"Fermeture" de London Calling
Après cinq années sur la toile, London Calling ferme ses portes. Toutes les infos par ici Today has been okay + Gloria  2979874845 Today has been okay + Gloria  1973890357
-28%
Le deal à ne pas rater :
Brandt LVE127J – Lave-vaisselle encastrable 12 couverts – L60cm
279.99 € 390.99 €
Voir le deal


Today has been okay + Gloria

 :: It's over :: Corbeille :: Anciens RP
Anonymous
Invité
Invité
() message posté Sam 12 Mar 2016 - 18:19 par Invité

And the more she could imagine this island, the less she liked the real world. The more she could imagine the people, the less she liked any real people. Il y avait une chorale sur l'estrade. Une jeune fille ondulait au milieu des instruments, les mains croisées sur sa poitrine, les yeux fermés sur la noirceur d'un monde qu'elle transcendait en déployant ses étincelles de lumière. Durant cette chanson, je m'étais débarrassé de mon air supérieur, meurtri et froid. Je savais que je n'avais plus d'effort à faire pour contenir mon émotion. Elle lui appartenait déjà. Je m'offrais entièrement à son talent. Je me perdais dans ses mélodies, dans les mouvements gracieux de ses cheveux sous le vent. Toutes les chanteuses de la pièce, toutes celles que j'avais écouté, celles qui m'avaient fait frissonné, toutes celles que j'avais profondément adulé en les suivant du regard, en m'imprégnant de leurs textes emprunts de plénitude, s'étaient fondues en une seule forme qui s'harmonisait derrière les rideaux bicolores de la scène. Gloria Kipling, l'ange déchu qui se relevait pour étreindre les étoiles. Je pinçai les lèvres en m'isolant. Mon cœur était lourd, il s'effritait contre les rebords tranchants de ma cage thoracique alors que je tentais de me souvenir de sa voix. Imagine all the people, living life in peace. Je tendis les bras en me raccrochant aux brides de ses acoustiques poignantes. Ses mots résonnaient dans ma tête comme un écho lointain, mélangé entre les mugissements d'une mer déchaînée et l'éclat doré d'une brise estivale. Elle possédait une puissance fulgurante. Elle semblait raconter mon histoire sans reliefs, sans noirceurs et sans marques de douleurs. Je m’appelais Isaac Von Ziegler et je m'étais sacrifié avant de me briser en mille éclats. J'esquissai un mouvement de recul entre les sièges. Une larme perla au coin de mon œil alors que je bousculais maladroitement un autre soldat. Le pied de sa chaise grinça, violant la quiétude de la pièce, attirant l'attention sur mon expression tordue. Je fronçai les sourcils d'un air bourru avant de m'évanouir dans la foule. Je n'avais pas besoin d'en entendre d'avantage. J'avais déjà découvert les méandres de mon âme. Il n'y avait plus rien en moi. Aucune passion, pas de bienveillance. Seulement des promesses. Je me redressai en agitant fébrilement les bras dans le couloir. Je ne pouvais pas partir. J'avais déjà reçu plusieurs avertissements à cause de mes absences répétitives, alors, je restai là, prisonnier de ma torpeur, le dos adossé contre un mur qui menaçait de s'écrouler sous le poids de mes désillusions. Je déglutis en pressant mes poings sur ma gorge. Il y avait tellement de sentiments dans ma poitrine. Je ne m'étais jamais senti aussi étroitement enlacé à une autre femme. Ma respiration sifflait entre mes lèvres. J'avais l'impression de tromper Olivia en étant aussi intime avec une voix. Je plaquai mes mains tremblantes sur mon visage. Je glissais sur le sol et demeurai flétri tout le long de la représentation. Je n'avais pas supporté l'essence du sentiment. Je n'avais pas supporté d'être humain à nouveau.
Les silhouettes se reconstruisaient dans l'espace. Le groupe de réinsertion s'activait dans le bâtiments. Il y avait une visite au programme, une sorte d'interaction entre les militaire et les musiciens, entre les malades et ceux qui pensaient les guérir. Je me redressai avec lenteur. Ma démarche vacillante accompagnait les mouvements de la foule. J'étais seul dans mes pensées. J'étais seul dans les souvenirs de ma captivité. Puis soudain, ce visage mélodieux transperça le silence. Je m'arrêtai devant Gloria. Cette étrange complicité faisait de nous les héros d'un roman où les étincelles de la liberté auréolaient les nuages grisonnants de l'hiver. «Je...» Murmurai-je en me redressant. Je la regardais avec intensité, les paupières tremblant sous les tintements de ses chants. Je les entendais encore. Je ne les avais pas oublié. Imagine all the people, living life in peace. Je plissai le front en secouant les épaules. Tout était si compliqué. Quand la guerre disparaît, les images qui restent ne lui ressemblent pas. Il n'y avait plus aucun raison de se battre pour l'honneur lorsque ce dernier prenait la couleur du sang. «Je suis désolé.» De ne pas rester jusqu'à la fin. De ne pas respecter la vie. De ne plus attendre, de respirer. D'avoir survécu. Je me sentais désolé.

Revenir en haut Aller en bas
Anonymous
Invité
Invité
() message posté Lun 21 Mar 2016 - 17:27 par Invité
ISAAC & GLORIA (all the angels have fallen, and all the devils have risen, i can’t distinguish the light from the dark, or the right from the wrong, but i’d risk staining my lips black, if it meant feeling your fire again. i should never have let you fall.) Il était parti en pleine représentation. C’était ce à quoi pensait Gloria, en cet instant ; elle l’avait observé disparaître de la salle avant de reporter son attention sur un point perdu au loin, au-dessus de l’audience. D’ordinaire, elle avait l’habitude d’observer son public dans les yeux comme pour tenter de trouver au fond de leurs prunelles l’essence même de ces âmes qui l’écoutaient. Cependant, en cet instant, elle était distraite ; distraite parce qu’il était parti, distraite parce qu’il s’était envolé dans un écran de fumée. Elle était habituée à observer les autres s’échapper de son aura lorsqu’elle chantait dans la rue ; après tout, les passants allaient et venaient entre ses croches et ses double-croches, se perdant dans la mélancolie de ses partitions et dans le rythme de ses raps improvisés. Elle ne les retenait jamais, aimant presque l’idée qu’ils étaient des ombres dans son existence qu’elle ne connaîtrait probablement jamais. Elle ne savait pas d’où ils venaient, où est-ce qu’ils allaient, ce qu’ils faisaient et ce qu’ils aimaient, et elle adorait cette part de mystère qui enveloppait ces individus-là, ces individus qui lui prêtaient suffisamment d’attention pour l’écouter chanter. Cependant, cela n’avait pas semblé être la même chose en cet instant—il n’était pas parti de son plein gré, il n’était pas parti parce qu’il avait eu autre chose à faire de sa journée. Gloria avait capté l’expression de profonde mélancolie qui avait envahi ses traits bourrus et son visage mangé par sa barbe avant qu’il ne se détourne complètement. Elle l’avait entraperçu et cela l’avait profondément marqué, comme s’il y avait eu derrière son visage un vécu bien plus dramatique que ce qui lui était possible d’imaginer.
Elle savait que c’était le cas, au fond. Son professeur de chorale les avait prévenus, tous, autant qu’ils étaient—ces réunions d’anciens militaires étaient bien plus comparable à des réunions de survivants, de survivants traumatisés par les horreurs de l’humanité. Elle s’était doutée qu’ils seraient hantés par les fantômes de leurs camarades, hantés par les douleurs qu’ils connaissaient encore. Mais elle ne s’était pas attendu à cela. Mais, enfermée dans sa tenue trop sage qui ne lui correspondait pas pour faire bonne figure, elle s’était sentie dépassée par ces ondes qu’elle recevait d’eux. C’était comme si elle capturait leur tristesse. Comme si elle ressentait leurs souffrances perpétuelles.
Et elle avait usé tout cela dans ses mots, dans ses paroles, pour finalement chanter à plein poumon ce désespoir devenu sien.
Ils avaient fait des arrangements à la chanson de John Lennon pour qu’elle convienne mieux à son coffre. Gloria s’était donc perdue dans les notes chargées d’émotion et de profondeur jusqu’à finalement tenir la dernière avec tout son coeur, tout son souffle, et sa voix disparut dans le silence sourd de la salle. Finalement, les auditeurs applaudirent avec retenue et elle esquissa un sourire, se retirant pour retrouver les rangs de ses camarades de la chorale. Ils se prirent tous par la main avant de s’avancer jusqu’au bord de l’estrade, saluèrent et se dispersèrent.
Gloria appréhendait. Gloria appréhendait la rencontre avec son public. D’ordinaire, elle aimait cela ; elle ne parlait pas beaucoup mais elle appréciait croiser les visages de ceux qui l’écoutaient pour les observer d’un peu plus près. Elle leur offrait des sourires, ils murmuraient quelques paroles et elle se sentait transportée, transportée au loin, là où son esprit aimait se perdre parmi les étoiles. Cependant, en cet instant, elle ressentait déjà bien trop leurs douleurs pour s’approcher d’elles encore plus. Elle ne savait pas si son coeur pouvait les endurer. Elle ne savait pas si elle, petite fille des rues, petites filles du Nord de Londres, pouvait survivre au quart de ce qu’ils avaient vécu.
Puis, finalement, il vint se mettre devant elle. Elle fut surprise par sa taille—il ne mesurait qu’une poignée de centimètres qu’elle, puisqu’elle était grande. Mais ce n’était pas une question de chiffres. Il avait les épaules affaissée, comme s’il portait le poids du monde sur son dos. « Je… » commença-t-il. Il se redressa et ses yeux se posèrent dans les yeux. Il y avait quelque chose de captivant dans son regard, comme s’il tentait de lui crier mille-et-une choses à la fois ; comme s’il essayait de s’exprimer alors que sa bouche refusait de le faire. Il avait pleuré. Gloria le voyait. « Je suis désolé. » Elle fronça les sourcils. Elle ne s’était pas attendue à des excuses parce que personne ne s’était jamais excusée auprès d’elle—pourtant, il était bien loin de lui avoir fait un affront, contrairement aux autres. « Il n’y a pas de mal, »  répondit-elle avec douceur, sa voix redevenue aussi faible qu’un murmure. C’était toujours ainsi, il n’y avait que lorsqu’elle chantait que l’on entendait vraiment. Que lorsqu’elle chantait qu’elle donnait l’impression de vouloir être entendue. « J’espère surtout que vous n’avez pas trouvé le choix de chanson déplacé. On s’est longtemps posé la question avec la chorale. »  Elle haussa doucement les épaules avant de finalement tendre les bras vers elle et les passer autour des épaules du soldat. Elle le serra contre elle avec pudeur, ne sachant pas réellement si elle avait le droit. Elle aurait pu lui expliquer comment elle avait tenté de proposer une de ses chansons pour cette représentation plutôt que reprendre un titre déjà entendu une centaine de fois ; elle aurait pu lui dire comme son interprétation était bien pale à côté de celle de John Lennon. Ou, encore, elle aurait pu lui décrire comme les étoiles changeaient à mesure qu’un soldat perdait la vie au combat, simplement parce que sa loyauté faisait de lui un être astral ; mais, elle préféra les gestes, parce qu’elle avait toujours trouvé les mots dérisoires.
Ils n’exprimaient jamais la palette entière de ses pensées. Jamais.
Revenir en haut Aller en bas
Anonymous
Invité
Invité
() message posté Sam 9 Avr 2016 - 1:19 par Invité

And the more she could imagine this island, the less she liked the real world. The more she could imagine the people, the less she liked any real people. J'avais deviné ses mélodies avant même qu'elle ne fasse vibrer le son. Ses mots ne m'effrayaient plus. C'était les images qui hantaient ma vision, les cris incessants de la guerre. Tous mes souvenirs semblaient vivants, dictés par mon esprit tourmenté par des années de séquestration. Je me redressai au milieu du couloir. La horde de soldats se dispersait dans le bâtiment, leurs silhouettes menues et chevrotantes se noyaient dans une masse opaque et gluante. Ils se mélangeaient tous. Malgré la gravité avec laquelle ils avaient vécu, ils continuaient à bouger entre les remparts, le regard vitreux sur les murs, la bouche courbée dans une expression déchue. J'ondulais dans ce chaos. Les notes de la musique picotaient mon épiderme. Je repensais à la chanteuse ; Gloria Kipling. Son nom était inscrit dans ma mémoire comme une cicatrice brûlante. Une partie de mon âme buvait ses refrains en y ajoutant du sentiment. Elle semblait si saine et passionnée. Son talent était acquis tout comme le mien. Je savais manier les armes, bouger avec agilité et atteindre la cible. Je savais répondre aux ordres, même si ces derniers me contraignaient parfois à abandonner mon humanité. Même s'ils me poussaient vers la démesure. Je vivais avec mes chimères et mes troubles psychologiques. L'irréalité tombait sur mon visage comme un voile sur la scène, et chaque soir, je retrouvais les soupirs agonisants de mes victimes. Oh le temps ne faisait que me vieillir. Il ne produisait aucun effet sur ma douleur, si ce n'est la rendre plus profonde. Malgré la sollicitude d'Olivia et mon envie de conciliation, je restai diminué. J'étais incapable de faire le grand saut. La lutte était ininterrompue dans mon esprit. J'avais quitté ma cellule. J'étais rentré au pays et j'avais embrassé ma femme. Mon cœur était ici, palpitant entre ses mains délicates, revigoré par l'espoir qu'elle m'avait insufflé. Mais j'avais laissé quelque chose la-bas. Une emprunte précieuse de mon sang entre les chaînes de la guérilla. Ils avaient bafoué mon intégrité, mon humilité en tant que sniper. On avait torturé mon corps avec tellement de véhémence, jusqu'à ce que les coups pénètrent à travers la chair pour s'étendre sur mes qualités morales. Ils avaient mutilé la carapace. Et je n'osais pas imaginer les ruines à l'intérieur. Je relevai ma tête vers la silhouette qui dessinait sous les néons. Sa chevelure ondulante capturait la lumière avec une légèreté funambule. Je demeurai figé sur place. Je devais réapprendre à communiquer avec les autres, à excuser mes mauvais comportements. Mais c'était trop dur d'exprimer un sentiment qui n'existait pas. « Il n’y a pas de mal, »  Déclara-t-elle dans un murmure presque inaudible. Je me penchai lentement vers son profil, l'oreille tendue afin de filtrer les battements de ses paupières. Elle était élancée mais la finesse de son visage lui donnait un air enfantin. « J’espère surtout que vous n’avez pas trouvé le choix de chanson déplacé. On s’est longtemps posé la question avec la chorale. »  Je pinçai les lèvres en hochant la tête. Elle avait posé une question pertinente. Je me raclai la gorge en croisant les bras sur mon torse engourdi. Les vérités se bousculaient dans ma tête. «Oui. Ce n'était pas très délicat. Mais c'est le thème de la journée. Il n'y avait pas de choix parfait.» Toutes les chansons étaient blessantes. Toutes les chansons réveillaient les images atroces de la guerre. J'ouvris la bouche afin de laisser échapper un soupir mais elle se redressa tout à coup, tendant les bras vers mes épaules afin de me serrer dans une étreinte poignante. C'était une sensation désagréable, comme si elle détachait l'os de la chair. Comme si subitement, mon cœur s'était mis à jaillir, revenant des profondeurs de l'abîme. Pendant quelques secondes, il s'arrêta de battre, à la fois soulagé et triste de constater combien la proximité de Gloria était saisissante. Je plissai les yeux entre les plis de son col. Les larmes perlaient au ras de mes cils mais je réprimais mes impulsions. Je ne bougeais pas. J'hésitais à la rejeter, à me retirer pour plonger à nouveau dans la solitude. Mais je revoyais sa silhouette. J'imaginais les vibrations de sa voix qui flottaient comme des nymphéas humides à la surface de l'eau. «Arrêtez, s'il vous plaît. C'est tellement injuste.» Marmonnai-je en frissonnant. Je n'avais pas la force de m'éloigner, alors, je lui demandais, je la suppliais de me libérer. Mes souvenirs, il y en avait des centaines sur lesquelles je mettais un nom. Ils étaient encore présents. Ils surgissaient tout le temps. Je voulais guérir, retrouver un semblant d'équilibre mais la conscience glissait inlassablement. Je me rappelais tout ce que j'avais oublié. Je ressentais tout ce que j'avais refoulé. La peur. La peur de mourir pour de vrai. Je n'avais pas franchi la limite. Mon sacrifice était indigne. Ma résignation avait été fausse pendant de longues années. J'étais torturé par toute cette incertitude, et sans m'en rendre compte, les mots tombèrent comme confession sur son cou. «Pourquoi moi ?» Pourquoi étais-je revenu ? Pourquoi avais-je survécu ? Je ne le méritais plus que les autres. Je ne le méritais pas tout court.

Revenir en haut Aller en bas
Anonymous
Invité
Invité
() message posté Jeu 28 Avr 2016 - 19:24 par Invité
ISAAC & GLORIA (all the angels have fallen, and all the devils have risen, i can’t distinguish the light from the dark, or the right from the wrong, but i’d risk staining my lips black, if it meant feeling your fire again. i should never have let you fall.) Elle était étrangère à cette douleur-là. Gloria observait l’ancien soldat et elle s’était surprise à désirer pouvoir lui donner un remède à ses malheurs ; elle aurait aimé pouvoir lui dire que coucher sur papier tout ce qu’il avait sur le coeur lui permettrait d’avancer, que cela avait marché pour elle lorsqu’elle avait écrit une chanson pour son enfant mort bien avant sa naissance. Elle aurait aimé pouvoir lui expliquer que tout ceci n’était que temporaire, qu’il allait s’en sortir et, qu’étrangement, elle en était persuadée même si elle ne le connaissait pas, même s’il n’était qu’une partition inconnue dans l’opéra de son existence. Elle aurait aimé pouvoir lui adresser tout cela, oui, lui adresser tout cela et l’aider de la meilleure façon qu’il soit. Mais, malheureusement, elle ne parvenait pas à ouvrir la bouche pour s’exprimer à voix haute ; les mots ne réussirent pas à lui échapper et elle eut la terrible envie de prendre un morceau de papier et un stylo pour mettre de l’encre sur les paroles qui se bousculaient dans sa tête.
Après tout, c’était ainsi que Gloria fonctionnait. Elle avait beaucoup de choses qui se passaient dans son esprit—oh, tellement de choses qu’elle ne parvenait jamais à saisir toutes les facettes de ses pensées, si bien qu’elle s’y perdait, encore et encore, si bien qu’elle s’y perdait et qu’elle y sombrait bien souvent. On la trouvait mystérieuse mais en réalité elle n’était que la victime de son esprit. Elle était prisonnière. Prisonnière de cette voix qui refusait de s’exprimer en parlant. Prisonnière de ces mots qui lui venaient en rimes. Prisonnière. Prisonnière. Prisonnière.
Prisonnière comme tous ces soldats pouvaient bien l’être dans leur tête.
Elle était désolée, au fond. Désolée de ne pas pouvoir faire plus de choses pour lui, désolée qu’il soit parti en plein milieu de leur représentation parce qu’ils avaient incroyablement manqué de tact. Elle culpabilisait, également, parce qu’elle se doutait bien qu’elle aurait pu s’en rendre compte avant même qu’il ne soit trop tard—pourtant, elle avait quand même chanté cette chanson, pourtant elle avait quand même laissé sa chorale décider de la liste de morceaux qu’ils allaient interpréter. Elle était étrangère à cette douleur-là. Peut-être était-ce pour cela qu’elle avait fait des erreurs, peut-être était-ce pour cela qu’elle ne s’était pas opposée à la représentation. Elle n’en savait rien. Il n’existait peut-être pas de véritable explication, après tout. « Oui. Ce n'était pas très délicat. Mais c'est le thème de la journée. Il n'y avait pas de choix parfait, »  lui répondit-il finalement. Elle l’observa avec un doux sourire aux lèvres. Cependant, elle désapprouvait ses paroles. Cependant, elle était bien loin d’être d’accord avec lui. Le choix parfait existait. Le choix parfait existait mais il était hors de sa portée parce qu’elle était étrangère à cette douleur-là, parce qu’elle était encore bien incapable de mettre des mots sur ce que l’ancien soldat en face d’elle pouvait bien ressentir.
Mais sa décision était déjà toute prise. En passant ses bras autour de lui pour lui donner du courage, elle se fit la promesse d’écrire une chanson un jour, d’écrire une chanson reflétant précisément cette douleur qui lui était étrangère. Gloria voulait comprendre mais, avant tout, elle voulait exprimer les maux du monde ; elle était persuadée qu’il s’agissait de la meilleure manière pour soigner les plus grandes blessures de la population. Elle était bien naïve Gloria, au fond ; mais peu importait réellement parce qu’elle vivait dans sa tête, elle vivait dans son monde, perdue au beau milieu des étoiles. « Arrêtez, s'il vous plaît. C'est tellement injuste, » reprit-il finalement. Elle fronça les sourcils et fit un pas en arrière pour ne pas accroitre son malaise ; elle ne s’était pas rendue compte que tout son corps s’était contracté sous sa prise, qu’elle l’avait embarrassé, qu’elle avait fait un nouveau faux-pas. Il avait les yeux humides et cela lui paraissait si étrange de voir un homme qui semblait si fort pourtant être si fragile. Il n’y avait pas de honte dans la faiblesse, selon elle ; cependant, cela semblait si étrange de constater  que n’importe qui pouvait se laisser abattre. « Pourquoi moi ? »  Elle l’observa en silence. Elle ne savait pas à quoi sa question pouvait bien référer tant elle était vaste ; pourquoi était-ce lui à qui elle était venue parler, pourquoi était-ce lui qu’elle avait pris dans ses bras, pourquoi était-ce lui qui avait été choisi pour survivre à ses camarades. Gloria n’avait pas de réponse. Non. « J’aime croire que tout est écrit dans les étoiles, »   finit-elle par dire. Elle fit un pas en arrière afin de donner à l’ancien soldat tout l’espace dont il avait besoin. Elle l’observa dans les yeux avec tout le sérieux du monde parce qu’elle pensait réellement ce qu’elle exprimait à voix haute. C’était ainsi qu’elle définissait le monde. Ainsi qu’elle le décelait. « Et, vous savez, les étoiles sont si belles. Intouchables. Majestueuses au-dessus de nos têtes. Alors, même si elles sont entourées d’obscurité, même si elles nous font subir de terribles épreuves, elles ne peuvent que renfermer quelque chose de magnifique. »  Malgré les horreurs, malgré les épreuves, Gloria demeurait persuadée que cela valait la peine. Parce que le monde était beau. Parce que le monde était magnifique. Parce que les astres étaient des entités pleines de promesses qui n’attendaient que leur heure pour montrer l’étendu de leur magnificence.
Revenir en haut Aller en bas
Anonymous
Invité
Invité
() message posté Mer 11 Mai 2016 - 4:23 par Invité

And the more she could imagine this island, the less she liked the real world. The more she could imagine the people, the less she liked any real people. Je suffoquais dans son étreinte. L’espace de quelque secondes, je m’étais senti porté par la sensation de flottement qui précédait l’agonie. Mon corps s’était crispé entre ses bras chétifs. Mon odeur s’était mélangée aux souvenirs putrides qui recouvraient mes paupières. Ce n’était pas mes larmes qu’il fallait craindre. C’était le fantôme des soldats, la vision des cadavres qui s’entassaient sur le sol dans une forme amorphe et bicolore. Rouge. Noir. Le monde était rouge et noir. Je me redressai en cherchant un repère dans le couloir. Mon regard remontait sur les parois des murs avant de s’évanouir entre les arabesques du plafond. Les néons de la lumières irritaient mes yeux vermeils. L’harmonie des sourires et les promesses de guérison pompaient l’air tout autour de ma poitrine. Gloria Kipling était étrangère à ma douleur. Et parfois, je l’étais aussi. Je me sentais rompu. Il n’y avait plus de lien entre mon corps et mon esprit, seulement la déchirure. Un soupir s’échappa de mes lèvres alors que je me redressais dans la pénombre. Mes prunelles brillaient tristement, dévoués aux arceaux, aux voûtes et aux barrières qui s’étendaient dans le cachot confiné où je trouvais encore refuge, malgré ma liberté apparente, malgré mes efforts pour retrouver l’équilibre. Je vacillais lestement dans le vide. Mes jambes étaient flageolantes, portées par la brise glaciale qui ondulait dans le bâtiment. Le groupe de visite était déjà loin. La chorale avait chanté. Les soldats avaient suivi la mélodie. Et nous étions là. Nous étions las de croire aux déclarations fugaces. L’espoir était devenu utopique. Le miracle était une notion métaphysique, unique et saisissante. Mais elle était aussi mensongère. L’existence était trop complexe pour être réduite au sentimentalisme dérisoire. Les talibans avaient choisi de m’épargner. Chaque jour, Hakim et son compagnons me torturaient en évitant d’appuyer sur mes points sensibles, en glissaient leurs lames à la limite de mes organes vitaux, sans toucher le tissu, sans crever la chaire. C’était lâche de m’octroyer le mérite du survivant, de me hisser sur les stalles de la miséricorde. Parce que je n’étais pas un héros. Je n’étais même plus un soldat. L’armée m’avait destituée de mon rang. J’avais perdu mes privilèges et mon honneur. Mon identité était brisée et les étreintes bienveillantes de cette petite chanteuse ne pouvaient pas me sauver. Ma force s’était transformée en faiblesse. Ma capacité à exprimer l’émotion s’était écrasée sous les flux anarchiques de mes pensées macabres. Je n’étais pas suicidaire. Je ne songeais pas à me tuer. Ce serait stupide. J’étais déjà mort. Je relevai mon visage, les traits tirés par l’incompréhension et la tristesse. Les mélodies de sa chanson résonnaient encore dans mes oreilles. J’étais sorti avant la fin de la représentation. Pourtant, j’en avais écouté assez. Je connaissais chaque mesure jouée par le piano. Je me rappelais des trémolos de sa voix alors qu’elle s’enchâssait dans les rythmes des instruments. Elle me regarda d’un air incrédule. Je pouvais décelais toute sa sollicitude, son envie qui se confondait avec le besoin d’aider, de sacrifier son don pour guérir les malheurs des autres. Mais je rejetais sa compassion. Je rejetais sa pitié. «J’aime croire que tout est écrit dans les étoiles,» Annonça-t-elle sur un ton soutenu. Je voulus esquisser un sourire courtois, lui témoigner la profondeur de ma reconnaissance et partir. Mais j’étais figé dans ce coin de la pièce. Mes muscles étaient paralysés par la morsure du froid. Elle me parlait d’étoiles et je pensais que tous les astres étaient morts dans le ciel. Nous étions opposés dans nos idéologies. Nous étions opposés parce qu’elle était magique et que j’étais détruit. «Et, vous savez, les étoiles sont si belles. Intouchables. Majestueuses au-dessus de nos têtes. Alors, même si elles sont entourées d’obscurité, même si elles nous font subir de terribles épreuves, elles ne peuvent que renfermer quelque chose de magnifique.» L’instant où je l’avais découvert sur l’estrade était inoubliable. Elle était majestueuse au milieu des autres. Sa voix avait transformé mon regard vitreux. Elle possédait une âme particulière. L’essentiel c’était qu’elle y croit. Pas moi. Gloria me demandait de m’abandonner, de suivre cette image sublimée qu’elle se faisait des constellations. Mais elles ne brillaient que la nuit. Elles se laissaient dévorer par les reliefs de la lune qui surplombait leur éclat argenté. Je plissai le front en esquissant quelques pas dans l’allée. Ma démarche était claudicante, troublée par les formules qui se composaient dans mon crâne. J’avais tellement de choses à dire. Tellement d’aveux cachés. « Il ne suffit pas d’être magnifique. Renfermer la beauté ne suffit pas, dans le sens propre ou figuré.» Marmonnai-je en haussant les épaules. J’étais presque défaitiste. Je réalisais qu’il était difficile de maintenir une conversation saine avec un homme hargneux. Je pris une profonde inspiration. «Je suis désolé. Je ne dis pas que vous êtes superficielle. J’ai juste arrêté. Vous savez, de regarder vers le haut.» Pendant des années, le toit recouvrait le ciel. Les cloisons bloquaient ma vue. Si bien, que maintenant, je me trouvais incapable d’apprécier les lueurs qu’elle décrivait avec autant de véhémence. Je n’éprouvais rien. Aucune admiration. Aucune satisfaction. Seulement, l’amour que je portais pour ma femme. «Je regarde les étoiles. Et c’est juste des étoiles. Comme une table est une table. Une chaise est une chaise.» Soufflai-je en levant le bras vers mon front. Je pressai mes tempes en sentant une légère migraine. J’étais dissipé dans mes propos. J’étais dissipé tout le temps.


Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé
() message posté par Contenu sponsorisé
Revenir en haut Aller en bas
Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Revenir en haut
London Calling. :: It's over :: Corbeille :: Anciens RP
» song for someone + (gloria)
» she was like the moon–part of her was always hidden away. / gloria
» today and tomorrow, I'll be there + Peter
» (fb) the magnetism swirls in the electric ocean within us + gloria
» today is the day we leave ✧ léo & barty

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
-