Rose O'Pry (+) Love how you push me out

Jambes croisées, assise sur mon fauteuil en cuir, je regarde mon patient tout en l'écoutant parler de ses mœurs. Je réajuste mes lunettes sur le haut de mon nez et écris quelques mots-clés sur mon patient. « Enfin, j’ai cru qu’il… Vous voyez… » Me dit-elle en rougissant. Non, je ne vois pas ce que vous voulez dire. Mais je me retins de lâcher mes nerfs, de cette journée infernale, je me concentre sur elle, allongée sur le canapé en cuir marron dont la forme était du style moderne et en même temps vieux. « Vous croyez que je suis folle, docteur ? » Elle penche sa tête en arrière afin de croiser mon regard. Je soupire et retire mes lunettes afin de les poser sur mes cuisses. « Non, vous ne l’êtes pas. Vous êtes juste… En train d’imaginer des choses qui ne vous arriveront jamais. » Elle se remit en place, l’air un peu détendu. Je me frotte le haut du nez et remets mes lunettes. « Et vous docteur, vous vous êtes déjà imaginé des choses qui ne vous arriveront jamais ? » Croyait-elle que je me foutais de sa gueule ? Je soupire, une nouvelle fois et pose mon stylo mont-blanc sur mon calepin, sur mes cuisses. « Oui, madame, ça m’arrive. » Elle s’assit sur le canapé et me regarde. « Comme quoi ? » Bon sang, je n’aime pas parler de ma vie privée avec mes patients, mais il le faut bien pour créer un lien entre nous. « Comme… Ma mère qui se suicide, finalement. » Je disais ça d’un ton sec, presque trop franc et direct. Elle me regarde, surprise. « Vous dites cela comme si c’était… Normal. » Je croise mes doigts entre eux. « Parce que ça a failli être vrai. » Elle ne dit plus rien et roula ses yeux au sol. De la pitié, ça se lit sur son visage. M'enfin, je ne suis pas à plaindre non-plus. C'est vrai, je n'ai plus mon père, mais cela ne veut rien dire sur le fait que moi aussi, j'ai envie de me tuer. J'ai une mère complètement folle de dépression, mais c'est grâce à elle que j'ai trouvée ma voie.
L'horloge sonne de ses gongs. Ma patiente se lève et je fis de même. Nous nous serrons la main et elle partit, je ferme la porte à clé derrière elle. Je pousse un soupir de soulagement. Fini, ma journée, finit ! Je balance mes escarpins dans le meuble à chaussures et monte les escaliers en descendant la tirette de ma jupe cintrée. Arrivée à la moitié, j'entends frapper, ou plutôt tambouriner. Je me précipite vers la porte, oubliant que ma tirette est à moitié défaite. Je déverrouille la porte et tourne la poignée. Ma surprise fut, de plus, belle lorsque je vis Simon, mon jeune patient. Mes joues s’empourprèrent, sans que je n’aie une raison apparente à cela.

Cher Journal,
Comme le veux mon habitude, je te souille de mon encre et de mes problèmes journaliers. Je suis psychologue, pourtant, je n'aime pas parler de MES problèmes aux autres psychologues. Voilà, j'écris. Toi, tu m'écoutes sans broncher, sans questions. Aujourd'hui, j'eus la visite de clients réguliers, certains n'ont même plus besoin de moi, mais s'obstinent à venir tout de même. Il y a eut la visite de cette femme, qui fait des rêves et cauchemars qui lui perturbe la nuit, Dieu, qu'est-ce qu'elle peut blablater sur un seul rêve. Lorsque fut la fin de mes séances, comme d'habitude aux alentours de dix-huit heures, et que j'allais monter dans ma chambre mettre ma tenue du soir, un pyjama léger et négligé, la seule chose que je supporte à être négligé, c'est moi, de toute manière qui peux me voir ainsi ? Me voir avec des cheveux en bataille, démaquillée, les jambes nues, même si elles le sont en journée, mais pas au-dessus de mes genoux. Bref, donc à ce moment-là, ma porte tambourina d'un rythme fréquent. Dieu, je peux te dire que ça m'a bien enquiquinée. Je suis allée voir et j'ai vu ce garçon, désorienté et complètement malade. Simon, ou Sims, comme il aime dire. Devines ce qu'il voulait de moi ? Un toit. Mon toit. De tous, pourquoi moi ? Ah oui, il n'avait pas de vrais amis à proprement dit. Quoi qu'il en soit, Journal, j'ai dit oui et l'ais laissé passer le seuil de la porte. Pourquoi ? La question qui tue. Je sens que cette période va être longue et... Quoi qu'il en soit, Journal, j'ai dit oui et l'ais laissé passer le seuil de la porte. Ah si, papa. D'ailleurs, sa chambre se trouve en face de la mienne, je lui avais donné la chambre parentale, qui n'est plus utiliser depuis que maman est partie dans le Sud de la France... Bon, sur ses mots, je me fatigue et te dis à demain. Souhaite-moi bonne chance.


Je referme mon journal, un livre dont la couverture était verte foncée et ornée de reliures dorées, les pages étant jaunâtre de vieillesse et d'usage. Je dépose ce journal sur ma table de nuit, avec mon stylo mont-blanc. Je fixe ma porte fermée. Que fait-il ? J'avais envie de savoir s'il dormait déjà. Je secoue la tête, vivement, rapidement. Non. Pourquoi cela me préoccuperait-il ? Je porte mes mains dans mes cheveux pour me les rabattre sur le côté et appuie sur l’interrupteur de ma lampe de chevet, de style victorienne. Toute ma maison est dans ce style-là, en bois ciré, foncé, rouge velours et assez rustique. Je remonte légèrement ma couverture à fleurs, vieillotte, mais bon, et m'enfouis dans mes oreillers, au moins quatre.