir, c'est la fête de nos petits jeunes de chez Oaks Production. Premier album, belles ventes déjà, même si elles n'égalent pas les nôtres. Leur clip est un véritable succès sur internet par contre, les jeunes se sont jetés dessus, accumulant les clics, les like et autres signes extérieurs dénués d'intérêt. Je soupire. Encore. La buée recouvre mon image qui me toise. Allez. En piste, connard.

***

La boîte est immonde, triviale, pleine de monde, de ces mêmes corps qui frayent au Viper, dans des rythmiques saccadées. Je ne sais pas pourquoi la jeunesse a choisi la thématique rose et or, l'on m'apprendra quelques minutes plus tard que leur single se nomme Golden Roses.
"Wouuuuuuuuuh, c'est leur clip, il est géniaaaaaaaaaal"
Je viens de perdre un tympan, même s'il menace de crever depuis longtemps à force de le coller à l'ampli dans des lives endiablés. Je me mets sur la pointe des pieds, au désespoir de trouver les garçons dans cette foule compacte et enfiévrée, qui commence à faire mouvement vers l'écran géant qui dégueule du clip et de la musique pop discutable des Spectrum. En vérité, il ne sont pas si mauvais que cela, c'est plutôt mon esprit railleur qui les catalogue à l'acidité de mon fiel, déjà accumulée sur ma langue. L'amertume dans mes joues creuses. Je fous un coup d'épaule à un mec pour pouvoir passer, Greg m'a dit qu'il se trouverait dans un des carrés VIP, à l'écart des masses. Une fille dénudée me fait de l'oeil, elle vient de me reconnaître mais je la vois à peine, les paupières déjà presque closes, aveuglé par des souvenirs trop récents, inégaux, inavouables. Eminemment trop tentateurs. Je récupère un verre sur le plateau d'un serveur, lui aussi en rose et or, avant de m'apercevoir qu'il s'agit là d'un cocktail de fillette, trop sucré et avec bien trop de couleurs dans un seul verre pour ne pas injurier mes humeurs sombres. Je bois quand même, avant de reconnaître Gregory et Ellis, en grande conversation avec une petite brune, que je ne connais pas a priori, et qui semble entièrement charmer le batteur qui lui lance des oeillades de connivence, tout en passant un bras protecteur autour de ses épaules. Je hausse mes deux sourcils quand je l'entends, d'humeur joviale, avec son sourire ravageur, pipeletter sur un rythme avoisinant le mien :
"Nan mais tu vois, c'est ça qu'il nous manque ! Une ambiance un peu décalée pour nos thématiques un peu trop denses, tu vois ? Ce que je veux dire, c'est que si un clip colle un peu trop à son contenu, il n'y a rien d'inattendu. Et si ça l'est trop, alors la mise en image éclipse la musique. Et je crois que toi, tu sais parfaitement équilibrer la nouveauté, tout en ne perdant pas de vue ce qu'il faut mettre en exergue. Le sens... Au milieu de mouvements contemporains. Vraiment hein ? Ce clip que tu leur as chorégraphié, il a juste ce qu'il faut d'énergie sans trivialité d'usage. Ou encore de... Comment dit-on... Quand c'est un peu trop..."
Je plisse mes paupières, mon verre de Sex on The Beach dans la main, avec un petit parapluie dedans comme si j'étais sur la plage, alors que j'ai le teint d'un vampire s'étant relevé d'un sommeil millénaire :
_ Vulgarité. C'est ça, le mot qui t'échappe, Wells. Même si c'est pas la seule chose qui te sort de la tête...
Je prends une gorgée, un sourire en coin, lui montrant bien que j'ai absolument entendu tout le ridicule de sa tirade. Quand on veut se faire une fille, on est pas obligé d'en faire dix tonnes non plus, surtout sur son talent, sinon elle trouve ça louche. Pfffff... Faut-il que je l'éduque de nouveau ? Je prends place, entre Ellis et elle, Greg fait la moue, parce qu'il sent que je veux jouer à ses dépends :
_ Alors vous êtes donc ce qu'il nous manque, il paraît ?
Sourire presque carnassier, mes cernes donnent d'autres élans aux ténèbres que portent mes iris. La musique nous martèle tout autour, m'obligeant à me pencher pour qu'elle m'entende. Maintenant que je la vois de plus près, elle me dit quelque chose... Mais je suis bien incapable de savoir d'où son visage m'est familier.  
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() message posté Lun 26 Fév 2018 - 12:40 par Invité
james & eleah
Les muscles se replient pour mieux s’arc-bouter, suivent un fil, invisible, indicible. Les pensées se claquemurent dans le gouffre de la conscience, s’y perdent enfin. Quelle heure est-il ? Peu importe. Dans le temps, seul compte la mesure. Celle que ses pieds marquent à intervalle régulier, chirurgical. Sous la peau, tout est tensions. Une main puissante sur sa hanche l’entraîne, les lignes du ventre se dessinent : soulevé de terre avant la redescente alanguie. Son dos s’arrondit, enveloppé par la poigne devenu légère de l’homme, comme endormi, dont la silhouette se découpe autour de la sienne. Elle y disparaît presque dans un souffle. Inspirer. Expirer. S’apercevoir enfin que la respiration, c’est la clef. Le nouvel élan qu’il faut pour se surpasser, pour aller au-delà, pour que l’émotion soit transcendée. Les airs de Land of All tamisent la pièce, la nimbent d’une réalité toute autre, discontinue, abstraite. Leurs mains tendues vers le ciel frôlent l’invisible pour mieux s’y confondre. En miroir, ils se miment. A la perfection. Comme s’ils étaient réellement au fond, ces deux âmes sœurs dont les reflets se confondent jusqu’à disparaître l’un avec l’autre, l’un dans l’autre aussi. Communion parfaite sur les accents sourds, de quoi suspendre l’attention du spectateur au bout de leurs doigts qui s’effleurent sans jamais s’étreindre tout à fait. Son corps bouillonne, les muscles tiraillent. Il faut dire que cela fait bien quatre heures qu’ils répètent, sans relâche, acharnés, incapable d’abandonner tant que la perfection ne sera pas atteinte. Le travail à fournir avant la version finale est encore titanesque. Mais ils y viennent, peu à peu. Depuis deux ans ils se connaissent, avec Charly. Deux ans de complétion, de collaboration.

« On devrait peut-être faire une pause trésor, t’as l’air claquée. L’homme s’est arrêté dans son élan. Il fait craquer ses cervicales, pivotant la tête à droite, puis à gauche. Sa voix est un peu efféminée. Si Eleah est fantasque parfois, lui l’est plus encore. Au-delà d’un genre qu’il se donne, c’est une façon d’être qu’il ne peut plus renier. Il ne parle pas tant que ça pourtant, juste assez.
- Tu plaisantes ? On est loin de l’avoir, ce foutu porté. Lâche-t-elle, les deux mains posées à plats sur les hanches, le souffle court.
- Chérie, si tu te t’blesses, ce sera la fin des haricots. Ah oui, à noter. Charly adore les expressions old fashion. Alors tu vas gentiment aller poser ton joli p’tit popotin pour te reposer, et on se revoit demain, frais comme des gardons.
- Frais, c’est vite dit … Les Spectrum fêtent la sortie de leur nouveau single ce soir. Je peux pas manquer ça. Elle se redresse, veille à replacer convenablement l’alignement de son dos. Tu peux passer d’ailleurs si tu veux, je leur dirais de te laisser rentrer. Thématique rose et or. Ça devrait te plaire.
- Nan mais tu plaisantes là ? Une soirée de jeunots décérébrés par de la Pop music … Nan mais tu m’as pris pour qui là chérie ? J’ai d’autres plans de toute façon. Un plan qui porte le doux prénom de … Jeremy. prononce-t-il, roulant le « r », à l’américaine,  avec un air aussi lubrique que rêveur. Et si tu veux tout savoir, il n’y a pas que son prénom qui est doux, je ne te parle même de sa jolie paire de …
- Non non, je ne veux pas savoir. Garde les détails pour toi tu veux. »
Il se mord une lèvre pour toute réponse. Apparemment, il s’y voit déjà, avec  le Jeremy. Eleah étouffe un rire, laisse dévaler une longue gorgée d’eau fraîche le long de sa gorge. Le sang pulse à ses tempes, frénétique. A croire que c’est ça, la rançon du succès. La fatigue, l’impression de mouliner quand on s’efforce pourtant de faire plusieurs choses en même temps. Avec une serviette elle vient éponger sa nuque, puis son visage. Un regard sur son cellulaire lui indique quatre appels en absence. Un de sa tante. Trois des Spectrum. Ca reprend son cours, et jamais ça ne s’arrête.


Presque à l’heure. La boîte est déjà bondée, forcément. L’effervescence du lieu monte en elle instantanément, comme une poussée d’adrénaline. Toute guillerette, elle a rechargé ses batteries dans l’après-midi en s’accordant une sieste d’une demie-heure et une décoction dont, au vue de la couleur, il ne vaut mieux pas connaître la composition. Tout est en nuances de rose, et d’or, de paillettes et de lumières. Et Eleah, enfantine qu’elle peut être parfois, elle adore. Même avec des talons de dix centimètres, son mètre 55 habituel ne lui permet guère de surpasser ses congénères. Mais tant pis. Une jupe cintrée (trop cintrée peut-être) en cuir noir, un tee-shirt rose fushia, de près ou de loin elle ressemble à une petite poupée des temps modernes, et avec vigueur, elle se fraye un chemin parmi les corps, se voyant interpellée par des visages plus ou moins connus au passage. Au bar elle commande un cocktail tutti fruttis. C’est-à-dire un cocktail molotov concentré de tant de sucre que cela pourrait achever un diabétique. Sans alcool bien sûr, vu qu’elle ne boit presque pas. Et avec une paille. Elément d’importance capitale. Quant à la petite ombrelle, juste après avoir aspiré le jus sur la longueur du pique en bois, elle vient de la glisser dans son chignon faussement décoiffé, apportant une touche d’excentricité à la coiffure totalement abracadabrante. Voilà qu’une voix l’interpelle : le batteur des Spectrum, avec qui elle a bien sympathisé durant leur collaboration. Un sourire mutin illumine ses traits, la discussion s’installe, puis un autre prend le relais. Grégory Wells. Rencontré à une précédente soirée. Ils ont tout juste eu le temps de sympathiser la dernière fois qu’ils se sont vus. Garçon craquant, à croquer, quoique bavard. Terriblement bavard. Il fait partie d’un groupe plutôt en vogue ces derniers-temps, même si leur répertoire est assez méconnu pour la jeune femme. Après avoir rencontré Grégory, elle s’est un peu penchée sur la discographie des Wild. Une belle intensité dans leurs chansons, peut-être trop axées sur les élans souffreteux de l’être parfois à son goût, mais belle malgré tout. On ne peut pas nier qu’ils ont une belle symbiose, sur scène, tous les trois. En plus le leader du groupe a une voix assez singulière pour que l’on se dise : putain, c’est quoi, cet ovni ? D’ailleurs, quand on parle du loup.

« Oui voilà, de la vulgarité c’est ça. Je ne cautionne pas les chanteurs qui essaient de se départir des quatre culs et douze paires de seins qui frétillent autour de lui pendant qu’il tente de sortir quelques sons appropriés. » Répond-elle en écho, son enthousiasme absolument inattaquable dès lors qu’elle peut défendre les intensités d’une discipline qui la passionne depuis toujours. Danser, c’est une seconde nature. C’est un langage qui va au-delà de tout mot, qui va même au-delà du corps dans lequel il s’incarne. Cela, elle en est persuadée. « Et vous vous êtes … Le leader du groupe c’est ça ? » glisse-t-elle, à l’attention du nouveau venu, dont la verve piquante vient de glisser  sur ses sourires mutins de petite fille. Elle le voit à peine dans la pénombre, incapable de toute façon de se concentrer tant ses esprits sont échauffés par l’ambiance et le taux de sucre dans son sang. Cependant elle se pose un instant, entre Gregory, et le nouveau venu de fait, dont l’humeur semble osciller entre le morose et l’acariâtre. Ses pieds marquent légèrement la mesure de la musique, le haut de son corps réagit à chaque pulsation de musique. Voilà une voix, la voix qui lui parvient. Eleah tend l’oreille, arbore un sourire espiègle. « Qu’est-ce que vous en pensez, vous ? Avez-vous l’impression que dans vos clips, votre musique ne se suffit pas à elle-même ? Qu’il lui faudrait quelque chose pour la transcender, la propulser plus encore ? » Elle marque une pause, sirote son cocktail en nuance de rose l’air de rien. « La danse est un bon vecteur pour ça, quand elle n’est pas utilisée uniquement comme artifice, ou accessoire. » Enfin elle le regarde, avec plus d’intensité cette fois-ci. Sa première réflexion est qu’il doit sans doute manquer de sommeil, que vraiment, il a une mine affreuse. Et puis, ses prunelles chocolat s’agrippent à la noirceur des siennes. Dans sa poitrine, son cœur manque un battement. Ses lèvres s’entre-ouvrent légèrement sur sa paille, s’en détachent. « Vous allez trouver cela étrange, mais, votre regard me donne un sentiment de déjà-vu. » Si la sensation est positive, ou non, elle l’ignore encore. Mais le fait est que quelque chose vient de se tordre dans son ventre. Sentiment auquel ses instincts pallient de manière instantanée. « Vous êtes à sec. Moi aussi. Qui pour une tournée de glucose ? » Entonne-t-elle alors, levant son verre vers le ciel, se relevant dans une même impulsion avec dans l’idée d’aller chercher d’autres boissons. « C’est quoi votre petit nom déjà ? » Elle baisse la tête vers lui, rayonnant d’un sourire presque trop équivoque. Et la sensation de déjà-vu, elle, perdure, demeure, s’installe et s’enlise.


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James M. Wilde
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() message posté Lun 26 Fév 2018 - 18:45 par James M. Wilde


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J'émets un léger rire quand elle dépeint l'absurdité de notre star système qui s'affiche dans des errances braillardes sur les ondes, au milieu de la nudité sans art et du bruit sans harmonie. Un rire. Pour la première fois, depuis un temps qui me paraît être l'équivalent de plusieurs éternités de malêtre. Quelque chose dans mon ventre se déploie avec chaleur, c'est plus que la came, c'est plus que l'alcool, ou encore la sensation impure de s'être relevé quand tout aurait dû me laisser à terre, dans les immondices que j'avais accumulés. Les mots, les cris, les heurts. L'horreur d'une nuit profanée se dissipe, devient étrangère à la persona qui se délivre pour avoir trop souffert le joug de mes affects torturés. Ce rire, Ellis l'entend, et dans son visage, c'est l'éclaircie d'un soulagement, le tableau de ses préoccupations laisse place à des couleurs plus diaphanes, celles de l'amitié qui se noue pour avoir trop été reniée par le sort. Tu es donc là. Oui... Avec toi. De nouveau. Il fait un léger hochement de tête dans ma direction, sans rien dire de plus, comme s'il me saluait après une longue absence, et me laisse m'installer, sortir mon grand jeu de fomentateur, tandis que Gregory surfe sur la vague de l'alcool qu'il tient bien plus mal que moi. L'alcool et l'excitation d'avoir su capter l'attention d'une aussi jolie fille. Elle est petite, elle est mince. Elle a ce port de tête distingué, pas austère, ça non. Quelque chose de plus racé, comme celles qui ont appris à regarder loin pour ne jamais voir ce qu'il y a derrière elles. Le passé en dérive d'une nature enjouée. J'ai envie de m'y arrimer aussitôt tant mes récentes infamies me laissent un goût amer et m'écoeurent à force d'avoir été remâchées. Je la regarde, souris un peu plus d'un air entendu. Je hais les mecs sans talent qui font ce qu'elle abjure, s'entourer de belles nanas dans des clips tapageurs pour faire oublier leur piètre talent. Technique de couards... Celui qui a voulu me vendre une fille à poil pour Explorers a failli se prendre un direct la dernière fois. Pourquoi pas une voiture de sport, ou la déliquescence d'une villa de star, histoire qu'on oublie même la musique ou encore les pensées qui y gisent, hein ? Pathétique.

Je zyeute le petit parapluie qu'elle a fiché dans ses cheveux alors qu'elle écoute encore Greg, tout en jouant avec le mien, le déployant, le repliant, sans cesser. Réflexe de ceux qui tiennent difficilement en place, et qui se sentent piégés au milieu d'un espace clos plein de monde. Surtout quand cet espace n'est pas mon domaine, celui que j'ai fait mien. Les détours, les sorties, les couloirs dérobés... Ici je ne les connais guère, je ne vois que des gens, je n'entends que du bruit. La musique m'insupporte car ce n'est pas celle que j'ai programmée. Je souffre comme celui qui retrouve la lumière du jour après en avoir été longuement privé. Tout est trop cru, trop intense, presque dégradant. Je frissonne tout en sirotant la fin de ce cocktail infect, avant de resserrer les pans de ma veste en cuir. Les camés ont toujours froid... Surtout en période de manque. Je me laisse emporter par son discours passionné, il y a chez elle quelque chose de vrai, que seuls ceux qui triment jusqu'au sang pour un art quelconque peuvent arborer. Je siffle, légèrement moqueur :
_ Je vois que madame est passionnée par son métier... Exactement, c'est moi, le seul, l'unique. Enfin en noir et blanc. Pour le technicolor, faudra repasser un autre soir.
Mes vêtements noirs. Ma mine pâle. Pas de rose et certainement pas d'or pour moi ce soir... Même si j'aurais pu. Ce n'est pas comme si mon dressing n'était pas à moitié constitué de vêtements bariolés. Mon ironie n'est pas agressive, j'ai un timbre plutôt bon enfant, que je reconnais pour l'avoir un jour manié avec aisance. J'ai l'impression de jouer un rôle, ce n'est pas désagréable en vérité. J'aime ça. J'ai envie d'être autre chose que moi. Quelqu'un qui n'aurait pas commis l'irréparable, dans la trivialité et les gémissements animaux. Je repose mon verre comme si je m'en débarrassais, alors que ce sont mes pensées que je repousse avec hargne. Elle relance la conversation, soutient mon regard et ma proximité. Je suis presque surpris qu'elle n'ait pas un mouvement de recul devant ma monstruosité. Mais elle ne sait pas. Elle ne sait pas... Elle ne voit que le masque. Rien des écorchures qui suppurent derrière. Je souris, presque carnassier :
_ Passionnée et avec une ambition sans limite à ce que je vois. Transcender ma musique... Vraiment ? J'aimerais bien vous voir essayer, tiens. Ma musique ne se transcende pas, elle se ressent. Elle vous infecte ou elle vous répugne, elle vous surprend dans vos mensonges ou elle vous dépare de vos attraits factices.
Gregory lève les yeux au ciel, je m'amuse dans mon grand numéro. Avant de concéder cependant :
_ Mais ouais, je peux envisager qu'un corps en souffrance puisse accompagner des sensations provoquées par une composition. Après tout, l'on ne danse pas sans musique, n'est-ce-pas ?
Une façon de sous-entendre du haut de toute mon arrogance que mon art est supérieur au sien... Même si elle conçoit la danse comme un vecteur, si bien que nous ne sommes pas tant en désaccord que je ne le voudrais sûrement. Je fais d'ailleurs semblant d'être moyennement intéressé, presque blasé de prime abord par cette conversation d'artistes qui d'habitude me gonfle profondément. Dans tous ces rassemblements il faut qu'un inspiré à la con me tombe sur le râble pour me sortir sa vision des choses et je trouve ceux qui se prétendent artistes souvent irrémédiablement creux. Ils sont artistes par égocentrisme seulement, un nombrilisme qui dévore le reste et laisse toute matière exsangue. Certes... Je ne vais pas prétendre ne pouvoir me reconnaître dans l'assertion. Mais il y a plus n'est-ce pas ? Plus que juste cela ? Ma rhétorique demeure sur mes lèvres pincées, en pause. Elle me regarde longuement, et je crois au départ que je l'irrite mais bientôt c'est une troublante question qui sort de sa bouche en cœur. Une question que j'évacue aussitôt car elle me travaille l'esprit depuis de trop longues minutes. Et je ne sais encore ce qui se cache tout en dessous. Je ne suis même pas certain de vouloir le savoir d'ailleurs...
_ Ce sont les affiches ça. Il y en a trop en ville...
Je hausse les épaules. Elle parle de mon regard... Elle n'aurait pas formulé sa phrase ainsi s'il s'était agi de ma tronche encore tuméfiée qui a servi à la sortie promotionnelle de l'album. Mais je suis mal à l'aise... L'ai-je prise elle aussi ? Dans cette semaine d'enfer, est-elle venue jusqu'à moi comme tant d'autres ? Je ne me souviens pas. Je ne me souviens de rien. L'ai je profanée, avilie, puis congédiée comme une pute ? Est-ce là le souvenir dont elle hérite de moi ? La honte me mord, dispense ses assassins poisons et mes iris se troublent. Je bas la mesure avec ma main sur ma cuisse, écartelé par une douleur que je ne sais pas encore gérer. Non. Non c'est impossible. Il faudrait qu'elle soit tordue et presque folle pour faire semblant de ne pas savoir. Mais elle s'évade déjà, avant même que je n'aie pu plonger dans son regard pour le lire davantage. Bordel. Elle va peut-être se servir de cette fausse politesse pour se barrer. Et je ne saurai pas. Sans doute jamais. Est-ce grave ? Ma lâcheté bataille tandis que les garçons commandent un Daiquiri et une Vodka caramel. Je les observe comme deux bestioles étranges... Qu'avez-vous donc fait de mes deux associés ? Rendez-les moi. Je perds le fil.
_ Je ne sais pas... James.
Je réponds aux deux questions avec une unique phrase qui traîne toutes les complexités qui gisent dans ma tête comme des corps en décomposition. Son sourire. Son sourire. Putain de sourire. Je ne souris plus. J'essaye de comprendre et l'incertitude me laisse interdit. Me hais-tu toi aussi ? Avec un minois pareil ? Narquois et facétieux ? Je lui emboîte le pas, en retard alors que je justifie mon attitude étrange en marmonnant à mes amis :
_ Je ne sais pas ce que je veux.
Voilà qui résume mon existence sans doute. Le monde nous frôle, je la perds par intermittence avant que de poser mes doigts sur son bras pour retenir son allure. Geste que je censure aussitôt après l'avoir osé, le malaise dans le bide, une lame qui fouaille mes entrailles. Mon personnage bien trop mis à l'épreuve ces dernières semaines se délite sous mes pas.
_ Et vous ? Vous vous appelez comment ?
Un indice. N'importe quoi qui lève le voile de ma mémoire pour la faire basculer. Peu importe ce que j'y trouverai. Je la regarde en face désormais. Il m'est trop difficile de détourner le regard pour croire n'avoir jamais été ce que je ne fais que réitérer. Je l'observe avec trop d'intensité avant de souffler :
_ Vous n'êtes jamais venue au Viper hein ?
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() message posté Mar 27 Fév 2018 - 18:24 par Invité
james & eleah
Un rire spontané s’échappe de ses lèvres, cristallin, presque vaporeux. Frivole Eleah, qui s’éprend sans honte de la légèreté de l’existence. Rien ne semble réellement important, ou tout au contraire a l’air primordial à ses yeux dans ces nuits-là, où ils boivent, tous, la pensant ivre elle-aussi, alors qu’elle les observe du haut de sa sobriété maladive. Elle n’a pas besoin d’accessoire pour être grisée. De la musique, l’effervescence du monde autour d’elle, des discussions improbables : cela lui suffit. Son regard curieux détaille, attentif, flamboyant déjà d’une curiosité naïve. On dit que l’ivresse rend sourd, qu’elle désinhibe, rend grotesque celui qui pourtant se tient si bien d’habitude. Elle révèle un autre que soi, ou au contraire, pourquoi pas justement celui que l’on s’efforce de dissimuler, là, tout au fond, et qui ne demande qu’à ressurgir lorsque l’on perd le contrôle. C’est pour cela qu’elle ne boit pas, ou presque. Car le vin a sur elle cet effet sans précédent, qui fait tomber le masque de frivolité pour la dévoiler sans fard, taciturne, meurtrie dans sa chair de petite fille. Il y a des choses que l’on n’oublie pas, non, jamais, c’est impossible. Ses lèvres capturent une nouvelle fois la paille, aspirent le jus sirupeux. Et puis, la spontanéité reprend ses droits sur l’échange. Elle rit une fois de plus, s’indignant/s’émerveillant du répondant presque incisif de son interlocuteur. Il ne manque pas de mordant au moins. Mais il semble jouer un rôle. Comme elle.

« Et vous ne l’êtes pas peut-être ? » Elle mime une indignation toute à elle, mutine jusqu’aux bout des ongles. Les stigmates de l’acharnement se dessinent sur sa peau blafarde comme une évidence. De quel acharnement s’agit-il en revanche ? Elle ne le connaît pas suffisamment pour le deviner. Mais pour que leur album se vende si bien, pour qu’ils réussissent à perdurer, tous les trois, c’est qu’il y a forcément quelque chose derrière. Une force sous-jacente, quelque chose qui les raccroche les uns aux autres et les porte. Ce n’est peut-être pas lui. C’est peut-être eux tous ensemble. Mais la passion est là, palpable. Celle qui anime tous les artistes qui se plaisent pour leur art plutôt que d’en dissimuler la médiocrité derrière des images vulgaires. « Le noir et blanc ça peut toujours s’arranger … » Elle hausse un sourcil, espiègle. Ses doigts fins viennent récupérer le petit parapluie coloré (rose et or, forcément), qui trône depuis un petit moment sur le sommet de son crâne. Elle l’arrange un peu, comme pour vérifier qu’il n’est pas trop froissé, vient enfin ficher le petit pique en bois dans la poche de veste noire, celle au niveau du torse. Elle se recule, avise son « œuvre » d’un regard critique. Son visage s’éclaire. « Ce n’est pas si mal. »

Un instant elle s’arrête, mutique, songeuse. Son regard s’agrippe au sien suffisamment longtemps pour semer le doute dans son esprit, pour rassembler les idées les plus improbables. Mais en même temps, elle ne rate pas une miette de ses paroles. La façon qu’il a de parler de son art lui met directement la puce à l’oreille. Ils sont comme deux satellites, propulsés en orbites d’un monde auquel ils n’appartiennent pas. Mais ils ne s’appartiennent pas non plus. Lui en nuances de noir et blanc. Elle en touche éparses de couleurs vives. Le contraste est trop grand.

« Vous parlez de votre musique comme s’il s’agissait d’une maladie … Ou d’un produit nocif. Il y a déjà tant de souffrances, partout … Pourquoi souffrir en vivant votre musique ? Pourquoi ne pas s’en griser et s’en nourrir ? N’y-a-t-il pas de beautés épargnées par la souffrance dans ce que vous composez ? » Les questions s’enchaînent, son regard insatiable, son entrain intarissable. Il n’y a pas que son art qui la passionne : Eleah est d’une curiosité avide, presque dérangeante, à l’égard de tout et de tout le monde. Cette avidité-là, parfois étouffante, la fait disparaître lentement. Ne reste que les sourires, une lumière aveuglante et bienvenue. « Bien sûr que l’on peut danser sans musique ! Pourquoi un sourd ne pourrait-il pas s’exprimer avec son corps ? Non, la musique n’est qu’un vecteur, elle aussi. Le corps a sa propre musique. Lorsque vous jouez du piano, croyez-vous qu’il est seulement fascinant de vous entendre ? De se contenter des sons que vous créez ? Non, il est tout aussi fascinant d’observer les doigts courir sur le clavier à ce moment-là. C’est l’ensemble … La cohésion de la musique et du corps qui transporte et bouleverse. » s’exclame-t-elle, mimant par des gestes ce qu’elle tente d’exprimer avec peut-être, un soupçon de naïveté. Et puis la vague d’émotions retombe. Elle a du mal à savoir ce qu’il pense, au fond, tant il semble sur la réserve. Soucieux ? Juste observateur ? Difficile à dire. Alors elle ne peut s’empêcher de poser la question qui lui brûle les lèvres. C’est pire encore après cela. Ailleurs. Si loin qu’elle le touche à peine. Elle pourrait parler, bouger devant ses yeux qu’il ne la verrait ni ne l’entendrait. Eleah décide de prendre les choses en main, peut-être aussi pour dissiper le malaise qu’elle croit avoir senti s’emparer d’elle. Debout, prête à prendre son envol, les garçons la dépassent d’une bonne tête, l’encadrent. Entre les corps elle s’apprête à se faufiler, mais juste avant, elle pivote sur elle-même, éprouvant un soupçon d’inquiétude à voir l’homme si désorienté. Et par quoi ? Elle n’en a aucune idée. « Bah alors, tu viens … James ? »

Enfin elle s’élance, son verre dans une main, le soulevant dans les airs pour esquiver les corps qui s’agglutinent et s’enchevêtrent à des rythmes totalement en disharmonie avec la musique ambiante. Ils se rapprochent du bar, le touchent presque, mais là elle sent quelque chose se refermer sur son avant-bras. Une poigne inconnue, quasiment glacée. Spontanément elle se retourne, entrevoit la silhouette toujours aussi désorientée de James. Il frôle l’état second, l’inquiète quelque peu au passage.  Ses lèvres se scindent en une moue mécontente. Son regard s’attarde encore sur les traits de son visage, glissent le long de la ligne de la mâchoire. En même temps, il y a le souvenir du goût d’un whisky irlandais qui se mêle à sa salive, lui fait oublier les notes fruitées et exotiques écœurantes de son cocktail fraise/ananas. La dernière fois qu’elle a bu du whisky, c’était il y a trois ans. La dernière fois qu’elle a bu du whisky, c’était lorsqu’elle était allée voir son père en taule. La dernière fois qu’elle a bu du whisky …

« Te perds pas trésor, on est là. » murmure-t-elle. Les pensées toutes interrompues, sa petite main s’est juste refermée autour de la sienne, le guidant dans sa direction. Une fois à leur niveau, elle le lâche, son attention immédiatement détournée vers le barman. « Coucou ! Alors hmm … La même chose que tout à l’heure pour moi s’il te plaît. Tu peux même forcer sur le sirop de fraise si tu veux, fais-toi plaisir. Quant à mon ami juste là, t’aurais pas quelque chose avec un peu de peps ? Genre … Avec un p’tit effet « coup de fouet » ? J’te fais confiance. » Elle lui glisse un clin d’œil adorable, pose son coude sur le rebord du comptoir. Quelques minutes plus tard, les verres sont prêts. Le sien se voit même gratifié d’une touillette lumineuse et d’une brochette de bonbons à la gelée de porc. Le rêve. Quant au verre de James, difficile de dire à quoi il ressemble. A part que le breuvage est vert. Oui vert. Comme le kiwi, ou la salade verte. Au choix. « Tiens, bois-ça, ça va te redonner des couleurs. Parce que t’as vraiment une mine affreuse. » Spontanément, elle est passée au tutoiement. Parce qu’elle est comme ça. Nature, imprévisible, dans la proximité avant même de connaître sans vraiment l’être pour autant. Elle aspire une nouvelle gorgée de son élixir. Plus elle le regarde, plus le doute se dissipe. Mais chose étrange, l’envie de savoir s’il se souvient d’elle n’est pas poignante. Comme si cet épisode-là de sa vie, son esprit l’avait occulté, qu’elle se plaisait à le dissimuler en elle-même comme un trésor caché, ou bien un secret bien gardé.  « Eleah. » finit-elle pourtant par lui répondre. « Je m’appelle Eleah. » répète-t-elle, comme pour qu’il grave son prénom dans sa tête. Qu’importe ce qu’elle a été, c’est ce qu’elle est maintenant qui compte. Pas cette fille paumée, brisée, perdue qu’il a déjà vue, et visiblement oubliée. Tant mieux. Tant pis. Elle n’en sait rien au juste. « Le Viper ? Oh si, une ou deux fois, avec les Spectrum justement. Au début quand je passais devant, j’étais persuadée qu’il s’agissait d’une boîte gay. A cause de l’ambiance. Mais en fait pas du tout, et le répertoire qu’ils passent est plutôt cool. Pourquoi, c’est ton QG ? » Temps de pause, avant de réaliser qu’elle parle trop. Et trop vite. Surement l’excitation liée à une absorption massive de sucre rapide. « T’es pas le proprio quand même ? »


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James M. Wilde
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() message posté Mer 28 Fév 2018 - 0:22 par James M. Wilde


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You've been bitten by
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Eleah
& James




Elle réagit. Aux gestes, aux mots, aux sensations qui la frôlent et la rencontrent, à chaque seconde. C'est un corps en mouvement, une passion qui pulse sous la peau, cette énergie qui déborde par tous les pores et qui m'envahit, me sort de ma transe glaciale. Elle rouvre le caveau, je respire, souffreteux, j'ai des sentiments contraires, qui se jaugent, s'observent comme des prédateurs étranges sous la lumière tamisée. Prêts à se sauter à la gorge. Dans les cris, j'ai oublié ce que c'était que de simplement converser, sans rien chercher. Sans rien subir. Sans rien détruire. Je réapprends peu à peu les codes qui me rendent à une décontraction de façade, et je l'écoute. Je l'écoute, oubliant le monde autour et le bruit qui cherche à nous abrutir. Quand elle questionne ma propre passion, un voile tombe sur mes yeux, et je les détourne quelques instants. Bien sûr que si. Trop. Bien trop sans doute. Cette passion, elle me dévore, elle gronde et elle me dévaste, à chaque seconde de ma putain de vie. Elle les voit, les signes, les marques, les désaveux durement portés, contre moi et contre d'autres. Elle parvient à me raccrocher au moment où elle épingle ce petit parapluie ridicule à ma poche. Je considère son geste, presque trop raide sur la banquette, comme si cette proximité si facile qu'elle esquisse me la rendait suspecte. Mais je n'ôte pas ce drôle d'ornement, qui détonne sur le monochrome de mon austérité, bien au contraire, mes doigts le touchent quelques instants pour le faire mien, m'approprier quelque chose qui vient d'elle. Un geste qui tient plus du réflexe que de l'acte conscient. Non... Elle a raison. Ce n'est pas si mal. Cela ne va pas si mal ce soir. Peut-être que je pourrais même aller mieux. L'incertitude me donne une expression absente, avant que je ne me laisse emporter par les arguments qui évadent sa bouche comme autant d'évidences de nos deux natures contraires. Ma bouche étire un sourire qui ressemble à de la connivence, je me penche plus encore pour lui souffler. Juste une phrase. Une seule.
_ Qui a dit que toute cette souffrance n'accouchait pas de la plus fragile et émouvante des beautés ?
Mon sourire marque cette souffrance devenue un univers entier, celui que j'explore souvent par choix, parfois par contrition. Cet univers que je ploie, pour le faire devenir cette matière imparfaite, qui déclenche alors toutes les sensations que je traque dans la nature humaine. La félicité derrière la plus triviale des colères, la passion derrière la plus froide des rages, la douceur de l'abandon après les plus déchirants des sanglots. Cette catharsis... J'aimerais presque la lui chanter pour qu'elle la comprenne, mais je me tais. Je me tais pour lui laisser tout loisir de déployer son être quand le mien se planque encore, atrophié, trop nu et trop meurtri pour se sentir légitime devant cette inconnue. Pourtant elle ne l'est pas. J'ai une drôle d'impression qui continue de me retourner l'estomac. Je décroche, et pourtant je me bouleverse à chaque argument qu'elle me sort, car ils viennent caresser ce qui jadis m'a remué jusqu'à la moelle pour ne plus me laisser de repos depuis. J'ouvre la bouche, avant de la refermer. Tout va trop vite. Trop vite.

Elle m'appelle, je la suis, je la touche. J'ai soif et j'ai sommeil, le tutoiement me fait papillonner des yeux, je ne sais même plus comment j'ai su marcher dans son sillage. Je comprends encore moins pourquoi. L'idée même qu'elle m'appelle trésor me fait hausser un sourcil incrédule, mais ma main serre la sienne. Une palpitation, qui suit la musique, et ses pas. Je lui abandonne mes doigts, je la laisse m'emmener sans concevoir de rejet à l'entrave, comme si je retrouvais un sentiment qui fut un jour, mais qui a disparu depuis. Mon épiderme ne se soulève pas, il y a dans le naturel troublant de son geste comme une nouvelle rencontre. Une impression de déjà-vu m'étreint avec violence et je ne m'occupe guère, à grand tort, de l'immonde commande qu'elle est en train de passer au bar. J'attends une révélation qui pourtant ne vient pas. Son prénom sonne comme tous ceux que j'ai su oublier, rien ne s'y accroche, rien ne le projette dans la clarté d'un souvenir, tout est trouble dans ma tête. Peut-être suis-je seulement en train de chercher avec l'avidité des fous ces indices qui sauraient me dessiner aux traits de l'humanité, sans me caricaturer au rang des monstres. Un lien avec cette femme pour savoir en fuir une autre... À brûle-pourpoint, je souffle, dans une confidence à contre-temps :
_ Vous avez à la fois raison, et immensément tort dans l'idée que vous vous faites de la musique. Vous la réduisez à ces sons que l'on entend, mais vous dépeignez aussi tout ce que le corps peut porter comme sensations dans l'harmonie qui le manipule. C'est tout à fait cela. La musique. C'est ce qui secoue les chairs, transperce le souffle, frissonne sur l'épiderme. Ce ne sont pas seulement des notes, ce ne sont pas seulement des sons, c'est tout ce qui fait cette fascination dont vous parlez. La musique, elle peut être partout, dans le corps, dans la voix, dans les secrets de votre esprit. Vous croyez parfois danser sans musique, mais tout au contraire, je crois que c'est la musique qui vous fait danser. Celle qui vous anime, qui vous est propre, qui vous meut et parfois vous laisse exsangue et palpitante, dans cet entre-deux si fragile qu'il tient à la fois du divin... et de la pire des trivialités.
Sur ces belles paroles qui délivrent un peu plus de ma personnalité que je me plais à emprisonner, je considère le verre qu'elle m'offre, tout en buvant volontiers avant de faire la grimace. C'est infect... Elle a raison, ça me redonne des couleurs, celles de l'indignation. Mais comment peut-on même oser servir ça ! Je crois que c'est un de ces smoothies à la mode, avec des épinards et autres conneries de bobo, arrosé d'alcool. Kaitlyn a souhaité en improviser un de ce type un jour. J'ai catégoriquement refusé qu'on les serve. De mon vivant, jamais !
_ Accorde-moi deux secondes Eleah, histoire que je puisse survivre à notre rencontre et t'apprendre deux trois petits trucs de plus...
Je fais un pas en direction du bar, pour exiger un breuvage qui prend soudain les allures d'un véritable Graal, et je fusille du regard celui qui vient de commettre cette ignominie :
_ Tu me serviras aussi un Kilbeggan, un double. Sec.
Rien de mieux qu'un Irish pour me rasséréner quand tout ici m'insulte et me tyrannise. Je suis bientôt armé de deux verres, l'un coloré, l'autre aux éclats ambrés qui me sont familiers. Ça et le petit parapluie en guise de pochette, mes cernes et mes yeux plissés dans la direction de cette petite pipelette qui cherche à m'assassiner, le spectacle est complet. Ou presque. Je m'étrangle sur mon cocktail que je continue de siroter, plus pour m'en débarrasser que par politesse au moment où elle qualifie le Viper de boîte gay. Ça c'est de la faute de Gregory qui a absolument voulu cette putain d'enseigne en néons fluo à l'extérieur. Je rentre, je la démonte. Mais c'est le pompon quand elle qualifie le répertoire de "plutôt cool". Je secoue la tête, incrédule :
_ Bordel, tu ne t'arrêtes jamais de parler, fillette ? T'es sous ecsta ou quoi ? Le répertoire du Viper Room est bien plus que "cool", il est parfait, car figure-toi que le répertoire, c'est moi qui le fais. Et ouais, t'as deviné, c'est moi le foutu propriétaire de la boîte qui fait gay et dont le répertoire est "cool".
J'appuie le mot, en dessinant des guillemets avec mes doigts, en singeant son ton comme si je me moquais d'elle, avant de continuer de plus en plus rapidement :
_ Pourquoi pas "potable" pendant que t'y es. Ou "passable" ? Non mais c'est pas croyable ça, aussi peu de discernement dans une si jolie tronche !
Mais je souris, au bord du rire qu'elle manque de m'arracher une nouvelle fois, avec cette désarmante facilité. Impossible que je l'ai malmenée la semaine dernière, ça n'a pas l'air d'être son genre de venir frayer dans l'antre glauque des rockeurs dégénérés par la cocaïne. Je ne sais pas pourquoi, mais j'en conçois un soulagement immense, qui achève de dénouer mes épaules. Je termine le cocktail aux deux tiers avant de détourner mon attention gustative complètement saturée d'acidité par une longue gorgée de whisky que je fais rouler sur ma langue. Nous sommes plantés là, à nous considérer, au milieu des allers-retours tonitruant des gens éméchés, entre le bar et la piste de danse. Je secoue la tête une fois encore :
_ Impossible que j'aie pu oublier une énergumène pareille. Ou alors, putain, tu devais être bien différente...
Un flash. Une chambre. La douceur veloutée d'une peau qui m'arrache un frisson. Et des odeurs, celles de cet air iodé, si caractéristique. Le passé reparaît, désuni par mes absences. Je pense à Atch, mon grand-père. À sa grande maison irlandaise, celle que je possède toujours aujourd'hui. Je fronce des sourcils, peine à comprendre pourquoi j'associe notre conversation à des réminiscence d'une terre familiale.
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() message posté Jeu 1 Mar 2018 - 17:29 par Invité
james & eleah
Quelque part, à la croisée des routes qui jalonnent rêve, souvenir et réalité,  ils se rencontrent. Son regard elle le connaît sans savoir exactement d’où. C’est surtout la sensation qui lui revient en premier : celle d’avoir vu mirer dans ses yeux la même chose que dans les siens, juste un instant. D’avoir voulu s’y agripper pour oublier ses propres noirceurs : celles nichées au creux de son ventre, étouffées par les rires parfois factices qu’elle offre à tous ceux qui l’entourent/l’écœurent. En s’arrimant à lui, elle a tenté de faire taire les pensées parasites : le cliquetis des menottes autour de ses poignets, l’inertie de son regard alors qu’elle ne se souvenait que de la fureur, le pâle reflet de son ombre quand il l’avait regardée, ébahi et terrifié de voir en elle toutes les ressemblances avec celle qu’il avait un jour brisée. Suivant du regard la constellation de ses souvenirs enfouis, Eleah hésite. Plus elle se concentre, plus elle convoque toutes les images auxquelles il est rattaché, plus son ventre se noue. Elle n’est plus d’une humeur si frivole que cela en son for intérieur. A-t-elle envie de se rappeler ? D’être de nouveau, dans ses yeux tout du moins, celle qu’elle fut ce soir-là ? Sans le savoir, il l’a vue. Sans fard. Sans artifice. S’accrochant à la nudité comme l’on s’agrippe à l’âme, décharnée de toute armure, fragile, presque contrite. Alors qu’elle ajuste le petit parapluie sur sa veste, touche finale sur la toile monochrome, ce qui aurait dû être une évidence n’est pas aussi clair. Mais la certitude du souvenir est là. Ce qu’elle doit en faire en revanche, c’est un autre problème.

Se tournant vers la facile frivolité, pendant un court un instant pourtant Eleah devient sourde à tous les bruits alentours. La musique n’est qu’un bruit confus, acouphène étrange qui gronde au fond de son oreille. Elle perçoit toujours la voix légèrement éraillée par l’alcool de Gregory à côté d’elle, mais elle l’entend à peine. Et puis il y a cette phrase qu’il lui glisse. La tonalité ressemble à une confidence. Et sans savoir pourquoi, un sourire en demi-lune vient éclairer ses traits de femme-enfant. Il n’a pas tort. La plupart des grands artistes en sont l’incarnation. Ils suppurent d’un mal être poisseux, souffrent de cet art qu’ils cherchent pourtant à transcender. Elle ne fait pas exception à la règle. Elle ne danse jamais si bien que lorsqu’elle canalise toutes les souffrances dissimulées de son être dans toutes les fibres de son corps.  La musique est partout alors. Elle la voit, la sent, l’entend et la caresse. Elle fait corps avec elle jusqu’à s’y sentir disparaître. Ce qu’il suggère, ce qu’il dit, toutes les certitudes qu’il place dans la conversation, Eleah ne les oublie pas. Non, au contraire. Elle se nourrit du point de vu, distingue sous l’apparente fatigue de son être au teint maladif des idées qui relèvent davantage de la passion que de l’observation pure et simple. La confidence parvient même à lui ôter tout mot de la bouche. Elle se tait, regarde avec curiosité ses lèvres se mouvoir, les lumières de la pièce se réverbérer dans l’opacité de son regard. Météore étrange que cet artiste-là, qu’elle reconnaît, mais qu’elle abjure tout à la fois. Eleah laisse le silence s’installer entre leurs deux silhouettes en suspens : ses lèvres se portent à sa petite paille. Une gorgée, puis une autre. Et puis un autre sourire, entendu cette fois-ci.

« Gregory a raison. Nous devrions peut-être travailler ensemble. Je serais curieuse de voir ce que donnerait … La collision de nos deux univers. » La collision. Forcément. Milles éclats, des brisures. Elle ne perçoit que cela s’ils se rencontrent. Car ses idées touchent à des absolus qui ne tolèrent pas les corps étrangers. Elle raisonne un peu comme lui, mais dans son domaine de prédilection. Alors les deux ensembles, qu’est-ce que cela pourrait donner ? Des agacements. Des incertitudes. Probablement des milliers de heurts. Mais quelles beautés ? Seraient-ils seulement capable de les créer ? Le jeu en vaudrait-il la chandelle ? Sa curiosité s’agite dans sa poitrine, mêlée d’une excitation toute nouvelle. Ça, plus le sucre qui coule à foison dans ses veines. Son cœur en bat un peu plus fort contre sa poitrine, petit oisillon qui s’affole, cherche son envol. La mine dont il la gratifie après une première gorgée de son smoothie verdoyant lui arrache un rire franc alors qu’elle continue de siroter son délicieux breuvage. Le voilà qui revient. D’où elle ne sait pas. Mais il semble refaire surface, là, avec eux, dans cette antre de la pop pour adulescents sous narcotiques.

« J’te l’accorde, ça a l’air infect. Mais regarde-moi-ça, tu as meilleure mine. Ce barman est un génie. J’vais lui demander son numéro. » Yeux ronds, elle est presque sérieuse dans sa boutade. Jette même un coup d’œil en direction du barman en lui adressant un petit signe de la main. Il n’y a que lui à savoir qu’elle n’est absolument pas ivre, et loin de l’être. A moins que l’ivresse tout autour d’elle ne déclenche en elle un effet placebo. « On apprécie le whisky irlandais, à ce que je vois. » glisse-t-elle à la dérobée, avant que les élucubrations ne commencent. Un soupçon de rougeurs gagne ses joues lorsqu’elle s’aperçoit que oui, elle vient de mettre les pieds dans le plat. Eleah manque de s’étouffer devant la modestie naturelle qu’il affiche. Son rire s’étrangle dans son cocktail, ses fossettes se creusent. En effet, il est revenu. « Parfait ?! Nan mais voyez-vous ça. T’es bien sûr de toi, pour une rock-star qui boit du smoothie détox. » répond-elle du tac au tac, maligne/enfantine. « Non, potable et passable, ça voudrait dire que ce que vous passez au Viper est tout juste tolérable à l’oreille tu vois ? Là « cool », ça veut dire que souvent, il y a une bonne ambiance. Que votre répertoire est vraiment pas mal. Non non, j’admets, vous choisissez des groupes de qualité. » Mais ? Parce qu’il y a forcément un mais. « C’est juste que je préfère les ambiances plus … Intimistes disons. » Et les pubs où passent des groupes de jazz, ou de vieux rock. Ça, ça lui plaît. Ça, ça parle à son âme. C’est comme ça qu’elle a été élevée faut dire : entre un saxophone, un piano, et un vieux 35 tours.

Et puis, cette phrase. Comme sortie de nulle part. Une phrase qui vient tuer le sourire sur son visage, le rend plus diffus et incertain. Plus absent aussi, même si cela ne dure qu’une brève seconde. Une autre gorgée vient caresser son palais. Alors il se souvient, lui aussi ? Pas avec autant de précision qu’elle pour l’heure, non, peut-être pas. Mais il se rappelle, peu à peu. Que doit-elle faire ? Lui mentir ? Feindre de l’ignorer ? Si l’obsession demeure, quoiqu’il arrive, il finira de toute façon par se rappeler. Alors à quoi bon. « C’est la frange. Ça fait toute la différence. » murmure-t-elle alors, avec un sourire en coin plus timide, fourrageant la fameuse frange qui orne désormais son front. Son regard se fixe sur un point invisible au-dessus de son épaule avant de revenir à ses traits. Son visage parle davantage, plus expressif qu’il ne l’était en arrivant à leur table, tout à l’heure. Elle lui a donné suffisamment d’indices pour lui laisser entendre qu’ils se sont déjà rencontrés. Le reste lui appartient. « Tu étais un peu différent, toi aussi. Mais cela n’a pas d’importance. » glisse-t-elle, comme un murmure, avant d’être interrompue par un danseur peu habile (passablement ivre aussi), dont l’épaule s’entrechoque brutalement avec l’arrière de son dos. Mouvement abrupte en avant, le contenu de son verre à moitié plein fait une envolée sur une partie de son tee-shirt rose fushia, et sur les alentours au passage. « Cac (merde). » Le juron irlandais racle sur sa gorge, guttural. Du bout des doigts elle jauge l’ampleur des dégâts. Chose prévisible : le breuvage colle. « Désolée t’as rien reçu ? J’vais aller nettoyer ça avant que ça sèche. » Absente, elle dépose machinalement son verre vide sur le comptoir, s’emploie déjà à se frayer un chemin jusqu’aux toilettes. Une queue d’enfer, forcément. Non mais elles ont vraiment besoin de s’agglutiner comme ça pour aller pisser, ou se repoudrer le nez ?



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Eleah
& James




Deux yeux qui cherchent les miens dans le bruit de la nuit qui s'éprend des rires faux et des mots creux. Deux yeux. Sur moi. À concevoir ce passé qui referme ses serres sur ma peau, la soulevant de frissons qui gravent à rebours des sensations que nous avons dû partager. Je ne suis certain de rien, ni du lieu, ni de la date. Les repères prosaïques m'échappent toujours, s'étiolant dans les circulations complexes de mes pensées qui fusent, mais mon corps... Mon corps lui se souvient toujours. Des doigts frôlés qui s'arriment à la chair, du secret d'une bouche qui gémit avec langueur, de l'étoffe moirée d'une chevelure où je me perds. Je me souviens. Je me souviens, je crois. C'est son parfum qui reparaît, me réchauffant dans les échos d'une humeur solitaire, mes ombres peintes dans la perdition d'un autre néant. Qui étais-je alors ? Qui suis-je pour toi ? Qui suis-je tout court... Mes lèvres s'entrouvrent mais je ne sais comment lui confier ce qui renaît en moi, je ne sais enfermer mes ressentis dans des mots. La violence de l'affect me rend muet. La virulence du choc me rend sourd. Je ne fais que la voir sans la remettre pour autant dans le paysage singulier de mes souvenirs qui se teintent de sensualité. Mes prunelles tremblent quelques secondes de la mise à nue que je conçois avec l'incertitude du changement. Là où j'ai traîné ma carcasse, le feu la lèche et la consume, mes os sont poreux et ma peine est immense. J'aimerais me souvenir mieux de ce que nous avons partagé pour me détourner de l'horreur. Mais je n'y parviens pas. Une seule seconde et tout revient, le passé fuit, les délicatesses de délitent au présent. La voix de mes amis qui peinent à tomber d'accord sur le prochain single à extraire de notre nouvel album, le rire d'une fille quasiment ivre morte, trop blonde et trop maquillée. Je fais une légère grimace, mais ça n'a plus rien à voir avec le goût immonde du smoothie. Je le termine pourtant, la voix adoucie mais mes iris sur elle pour la jauger. Devrions-nous nous oublier à créer ensemble, quand nous avons déjà uni nos corps dans la pulsion d'un plaisir partagé ? Dois-je exhumer plus encore la sensation fichée dans le creux de mon ventre, pour perturber toutes celles qui déjà sont trop avides pour demeurer contenues ? Dois-je la trainer dans la déliquescence de ce qu'est mon quotidien aujourd'hui ? Changeant, incertain, imparfait ? La sensation se fait musique, étrangle la médiocrité de celle qui cherche à la surpasser, trop commune, trop étrangère. Extérieure. Inutile. La musique qui fut à deux, dans un passé qui nous dessina autrement. Je penche la tête sur le côté, la détoure avec lenteur, ses sourires, ses airs de femme enfant, parfois aussi perdus que les miens. Mon murmure vaut toutes les promesses :
_ Peut-être devrions-nous, en effet.

Mais le monde ne nous attend pas, nos incertitudes il les balaie, et tout autour continue de danser, se riant bien de ceux qui ne savent décider quels pas doivent les porter. Sur mon visage, les idées qui défilent, dans mes yeux, l'ambition qui palpite, dans mon coeur, les battements d'un combat. Mon être se révulse à s'imaginer dépérir. Un peu plus que cela, et il suffira d'une ligne pour m'envoyer danser plus loin que je ne suis jamais allé. Et mes promesses trahies ne pourront alors se voir réparées. Cette faiblesse se refuse à moi, et son rire qui pulse, bien plus aérien et plus mélodieux que le brouhaha ambiant me donne la force de trancher. Son rire c'est une putain de came. Pulsation dans mon corps sclérosé. Les souvenirs deviennent des projets. Oui. Oui. Gregory a raison. Comme bien souvent... Je joue désormais, au tempo de notre conversation psychédélique, et me débarrasse de la boisson qui chercha à m'envoyer ad patres :
_ À cause de toi, mes allures de rockeur émo-gothique sont définitivement gâchées. De la couleur, mais pour quoi faire ? Tu veux qu'je rentre seul ce soir, c'est ça ? Quant au whisky irlandais, ma jolie, c'est à ça que j'ai été quasiment élevé.
Le grand-père n'avait aucun problème pour me laisser farfouiller dans les placards, et ce pendant toute l'adolescence. J'ai un petit sourire mélancolique, cela faisait bien longtemps que je ne m'étais pas souvenu de lui avec autant de détails, toute ma jeunesse dénaturée par la fêlure de mes découvertes monstrueuses d'adulte. Il est très délicat pour moi de la ressusciter. Nous discutons du Viper, et même si je continue à froncer les sourcils, comme si les insultes fleurissaient par sa bouche trop bavarde, je n'en note pas moins les compliments qu'elle fait, et d'autres couleurs viennent réchauffer mon visage, avant que je n'opine :
_ On a hésité, tout au départ, quand on a choisi le genre de lieu qui nous accueillerait. Il y avait un petit pub à LA, qui était un peu comme notre seconde maison, ça t'aurait plu comme ambiance... Le Viper, il a surtout été construit autour de sa scène, je l'ai aménagé pour l'acoustique et pour contenir suffisamment de monde pour frôler l'euphorie d'une petite salle de concert.
Je fais un clin d'oeil mutin en ajoutant :
_ Comme ça, y a bien plus de fans pour m'aduler.

Ma confidence, portée jusqu'à son front avec la spontanéité de ma langue qui se délie, la fait fuir. Elle pense, et je ne sais exactement ce qui peut ficher quelques éclats de désespoir dans ses iris que j'observe. J'ai presque peur qu'elle mente, et toute ma posture semble se redresser pour parer le rejet que je pressens. Serais-ce réellement surprenant qu'elle me renie quand j'ai sûrement été froid voire blessant quand nous avons dû nous quitter ? J'ai dû être comme ça... Je suis toujours comme ça. Je crois. La sensation qui continue de tourner dans ma cage thoracique, à chaque inspiration, ne tisse aucune blessure supplémentaire qui pourrait m'indiquer une séparation brutale cependant. Je l'entends confirmer. Les blancs se remplissent de sa voix, le silence devient une créature trompeuse, j'essaye de me rappeler le goût de sa peau, collectionnant les couleurs qui dansent devant mon regard tandis que je suis la ligne de ses phrases plus ténues. Je baisse les yeux. Différent. Le mot tombe, révélation terrible, anodine pour tant d'êtres parmi nous, immensément troublante pour moi. Différent. Je ne parviens pas à convoquer celui que j'ai pu être, car je me persuade à continuer de peindre le monstre que je n'ai pas changé. Hier. Aujourd'hui. Demain. Au présent de l'infamie. Le juron me bouscule, Atch disait la même chose. Je secoue la tête, le col de ma veste a à peine été éclaboussé. Je reste là, près du bar, les gars à côté toujours sur la banquette, oscillant entre des instincts contraires, avant de lui emboîter le pas une seconde fois, abandonnant à qui voudra la Vodka caramel et le Daïquiri que je n'ai pas pris la peine de distribuer. Je pousse des gens, je fais un sourire ravageur à une fille qui cherche à me parler en lui murmurant un "pas maintenant, Beauté" avant de rejoindre Eleah. Des couples s'étreignent, des filles se disputent, des amis se prennent en photo devant les décors roses et ors. J'ai l'air de ne plus pouvoir me passer d'elle pour la suivre jusqu'aux chiottes. Super. Je zyeute le spectacle de son t-shirt ruiné, avant de poser une question. De but en blanc.
_ Différent comment ?
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() message posté Ven 2 Mar 2018 - 8:29 par Invité
james & eleah
La sphère se referme, et le temps d’un balbutiement, incertain, tout juste audible, l’illusion s’étiole. Il a oublié. Dans les méandres de son esprit elle s’est vue disparaître aussi vite qu’elle était apparue, étoile filante passée au-devant de son univers avant de mourir. Mais Eleah ne le blâme pas pour autant, car elle aussi, pour des raisons toutes différentes, elle a rangé cet épisode-là de sa vie dans un tiroir, puis l’a refermé, laissant les souvenirs s’endormir au profit d’une réalité toute entière qui l’attendait pour qu’elle la dévore. Plus elle se concentre, plus le doute se dissipe. Il n’y a plus de place à l’erreur désormais. Elle se surprend d’ailleurs à ne pas l’avoir reconnu tout de suite. Car il n’a pas de ces visages inexpressifs ou dénué de lignes qui ne marquent pas. Il n’a pas le profil de ces gravures de mode que l’on habille, que l’on projette sur des façades entières, et devant lesquelles on passe sans réellement les regarder. Ils disparaissent presque derrière les vêtements qu’ils portent. Son magnétisme ne vient pas d’une beauté accessoire. Il est tout ailleurs, niché dans le charisme. Celui qui rend attirant sans que l’on ne sache réellement pourquoi. Celui qui happe et bouleverse, bien plus que ne pourrait le faire une sculpturale beauté que l’on oublie aussi vite qu’on l’a consommée.

« LA … J’adore cette ville. Je n’y suis allée qu’une fois, mais c’était génial. Pourquoi vous vous êtes installé à Londres tous les trois, si vous étiez si bien aux Etats-Unis ? » La question sonne comme une évidence à ses yeux. L’ambiance intimiste qu’il dépeint lui fait envie. Elle s’éclipserait bien de cette boîte abominable pour une atmosphère plus cosy, et bon enfant. Une seconde elle relève les yeux vers l’un des écrans géants qui ornent les murs. Et le clip qui passe en boucle, encore et encore jusqu’à les écœurer tous. Plus il passe, plus elle l’aperçoit, plus elle distingue les imperfections cachées de la chorégraphie qu’elle a mis en place pour eux. Tous les détails qu’elle changerait aujourd’hui pour les faire autrement. Son regard se reporte sur James, s’y agrippe pour ne pas penser à autre chose. Sa mine frôle l’indignation à présent.

« Tu déconnes ? Va pas me dire que tu es de ces rock-star qui s’enivrent de voir leurs fans défaillir devant la scène lorsqu’ils poussent un râle, ou qui jubilent lorsqu’ils sont gratifiés de lancés de petites culottes de groupies décérébrées. » Un ultime rire lui échappe, spontané, clairon dans la nuit aux milles mélodies abruptes et saccadées. Il sait être drôle lorsqu’il n’a pas cet air absent et taciturne qui l’enveloppait tout à l’heure. Celui-là même qui le révélait comme un parfait inconnu à ses yeux, alors même que, relativement physionomiste, Eleah aurait dû le reconnaître tout de suite. Différent, oui. Il est différent de celui qu’elle a rencontré un jour. Quoique son attitude depuis quelques minutes le rende tel qu’il a été. L’alcool consommé ce soir-là lui a fait oublier les détails. Mais elle n’a pas oublié cette forme d’espièglerie, toute confuse, dont il vient de la gratifier. Jeu de dupe ou sursaut de l’être qui malgré toutes les entraves, cherche à se manifester ? Eleah l’ignore. Elle ne le connaît pas suffisamment pour pouvoir faire la différence. Et de toute façon, elle n’est pas du genre à forcer l’offrande. Elle prend des êtres ce qu’ils veulent bien lui donner. A appris à s’en contenter. A sa place, son frère aurait sans doute été plus vindicatif, mais tout le monde sait dans leur entourage qu’ils ont toujours été aux antipodes, malgré leur ressemblance physique troublante.

Le menton abaissé sur son tee-shirt bariolé au jus de fraise, c’est l’excuse inespérée pour s’éclipser un instant. Emportée naturellement par la vague de monde alentour, féline, agile, elle se faufile entre les corps, se voit gratifiée de quelques salutations au passage, parce que forcément, les Spectrum n’ont pas tari d’éloge sur son travail, et l’ont présentée à tout le monde lorsqu’elle est arrivée. De quoi enrichir son carnet d’adresses. Il n’y a jamais de petits profits. Les toilettes des femmes sont bondés, forcément. Entre une blonde plantureuse qui se remaquille, une brunette déchirée penchée au-dessus de la cuvette (et qui va probablement passer le reste de la nuit dessus) et toute une file de minettes perchées sur des talons hauts qui attendent leur tour, inutile de préciser que c’est the place to be pour être au parfum de tous les ragots de la soirée.

« Pardon les filles, j’emprunte juste le lavabo … entonne Eleah en se frayant un chemin jusqu’à une vasque vacante. Un coup d’œil dans le miroir : elle en a partout, et ça commence déjà à coller par-dessus le marché. D’un geste elle appuie sur le bouton du robinet, commence d’ores et déjà à essayer de réparer les dégâts, en étalant plus qu’autre chose dans un premier temps. Penchée en avant, l’entreprise est périlleuse, et passablement inutile.
- Trésor, il est flingué ton truc. Tu ferais mieux de l’enlever. conseille la blonde à son côté, avant d’avoir un regard circonspect dans la direction de l’homme qui vient d’entrer.
- Dis-donc Jéronimo, c’est les toilettes des dames ici, qu’est-ce que tu fous ? déclare une des nanas dans la queue, outrée.
- Vous en faites pas les filles, c’est pas un voyeur. Il préfère les mecs de toute façon. répond Eleah, la bouche en cœur, pour lui fournir une excuse toute trouvée. Bah quoi ? demande-t-elle à James ensuite, l’air de rien, comme si tout était absolument normal. Oh et puis zut. Dites-moi les filles, est-ce que l’une d’entre vous aurait un tee-shirt en rhab’ ? La solidarité féminine se fait laborieuse. Mais finalement, il y en a une qui sort de son sac à main un tee-shirt à l’effigie des Spectrum, qui a été distribué à l’entrée pour les invités avec tous un tas d’autres babioles inutiles (un porte-clef lumineux notamment. Oui. C’est possible. L’apologie du bon goût.) Merci, t’es géniale ma belle ! Ni une ni deux, sans aucune pudeur, la seconde d’après, elle a déjà enlevé son tee-shirt trempé. Tiens-moi ça tu veux ? sans lui demander son avis, elle lui met le tee-shirt sinistré entre les mains, enfile celui des Spectrum à la place, carrément trop grand pour son gabarit de moustique. Ça pourrait presque lui faire une robe. Courte la robe en revanche. Très courte.  Non mais, c’est quoi les tailles qu’ils ont refilé aux invités ? Machinalement elle noue le bas du tee-shirt, histoire de ne pas avoir l’air de sortir de son lit, puis récupère le fushia entre les mains de James. Merci trésor.   Elle le met en boule, ne s’encombre d’aucune formalité en le mettant directement dans une poubelle. Eleah lui emboîte le pas vers la sortie, et daigne enfin répondre à la question qu’il lui a posé, tout en aplatissant les plis de son nouvel habit de lumière. Différent au sens où … Je ne t’ai pas reconnu tout de suite quand tu es arrivé. Tu avais l’air … Ailleurs … Absent … Comme si tu revenais d’un périple terrible dans les noirceurs du monde. L’image n’est peut-être pas idéale, mais compte tenu de la mine qu’il affichait alors, elle n’a rien eu d’autre en tête. Cela dit, en trois ans, on change tous. Plus ou moins.  ajoute-t-elle, comme pour temporiser son précédent propos. Je ne pensais pas te revoir un jour. Admit-elle enfin, haussant en même temps les épaules, avant d’arborer un sourire en demi-lune. Plus loin elle distingue Ellis, et Gregory. Elle les trouve sympa tous les deux. Ellis a l’air d’être un type bien … Gregory aussi. Elle marque un temps de pause, étouffe un petit rire derrière sa main. En revanche, il est carrément ivre.  Tu t’en occupes d’habitude quand il est dans cet état ? »

« Prop me up, before I black out »
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James M. Wilde
James M. Wilde
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() message posté Ven 2 Mar 2018 - 14:06 par James M. Wilde


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Prop me up, before I black out
Withdraw before you're out of time
Clean slate and buried war crimes

You've been bitten by
A true believer
You've been bitten by
Someone who's hungrier than you »

Eleah
& James




Je ne peux que la considérer différemment, il y a dans les non-dits de mes souvenirs brumeux de cette gêne héritée d'une étonnante pudeur. De celle que j'ai très peu l'habitude de savoir parer. Personnage impudique par essence, vomi sur le papier bon marché des tabloïds, mes frasques se distinguent, toutes exposées. Des bras nus qui m'enserrent, des bouches que j'ai embrassées, des corps que j'ai consumés au milieu de l'alcool ou de la drogue. Ces filles innombrables, que je ne reconnais pas, que je peux croiser sans détourner un seul instant les yeux car j'assume tous les tourments qu'elles ont pu subir à mes côtés, consentantes dans la destruction anonyme d'une relation sans gain, si ce n'est l'exaltation factice de quelques minutes avant que le corps ne retombe de nouveau dans tous ses manques, l'extase frôlée devenue une blessure amère pour n'avoir guère pu être totalement partagée. Et celles qui ont un jour suffisamment atteint mes chairs pour laisser une empreinte mémorielle sur mes sens, en général, soit je les quitte avec la couardise de ceux qui ne peuvent plus supporter les attaches et leurs morsures, soit je les garde jalousement auprès de moi pour ne plus les quitter du regard. Jusqu'à ce qu'elles s'aperçoivent que les intensités qui se nichent dans mes prunelles sont bien trop implacables pour qu'elles ne les subissent davantage. Eleah est dans cet entre-deux incertain, encore mâtinée d'oubli, je commence à la concevoir dans toutes les aspérités de sentiments divers : l'avidité de recouvrer celui que je fus par accident alors, le besoin de me parer de ses traits pour exister encore, la peur de ne plus pouvoir être sans hurler. La résurgence de la Californie me donne d'autres élans, et mes premiers réflexes qui me murmurent de ne rien dévoiler ne tiennent pas la cadence de ce besoin dévorant pulsé par ma fragilité. Démuni, je ne peux plus qu'apparaître dans l'état où je suis rendu, sans plus rien maquiller de ces moments que je regrette tant. Mon ton trace cette tristesse, la blessure de ce départ imposé ne s'est jamais totalement refermée :
_ Parce que les gars voulaient rentrer, voir la famille, arrêter de courir. Parfois, l'on revient aux origines parce qu'on n'a plus la force de les ensevelir sous une existence factice. J'aurais aimé pouvoir rester. Ça ne t'a jamais tentée, les Etats-Unis, pour y danser ou y porter ta carrière ?
Et me cacher là-bas, à jamais, oublier l'Angleterre et le deuil enchaîné à cette ville de cauchemar. Je suis son regard, tombe sur le clip que pour la toute première fois je détaille, l'harmonie entre la chanson et les mouvements, c'est comme une union imparfaite, qui se cherche, se trouve souvent, se rate parfois. J'aime ce que j'y trouve, j'aime ce qu'elle a sans doute mis d'elle dedans, j'aime ce qu'elle a su confier dans les contre-temps. Je n'y vois qu'un accord de toute beauté, je suis la ligne des muscles, les vêtements dépouillés, je sais que je travaillerai avec elle désormais. Je secoue la tête, amusé, un sourire de garçon sur les lèvres, les yeux brillants de mes jeunes années, presque adolescent dans l'aveu que je glisse :
_ Je ne ferais que mentir si je prétendais que je ne trouve rien dans leurs hurlements. Il y a... Je ne sais pas, une fascination et une répulsion pendant ces quelques minutes-là, cette jubilation déchaînée, tu sais... Ça fait partie du contrat, c'est ridicule et en même temps c'est une ivresse terriblement addictive. Le tout c'est de savoir s'en servir au bon moment.
La relation de pouvoir et de sujétion, je la méprise mais je ne peux m'empêcher pourtant de la laisser m'emporter. Parfois c'est l'éclat d'une seconde, une seconde où eux et moi, nous sommes dans la fièvre de cet échange... Puis tout se brouille de nouveau, et je ne vois que des corps, des cris, et je ne conçois alors plus que du dédain pour ceux que je sais enchaîner à chacun de mes mouvements. Je hausse un sourcil :
_ Dis surtout que tu es jalouse, parce que dans le cadre de tes représentations, les gens savent se tenir, et ils ne te balancent pas leurs sous-vêtements. Je suis certain que ça te manque.

Puis les toilettes... Un autre décor pour un tout autre échange. Je suis comme le renard dans l'intimité d'un poulailler, et contrairement à l'argument qu'elle sert à ses congénères, mes iris trahissent toute mon arrogance masculine. Des chiottes comme celles-ci, j'en ai beaucoup visitées, accompagné. Des filles comme cette magnifique blonde que je reluque sans aucune gêne. Mon ironie déborde :
_ Ouais c'est ça, mes deux copains du moment sont là-bas, prêts à s'écrouler sous le poids de mon charme. J'ai voulu jouer sur le désir, vous voyez, je les fais mariner.
J'ai un rire incrédule, un peu agressif, je calcule la blonde des pieds à la tête, elle a le genre de celles que j'emmène pour prolonger des soirées comme celles-ci, mais Eleah s'amuse, je hausse les épaules quand elle me file l'objet du délit entre les mains, et mon regard s'aimante à sa peau nue. Je glisse mon indiscrétion sur la peau de sa taille, et j'ai comme un flash supplémentaire, qui me rappelle ce que cela fait de poser sa main dans le creux de ses reins. Dublin. Ou... non. Non. Galway. Je ne sais pas pourquoi mais j'en suis certain, je sens la ville, j'entends la circulation des bateaux dans le port, je vois les couleurs des différents pubs. Galway. On y était... en octobre. Octobre de quelle année. Je suis paumé. Rah ! C'est Greg qui sait tout ça par coeur. Je la suis volontiers, amusé de ses allures décontractées dorénavant qu'elle arbore le t-shirt du groupe en vedette ce soir, j'essaye de marcher à ses côtés même si fendre la foule de front est délicat. Et c'est elle qui me livre la pièce manquante de cette rencontre diffuse. Trois ans. Le concert qui s'est terminé sur notre épique outro d'Agitated. Cela je m'en souviens, c'était la clôture de notre tournée anglo-saxonne, les gens étaient déchaînés. Je suis parti seul après cela, je n'avais pas envie de fêter avec les garçons notre victoire qui résonnait comme un échec dans ma tête. On allait devoir rentrer, retrouver le Viper, essayer de replonger dans ce nouvel album que je peinais à concevoir. Je réponds avec lenteur :
_ Je me suis un peu perdu en chemin.
L'euphémisme est charmant. Je regarde Greg au loin, presque pivoine tant l'alcool lui est monté à la tête et je les entends... Les échos malsains de mes échappées. Je les lis... Tous ces indices qui montrent tout ce qu'il a dû porter en mon absence, porter et subir à me voir dégénérer sans rien pouvoir y faire. Je gratte la blessure tout juste cicatrisée de mon arcade sourcilière, les stigmates de cette violence que je n'ai pu contenir et je souffle :
_ On change... Je ne sais pas. Je n'en suis pas bien sûr à force. Tu crois que tu es différente mais tu essayes juste d'être quelqu'un d'autre. Sous ton rire acidulé et tes mimiques charmantes, c'est la même personne. La même personne. On est juste qui on peut être, c'est tout.
Je la regarde avec une douceur mêlée de peine, je parle de moi, je parle d'elle, je parle de tous ceux qui prétendent être heureux tout autour, et dont les mensonges débordent dans des exclamations surfaites. On ne change pas. On ne change jamais. Je lui confie, sans une seule seconde fanfaronner :
_ J'espère que tu n'es pas contrariée que ce soit le cas. J'ai l'impression... J'ai l'impression que ce n'était pas un mauvais souvenir, hein ? C'était à Galway n'est-ce pas ?
Je me rappelle, de plus en plus, de son sourire, et aussi de cette fragilité qui se ressent sous le fard de ses attraits. Je reviens à mes amis avant de hocher la tête :
_ Ils sont géniaux. Mais il ne faut pas leur répéter trop souvent, sinon ils vont s'apercevoir qu'ils n'ont en réalité pas véritablement besoin du leader du groupe. Ils vont prendre la grosse tête, et le melon, au cube, c'est ingérable. Mieux vaut les laisser dans l'ignorance.
Je roule des yeux en grommelant :
_ Putain, pourquoi il ne tient toujours pas l'alcool après toutes ces années. Pffff... Ouais ouais, t'en fais pas, je vais faire le ménage et ramener son cadavre en lieu sûr. Il l'a suffisamment fait ces derniers temps j'imagine. Tu te fais du soucis pour blondinet, ou quoi ?
Un temps d'arrêt, un peu amusé. Elle était avec lui au final avant que je n'arrive, et peut-être Greg a-t-il conçu le début d'un béguin pour son joli minois, ça ne serait vraiment pas étonnant, elle est aussi joyeuse que lui, agréable, avec cette finesse d'esprit qui permet les échanges les plus agréables car ils apaisent, le temps qu'ils peuvent durer. Je pousse son épaule de ma main, joueur :
_ A moins que tu ne veuilles que j'abandonne son cadavre sur le pas de ta porte, je peux livrer à domicile. Y a aucun danger avec lui, il sait être bien élevé, et je crois qu'il est persuadé par les magazines féminins qu'il faut être un gentleman pour plaire, et autres conneries du genre. Mais il faut me le rendre, amoureux il est chiant, il ne se concentre plus et j'ai besoin de lui tu vois, frais et dispo, surtout si on doit réfléchir à ce foutu clip.
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() message posté Sam 3 Mar 2018 - 11:18 par Invité
james & eleah
Revenir aux origines. Là où tout a commencé. L’idée la fait réfléchir, la laisse mutique dans le bourdonnement grisant/indécent des milles silhouettes qui les entoure, jusqu’à les laisser anonymes parmi la foule. Revenir aux origines. L’idée est si incongrue, si évidente, si inconcevable aussi. Pourquoi s’enliser là où l’horreur a étendu son empire ? Pourquoi vouloir forcément se rattacher à ce qu’on fut, alors que cet être-là était intolérable ? Sa conscience refuse de comprendre. Mais elle est pourtant forcée d’admettre qu’elle sait. Oui elle sait quelle sensation cela peut procurer, de retourner sur les terres qui ont tout détruit. Cette attirance que l’on éprouve, malsaine parfois, pour ce lieu qui a vu naître le monstre tapi sous la chair. Hormis par obligation, jamais Eleah ne retournera sur les lieux de son enfance. Cela elle s’y refuse, comme si s’y rendre, c’était prendre le risque de redonner de la matérialité à l’intolérable, à ce qu’elle n’oublierait jamais malgré tous les efforts possibles et imaginables. Il est des choses qui restent gravées, là, quelque part. Au-delà de la chair, c’est dans l’âme que cela s’installe. Depuis des années elle fuit, encore, toujours. Au point de ne plus savoir faire autrement. Alors quoi bon ? A quoi bon marquer une pause, s’arrêter, regarder en arrière ? Non elle ne peut pas. Non, c’est intolérable.

« Le poids d’une existence factice est parfois moins lourd à porter que le poids de ce que l’on cherche à fuir. » dit-elle, pensive, son regard fixé sur une silhouette au loin. Celle de Gregory en l’occurrence, qu’elle ne voit pas vraiment en réalité. Elle songe à Ellis aussi. A ce que James vient de dire. Alors il sait, lui aussi, tandis que ces deux acolytes, eux, ignorent. Ils ont été épargnés. Les horreurs ont été projetées sur eux comme des éclaboussures, mais jamais ils n’y ont mis les mains. Jamais ils n’ont été acteurs au point de ne plus pouvoir revenir en arrière. La question qu’il lui pose lui échappe presque. Eleah y revient en contretemps, persuadée de s’être trahie en laissant un temps trop long de réflexion s’installer entre leurs deux silhouettes. Ce n’est pas ce qu’elle est censée être, dans sa spontanéité toute naturelle. « J’y suis allée plusieurs fois étant plus jeune. Avec le Royal Ballet. J’aurais pu m’y installer, les opportunités ne manquaient pas là-bas. Mais … je ne sais pas. Ce n’est pas ce dont j’avais envie à l’époque. Peut-être irais-je un jour, les portes sont toujours ouvertes. » La réalité, toute évidente, c’est qu’il y a son frère, Arthur. Jamais elle ne le quittera. Au fond c’est peut-être lui, son pire démon. Elle l’aime. Elle le hait. Ils se rappellent l’un et l’autre constamment ce qu’ils ne pourront jamais oublier, l’enfer dans lequel ils sont nés. Elle a toujours voulu le protéger, des autres, de lui-même, d’elle aussi, au point de s’oublier en lui comme le font les âmes sœurs. Il y a entre eux cet indicible lien qui n’est compréhensible par personne d’autre. Lorsqu’elle n’a pas de nouvelles de lui pendant plus de quelques jours, c’est une torture. La peur la ronge. Mais en même temps, lorsqu’il est trop présent dans sa vie, elle renoue avec des instincts destructeurs. Car Arthur est tout, sauf l’équilibre qu’est censé vous apporter un frère sur lequel vous pouvez compter.

La tonalité de la conversation change. C’est mieux, beaucoup mieux. Plus rassurant en tout cas. Eleah préfère être dans la complicité que dans la confidence, même si souvent l’un ne va pas sans l’autre. Un élan de surprise la traverse, l’enjoue. D’un regard subtil elle étudie l’expression qu’il arbore, presque avec délicatesse, pour la conserver dans l’écrin d’un souvenir qu’elle souhaite figer contre son visage. Il l’ignore peut-être (mais peut-on réellement ignorer cela ?), mais il est bien plus attirant avec cette expression espiègle. Il paraît plus jeune, moins affadi par les aléas de sa vie. Inatteignable, comme figé dans une indicible jeunesse qui rejette les élans destructeurs pour savourer/s’amuser. C’est cela qu’elle cherche, elle aussi, en s’amusant de tout, en se confondant dans une excentricité à laquelle elle a fini par croire dur comme fer. Elle refuse de se laisser atteindre, que ses propres démons la détruisent. Elle veut être plus forte que cela. Mais les habitudes ont la vie dure, et parfois, le naturel revient au galop plus vite qu’on ne l’imagine.

« Parce que pendant cette fraction de seconde, l’adrénaline, la sensation de puissance est indicible. Comme si le monde était à tes pieds. » Elle lui rend un petit sourire complice. Ses succès n’ont rien à voir avec ceux qu’elle a pu connaître. Ils gravitent dans des univers aux publics relativement différents. Mais elle peut imaginer sans peine la sensation procurée. Cette même sensation qui fait perdre pieds à bien des artistes qui se produisent sur scène devant public. Lorsqu’on sent que l’on entraîne toute la salle avec soi, que l’on subjugue, qu’il y a cette cohésion de groupe immense : rien ne peut égaler cette sensation-là. Pas même la plus puissante des drogues. « Mon public à moi est plus discipliné. Il lance des fleurs. C’est encore mieux. » Elle lui glisse un clin d’œil, à la dérobée, accompagné d’un petit air rêveur. Elle adore les fleurs, toutes autant qu’elles sont. Les rock-stars n’ont pas ces privilèges-là. Ils en ont d’autres cela-dit.

Dans les toilettes, alors qu’elle s’affaire à nettoyer son tee-shirt sinistré, Eleah l’observe de temps à autre. Il est vraiment en train de mesurer les mensurations de Blondie aux gros obus là ? Un petit regard vers le ciel, et elle bride son envie de lui envoyer une claque sur l’arrière du crâne pour lui remettre les idées en place. Sauf qu’en toute honnêteté, elle l’admet, cette nana est vraiment bien foutue. Un peu trop refaite à son goût : elle mettrait sa main à couper que le décolleté n’est pas 100% biodégradable, mais enfin. Des jambes immenses, fuselées. Inutile d’imaginer qu’il doit y avoir pire destinée que de se retrouver à courir le long de ses attraits féminins. Cela dit, elle n’a pas l’air de remarquer le regard qu’il porte sur elle. Ou alors si, elle le voit, ais l’argument énoncé par Eleah est imparable. La jugeote semble lui faire un peu défaut. Comme quoi, certains stéréotypes existent bel et bien. Blondie plantureuse en est le parfait exemple.

« Trésor, soyons honnêtes. Tout le poids de ton charme se résume à la fermeté de ton petit cul. Ils le savent pertinemment, tes deux copains. C’est ça qu’ils convoitent. » lâche-t-elle avec décontraction, souriant en même temps de toutes ses dents, avec cette lueur taquine/espiègle dans le regard, signe que ce petit jeu-là, elle peut s’y enliser sans le  moindre problème. La remarque conforte plus encore Blondie : il est forcément attiré exclusivement attiré par les hommes, pour que sa « copine » se permette de lui parler ainsi. C’est donc sans complexe qu’elle se penche en avant pour rajouter une dose de rouge à lèvres sur ses lèvres pulpeuses (pas 100% biodégradables elles non plus),  s’adonnant ainsi à une présentation de fessier/décolleté tout à fait spectaculaire. Pour échapper à cette vision de la déliquescence du monde, Eleah emboîte le pas vers l’extérieur, réajustant en même temps légèrement son chignon qui commence dangereusement à passer côté bâbord sur le sommet de son crâne.

« Et finalement, as-tu réussi à te retrouver ? » poursuit-elle, prolongeant l’euphémisme allusif dont il vient de la gratifier. Elle ne comprend pas les détails de ses perditions, forcément. Elle n’est pas certaine de vouloir les connaître non plus. Alors elle se contente de ce qu’il veut bien lui donner, l’euphorie toute absente de son petit corps à la suite de sa seconde remarque. Elle n’est pas d’accord avec lui. Il y a trop de pessimisme dans l’idée qu’il suggère, et cela se heurte à la vision positivement écœurante qu’elle a parfois de l’existence. C’est son moteur. C’est sa came. C’est ça qui la tient debout, qui la motive et la guide. L’idée que l’on peut changer, que l’on peut être quelqu’un d’autre. « A force de se convaincre que l’on est quelqu’un d’autre, peut-être parvient-on à le devenir, justement. » Renier cela, c’est renier toute possibilité d’évolution, d’espoir aussi. C’est s’enchaîner aux noirceurs qui nous composent, sans jamais pouvoir s’en défaire. Cela elle ne peut le concevoir. C’est trop loin de tout ce en quoi elle croit. Un temps de silence s’installe encore. Au bout d’un moment, à observer les mouvements d’humanité décadente autour d’elle, Eleah finit par l’entendre. Esquisser ce sourire délicat, presque doux. Sursaut de son naturel, de ce qu’elle sait être parfois, une fois le maquillage excentrique retiré de sa peau diaphane. « Non … Ce n’était pas un si mauvais souvenir que cela. » murmure-t-elle, confidence à demi-mot. En y repensant, elle se dit que c’est peut-être même grâce à lui que le souvenir fut tolérable. Sans le savoir, il avait su placer un baume, être cet inconnu à qui se raccrocher quand les terreurs de petites filles ressurgissent, et prennent l’allure d’un père qui a cessé d’en être un à la seconde où il a décidé de briser l’enfance plutôt que de l’embellir. James ignore tout cela. Il ne saura sans doute jamais ce qu’il a pu être pour elle, juste ce soir-là. Elle ne lui dira peut-être pas. Il n’y a pas besoin de le dire, de ressasser ce qui fut, alors qu’ils peinent à être ce qui est.

Un rire lui échappe, encore. L’image est drôle, l’extirpe de ses pensées trop vagabondes, ce soir. « Tu parles. Vous allez au-delà de la collaboration tous les trois. Ce n’est pas que professionnel … C’est plus que ça. Ils ne t’auraient pas regardé ainsi quand tu es arrivé si c’était le cas. Mais … Je ne dirais rien. C’est promis. » Sous-entendu, il n’y aurait pas cette forme d’attention permanente. Ce souci de l’autre, même lorsqu’il s’enlise dans les pires travers. « Il a l’alcool bon-enfant, c’est plutôt une bonne nouvelle. Ce serait dommage qu’un joli minois comme le sien termine dans un coin sombre. » constate-t-elle en l’observant au loin, rouge, en effet. Très rouge. Mais il rit au moins. L’ivresse est un état qu’Eleah regarde souvent d’un regard absent, sans savoir quoi en penser. Certains états l’amusement, d’autres la débectent. Sans le vouloir, elle impose une distance toute particulière avec les hommes qui cherchent à la fréquenter. Surtout des hommes comme Grégory, qui pourraient avoir des idéaux ou des principes, et auxquels elle pourrait s’attacher sincèrement tout en n’ayant rien de concret à offrir. Elle note l’élan joueur de James, affiche une moue réprobatrice. « Tu es gentil mais dans cet état-là, je préfère te le laisser. Ramène-le-moi quand il sera frais comme un gardon, et je verrais ce que je peux faire. » Elle le gratifie d’un clin d’œil, lève un tantinet les yeux au ciel face à ce qu’il suggère. « Tu penses que son éventuel béguin pour moi pourrait surpasser l’admiration qu’il a pour toi ? » Elle hausse un sourcil, humeur défiante. Elle a pas mal parlé avec Gregory (enfin, lui a parlé surtout). Souvent il a fait mention de James, sans forcément le nommer explicitement. Un sourd aurait remarqué, cette admiration qu’il a pour lui, pour sa créativité, pour ce qu’ils arrivent à mettre sur pieds tous ensembles. Cette même admiration qu’il y a parfois pour un mentor, un frère, ou même une sœur. Du regard, elle ne l’a pas lâché. Il rit au loin, bon enfant, comme en marge de la réalité. Sauf que la réalité ne tarde pas à le rattraper, en la personne d’une grosse armoire à glace, sur laquelle vient de se renverser son verre, sans doute. Peut-être. Elle peine à distinguer, avec tous les corps qui s’agglutinent. « … Je crois qu’il est en train d’entrer dans les bonnes grâces d’un mastodonte, on devrait peut-être s’en mêler, qu’est-ce que t’en dis ? » suggère-t-elle, se hissant sur la pointe des pieds en s’appuyant sur l’épaule de James, pour mieux voir. Comme une petite fille, perdue dans la foule.  Un brin inquiète, un soupçon amusée aussi.


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