"Fermeture" de London Calling
Après cinq années sur la toile, London Calling ferme ses portes. Toutes les infos par ici (james&eleah) raise me up. 2979874845 (james&eleah) raise me up. 1973890357
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() message posté Jeu 14 Juin 2018 - 18:46 par Invité
RAISE ME UP
james & eleah

« Spirits creeping in my yard, hold my head, it's tilting back. Something dancing me around, putting crystals on my neck, lifting my feet off the ground. Raise me up. »
Le bruit, le bruit partout. Qui crisse, qui suinte, qui ploie et se distend pour composer la sphère ivre d’euphories partagées. Elle ne sait pas quelle heure il est, elle ne sait plus, elle a cessé de compter à l’instant où son corps s’est perdu auprès de tous ces autres, sur la piste de danse. Elle a si chaud. Son front est un peu moite. La fièvre dans les membres, l’esprit corrompu par la brûlure. Les pensées se distillent, ne sont plus que des murmures indistincts qu’elle n’a pas l’audace de pourchasser pour en connaître le sens. Elle n’en a pas envie non plus. Il est trop tard pour cela. Ou bien trop tôt. Seul le tempo de la musique compte. Rien avant, rien après. Juste cela. Cela et son corps qui gravite, silhouette en équilibre. Elle aime le répertoire du Viper Room, même quand la scène est délaissée de ses groupes vedette. Les Wild. Les Spectrum. Tous ensembles. Ils ont su enfiévrer les sensualités qui bruissent sur la piste, s’ancrent sur la courbure des hanches, se tatouent aux doigts de ceux qui s’entremêlent dans un même mouvement, dans une même danse. S’en est presque trivial. Elle fait partie de cet ensemble-là depuis une bonne heure maintenant. Depuis qu’Alistair n’est plus, que James a disparu quelque part, dans des méandres où elle n’a pas encore su aller le chercher. Il est là, quelque part. Elle le sent. Partout sa présence. Elle le sait. Ses instincts joueurs, un brin sadiques, beaucoup trop fiers aussi, n’ont pas voulu aller le trouver tout de suite. Ils se sont perdus à l’orée d’autres corps, se sont enfiévrés à d’autres musiques. Elle aimerait pouvoir se dire qu’elle n’a plus pensé à lui au bout d’un moment. Qu’il est sorti de sa tête, qu’il a délaissé son corps. Mais ce n’est pas vrai, c’est un leurre. Immonde mensonge cajolant son oreille pour la rassurer, quand elle sent l’appel de toutes ces frénésies qu’il a su déployer sur scène, et qui l’ont bouleversée. Elle rêve de s’affranchir du lien tout de suite pour en ignorer les dangers, mais rêve plus encore de s’y enliser, pour voir jusqu’où ils sont bien capables d’aller. Sans frontières, sans barrières.

Son cœur bat si vite, à se rompre. Le morceau s’achève, un autre s’enchaîne. Boucle infinie qui ne s’arrête que pour mieux repartir, quand les silhouettes ployant sous l’ivresse ont de plus en plus de mal à la suivre. Eleah n’a pas bu une seule goutte d’alcool ce soir. Seulement des litres de Virgin Mojito, à chaque fois qu’elle est retournée s’arrimer au bar. Toute sa peau doit avoir la saveur du sirop de fraise désormais. Sa bouche est si sucrée que rien ne semble pouvoir étancher sa soif. Rien, pas même le grand verre d’eau fraîche que vient de faire glisser la barmaid sur le comptoir, qu’elle a saisi entre ses doigts, avant de le vider d’une traite, pour mieux repartir. Jusqu’à avoir mal. Mal aux dos, mal aux reins, mal aux hanches, mal aux pieds, et même aux bras qui souffrent d’avoir trop été sollicités durant les danses si singulières qui animent la piste du Viper. La sensation est unique cependant. Elle se sent pleine, elle se sent bien, elle se sent ivre de toute cette chaleur étouffante. Les tracas de son quotidien ne rugissent plus dans sa tête. Arthur non plus n’est plus là. C’est indicible … c’est invincible.

Ses pas la mènent jusqu’aux toilettes. Elle ne tarde pas à élire domicile près d’un lavabo, où précautionneusement elle se rafraîchit l’arrière de la nuque, puis le sommet des tempes. Un regard furtif dans le miroir suffit à lui faire constater que ses joues sont bien trop écarlates. Il fait si chaud. Et depuis des heures, elle s’est à peine arrêtée. Avec le bout de ses doigts, elle réajuste les épis de sa frange, arbore une moue mécontente en réalisant qu’il n’y a plus grand-chose à faire pour en tirer quelque chose. Alors avec amusement elle l’ébouriffe totalement, haussant les épaules juste avant de repartir. Retrouver la vague qui continue de danser, moins puissante peut-être, plus essoufflée par  la nuit qui recule, le jour qui ne tardera pas à s’avancer. Elle n’a pas nécessairement envie de partir, se sent toujours happée par sa  présence qu’elle devine parfois dans les contours de silhouettes anonymes. Où es-tu ? Là … Là partout. Là si loin, pourtant. La dernière fois qu’elle a distingué nettement ses traits dans l’épaisse foule, il semblait aux prises avec une demoiselle. La même peut-être que celle plus tôt dans la soirée. Elle n’a pas cherché à l’identifier, à clarifier l’image. Elle s’est perdue dans sa danse, immensément solitaire, accompagnée pourtant. De qui, de qui cependant ? Elle a oublié. Il fait si chaud. L’air l’oppresse à présent qu’elle ne distingue plus rien. Il lui faut de la fraîcheur. De quoi emplir ses poumons. En sortant des toilettes elle jette des œillades alentours. Constate avec détresse qu’elle ne reconnaît plus rien de sa silhouette. L’idée qu’il ait pu s’évaporer quelque part avec cette fille la traverse. Une évidence sans doute. Une évidence prévisible. Il n’est pas du genre à rentrer seul, elle non plus … Elle non plus. Mais il n’y a personne à ses côtés. Personne qui a su accaparer son attention avec assez d’impériosité pour la faire l’oublier. Cette pensée là l’agace, l’énerve presque. D’un geste déterminé elle pousse la porte de la sortie de  secours, se retrouve sur la voie sans issue à l’arrière du club. La musique n’est plus qu’un fond sonore étouffé par l’épaisseur des murs frais. L’air s’engouffre dans ses poumons avec tant de virulence que cela la surprend presque. Sa peau frissonne. C’est si délectable qu’elle ferme les yeux, s’arrête, s’isole sur le côté, dos contre le mur. Elle s’y adosse, contemple l’écrin de la nuit. Personne autour, à part peut-être des chats de rues qui cherchent des victuailles, là-bas, plus loin, dans l’obscurité tapie de la ruelle. Une grimace s’étend sur son visage : elle baisse les yeux vers ses pieds qui la font souffrir dans ses chaussures. En prenant appui sur le mur, elle les retire une à une, pousse un soupir de soulagement lorsque ses orteils peuvent enfin bouger sans contraintes. Elle s’assied sur le rebord d’une marche, détend ses jambes une à une, contemple les bras de la nuit qui l’enserrent, jusqu’à l’étouffer. Elle connait la chanson qui passe en toile de fond. Alors elle la fredonne, le nez relevé vers le ciel obscur. Il y a dans l’image qui se dessine devant ses yeux un sentiment étrange. Un sentiment de déjà-vu. Une nuit sans lune. La réverbération des néons. Les éclats de voix, trop loin pour être compris. Elle était bien, si bien … Et maintenant, elle ne sait plus. Alors elle se lève de nouveau pour fuir la morosité dans laquelle elle serait capable de s’enliser toute seule. Les lanières de ses chaussures en cuir suspendues autour de son index, elle pousse la porte à rebours, surnage dans l'obscurité du Viper en longeant un mur, marchant dans un équilibre plus incertain maintenant que ses pieds nus se recroquevillent un peu sur le sol poreux. Et puis quelque chose, enfin ... Alors qu’elle s’accoude au mur pour tenir debout, qu’elle tente en même temps de remettre ses pieds qui font de la résistance dans ces foutus escarpins.

« Tu es là … ? » demande-t-elle, question qui pourrait ne pas en être une. Elle n’est pas totalement sure. Un sourire vient égayer ses traits. Il est là, quelque part. Si ce n’est là, peut-être ailleurs. Mais elle sent un regard. Un regard sur elle. Pas totalement connu, pas étranger non plus.  


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James M. Wilde
James M. Wilde
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() message posté Ven 15 Juin 2018 - 14:56 par James M. Wilde


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Eleah
& James




Dans l’ombre. Dans l’ombre, je me suis réfugié, à l’étage VIP. Dans l’ombre elle parle, de tout, de rien, de cette multitude de détails sur son caractère haut en couleurs, d’insignifiants détails que j’aurai oubliés le lendemain. Dans l’ombre, je l’écoute, distrait, les yeux parfois indécemment posés sur le galbe de sa cuisse que l’on devine en transparence de sa robe d’été. Les projecteurs la nimbent, le long de la rambarde, et elle joue avec ses longs cheveux bruns qui cascadent sur ses épaules dénudées. Brianna parle, et parle encore, s’intéresse peut-être de trop près à ma personne. Ce n’est pas la proximité physique qu’elle recherche, j’ai par trop l’habitude que l’on ait des prétentions sur ma sphère pour venir l’envahir de cris, ou de gestes déplacés. Non, avec elle, c’est plus pernicieux que cela. Elle cherche à me faire avouer certaines anecdotes dont je suis étrangement très avare ce soir. Ses allusions me troublent parfois et me laissent interdit, dans mon fauteuil, tandis que je tiens une conversation banale, perdu, dissocié, oscillant entre mes pensées et les sensations qui parcourent mon corps. Elle se sait attirante, elle rentre dans l’archétype de ces filles que je baise habituellement, venant chercher ce que je me refuse de donner, réitérant le jeu malsain qui trace tant de mes nuits qu’elles se mélangent toutes pour devenir informes. Dans l’ombre. Dans l’ombre. Elle rit et j’ai un haut le coeur, tandis que l’adrénaline continue de graviter dans ma tête, de pulser dans mes veines, balançant des flashs devant mes regards de moins en moins amènes. Et quelque part, par son attitude futile et ses arguments creux, je crois que c’est ce qu’elle recherche. Je crois que c’est ce qu’elle veut, que mes yeux s’aimantent à sa peau pour mieux imaginer la déchirer, que mes attentions se resserrent jusqu’à ce que n’existent plus qu’elle, la musique dans mes oreilles, et la haine. Et la haine. La violence du sentiment me désarçonne car cela fait quelques temps que je n’ai pu retourner le fouailler comme j’en ai pris si souvent l’habitude, je l’ai abandonné pour tracer des reliefs plus aériens et m’élever enfin quand je ne cessais de sombrer. Mais à la seconde où ses lèvres tressaillent pour mieux rencontrer mes airs qui la désincarnent déjà, je sais que c’est ce qu’elle souhaite. Ce qui pulse, ce qui cherche à distendre ces chaînes trop neuves pour sortir et tout détruire. Ce qui grogne, ce qui geint, ce qui se tord jusqu’à ce que la douleur vienne côtoyer la frénésie arrachée à la scène. Dans l’ombre. Dans l’ombre. Sombre, sombre, sombre encore. Tu ne sais faire que cela. Que cela. Je déglutis difficilement, les mots inutiles quand je me sens cerné et je me laisse dériver, toujours vautré dans ce fauteuil qui m’enserre. Ce serait simple. Ce serait si facile. Faire quelques pas, prendre sa main, l’emmener plus loin. La malmener sans rien justifier, oublier tout sentiment pour me perdre un peu plus. Elle sait, elle sait que ce sera cela. Elle le sait, je crois, j’ai la vague impression de l’avoir déjà vue et un ricanement retentit dans ma tête malade à cette idée. Elle a bien dit fréquenter le Viper depuis son ouverture hein ? Et elle me regarde… Elle me regarde et me détaille d’une façon si détestable que mon coeur combat tous les instincts qui m’indiquent de me mouvoir pour la rejoindre. Je me sens oppressé. Oppressé dans ses yeux, opprimé par mes pensées infâmes. Et la musique est là, partout, partout, assourdissante. Ellis m’a toujours dit de ne pas suivre ces filles-là. Celles qui nous désirent au point de vouloir nous dévorer. Comme Brianna quand elle me toise, avec ses lèvres trop charnues et trop rouges. Il m’a toujours dit de me méfier parce que ces filles sont dérangées, et qu’elles imaginent nous rendre aussi avides d’elles, qu’elles ne le sont de nous pour nous avoir vus sur une scène. Il me l’a toujours dit. Je ne l’ai pourtant jamais écouté. Plus encore, à un moment, c’étaient ces filles-là que je convoitais le plus car leur aptitude à se donner n’a pas d’égal, il y a une passion qui embrasse la névrose, et dans leurs mots, dans leurs prunelles enflammées, je vois l’avidité. Et l’adoration. Comme ce soir quand dans cette oeillade caressante elle m’idolâtre, les doigts serrés sur la rambarde, la musique partout, partout. Et ses putains de jambes qu’on croiraient nues dorénavant que la lumière s’est tamisée au rouge des exactions qui gravitent sous mon crâne. Si simple. Si simple. Un seul pas. Rien qu’un seul pas. Rien qu’un seul pour croire que ça suffira. Que me perdre dans un corps comme celui-là équivaudra l’obsession, l’arrachera à ma chair, me fera oublier. Les rêves, les projets. Et elle. Qui est si belle ce soir, si belle. Si désirable que je déteste plus encore le piètre substitut qui est venu me trouver, et qui ne parvient pas à me détourner de ce qui m'abrutit depuis que je l'ai rejointe au bar. Quand je dérive de l’image brûlante de Brianna, c’est pour me consumer sur le corps qui s’agite juste en bas. D’ici je l’aperçois. Eleah… Dans la fièvre qu’elle seule sait déployer au milieu de corps morts, morts, à côté d’elle rien ne paraît vivant, rien ne paraît animé du niveau de passion qu’elle déploie. Il y a l'absolu dans ses gestes et dans son souffle. Plus rien ne compte à côté, rien ne compense, rien ne dispute la métaphore de son être dispersé dans la foule immense. J’ai chaud, j’ai froid, le dégoût de cette connasse qui ne me lâche plus s’évide dans une sensation plus lourde, toujours là, dans le creux de mon ventre. Depuis des jours. Des jours. La soirée se brouille et sombre. Sombre. Le tempo de la musique côtoie celui qui s’installe dans ma tempe et je vide un énième verre, plissant du nez parce que c’est de la vodka quand je m'attendais à retrouver mon sempiternel scotch depuis longtemps consommé. L’alcool élance mon souffle qui se saccade parce qu’elle vient de disparaître tandis qu’elle tenait compagnie à ma solitude depuis des heures. D’habitude c’est vers le bar qu’elle se dirige, pour se réhydrater, mais la direction n’est pas la même, et Kait’ est affairée auprès d'un mec qui n’a rien de ses traits. Brianna tente de me réenchaîner en me demandant ce que j’ai vu, mais je ne daigne pas lui répondre, fouillant la foule, le visage d’autant plus bouleversé que j’ai la terreur qu’elle soit partie. Partie. Sans que je n’aie pu… Sans que je n'aie su... Pu faire quoi au juste ? Su dire quoi ? Je ne sais pas, je ne sais pas. Je ne sais que trop. J’aurais pu la rejoindre bien plus tôt, fendre la foule, frôler son corps comme lors de la première soirée qui nous a réunis, retrouver des enfers familières parce que ce sont les miennes. Mon domaine, mon nightclub, pouvoir lui en montrer tous les secrets, rejoindre la fièvre, la partager. Plutôt que de la laisser me corrompre auprès de cette fille. Peut-être est-elle partie avec quelqu’un d’autre, après tout. Après tout. Je n’ai eu aucun mal à la voir ainsi aux prises avec tous ses partenaires sur la piste de danse, tant elle sait aimanter les êtres, les faire graviter autour d’elle, harmonies triviales autour d’un météore. Aucune jalousie n’est venue brimer le désir pour le corrompre, car sous mes iris elle se déployait, elle se laissait enchanter sous mon avidité, tenue en bride par la distance. Libre, heureuse, ivre de ses propres mouvements. Sous mes yeux elle était là, partout, en moi, au loin, dans ma tête, dans mon corps. Dans d’autres bras. Mais chaque fois que quelqu’un l’a touchée la pulpe de mes doigts s’est souvenue. Des aspérités de sa peau, de la vibration de ses côtes quand elle riait sous moi, du froncement de son nez sous mes lèvres. Là. Là. Sombre, mais pas sans elle. Pas sans elle.

Je me lève brusquement, considérant qu’elle ne reviendra pas, incapable de subir une seconde de plus la compagnie de Brianna qui m’est telle une injure désormais que je n’ai plus la possibilité d’oublier sa présence en m’évadant dans le sillage de celle qui m’obsède. Ma compagne de la soirée ne comprend pas, l’aigreur la départit de toute beauté quand, en passant auprès d’elle, ma cruauté l’accable de quelques mots sourds, glissés à son oreille :
_ Tu m’ennuies… Je vais me distraire ailleurs.
J’aurais pu l’épargner surtout que la pique la déséquilibre presque et qu’elle se rattrape à la barre métallique qui borde le balcon, ses yeux pesants sur moi tandis que je m’éloigne sans me presser, empruntant la porte de service à digicode qui se verrouille derrière moi, sur un son brutal et sans équivoque. Je descends la volée de marches, recouvrant les ténèbres backstage que personne ne vient plus troubler à ces heures indues. La silhouette du piano à queue se distingue dans le voile blafard de la nuit portée par la fenêtre. Je pense rentrer, la chercher serait sans doute inutile, mais mes instincts m’indiquent qu’il faut poursuivre l’obsession plutôt que de l’emmener dans la solitude du penthouse, jeter des accents de folie dans mes insomnies. Je pourrais prendre la Blackbird et aller jusqu’à chez elle, frapper, forcer la porte, virer le type qu’elle aura posé là dans son lit et la prendre aussitôt. Je pourrais marcher jusqu’en bas de son immeuble et m’y assoir pour la retrouver au matin. Je pourrais aussi n’en rien faire, me forcer à oublier, retracer tous mes pas, aller trouver Brianna et la sauter pour m’endormir enfin. Je pourrais, je pourrais. Mais je ne fais rien, mes élucubrations s’échafaudent et se détruisent seules, trop fragiles, trop déliquescentes pour que je ne me permette de les lui dévoiler. Je dois la laisser libre, je dois la laisser seule. La garder dans ma tête, ce serait déjà… Déjà… La porte s’ouvre et je n’ai pas bougé. Les lueurs extérieures détourent sa silhouette, elle tient ses chaussures à la main, les pieds sans doute fourbus. Je demeure, envouté par ce coup du sort, parce qu’elle est toujours ici. Elle est ici. Avec moi. Je suis dans l’ombre. Dans l’ombre. Et dans l’ombre elle me ressent, elle me sait, elle me voit. Sa question aux atours d’affirmation me saisit, le frisson est entier, je ne décolle pourtant pas mon dos du mur, savourant le spectacle de ses airs échevelés que je peine à distinguer. L’obsession est entière, sans doute froisse-t-elle mon timbre, parce que depuis des heures j’ai envie qu’elle soit là. Avec moi. Dans l’ombre, dans l’ombre. Je ne l’ai pas rejointe, j’attendais sans doute qu’elle ne me trouve.
_ Et toi aussi. J’ai cru que tu étais partie.
Ce dernier mot se délivre sur ma langue avec toute l’angoisse que je tais. La peur qu’elle soit partie, la peur qu’elle soit restée. Pour me voir ainsi, encore bercé par la lumière arrachée de la scène, encombré par les ténèbres dont j’hérite à chaque fois, parce que les envies sont terribles, les envies me dévorent, et que je n’ai pu ou n’ai su les assouvir par le biais de quelqu’un d’autre. La frustration est immense, le plaisir de la savoir encore au Viper l’est tout autant. Je ne bouge toujours pas lorsque je murmure :
_ Tu as aimé le spectacle ? Tu y as vu ce que tu étais venue chercher ?
Quelque part une menace dans ces deux questions-là, me ramenant à mon état d’amuseur public, être désincarné que l’on dépouille pour savoir mieux ressentir. Et ressentir encore. Je ressens tant à présent. Tant. Sans doute bien trop.
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() message posté Dim 17 Juin 2018 - 22:21 par Invité
RAISE ME UP
james & eleah

« Spirits creeping in my yard, hold my head, it's tilting back. Something dancing me around, putting crystals on my neck, lifting my feet off the ground. Raise me up. »
Là. Partout. En dedans, comme en dehors. Désincarné dans sa chair, dans ses esprits échevelés par tout cet alcool qu’elle n’a pas consommé, mais qu’elle a eu l’impression de boire à travers d’autres. D’autres. Des inconnus, des anonymes sans visages. Immondes et sublimes créatures du purgatoire, délicieuses à dévorer, détestables lorsqu’elles cherchent à la corrompre. Tous à se lover autour des sensualités de sa silhouette oisive. Là. Partout. Ailleurs pourtant. Elle était ailleurs. Quelque part dans l’ombre, à le traquer, à le voir, à refuser de le rejoindre pour n’avoir pas l’impression d’être vaincue par lui. Libre. Libre de choisir le moment où révulsée par tous ces autres, elle ne pourra plus tenir. Libre de partir, ou de rester, sans même avoir à se justifier. Libre de tout, encore là pourtant. Elle n’a pas pu rester dehors, marcher pieds nus entre les morceaux de verres brisés sur le trottoir, rejoindre son appartement trop silencieux depuis qu’Arthur le délaisse pour aller baiser des filles au hasard de ses rencontres nocturnes. Il a disparu de son champ de vision à un moment donné. Eleah ne sait plus bien quand. Elle le sentait pourtant, là, partout. A graviter autour d’eux, à les enfermer dans la sphère qui n’appartient qu’à lui. Il servait des verres, faisait la conversation à une jolie brune qui lui dédiait de ces regards que l’on ne voue qu’à ceux que l’on admire jusqu’à la névrose. L’a-t-on déjà regardée ainsi un jour ? Peut-être. Peut-être pas. Ces regards-là ne comptent pas lorsqu’ils ne sont pas rendus. Elle n’a rien vu, elle n’a rien voulu voir. Et puis il s’est perdu quelque part, là où elle ne pouvait pas le voir. Elle n’a pas traqué ses regards, elle n’en a pas eu besoin. Elle a senti qu’il était là, quelque part. Qu’elle n’avait peut-être pas le droit d’immoler sa sphère. D’interrompre la fulgurance d’un désir qu’il aurait eu envie de projeter sur quelqu’un d’autre.  Sur elle, en l’occurrence. Sur elle … C’est peut-être pour cela qu’elle a gardé une distance parcimonieuse. Mais elle n’a pas pu partir sans se retourner, en arborant cette désinvolture qui lui est parfois coutumière. Elle n’a pas pu, car cela n’était pas assez.

La fatigue ne la tiraille pas encore tout à fait. L’adrénaline est partout, pulsant à ses tempes, faisant battre son cœur plus vite malgré l’intermède qui a rafraîchi son corps, à l’extérieur. Sa silhouette oscille avec souplesse, se déséquilibre un peu lorsque ses plantes de pieds douloureuses rencontrent le sol. Elle a envie de danser encore. Jusqu’à s’épuiser, jusqu’à ne plus rien sentir, jusqu’à avoir mal. La porte métallique de la sortie de secours se referme lourdement derrière ses pas. Sa main s’appose sur le mur pour retenir son corps, plus prompt à chavirer maintenant que les lumières changeantes de l’intérieur l’aveuglent. Ses pupilles se réhabituent très vite à l’ambiance. Il fait plus sombre ici. Plus que partout ailleurs. Sa présence devient alors une sorte d’évidence, peinte en nuances obscures, se déployant dans les recoins où il a su se perdre. Se perdre pour qu’elle vienne l’en excaver, ou l’y retrouver, pour l’irradier de ses lueurs changeantes. Son timbre nébuleux vient se frayer un chemin jusqu’à elle, confirmant les soupçons qui la fascinent déjà. Un sourire s’aimante à son visage, instantané. Sa posture se déséquilibre un peu plus. Cassure de la hanche qui ploie lorsqu’elle cherche à remettre une de ses deux chaussures, bien en vain. Comme ivre. Ivre de tout ce qu’elle n’a pas su boire. Ivre de ces sensations qu’il a su faire naître dans sa carcasse, encore et encore.
« Cela t’aurais déplu ? Que je parte, sans dire au revoir … Sans me retourner ? Cela t’aurait fait mal … James, que je ne vienne pas te trouver ? »
Les questions prennent des atours d’affirmations. Féline et joueuse, dans ses attraits de femme éreintée par les danses éclectiques. Elle inflige une morsure à sa lèvre inférieure qui dissimule un sourire plus espiègle, a une conscience terrifiante de jouer avec le feu. Elle n’a pas peur. Ni de lui. Ni de ce timbre, presque ombrageux, qu’il arbore. Au contraire, papillon de nuit attiré par la lueur brûlante qui viendra calciner ses ailes balbutiantes, Eleah s’est rapprochée. Elle le voit dans la pénombre, dans les flashs de lumières du Viper qui parviennent jusqu’à eux. Là, partout. En dedans, comme en dehors. Son cœur bat un plus fort. Ses questions la troublent un peu. Cela se voit. Son sourire s’étiole, sa mine moins écervelée. Elle se rapproche avec plus de lenteur, détourant les angoisses qui le nimbent sans avoir besoin de tendre la main vers elles. Est-ce cela le revers de toute cette infinie énergie qu’il déploie sur scène ? L’ombre. L’ombre partout, éreintante … Fascinante. Il ne lui faut qu’un pas ou deux pour le rejoindre, disparaître avec lui dans l’obscurité où il s’est réfugié. La tête légèrement penchée sur le côté, elle a renoncé à essayer de remettre ses escarpins. Elle paraît moins grande. Petite chose qui observe, loin d’être démunie. Intriguée aussi. Par la menace qui gronde dans son timbre, qui l’attire, plutôt que de lui faire peur. Quelque chose rugit à l’intérieur face aux sous-entendus qu’ils tracent. Comme s’il était tout à coup sourd, muet, aveugle. Qu’il n’avait pas compris l’essence : de ce qu’elle est, de ce qu’elle désire. Imaginer qu’elle pourrait juste venir pour la parade sonne à son oreille comme une injure. Se pointer pour le grand show, se délecter de ses allures scéniques, ne désirer que cela … Que cela. Non, ce n’est pas cela qu’elle est venue chercher. Ni aujourd’hui. Ni hier. Ni demain. Il le sait pourtant … Elle pensait qu’il le savait. Son sourcil se hausse pour le tancer un peu, préférant la réprimande à la déception.

« Qu’est-ce que tu crois ? Que je suis venue me nourrir de ton personnage haut en couleurs ? Que je ne suis venue que pour cela, que c’est la seule chose qui m’intéresse ? »
Elle croise les bras au-devant de sa poitrine, mécontente, même si ses traits s’adoucissent ensuite d’une drôle de façon, dans la fulgurance d’un geste qui l’amène à effleurer le bout de ses doigts.
« C’est toi que je suis venu chercher … Seulement toi. Idiot. »
L’assertion d’ « idiot » se voit surenchérie d’une légère pichenette contre son torse. Elle aurait pu rajouter quelque chose pour alléger l’atmosphère. Une boutade supplémentaire, pour lui faire croire que cela ne l’atteint pas tout à fait. Que ce n’est qu’un jeu, après tout. Quelque chose comme « Oh j’suis venue pour toi et surtout pour le Virgin Mojito, quelle idée ! » Mais elle ne peut pas. Un soupire sous-tendu l’étreint. Son souffle tremble un peu. De la joie de le voir enfin, sans la présence oppressante de toutes les silhouettes alentours, à l’appréhension de ce qui chavire, à l’intérieur d’elle. Elle lui en veut un peu de l’avoir imaginée assez superficielle pour ne vouloir qu’une partie de lui. La plus évidente peut-être. Celle qu’il maîtrise aussi le mieux. Ce personnage qu’il a façonné au sang de ses angoisses, à la sueur de travaux acharnés. A ses yeux ce n’est pas suffisant, c’est trop facile. A ses yeux c’est une évidence trop vague. Eleah veut tout, le plus beau, le plus laid. Elle pensait si fort qu’il le savait. D’y penser, sa frustration grandit, lui donne des envies impérieuses pour le convaincre. Lacérer la chair, mordre la peau pour y imprimer l’idée. L’idée à graver pour ne jamais l’oublier. Pour qu’elle soit là, toujours, en dedans, comme en dehors. Alors sa langue devient légèrement plus vipérine, chargée de cette douceur insolente dont elle n’a que peu usé avec lui, tandis que des lueurs de défiance flamboient dans ses regards :
« Cela dit si tu estimes qu’il n’y a rien d’autre que cela, qu’il n’y a que celui que tu as déployé sur scène, rien avant, rien après, dis-le-moi tout de suite, que je ne perde pas mon temps. »
Ou lui faire comprendre qu’elle ne veut pas que l’être scénique, qui sait se transcender sur les planches comme personne … Qu’elle sait aussi que ce dernier ne peut totalement exister sans cet autre qui tremble, crie, feule, caresse, insulte et injurie. Le tout d’un être dont elle a décidé de traquer jusqu’aux infinis contours, jusqu’à se perdre elle aussi. Elle ne sait pas jusqu’où elle pourra aller, ni si elle pourra tout voir. Mais elle ne veut pas qu’un seul, quand il y a tout un pluriel à considérer … à affranchir. L’avidité de sa nature vomit toute la superficialité qu’il suggère. Elle la prend de part en part, pour mieux la déchirer. Elle aimerait pouvoir faire de mêmes avec ces angoisses qu’il projette contre sa silhouette sans s’en rendre compte. Elle aimerait pouvoir … Dans l’ombre. En dedans, avec lui.



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Eleah
& James




Il y a un hurlement à l’extérieur, et du verre qui éclate. Impact. Il y a un hurlement à l’extérieur. Puis des pas précipités, et le rire d’une fille. Les semelles sur les morceaux brisés, broyés par les talons, rythmique incessante d’une vie parasite. Il y a un hurlement à l’extérieur. Un hurlement. A moins que cela ne soit dedans. Dedans. Dans ma tête, et sous ma peau qui semble ne plus totalement m’appartenir, répugnée par une autre, attirée par elle. Elle. La silhouette du clair-obscur de trop de nuits, d’autres jours qui se confondent, confus dans des maux inénarrables. Il y a un hurlement. Celui qui fait écho à ce regard échu, à quelques caresses sur un clavier, son épiderme sous ma paume, son souffle dans le mien. Puis la musique qui pulse, pulse, pulse. Les tempes douloureuses, mon regard chavire jusqu’à ses pas ténus sur le béton armé, pieds nus. Nus. Les lumières qui s’échappent du panneau escamotable, derrière la scène, dansent des couleurs fantasmagoriques qui donnent à la pièce des atours infernaux. Ses pieds nus nimbés de rouge. Rouge. Orange. Orange. Flash. Rouge. Rouge. Rouge. Cri. Mes ongles qui cherchent à se planter dans le mur derrière moi quand les mots quittent sa bouche. Est-ce qu’elle hurle ? Est-ce que c’est moi ? Nous parlons bas pourtant, si bas, comme si les mots portaient l’effroi jusque dans nos pensées. Je ne bouge pas, je ne bouge pas. L’envie malmène mes côtes, la rejoindre devient une évidence que je dénonce en serrant la mâchoire, l’ennemi précise son visage et glisse une expression fermée sur mes traits balayés une seconde par quelques lueurs en goguette. Puis le noir reparaît, la musique change, langoureuse et hypnotique. À moins que ce ne soit elle. Elle. Je ne veux pas la rejoindre. Pas tout de suite. Si, j’en crève. D’envie. Elle creuse mon estomac et grave plus encore mon visage d’une dureté qui s’invite au détour de mes joues creuses. Je ne sais même plus comment déglutir, l’aigreur accumulée ces dernières heures aux côtés d’un vague substitut alourdit ma langue, rend opaques mes songes qui se déparent de Brianna en virant au noir d’idéaux inavouables. Mes doigts se décrispent au rythme lent du tempo qui dévale mes épaules, que je maintiens toujours contre le mur, comme si je faisais barrage à l’onde qui continue de tournoyer depuis que j’ai quitté la scène. Non bien avant. Depuis son message peut-être. Ou depuis que je m’interdis de la joindre quand l’envie déploie toute son ivresse, au creux de mes insomnies. Je ne sais pas, je ne veux pas avoir affaire à cela. Avoir affaire à moi. Pas lorsque je pressens les noirceurs, les pensées acides, les images fourbes qui viendraient déformer tous les tableaux déjà entrevus. La nuit, loin d’elle, j’embrasse tous les jugements, reprends si facilement des parures qui déchirent ma peau, tuent mon amour propre, me laissent aphone, perdu. Perdu. Avec l’aigreur de n’y plus rien trouver si ce n’est le reflet de ma personnalité rendue creuse par toute cette violence enfuie. J’avais envie de lui attaper le visage, d’ôter son expression de fanatisme, en serrant jusqu’à l’outrage. J’entends encore l’écho des os qu’on brise, je ressens encore le plaisir qu’on y trouve. Que j’y trouve. Dans l’ombre, une part de moi resplendit, à la regarder comme une créature étrange. Mais pas étrangère. Bien au contraire. Je l’ai tellement appelée, convoquée ici, jusqu’à la tourmente des sens.

Le sourire que je distingue ne me redonne pas le mien, mais certains de mes muscles offusqués par mes fréquentations de la soirée se dénouent, parce que ce sourire est si spontané. Autrement distingué par rapport à ces moues ridicules et aguicheuses que l’autre me balançait. Je frissonne, de dégoût, de ce trouble qui s’insinue, oscillant entre la destruction de tous nos appuis, entre la création d’autres pentes douces qui pourraient nous accueillir. Mais toutes les pentes s’acèrent dans la brutalité de la respiration que j’exhale à la voir chanceler, aussi ivre que moi, pas pour les mêmes raisons toutefois. Et si je ne chancelle pas sous l’accent bravache de ses fausses questions, c’est bien parce que le mur est dans mon dos, et que tourner les talons ne m’est plus permis désormais qu’elle est apparue sous mes regards aiguisés. Ma bouche se pince plus encore, mon ton perd presque une octave et la musique me semble distordue par les aveux qu’elle m’arrache. Parce qu’elle sait. Elle sait. Et elle se rapproche pour voir plus encore ce qu’elle a su prédire. Mon humeur sombre entièrement, il ne lui fallait guère qu’un tout dernier élan pour recouvrer la difformité de ses attitudes enragées. Peut-être que c’est celle que je convoque toujours sur scène. Peut-être.
_ Oui.
Oui, petite fille. Et ça ne devrait pas car cela te donne bien trop de pouvoir sur moi. Le seul mot évadé de ma bouche serrée tombe comme une pierre dans mes entrailles et mon esprit se révolte. Oui. Et ça aurait été bien pire que du déplaisir. Oui. Oui. Oui. Je ne mens pas. Pas ce soir, pas alors que dès que je respire c’est elle que je ressens, insinuée bien trop profondément pour même que je ne l’accepte. Je la laisse faire. Approcher. Sans bouger. Sans bouger. Quand j'en ressens un besoin qui m'aveugle et qui l'attire. Je le vois bien. Le regard par dessous ses cils, le regard non étudié qu’elle me lance. La façon d’entrouvrir sa jolie bouche. La manière de ne plus chercher que ce déséquilibre tentateur entre nos deux silhouettes.
_ Oui. Mais tu n’es pas partie. Tu n’as pas pu. Je t’en ai laissé l’occasion et tu n’as pas su t’en aller.
Elle aurait pu. Elle aurait dû. Je ne sais plus très bien. Je ne bouge pas. Je reste là. Je reste. À laisser filtrer les terreurs enfouies qui continuent de psalmodier que ce ne sera pas assez. Ça ne sera jamais assez. Je ne serai jamais assez. Elle non plus. Je ne sais pas. Je ne sais plus. Ce soir rien ne pourra étancher la soif, combler le vide qui se rouvre à persister. Toujours là à l’intérieur. À rugir pour qu’elle s'y précipite. Par pitié. Le hurlement est partout et retentit à mes oreilles jusqu'à me rendre sourd. Rien n’est assez car rien ne me satisfait jamais. Rien ne suffit jamais. Rien. Rien. Ni elle, ni moi. Alors j’excave le pire, les jugements faciles, l’indistinction des masques pour mieux savoir me planquer derrière, cesser-là l’informe pour caresser quelques contours connus par coeur. Chaque contour, chaque lueur. Mais c’est elle que je cajole, c’est elle que je toise, que je dessine, que je cherche, trouve, détoure et convoque. Elle que je sais par coeur parce que je ne peux que m’oublier. Je cherche sa colère pour mieux conjuguer la mienne, l’étreindre enfin, savoir que sous la mort elle couve encore. Elle demeure, toujours là. À jamais pour me navrer. Pour toujours jusqu’à me déconstruire. Et la déconstruire avec moi, afin de trouver l’essence de ce que nous sommes, de ce que nous fûmes. Et deviendrons à nous heurter. Je vois sa bouche qui se tord et mon sourire narquois reparaît sur mes lèvres exsangues. Je laisse aller ses discours, l’ivresse rugit lorsque les flammes viennent nourrir la rage d’avoir subi l’attente. Par ma faute. Par la sienne. La nôtre. Une faute vécue ensemble pour mieux nous souvenir de ce tout qui nous échappe tant. Je relève le nez, nargue ce qu’elle tente d’expliciter, me tais pour mieux subir la peur de ce qu’elle clame sous couvert de mensonges. Jusqu’à ce qu’elle me frôle. L’électricité mord ma chair, lui rend la vie qui tente de s’en délier, la brûlure est immense, ma main se contracte sous ses doigts. J’aimerais qu’elle cesse de me toucher. J’aimerais que son geste se réitère jusqu’à souffrir plus fort. De ce que je la laisse imaginer. Je reste là, je ne bouge pas. Et je me tais, je me tais. Dans mes yeux assombris par le fiel que je retiens, il y a un éclair d’une malice ignoble quand elle m’apprend ce que je sais aussi. Je sais qu’elle est venue me chercher. Elle sait que je suis venu la trouver. C’est comme ça. Comme ça. Le reste a si peu d’importance. Le reste n’a que l’importance que je lui donne, à convoquer ensemble les angoisses et les vérités falsifiées. Parce que le reste, cette nuit, me dévore, et mon humeur s’en pourlèche. Il y a tant d’images, tant de mots, des impressions sur des couleurs qui se glacent. La musique change encore, électro détestable qui pâlit aux sursauts de la fureur, en décalage du ressenti profond, trop aérienne pour seulement s’unir à ce que je brasse à l’intérieur. La légèreté qu’elle tente d'asseoir sur sa posture échoue, parce que mon masque demeure ancré, il y a dans mes iris trop de dévoration pour seulement me complaire dans nos jeux habituels. J’aimerais qu’elle parte, j’aimerais qu’elle parte. Mais elle ne l’a pas fait, elle ne l’a pas fait. Et je ne la repousserai pas. Bien au contraire, mon sourire se morcèle parce que l’amertume ressurgit quand je la vois écartelée par mes présupposés. Je devrais dire. Je devrais parler. Dire ce qui est, dire ce dont j’ai envie. Plus que tout, plus que ces promesses indolentes, plus que les rires et plus que les bribes d’euphorie. Bien plus que ce que je ne devrais quand je sais mes besoins trop nombreux pour entièrement savoir les contrôler. Souhaite-t-elle seulement que je contrôle quoique ce soit… J’aimerais qu’elle arrache tout, qu’elle me pile sur place, qu’elle me force à me mouvoir enfin. À défaut de la brutalité sous ses mains, j’ai la lame de sa langue pour héritage. Des phrases qui brûlent ses allures de petite fille. Oui. Oui. Oui. Oui. Mais le mot ne franchit pas mes lèvres, car l’aveu qu’elle recherche ce n’est pas celui-ci. Ce n’est pas celui-ci.
_ Rien d’autre ? Hein ? Rien. Ce serait si bien, ce serait si simple. Je te l’ai dit cent fois en songes, qu’il n’y avait que cela, que tu ne devais pas attendre de moi ce que tu cherches ici. En demeurant dans l’ombre pour savoir m’y trouver. Trouver l’autre visage pour mieux dissimuler le tien. Nourrir la colère pour mieux la brandir quand tu auras peur. Il n’y a rien, quelle déception, tant pis, on peut s’arrêter là. Si bien. Si simple. Tellement faux.
Mes épaules se décollent avec lenteur de la cloison quand je retiens tous les gestes que j’esquisse en pensée. L’avidité qui se peint sur son visage est si belle, si belle. Mon index frôle sa bouche au moment où je me rapproche d’elle, les sursauts de sa fureur soufflent tout contre ma peau. Ça brûle. Ça brûle tant. Je ne mentirai pas, je ne mentirai pas.
_ Chhhhhut. Chhhhut, petite fille, je sais, je sais. Tu veux tant. Tant et plus. Et moi, je t’ai absolument tout promis. Et tu n’es pas partie. Tu n’es pas partie, Eleah. Je ne suis pas parti non plus, avec l’autre, parce que je n’en avais pas envie. J’avais envie de tant. J’ai envie de tant, si tu savais, tu ne sais pas à quel point cela me dévore.
C’est son poignet que je saisis, mélange de douceur, et de brutalité farouche avant de déposer sa main contre mon torse, je ne la maintiens pas, je la laisse-là, choisir, saisir, savoir. Ce qui combat, dans le souffle effréné, dans les battements qui me torturent, la peur d’elle, la peur de moi. La frénésie plurielle de deux monstres qui se savent.
_ Il y a quelques temps, je t’aurais injuriée jusqu’à ce que tu baisses tes yeux noirs, que le dégoût te désarçonne, que tu partes en courant, parce que ce jeu-là, je le connais par coeur. Je t’aurais repoussée pour mieux te préserver. Le beau mensonge, si simple, si parfait. Mais je n’ai pas envie de te préserver. Je n’ai pas envie de me préserver non plus. Alors oui… Oui. Bordel, oui. Ça m’aurait déplu que tu te tires quand je n’ai fait que t’attendre toute cette putain de soirée. Ça m’aurait rendu dingue. Et pourtant, tu n’as pas joué avec moi, petite fille, tu ne joues pas. On pourrait croire en te regardant comme ça… Mais tu ne joues pas. Pas avec moi. Je ne joue pas non plus. La scène est là, juste là, sous tes pieds, avec moi. Avec moi. La scène, c’est ça, la nôtre. La seule qui soit.
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Anonymous
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() message posté Dim 24 Juin 2018 - 18:45 par Invité
RAISE ME UP
james & eleah

« Spirits creeping in my yard, hold my head, it's tilting back. Something dancing me around, putting crystals on my neck, lifting my feet off the ground. Raise me up. »
L'ivresse, l'ivresse partout. L'ivresse qui fait étalage de ses déboires. L'ivresse qui fait crisser les chairs devenues acides si elles ne sont pas amorphes. La sienne se déploie comme une onde, l'adrénaline suppure par tous les pores de sa peau blanche. Elle a oublié les confidences larmoyantes, les rires factices, l’apitoiement déchu qui se complaît trop facilement dans l'horreur. Les chaises en plastique, alignées. En arc-de-cercle pourtant. Et le tour à tour, quand il faut réussir à parler, à se présenter, à faire partie de cette mascarade-là qui n'a aucun sens. Que faut-il dire alors ? Que faut-il avouer ? Le meilleur. Le pire de ce qu'on est. Elle n'a pas pu ce soir, ni tous les autres avant. Ils veulent qu'elle mette des mots sur toutes les sensations qui l'assaillent quand les griffes du silence et du vide se resserrent autour de sa silhouette menue. Ils le veulent, ils estiment cela nécessaire. Mais elle n'a pas pu. Ni ce soir-là, ni tous les autres avant. L'ivresse alors. La seule capable de combler le vide inexprimable. Celui qui se répand dans son corps comme un parasite et que seule la danse est capable de chasser. La danse … Et lui. Lui depuis quelques semaines maintenant. Lui depuis cette nuit irlandaise, peut-être, dont elle a préféré oublié les contours pour pouvoir se leurrer et continuer de vivre. Vivre … Ce mot là la fait presque rire. Rire à s'étouffer. Rire à s’écœurer. Elle n'a pas pu partir sans se retourner. Quelle tristesse. Quelle honte, Eleah. Toi si prompte, pourtant, à briser les fers que toi seule tu t'imposes. Toi si déterminée lorsqu'il s'agit de broyer ce qui est. Tu es là pourtant. Oui, elle est là. Elle n'a pas pu simplement partir, sans se retourner. Sans l'avoir vu, sans l'avoir touché. L'envie a crevé à l'intérieur tout au long de cette soirée passée lovée, enchevêtrée, à tous ces autres. Inconnus de passages, sans importance. Elle était bien sur cette piste de danse. L'oubli à l'intérieur, et elle, presque entière. Presque, parce qu'elle aurait voulu qu'il la rejoigne sur la piste, qu'il s'arrime à sa silhouette, tout contre son dos, comme lors de leur première danse. Qu'il se laisse guider à la sensualité aérienne de ses mouvements. Que le reste n'ait pas d'importance. Que la sphère se referme autour d'eux, écrin de solitude mutique mais à deux. Mais il n'est pas venu, et elle n'est pas allée le trouver. Sursaut d'orgueil qui empêche de totalement se mouvoir même quand on en crève. La peur aussi, de ce qui est, de ce qui fut, de ce qui pourrait être. L'envie malsaine d'asseoir cette liberté sans fers quitte à faire mal, de lui prouver au loin qu'elle n'a besoin ni de lui, ni de personne d'autre. Qu'elle n'appartient à personne, non, personne. Au bout d'un moment elle a failli s'en convaincre et a entrepris de partir. Mais elle n'a pas pu. C'était impossible. Il était trop tard. Trop tard pour reculer. Trop tard.
 

Le sourire qui la traverse lorsqu'elle l'aperçoit est d'une infinie spontanéité, frôle la candeur quand elle fait mine d'ignorer encore un peu où ce lien finira par les mener. Mais son enténébrée figure lui répond, et tout change après cela. Tout change et vacille sous les amertumes que délivre sa langue. Elles se répercutent contre la peau, la font frémir à l'intérieur, l'aimantent de façon absolue alors qu'il aurait sans doute été plus raisonnable de faire demi-tour. Son cœur rate un battement, perd de sa verve habituelle. Cassure. Cassure à ce « oui » qu'il délivre. Sans fard. Sans mensonge. Couperet qui tombe. Verdict d'un jugement dont elle apparaît être la victime, ou bien le bourreau. Les deux ensembles. Le sourire s'étiole pour laisser la place à des émotions plus lourdes qui traînent derrière sa silhouette alourdie par une ivresse illusoire. Elle se rapproche plus encore parce qu'elle n'envisage plus une autre voie que celle qui s'avance dans l'obscurité de la pièce. Pièce immense, dans laquelle la musique résonne. Si sombre … Si sombre. Traversée parfois par les lueurs des réverbères qui lui permettent de deviner dans la pénombre certains contours. Mais les seuls qui comptent, les seuls vers lesquels elle se dirige, ce sont les siens. Les siens qui la retiennent et l’abjurent tout à la fois. Elle ne sait pas. Elle ne sait pas trop ce que c'est, cette émotion qui gronde à l'intérieur, qui renaît. Colère. Amertume. Détestation. Colère encore. Ses regards cherchent à le deviner dans l'obscurité et reconnaissent à peine, au début, ce qu'il délivre de lui. Ce qu'il projette sur elle. Elle ne parvient pas à recevoir ce qu'il déploie comme une injure. Est-ce cela alors ? Le revers du pile qui s'exalte sur scène ? La face cachée de toute cette énergie exsangue ? Eleah s'approche encore. Elle n'a pas peur. Pire que cela, il l'attire. Plus que d'habitude. Plus que tout. Toute la noirceur de cette humeur, arborescence en teintes obscures, la fascine sans qu'elle ne sache pourquoi. Son cœur bat plus fort. Et c'est comme si elle le ressentait vraiment pour la première fois. Battre, battre encore une mesure indistincte. Si puissante, à l'étourdir. L'orgueil s'insurge face à sa remarque, la pousse à délivrer une réponse inattendue, prévisible pourtant.
« Tu ne m'as laissé aucune occasion James … J'étais là, je pouvais partir. Que tu le veuilles ou non, ce choix-là m'appartenait. Les occasions m'appartenaient. J'ai choisi de rester … C'est tout. »

Lourd. Plus lourd encore, le masque qu'il faut porter, qui devient intenable dans ces circonstances qui appellent à des vérités si crues, si cruelles aussi, qu'elles font mal. Elle est obligée de lui donner tort, d’abjurer qu'il puisse avoir raison. Il le sait pourtant n'est-ce pas ? Que c'est pour lui qu'elle est restée. Que c'est pour lui qu'elle est là. Qu'elle ne sait pas pourquoi, et lui non plus. Ou alors le sait-il trop, et c'est cela qui le met dans cette humeur. Le masque se fissure à chaque parole qu'il délivre, les aigreurs  trop nombreuses sur la langue pour qu'elle puisse seulement les décompter. Et elle se rapproche encore. Toujours. Jusqu'à le frôler. Jusqu'à pouvoir toucher toutes ces cruautés qu'il est capable d'invoquer, broyant le jeu pour y asseoir ses ténèbres, étouffant les lueurs irradiantes pour y injecter de ses obscurités furibondes. Qu'est-ce que tu fais ? Qu'est-ce que tu cherches ? Les questions fourmillent dans sa tête à l'abrutir. Briser quelque chose. Lui. Elle. Eux-ensemble. Ou simplement cesser de mentir. Dire ce qui est. Arborer l'indécence d'une nature immonde. Quand elle le regarde elle ne reconnaît rien, et tout à la fois. Le même homme,  déchargé de ce qu'elle connaît déjà pour ne montrer que ce qu'elle n'a su qu'apercevoir, sans oser aller plus avant. Son silence la mord. Sa peau frémit, tremble. Le masque se fissure, glisse avec lenteur le long de ses traits dont l'espièglerie s'est enfuie pour laisser place à quelque chose d'autre, de plus indistinct, de plus fragile aussi. Ce n'est pas de la colère. Pas tout à fait. Cela ressemble à de la détermination farouche. Cela y ressemble, oui, grandement.

Mutique, elle ne dit rien. Pas une seule réponse à toute l'ironie dont il se pare. Pour faire quoi ? La navrer ? Est-ce cela qu'il recherche ? Son humeur frivole chavire, emprunte les mêmes sillons tortueux que ceux qu'il doit fouailler depuis des heures. Sans équivoque elle le rejoint peu à peu, renoue avec la sensation exquise d'être sans avoir à se cacher derrière autre chose. Elle ne sourit plus, ses prunelles se gorgent de la pénombre alentour. La colère qu'elle étouffe en la laissant crever à l'intérieur émet un crissement qui retourne ses entrailles. Elle n'a pas peur. Non. Pas de lui … Pas de lui, ni de tout ce qu'il saura dire, ou faire. Il n'a pas ce pouvoir là. Il ne l'a pas, n'est-ce pas ? Non.  C'est pour cela que lorsqu'il s'avance, Eleah n'a aucun mouvement de recul. Au contraire, elle le toise avec plus d'intensité qu'auparavant, distinguant jusqu'aux infinis rouages de cette humeur qu'il déploie comme une toile obscurcie par la haine. L'avidité est si puissante qu'elle rend plus sèche sa bouche. Plus âpre aussi. Âpre … La brûlure de son souffle s'éraille contre la pulpe de son doigt. Les mots tremblent, ne parviennent pas encore à franchir la barrière de ses lèvres tant les impressions retrouvées la statufient. Un sursaut la cueille malgré elle par surprise lorsqu'il se saisit de son poignet. Son regard le suit, le poignet ne cherche pas à se libérer. Les aveux se font légion dans sa tête, pulsent à ses tempes. Oui, cela m'aurait fait mal. Oui. Oui partout. Oui à tout ce qu'elle a su prévoir, subodorer, infliger, retenir. Oui. Sa mâchoire se resserre. Elle a mal. Mal en dedans. Mal en dehors. La morsure de sa paume contre son poignet. La fêlure d'un masque qui se tort jusqu'à devenir ignoble. Les accents de la fureur qu'elle cache rugissent à l'intérieur, se repaissent de ce qu'il lui offre sans totalement y consentir. Cela fait mal n'est-ce pas ? De savoir que je suis là, quelque part, dans ta tête ? Partout … Partout. Mais tu es là toi aussi. Tu es là, tu le sais. Et pour cela elle commence déjà à le haïr autant qu'elle l'adore. Elle aurait dû partir. Elle aurait dû. Mais elle ne l'a pas fait. Il est trop tard. Elle n'a pas pu partir. Il n'était pas temps encore. Il manque encore quelque chose. Quelque chose à saisir. Ce tout qu'il lui a promis. Ce tout qu'elle est venue chercher, et sans lequel elle ne repartira pas. Ce tout qui fait se resserrer sa main autour de sa chemise avec lenteur, froisser le vêtement, planter les ongles dans la chair fragile jusqu'à sentir, jusqu'à éprouver la morsure jusque dans sa chair à elle, jusqu'à lui imposer un mouvement de recul, jusqu'au mur, jusqu'à ne plus pouvoir reculer.
« Non … Je ne suis pas partie. Tu as raison James … Je ne pouvais pas. Et tu sais pourquoi ? Parce que ce tout que tu m'as promis, je viendrais le chercher. Tu le sais n'est-ce pas ? Bien sûr que tu le sais … Tu serais partie avec elle sinon. Tu aurais essayé d'oublier que je me suis infiltrée, là, quelque part, assez pour que tu ne puisses plus m'ignorer, assez pour que tu commences à me haïr. Assez pour que le tout ne soit jamais assez. Ce jeu-là tu le connais par cœur, c'est sans doutes vrai. Mais cette fois-ci,  tu n'es pas le seul à en connaître les règles. Et tu n'as pas le pouvoir … de me navrer, de me dégoûter, de me repousser. Je ne veux pas que tu me préserves de toi, et je ne te préserverai pas de moi non plus. Parce que tu sais, n'est-ce pas ? Tu as vu … Tu as reconnu … Tout ce qui feule à l'intérieur, et que ceux qui ignorent ne distinguent que comme une ombre passagère. Mais elle est loin d'être passagère en vérité. Elle est là, partout. Compagne qui crisse. Elle crie. Elle agonise. Elle enrage. »

Ses doigts serrent. Serrent un peu plus. Serrent à avoir mal, serrent à sentir le sang qui pulse sous sa peau blanche. Pulse, pulse, petit cœur. Je te sens. Je te sens si fort. Je pourrais t'arracher de cette poitrine juste avec l'avidité de mes ongles. Sentir la brûlure du sang contre la pulpe de la peau. La sentir, oui. La sentir. La brûlure cruelle de son souffle glisse à l'orée de sa jugulaire, souligne l'os de sa mâchoire, chatouille le coin de sa bouche. Elle ne le lâche pas. Elle s'y refuse. Même lorsque ses lèvres délivrent contre les siennes ce qui ressemble plus à une morsure qu'à un baiser, et qu'elle souffle dans un murmure :

« Je veux quelque chose de vrai … Même si ça fait mal, même si c'est une torture. Parce que tout le reste … Tous les mensonges … Cela ne suffit pas … Cela ne suffit jamais, n'est-ce pas ? Cela essouffle … Cela écœure. S'en est assez … S'en est trop. Je ne peux plus. Je voudrais broyer tous tes leurres pour arracher tes vérités dissimulées, étriper chaque mensonge, même si cela signifie excaver un monstre. Parce que mon monstre n'en peut plus de sourire, de minauder et de se taire. Il voudrait hurler lui aussi. Hurler enfin. Mais il a oublié comment faire … Parce qu'à force de mentir,  on finit par se perdre, par croire en quelque chose qui n'existe pas, qui est mort … Pourri depuis si longtemps. Tu as raison … Je ne joue pas. Pas avec toi. Je ne sais pas pourquoi. Je ne l'explique pas. Peut-être parce que tu ne joues pas non plus. Parce que tu sais que je te vois … Que tu me vois aussi. Parfois je te haïrais pour cela … D'avoir su voir. Mais ça aussi tu le sais … Tu le sais, n'est-ce pas ? Alors vas-y. Dis-moi ce que tu veux James. Dis-moi de partir pour nous laisser une chance de nous complaire dans les personnages que nous avons su façonner, ou dis moi de rester, et jouons ensemble les vérités nues et crues de nos natures conjuguées. »


(c) DΛNDELION
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James M. Wilde
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() message posté Ven 29 Juin 2018 - 23:51 par James M. Wilde


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Eleah
& James




La brutalité de la musique me désarçonne, c’est elle dans les veines, c’est elle dans ma tête, c’est elle sous mes doigts que je n’ose pas poser. Sur Eleah. L’accord crisse, se désincarne en tourbillonnant dans mon corps sec qui reprend vie, et la fracture se rouvre béante, les chairs brutalisées par les souvenirs, les sensations héritées d’un monde que je hais. Et dont pourtant je fais partie. Alors venir la chercher, l’y traîner s’il le faut pour ressentir jusque dans les ombres les plus moites, l’onirisme d’une déchéance à ses côtés, qui parviendrait à ciseler d’autres atours. Qui seraient moins acérés, moins honteux, moins infâmes. Et ce tempo, ce putain de tempo, là, fiché dans ma tempe, des mots, des os, les cris et les larmes, tout cela s'amoncelle par vagues pour l’avoir trop cherchée dans le noir, pour avoir repoussé tous les pas de notre danse, nous rendant statiques, mutiques, à nous observer dans l’entre deux d’un autre cauchemar. Le mien, le sien peut-être. J’en imagine les volutes cercler ses chevilles pour les marquer, je sais qu’un seul mouvement peut lui restituer toute sa liberté. Mouvement tragique, mouvement factice, égocentré, bientôt en corolle, éclaté dans les iris, des pensées, des pensées, l’alcool aussi, qui dégouline sur les épaules. Je frissonne, j’ai si chaud et l’air est lourd. C’est l’air que l’on inspire, c’est l’air que l’on chantonne et qui glisse entre les lèvres closes. L’air que l’on quémande, à bout de souffle, à bout de souffle. Qui filtre le pire et le meilleur de soi. L’air est tendu entre nous, c’est une ligne entre nos regards qui se jaugent, une ligne. Une ligne infinie. Sur laquelle je marche jusqu’à elle, sans plus bouger tant je chancelle de ce que je ne dis pas. Elle, elle, elle. Musique et mouvement. C’est ce qui la caractérise, c’est même son essence quand je crois parfois en être le simple réceptacle. Et je respire, et je respire, plus intensément, comme pour ravaler ce qui m’apparaît telle une évidence de trop, qui clame toute l’agonie d’une convoitise. De longues semaines oubliée, évidée de ses lueurs fourbes, elle reparaît identique, inchangée. L’envie est là, partout, en moi. Je croyais n’être plus rien, que cette ruine sur laquelle on insuffle un piètre soupçon de vivacité pour clamer qu’elle n’est pas encore entièrement érodée par le temps. Je croyais être mort, quelque part, entre les cris et la brutalité, l’aveu des ténèbres et la faute triviale. Dos au mur. Dos au mur. Je croyais le chemin tout tracé vers un quelconque caveau, mais il a fallu qu’elle s’en mêle, il a fallu qu’elle apparaisse, et que ses rires, et que ses feux, et que ses ivresses d’irréel pour fuir ce qui la tue avec lenteur, ressuscite chez moi d’autres parjures. Il y a les rêves, à l’orée des ténèbres. Dans le noir, dans l’air moite, il y a le revers de chaque murmure corrompu à nos imaginaires. Revers grimaçant, dangereux, létal. C’est l’heure de payer pour toutes les promesses, et pourtant je ne dois rien, je ne dois rien. J’en ai juste besoin. Je cherche les fers, leur tourmente, leur morsure si familière, je cherche dans l’ébauche de son sourire narquois la peur et la colère. Mais ma colère n’est pas constituée de ces mécaniques usées jusqu’à la corde, ma colère n’appelle guère le néant, bien au contraire… Elle veut chercher la sienne, l’exhumer pour la recevoir toute entière. Qu’elle déchaîne d’elle ce qu’elle retient si souvent et si bien pour venir lover les flammes dans mon coeur écoeuré. Alors que Brianna parlait, j’ai songé à des centaines de façons de la rejoindre dans la foule, la prendre là, apposer mes mains, la pulpe de mes doigts, sur sa peau, sentir l’air absenté au creux de nos bouches rejointes, l’indécence en public, la musique tout autour, les dangers balayés par les projecteurs harassants. Ça n’aurait pas été pareil. Ça n’aurait pas été pareil, toutefois. Car ici, je suis, elle est. Loin du paraître et des airs de pantomimes, il ne reste que ça. Que ça. La fiertée mise à bas, nos silhouettes désincarnées par la nuit, les lueurs des lampadaires qui dansent dans ses cheveux, l’éclat d’une Lune voilée. Je suis. Elle est. Là. Là. Juste là.

Les retrouvailles sont changeantes, incertaines, elles frôlent la reconnaissance et ses angles saillants. Deux monstres qui se revoient, oublient avoir été amis, crèvent de la torpeur des civilités, grognent pour la chair, feulent pour le sang. Tout pulse, tout tourne. Ça n’a rien à voir avec la ligne de coke, le Lagavullin qui occupe mon estomac. Je ne renâcle guère à l’évidence qui brusque tous mes codes, m’arrache toute notion de cet orgueil malade. J’avoue, sans pudeur, sans honte. J’avoue le mal, qui pulse, qui lance. J’avoue le pire qu’elle est venue chercher jusqu’ici. Et parce qu’elle vacille, je me sens plus entier. Ça fait mal hein ? Ça fait si mal ce soir, ma beauté. Ça fait si mal et j’en redemande encore, parce que je n’ai plus que cela. Plus que cela. Le plus beau. Le plus laid. Le plus laid ce soir, viens l’arracher. Viens. Viens. À mon plus grand plaisir, qui secoue mes muscles qu’on croirait endoloris par le déni, elle me rejoint, elle me confronte. Je cherche dans ses airs tout ce que je m’étais promis de ne jamais déclencher, la fureur, le dégoût. Je m’y mire toutefois avec autant de frénésie que jadis. Viens. Viens… C’est ce que tu veux tant voir, depuis que nous nous sommes retrouvés. Non. Depuis cette nuit-là, depuis cet instant où tu t’es raccrochée avec tant de fougue à ma chair corrompue. Je ne ponctue même pas la piètre remarque qu’elle m’oppose. Le choix. Le choix. Le choix n’existe pas. Pas ce soir, pas ici. Il n’y a que des routes tortueuses qui prolongent les précipices dans lesquels nous nous jetions déjà. Le choix, un leurre, un leurre. L’orgueil tord mes lèvres, une étincelle pleine de fureur transite dans mes iris pour lui indiquer que je lui laisse ces faux-semblants dont elle abuse pour exister. Je me fiche de la vérité, je me fiche qu’elle l’énonce quand elle pèse tout autour de nous, c’est bien pire, bien pire que des mots, bien pire que des aveux. C’est là. Là. Là. C’est tout n’est-ce pas ? C’est tout ce qu’il y a. Et bien plus que tu ne crois. Le masque glisse, le sien dévale ses lèvres charnues, le mien se fracasse au sol parce qu’il ne tient plus qu’à un fil, noirâtre, dégoûtant de ces pâles mensonges que je ne sais plus dompter pour abuser le monde. Il faut le faire en permanence et je suis fatigué. Je suis fatigué. Je n’ai plus envie de jouer, pas ce soir, pas avec elle. Jamais. Je mords ma lèvre inférieure, me repais un instant du spectacle qu’elle montre, expose crûment, en ponctuant son désaccord des plis de l’amertume qui dessinent un sourire navré. Tu ne souris plus hein, tu ne souris pas. Parce que tu es là. Et moi aussi. Moi aussi. C’est si beau ce que j’entrevois, si pâle, d’une fragilité presque nocive tant elle donne l’envie de la dévorer. Mais je connais les fragilités pour en être entièrement constitué, elles constituent les ferveurs les plus incandescentes, elles broient, elles tuent, elles assoient leur légitimité avec brutalité, comme ce pas qu’elle amorce, ce silence qu’elle abat, cette distance qu’elle combat. Je ne la repousse pas, j’avais tellement envie qu’elle me rejoigne. J’ai un peu moins mal quand elle est là. Un peu moins mal.

Je sais qu’elle ne me craint pas, en cela elle n’a guère menti, elle est restée ici, avec moi. Pas par ignorance mais bien par besoin de ce qui promulgue à mes attitudes des accents hérétiques. La dureté de ses yeux fraye des sensations honnies sous ma peau. Je ne veux pas qu’elle détourne le regard, non. Ne te détourne pas, regarde, regarde. Et vois. Ses lèvres tremblent juste sous mon doigt, j’ai l’impression que son sourire éteint étend une énième morsure. Je lui restitue ses mouvements, cesse de même la toucher tant l’avidité éprend l’ensemble de mes muscles qui semblent prêts à rompre. Si mal. Si mal. Elle a mal aussi, si mal. Mal jusqu’à moi. Les deux ensemble, sur la même onde d’une brutalité inavouable. Elle la connaît, cette brutalité-là. Elle la connaît, elle la côtoie, elle en sait les indistinctes mécaniques. Par coeur. Par coeur. C’est une évidence qui me secoue tout entier. De cette brutalité, elle est constituée, tout comme moi. Et j’aime ça. J’aime ça au point d’étirer un sourire qui oscille entre la satisfaction et la rage. Viens, viens. Prends tout ce que tu voudras, cette rage est à toi. À toi. En toi. Son emprise froisse le tissu, resserre mon col, ma respiration s'accélère et tout mon corps se révulse. Une violence appelée, rêvée à en crever, pourtant crainte jusque dans la profondeur de l’être, fêlé, broyé. L’absence de mouvement, ce mur qui rencontre mon dos, moi, elle, sa main qui serre, et serre encore. Je dois convoquer tout ce qui demeure de volonté pour ne pas chercher à lui échapper. Une seconde je ferme mes paupières pour ravaler le sursaut de ma peur, le transformer en haine où le plaisir sait si bien se glisser. Un si déviant équipage. Je ne sais plus comment respirer, j’étouffe, j’étouffe, je vis, je ressens, les battements. Les miens, elle, dedans. Ma main revient maintenir la prise dont elle mesure sans doute l’horreur pour la voir dévaler tous mes traits, je glisse mes doigts sur les siens, une contrainte, pour elle et pour moi. Tout en même temps. Ensemble. Ensemble. Dos au mur. Elle aussi, bien sûr. Bien sûr. Et tout ce qu’elle avoue, je le sais, je le sens. Je ne dis rien parce qu’elle le voit bien. J’aurais pu rejoindre tant de corps, dans cette salle bondée, prendre tout ce que je voulais, qui je souhaitais dévoyer au fil déchirant d’une nuit sans saveur. J’aurais pu et je ne l’ai pas fait. Ce qu’elle dit, j’en perds le souffle, et toutes les notions simplistes dont on nous abrutit. Elle serre plus, elle serre si fort. Je serre un peu plus à mon tour, ses doigts dans les miens. Mon murmure est déformé par l’angoisse qui vrille mes tympans :
_ Ça fait mal hein ?
Non pas ça, pas nos mains qui se torturent pour mieux dériver la haine en un jeu détestable et vicié.
_ De tout rentrer. De tout retenir. En permanence… Pour que personne ne sache. Pour que personne ne voie. Ça fait si mal.
Je l’ai reconnue, dans les souvenirs de la sensualité de Galway, dans cette danse que nous nous sommes jurée depuis que nous nous sommes retrouvés, je l’ai reconnue. La peine, la mort lente, qui ronge, qui prend, qui dévore tout, jusqu’à ce qu’il ne reste rien. Uniquement l’enveloppe, et toute la colère pour l’habiter, la mouvoir, l’affranchir de l’apathie malsaine. Mon coeur se débat, je reste immobile, j’ai presque envie que ses dents déchirent ma peau, parce qu’elle me tient, parce qu’elle me sait, elle me sait tant déjà. Le baiser est d’une virulence terrible, il m’arrache une exclamation, de douleur et de plaisir mêlés. Avec elle, ce soir, je ne sais pas, je ne sais plus. Je ne sais que trop sans doute. Ça a toujours été comme ça, les rires, la sensualité, la ferveur, le plus doux pour caresser ce qui suinte, ce qui dévoile la déchéance, trahit les idéaux, dévoie le sentiment pour le faire devenir violence. Je bois son souffle, et toute la suite de ses mots qui m'ensorcellent, l’écho de tout ce que je sais par coeur éclate dans ma tête. Tout ce qu’elle veut. Tout ce qu’elle désire. Et que je suis prêt à donner, sans rien dissimuler. Mon souffle précipite mes désirs, légion hybride de ces gestes imparfaits, de tous les maux inavoués, mon corps se modèle déjà au sien, abdique toute identité héritée du papier glacé des tabloïds, des lueurs irisées de la scène. Il s’arrime à tout ce qu’elle offre au passage, tout ce qu’elle offre en quémandant le pire pour savoir se délivrer, et la bête la toise, la bête la jauge, exulte sa posture en comprenant ne pas craindre l’égale qui la convie à une partie de chasse. Qui est le prédateur ? Qui donc est le bourreau ? Elle ? Moi ? Nous deux ensemble… Mais de qui, ou de quoi ? Peut-être de tout ce dont nous avons dû nous parer jusqu’alors pour savoir subsister. Mes lèvres viennent abattre un juste courroux, reprendre un avantage très vite abandonné parce que je tremble, j’ai envie d’elle à m’en damner. Mais je le suis déjà. Je libère sa main, étend mes doigts tremblants jusqu’à sa nuque que j’attrape, mon pouce étire une caresse sur sa joue, dégage ses cheveux. Contrainte et contrition, elle ou moi. Elle et moi. Le pouvoir s’échange pour devenir incertain :
_ Hais donc ce que tu ne veux pas fuir… Je te hais déjà pour savoir tant rester. Et me dire tout cela, et déchaîner tout ce que j’ai juré d’étouffer une dernière fois. Mais ça ne fait rien, parce que je veux que tu restes, je veux que tu sois là. Avec moi. Dans le noir, dans tout ce qu’il y a de pire, dans tout ce qui me fait horreur. Parce qu’avoir mal avec toi, c’est savoir hurler tout le désarroi de nos natures, qui s’appellent… Qui s’appellent, depuis cette foutue nuit.
Mes lèvres encore, une morsure apposée pour qu’elle se souvienne.
_ Pour exister encore. Encore un peu ensemble. Alors reste. Reste. Je veux la peine, et la douleur, je veux ce que tu tais, je veux tes peurs, je veux tout ce que tu planques, et puis tout tes mensonges encore, pour les apprendre par coeur. Recommencer. Encore. Encore. Le choix est fade, le choix c’est ce qu’on se raconte, mais des créatures telles que nous, Eleah, elles ne choisissent pas, elles survivent. C’est tout, c’est tout. Alors survis avec moi, sans rien retenir, sans rien garder. Je te veux toi. Juste toi.
Juste toi. Juste ça. Sans exception. Mon corps la presse de déchoir toute entrave pour savoir le damner un peu plus. Mes mains trouvent la fermeture de sa robe, navrent les attaches dans l’ivresse de l’urgence. Reste. Reste. Reste encore. Jusqu’à… Jusqu’à… La pensée se distance, il n’y a pas d’échéance, mes lèvres reviennent trouver les siennes pour sceller l’alliance d’une nuit qui ne ressemble en rien à celles qui se sont étanchées entre nos corps emmêlés. Les faux-semblants sont tous déjoués, ils échouent, ils disparaissent. Tout ce qu’elle demande, tout ce qu’elle a exigé, tout ce qu’elle souhaite hurler. Tout ce que je jure de venir délivrer sur sa langue, dans des gémissements déjà rendus animaux. Mes doigts s’enfoncent dans la peau de son omoplate, je la maintiens tout contre moi, me retiens à elle tant je me sens prompt à sombrer. Mais je ne veux pas d’une jouissance aveugle, je ne veux pas me consumer à elle sans l’entendre avouer encore les fractures et les leurres. Je veux tout. Et plus encore après cela.
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Anonymous
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() message posté Dim 1 Juil 2018 - 12:20 par Invité
RAISE ME UP /!\ +18
james & eleah

« Spirits creeping in my yard, hold my head, it's tilting back. Something dancing me around, putting crystals on my neck, lifting my feet off the ground. Raise me up. »
Cassure. Cassure du toi, cassure du moi. Cassure du nous ensemble. Qui es-tu ? Qui es-tu ? Je ne te reconnais plus, je te sais par cœur. Tu es là, tu m’écœures, tu m'immoles. Le sang pulse à l'intérieur. Pulse si fort. Elle n'entend plus que lui, ses battements frénétiques. La musique s'assourdit à l'extérieur, n'est plus qu'un acouphène qui résonne au fond de son oreille à l'abrutir, à lui faire perdre l'équilibre. L'équilibre … Retiens-moi, retiens-moi … Ses ongles ne griffent plus la chair. C'est pire que cela. Elle sent la peau qui s'insurge sous la morsure de la pression qu'elle impose, elle se repaît des tressautements de la peur qui mire dans ses regards obscurs. Ses prunelles sont noires, si noires. Sublimes. Immondes. Eau lustrale dans laquelle elle surnage pour mieux se noyer. L'orgueil est incapable de s'en détourner et de prendre la fuite, alors il préfère boire toutes les noirceurs qu'il impose. Évidences contrastées, en demi-teintes. Il est là. Dans toute la splendeur d'un moi, d'un je, qu'elle ne connaît pas totalement, mais dont elle saisit déjà la quintessence. Qui la fascine, la façonne. Pourquoi ? Pourquoi ? Sa mâchoire se serre à se rompre, fait grincer les gencives qui retiennent encore tout ce qui s'éreinte à l'intérieur. Aucune pitié pour ce qu'il divulgue. Aucune compassion non plus. Pas de craintes, pas de peurs. Pas de lui en tout cas. Non, pas de lui. Les élans menaçants dont il se pare sont des invitations à le rejoindre. Ils réveillent tout ce qu'elle a su laisser crever, qui se souvient exister, toujours, encore un peu. Juste assez. Solitaire jusqu'alors, ayant enfin  trouvé un digne comparse avec lequel se corrompre. Toute la fascination qu'il dévoile à regarder son masque si finement étudié se fissurer sous ses appels la fait enrager plus encore. Serrer plus fort … plus fort. Et sa main sur la sienne, qui serre elle aussi. Serre assez pour ne plus savoir ce qui est de lui, ce qui est d'elle. D'eux ensembles. D'eux qui se rejoignent dans le néant abyssal de leurs natures refoulées, écumes vomies sur les rivages incertains de natures proscrites, indécentes, immondes. En vie pourtant. En vie malgré tout. Parasites à la fois bourreaux et victimes. Qui est l'un ? Qui est l'autre ? Elle ne sait pas. Elle ne sait plus. C'est intolérable. C'est divin. D'éprouver enfin. Quelque chose qui n'est pas seulement joué ou feint, appris par cœur. Il n'y a aucun rôle à jouer ce soir. Aucun rêve à pourchasser. Ce sont des illusions, des mensonges. Ils sont tours morts un jour. Morts de n'avoir pas survécu. Morts. Cela fait mal. Il a raison. C'est une torture. Le soulagement l'étreint pourtant, intolérable. Le soulagement. D'être. D'être enfin, quelque part, dans la morsure de cette chair qu'elle serre si fort que cela fait mal. Tout rentrer, tout retenir. Les mots se répercutent, la font trembler comme le nerf tendu sur l'instrument que l'on pince pour créer le crissement d'un son.   Ses lèvres s’entrouvrent, l'inférieure tressaute. Elle la mord. Mord pour retenir encore un peu ce qui crève de sortir, ce qui fait sauter les barrières une à une. Traverser le no man's land jusqu'au front des terreurs viciées. Jusqu'à ce qui est.  Ce qu'il quémande. Ce qu'il veut.


Les mots s'étouffent au fond de sa gorge, toutes les assertions enragées terrassées par le mutisme qui navre son visage, divulgue une souffrance si pure, si crue aussi, déparée de tous les fards avec lesquels elle sait si bien se falsifier. Artiste évanescente, camaïeu de couleurs trop vives pour que l'on puisse distinguer la toile de fond sans se brûler la rétine. Elle s'éteint. Elle s'embrase.  Il a raison. Cela fait mal, si mal. Un mal si terrible, si constant, que l'on finit par en prendre l’habitude. Par l'accepter comme un compagnon de route. Une ombre qui suit, dans chaque sillage, dans chaque détour, dans chaque interstice. Une ombre qui traque. On ne peut la semer, s'en cacher, ou imaginer la vaincre. On ne peut pas. L'impuissance alors. L'impuissance partout. La rage de ne pas savoir comment faire, la rage d'avoir si mal. Sa mâchoire se serre plus fort, rend plus acéré chaque angle meurtri de son visage. Ses paupières refusent de se fermer, de jeter le noir sur l’image qu'il lui renvoie. Elle veut s'en abreuver encore. S'en écœurer. Une larme indistincte vient rouler sur sa joue gauche, devenue creuse. Déparée de ses attraits enfantins, les fossettes asséchées par la haine qu'il a su convoquer. Elle voudrait crier. Elle voudrait tant, depuis si longtemps. Elle en est incapable. Elle a oublié comment faire. Ses entrailles vrillent, font remonter la bile de son estomac. Elle parvient à articuler des mots enfin, à les aligner l'un après l'autre. Ils se font légion. Ils sont une ultime offensive pour l'entraîner et le repousser tout à  la fois.


Supplication, condamnation. L'un ou l'autre. L'un dans l'autre. Tu aurais dû me laisser partir. Tu aurais dû me repousser, me damner, me convaincre. Tu ne l'as pas fait. Pourquoi ne l'as-tu pas fait ? Ses lèvres assassines goûtent à la saveur des siennes. Elle n'est plus la même que celle déjà connue par cœur. Elle n'a plus rien à voir ce soir. Elle est toute autre. Amère. Fragile. Brûlante. Adipeuse. Rauque. Elle la veut encore. Elle la veut acide, agressive, stupéfiante. Se délecter de la sapidité de ses aigreurs jusqu'à rêver les abominer. Les imaginer salées, sirupeuses sous la langue, les canines enfoncées dans la douceur candide de la chair trop blanche. Le sang sur les papilles … Le sang. Le sang et les larmes. Ces choses là ont la même saveur. C'est pour cela qu'elles fonctionnent  ensembles. L'un avec l'autre. L'un dans l'autre. Son corps la rejoint, la comprime, l'offusque, la fascine. Tous les muscles se tendent sous la peau, sur les os qui s'effritent, sur la posture qui ploie et se modèle en répudiant la contrainte pour la faire sienne. Sa nuque cède à la contrition qu'il imprime avec sa main, ses doigts refusent toujours de le libérer. S'en est trop. Ce n'est pas assez. Elle en veut plus. Elle veut tout. Qu'il vienne tout prendre, tout arracher. Et son corps qui vacille, et son âme qui suinte. Tout. Jusqu'à l'aigreur. Jusqu'à avoir mal. Ses mots pulsent à ses tempes, façonnent cet irréel abscons qu'elle a toujours refusé d'embrasser. Celui qui consiste à être. Délaisser le paraître, abandonner le subterfuge. N'être plus que la bête décharnée qui s'est cachée si longtemps que l'on n'en distingue plus que l'ossature. Avilie. Hideuse. Sordide. C'est cela qu'il veut n'est-ce pas ? Il le veut si fort. Elle la veut aussi, celle qu'il cache. Elle la veut au point de consentir à lui offrir tout l'infâme qu'il quémande, et qu'elle a mis des années à renfermer. Rester. Rester alors. Rester parce qu'il le veut, qu'il l'a choisi, même s'il prétendra le contraire. Rester pour goûter à ses cruautés furibondes, riposter en projetant sur les contours acérés de sa silhouette toutes les terreurs putréfiés qu'elle renferme. Rester pour le maudire, l’idolâtrer, l'exécrer, le chérir. Rester pour le haïr ou pour l'aimer. Tout ensemble. Car sans ce tout, ce n'est jamais assez.

La morsure qui ponctue sa tirade fait tressauter sa peau. Il y a une cassure. Cassure lorsque sa main vacante lâche la lanière de ses escarpins qui rejoignent le sol dans un fracas indistinct, sonnant le triomphe d'un abandon, d'une corruption. Du tout. Cassure lorsque le souffle qui se libère de ses lèvres est un tremblement qui se propage comme une onde le long d'une ligne à haute tension, le long de la nuque, dévalant la colonne vertébrale, jusqu'aux reins, jusqu'aux jambes. Cassure lorsque l'expression qui cisaille ses traits oscille entre une fragilité absolue et une rage impérieuse. Cassure aux derniers mots qu'il prononce. Survivre alors. Sans rien retenir. Sans rien garder. C'est ce qu'il veut. Juste elle. Le plus beau. Le plus laid. Le mutisme s'éraille dans un feulement indistinct, dans un gémissement qui s'échappe de sa bouche et résonne comme une complainte. Incapable de parler. Incapable de dire. Ce sont les élans nerveux et avides de son corps qui s'éveillent. L'aspiration à contraindre, à posséder, à vaincre autant qu'à être vaincu. Pensée bestiale, instinct animal. Pour survivre, survivre encore un peu. C'est ce qu'il veut. La main qui serre libère peu à peu le vêtement et la peau de son joug, remonte, se pose autour de son cou. Sans presser, sans s'imposer. La menace pourtant sous-jacente, quand son pouce s'arrête sur les battements de sa jugulaire, que ses doigts encerclent sa gorge. Qu'elle le sent. Qu'elle le sent si fort. Ses pupilles s'agrandissent, dilatées par la fascination qu'elle éprouve à le regarder, à le voir. Cru et sans fard. Décharné. Immonde. Sublime. Nu … Presque nu bientôt, car déjà les mouvements qu'il amorce trouvent une réponse.  Ses doigts se précipitent aux ornières de ses vêtements, traquent la peau, cherchent à la découvrir avec une virulence brutale. Cassure encore. Une dernière fois. Pause, durant laquelle ses doigts s'imposent à l'arrière de sa nuque, s'agrippent avec trop de ferveur, le convoquent, le supplient. Les deux ensemble.

« Si c'est ça que tu veux … Prends tout. Prends tout James … Prends moi. Parce que je ne t'épargnerais pas non plus … Prends-moi. Juste moi ... Juste ça.  »

Littéralité. Abstraction. Tout se confuse. Rester. Rester pour le trouver. Elle le cherche, elle le pourchasse. Il est là. Juste là. Figure composite de toutes les insanités qu'elle adore. Sa bouche s'écrase contre la sienne, impose, reçoit, demande. Langueur indécente pour réapprendre les saveurs de ses noirceurs. Ses doigts se saisissent de ce qu'ils trouvent, froissent le tissus fragile de sa chemise. Ils ne pressent pas cette fois-ci, ils tirent, ils  déchirent. L'innocence du coton crisse sous ses doigts, ne fait que gorger ses avidités devenues enragées, les boutons sautent, les coutures agonisent. En le déparant du vêtement, elle croit navrer la chair au passage. Griffure des ongles. Marque rougeâtre de son passage, qui fait mal, si mal. Ses doigts sur sa peau la font se réveiller, la tourmentent. Elle gronde en retour, répondant de façon ignoble à toutes les sensations abruptes que leurs chairs convoquent en se modelant l'une contre l'autre. Ses doigts fouaillent toujours. Ivres, ahuris, il ne savent plus s'arrêter, ne trouvent plus de limites. Sans douceur elle délit sa ceinture, tire, laisse le cliquetis du métal mourir sur le sol sans y prêter attention, puisque ses mains cherchent déjà à le libérer de son pantalon. Pas complètement cependant. Juste assez pour le trouver. Pour se laisser voir. Pour le rejoindre. La nudité est farouche, poursuivie, tourmentée parce que la précipitation étend son empire. Prendre son temps devient une idée absconse. Détourer, effleurer, ce soir, cela n'a aucun sens. Elle veut juste saisir, se consumer. Contre lui. En lui surtout. Disparaître, se fracasser contre son corps pour mieux le laisser s'y échouer. S'y fracasser jusqu'à avoir mal, jusqu'à ne plus savoir ce qui est de lui, ou ce qui est d'elle. Son corps tout entier l'accule, le repousse encore contre le mur, presse dans une impériosité animale qui quémande autant qu'elle consent à donner. Les repères se distillent dans l'ivresse. Les saveurs de sa peau sur sa langue, sur ses paumes.  Sa cuisse qui remonte le long de sa jambe, se presse contre sa hanche. Les paupières se ferment, rejoignent le noir pour mieux le trouver. Mais c'est une erreur … Une erreur que de ne pas le voir, que de ne pas le regarder.

Les accents d'un sursaut la saisissent de part en part. Sursaut de l'horreur qui se dévoile, qui se souvient. Viscérale. La texture fragile d'une peau qui change, qui se morcelle dans le soulèvement d'un souvenir. Sa main … Sa main contre sa cuisse, ses doigts remontant en tremblant le galbe juvénile de la jambe. Le froid qui suinte. La peur qui grince, qui crisse. L'incompréhension qui geint sa détresse. L'ignoble en étalage, la promesse indistincte d'un amour factice. Si vrai pourtant. Si vrai … Jusqu'à l'outrage. Jusqu'à l'abject. Elle a tant de fois voulu oublier, ce que cela fait. Ce qu'il a fait. Tant de fois. Trop de fois. Elle n'a pas pu. Pas totalement. Tout se morcelle. Tout est insensé. Puzzle imparfait aux pièces manquantes. Parce qu'elle ne veut pas se rappeler. Parce qu'elle ne peut s'en empêcher pourtant. C'est gravé là, quelque part. Partout. Chaque fois qu'on la touche. Chaque fois qu'on s'accapare son corps. Cela la compose, depuis le début, depuis l'essence. Les sensations projetées sur sa peau sont intactes. Elles la narguent, elles se rient de toute la tourmente qu'elles sont capables d'étendre, d'imposer. L'épiderme se souvient, l'épiderme n'a pas pu oublier. La marque de ses fers. Les seuls qu'elle a toujours porter. Les seuls qu'elle n'a pas su briser. Prisonnière. Prisonnière de ce qu'il a été. Le monstre qu'il a su créer, décharné, recroquevillé à l'intérieur. Pétrifié … Pétrifié. Jamais libre. Incapable de l'être parce qu'il existe au gré de l'imparfaite image qu'il lui renverra toujours. Rongé par la haine, incapable de se mouvoir. Incapable de fracturer cette main qui glisse, s'insinue, broie la candeur enfantine au gré de caresses tremblantes. Une sensation immonde dévale jusqu'à son ventre, jusqu'à interrompre la précipitation enfiévrée de son souffle.

Cassure encore. Cassure lorsque le monstre rejoint la réalité pour se modeler enfin sur les traits de son visage qui revêt des accents cruels, impérieux, fragiles et terrifiés tout à la fois. Il le regarde, il le voit, il le reconnaît à son tour. La même monstruosité, sur lui, sur elle. Sur eux. La même, à quelque chose près. Dans un geste virulent sa paume se referme autour de son poignet, les ongles plantés dans sa peau, violence chargée de toutes les impiétés dont elle se compose. L'interruption de la caresse. L'interruption de la contrition. Cassure. Cassure où elle le regarde, là, juste à l'orée de son visage, serrant plus fort, imposant à sa main de s'imprégner davantage sur la peau nue qu'elle convoite.  

« Ne tremble pas … Jamais. Pas avec moi. Je veux la morsure de tes mains, de tes ongles, de tes lèvres. Toutes … Tant qu'elles t'appartiennent. Je veux tout  ... Donne les moi. Ne retiens rien ... Ne tremble pas.  »
Les morsures,  tant qu'elles viennent de toi. Tant qu'elles permettent de surpasser, d'oublier, toutes les autres. Les siennes surtout … Les siennes, gravées si profond dans la chair, qu'elle ignore ce qu'il faudrait déployer pour les déloger. Lui … Lui peut-être. Les tiennes, oui … Les tiennes.


(c) DΛNDELION
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James M. Wilde
James M. Wilde
MEMBRE
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() message posté Jeu 5 Juil 2018 - 20:50 par James M. Wilde


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« Just like you said
It's all been done before
I don't have to talk pretty
For them no more
I can talk what I want, how I wanna »

Eleah
& James




Et dans les errements qui confinent à l’injure, la serrer contre moi. Et dans les dénivelés de l’opprobre qui brûlent les chairs, choisir de m’immoler à toi. J’ai dans le sang tous les échos immondes de cette nature que j’abjure sur ta bouche, que je ressuscite en respirant ta peau, que je dévoile en posant mes iris obscurcis sur ton front. La bête sourit de toutes ses dents, mes lèvres étirent des satisfactions qui t’attirent jusqu’à me confronter, et je ne sais plus qui de toi ou de moi je souhaite voir sombrer. Mes mains resserrent leurs entraves pour mieux me raccrocher à un instant qui balaie le passé, tous les futurs ensemble, crache sur le présent qui palpite trop fort, dévoré par des instincts qui souhaiteraient s’épandre sous tes paupières alourdies par le désir pour quelques éternités, brûler la rétine, dévoyer tous les mots sur tes lèvres dorénavant closes. Tu ne dis plus rien, n’est-ce pas ? Tu ne dis plus rien, parce que tes dents cherchent à déchirer l’abscons et s’abreuver d’un sens que tu crains, que tu convoites, tour à tour. L’avilissement de tout ce qui est beau pour ressentir enfin, renoncer au factice de nos rires, aux facilités de l’ironie disparate dont nous abusons. Et rencontrer l'âpreté d'une vérité impardonnable. Crever, plutôt que de continuer à respirer l’impur, boire les mensonges, faire semblant de persister dans la fraude d’une nuit qui n’a que trop duré. Sous ses doigts, le tissu qui susurre ses crissements, prêt à rompre, sous les miens sa main prise en tenaille de tant d’envies que je ne sais plus lesquelles boire, lesquelles vomir, lesquelles consumer. Aucune qui ne soit là, à se nicher dans mes yeux qui semblent la voir pour la première fois, le prédateur la juge digne de violences si honteuses qu’elles me font frissonner, digne de les voir, digne de goûter celles qu’elle persistera à venir chercher. Car elle ne lâche pas, elle ne me relâchera pas. Pas avant que je ne sois éreinté, que j’avoue dans son corps le pire dont nous avons joué sans jamais pouvoir nous en détourner. Qui es-tu, qui es-tu ? Pour voir ce que je cache, pour saisir tout ce que j’ai persisté à dérober, pour comprendre ce que je peine à déchiffrer. Qui es-tu ? Réminiscence de mon esprit lorsque la lumière balaie ses effrois sur ton visage rendu à une dureté que je ne lui connais pas. Persistance de souvenirs que je ne peux conter sans avoir le réflexe de hurler. Déviance de mes idéaux les plus brutaux et les plus avides. Entre tes mains, dans le souffle contrarié, la peur qui suinte, et nos aveux mutiques et dérangés. La torture dévoile ses revers, sous la peine que je lui chante, il y a toutes les promesses portées, de savoir que le mal est partagé, qu’elle peut aussi me l’infliger pour s’en débarrasser. Déjouer tous les destins si c’est pour vivre libre tout contre moi l’existence qui sera à l'aune de sa monstruosité, tracer l’ignoble que j’ai bu sur ses lèvres dans d’autres enfers. Mais ces enfers-là n’avaient rien de ce qui se tapit dans les abîmes où nous tombons. Dans le noir, c’est nos visages qui changent, et nos idéaux qui se blessent de n’avoir su se confondre. Dans le noir, c’est le monstre qui m’appelle, je ne suis que lui, et il n’est plus que moi. Les fers sont brisés depuis l’opprobre d’un autre mur, la bête est nue devant son juge, le bourreau qu’elle a choisi, digne prédateur de ses désirs. Le son sourd que filtrent ses lèvres, l'hommage à la reconnaissance, toi, moi, nous ensemble, soulagement inavouable, morsure de l’amertume de se savoir découverts. Mis au jour dans la pâleur de la nuit, les griffes des ténèbres partout, dans la peau, dans la peau. Elle est là, la brûlure insatiable, qui tiraille mes muscles, mes doigts se ferment parce que me retenir ne signifie plus que la contraindre. Peut-être est-ce elle que je bride cependant, que je bride encore un peu pour me préparer à l’affronter. Et les paupières lourdes, révèlent l’iridescence d’un plaisir naissant, que je grave dans ses prunelles. Je plonge. Je plonge. J’oublie tout ce qui fit les retenues et les beautés frivoles de l’illusion de contrôle sur mes instincts. Les flammes sur sa peau, les flammes sur la mienne, cela fait mal, si mal, si mal. Je n’ai jamais oublié combien j’aimais cela. Je n’ai jamais oublié ce que cela faisait de surprendre la brûlure viciée chez quelqu’un d’autre, les airs adulescents brisés par la colère, l’animal débusqué qui cherche à s’échapper. Mon souffle feule les premières notes de la luxure. Rien à voir avec celle que je trouve dans les étreintes sulfureuses et désincarnées, qui frôlent la débauche sans jamais apporter ne serait-ce qu’une once de délivrance. Fourvoyée, éphémère, acide dans son déchainement, facile dans son désoeuvrement et ses mécaniques implacables, je la dénonce, je la déchoie. Devenue hérétique sous mes doigts qui cherchent bien plus que l’étreinte, bien plus que la corruption, bien plus. Bien plus. Ce tout qui résonne dans ma tête et me rend sourd à chaque pulsation de mon sang dans mes tempes, la musique interdite, arrêtée au seuil de notre caveau. Fait de souffles, de cris silencés, et de regards enragés. Les mots s’interdisent pour sonner leur déchéance, creux, creux. Au creux de toi. En moi, le supplice de l’attente, assassine, qui abuse de sa lame le long de mon échine.

Tu aurais pu partir, tu aurais pu cueillir l’horreur pour me la balancer en pleine gueule. Me repousser dans l’élan d’une répulsion implacable, je ne t’aurais pas poursuivie. Je ne t’aurais pas contrainte. Je ne t’aurais pas rattrapée. J’aurais bu le poison du rejet, j’aurais hurlé dans l’ombre, jeté des images infernales à ta suite pour te parjurer, déchirer l'idole, ses contours en héritage qui s’évanouissent dans la nuit. Juste l’amertume de ce qui aurait pu être. Juste cela. Puis plus rien ensuite. Plus rien. Pourtant… Ça n’aurait pas suffi. Jamais. Jamais. Mon corps s’impose parce que l’attente n’a que bien trop duré, les arêtes acérées n’ont plus rien de doux, plus rien de sensible, le fiel d’une morsure, le goût métallique sur la langue, ses muscles à elle, des lignes sous l’épiderme, rencontre imparfaite sous mes doigts qui la parcourent. J’ai sa nuque offerte dans le creux de ma paume, j’aime l’inflexion que je lui arrache, la violence d’un baiser qui ne peut convenir à l’appétence ainsi déchaînée. C’est trop d’un coup, c’est l’air qui revient vicier mes poumons, c’est l’attrait de la mort qui prend les parures du désir, de la femme à dérober, pour découvrir tout ce qu’elle peut dissimuler de monstrueux. Elle est si différente, elle est si semblable à tous les cauchemars toutefois. Si semblable. Eternelle adversaire que j’ai su choisir par erreur, ou parce que j’ai su, comme je sais aujourd’hui. Je sais. Je sais. Je te sais toi, et tu me hais, et tu me veux. Comment est-ce même possible de se vouloir à ce point-là, sans décence, sans contrition, sans manoeuvres habiles qui rétabliraient une saine distance. Des distances impies, je n’en veux pas, je ne peux plus les souffrir. De ces silences, de ces vides implacables que j’ai su ouvrir pour m’y planquer, me repaître de tout ce que j’ai pu faire récemment, de tous ces actes malsains, la haine qui se glisse dans toutes les déchirures d’une personnalité toujours plus composite. Mais qui complète la sienne. Qui se veut similaire, adepte du démon qu’elle représente, qui s’ouvrirait les veines pour l’abreuver et lui rendre la liberté impure et déformée. Une liberté quand même. La seule qui soit. La seule qui reste. La seule qui me reste.

Ses chaussures choient, c’est un bruit qui martèle mon coeur, mon corps et ma tête, une galopade pour servir la ferveur de la perdition. Tout se rencontre, tout se morcèle, tout tremble enfin. La peau, les os. Il y a le mal partout, et le besoin de l’autre, la sensualité déchaînée qui devient corruption. J’ai des mots malformés dans la bouche, les avortements de tant de serments qui sont morts avant de n’être seulement portés. Les seuls serments qui demeurent son sur sa langue, sur ses lèvres, dans son cou que je continue de contraindre pour mieux le malmener. Les dents menacent la vie qui sursoit au plaisir. Cavalcade. De son coeur et du mien. J’échappe un soupir de contentement quand la menace change de tortionnaire, j’aime sentir tout ce qu’elle retient, de moi et d’elle. Une mesure pour mieux se savoir, une mesure pour mieux apprécier toute la douleur qu’elle pourrait imposer en retour de celle que je lui destine déjà. Elle pourrait serrer, serrer la maigreur de mon cou, sentir cette peur s’y insinuer, voir le monstre de plus près lorsqu’il se sait enchaîné. Le sang, le sang, la soif inaliénable, cette survie qui pulse sous la jugulaire, sous la pulpe de ses doigts de femme. Des ongles et de la chair. J’impose la vision d’une folie qui ne peut plus se planquer, les années défaillent, rappellent un être qui n’a jamais su sortir des murs où on l’a un jour cloitré, un être déchu, mortifère, assassin. Meurtrier. Un monstre, juste un monstre et sa peur en étendard. D’avoir sur se mirer jusqu’à se rendre aveugle, insomniaque, drogué, déviant. Je la laisse me voir, détourer les noirceurs qui dévalent mes joues qui se creusent. Je dois avoir l’air d’un cadavre dans le clair obscur de la nuit qui nous étreint. C’est ce que je suis. C’est ce qui est sorti de l’asile, un soir d’hiver, un soir pas comme les autres, où échapper à tout n’était plus que la destinée rétrécie de cette vie que j’avais su forger. Une vie. Une mort. Troquée en échange de ces limites toujours repoussées, toujours plus lointaines, incertaines, indomptées. Je n’ai pas de limite, je n’en ai aucune. Et toi non plus. Car elle a envie de serrer, elle en a l’ignoble appétit, et la bête que je renferme lui sourit. Elle aimerait crever ici. Elle aimerait bien ça, oui. Que la douleur atteigne un putain de paroxysme pour s’éteindre à jamais. Mais il y a des possessions pires que la mort, celles qu’elle tisse tout autour de moi, depuis des jours, des semaines et des années enfuies de Galway. Depuis toujours peut-être bien, parce qu’un dégénéré comme moi cherche un animal pour se sublimer. Ouvrir la peau, décharner les os, chercher l’essence et l’excaver du bout de ses doigts sanglants. Elle déchire, l’étoffe, les vêtements cèdent, tout comme moi quand j’exhale un gémissement qui trahit tout l’état dans lequel je me trouve. La passion intime la violence d’un langage reçu du fond des âges, la déchirure précède la tourmente, sa robe se navre d’un traitement de brute, les attaches plient et libèrent sa peau, mes mains ne frôlent plus, elles assaillent. Surtout lorsque les mots s’engouffrent dans mes entrailles pour y verser une mélodie souffreteuse, bientôt symphonie qui déploie tout mon être. La prendre, la prendre, tout prendre d’elle pour me l’approprier. Et donner tout de moi au passage. Car l’un ne peut être sans l’autre. L’un à l’autre. L’un dans l’autre, toujours.

La foi reparaît, extatique, violentée dans le cristallin qui brille, mire ses reflets qui n’ont plus rien de chaste. Je ne l’ai jamais portée jusqu’aux nues d’un piédestal impropre à tous ses airs sulfureux. Elle n’est pas sainte, elle n’est pas inatteignable. Virginale. Intouchée. Ça non. On l’a déjà broyée, sous d’autres doigts, sous d’autres mains, d’autres instincts pour modeler ce qu’elle est devenue. Dès lors qu’elle se fracasse à ma peau qui exsude les parfums de l’étreinte qu’elle quémande. Dès qu’elle me griffe, me malmène, me repousse pour mieux intercéder envers la bête, la faire sortir, la dévoiler, je sais qui elle est. Déformée tout comme moi. Défigurée par un acte qu’on ne pourrait narrer. Les mots ne suffiraient pas à encercler l’horreur, elle ne peut se contenir, elle ne peut se résoudre ou se restreindre. Il faut l’exprimer pour la connaître, la subir pour la goûter. Qui es-tu, qui est-tu. Quel animal peux-tu bien être pour vouloir faire mal autant que tu cherches à subir. Les griffures appellent d’autres marques, mes doigts étreignent jusqu’à la furie, je ne crois jamais avoir cherché à me remémorer quelqu’un ainsi, dans le souvenir de la chair, estampé dans l'esprit. Pour le garder, pour le retenir, pour l’apprendre à m’en écoeurer. Je la laisse faire, disputer une supériorité que je ne cherche même plus à gagner, nous sommes deux égaux dans nos noirceurs, elles sont constituées de la même étoffe, des mêmes ires et des mêmes envies. Les limites s’effacent, celles que j’ai toujours repoussées en songe depuis que je suis né se gomment sur la peau que je marque, tel une bête qui voudrait se sustenter d’un ostentatoire primaire. Demain il y aura des bleus, des griffures, de ces stigmates que nous ne pourront plus nier. Seulement dissimuler encore. Mais pas cette nuit, pas cette nuit. Le métal chante, le désir atermoie dans mon souffle, pulsation presque exsangue, j’ai mal au crâne, j’ai le vertige, je la veux à dégénérer, ne plus rien savoir ou comprendre si ce n’est sa saveur ou son épiderme. Ses yeux qui flamboient, ses ongles qui s’enfoncent. Mon dos percute le mur, j’accueille sa cuisse sans douceur, immisce d’autres indécences du bout des doigts, cherche à la voir défaillir d’un désir dont nous jouons encore, malgré nous, parce qu’il brûle, dévore, distille des avidités qui vont au delà de l’acte lui-même.  Le contact visuel se rompt, mon autre main se glisse dans ses cheveux pour mieux élancer une domination très incomplète. Imparfaite. Je ne peux plus la voir, la toucher est comme un leurre, surtout lorsque je ressens jusque dans mon ventre qui s’accable, le rejet qui tord ses envies. Elles deviennent indéchiffrables, elle est là, pourtant lointaine, prise dans un monde où je n’existe pas, et ce n’est même pas le plaisir qu’elle consume dans des souvenirs opaques, c’est l’effroi, c’est la haine. Et le dégoût. Le dégoût. Il me gifle dans une violence telle qu’elle m’habite tout entier, c’est pire que le reniement, c’est pire que le renoncement. Pire que cette rage, ou cette liberté monstrueuse. Pire. Pire. Pire. Pire que tout. L’immonde nous relie, glisse le long de mes doigts, remonte jusqu’à mon coeur, et mon désir d’elle se confond à ces autres instincts qui côtoient tant l’aube de mes plaisirs. Ceux qui cherchent à détruire, ceux qui cherchent à nier tout ce qui est. Sera. Fut. Pourrait même. Le conditionnel n’existe pas dans l’infamie. Cavalcade, j’ai la nausée. Des envies si proches de ce que j’ai fait. Si proches. Si… Si… Là… Juste là. Mon souffle se confond à la mémoire triviale, la honte ne suffit pas à contenir la bestialité qui n’a pas été étanchée. Pas ce soir où j’ai commis l’impardonnable. L’écho d’une génèse terrible. Cavalcade, le choc secoue la cloison. Je l’ai plaquée au mur à mon tour, réitérant les gestes, réitérant la haine, les ténèbres retombent, les feux deviennent brasier, j’oscille dans un entre deux qui portent des tremblements déchaînés dans tous mes muscles. Ma main se referme sur sa cuisse. Comme ce soir-là. Ma main cherche à encercler ses poignets. Comme ce soir-là. Ma main crève de déchirer toutes les chaines pour mieux renier tous les liens qui auraient su me sauver. Comme ce soir-là. Le dégoût qu’elle ressent. Moi en elle, à la forcer. Le dégoût, et la peur. La peur. De ne jamais savoir m’arrêter. Et les bruits gutturaux, dans mes oreilles. Et… Comme ce soir là. Pourtant. Pourtant. Je ne fais que la plaquer sur ce mur, et l’étreindre. Et l’étreindre. Pour la ramener. Pourtant. Pourtant, ça n’a rien à voir, car je cherche son visage, je cherche à ce qu’elle me revienne pour mieux me voir. Je cherche. Je cherche. Je la cherche pour me sentir entier. Ma main sur sa joue, une caresse incertaine, qui tranche avec d’autres tremblements. Là dans sa chair, là en elle. À ne plus savoir qui je suis, qui elle est. À rencontrer l’ignoble parce qu’elle l’a ressenti et qu’elle me l’a donné. Ses ongles malmènent mon poignet, arrêtent le tempo malsain qui s’insinuait en elle, trouvent une autre cadence dans l’horreur qui semble ainsi ressuscitée dans nos souffles suspendus. C’est elle. C’est elle. Et c’est moi. C’est nous. Ça n’est pas ce soir-là. Ça n’a rien à voir. Ça n’a rien à voir.

Je déglutis avec lenteur, et le monstre idolâtre l’animal qu’elle libère, dans mes iris j’implore sa violence. Plutôt que le dégoût, plutôt que l’horreur, plutôt que la mécanique qui broie, sonne faux, rend tout ce qui se savoure à des saveurs de cendres, et de deuil. Le mouvement égraine toutes les certitudes, les mots suivent la ligne d’une convoitise que j’abats sur elle, rejoignant sa volonté avec une lenteur infâme. Ma caresse maîtrise tous les échos qui pourraient me rappeler à cette honte que je vomis et sans le savoir peut-être, elle m’absout, elle me libère à son tour. Et je comprends. Je comprends qu’elle me veut, qu’elle me veut jusqu’à l’infamie qui nous dévore, qui nous hante. Qu’elle me veut dans tout ce que je sais être. Qu’elle me veut dans le désespoir de l’ignominie, celui qui demeure après s’être tant avili qu’on ne se reconnaît plus. Mais c’est elle, c’est moi, nous ensemble. Je ne dis rien mais je l’embrasse, les tremblements s’évadent, je la précipite de nouveau sur le mur, sans rien retenir, sans rien silencer. Sans rien défigurer de mon essence, parce qu’elle sait. Parce qu’elle sait. Et qu’elle est déjà brisée. Elle est déjà brisée. Je ne peux la réparer. Je ne peux lui faire plus de mal qu’il n’a déjà été fait. Je ne peux que la délivrer, lui montrer le vrai visage de sa monstruosité. Je ne dis rien car je ne tremble plus, je ne tremble pas. Je sais ce qu’elle est. Je sais qui elle est. Mes doigts bleuissent sa cuisse, je la rencontre en un mouvement brutal, les yeux fichés en elle, le corps enfoui à l’orée de la douleur. Elle bat mes tempes, elle court sur ma peau, la hérisse d’un frisson délectable. J’aimerais la rejoindre, m’immiscer jusqu’à ne plus rien distinguer, de la peau, de la chair ou des pensées. Le mur tremble de nouveau, les basses le lèchent, je la laisse libre de se retenir à moi, à mes épaules où les os saillent, je la laisse libre de me subir, libre de me prendre, comme personne ne le fait jamais. Tout le monde est si précautionneux, les outrages ne sont jamais frôlés, la distance impropre des chairs, même l’une dans l’autre, quand les caresses sont empruntées à des attentes toujours remplies. Sans surprise, sans saveur. Etreinte aseptisée. Mais pas avec elle. Pas quand entrer en elle, prendre possession de son corps, revient à recouvrer tout ce qui dispose du mien. La fièvre, la corruption, l’hérésie de ces rêves amers, si aveuglants qu’ils revêtent une beauté de cauchemar. Les rêves versés en elle, les pensées inavouées à chaque coup de reins, gravées sur sa peau. Le personnage se déjoue, il ne reste que l’imperfection de l’animal qui tente parfois de se faire homme. La musique en saccade, dans la respiration qui murmure le plaisir, la douleur, la fureur. L’oubli tant convoité, l’horreur en partage pour d’autres libertés. Celles que personne ne peut comprendre, celles que personne ne peut envisager. Ils verront les griffures, ils verront les stigmates, ils liront la violence, ils jugeront la passion comme infâme. Quand j’y vois, à chaque assaut, tout ce que nous cherchons, au seuil de la folie, pour mieux survivre, pour mieux ressentir, glisser le feu pour la foi absentée, jouer l’harmonie pour tous les cris portés. Notre harmonie est tempétueuse, le rythme imparfait, virulence d’un plaisir emmêlé à ce tout que je lui jure de délivrer. Tout ce qui nous relie. Tout ce qui nous unit. Contre ce mur. Fiché dans la chair, glissé sous le masque. Qui craquèle, qui grogne, qui explose enfin, qui cherche à exister pour ne jamais s’éteindre. Des traits défigurés. À jamais. À jamais. Nous sommes hideux. Nous sommes ignobles. Divine laideur de deux perditions qui se rencontrent, qui se dévorent, qui se créent. L'un dans l'autre, l'un à l'autre. Ensemble. Te prendre, te prendre, et tout recommencer. Balayer les souvenirs, les remplacer par la fable de nos corps déchaînés. La seule réalité que j’accepte encore de subir. Moi en elle, et elle en moi. La culpabilité absente, même si cela fait mal. Surtout si cela fait mal, pour le plaisir qui s’y cache, ce plaisir qui entrave l’horreur, pour mieux la dessiner. Elle est en moi, elle est en toi. En nous ensemble. Et nous la modèlerons à l’envi, parce qu’elle ne peut nous enchaîner. Plus maintenant. Plus jamais.
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() message posté Dim 8 Juil 2018 - 20:55 par Invité
RAISE ME UP /!\ +18
james & eleah

« Spirits creeping in my yard, hold my head, it's tilting back. Something dancing me around, putting crystals on my neck, lifting my feet off the ground. Raise me up. »
Fable onirique, fable irréelle. En camaïeu obscur, décharné, immonde. Fascinant jusqu’à l’outrage. Tu es là n’est-ce pas ? Oui tu es là. Je te vois désormais. Je te vois, plus que jamais. Ses doigts resserrent leur prise, froissent la chair au-delà du tissu qui la pare, crèvent de sentir chaque palpitation qui gronde à l’intérieur. Toutes les avidités de sa nature l’étreignent, étau sanguinolent dont il ne pourra se départir de la brûlure sans avoir mal. Car il l’a voulu, malgré lui, n’est-ce pas ? Il a choisi. D’excaver la bête. La sienne. La leur. Pour qu’ils se rencontrent. Qu’ils se regardent et admirent toute la laideur ignoble qui les compose. Rencontre sublime, rencontre cruelle. N’est-elle que cet être décharné par l’horreur ? Ne sont-ils que cela ? Y-a-t-il autre chose ?  Oui, bien sûr. Il y a tout ce personnage éclectique qu’il déploie sur scène pour les dévoyer, les fasciner, les pervertir à son image.  Il y a toutes ces lueurs enfantines qu’elle a su brandir pour les aveugler tous, faisant étalage d’une candeur illusoire déjà broyée depuis l’aube de sa naissance. Toutes ces lumières dont ils aspirent à s’abreuver chaque fois qu’ils la rencontrent, sans savoir qu’il s’agit d’un déliquescent poison qui les fera pourrir, à l’intérieur. Et qu’elle adorera les regarder. Croire. Imaginer … Qu’ils savent, quand ils subodorent à peine le complot qui se trame à l’intérieur. Subterfuge. Leurre. Écœurant leurre devenu morceau d’une essence fragmentaire dont elle nie parfois toutes les nuances. James l’a vue. Il est trop tard. Il sait. Il sait ce que cela fait, d’être quelqu’un d’autre. De se haïr tant que l’on finit par rêver projeter cette haine sur tous les autres. Que tout a un goût de cendres, et de pas assez. Car tout n’est que mensonge et irréalité. Mais pas ce soir, non, pas ce soir. La peur gronde dans son ventre, fait vriller ses sens. L’être décharné se retourne, déchire le linceul derrière lequel il se cache depuis tant d’années. Triomphante laideur, glissant sur sa peau nue, nimbant ses prunelles devenues noires. Noires comme de l’encre, dont elle rêve le tatouer. Elle le hait, d’avoir su la voir, de savoir la regarder. De l’épier avec une fascination qui brave la folie sans se révulser. De la reconnaître tout au contraire, comme une digne égale de ce qu’il renferme. Et elle se hait davantage : d’être incapable de se détourner de l’image qu’il renvoie. De ne pas céder aux élans de fuite qui émettent un son strident au fond de son oreille. Acouphène insupportable. Douleur ignoble, qui la relie à lui. Qu’elle veut pourtant. Si fort. De tout son être. Elle le veut tant que cela fait plus mal encore.  Comme les condamnés à mort qui se raccrochent désespérément à l’espoir d’une vie. Même courte. Même absconse. Une vie où ils seraient affranchis, de la peur, de la douleur, de ce qu’ils ont commis. Alors elle reste là. Elle cherche à excaver tout ce qu’il renferme, au plus profond de lui. Tout prendre, sans commune mesure, puisque c’est ce qu’il veut, et que c’est le prix qu’il doit payer s’il souhaite étancher toutes les avidités qu’il projette sur son corps. La laisser se frayer un chemin jusqu’à l’horreur, la débusquer, la ressentir. Tout prendre, tout déchirer. Tout … Tout, jusqu’à s’en écœurer.  Rester là, avec lui … avec toi. S’abreuver de chaque souffle qui le compose, boire sur ses lèvres les serments indicibles, détourer les marques de la haine pour déverser en lui tout ce qu’elle encage, devenir le réceptacle infini de tout ce qu’il saura lui donner, en partage. Le plus beau, le plus laid. La beauté illusoire de leurs frivolités mensongères, des caresses fragiles qui croient se transcender dans la douceur, des espiègleries furibondes qui leur donne l’impression de subsister. La laideur sublimée de leurs noirceurs qui se rencontrent, se fracassent l’une contre l’autre pour créer quelque chose d’autre. Un monstre hybride. Le monstre de la fable qu’ils sauront se raconter. Onirisme répugnant pour tous les autres, homérique pour eux. Elle le veut. Elle a mal. Elle se tait. Son mutisme trahit toutes les émotions qui la parcourent, et dont elle est incapable de repousser la salve. Car c’est ce qu’elle est. Ce qu’elle a toujours été. Un être qui ressent, trop, beaucoup trop, jusqu’à la folie. Elle est incapable de nier, de mentir. Parce qu’il la voit. Qu’il la regarde. Qu’il n’y a plus rien à cacher. Qu'il sait.


Son corps le rejoint dans la brusquerie d’une étreinte. Les repères se distillent dans l’obscurité. Continuation du moi, prolongement du toi. Elle le retrouve, elle le rencontre. Le claquement de ses chaussures sur le sol est la marque d’une invitation forcée. L’acculer devient une évidence, laisser l’avidité de ses mains s’arroger les contours de sa silhouette une nécessité. Les lignes de son visage se morcellent dans la pénombre, se révèlent au gré de lueurs vacillantes qui cisèlent la pièce à intervalles irréguliers. Ses yeux s’aveuglent, s’habituent peu à peu aux noirceurs.  Lorsqu’elle le distingue, l’image qu’il renvoie la bouleverse jusqu’à faire tressauter son âme. Les accents d’une folie intrinsèque, suppurante. Là, partout. Et la peur. Une peur terrible, digne de celle qu’elle abrite. Les deux ensembles, main dans la main, nés l’un de l’autre, l'un pour l'autre. Ses doigts fouaillent pour excaver la peau, imposer la morsure des ongles sur l’albâtre de l’épiderme. Une menace sur sa jugulaire, l’étreinte de sa folie qui l’enveloppe pour mieux l’enfermer avec lui. Et l’y noyer … l’y noyer. Pendant de lourdes secondes, Eleah surnage en elle, naviguant dans les eaux troubles qui le composent. Mais elle n’a pas peur. A aucun moment. Bien au contraire, elle rêve d’entrevoir jusqu’à l’essence, de trouver le cœur pour y apposer sa brûlure. Ses pupilles se dilatent dans l’obscurité, incarnent les mêmes abysses que lorsque la drogue pulsait dans ses veines. Elle est éveillée pourtant cette fois-ci. L’ivresse, sans artifice. Crue et sans fard. Avec la lenteur des tortionnaires, ses phalanges se déploient le long de sa mâchoire, s’étendent le long de sa joue creuse dans une caresse souffreteuse. Son souffle s’arroge le droit de suivre les mêmes lignes, de l’autre côté de son visage. Il détoure tous les accents pernicieux de la folie, se fascine, se libère enfin dans l’indistinction d’un murmure qui sonne comme un râle. Tu es là. Tu es là … Je te vois. Monstre de chair, de sang et de larmes. Tu es comme moi n’est-ce pas ? Oui … Tu es comme moi. Ses lèvres viennent courir sur sa pommette, pourchassent les élans mortifères jusqu’à la courbure de la nuque, mordent enfin, pour les tourmenter dans une douleur obsédante. Elle ne fuit pas, elle ne fuit plus. Tout au contraire, son corps l’accule plus encore contre le mur. Cherche à se graver, là, quelque part. A se retenir à lui, en lui. A cette déliquescente folie qui lui apparaît sublime, car familière. Si familière. Pour la première fois. Depuis toujours, peut-être. Le crissement de l’étoffe sous ses doigts marque les accents de tous les élans qu’elle claquemure. Avidité brutale, devenue irrépressible. Aliénée, par tout ce qu’il a su invoquer.


Les gestes deviennent confus, empressés. Un râle animal lui échappe en sentant les agrafes de sa robe céder sous ses assauts. Libération du toi, du moi. Du nous ensemble. C’est ainsi qu’elle le ressent, son cœur se gonfle dans sa poitrine de toutes les envies terrassantes qu’elle s’oblige d’habitude à réfréner jusqu’à éprouver le goût amer d’une frustration ignoble. Tout prendre. Tout ce qu’il saura donner. La violence de son étreinte se modèle contre sa peau sans l’épargner. Ses lèvres s’enflamment, deviennent plus acharnées chaque fois qu’elles sentent la pulpe de sa peau se réveiller, vibrer à l’unisson de la sienne. Ensemble. Brutalité indécente. Brutalité délicieuse. Sans limites, si ce n’est celles qu’ils sont capables d’imposer. Mais ils n’en ont aucune.  A chaque riposte sur sa chair, un souffle guttural filtre entre ses lèvres, convoque tous les élans farouches, déjà prêts à rendre toutes les douleurs apposées. Recevoir. Donner. Les limites se froissent pour ne laisser qu’un tout abscons. Cela fait mal, si mal. Mais ce n’est pas assez. Ça ne l’est jamais. Sauf lorsque ses ongles marquent sa peau, que ses doigts navrent la sienne. Qu’elle le ressent, jusque dans les tréfonds anéantis de ses chairs anesthésiées par l’horreur. Réveillée … réveillée. Contre lui. Sous ses mains qui meurtrissent la candeur inexistante, dévoyée, déviante. Ses ongles déchirent, se frayent un chemin jusqu’à le débusquer, les caresses patientes et méthodiques balancées dans l’opprobre pour laisser la place aux avidités indécentes de sa nature, imposant leurs désirs, prêtes à recevoir tous les siens, en partage, jusqu’à l’outrage. Le sang pulse à ses tempes, à l’étourdir, à l’essouffler, à l’abrutir. Elle aspire à tant de flammes, projetées sur lui, qu’elle ne sait plus où donner de la tête. C’est un délice. C’est une torture. Et de ce qu’elle éprouve, Eleah ne sait rien retenir. Chaque gémissement plaintif qu’il lui arrache est d’une vérité absolue, crue, décharnée de toutes les parures qui enjolivent et rendent faux les désirs que l’on cherche à partager. Funambule sur le fil tendu de leurs sensualités transcendées par les sévices qu’ils s’infligent, il lui semble pouvoir chavirer à tout instant. D’un côté, ou de l’autre. Se fracasser sur les récifs suintant de ce qu’ils n’auront pas su être. Elle tient pourtant, sur le fil. Elle tient avec toute la force qu’elle est capable de déployer, se raccrochant à lui avec une virulence plus que fiévreuse. Ahurie, quasiment folle lorsqu’il l’accule contre le mur à son tour, qu’il n’y a plus d’échappatoire.

Dans les tortueux méandres de sa mémoire elle se perd. Elle divague. Il est là, partout. Figure marchant en filigrane, ombre dérangeante amarrée à tous les sillages qu’elle saurait tracer. Né de la violence, transcendé par elle. Il y a le bruit de la boîte crânienne que l’on fracasse contre l’émail immaculé qui se répercute dans sa tête, à l’unisson de son dos qui rencontre le mur. Puis la douceur d’un timbre. Appris par cœur. Qu’elle pourrait reconnaître entre tous, même dans un indistinct murmure. Les tremblements d’une main rugueuse sur sa peau nue. Les repères se brouillent tout autour. Elle n’est plus vraiment là pendant une longue seconde, perdue dans cet ailleurs qui composa l’essence du monstre rachitique qui crève, à l’intérieur. Ce n’est pas lui. Ce n’est plus lui. Il n’est pas là, n’est-ce pas ? Ses yeux croient se rouvrir dans l’obscurité et ne rien distinguer. Rien à part le noir. Le noir et le vide qui rugit à l’intérieur, et lui donne envie de vomir. Elle a peur. Si peur. Une peur terrassante. C’est un cauchemar. La sensation se déploie dans tout son corps comme une vague déferlante. Elle aussi, elle est incapable de la retenir, de feindre qu’elle n’existe pas. Il a voulu tout prendre, tout voir. Alors elle lui a tout donné, sans même s’en rendre compte. Ses paupières alourdies par la haine et la terreur balbutient, se rouvrent enfin avec lenteur pour rejoindre la réalité qui les compose. Rencontre. Rencontre à nouveau. Du toi. Du moi. Il lui semble le revoir pour la première fois, le reconnaître, le savoir. C’est toi, juste là. C’est toi n’est-ce pas ? Ce n’est pas lui … Non, il n’est pas là. Dans ses prunelles, elle reconnaît l’indistinction d’un trouble. Comme si en partant dans son ailleurs, elle avait laissé une brèche entrouverte pour le laisser s’enfuir à son tour. Pas longtemps. Juste assez pour semer le doute. Je suis là. Je suis là, avec toi. a-t-elle envie de répéter, sans en être capable. Tout donner, tout prendre. Elle ne regrette rien, car c’est la cruelle vérité de ce qu’elle est. Et qu’il a vu désormais, qu’il sait jusque dans sa chair, qu’elle subodore aussi dans la sienne. L’étreinte qu’il modèle contre sa silhouette rend les contours du cauchemar indistincts … Jusqu’à le chasser peu à peu. Jusqu’à ce qu’il n’y ait plus rien, à part eux.

Un soupire indistinct lui échappe. L’expression d’une volonté sans détours, sans leurre. Elle ne veut pas de crainte ou de répulsion entre eux. Elle le veut, dans la complexité tortueuse de tout ce qui le compose. Sans tous les artifices qui navrent l’être plus qu’ils ne le transcendent. Un tremblement la saisit de part en part. Le dernier, alors que ses lèvres se modèlent contre les siennes dans une douceur appuyée qui jure avec toutes les violences qu’elle a su projeter contre lui, et qu’elle continue de quémander sans honte. Il ne tremble pas. Il ne tremble plus. Le souvenir s’évade, déconstruit, fracassé par l’élan de son corps qui la plaque contre le mur. Ses doigts se plantent en écho dans la peau fine de l’arrière de sa nuque, les muscles de son dos geignent lorsqu’ils rencontrent la rugosité du mur. Elle le regarde, elle ne peut plus s’en détacher. Te trouver, te rejoindre. Là, à l’orée de la douleur, dans le sursaut d’un plaisir indistinct à l’idée d’être soi, juste soi. Parce que tu ne trembles pas … Que tu n’as pas peur de moi. Et elle n’a pas peur de lui non plus, ni de tout ce qu’il projette lorsqu’il la rejoint, lorsqu’il prend possession de son corps, et que ce dernier se contracte dans un sursaut de douleur. De la complainte à la férocité, la cuisse qu’il malmène se resserre autour de sa hanche, l’encercle, l’emprisonne, le retient. L’échappatoire rendue impossible. La retraite improbable, immonde, maintenant qu’ils se rencontrent, qu’ils se voient, qu’ils se sentent. Toute sa peau vibre à l’unisson de la sienne, rend indistincts les contours de la décence. La pulpe de ses doigts se raccroche aux contours acérés de ses omoplates, se retiennent, griffent, cherchent à le libérer de toutes les parures illusoires. L’étau de ses cuisses se resserre, à lui faire mal, à l’étouffer, à brouiller plus encore les contours tandis qu’elle consent à tout recevoir, chaque gémissement échappé de ses lèvres entrouvertes oscillant entre douleur, plaisir et déraison. Tout donner. Tout prendre. Ses yeux fichés dans les siens, ouverts sur toutes les images qu’il saurait renvoyer. Le plus beau. Le plus laid. La douleur qui se peint sur ses traits, au creux de ses reins. La même que la sienne, dans laquelle sursautent d’autres intensités, qu’elle vient boire, boire encore, à l’orée de ses lèvres qu’elle se refuse encore de goûter pour mieux le regarder. La conscience de le vouloir se mire dans l’obscurité de ses prunelles. C’est inconcevable. C’est insensé. Elle ne cache rien, divulgue tout. Jusqu’aux convoitises brutales qu’elle découvre pour la première fois, dont il est le réceptacle. En premier.  Son autre cuisse rejoint la première, l’enserre à son tour, donne une autre dimension à la douleur éprouvée lorsque tout son corps se surélève, en équilibre, et que ses bras l’encerclent avec force pour mieux le retenir. Indistinction. Elle sent la peau nue de son dos crier un peu plus à chaque coup de rein, lorsqu’elle frotte  le mur. Elle ressent tout, jusque dans les tréfonds de son corps. Ou du sien. L’un ou l’autre, elle ne sait pas, elle ne sait plus. Où s’arrête l’un, où commence l’autre. Elle se perd, contre lui, en lui, en elle. Rencontre cruelle. L’un à l’autre, l’un dans l’autre, jusqu’à se perdre ensemble, surnager dans la douleur qui consiste à être. Être … Juste cela. Ses bras menus l’encerclent avec la force des exaltés devenus fous, ses lèvres se perdent dans le creux de son cou, aspirent à le marquer, goûtent les fragrances de sa peau qui s’insurge lorsqu’elle est contrainte par ses canines insatiables. Le blanc, devenu rougeâtre. Et son prénom, qu’elle articule de manière indistincte, dans des soupirs devenus rauques, pour mieux le convoquer, pour le savoir. Sa paume, désormais contre sa joue, apprenant par cœur son image, sa tempe posée contre la sienne pour y mesurer tous les battements. Et te savoir … te savoir. Jusqu’à ne plus comprendre, jusqu’à oublier, ce qui est de toi, ce qui est de moi … de nous ensemble.


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James M. Wilde
James M. Wilde
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() message posté Dim 15 Juil 2018 - 16:49 par James M. Wilde


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It's all been done before
I don't have to talk pretty
For them no more
I can talk what I want, how I wanna »

Eleah
& James




Et tourne et tourne l'absurdité du monde. À l'extérieur de soi, les hurlements d'une pâleur immonde. Rien qui ne vaille les cris d'un désespoir honni que l'on excave des chairs qui tremblent à trop vouloir se confondre. Et tourne et tourne l'absurdité des hommes. À la pâleur de sa peau, l'irréel des désillusions trop humaines, les sensations repoussées pour n'être pas assez, des sentiments banalisés pour avoir été trop galvaudés. Rien qui n'atteigne la sensation qui court dans les souffles qui s'affrontent. Et tourne et tourne la valse des mendiants. Ceux qui se prostituent pour un gramme de plaisir dérobé, impiété qui cisaille les muscles, à coup d'alcool, à coup de came, la ligne toujours droite pour finir dans l'ornière de ces déshérités de l'univers. Rien qui ne soit à l'aune du murmure extatique que je couche dans le creux de son cou, respiration qui s'allonge à chaque coup de reins. Et tourne et tourne encore. Encore. Les images dévoilées dans ma tête, le passé qui implose pour accoucher d'un présent aussi dégueulasse que délectable. Entre ses bras, le profane a des atours de sacré. Mais ce que je suis en train de louer dans le creux de son corps n'a rien à voir avec la foi des foules ou avec celle qui anime la facilité d'une vie déjà tracée. Il y a, affronté à sa peau, glissé dans ses cheveux que j'empoigne, poignardé contre le mur où elle se fracasse, la vérité de deux natures réconciliées. Qui communient dans l'infamie pour mieux persister, se relever, magnifier la violence entre nos doigts serrés. À un moment je cherche l'une de ses mains qui malmène mes épaules et je serre. J'entrelace la force pour mieux la confondre à la douleur, la moiteur de nos transpirations qui se mélangent à la dureté du mur, je tisse l'opprobre pour entériner l'absence de mon serment. Je n'ai rien dit. Rien promis. Rien clamé qui ne soit la cruauté d'un désir, la convoitise implacable pour la verser dans son avidité. Deux monstres qui s'entre dévorent, s'unissent un instant pour éviter de se déchirer. Il y a des serments éculés, ceux des gens qui tournent encore. Mais le cercle brisé entame mes poignets. C'est bien fini. C'est bien fini. C'est terminé. Déparé de mes instincts de fuite, je sais qu'il ne demeure que ce cri qu'elle a un jour perçu, et qui la dépare à son tour désormais. L'absolu de sa bestialité m'aveugle et m'accable. Me transcende et me morcèle. L'union d'une disparition que l'on enfouit le plus profondément possible pour mieux en ressentir les familiarités. L'odeur âcre d'un instant presque désuet, les tendons et les muscles qui saillent de la violence enfin autorisée, consacrée dans deux corps qui s'appellent encore même s'ils sont déjà enchaînés. C'est une danse que nous connaissons par cœur pour en avoir entrevu quelques pas il y a des années, qui se destine à un futur incertain désormais qu'il étouffe entre nos doigts serrés. Ses jointures contre les miennes, ça fait si mal de la retenir, de la presser, d'évader des gémissements rauques qui font échos au plaisir qu'elle dérobe tout contre moi. Est-ce que tu es là ? Est-ce que tu es toujours là ? Dans la frénésie et l'horreur, dans l'hérésie et la splendeur ? Dans le sublime de nos propos dorénavant suffisamment échus qu'ils ne savent plus se former ? Est-ce que tu es là ? Oui... Tu es là. Là sous les doigts, là dans le cœur, là dans le souffle qui défaille. Là. Partout. Tout autour de moi. À te graver dans les contours pour mieux les magnifier. Le personnage déploie ses ailes pour savoir les rogner, il n'y aura pas d'envol futil sur des exclamations creuses. Pas maintenant. Pas ce soir. Plus jamais. Car elle sait, elle le sait à voir la peine qui défile au milieu du désir, douleur qui creuse son sillage jusqu'à son ventre pour s'y enterrer. La bouche scellée sur la sienne pour mieux clamer la douceur abandonnée dans un mouvement plus brutal que les autres, mon cœur manque un battement parce que son épaule entrechoque le mur, mes yeux dévalent sa gorge comprimée, mon index joue un instant avec sa peau perlée de sueur, puis mes doigts se referment sur son épaule brimée, je ne retiens plus la cadence et la reçoit en même temps qu'elle, ma main paye son tribut pour savoir caresser l'euphorie qui ne cesse de croître dans le creux de mes reins. Et chaque fois que je la regarde, c'est l'abîme que nous avons ouvert ensemble qui me rend ses obligeances. Dans ses yeux, les méandres de ce que je devine sans le savoir vraiment, que je sais sans le ressentir entièrement, que je ressens enfin sans pouvoir l'abolir. Sans en concevoir un seul instant l'envie tant les paysages de sa folie s'accordent parfaitement aux miens, dessinent des contours indistincts et infinis. Hypnotiques. Les yeux grands ouverts. Sur elle et sur moi, sur ce que nous sommes. Ce que nous devions être. Ce que nous n'avons jamais su devenir. Je serre plus encore son épaule pour y laisser l'empreinte de tout ce que nous avons manqué, pour rattraper l'absolu d'une étreinte qui n'aurait jamais dû céder à la nuit de nos souvenirs. Les miens deviennent nébuleux, les anciens crimes balayés par tous ceux que j'aimerais commettre à ses côtés, qu'elle peut lire gravés dans mes iris qui la toisent. Le combat se poursuit, il n'aurait jamais dû cesser.

Dès qu'elle frôle ma nuque de la pulpe de ses doigts, je me remémore le joug que j'ai su imposer, l'échine courbée, le hurlement mis à nu et enfermé dans un mutisme assassin, chaque fois qu'elle fiche ses ongles dans ma peau ce sont les anneaux des chaînes qui se distendent, qui finissent pas choir, irrémédiablement tomber. Cliquetis infernal qui crisse dans mes pensées diffuses, pleines d'elle, entièrement corrompues pour être autant convoitées. Ça n'a jamais ressemblé à cela. Ça n'a jamais été ainsi. Me regarder sans vouloir me déformer. Me trouver sans vouloir me briser. Me rencontrer pour mieux m'apprendre. Me prouver que l'ancrage se trouve là, entre l'infini de tous les espaces et les harmonies encore non consacrées. Je lui offre les territoires vierges. Et les ombres ravagées. Je lui soumets les infamies et les précipite sur elle, les yeux grands ouverts pour continuer de la regarder. Pour continuer de la savoir, dedans, dehors. Entre. Entre nous, les idéaux qui s'assaillent, entre nous, la déshérence d'un moi oublié pour avoir été jugé si déviant qu'il fallait l'enfermer, entre nous. Entre toi. Entre en moi. Ça n'a jamais été ainsi car ça ne devait pas être. Ça ne devait pas renaître, se coucher sur l'épiderme, ramper la convoitise, arracher le mépris pour y découvrir les envies que l'on ne peut concevoir sans trembler. Toutes versées en elle à chaque assaut, à chaque fois que nos corps convolent pour mieux convoiter l'infamie qui se relie et se tisse. Se prolonge. Prolonge la folie pour ne jamais consentir à l'oubli. Je ne veux pas oublier. Je ne veux plus oublier. Si tu savais tout ce que j'ai abandonné au déni pour cette survie sans saveur. Si tu savais tout ce que j'ai renié pour mieux correspondre à ces modèles où il fallait entrer. Si tu savais toutes les nuits à attendre un animal à ta mesure pour mieux assumer la monstruosité. Et dans le noir. Dans le noir. Le fol espoir d'un jour savoir y arriver. L'idée même se fiche sous ma peau. Sous la sienne. Je ne sais plus très bien ce qui est d'elle ou de moi. De nous. Natures devenues indistinctes pour être trop proches. Fusionnées. L'une dans l'autre. Ce qui est bien, ce qui est mal, balancé à l'incertitude d'un seul élan qui ne semble plus pouvoir cesser. Bientôt enfermé dans le cauchemar qui la contraint, je le vis au tourment d'une seconde trop longue, bientôt infidèle et impur, personnage et monstre personnifié. Assumant la honte, l'opprobre, la peur, j'érode les derniers sursauts de mes retenues qui retombent toutes autour de nous sur le béton armé. La musique s'exsangue dans le tempo de mon sang, lourd, bien plus lourd. Et je détiens, et je dérobe, et je déchaîne. Le monstre au sourire inhumain. La fièvre acide et le doucereux plaisir qui se construisent en elle. La haine et la peur bientôt gommées de ses lèvres dans la brutalité des miennes qui reviennent la trouver. Et étouffer. Étouffer ensemble. Respirer l'horreur et s'y consumer. En trouver les plus délectables beautés. Mon baiser se dompte à la violence de nos corps, le point d'ancrage de nos doutes invoqué sur sa langue, la douceur avide pour mieux la dévoyer. Ensemble. L'un avec l'autre. Ces murmures aux atours d'aveux qu'elle m'arrache et que je lui donne de mon plein gré, il me semble les modeler à ses terreurs pour mieux me les approprier et les savoir par cœur. Je la connais. Je la connais. Je te connais à présent. Tu pourras me mentir mais jamais me renier. Tu pourras me fuir mais jamais m'oublier. Je ne pourrai pas t'effacer. Je ne veux pas t'effacer. Le cauchemar s'évade, nous préférons tisser le nôtre aux ténèbres de cette nuit qui se prolonge. Le souffle brûle, mes lèvres cherchent l'intimité presque fébrile qu'elle offre soudain, je la recueille pour mieux me laisser y sombrer. Non je n'ai pas peur de toi. Je n'aurai jamais peur de toi. Encerclé, enfermé, emprisonné en toi, j'y resterai. J'y resterai. Le mur geint des assauts répétés, je l'y maintiens, je l'y retiens, jusqu'à abandonner les certitudes à la pâleur de sa peau nacrée par le miroir de la nuit qui nous observe. Mes terreurs refluent et se voient bientôt doublées par la frénésie de la nature qu'elle manque de terrasser. Je ne combats plus, je sais que je n'ai rien à gagner. Alors tourne et tourne encore la valse d'un monde rendu dingue. Tourne et tourne encore les harmonies trop simples pour nous porter. Tourne et tourne encore les corps enchâssés qui ne peuvent que se consumer. Mes doigts ne tremblent plus lorsqu'ils frôlent ses traits pour dessiner les contours du prédateur qui aura su déjouer mes folies destructrices. Tourne et tourne encore la vanité dans ma petite tête qui s'est crue un jour si maligne à instaurer cette prison de chair pour mieux contenir ce qui ne saurait plus se taire désormais. Tourne et tourne encore... Les serments échus, déçus, les violences déchues, et les colères fantoches. La violence avec toi n'a jamais été aussi belle. Je crois que je pourrais tout assumer contre ta peau. Tout assumer contre toi. Alors retiens moi. Oui retiens moi encore. Elle touche mon visage à son tour. Furète sur le masque absent, suit les contours blessés. Et tourne et tourne la déraison de nos natures. La morsure du passé couchée en toi, la douleur qui se déchaîne pour devenir plaisir. Elle frôle, caresse. Délaisse une morsure, goûte le monstre pour se l'approprier. Les murmures qui deviennent des cris. La musique ensevelie dans la chair. La folie écartelée sous mes doigts qui suivent les stigmates d'une existence et rêvent d'en dessiner d'autres. Les rêves reparaissent à l'orée d'une condamnation, la haine disparaît, et la liberté m'assaille tout entier. C'est ce que je suis venu chercher. C'est ce que je suis venu lui montrer. Il n'y a plus que le cri, ce cri qu'elle seule peut prolonger. Le cri de tout ce qui nous tient éveillé, le pire qui nous constitue, et tout le reste que nous savons encore être, tout ce que nous souhaitons protéger. Il n'y a plus que ce cri. Il n'y a plus que cela. Tout. Rien. Il n'y a plus que toi. Je t'apprendrai. Je t'apprendrai à assumer ce que tu es. Jamais je ne silencerai ton animalité. Alors donne-la moi. Donne-la moi. Car il n'y a plus que toi. Plus que toi pour percevoir la mienne et la détenir enfin.
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