(Rhys & Amanda) Sorry for the coffee

Il était à peu près huit heures. Il avait le temps de passer prendre un café avant la réunion habituelle du matin. De toute façon, sans caféine, Rhys était quasiment certain de ne pas réussir à tenir toute la journée. Il n’avait jamais été accro mais depuis qu’il s’infligeait un rythme aussi intensif de travail, il avait bien fallu trouver des stimulants. Lorsque Julian lui avait proposé de venir avec lui travailler pour le Times, il n’avait pas hésité longtemps avant d’accepter. C’était une offre alléchante, difficilement déclinable. Pourtant, il savait que les débuts seraient compliqués. C’était un quotidien reconnu, les attentes étaient beaucoup plus élevées. Et puis, Rhys n’était pas comme Julian. Il n’était pas aussi doué, n’avait pas la même expérience. Il savait pertinemment qu’il devait faire ses preuves et c’était exactement pour cette raison qu’il ne s’était accordé qu’une poignée d’heures de sommeil la veille, préférant se concentrer pour avancer un article. Sa boisson en main après avoir fait la queue dans la file interminable du Starbucks, il s’apprêtait à traverser la rue quand un vélo manqua de peu de le faucher. Par réflexe, il tendit son bras pour freiner la jeune femme à côté de lui et c’est au moment où il lâcha un brusque « Attention! » qu’il sentit un liquide brûlant glisser sur sa cuisse. Rhys baissa la tête. Une énorme tâche marron avait imprégné son pantalon beige. Comme par hasard. Le seul jour où il décidait de mettre ce pantalon qui traînait dans son armoire depuis des lustres, il fallait que cela arrive. Partagé entre l’envie de s’énerver et de rire jaune, ses prunelles firent des allers retours furtifs entre la blonde et son pantalon, réalisant l’ampleur de la chose. « Le blond, c’est que votre couleur de cheveux ou vous l’êtes dans la tête aussi?! » Oui, il comprenait qu’elle n’avait pas fait exprès. Mais il était quand même extrêmement irrité. Parce qu’il était tôt, qu’il était déjà en retard à une réunion, qu’il n’avait pas beaucoup dormi. Et lorsque Carstairs était agacé, il s’en prenait au monde entier. Soudainement, il s’était senti à la place d’Emma Stone dans La La Land. Sauf que lui, il n’avait absolument rien pour cacher cette immense tâche. Encore heureux que ce soit sur la cuisse et pas un peu plus haut au centre. « Y’a rien à faire, il est fichu. Vous me l’avez fichu. » Et dire qu’il avait une réunion qui commençait… bah tiens, maintenant. Génial. Cette journée commençait décidément très mal. Dégoûté par son pantalon qui lui collait à la peau de manière très désagréable, il sortit son portable afin d’envoyer un message à ses collègues pour les prévenir de son retard. « Encore heureux, ce serait la moindre des choses. » Il était encore assez énervé pour lui parler sur un ton hautain, mais pas assez pour refuser de se faire repayer un café. C’était quand même plus de cinq livres, ce truc chez Starbucks. Rhys n’était pas du genre radin, mais… cinq livres quand même, quoi. Soupirant bruyamment tout en tentant de se calmer et de se convaincre que ce n’était pas si grave d’avoir une énorme tâche couleur boue sur sa jambe, il releva la tête vers son interlocutrice. « Vous auriez pas des mouchoirs, un truc pour éponger? » demanda-t-il, s’efforçant d’employer une voix un peu plus posée. Allez Rhys, un petit effort. Elle n’avait pas volontairement voulu lui renverser sa boisson, après tout.