"Fermeture" de London Calling
Après cinq années sur la toile, London Calling ferme ses portes. Toutes les infos par ici FB - I'd learned that some things are best kept secret ft Ginny 2979874845 FB - I'd learned that some things are best kept secret ft Ginny 1973890357
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() message posté Sam 31 Jan 2015 - 12:47 par Invité
“ People sleep peaceably in their beds at night only because rough men stand ready to do violence on their behalf.”     Il y’a avait une part d’ombre que je n'osais pas encore embraser de peur de détruire mes valeurs, ou d’apprécier le monde obscur ou mon père avait déjà élu domicile . La douleur valait mieux que la colère. La douleur était ma punition divine pour avoir survécu. Je roulai des yeux dans l’immensité de la pièce ; quelques faibles lueurs traversaient les rideaux opaques du salon afin d’éclairer mes blessures suintantes, et même si le printemps s’épanouissait sur tout Cardiff, la beauté de la nature semblait immobile dans cette maison. Le noir n’avait qu’une seule nuance, une seule finalité, et pourtant je parvenais à distinguer les ombrages de ses teintes sur le parquet craquelé et meubles usés. J’étais une âme profonde, captive d’un terrible geôlier. Il s’avança à nouveau vers moi, le visage déformé par le désarroi et je pus apercevoir mon reflet se confondre dans son regard de braises. George Fitzgerald était à la fois mon bourreau et sauveur. Il était cet homme que je chérissais malgré tous les supplices qu’il m’infligeait. Je me cramponnai aux pans de mes vêtements en succombant avec mutisme à ses coups de pieds. Je crispai la mâchoire en appréciant mon souffle parfois apaisant, parfois brûlant. Le gout amer du sang s’engouffrait dans ma gorge serrée et même si l’envie de pleurer jaillissait du plus profond de ma poitrine je refusais de lui offrir la satisfaction de m’avoir brisé. J’étais une épave, mais je me redresserais de ces ténèbres, et mes ailes en éther ne finiraient jamais de lancer les flammes de ma victoire. Je plaquai mes mains contre le sol avant de toucher ses chaussures boueuses. Il continuait à me frapper à la vie, à la mort. L’allégresse de l’amour s’était fanée et je sentais le péché originel envahir mon esprit. Il ne prononçait pas un seul mot mais ses grognements indistincts raisonnaient comme des tambours de guerre à mes oreilles. Ainsi je comprenais que son deuil n’était jamais achevé. Ainsi, je réalisais que l’affection qu’il me portait parfois ne se suffisait pas à elle-même. Ses élans de lucidité étaient fugaces, ce n’était que le prélude d’une longue et éprouvante chute. Je clignai des yeux en fermant mes doigts au maximum, avant d’accueillir un nouveau coup. Les couleurs s’embrumaient devant moi comme des éclairs électriques avant de s’évanouir dans le néant – Je perdais conscience de toutes mes notions ; le temps, l’espace, la famille.

Lorsque je finis par sortir de ma torpeur, j’étais seul et étourdi. Mes muscles se contractaient involontairement avant de laisser place à la douleur lancinante. Mon clavicule entrouverte ne guérissait pas. Mon souffle aérien avait perdu toute fluidité, et je ne tardai mais à tousser quelques gouttes de sang. J’émis une plainte discrète en me relevant avec difficulté. Mon genou suivait à peine les mouvements disharmonieux de ma jambe, mais la situation avait été pire un million de fois – je ne me plaignais pas. Je ne le pouvais pas. Je trainai mes souliers le long du couloir avant de retrouver mon père, effondré devant la cheminée – une mignonette de whisky dans la main. Il était si pathétique ; et pourtant je ne pouvais pas me résigner à le détester de tout mon cœur. Peut-être que j’étais pathétique moi aussi. C’était dans nos gênes.

Je m’évadais en titubant dans les rues animées de la ville – une fête nationale ? Pourquoi tant de festivités ? Etais-ce une façon qu’avait trouvé le destin de narguer mes pensées ? De toutes les richesses de la terre, aucune ne pouvait me sortir de ma prison. Ce n’était pas un jeu, mais un très mauvais concours de circonstances. Je n’étais pas un garçon défaitiste d’habitude, je n’abandonnais pas ma vie ou mes quêtes extravagantes – mais parfois, mon corps ne résistait pas. Je serrai ma prise sur mes côtés en me mordant la lèvre inférieure. Mon bras droit tombait ballant le long de mon profil ; et je soupçonnais mon épaule de s’être déliée à nouveau. Je fis une grimace en tentant un mouvement circulatoire, en vain. Bizarrement, je fis le tour du lycée – observant le panier de basket et le vaste terrain de Rugby. L’équipe s’entrainait encore mais je ne faisais pas parti de ce monde, ni du mien d’ailleurs. Je soupirai en prenant la direction de la plage, avant de me souvenir d’Eugenia – Nous n’étions pas encore très proches, mais le semblant d’amitié et d’attirance que je ressentais pour elle valait plus cher à mes yeux que tout le reste. Elle était mon ancre et la seule à essayer de me comprendre. Je tentai une petite course afin de me presser, mais je ne parvins qu’à rendre ma respiration plus laborieuse. Après plusieurs pauses à intermittences, quelques gémissements, et une once de positivité, je finis par arriver devant sa porte.

Elle apparut comme par enchantement,  comme si elle n’avait fait que m’attendre toute la journée. Ses longs cheveux bruns encadraient son visage fin, et je réalisai qu’elle était encore plus belle qu’avec son chignon mal coiffé. Ses grosses lunettes ornaient son regard olive et lui donnaient des airs à la fois négligés et intelligents. Je fis la moue en me penchant vers  le mur.« Salut toi. » Soufflai-je en serrant la mâchoire. « Si je fais tes devoirs, tu as le temps de traîner ? » Proposai-je en souriant, feignant l'insouciance - feignant la normalité.
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() message posté Sam 31 Jan 2015 - 23:55 par Invité
you have to love. you have to feel. it is the reason you are here on earth. you are here to risk your heart. you are here to be swallowed up. and when it happens that you are broken, or betrayed, or left, or hurt, or death brushes near, tell yourself you tasted as many as you could. ✻✻✻ Sale gamine trop curieuse. Sale gamine enfermée, enfermée entre ses quatre murs, enfermée dans son monde et loin des autres. Mes yeux se perdirent dans le ciel bleu et accueillant que j’entrapercevais depuis ma fenêtre, avant que je ne finisse par pousser un profond soupir. Ma mère était partie avec ma sœur célébrer dans les rues de Cardiff un évènement que je ne comprenais même pas. J’avais gentiment décliné leur proposition de me joindre à elles lorsqu’elles avaient mis leurs chaussures et passer leurs vestes sur leurs épaules ; j’avais bien vu dans le regard de ma sœur que je n’étais pas réellement la bienvenue. J’avais bien vu dans le regard de ma sœur qu’elle préférait que je reste loin, loin d’elle, loin de son image, loin de l’empire qu’elle se construisait.
J’étais la sœur jumelle ratée, après tout. Un seul battement de cils de sa part m’avait rappelé que je n’avais absolument aucune raison d’oser prétendre le contraire.
J’hantais la demeure de ma mère, depuis. Je me perdais dans les différentes pièces, allant et venant, incapable de trouver une occupation capable de satisfaire mon esprit boudeur. Une moue désabusée avait pris possession de mes traits ; comme à chaque fois que la solitude se faisait trop pesante dans mon cœur, j’en venais à souffrir de tous ces instants où j’avais été rejetée par Scarlet. Je resongeai à chacun de ces jours passés, chacun de ses gestes à elle. Mon père me manquait, me manquait terriblement, sans que je ne puisse réfréner l’agitation de mon esprit. Je déglutis avec difficulté avant de me lever de ma chaise de bureau et me laisser tomber sur mon lit, fixant le plafond avec obstination.
J’étais seule. Si seule. Parfois, je me disais que cela ne faisait rien, qu’il valait mieux que je vive ainsi. Mais, souvent, je me rappelais que je ne faisais que me mentir. Souvent, la lucidité me ramenait sur Terre et me prouvait que je m’aveuglais simplement dans l’espoir d’être plus heureuse. La réalité était que je ne l’étais pas. Du moins, pas vraiment. J’avais toutes les excuses du monde pour être satisfaite mais j’en venais toujours à me souvenir qu’il aurait sans doute été préférable que je change des morceaux entiers de ma vie.
Je me cachais derrière de grands sourires et un entrain à toute épreuve, d’une certaine manière. Je faisais comme si les moqueries et le harcèlement moral dont j’étais la victime ne me dérangeaient pas. Je répliquai, même, parfois, avant de me rappeler que j’étais une personne de l’ombre. Avant de me rappeler qu’il valait sans doute mieux pour moi de les laisser faire. C’était ma façon de prouver à ma sœur que je l’aimais. Je la laissais bâtir son empire. Je la laissais me rabaisser. Je la laissais dominer, simplement parce qu’elle avait besoin de tout cela pour avoir la sensation d’être une personne d’importance. Pour prendre le dessus comme elle le souhaitais.
C’était idiot de ma part. J’en avais conscience. Cependant, je n’étais pas encore suffisamment courageuse pour aller à contre-courant. Pour m’affirmer. Pour clamer que, moi aussi, j’étais quelqu’un qui valait la peine d’être connu.
Peut-être n’était-ce pas le cas, au fond.
Peut-être n’étais-je née que pour être oubliée.
Quelqu’un vint frapper à la porte de la demeure de ma mère ; je fronçai les sourcils, revenant sur terre, me rendant compte que j’étais toujours là, sur mon lit, perdue dans mes pensées en fixant le plafond. Je me redressai doucement, jetant un vague coup d’œil dans le miroir de ma chambre pour vérifier mon apparence ; je me rendis bien vite compte que rien n’était récupérable et, remettant mes lunettes qui avaient légèrement glissé sur mon nez, je descendis au rez-de-chaussée afin d’ouvrir la porte.
Et le visage qui s’offrit à moi fut celui de Julian Fitzgerald. « Salut toi. » me lança-t-il avec entrain. Je lui adressai un sourire, priant corps et âme que mes joues ne se colorent pas de rose. Je savais que cela était sans doute peine perdue. Je ne parvenais pas réellement à contrôler les aléas de mes émotions en sa présence. « Si je fais tes devoirs, tu as le temps de traîner ? » me demanda-t-il avec détachement. C’était trop tard. Je me mis à rosir légèrement avant d’hausser les épaules avec détachement, espérant que cela compense avec la puérilité de mes réactions.
Julian Fitzgerald était arrivé dans mon existence du jour au lendemain. Je ne savais pas réellement si je m’étais imposé à lui ou s’il s’était imposé à moi ; la succession d’évènements voulait simplement qu’il soit la seule personne acceptant de m’adresser la parole à l’école de Cardiff. Il était âgé de plusieurs années de plus. Il était même dans un niveau supérieur ; il me paraissait à la fois mature et intelligent, intouchable et à des lieux de ma propre réalité. Je ne comprenais pas l’intérêt qu’il me portait. Je ne comprenais pas pourquoi il continuait de s’asseoir en face de moi à la cafétéria, pourquoi il venait me rendre visite de temps à autre, pourquoi il souhaitait être en ma présence quand il le désirait. Je ne savais pas, je ne savais rien, je ne comprenais pas et je ne comprenais rien. « Je n’ai pas besoin de toi pour faire mes devoirs, dans tous les cas. » lui déclarai-je avant de me redresser. Je lui désignais d’un geste de la main l’intérieur de ma maison pour qu’il rentre. « Entre. » Je refermai la porte derrière lui avant de me retourner afin de lui faire face. Je croisai mes bras sur ma poitrine. Je me sentais presque ridicule de l’accueillir en étant si négligée. Presque ridicule au point que je devais lui paraître risible. « Tu n’es pas à la fête de Cardiff ? Je pensais que c’était un truc où, genre, toute la ville y allait pour célébrer je ne sais pas trop quoi et faire semblant que les habitants forment tous ensemble une seule et même entité d’entraide et de partage. » Je me rendis compte que trop tard que mes paroles étaient sans doute trop amères ; alors, au lieu de prononcer quoi que ce soit de plus, je me tus, et l’observai. J’avais la sensation qu’il paraissait fatigué. Plus que d’ordinaire. Je ne dis rien, cependant ; je gardai mes suspicions pour moi et me refocalisai sur le reste.
Il y avait tant de choses que je savais sur lui grâce aux fichiers. Cependant, j’avais fini par comprendre qu’il  existait encore plus d’informations dont je n’avais pas encore connaissance et qu’aucun document ne détenait.
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() message posté Lun 2 Fév 2015 - 22:43 par Invité
“ People sleep peaceably in their beds at night only because rough men stand ready to do violence on their behalf.”    L’esprit lourd et malheureux, je cheminais à travers les fanfares de la ville comme une ombre fugace. La douleur ne pouvait pas me briser mais les regards indiscrets de la foule me transperçaient comme un million de lames. A chaque fois que je croisais une silhouette féminine, je rêvais en secret que ma mère était de retour afin de me noyer dans son affection débordante. Je voulais lui raconter mon enfance, son deuil, le silence, et les coups. Il suffisait simplement que je lui parle pour oublier son absence. Il suffisait qu’elle revienne et j’aurais tout pardonné. Les murs de notre demeure délabrée n’étaient certainement plus les mêmes sans elle ; nous avions vogué dans les landes d’Ecosse et les tréfonds de l’Europe, mais l’endroit avait beau changer, je la rencontrais partout et elle me manquait terriblement. Je m’emmêlais dans mes songes, et parfois dans un écart de folie, elle se matérialisait en face de moi avant de se perdre à nouveau parmi les autres. Elle finissait toujours par me quitter même lorsque je m’accrochais aux nuages de poussières qui m’entouraient, parce qu’Aîda était différente. Parce qu’elle vivait dans un autre monde. Je tremblais en chassant mes pensées.  Ma démarche n’était plus droite, je ne relevais plus le menton, et je ne déployais plus mes ailes – Je déambulais en peine avant de raser le sol à bout de forces. Les souvenirs étaient un mal incurable. Cet amour était une débâcle sans fin. Je me rappelais encore de son rire cristallin et de ses paroles mélodieuses : ‘‘Il faut être gentil Julian. Mon bébé, un jour tu seras grand et tu comprendras. Les vraies louanges sont celles qui fortifient nos vertus. Les belles paroles naissent au fond du cœur. Tu es fait d’ombre et de lumière, mais je ne vois que les éclairs bleus dans tes yeux.’’ J’accélérais à travers la brume – j’avais grandis mais je n’avais jamais compris ses réflexions. Cette quête me semblait insensée.  Il y’ avait quelquefois plus de tristesse que joie. J’étais seul face à la vengeance de mon père.

Ma rencontre avec Eugenia me semblait presque irréelle. Peut-être s’agissait-il d’une énième illusion de mon subconscient fourbe ; ou pire encore de ma meilleure amie imaginaire ! Le son de sa voix était parfois aussi lointain que mes rêves. Je peinais à accrocher son regard dans les longs couloirs menant aux salles de classes. A vrai dire, elle se permettait bien plus de discrétion que nécessaire, pourtant je la trouvais resplendissante dans sa simplicité. Ce n’était encore qu’une gamine - j’avais quelques années de plus, mais je me sentais anxieux en sa présence.  Elle clignait toujours les yeux en rajustant ses lunettes avant de m’éclairer d’un sourire ou de faire une remarque amusante.  Ses tics nerveux, ou sa façon de transfigurer le monde me subjuguait ; comment pouvait-elle supporter les moqueries sans broncher ? Comment pouvait-elle trouver la force d’aimer une sœur qui la tyrannisait ? Je fis la moue en enfonçant mes doigts dans mes côtes endoloris. La sensation de fatigue ne me quittait jamais, mais je suppose qu’à force, j’avais appris à cohabiter avec mon sort.  Je me redressai devant la porte avec nonchalance en feignant l’indolence. « Je n’ai pas besoin de toi pour faire mes devoirs, dans tous les cas. » Elle me désigna l’intérieur d’un geste de la main.  « Entre. » Je la fixai avec incertitude avant de répondre à sa requête. Je m’appliquai à faire de longues enjambées, mais l’un de mes genoux se rebellait outrageusement contre ma volonté. Je souris en titubant, l’air de rien. « Tu n’es pas à la fête de Cardiff ? Je pensais que c’était un truc où, genre, toute la ville y allait pour célébrer je ne sais pas trop quoi et faire semblant que les habitants forment tous ensemble une seule et même entité d’entraide et de partage. »  Récita-t-elle avec amertume. Je fis la moue en fronçant les sourcils.  « Je ne sais pas. » Soufflai-je en sentant un point de côté. « Je … Je peux m’assoir ? » Balbutiai-je en me laissant glisser le long de la rampe d’escalier jusqu’au sol. Un gémissement m’échappa tandis que je relâchai la pression sur mes muscles. « Tous les prétextes sont bons pour être heureux, Ginny. Je pense que les habitants de la ville ont juste besoin de se bercer d’illusions. C’est sécurisant ; puis je te parie que les vieilles mégères doivent en raconter des potins à l’heure qui l’est. » Je courbai la bouche, avant de laisser mes deux mains retomber de part et d’autre de mon torse bombé. Elle ne se rendait probablement pas compte que j’étais comme ces habitants hypocrites, comme ces êtres humains affligés, je cherchais moi aussi un prétexte pour me sentir en sécurité. Je battis des cils ; ma mère me manquait. Londres me manquait. Robin et mes amis d’enfance me manquaient. Je suffoquais dans ces lieux de perditions ; je n’étais pas ici chez moi.  Cardiff n’était qu’une prison de plus où mon bourreau me trainait avant de me faire gouter aux supplices du corps.  Je soupirai.

« Par contre moi, je savais que tu serais ici – toute seule. » Je levai les yeux vers son visage pâle. « Je savais que tu avais besoin de compagnie – tout comme j’ai besoin de parler à quelqu’un. » Je tendis la main en réprimant ma douleur, l’incitant à s’assoir à mes côtes. « Je savais aussi que tu avais fouiné dans mon dossier ; je suis intrigué. Qui penses-tu que je sois Eugenia Lancaster ? » Susurrai-je avec amusement. Mon cœur était flexible, il se modelait en fonction de mes humeurs. En cet instant précis, il prenait la forme singulière de l’espoir. J’haussai les épaules en esquissait une ébauche de sourire. Ange ou démon ?
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() message posté Mar 3 Fév 2015 - 19:51 par Invité
you have to love. you have to feel. it is the reason you are here on earth. you are here to risk your heart. you are here to be swallowed up. and when it happens that you are broken, or betrayed, or left, or hurt, or death brushes near, tell yourself you tasted as many as you could. ✻✻✻ Je cohabitais avec le reste du monde d’une manière singulière et étrange ; cela était comme si j’effleurais simplement du bout des doigts l’univers propre à l’humanité sans parvenir à complètement m’y abandonner. Sans parvenir à complètement en faire partie à mon tour. J’observai ce qu’il s’y déroulait de loin, avec une distance de sécurité qui me paraissait presque nécessaire. J’avais besoin de cette marge de manœuvre pour survivre, pour me dire que, moi aussi, j’avais des raisons d’être. Pour me dire que ma vie aussi avait un but, une finalité, un objectif. Je n’étais peut-être pas acceptée dans ce monde-là mais je le connaissais. Je n’étais peut-être pas acceptée dans cette vie mais je m’y adaptais comme je le pouvais. A ma manière.
Je n’avais pas réellement de limite, hormis celle de ma curiosité. Je n’avais pas encore compris que mes gestes étaient fondamentalement incorrects ; je n’avais pas encore appris qu’il s’agissait de pur voyeurisme, d’une perversité diverse destinée à simplement alimenter mon savoir personnel.
Je n’avais pas encore suffisamment de conscience et de raison pour m’en vouloir. M’en vouloir réellement.
Mes yeux parcoururent rapidement le visage de Julian et je me rendis bien vite compte que je serais bien incapable de soutenir son regard aussi longtemps qu’il aurait pu le faire ; au lieu de quoi, je détournai la tête en me balançant anxieusement sur mes pieds, parlant trop pour que mes paroles puissent être réellement compréhensibles. Cela était le sentiment qui m’animait toujours en sa présence. J’avais la sensation de n’être qu’une sale gamine perdue dans un univers trop grand pour elle. J’avais l’impression de n’être qu’une gosse à qui on accordait un peu d’attention par pure courtoisie, par pure morale ou par pure nécessité. Mais cela n’était pas grave. Je ne lui en tenais pas réellement rigueur ; j’avais appris à vivre sans les autres et, même si sa présence me rendait nerveuse et ne signifiait pas forcément quelque chose à ses yeux, le fait qu’il m’accorde un peu d’attention me permettait de me sentir légèrement plus sereine.
Comme si, finalement, j’avais cessé d’être invisible. Comme si, finalement, je n’étais plus un fantôme qui hantait l’école de Cardiff, mais une élève comme les autres. Mais une élève parmi tant d’autres. « Je ne sais pas. Je… Je peux m’assoir ? » me répondit-il avant de se laisser glisser le long de la rampe afin de s’asseoir sur les marches de l’escalier. Je compris en cet instant que j’avais sans doute bien trop parlé ; je fronçai les sourcils, me demandant silencieusement quelle était la raison de sa visite. Il reprit la parole bien avant que mes pensées ne parviennent à formuler une réponse concrète. « Tous les prétextes sont bons pour être heureux, Ginny. Je pense que les habitants de la ville ont juste besoin de se bercer d’illusions. C’est sécurisant ; puis je te parie que les vieilles mégères doivent en raconter des potins à l’heure qui l’est. » J’esquissai un sourire presque moqueur, laissant échapper de mes lèvres un petit rire ; je les imaginais, ces vieilles dames, critiquant les moindres faits et gestes de leur voisinage. J’en savais sans doute plus qu’elles, toutes réunies ; et, d’autres parts, je me demandais également si elles avaient conscience que j’existais et que je savais. Je savais beaucoup plus de choses qu’elles qui osaient prétendre être les yeux et les oreilles de la ville. « Par contre moi, je savais que tu serais ici – toute seule. Je savais que tu avais besoin de compagnie – tout comme j’ai besoin de parler à quelqu’un. » compléta Julian tandis que je m’étais perdue dans mon esprit. Je n’avais jamais été véritablement bavarde avec les étrangers ; la plupart du temps, je m’asseyais simplement pour les écouter parlementer. Je tentais de faire des efforts avec Julian. Mais, bien souvent, cela se révélait être un échec cuisant et regrettable, où je me ridiculisais durant toute la durée de mes brèves tirades. « Je savais aussi que tu avais fouiné dans mon dossier ; je suis intrigué. Qui penses-tu que je sois Eugenia Lancaster ? » finit-il, achevant de me ramener sur Terre. J’esquissai un vague sourire avant de fixer mes mains.
Je ne savais pas si je devais me sentir gênée ou bien flattée. Les deux, sans doute. «Tu veux réellement savoir ? » lui demandai-je avant de me racler la gorge. Je savais des choses, oui. Dans mon extrême naïveté j’estimais savoir l’essentiel. Je n’étais pas habituée avec le relationnel ; dans mon esprit, Julian avait parcouru la ville pour venir jusque chez moi afin de connaître ce que je pouvais bien savoir, et il était de convenance que je lui donne une réponse concise. En cet instant, je n’imaginais pas que j’avais d’autres choix. J'étais bien trop étrangère avec le reste du monde pour connaître les moindres nuances de ses us et coutumes. « Je pense que tu es un orphelin de mère issu d’une union qui se révélait prometteuse. Mélanger les origines a souvent d’enrichissantes répercussions ; j’imagine que ton éducation a dû se faire entre deux mondes et cela t’a permis d’appréhender une palette complète d’horizons différents. Ton père était banquier, ta mère journaliste, ce qui aurait laissé croire que vous étiez en bonne voie pour faire partie de ces classes supérieures… Jusqu’à ce que ta mère meurt. » Je n’avais absolument aucun filtre. Cela était sans doute mon pire défaut, en cet instant ; cependant, je n’avais absolument aucune notion du bien, du mal, du correct, de l’incorrect. Je disais ce que je savais. C’était ainsi que je fonctionnais. Ainsi que je réagissais. « Tu as vu le monde, tu as vécu dans différents endroits. J’imagine que cela explique en grande partie l’aura de sophistication qui flotte autour de toi… Et aussi ta grande capacité à entretenir des conversations. » J’haussai les épaules. « J’imagine que tout cela fait de toi une personne avec un grand avenir même si ta famille a pris une mauvaise voie. Tu as des mauvaises notes mais tu es intelligent… Ce qui prouve qu’il y a sans doute une pointe de laisser-aller. Il y a peut-être une part de décadence dans ce que tu es, Fitzgerald, mais je pense que c’est ton environnement qui t’influence dans cette voie. Au fond de toi, par contre, tu dois être un gagnant. Tu as tous les critères réunis pour l’être, en tout cas. Et… Je dirais que, sinon, tu perds ton temps à trainer avec les cas désespérés comme moi. Tu as bien mieux à faire que rester là à m’écouter débattre sur ton avenir. » Je m’arrêtai dans mon discours avant de jeter un bref coup d’œil dans sa direction ; je savais que je me baisais sur tout ce que j’avais bien pu lire, tout ce que j’avais bien pu voir. Je savais que je me baisais sur les dossiers et sur les raisonnements logiques que j’avais pu constater avec le temps, avec mon acharnement. J’avais l’intime conviction que je ne me trompais pas.
Mais au fond, qui étais-je ? Une sale gamine. Je n’avais pas le droit d’avoir une opinion Je n’avais pas le droit de tracer son avenir et décider de qui il était alors qu’il avait encore toute sa vie devant lui.
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() message posté Ven 13 Fév 2015 - 20:49 par Invité
“ People sleep peaceably in their beds at night only because rough men stand ready to do violence on their behalf.” Je me crispai en face de la porte d’entrée juste devant le petit jardin des Lancaster. Je n’osais pas marcher jusqu’au bout et embrasser la réalité à nouveau. J’avais peur que cette sensation de deuil disparaisse à tout jamais, alors je m’accrochais aux vestiges de mes souvenirs comme un désespéré. Je n’avais pas vraiment eu le temps de profiter de ma mère, peut-être même n’avais-je jamais réellement entretenu une relation spirituelle avec elle. J’étais trop jeune, trop insouciant, trop à l’ouest. Mon cœur se serra tandis que je me penchais afin de soulager ma jambe. La violence de mon père me réconfortait dans ma solitude. Je me sentais en sécurité malgré la douleur lancinante et les sensations d’injustices. Mon esprit était troublé par le soleil et par la lune, mais le visage d’Eugenia éclatait d’une lumière parfaite. Elle était différente. J’expirai en gémissant avant de faire un grand pas. Je pouvais facilement me perdre dans la contemplation de son expression. Je savais que la nature s’édifiait constamment, et que la profondeur de la beauté ne pouvait être matérielle – pourtant je me consacrais corps et âme à cette gamine désinvolte et tranchante. J’aurais probablement mieux fait de longer la côte au lieu de me réfugier dans les plaisirs mesquins que me procurait sa compagnie. Mais me voilà, chavirant comme un naufragé à la dérive. Je me laissai glisser sur la première marche de l’escalier en frôlant son corps maigrichon. Ce contact bien qu’anodin me semblait presque légitime. J’avais tous les droits lorsqu’il s’agissait de Ginny. Les réflexions qui hantaient ma tête étaient tellement ridicules ! Comme si j’extrapolais toutes mes frustrations, et tous mes espoirs, elle était mon salut. J’esquissai un sourire au coin en la rejoignant dans son silence impérial. Elle contempla ses mains pendant un long moment sans de remarquer ma présence dans la pièce. Avais-je si peu d’intérêt à ses yeux ? Nous partagions la table des opprimés à la cafétéria depuis le début de l’année. Je croyais que cela était suffisant pour créer des liens, mais je me trompais certainement. Je scrutai les lieux avant de m’attarder sur la fenêtre. Le vent sifflait à l’extérieur, me tirant de mon absence accablante. Ginny se redressa avant de répondre à mes interrogations existentielles. « Tu veux réellement savoir ? » Elle se racla lentement la gorge, annonçant le début d’une longue et éprouvante tirade. Tout du moins, elle l’était pour moi. « Je pense que tu es un orphelin de mère issu d’une union qui se révélait prometteuse. Mélanger les origines a souvent d’enrichissantes répercussions ; j’imagine que ton éducation a dû se faire entre deux mondes et cela t’a permis d’appréhender une palette complète d’horizons différents. Ton père était banquier, ta mère journaliste, ce qui aurait laissé croire que vous étiez en bonne voie pour faire partie de ces classes supérieures… Jusqu’à ce que ta mère meurt. » Je l’écoutais avec application comme si son récit à propos de ma vie ne me concernait pas. Je m’égarais souvent dans mes rêves, parmi les fantômes qui déambulaient autour des tombeaux de ces êtres chers que j’avais perdus. Je n’étais pas orphelin de mère. J’étais orphelin tout court – En quoi un homme endeuillé pouvait-il combler mon manque d’affection ? Mes doigts se courbèrent et je me retins de commenter afin de ne pas sombrer dans la démesure. Je n’étais pas très doué avec les émotions, et je ne voulais certainement pas me dévoiler plus que nécessaire. « Tu as vu le monde, tu as vécu dans différents endroits. J’imagine que cela explique en grande partie l’aura de sophistication qui flotte autour de toi… Et aussi ta grande capacité à entretenir des conversations. J’imagine que tout cela fait de toi une personne avec un grand avenir même si ta famille a pris une mauvaise voie. Tu as des mauvaises notes mais tu es intelligent… Ce qui prouve qu’il y a sans doute une pointe de laisser-aller. Il y a peut-être une part de décadence dans ce que tu es, Fitzgerald, mais je pense que c’est ton environnement qui t’influence dans cette voie. Au fond de toi, par contre, tu dois être un gagnant. Tu as tous les critères réunis pour l’être, en tout cas. Et… Je dirais que, sinon, tu perds ton temps à trainer avec les cas désespérés comme moi. Tu as bien mieux à faire que rester là à m’écouter débattre sur ton avenir. » Je me noyais dans mon propre chagrin, ramenant mes genoux douloureux vers ma poitrine en position fœtale. Elle se trompait totalement sur moi. Les archives du lycée n’étaient qu’un ramassis de conneries administratives. Eugenia ne pouvait pas résumer une personne en survolant les feuilles d’un dossier ; la nature humaine était trop complexe pour être contenue. Je baissai la tête d’un air abattu en analysant ses paroles. Elle avait une bien haute estime de moi. Je peinais à retrouver un souffle de liberté dans mon quotidien, alors comment pouvais-je gagner mes combats ? Je fis la moue en bougeant mon épaule engourdie. « Ne me juge pas – ce que tu dis est vraiment intéressant mais est-ce que je peux on avoir de la glace? » Soufflai-je en ignorant l’impact de son discours. A quoi bon la contredire ? Je savais pertinemment qu’elle était têtue et je n’avais pas envie de lui montrer à quel point l’existence que je menais était pathétique. « Tu as sans doute lu que j’étais incroyablement maladroit ; je tombe souvent et je me prend tout le temps des portes. » Je ris avec légèreté en essayant de me relever. Ma jambe trembla, et je dû m’agripper au bras d’Eugenia pour ne pas perdre l’équilibre. Je rougis en marmonnant des excuses sommaires. Sa proximité me déstabilisait au point de me briser le cœur. Je lâchai sa prise en riant jaune. « Voilà ce que je te propose ; pour chaque service que tu me rendras je te dévoilerais un secret qui n’est pas cité dans tes précieuses archives. » J’arquai un sourcil d’un air charmeur. « Glaçons versus secrets ? »

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() message posté Lun 16 Fév 2015 - 12:59 par Invité
you have to love. you have to feel. it is the reason you are here on earth. you are here to risk your heart. you are here to be swallowed up. and when it happens that you are broken, or betrayed, or left, or hurt, or death brushes near, tell yourself you tasted as many as you could. ✻✻✻ J’étais différente. Cependant, dans mon esprit, cela n’était pas un fait qui correspondait à quelque chose pouvant être considéré comme positif. Non. Il n’y avait rien de bien à ma singularité. Il n’y avait rien d’appréciable à ce que j’étais. Bien au contraire.
Ma différence était un fléau.
On m’avait suffisamment répété que j’étais étrange, bizarre, anormale. Je vivais à des années lumières de la réalité et les autres faisaient de leur mieux pour me maintenir à l’écart. J’étais comme un animal unique que l’on avait emprisonné pour l’observer, pour se moquer ; je ne comptais plus les murmures mesquins que j’entendais sur mon passage. Je ne comptais plus les index que l’on pointait vers moi afin de me désigner. J’étais Eugenia Lancaster, la fille différente. J’étais Eugenia Lancaster, la fille anormale qui n’avait pas sa place parmi le monde des vivants.
Je tentais de me dire, bien souvent, que cela n’était pas grave. Que je pouvais continuer d’avancer sans les autres, sans leur aide, sans leur soutien. Cependant, en ces instants, je ne m’étais pas rendue compte que cela me blessait plus que nécessaire. Je n’avais pas voulu admettre être atteinte par les autres, être atteinte par ces moqueries, être atteinte par cette humanité que je détestais profondément, de tout mon être. Je ne savais pas si cela avait été ma fierté ou mon innocence qui m’avait poussé à garder la tête haute et les épaules droites ; cependant, je n’avais pas su que, quelques années plus tard, je passerais de longues après-midi à observer le ciel et me demander comment j’avais bien pu en arriver là. Comment j’avais bien pu accepter d’être malheureuse à cause d’une poignée de gamins qui s’étaient plu à croire que la normalité était une chose qui existait réellement.
Je ne m’étais pas rendu compte, à cette époque, que je les laissais délibérément me briser et que cela me hanterait durant tout le restant de mon existence.
J’observai Julian tandis que je lui faisais l’exposé de ce que j’avais bien pu apprendre et déduire sur lui ; cependant, je le voyais dans ses yeux qu’il s’ennuyait. Je le voyais dans ses yeux qu’il n’en avait que faire. Je fronçai légèrement les sourcils, le cœur lourd, la poitrine douloureuse. Je ne comprenais pas, non. Je ne comprenais pas parce que je n’étais pas habituée à cette société que j’évitais comme la peste. Je ne comprenais pas qu’il puisse ne porter aucun intérêt à la réponse qui concernait la question qu’il avait posée en premier lieu. J’étais vexée, également, au fond ; j’avais la sensation de ne faire que des faux-pas. J’avais beau essayer. J’avais beau essayer ; ce monde n’était pas le mien et, pourtant, je persistais à vivre dedans. « Ne me juge pas. Ce que tu dis est vraiment intéressant mais est-ce que je peux on avoir de la glace ? » me demanda-t-il, confirmant les pensées qui m’avaient agitées. Il n’en avait eu que faire, donc. Je ne pus retenir la bouffée de déception qui s’empara de mon expression. « Tu as sans doute lu que j’étais incroyablement maladroit ; je tombe souvent et je me prends tout le temps des portes. » ajouta-t-il pour expliquer sa demande, un rire l’habitant.
Je me rendis compte que je m’étais contentée de l’observer à sa question, en cet instant. Que je m’étais contentée l’observer avec tristesse, comme une enfant qui ne recevait pas de récompense après avoir bien travaillé. Je secouai vaguement la tête pour revenir sur Terre ; mais pouvais-je réellement revenir sur Terre, tout en sachant que je n’y avais pas ma place ?
Il tenta de se relever mais perdit l’équilibre ; je notai seulement que sa jambe devait lui être douloureuse. Je fronçai les sourcils. Il n’était pas venu pour me voir. Cette pensée s’imposa à moi lorsque sa main s’abattit sur mon bras pour se rattraper. Il était simplement venu pour se soigner et repartir faire la fête avec les autres. Tout le monde était dans les rues de Cardiff ; il avait sans doute compris que je serais la seule chez moi capable d’être en mesure de le soigner sans aller à l’hôpital. « Voilà ce que je te propose : pour chaque service que tu me rendras je te dévoilerais un secret qui n’est pas cité dans tes précieuses archives. Glaçons versus secrets ? » me proposa-t-il. Je poussai un petit soupir, tandis que son bras lâchait le mien. Je levai les yeux vers lui. « D’accord. Viens, le congélateur est dans la cuisine. » D’un pas trainant, je me dirigeai dans le couloir de la maison de ma mère pour rejoindre la cuisine ; je jetai un vague regard par-dessus mon épaule pour m’assurer qu’il me suivait bien, puis, une fois arrivés dans la pièce, je lui désignai une des chaises autour de la table. « Assis-toi. » lui indiquai-je doucement dans un murmure. J’ouvris la porte du congélateur pour attraper le bac à glaçons ; dans un mouvement, je récupérai également un torchon, et je m’appliquai à faire tomber les glaçons, un à un, dans le tissu. Je finis par le refermer et le tendre à Julian. « Tiens. Tu as besoin d’autres choses ? » lui demandai-je avec précaution. Au fond de moi, mon cœur battait douloureusement dans ma poitrine. J’avais la sensation que cela me blessait bien plus que tout ce que les autres avaient bien pu me dire. J’avais l’impression que le simple fait qu’il ne soit pas venu pour moi mais pour mes services me faisait du mal, sans que je ne sache réellement pourquoi ; je me trouvais à la fois idiote et stupide, affligeante et puérile. Mais cela ne changeaient rien aux faits. « Si ça t’intéresse, ma mère a fait un gâteau au chocolat un peu plus tôt dans l’après-midi. » J’haussai les épaules. « T’aurais dû me dire tout de suite que tu venais pour des glaçons, ça m’aurait évité de te faire perdre du temps. » Je ne pensais même plus à son marché. A sa proposition. Dans mon esprit, cela n’était qu’une preuve de plus venant alimenter l’image qu’il devait avoir de moi : celle d’une gamine insatiable.
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() message posté Lun 16 Fév 2015 - 15:41 par Invité
“ People sleep peaceably in their beds at night only because rough men stand ready to do violence on their behalf.” Je ne parvenais plus à distinguer ses émotions. Ses grands yeux méfiants restaient figés, fixant un coin de la pièce qui me semblait hors de portée. Eugenia devait certainement me trouver bizarre – Je débarquais sans crier gare afin de fuir mon profond sentiment de solitude. Je n’avais aucune raison de m’accrocher à elle. Je n’avais pas le temps de l’apprécier à sa juste valeur. Et je ne pouvais certainement pas lui apporter grand-chose de concret. C’était une erreur de l’associer à mon quotidien chaotique. Je plantai mes ongles dans mes cuisses en silence. Ses mots étaient aussi lointains que la mer ; mais je n’avais pas peur de ses déclarations. C’était la déception qui me blessait le plus. J’étais à mille lieux de correspondre aux schémas qu’elle s’était fait de moi. Déjà, je n’étais pas le fruit d’un mélange de cultures ; après la disparition de ma mère je m’étais complètement détaché de son identité. Je savais apprécier la douceur des gâteaux au miel, mais en dépit de tous mes efforts je restais ignorant. Je ne savais même pas situer géographiquement le Liban ! Mon éducation était un apport personnel ; je luttais tous les jours pour ne pas sombrer dans l’incivilité. Mon père était ivrogne, ma mère était un fantôme et j’étais une épave. Mon cœur cognait ma poitrine comme une explosion de couleurs. Il y’ avait le feu en moi, mais il était certainement trop tôt pour que je lui confie mes frustrations. Ginny était ma seule amie et sa perte m’était insupportable.

Elle prenait trop de recul à mon goût. L’avais-je froissé en me murant dans le silence ? Certainement. Je savais qu’elle était spéciale dans ses réflexions, et ça ne me dérangeait pas de jongler entre ses humeurs complexes. Je l’avais assez observé pour comprendre sa différence – Elle vivait dans l’ombre de sa jumelle maléfique. Et je ne pouvais m’empêcher de songer à la bêtise des autres débiles au lycée ; comment pouvaient-ils passer à côté de son aura innocente ? Etais-je le seul à m’émouvoir par le timbre délicat de sa voix ? Je savais pertinemment qu’elle était à l’image des grandes divinités grecque ; magnifique, plaisante, et intenable. Je fis la moue en ignorant les tiraillements de mes muscles. « D’accord. Viens, le congélateur est dans la cuisine. » Lança-t-elle avec lenteur. Je me redressai avec nonchalance afin de me donner un peu de contenance avant de la suivre le long du couloir. Ma démarche contrastait horriblement avec l’image que je voulais renvoyer, mais je me forçais à garder la tête haute afin de ne pas l’alarmer. « Assis-toi. » Murmura-t-elle avant de se détourner. Je l’observai sortir un bloc de glace et préparer un torchon de cuisine avant de me le tendre. Je n’osais pas encore effectuer de mouvement en sa direction. Je restai planté sur place pendant quelques secondes, rêvant éveillé de meilleurs circonstances pour ma vie. Evidemment, mon genou me rappela à l’ordre bien assez vite et j’esquissai un sourire fade en appliquant le tissu sur mes boursouflures. Je clignai des yeux afin de retenir mon expression de douleur ; Ginny ne semblait pas encore avoir remarqué l’étendue de mes blessures. Et l’idée que je puisse être normal aux yeux de quelqu’un me remplissait de plaisir. « Tiens. Tu as besoin d’autres choses ? » Je secouai frénétiquement la tête – Elle en avait déjà assez fait. Sa présence me suffisait amplement. Je pressai ma paume ouverte sur ma jambe tout en continuant de l’observer. Etais-ce inapproprié de la sonder de la sorte ? Je ne voulais la gêner, mais au fond j’étais encore plus confus par mes propres réactions. « Si ça t’intéresse, ma mère a fait un gâteau au chocolat un peu plus tôt dans l’après-midi. T’aurais dû me dire tout de suite que tu venais pour des glaçons, ça m’aurait évité de te faire perdre du temps. » S’enquit-elle en haussant les épaules. Je fronçai les sourcils en me relevant avec difficulté. Le torchon plein de glace m’échappa, et je ne pris même pas la peine de me baisser pour le ramasser. J’étais complètement transporté par ses paroles. Il n’y avait qu’elle pour m’inviter à prendre un bout de gâteau tout en m’insultant en même temps. Je fis un pas incertain en sa direction. « Je n’ai pas besoin de tes glaçons – si ça peut te prouver ma bonne foi alors je ne les utiliserais pas. C’est aussi simple que ça. » Je déglutis en pressant ma main contre ma cuisse gauche. Je voulais lui prouver que je n’étais là pour profiter de ses faiblesses. Les miennes étaient tellement pires. Après tout je pouvais bien prendre mon mal en absence le temps d’une conversation. « Tu m’as ramené le torchon alors tu as droit à un secret. » Marmonnai-je en m’accoudant à la chaise. « Ma mère a eu son accident à cause de moi. Elle était sortie faire les courses à ma demande. » Je souris tristement. « Alors quand tu t’es mise à parler j’ai décroché à la minute où tu as dis les mots ‘‘ ta mère meurt’’ … » Je prononçai ces mots avec une expression grave et profonde. C’était certainement pour cette raison que je justifiais les violences de mon père – ça et ma peur de perdre mon seul parent encore vivant. Parfois je me demandais ce à quoi ressemblerait la vie si ma mère était toujours parmi nous. Je serais certainement intelligent, vaillant, et promis à un brillant avenir. Exactement comme Eugenia l’imaginait. Au lieu de ça je préférais me laisser aller à la douceur d’un moment trop triste pour être surmonté. Je ne voulais pas le surmonter.

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() message posté Lun 23 Fév 2015 - 22:27 par Invité
you have to love. you have to feel. it is the reason you are here on earth. you are here to risk your heart. you are here to be swallowed up. and when it happens that you are broken, or betrayed, or left, or hurt, or death brushes near, tell yourself you tasted as many as you could. ✻✻✻ Je ne savais pas encore, à ce moment-là, qu’une vie toute entière ne pouvait se résumer à une succession de vérités imprimées sur une feuille de papier. Je ne savais pas encore que je tomberai de haut ; j’avais passé tant d’heures à attacher une importance trop grande aux fondements même de la réalité que je ne m’étais pas rendu compte que les dossiers étaient les premiers à me mentir. Les premiers à transformer cette vérité que je chérissais tant.
Je n’avais jamais fait confiance aux autres, aux êtres humains, à ces personnes capables de dire absolument tout. De dire absolument n’importe quoi. J’avais été sceptique à leurs moindres paroles et j’avais refusé leurs mots, leurs affirmations. Je ne leur avais accordé absolument aucun crédit, persuadée que la pire créature de cette Terre n’était que l’espèce même à laquelle j’appartenais. Je ne savais pas d’où m’était venue cette répulsion pour l’Homme en général ; cependant, elle m’avait habité, au fond de moi, et chacun de mes gestes avaient été motivé par mon envie de m’enfoncer dans mes positions.
J’avais la vérité pour quête et je m’étais tenu à cela.
J’observai Julian avec une déception que je peinais à contenir ; quelque part, si je détestais le monde entier, je m’étais plu à croire qu’un être humain puisse entrer dans ma vie sans que je ne me sente vulnérable. J’avais apprécié son calme et sa tolérance ; pourtant, à mesure que les secondes défilaient, j’avais la sensation de me rendre compte qu’il était comme les autres. Tout du moins, qu’il me voyait avec les mêmes yeux que toutes ces personnes qui passaient leur temps à me rejeter. Je me mordis l’intérieur de la joue avec violence en l’observant presser contre son genou meurtri le torchon plein de glaçons ; je me remémorais chaque instant de sa brève visite, cherchant l’instant où il aurait pu m’envoyer des signaux signifiants qu’il n’en avait que faire de mes paroles.
Après tout, je le savais. Je n’étais pas douée avec le relationnel. Je n’étais pas faite pour être avec les autres. Je ne comprenais pas leurs règles, leurs façons d’être. Je vivais à une centaine d’années lumières de leur environnement et je me plaisais à croire que m’en tenir à mon propre monde était acceptable. « Je n’ai pas besoin de tes glaçons – si ça peut te prouver ma bonne foi alors je ne les utiliserais pas. C’est aussi simple que ça. » dit-il alors qu’il faisait tomber les glaçons contenus dans le tissu à terre. Je fronçai les sourcils en secouant la tête. Je notai sa main qui se crispa sur son articulation douloureuse ; aussitôt, je me penchai pour attraper ce qui était à terre avant de lui tendre. « Ça serait complètement idiot. J’ai sorti ces glaçons pour toi, maintenant c’est trop tard pour prétendre que tu n’en as pas besoin. » lui répondis-je en laissant tomber le torchon dans ses mains. J’haussai les épaules, comme pour balayer ma déception.
J’avais espéré qu’il soit différent. Quelque part, il l’était ; il semblait réellement gêné et désolé de m’avoir blessé. Cependant, cela ne changeait rien aux faits. Je n’avais sans doute aucun intérêt à ses yeux. Je pris une profonde inspiration, avant qu’il ne finisse par s’accouder à la chaise. « Tu m’as ramené le torchon alors tu as droit à un secret. » me dit-il. Je fronçai les sourcils en faisant un vague geste de la main pour lui montrer que cela n’avait absolument aucune importance. Pourtant, il reprit. « Ma mère a eu son accident à cause de moi. Elle était sortie faire les courses à ma demande. Alors quand tu t’es mise à parler j’ai décroché à la minute où tu as dit les mots "ta mère meurt"… » Je sentis mes joues se colorer sans que je ne parvienne à faire quoi que ce soit. Je sentis la gêne, également, d’avoir pu lui parler de la mort de sa mère sans même prendre le temps de songer à l’impact que ces mots auraient sur lui. Parce que j’étais ainsi. Je n’étais pas insensible à la douleur des personnes mais j’étais étrangère à leurs émotions ; dans ma bulle, je m’enfermais au loin, et j’étais en paix avec moi-même. « Désolée. » marmonnai-je sans savoir où me mettre. Mes joues ne devaient n’être que deux plaques rouges en dessous de mes lunettes ; ma respiration était légèrement affolée et l’intégralité de mon corps était agitée de tics nerveux. Et maintenant ? Qu’étais-je censée faire ? Je secouai la tête, parcourue de frissons, avant de finalement me lever et me diriger vers le plan de travail.
Je soulevai doucement le papier d’aluminium recouvrant le restant de gâteau au chocolat que ma mère avait fait un peu plus tôt dans la journée ; avec précaution, je découpais deux tranches, les disposant sur des petites assiettes, avant de les poser sur la table de la cuisine. « Tu ne m’as pas répondu, du coup j’ai considéré que c’était un oui. » déclarai-je. « Pour le gâteau, je veux dire. Tu veux une cuillère ? » Je n’attendis pas sa réponse. J’allais chercher deux petites cuillères dans le tiroir, et en posai une en face de lui. Je me demandais comment il me voyait. Je me demandais s’il pensait que j’étais simplement une personne marginale ou si, en plus, il finissait par se peindre une vision négative de ma personne. Je sentis un frisson me parcourir et je secouai la tête. Je m’en voulais, oui. Je m’en voulais de ne pas réussir à me comporter normalement pour une fois dans ma putain de vie. « Je sais que mon avis ne compte probablement pas et qu’il risque de ne jamais rien sauver mais… Elle n’est pas morte à cause de toi, même si elle est sortie parce que tu lui as demandé. » repris-je. « Quelle était la probabilité qu’elle meurt en sortant ce jour-là ? Une sur un million. Pourtant cela ne signifie pas que la faute est sur toi, ou sur qui que ce soit d’autre. Si elle était restée, elle aurait pu mourir électrocutée, ou bien elle aurait pu faire un arrêt cardiaque… Qui sait. On dit souvent va où tu veux et meurs où tu dois. Tu n’es en rien responsable. »  Je demeurai quelques instants silencieuse avant de me rendre compte que mes paroles étaient sans doute pire que les précédentes ; alors, rougissant de plus belle, je baissai le nez vers mon assiette pour finalement enfourner une cuillérée de gâteau de ma bouche, priant presque corps et âme que Julian oublie mon existence.  
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() message posté Sam 28 Fév 2015 - 16:29 par Invité
“ People sleep peaceably in their beds at night only because rough men stand ready to do violence on their behalf.”   Il me semblait que son visage paisible et innocent était la réponse à toutes mes interrogations. Je voulais l’étreindre chaleureusement afin de surmonter ma peur du vide, mais elle était certainement trop bien pour moi. Je pouvais lire la déception dans son regard troublant. Elle avait le don de faire naitre un désir tourmenté dans mon cœur. Je m’éveillais de mon éternel cauchemar dans l’espoir de retrouver un peu de réconfort dans les bras de cette amie encore étrangère à mon univers. Eugenia, je me laisse souvent mourir parce qu’il n’y a personne pour me sauver. Les fantômes et les ombres enlaçaient mon corps douloureux sans que je ne parvienne à échapper à mon destin. Je connaissais le poids du deuil et tous ses chagrins. Ce sentiment se réveillait parfois en moi, criant mon désespoir et ma nostalgie. Elle se pencha afin de récupérer mon torchon je ne restai de marbre face à son insistance. Je ne voulais plus soulager mes muscles ou lui demander de faveur. Me doigts se crispèrent autour du bout de tissu suintant par réflexe, mais je refusais toujours de l’appliquer contre mon genou boursoufflé.  Au lieu de cela, je la fixais avec intensité, détaillant chaque fluctuation de ses traits délicats. Elle se murait dans une sorte de solitude  insupportable mais sa façon de se tenir si maladroitement en face de moi, me donnait envie de braver tous les obstacles et de la rejoindre. Mes pensées s’embrouillaient dans mon esprit. Ginny était une fille ordinaire, pourtant je l’avais inconsciemment élue. Elle était le gouffre qui me séparait de la réalité. Elle était le mirage de mère – Je la voyais en elle. « Ça serait complètement idiot. J’ai sorti ces glaçons pour toi, maintenant c’est trop tard pour prétendre que tu n’en as pas besoin. » Je me mordis la lèvre inférieure en écoutant les vibrations mélodieuses de sa voix. Sa bouche si douce me parlait. Je n’en revenais pas. Je papillonnai des yeux afin d’échapper à l’emprise de mes démons.  « Je suis complètement idiot alors. » Marmonnai-je d’un air absent. Ne pouvait-elle pas voir tous les efforts que je m’évertuais à faire pour rester dans ses bonnes faveurs ? Je tentais de fermer les yeux sur sa froideur et ses suspicions. Je voulais mériter sa confiance et passer outre son manque de considération pour les valeurs sociales. Je soupirai en m’éloignant entre les chaises de la table à manger, dressant ainsi une distance de bienséance entre nos deux corps. Mon cœur quant à lui, continuait à s’enfoncer dans son malheur amoureux. La chaleur se répandait en moi comme une brume maléfique. Je pouvais entendre les musiques accablantes de la marche funèbre de mon propre destin. J’étais obsédé par la mort de ma mère, et ces émotions puériles qui berçaient mon âme ne valaient pas mieux à mes yeux. Je retins ma respiration en prenant appui sur la table. Ma stature droite perdait de sa splendeur au fil des minutes et même si Ginny ne s’apercevait de rien, j’avais un mal de chien. J’avais l’impression que mes os craquaient sous le poids d’une injustice plus grande que le monde. Mon épaule continuait de me tirailler même si j’essayais de rester immobile. Je fini par froncer les sourcils en lui avouant mon terrible secret. Je portais en moi le chaos de l’âme coupable. J’avais tué Aïda sans m’en rendre compte. Prononcer ces mots m’avait couté, je m’égarais complètement dans les souvenirs éphémères de l’accident. Parfois, dans un accès de folie, il me semblait ressentir la collision de la voiture contre les remparts du pont d’Hammersmith.  Je ressentais les eaux gluantes emplir mes poumons avant de m’emmener au fond de la tamise.

 « Désolée » Marmonna-t-elle, les joues empourprées par la gêne. Je m’attendais à ce genre de réaction mais j’avais espéré qu’elle soit différente de tous les autres. Je n’avais pas besoin de sa pitié ni de sa sollicitude. Elle resta silencieuse pendant quelques instants avant de me présenter un morceau de gâteau.  « Tu ne m’as pas répondu, du coup j’ai considéré que c’était un oui. Pour le gâteau, je veux dire. Tu veux une cuillère ?  » S’enquit-elle en haussant les épaules. Elle se dirigea vers un tiroir sans attendre ma réponse. Je suppose que je n’avais pas vraiment le choix. Je devais engloutir son présent en guise de consolation. Je tendis ma main tremblante vers l’assiette en grimaçant. « Je sais que mon avis ne compte probablement pas et qu’il risque de ne jamais rien sauver mais… Elle n’est pas morte à cause de toi, même si elle est sortie parce que tu lui as demandé.  Quelle était la probabilité qu’elle meurt en sortant ce jour-là ? Une sur un million. Pourtant cela ne signifie pas que la faute est sur toi, ou sur qui que ce soit d’autre. Si elle était restée, elle aurait pu mourir électrocutée, ou bien elle aurait pu faire un arrêt cardiaque… Qui sait. On dit souvent va où tu veux et meurs où tu dois.Tu n’es en rien responsable.   » Déclara-t-elle avec entrain. J’arquai un sourcil en triturant le chocolat au bout de ma cuillère, avant de m’esclaffer de rire. « Tu essaies d’être gentille avec moi ? » Je souris tristement en me redressant sur mon siège. C’était un pas de géant dans notre amitié. « Je sais que ça va te paraitre bizarre mais je te connais. Et je n’ai pas eu besoin de lire ton dossier pour ça. » Sifflai-je avec difficulté. Je n’étais pas sûr de pouvoir avaler sans douleur alors je faisais diversion en parlant. Il parait que j’avais un talent inné d’orateur. « Je sais que c’est bizarre mais je te connais et je n’ai pas eu besoin de lire ton dossier pour ça. » Je fermai mon poing sur les rebords de la table en laissant ma tête retomber en arrière. Mes mouvements étaient empreints d’une certaine mélancolie. « Je suis convaincu qu’il y a beaucoup trop de dévotion et d’affection en toi. Tu refuses de le montrer mais moi, je te connais. » Répétai-je sans la regarder. Je te connais, Eugenia.  
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() message posté Sam 28 Fév 2015 - 20:52 par Invité
you have to love. you have to feel. it is the reason you are here on earth. you are here to risk your heart. you are here to be swallowed up. and when it happens that you are broken, or betrayed, or left, or hurt, or death brushes near, tell yourself you tasted as many as you could. ✻✻✻ Je ne savais pas si je pourrais me mêler aux autres un jour. Je ne savais pas si j’étais destinée à demeurer seule jusqu’à la fin de mon existence ou, si, au bout d’un moment, je parviendrais à côtoyer la même réalité que tous ces individus présents sur Terre. Je détestais le genre humain mais, au fond de moi, je me trouvais horriblement solitaire. Au fond de moi, je souffrais de ma différence, de ma distance avec le monde des autres. J’aurais aimé avoir de l’importance, moi aussi. J’aurais aimé connaître l’amitié. J’aurais aimé être aimée, quelque part.
Mais je refoulais toutes ces émotions au fond de mon être. Je m’emprisonnais dans ce que je devais être par facilité, pour moi ou pour les autres. J’étais une personne étrange. J’étais une personne hors du temps. Je n’étais pas conçue pour être aimée, ou même pour me mêler aux autres. Je préférais croire que mon rejet du genre humain pouvait expliquer ma solitude. C’était ainsi. Je cessais de me battre pour une chose que je savais déjà perdue d’avance. « Je suis complètement idiot alors. » me dit Julian en m’observant. Son regard me dérangeait presque, comme s’il me mettait à nue, comme s’il parvenait à sonder mon âme. Au fond, j’avais également conscience que je n’avais jamais réellement cherché à faire la différence. Chercher à me mêler aux autres. Chercher à faire des efforts.
Julian était la seule personne que je parvenais à tolérer, en dehors de mon cercle familial. Il me paraissait différent. Il me paraissait plus nuancé que le reste du commun des mortels. Je ne lui avais pas adressé beaucoup de fois la parole mais cela avait suffi à me faire penser qu’il était bien plus distingué, également ; je n’avais pas réussi à suffisamment me réfréner pour lui laisser une part de mystère en évitant de faire des recherches mais cela n’altérait en rien la forme d’admiration que je nourrissais à son égard.
Si je rougissais, cela était uniquement parce que je savais que je n’avais pas agi comme les autres. Si je rougissais, cela était parce que j’avais la sensation d’avoir enfreint les limites, dépasser les frontières du raisonnable. J’avais prononcé des mots qu’il n’aurait pas fallu que je prononce. J’avais dit des paroles qu’il n’aurait jamais dû être dit. Les autres avaient des règles de bienséance que je peinais encore à appréhender. Je n’avais pas réfléchi en parlant et je me sentais fautive d’être différente des autres. Je me sentais fautive d’être étrange et décalée, en quelque sorte.
Le rire de Julian me fit froncer les sourcils. J’avais tenté de me rattraper de la pire façon qui puisse être ; je n’avais fait que m’enfoncer davantage en exposant ce que je pensais. Je n’avais aucun filtre. Aucune limite. Les mots s’échappaient de ma bouche sans que je n’y réfléchisse réellement. « Tu essaies d’être gentille avec moi ? » me demanda-t-il. Il y avait quelque chose de triste dans son regard. Je laissai mes yeux le détailler avant d’hausser les épaules avec légèreté, troublée par cette réaction que je n’attendais pas. « Non, pas réellement. » lui répondis-je. « Je te parle de probabilités et de statistiques. Je te dis ce que je pense. Ce n’est pas être gentille. » J’esquissai un vague sourire en haussant simplement les épaules. Je n’avais pas l’habitude de parler aux autres, de faire part de mes pensées, d’être confronté à un autre être humain. J’avais l’impression de devoir justifier la moindre de mes actions, le moindre de mes mots.
Cela était comme si j’étais une étrangère. Une personne qui venait d’ailleurs. J’avais une autre culture, un autre code de conduite. Et, à cause de mes différences, les autres ne me comprenaient pas forcément et, de la même manière, je ne comprenais pas les autres. « Je sais que ça va te paraitre bizarre mais je te connais. Et je n’ai pas eu besoin de lire ton dossier pour ça. » finit-il par me dire. Je l’observai sans le comprendre. Il bougea légèrement avec désinvolture. Je ne voyais pas de quelle manière il pouvait clamer une pareille chose. Il était intelligent, certes, mais je peinais à croire qu’il puisse affirmer me connaître sans se tromper. Après tout, combien de fois m’avait-il adressé la parole ? J’étais persuadée de pouvoir les compter sur le bout de mes doigts. Je serrai les dents en me rendant compte que cela signifiait, sans doute, qu’il me prenait pour une personne étrange. Pouvais-je le blâmer ? Non, bien sûr que non. J’en étais une, après tout. « Je suis convaincu qu’il y a beaucoup trop de dévotion et d’affection en toi. Tu refuses de le montrer mais moi, je te connais. » continua-t-il. Je l’observai en tentant de cacher ma surprise. Je ne m’étais pas attendue à ce qu’il me décrive de la sorte. « Et qu’est-ce qui te fait dire ça ? » lui demandai-je doucement en me raclant la gorge. J’étais curieuse, oui. Curieuse de comprendre comment il avait bien pu en arriver à de telles conclusions. Curieuse de savoir comment son esprit fonctionnait.
Une part de moi me répétait qu’il se moquait sans doute de moi. Mais je tentais de la faire taire.
J’étais trop fragile pour être brisée. J’en étais persuadée. « Je veux dire, tu ne me connais pas. Je n’ai fait que manquer de tact en ta présence et parler beaucoup trop. » poursuivis-je en l’observant d’un air sévère. « Je ne suis pas sûre que cela soit typique des personne dévouée et affective. » Je retins ma respiration pendant quelques instants avant de porter ma cuillère à mon assiette et manger un morceau de ma part de gâteau au chocolat.
Voyait-il que j’étais comme une bête, une bête sauvage ? Comprenait-il que je n’étais pas comme les autres et que je ne parviendrais, jamais réellement, à me mêler à la foule ? Je vivais ailleurs, je vivais loin. Il ne pouvait pas prétendre me connaître. J’étais bien trop loin pour être à la portée de qui que ce soit.
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