détention - Reese

Lorsque la porte en métal se referma derrière lui, Reese poussa un large soupire. Etre emmené en détention pour un simple graffiti idiot, c'était trop... En plus, ce n'était même pas lui qui l'avait fait, il avait juste accompagné... Malheureusement, il n'avait pas eu suffisamment de chance ce soir-là et avait trébuché en s'enfuyant. Bon dernier et sans qu'un seul de ses "amis" ne se décident à lui venir en aide, il avait fini par se faire passer les menottes, accusé de vandalisme, comme un malpropre. Et comme si cela ne suffisait pas, il avait fait preuve d'une grande insolence avec les autorités. Ce n'était pas la meilleure des idées, mais c'était son caractère et sa façon de faire en toutes circonstances. Les déboires qu'il avait eu auparavant n'avaient pas suffi à lui faire comprendre qu'il était dans la mauvaise voie.

Reprenant ses esprits et après avoir encore maugréé quelques jurons, le jeune homme jeta un oeil sur la cellule. Il n'était pas seul et ce n'était pas pour le rassurer. Le type présent avait l'air de faire partie d'une catégorie de marginaux... Et vu l'état de son visage, il venait de se battre. S'il était là, c'était certainement qu'il n'était pas un ange. D'ailleurs, il avait l'air de s'impatienter de crier envers les policiers. Reese préféra l'ignorer et aller s'installer à l'autre bout de la cellule pour ne pas risquer de le mettre en rogne. Il pariait que, même mineur, personne ne viendrait le sauver à temps dans ce lieux.

Poussant un soupire, il s'assit, gardant toujours un oeil méfiant sur son compagnon. Lorsque ce dernier lui adressa la parole, il sursauta et se redressa légèrement. Il tourna la tête, comme s'il avait espoir qu'il n'était pas la cible de cette question, mais il savait parfaitement qu'il était seul avec ce type chelou. "Euh...." répondit-il, un peu prit de court. Devait-il répondre ou quoi? Comment devait-il réagir ? "Reste où tu es..." déclara-t-il finalement, calmement, en observant le fait que le jeune homme avait l'air de vouloir s'approcher de lui. Du mois, c'était l'impression qu'il avait. Mais le sentiment d'insécurité grandissante qui le possédait devait y être pour quelque chose. "Si tu t'approches à moins d'un mètre de moi, je crie au viol...." ajouta-t-il en s'écartant pour se mettre dans un coin de la pièce. Reese faisait souvent le fier, mais il lui arrivait d'être un trouillard. En même temps, entre un vandale qui a été enfermé pour un graffiti qu'il n'avait même pas fait et un type tatoué de partout qui s'est battu avec ce qui semblait être une meute de loups à mains nues... Y avait un monde !
Mais enfin pour le coup, il avait fait preuve d'une immense imagination en parlant de crier au viol. Reese déglutit, se demandant pourquoi, pour une fois, il ne s'était pas contenté de se tenir à carreaux et de jouer les gentils garçons.

L'énergumène effrayant semblait étonné de la réaction de Reese et tenta même de prouver sa bonne foi en levant les bras au ciel, lui indiquant qu'il ne comptait pas lui faire de mal. Reese lui adressa un drôle de regard, encore bien méfiant. Ce gars avait l'air du marginal par excellence... Alors pouvait-il croire en sa parole et se calmer? Et puis, d'abord, pourquoi voulait-il tellement lui parler? "Je parie que tous les violeurs disent ça avant de passer à l'acte." répliqua simplement l'adolescent en se redressant et se calant encore plus dans le lit, sur ses gardes, prêt à donner des coups si nécessaires. Puis, finalement, après que quelques minutes soient passées, il se relâcha. Ce serait tout de même le comble qu'il lui arrive dans une cellule, en plein poste de police. Et puis, l'autre n'avait pas l'air bourré et... Ca se trouve, ce n'était qu'un pauvre type qui voulait discuter avec quelqu'un... Et puisque Reese était seul, enfermé avec lui dans ce lieu, il était l'unique interlocuteur probable. Sérieusement, qu'est-ce qui lui avait pris de suivre ses amis cette fois? Certes, il aurait l'air d'un balèze devant ses potes, le lendemain au lycée... Mais à quel prix... Ryder allait sans doute encore une fois lui confisquer son skate... Et cette fois-ci, ce serait pour toujours.

L'autre lui demanda pourquoi il était là. Bonne question. "J'ai tué quelqu'un." rétorqua-t-il avec insolence et un certain regard noir. C'était un de ses fantasmes de dire ça si un jour il était arrêté par la police et qu'il devait s'expliquer à ses camarades de cellules. Voyant une lueur inquiète naître dans le coin des pupilles de son interlocuteur, il se décida finalement à calmer le jeu et à dire la vérité. "Vandalisme." déclara-t-il simplement, en le sortant complètement du contexte. "Je suis là pour vandalisme. Un mur tagué." Même si en fin de compte, il avait été plus observateur que complice de cet acte. Mais il aurait pu le faire également. A force de traîner avec des gens peu scrupuleux du respect des autres et du matériel. "Et toi, alors?" demanda-t-il finalement, se rapprochant doucement, mais sûrement, de l'homme tatoué. Il avait encore un peu la frousse, mais au pire, il ferait ce qu'il avait dit plus tôt: il crierait au viol dans le cas d'une agression. "Qui t'a refait le portrait comme ça?" demanda-t-il par la suite, le regardant avec curiosité. "T'es un dealer de drogue?" Ouais, avec Reese, les choses étaient assez... peu complexes et il ne se gênait pas de poser des questions ouvertement.

Reese avait dû entendre et regarder trop de faits diverts et de séries pour avoir une telle idée en tête. Comme quoi, malgré son jeune âge et l'espoir de la jeunesse, l'oeil neuf comme on le dit si bien, il était déjà bien pessimiste et ne parvenait pas à voir d'abord le bon côté des gens. Mais enfin, à notre époque, dans notre société, mieux valait être méfiant, pour sa propre sécurité. Son interlocuteur avait ri, l'air amusé par la crainte de notre jeune skateur. Il lui répéta qu'il n'avait rien d'un si sordide individu, même s'il avouait pouvoir faire peur avec sa dégaine. Reese poussa un soupir. L'autre alla même jusqu'à lui avouer qu'il était homosexuel, avant de poursuivre que ce n'était pas pour autant que notre lycéen l'attirait. Reese fronça les sourcis et fit la moue. "J'ai dix-sept ans, pas seize! Et ça fait toute la différence." renchérit-il. Ce n'était parfois pas plus mal de faire plus jeune, mais sur le coup, il voulait que l'autre le voit comme un homme et pas comme un pauvre petit gamin enfermé ici par erreur. Toujours cette impotance qu'il donnait à rendre de lui l'image de quelqu'un qu'il n'était pas.
"Mouais.... Ca prouve juste que t'es pas un pédophile, au fond." rajouta-t-il ensuite. Mais là, c'était plus pour faire le petit malin que parce qu'il croyait toujours en l'hypothèse d'être enfermé dans la même cellule qu'un violeur. Il suffisait de voir et entendre l'autre parler pour comprendre qu'il affirmait la vérité. De toute façon, s'il voulait lui faire quelque chose, il n'aurait très certainement pas perdu de temps en bavardages inutiles et serait déjà passé tout bonnement à l'acte.

Reese haussa simplement les épaules face à la remarque de son interlocuteur. Il ne savait pas si c'était de l'ironie ou si l'autre ne faisait que relever un fait, mais ce n'était pas la peine d'en faire tout un fromage. Il était soudainement en train de se demander comment son cousin prendrait la chose. D'habitude, il était très cool et se souciait guère des conséquences, mais pour le coup, il commençait à craindre une punition en rapport avec son activité favorite: le skate.


"Tu te retrouves dans tout ce bordel juste pour des insultes?" demanda-t-il. "Il a dit quoi pour te mettre en rogne à ce point?" Bah oui, cela étonnait un peu Reese. Il n'était pas du genre à répondre par la violence lui-même. Pourtant, il s'en prenait des insultes. Mais ce n'était pas un jeune homme sage non plus et il avait une grande gueule.

"Ah..." déclara notre lycéen lorsque son interlocuteur lui dit qu'il n'était pas un dealer, comme s'il était déçu de cet état de fait. "Tu fais quoi du coup? Un truc illégal quand même?" demanda-t-il naturellement. Quoi? Oui, d'accord, c'était pas un pervers détraqué, mais ça n'empêchait qu'il avait la dégaine d'un gars pas net. Et puis bon, au pire, que risquait-il à parler honnêtement. Bon, à force, l'autre finirait par croire que c'était Reese le type qui trompait dans des choses bien louches.