"Fermeture" de London Calling
Après cinq années sur la toile, London Calling ferme ses portes. Toutes les infos par ici You are my bestfriend and you don't even know it (Heaven) 2979874845 You are my bestfriend and you don't even know it (Heaven) 1973890357
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You are my bestfriend and you don't even know it (Heaven)

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() message posté Dim 12 Juil 2015 - 2:04 par Invité

“Because never in my entire childhood did I feel like a child. I felt like a tiny person all along―the same tiny person that I am today.”  Je m'étais encore réveillée dans un appartement vide. J'assumais parfaitement ma solitude, mais l'abandon de Tom, l'absence de mes parents et l’incapacité à plonger dans mes petites routines habituelles commençait à me peser. Mon rêve de devenir calligraphe était une création inachevée de mon esprit. Une possibilité lointaine, autant désirée que crainte. Néanmoins, je nourrissais secrètement l'espoir de parvenir à réaliser une part de cette fantaisie. Peut-être que la photographie pouvait parfaire ma fibre artistique. Peut-être que les tracés numériques pouvaient raconter mon histoire avec la même précision que les anciennes écritures. Je me redressai en quittant le bâtiment en direction du Hyde Parc. Le vent soufflait dans mes oreilles. Il murmurait les chants de l'espoir dans mes cheveux ondulées et m'emportait au milieu des roseraies et des sentiers de cailloux. Les silhouettes des passants oscillaient suavement sous mes yeux voilés de tristesse. Tous ces visages silencieux de commerçants, d'épiciers, de boulangers et de libraires disparaissaient au coin de la rue. Il s'abaissaient avec une expression maussade et quittaient soudainement le parc afin de commencer leur journée de travail. Je crispai ma prise sur mon appareil photo. Je tendis mes doigts engourdis vers le canon et pressai mes paumes de toutes mes forces contre le flash. L'objectif cliquetait. Il capturait les mouvements qui m'entouraient avant de reprendre sa forme initial. Alors, je frottai mon pouce contre le bouton à nouveau. J'appuyais sans cesse en agitant aléatoirement les mains. J'espérais que le monde pourrait s'arrêter de tourner pendant une seconde. Je voulais qu'il reste figé et que mon bras gauche soit le seul à vibrer au gré de mes pensées. Je voulais le voir trembler et reconnaître les premiers signes de la maladie. Cependant, faire face à la réalité, au lieu de me soulager, faisait naître dans mon âme un trouble et un souci immenses. Que vais-je devenir maintenant ? J'avais abandonné mes études. Ma mère n'avait pas assez d'économies pour subvenir à mes besoins indéfiniment et je n'avais aucun talent exploitable. Je ne pouvais pas être serveuse ou accomplir de tâches manuelles compliquées. Je ne contrôlais pas mes mouvements. Je ne contrôlais pas ma vie. Je la laissais passer, tranquillement, lentement, comme une légère brise à la surface de la serpentine. Mon cœur se serra douloureusement dans ma poitrine. J'avais si mal, mais on m'avait conditionné à souffrir dans le mutisme, avec discrétion, comme une poupée de cire cassée dont le sourire était immortel. Je saisis mon sac et cheminai à travers la promenade en élançant les jambes. Mes semelles craquaient contre l'asphalte mouillé, laissant échapper une petite note musicale que je trouvais amusante. Je roulai des yeux à travers les murs de la ville et songeai que l'architecture impériale de la capitale était elle aussi, porteuse de grâce et de beauté. Je pouvais retrouver la passion de l'artiste partout ailleurs que dans des parchemins, des hiéroglyphes ou des dessins. Que vais-je devenir maintenant ? Je ne me sens pas à ma place dans cette grande ville. Je passai devant le Buckingham Palace et soudain, ma petite chemise en flanelle se transforma en une magnifique robe de bal émeraude. Je fermai les yeux et je pouvais presque entendre les sifflements des violons annoncer la première danse. Je pouvais imaginer l'agencement parfait des invités, le scintillement des lustres et l'ambiance noble qui imprégnait les murs tapissés de toiles et de décorations colorées. Je pouvais parfaitement visualiser cette ambiance féerique, mais je n'avais plus dix ans. J'étais trop vieille pour fantasmer sur un comte de fée. Je m'attardai sur l'énorme portail en acier. Personne ne remarquait mon existence. Personne ne savait ce que j'endurais. Je battis des cils en comptant les espaces qui me séparaient de l'entrée ; une centaine, un millier peut-être. Le klaxon d'une voiture interrompu mes rêveries et j'haussai les épaules avec insolence avant de me rendre dans la rue des commerces.  Je flânais sur la terrasse avant de retrouver une petite brasserie au bout de l'avenue. Les vapeurs de vins et l'odeur des pâtisseries flottaient dans la pièce. Je sentis mon estomac se contacter, avide, affamé de mets succulents. C'est bon, je vais pouvoir manger. Je scrutai les lieux à la recherche d'un visage familier mais Heaven n'était toujours pas arrivée. Je m'installai dans une table reculée en croisant les bras. Un simple geste à la serveuse lui fit comprendre que j'attendais quelqu'un. Je me penchai en avant. Mes pensées étaient rythmées par les tiraillements de mes muscles et par la douleur vicieuse qui s'infiltrait dans mes os. Je ne voulais pas être malade. Je secouai les épaules. Je me mordis la lèvre inférieure comme une enfant , puis je déposai un roman sur mes genoux. Bien évidement, ce n'était qu'un leurre, une façon de jouer sur les apparences et de faire croire au monde autour de moi que j'étais une jeune femme accomplie. En réalité, j'étais incapable de comprendre les modalités de la littérature ou d'apprécier les tournures de phrases compliquées. Mon ambition était de copier les écritures et non de créer, d'inventer ou de retranscrire un message divin. Je soupirai en tournant mélancoliquement les pages. J'arborai une expression concentrée, les traits allongés et les sourcils froncées, comme si mon esprit était en plein analyse psychosomatique de l'univers. Alors que j'étais surtout préoccupée par  une part de gâteau au chocolat déposée sur le comptoir. Je salivais en imaginant le moelleux fondre dans ma bouche et s'écraser contre mes joues. Je ne remarquai même pas la présence de Heaven, ni son petit air sournois et intelligent. Je me tournai lentement. Elle me donnait toujours l'impression d'avoir une idée un peu folle derrière la tête. Ses yeux perçants se posèrent sur mon visage et je lui souris avec désinvolture. « Salut, la moche. » Hasardai-je en soulevant un sourcil. « Regarde, j'ai pas commandé, il fallait que je sois sûre que tu allais venir pour l'addition. » Blaguai-je en tapant des mains. Je lui désignai une chaise puis je l'observai avec un mélange étrange de nostalgie et d'amertume. J'avais détesté cette fille durant toute mon enfance. Je l'avais envié parce qu'elle portait le statut de la princesse que je convoitais tellement, et pourtant, je réalisai en rencontrant l'aura lumineuse qui flottait autour de sa stature présomptueuse, que ma haine était immature, qu'elle ne faisait que déguiser un profond attachement pour une amie de longue date. C'était ma meilleure amie depuis toujours et je ne m'en étais même pas rendu compte.
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() message posté Dim 12 Juil 2015 - 23:45 par Invité

Elsa & heaven — growing apart doesn't change the fact that for a long time we grew side by side; our roots will always be tangled. I'm glad for that. ✻ ✻ ✻ « Zacharie, Zacharie, Za-cha-riiie. »  Heaven sautillait presque sur place, son téléphone portable collé contre l’oreille. Elle s’amusait à faire les cent pas à l’entrée du Parc de St. James, presque affligée par le manque de réaction de son frère à l’autre bout du fil. Finalement, elle l’entendit maugréer diverses insultes avant de finalement se racler la gorge et lui accorder toute son attention. « T’es vraiment chiante, Heaven. Je ne pensais pas que ça puisse être possible mais tu es dix fois pire qu’avant. Tu ne penses pas que ce sont tes hormones de grossesse qui te p… »  Elle leva les yeux au ciel, ignorant sa remarque avec superbe, à un tel point qu’elle ne prit même pas la peine de l’écouter jusqu’au bout. Puis, finalement, quand plus aucun son ne se fit entendre à l’autre bout du fil, elle comprit que c’était de nouveau à son tour de parler, puisque son frère avait enfin terminé son discours moralisateur. « Zacharie, »  répéta-t-elle encore une fois, ne lâchant pas l’affaire, comme une enfant, comme une gamine. Elle entendit presque le sourire qui se dessina sur les lèvres de son frère mais celui-ci se garda bien d’exprimer son amusement à voix haute, préférant paraître grognon à la limite du grossier. « Qu’est-ce qu’il y a, sale mioche ? »   Un sourire victorieux illumina son visage quand son frère finit par rendre les armes et lui accorder toute son attention ; pour faire durer le suspens, elle mit quelques instants avant de finalement rendre. Elle se délecta de l’impatience de son aîné, elle apprécia les soupirs qu’elle perçut dans le combiné, elle rit intérieurement de sa bêtise comme si elle était réellement drôle, comme si elle était réellement amusante. C’était faux, bien entendu. Elle avait simplement réussi à agacer son frère mais, fidèle à elle-même, Heaven aimait la simple idée d’être sous les feux des projecteurs. « Devine qui je suis sur le point de voir, »  lâcha-t-elle finalement. Zacharie grogna, presque exaspéré. Et, elle, cela la faisait d’autant plus sourire. « Je n’ai vraiment pas la tête de jouer aux devinettes. Si tu veux, je peux toujours demander à mère de venir prendre le téléphone et de… »  Son air satisfait se décomposa et disparut de son visage, alors qu’Heaven cessait tout mouvement. Elle se renfrogna, guère satisfaite de la tournure de leur conversation. Elle cligna plusieurs fois des paupières et finit par pousser un profond et las soupir.  « Essais un peu de me mettre mère en ligne, »  répliqua-t-elle avant de se reprendre, sachant parfaitement que son frère en était capable.  « elsa Saint Claire. Tu sais, la fille de notre gouvernante. »  Il y eut un silence au bout de la ligne et, jetant un coup d’oeil à sa montre, Heaven se remit à marcher en direction du centre de Westminster. Elle eut le temps de s’arrêter au passage piéton le plus proche avant que son frère ne reprenne la parole. « C’est tout ? Tu me fais tout un cinéma pour ça ? »  lui demanda-t-il finalement. Heaven pouvait percevoir le mélange d’amusement et d’exaspération qui se trouvait dans sa voix.  « Mais c’est énorme comme nouvelle ! »  protesta-t-elle, traversant la route pour s’engouffrer dans une petite rue perpendiculaire à l’avenue principale. Elle entendit presque son frère peser le pour et le contre, avant de distinguer au loin les bruits d’une porte qui se claqua. Quelques murmures vinrent lui chatouiller l’oreille, mais elle fut bien incapable de saisir le sens de la conversation que son frère pouvait avoir avec une autre personne, à l’autre bout du fil.  « Tu me raconteras ce qu’elle est devenue, du coup, »  finit par reprendre Zacharie, abandonnant son cinéma de grand-frère exaspéré. « Je dois te laisser, c’est l’heure des soins. »  Le coeur d’Heaven se pinça et, même s’il ne pouvait pas la voir de là où il se trouvait, elle hocha doucement la tête.  « Amuse-toi bien, »  s’exclama-t-elle sans grand entrain. Son frère eut un rire vidé de toute conviction. « C’est ça. J’adore me faire tripoter par les infirmières, c’est bien connu. Allez, passe un bon après-midi. Salut. »  Heaven ne répondit pas. Elle n’entendit plus rien, plus rien du tout.
Leur mère avait sans doute déjà raccroché pour lui.
Elle rangea son téléphone dans son sac à main, continuant d’avancer parmi la foule. Un pli marquait son front alors qu’elle sentait l’inquiétude se déverser dans ses veines ; elle était soucieuse, oui, soucieuse en songeant à son frère qui connaissait des bons et des mauvais jours. Elle avait aisément pu deviner qu’il n’était pas en grande forme, et elle était presque déçue que son petit numéro pour l’amuser n’avait pas été suffisant pour le faire sourire. Elle enfonça ses mains dans ses poches avant de pousser la porte du café où elle avait rendez-vous, balayant la pièce du regard avant de repérer Elsa. Elle resta là quelques instants, ne sachant pas très bien si elle avait envie d’aller à sa rencontre ou si elle préférait conserver son passé dans une boîte perdue au fond de son esprit. Puis, finalement, elle se posta en face d’elle, une main posée sur son dos souffrant de ces vingt-six dernières semaines qu’elle avait passé à porter un être en son sein. Elsa finit par remarquer sa présence et lui adresser un sourire. « Salut, la moche, » l’accueilla-t-elle et Heaven arqua un sourcil. « Regarde, j'ai pas commandé, il fallait que je sois sûre que tu allais venir pour l'addition. » Heaven secoua la tête en levant les yeux au ciel, s’installant sur la chaise qu’Elsa lui désignait du bout des doigts. Elle observa ses traits fins, ces traits qu’elle avait connu par coeur en étant gamine, ces traits qui lui rappelaient désormais cette vie qu’elle avait eu dans le manoir familial. Il y avait eu des hauts et des bas, des bons et des mauvais jours, exactement comme pouvait en avoir l’expérience Zacharie actuellement. Dans tout cela, Heaven ne savait plus. Elle ne savait plus si elle aimerait revenir en arrière ou non. « J’ai toujours su que tu aimais particulièrement mon compte en banque, monkey butt, »  répondit-elle avec une suffisance feinte, avant de se mettre à sourire. Elle savait. Elle savait qu’Elsa aurait préféré être à sa place, autant qu’elle aurait préféré être à la sienne. Elles avaient toutes les deux vécu dans des mondes imparfaits. Elles avaient toutes les deux souffert à cause de leurs désillusions de gamines. « Et tu as vu, je ne suis pas en retard, »  ajouta-t-elle en papillonnant des yeux jusqu’à sa montre. « C’est toi qui étais cinq minutes en avance. »  Elle aimait jouer sur ça, elle aimait jouer sur ces principes qu’elle avait toujours rejeté. Elle était en retard de cinq minutes, oui. Mais comme elle avait pu le dire à Elsa, une lady n’était jamais en retard. C’était toujours les autres qui étaient en avance.
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() message posté Ven 24 Juil 2015 - 16:41 par Invité

“Because never in my entire childhood did I feel like a child. I felt like a tiny person all along―the same tiny person that I am today.”  Je crispai mes doigts autour de mes manches. Il y avait un ombre qui rampait à l'intérieur de ma poitrine, une peur insurmontable qui me retenait dans chacun de mes mouvements. Je fermai les yeux pendant quelques instants et songeai à mes balades nocturnes avec Milan. J'imaginais la sensation de liberté qui s'emparait de mon esprit à chaque pression de peinture, à chaque tracé que je dessinais sur les murs de la capitale. Les lignes irrégulières flottaient dans le vide avant de se rejoindre quelque part sur la façade. Et c'était beau de pouvoir créer à nouveau. Je baissai les yeux. Je n'étais pas nostalgique d'une époque ou d'un bref moment de complicité avec un ami. J'étais nostalgique d'une personne. Moi. Je sombrais dans l'oubli de toutes les valeurs qui me tenaient à cœur. J'avais abandonné mes études de calligraphie par dépit, mais je me rendais compte que ma passion était ancrée dans mon être. Il suffisait que je m'égare un peu et la douceur de mes rêves revenait au galop. Je pris une profonde inspiration avant de sourire à Heaven. Ses boucles blondes auréolaient son visage pâle. Je plongeais dans son regard océan, je me concentrais sur notre histoire et je me rendais compte de toutes les barrières sociales qui nous séparaient. Il y en a un paquet ! Elle était née pour régner. C'était une lady, et je n'étais qu'une fillette trop envieuse pour réellement apprécier sa compagnie. Les choses n'avaient pas beaucoup changé depuis. Je ressentais toujours une pointe de jalousie envers elle, probablement par habitude, mais j'étais assez mature pour quémander son attention. C'était la seule à me considérer comme un être entier malgré la maladie. Elle n'avait pas sourcillé la première fois que je lui avais parlé de mon Parkinson précoce. Elle ne s'était pas perdue dans les commodités usuelles ou les répliques réconfortantes. Heaven avait tout simplement rit. Parce que dans son monde, les blessures du cœur se drapaient par les voiles de l'indolence. Parce qu'elle ne voulait plus appartenir au passé, mais que la noblesse des grands monarques du passé coulait dans ses veines. Elle était vivante et chacun de ses gestes la rendait resplendissante, même lorsqu'elle s'appliquait à être différente. Je penchai la tête en plissant le front. « J’ai toujours su que tu aimais particulièrement mon compte en banque, monkey butt, »  J'haussai les épaules d'un air innocent. J'étais superficielle, elle ne m'apprenait rien. J'avais toujours été attiré par les strass et les paillettes. J'étais une pie voleuse qui ondulait suavement autour de l'éclat brillant de sa vie. Super comparaison ! Je fis la moue. « Je t'ai dis de pas m'appeler comme ça. » Murmurai-je d'une voix fluette. Je remuai le bout du nez avant de sourire au coin. J'étais tout de même amusée qu'elle se prête à mes jeux, qu'elle oublie le temps d'une rencontre toutes nos disputes puériles à propos de sujets dérisoires. Un léger frisson traversa mes doigts mais je ne laissai rien transparaître. Je continuais de la fixer. J'étais tellement obnubilée par l'expression divine qui glissait sur ses joues, que je n'avais pas pris la peine de détailler le profil arrondi de son ventre. Je n'avais pas remarqué qu'elle était enceinte, et que la vie battait dans sa chair comme un flux intermittent de magnificence. Je courbai la bouche. Il y avait des rumeurs sur sa rébellion. Des histoires étranges et peu glorifiantes, mais je ne pouvais pas me résigner à croire ces choses. Heaven avait  peut-être goûté à l'ivresse et aux méfaits de la drogue, mais aujourd'hui, c'était une princesse qui se dressait devant moi. C'était la femme que j'avais tant désiré devenir avant que mon existence ne s'effondre brusquement. Je me redressai légèrement. « Et tu as vu, je ne suis pas en retard, »  Fit-elle remarquer en s'installant. « C’est toi qui étais cinq minutes en avance. »  Je levai les yeux au ciel avant de rire avec euphorie. Elle était à l'origine de mes plus grandes frustrations d'enfance, et voilà que je me délectais de ses sous-entendus. Une Lady n'est jamais en retard. Je frottai mon index contre mon menton. Mais quand une jeune lady est destinée à être une héroïne, le caprice de cinquante familles de l'environ ne saurait prévaloir contre elle. Jane Austin l'avait écrit mais c'était Heaven qui vivait la concrétisation de ce destin de grandeur. Alors quoi moi, je n'étais que la fille de la servante. Celle dont le nom était cité à quelques pages de la préface mais qui disparaissait peu à peu au fil des lignes. Je ne faisais pas partie de l'intrigue. Je n'étais qu'une figurante.  « Je suis presque choquée, que tu aies appris quelque chose sur les codes d'éthique. Tu courrais toujours partout en disant que tu voulais être autre chose qu'un titre de noblesse. » M'amusai-je en agitant la tête d'un air bien entendu. Je jetai un rapide coup d’œil au menu qui était dressé sur la table. « Tu suis le guide nutritionnel de la lady enceinte à la lettre ou tu peux manger normalement ? Je dois me préparer psychologiquement à te voir commander du placenta de jument pur race ? » J'arquai un sourcil. Je me posais vraiment la question ; à quel point cette Heaven était-elle différente la fille que j'avais connu ?  
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() message posté Sam 25 Juil 2015 - 23:22 par Invité

Elsa & heaven — growing apart doesn't change the fact that for a long time we grew side by side; our roots will always be tangled. I'm glad for that. ✻ ✻ ✻ On désire toujours ce que l’on a pas. Cette expression avait pris tout son sens entre Elsa et Heaven durant leurs enfances. L’une avait rêvé de châteaux et de princes charmants en devant se contenter du simple rôle de servante. L’autre avait désiré être normale et comme les autres en subissant un titre dont elle n’avait jamais voulu. Elsa n’avait sans doute pas compris les convictions de Heaven. Cette dernière, quant à elle, n’avait sans doute pas compris les désirs de sa seule camarade de jeux. Elles avaient vécu dans deux mondes différents en étant si proches l’une de l’autre physiquement. Elles avaient connu deux réalités opposées en évoluant dans le même espace. Leur situation était ironique, presque risible ; elles s’étaient enviées, détestées. Elles ne s’étaient pas comprises, elles avaient érigé un mur entre elles alors que l’une avait sans doute été le seul espoir de l’autre. Cela avait été plus fort qu’elles. L’une comme l’autre était trop borné pour admettre avoir tort. L’une comme l’autre était bien trop enfoncée dans ses idées pour pouvoir sortir sa tête de l’eau. L’une comme l’autre s’était bien trop plu dans ses rêves, dans ses désirs, dans ses aspirations, pour un jour avoir suffisamment de courage pour leur tourner le dos, leur tourner le dos et les abandonner.
Un sourire flottait sur les lèvres de Heaven alors qu’elle s’installait en face d’Elsa. Elle s’attarda quelques instants sur son visage avant que son attention ne soit attirée par des mouvements presque imperceptibles de ses doigts. Son visage demeura impassible. Elle ne fit absolument aucune remarque. Elle savait suffisamment bien qu’une personne malade préférait qu’on ne lui rappelle pas sa condition quand elle était dotée d’un tempérament comme celui d’Elsa ; elle le savait, oui, parce qu’elle avait été dans la même situation. Quand elle avait été hospitalisée pour son anorexie, pour sa boulimie, elle n’avait pas voulu qu’on lui parle de ses problèmes. Elle n’avait pas voulu qu’on évoque son poids, ses côtes saillantes, les dangers qui la menaçaient, toutes ces facettes de sa maladie. Ces souvenirs étaient gravés dans sa mémoire. Ces souvenirs continueraient de la hanter, alors que cette époque était derrière elle, alors que son état n’avait pas été permanent.
Et, elle, au moins, était suffisamment décente pour ne pas rappeler à Elsa qu’elle tremblait. Parce qu’elle savait qu’elle ne voulait pas qu’elles en parlent. Elle le savait parce qu’elles étaient pareilles, toutes les deux. Strictement pareilles. Pareilles avec toutes leurs différences, pareilles malgré toutes les nuances de leurs personnalités respectives. Pareilles même après avoir passé leurs enfances à s’envier et se détester avec admiration. « Je t'ai dit de pas m'appeler comme ça, » lança Elsa et Heaven haussa simplement les épaules, un sourire mi-moqueur, mi-amusé, peint sur les lèvres. Elle lui avait répété encore et encore, mais c’était en lui disant une fois de plus qu’elle l’incitait à continuer. Parce que Heaven était ainsi. Dotée d’un esprit de contradiction presque aussi grand qu’elle ne pouvait l’être, elle.
Elle se demandait souvent pourquoi le monde semblait si agacé en lui parlant. Pourquoi les autres paraissaient sur le point de lever les yeux au ciel. Au final, elle avait ses réponses. Parfois, même, elle était trop petite pour contenir toute sa bêtise. « Je suis presque choquée, que tu aies appris quelque chose sur les codes d'éthique. Tu courrais toujours partout en disant que tu voulais être autre chose qu'un titre de noblesse, » reprit Elsa quand Heaven évoqua à voix haute le principe qu’une lady ne pouvait jamais être en retard. Son rire vint se joindre à celui de la blonde assise en face d’elle, et elle pencha sa tête légèrement sur le côté pour l’observer avec grande attention. « Tu suis le guide nutritionnel de la lady enceinte à la lettre ou tu peux manger normalement ? Je dois me préparer psychologiquement à te voir commander du placenta de jument pur race ? » Heaven eut une moue dégoûtée, secouant la tête en entendant les mots d’Elsa. « Ugh, non, ne me parle pas de placenta de jument autrement je risque de te vomir dessus, »  répliqua-t-elle. Une main vint se poser sur son ventre et elle le caressa, sentant les coups légers de son petit garçon sous ses doigts. Les paroles d’Elsa étaient sans doute teintées d’ironie mais elle constatait presque avec effarement qu’elle n’avait pas tout à fait tort ; après avoir digéré le choc d’une grossesse hors-mariage, Kathleen Howard-Clark s’était mise en tête de suivre la grossesse de sa fille de très près. Elle avait évoqué plusieurs astuces, plusieurs trucs, tenté de lui faire avaler certaines mixtures et de l’inscrire à divers clubs mondains composés uniquement de futurs mamans issues de la noblesse britannique, mais Heaven ne lui avait jamais prêté suffisamment d’attention pour écouter réellement les techniques qu’elle soutenait.
Peut-être y était-il question de placenta de jument, elle ne voulait pas savoir. « Mon petit garçon me dit qu’il a fortement envie de macarons et de tarte à la framboise, donc je vais l’écouter, »  reprit-elle en détaillant la carte. Elle fronça le nez en lisant les lignes de pâtisseries que le café pouvait proposer. « Même si la tarte aux pommes avec la boule de glace vanille a l’air pas trop mal. T’en penses quoi ? » Elle releva les yeux vers Elsa, attendant une réponse de sa part. Elle se connaissait suffisamment pour savoir qu’elle était parfaitement capable de commander les trois plats pour picoter dans chaque et décréter qu’elle avait trop mangé en laissant presque tout dans les assiettes ; depuis qu’elle était enceinte, son appétit était un peu plus grand mais elle avait encore tendance à manger affreusement peu.
Pourtant, elle faisait des efforts. Elle essayait. Réellement. De tout son coeur. Mais elle était constamment trop anxieuse pour que cela puisse réellement fonctionner.
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() message posté Lun 3 Aoû 2015 - 17:39 par Invité

“Because never in my entire childhood did I feel like a child. I felt like a tiny person all along―the same tiny person that I am today.” Tandis qu'elle me souriait, je m'efforçais de retenir les mouvements aléatoires de mon bras gauche. Je m'efforçais de rester fidèle à nos souvenirs communs malgré l'usure du temps et les mesquineries enfantines qui nous avaient un jour séparé. Heaven Howard-Clark  ; je prononçais son nom avec une certaine retenue. Heaven Howard-Clark  ; je le laissais allègrement flotter autour de ma conscience et m’imprégner de sa noblesse désuète. Parfois, je voulais disparaître dans l'éclat de sa magnificence. Je voulais tellement être une sœur, une amie, une part de cet univers sans imperfections, mais Kathleen m'avait toujours rejetée. Elle m'avait remise à ma place simplement en me fixant du regard. Je me mordis la lèvre inférieure en penchant la tête vers la table. Heaven, s'était contenue dans ce cadre fait d'ivoire et de bois vernis, exactement comme je le voulais. Sa vie n'était pas facile. Elle avait souffert d'un manque affreux d'affection, de liberté et d'insouciance. Pourtant elle se dressait aujourd'hui devant moi comme une vénale. Ses cheveux blonds encadraient son visage d'une pureté que j'étais la seule à remarquer : celle de l'enfance déchue. Mes doigts se crispèrent tout à coup avant de prendre une inflexion étrange. Mes ongles s'inclinaient comme des griffes tranchantes, triturant le tissu de la nappe au fur et à mesure que le Parkinson enflammait mes muscles. Mais ce n'était pas si grave. Je ne me sentais pas vulnérable ici. Heaven et moi étions peut-être deux étoiles contradictoires, mais le ciel n'était pas assez vaste pour nous tenir éloignées. Elle brillait de son côté et je m'incrustais entre les couches vespérales de la nuit afin d'aspirer sa lumière. Nous partagions cette même envie de quitter la routine et de renoncer aux douceurs d'une existence tranquille pour aller chercher laborieusement le secret du bonheur. Son père était un criminel et le mien un déserteur. Quelle différence y avait-il vraiment lorsqu'une personne nous  décevait ? Je me redressai sur mon siège. Je baissai les yeux afin d'observer les plis de mes vêtements trop amples. Je perdais du poids alors qu'elle portait l'essence de la vie. Un petit être grandissait au creux de ses entrailles. Un garçon que mes propres enfants auraient pu jalouser afin de perpétuer une ancienne tradition. Le combat des classes sociales et des vanités humaines. J'hochai la tête avant de lui adresser un regard plein d'incertitudes. Je n'avais pas besoin de lui exprimer l'étendue de mes troubles. Je ne voulais pas en parler et il lui était plus aisé de me réconforter dans le silence. Le feu coulait dans mes veines. Il s’infiltrait dans ma chair et embrasait ma force, ma volonté et le peu de contrôle qu'il me restait de mes membres. Je croyais qu'il était impossible de vivre dans cet état de béatitude constant et pourtant, chaque jour je parvenais à me réveiller, à poursuivre un bout de chemin sans réellement succomber à la maladie - simplement en survivant à ses symptômes. Heaven laisse-moi être comme toi. D'un geste gracieux je joignis mes mains l'une contre l'autre. Je gardais ma tête droite, les épaules dégagées et le dos parfaitement aligné contre le dossier de ma chaise. Ma frange mal coiffée contrastait avec mes efforts de bonne conduite. Ils rappelaient outrageusement les origines de ma naissance. Chaque mèche qui s'ondulaient sauvagement chantait un petit air campagnard. Je me rappelais de cette ville lointaine où j'avais grandi. Je me souvenais des parfums de l'herbe fraîche et des arbustes fleuris que je prenais dans les bras. De mes courses effrénées avec les cours d'eau et les flux de la rivière. C'était un rêve flatteur qui me montrait l'objet réel de ma convoitise : Tout le contraire de ça. Je ne voulais pas de ma liberté. Mon cœur se languissait d'une prison dorée. Et aujourd'hui j'avais fini par l'emprisonner dans mon incapacité à gérer mon corps fébrile. Je ris nerveusement lorsque Heaven s'adressa à moi. J'observais chacun de ses gestes, remarquant avec surprise qu'elle avait déjà acquis certains réflexes maternelles. Elle semblait enfin en harmonie avec elle-même. Il s'agissait bien de la même fille agaçante, mais il y avait quelque chose de plus. Une aura apaisante qui parvenait jusqu'à moi, qui m'enveloppait moi aussi. «Ugh, non, ne me parle pas de placenta de jument autrement je risque de te vomir dessus,  »  Je souris avant de secouer la tête. « Je tiens à te rappeler que tu as déjà presque vomi sur moi. » M'amusai-je en me remémorant les détails d'une expédition en mer à laquelle je l'avais expressément invité. Mon père était rentré après une éternité d'absence, si bien que j'avais eu du mal à retrouver ses traits familiers sous les poils hirsutes de sa barbe et l'allure grisonnante de ses cheveux dégarnis. Alexander St. Claire, le fantôme. L'homme qui portait mille visages, et pourtant je n'en connaissais aucun. Il s'était tout à coup découvert une passion pour moi. Il m'avait regardé avec ses petits yeux sournois et m'avait promit de m'emmener à bord de sa péniche ; « La Dulcie Vita ». Alors, il m'avait semblé presque naturel d'y aller accompagnée. Pour lui prouver que j'avais une amie géniale. Pour me prouver que j'avais un père affectueux. Et pour prouver à Heaven que je pouvais être heureuse sans faction. Je soupirai tout à coup. Mon cœur vibrait douloureusement dans ma poitrine. Il est mort depuis deux semaines. Les décors de la pièce s'embrouillaient sous mon regard. Les voix des autres clients étaient tellement lointaines. « Mon petit garçon me dit qu’il a fortement envie de macarons et de tarte à la framboise, donc je vais l’écouter, »  Je m’éveillais peu à peu de ma torpeur. J'arquai un sourcil, sans comprendre de quoi elle parlait. Je battis des cils à plusieurs reprises avant de revenir vers elle, arborant un sourire vague et distant. « Même si la tarte aux pommes avec la boule de glace vanille a l’air pas trop mal. T’en penses quoi ?   »  Elle lisait le menu. Elle me parlait de la commande. Voilà de quoi il s'agissait. Je fis la moue en frottant mes pommettes du bout des doigts. « Je ne sais pas. Peut-être pas la tarte aux pommes pour moi. S'il mettent de la patte d'amandes dedans, je risque de te faire un choc anaphylactique. »Raillai-je en faisant référence à mon allergie aux fruits à coques. Je fis mine de réfléchir. « Moi, je pense qu'on devrait opter pour un assortiment de macarons, le gâteau au chocolat qui me fait de l’œil depuis tout à l'heure, la tarte aux framboises et je suis super tentée par la tarte au citron meringuée. » Je tendis mes jambes sous la table afin de frôler ses chaussures. Je voulais attirer son attention. Je voulais qu'elle me regarde encore une fois pour que je puisse m'imprégner de son courage. Mes lèvres frémissaient. J'avais un peu froid, comme si le vent s'était tout à coup levée contre moi. « Merci. » Murmurai-je, honteuse. Merci d'être là tout le temps, dans mes pensées, dans mes souvenirs heureux et malheureux. Merci d'exister quand je n'ai aucune envie de partager mes tourments mais que je n'arrive plus à les garder pour moi. Merci de t'appeler  Heaven sans croire au paradis, parce que je suis Dulcie et que je ne sais pas ce que la douceur veut dire. Je déglutis en balayant mes cheveux d'un geste de la main. « Il est mort. Mon père est mort il y a deux semaines. Un accident de travail. Je le sais parce qu'on m'a convoqué chez le notaire. »J'esquissai un faible rictus. Elle était encore la première personne à savoir. Je n'osais pas en parler à Tom, ni aborder la thématique du deuil avec Remy. La dernière fois que j'avais vu mon père, Graham était là. Mon ex petit ami dont je n'osais même plus prononcer le prénom à haute voix de peur qu'il se matérialise devant moi et que je découvre encore une fois tous les ravages qu'il avait fait à mon cœur. « Je n'arrive pas à être triste pour lui. Tu … Tu as été triste ? » Je me raidis tout à coup, regrettant presque d'avoir abordé le sujet. Après le divorce de mes parents, quelque chose s'était brisée dans ma famille. Mais je m'étais réfugié chez les Knickerbadger. J'avais trouvé une nouvelle figure paternelle , un grand frère, une deuxième maman. J'avais si bien comblé le vide qu'il me semblait presque irréel de songer à mon père. Il suivait ses aspirations professionnels. Il envoyait un chèque tous les mois et une lettre pleine d'excuses et promesses. Je ne pouvais pas lui en vouloir. C'était correcte. Puis, un jour, après plusieurs années, il avait complètement cessé d'appartenir à mon quotidien. Je ne retenais de lui que deux choses ; la virée en mer avec Heaven et le dessin de son dos qui disparaissait derrière la brume matinale. Deux choses. C'était si peu pour que je souffre de sa disparition et beaucoup trop pour que je puisse balayer son existence.
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() message posté Lun 3 Aoû 2015 - 17:50 par Invité

Elsa & heaven — growing apart doesn't change the fact that for a long time we grew side by side; our roots will always be tangled. I'm glad for that. ✻ ✻ ✻ Petite, elle n’avait jamais réellement su si elle appréciait Elsa ou non. Elle avait été là, à ses côtés, chaque jour de chaque semaine, chaque semaine de chaque mois. Elle avait été là, à ses côtés, à l’observer d’un oeil envieux, la tête pleine d’espoirs, le corps animé par de la jalousie puérile. Et, de son côté, Heaven l’avait observé de la même façon. Après tout, Elsa n’avait pas été celle contrainte de faire des auditions de piano. Elle n’avait pas été celle à qui l’on avait demandé de se tenir droite à table. Elle n’avait pas été celle forcée de sourire même quand elle avait envie de pleurer. Heaven n’avait jamais compris pourquoi la fille de sa gouvernante avait toujours semblé vouloir être à sa place. Pourquoi elle avait toujours semblé croire que sa position était mieux que la sienne à elle. Elle s’était toujours répété qu’elle ne comprenait pas. Qu’elle ne comprenait pas ce que cela signifiait de s’appeler Howard-Clark. Qu’elle ne savait pas. Qu’elle ne savait pas tous les sacrifices qu’il fallait faire quand on se retrouvait là où elle était. Alors, non. Elle n’avait jamais su. Elle n’avait jamais su si elle appréciait cette amie qui l’enviait. Elle n’avait jamais su si elle appréciait cette autre petite fille qui avait une vie plus facile. Qui avait eu une existence plus agréable.
Et, maintenant qu’elle se trouvait en face d’elle, maintenant qu’elle l’observait, Heaven se disait qu’elle ne savait pas ce qu’elle aurait fait sans sa présence. Elle était persuadée qu’Elsa avait été le peu de courage qui lui avait resté dans les pires instants de sa réalité. Quand elle avait eu envie de pleurer, elle avait croisé son regard, et elle s’était presque dit, s’était presque répété, qu’elle devait garder la tête haute. Quand elle avait eu envie de tout laisser tomber, de tout abandonner, elle avait croisé son regard, et elle avait fini par admettre que sa vie ne pouvait pas être dorée si elle ne faisait pas d’efforts.
Cela avait été comme si elle avait fait de son mieux pour elle. Comme si elle avait tout supporté pour elle. Comme si elle avait continué pour elle, parce qu’elle savait qu’Elsa aurait été capable de tout si elle avait eu la possibilité d’être à sa place. Parce qu’elle savait qu’Elsa se serait battue même dans ces instants où rendre les armes aurait été beaucoup plus simple.
Heaven ne focalisa pas son regard sur les mouvements incontrôlés d’Elsa, refusant de l’embarrasser, refusant de ne voir que cela. Refusant, aussi, de la prendre en pitié, parce qu’une âme comme la sienne était suffisamment forte pour continuer d’avancer sans les autres. « Je tiens à te rappeler que tu as déjà presque vomi sur moi, »  lui rappela-t-elle et Heaven esquissa un sourire amusé, refusant de rebondir sur ce sujet. Elle secoua la tête, levant les yeux au ciel, avant de replonger son regard sur la carte et se concentrer sur son choix, une main sur son ventre, l’autre parcourant les lignes à mesure que ses yeux les lisait.
Elle avait l’impression qu’il s’était passé tant de choses depuis la dernière fois qu’elles s’étaient réellement vues et, pourtant, elles se tenaient l’une face à l’autre comme si elles s’étaient quittés la vieille. Elles avaient grandi ensemble mais différemment ; Heaven se plaisait à croire, d’une certaine manière, qu’elles auraient toujours quelque chose en commun malgré les années qui filaient. « Je ne sais pas. Peut-être pas la tarte aux pommes pour moi. S'il mettent de la pâte d'amandes dedans, je risque de te faire un choc anaphylactique. Moi, je pense qu'on devrait opter pour un assortiment de macarons, le gâteau au chocolat qui me fait de l’œil depuis tout à l'heure, la tarte aux framboises et je suis super tentée par la tarte au citron meringuée, » A mesure qu’elle parlait, Heaven suivait les choix d’Elsa sur la carte. Elle finit par hocher la tête, approuvant ses idées de commande, sachant parfaitement qu’elles ne parviendraient sans doute pas à manger tout cela toutes seules mais s’en fichant complètement. Au pire, elles emporteraient les restes avec elles. Elle ne s’en formalisait pas. « Merci, » ajouta alors Elsa dans un murmure. Heaven fronça les sourcils avant de relever la tête. « Ne me remercie pas, je n’ai pas encore payé, » déclara-t-elle avec un sourire presque taquin sur les lèvres.
Elle releva la tête vers elle, trouvant une expression soucieuse sur son visage. « Il est mort. Mon père est mort il y a deux semaines. Un accident de travail. Je le sais parce qu'on m'a convoquée chez le notaire, » lui déclara-t-elle. « Je n'arrive pas à être triste pour lui. Tu… Tu as été triste ? » Elle observa Elsa avec attention, ne sachant pas quoi lui répondre. Elle avait l’impression qu’il s’agissait d’une vaste question. Qu’il n’y avait pas forcément de réponse. Qu’elle ne détenait aucune vérité. Qu’à vrai dire il n’y en avait pas.   « Non. J’ai été en colère et un peu perdue, aussi. Mais je n’ai pas été triste, »  finit-elle par déclarer. « Le seul conseil que je pourrais te donner est de ne pas t’attarder sur quelqu’un qui ne s’est pas donné la peine de faire partie de ton existence. »  Ses paroles étaient sans doute trop dures. Trop directes. Mais elle les pensait sincèrement. Elle avait fini par décréter que son père avait beau avoir fait toutes les horreurs du monde, cela ne la concernait pas. Après tout, elle ne le connaissait pas. Lui non plus ne la connaissait pas. Tout s’arrêtait là.
La serveuse finit par arriver à leur hauteur et Heaven lui adressa un sourire. « Vous avez fait votre choix ? »  Elle hocha la tête doucement. « On va prendre une part de gâteau au chocolat, de tarte au citron meringuée, de tarte à la framboise, et l’assortiment de macaron. Je prendrais un thé vert avec ça, aussi. Elsa ? »  Elle releva la tête vers son amie d’enfance pour qu’elle termine la commande. Maintenant qu’elle le savait, oui, Elsa paraissait soucieuse. Sans doute trop. Avec le temps, Heaven avait appris à devenir égoïste ; en cet instant, elle était persuadée qu’Elsa aurait sans doute mieux fait de faire de même.
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() message posté Dim 27 Sep 2015 - 1:36 par Invité

“Because never in my entire childhood did I feel like a child. I felt like a tiny person all along―the same tiny person that I am today.”  Notre rivalité était si puérile. J'avais passé mes plus belles vacances d'été auprès de Heaven, à la suivre dans les escaliers d'une demeure dont le plafond était trop haut pour contenir toutes les étoiles du ciel. Je l'avais toujours considéré comme une féerie, comme un modèle. L'éclat au coin de ses yeux me rappelait la flamme de la veilleuse de verre qui ornait sa table de chevet. Elle avait une forme d'urne, entourée de petites chaînettes comme si elle détenait un secret, comme s'il s'agissait d'un objet magique et mystérieux. Lorsque j'étais petite, je pensais qu'il s'agissait d'une pièce précieuse issue d'une univers parallèle. En réalité, tous les meubles qui entouraient les parois de sa chambre éveillaient mon imagination débordante. J'avais envié Heaven parce qu'elle était belle et lumineuse, parce que son monde tournait en orbite autour du mien, sans que je ne puisse atteindre sa magnificence. Je n'étais pas comme elle. Je vivais dans une maison à la compagne. Mon quotidien se composait des fleurs des champs et des mugissements du vent au bord de la rivière. J'ignorais tout des mondanités et des responsabilités d'une héritière. Ma vie se résumait à la simplicité, et parfois même à la médiocrité. Je fronçai les sourcils en secouant les épaules. Les choses étaient différentes, maintenant. J'avais grandi et je ne pouvais plus me permettre de tenir de tels propos. Je ne pouvais qu'apprécier Heaven et l'image de la femme forte et indépendante qu'elle miroitait dans un horizon brumeux et lointain. Elle était major de sa promo en journalisme, tout de même. Je devais bien lui accorder ce mérite. Je ressentais même une certaine fierté car je reconnaissais sa lutte acharnée contre la fatalité. Elle survivait malgré l'horreur qu'évoquait son nom auprès de la noblesse. Elle survivait en dépit de ses anciennes addictions et de ses erreurs. Aujourd'hui, elle était exactement la princesse que j'avais rêvé de devenir. Je souris au coin puis je crispai mes doigts sur le rebord de la table. Les tremblements de ma main gauche avaient diminués, mais je ressentais toujours une légère crampe au niveau des muscles. Lentement, j'allongeai le cou en tendant l'épaule. C'était stupide, mais j'avais l'impression que ce geste soulageait la pression au niveau de mon bras. Heaven quant à elle, ne se préoccupait pas de mes changements d'attitude. Elle savait que j'étais malade, mais elle ne s'en accommodait pas, me laissant la liberté de penser et d'agir naturellement. Je lui étais si reconnaissante. C'était presque ironique de constater que c'était en présence de mon ennemie d'enfance que je me sentais le plus à l'aise. Je cherchais timidement le contact de ses yeux. J'accrochai son regard pendant une fraction de secondes avant de me détourner. Il nous avait suffi d'un battement de cils pour partager un moment d'intimité. Un jour, je viendrais vers elle, je frapperais à sa porte et nous échangerons un simple regard avant de nous quitter. Notre relation était aussi simple que ça. Je me mordis la lèvre inférieure. Parfois, j'avais l'impression que nous étions les revers opposés de la même médaille. Elle avait le côté brillant, tandis que le mien était terne et rouillé. Nous représentions une seule et même unité. Je fis la moue en parcourant la carte. Heaven hochait la tête au fur et à mesure que j'énumérais les choix de pâtisserie, puis lorsque je me tus, lorsque je lui adressai un maigre remerciement, son visage s'illumina. «  Ne me remercie pas, je n’ai pas encore payé, »  Se moqua-t-elle. Je levai les yeux au ciel en riant avec légèreté. « De toute façon tu n'as pas le choix. Une lady  tient toujours ses promesses. Sinon y a des malédictions et des mauvais présages de nobles. » Je fis la moue avant de m'adosser le siège. Ma voix se mélangeait aux râles de ma respiration sifflante avant de s'évanouir dans ma gorge douloureuse. Je n'osais jamais lui parler en détails de son père, mais ma langue avait fourchée. J'avais ressenti le besoin de partager avec elle le deuil d'un étranger dont je portais l'empreinte génétique. Mon expression se figea tandis que ma question restait en suspens dans la pièce. J'avais tant d'amour à donner et personne vers qui diriger toutes ces émotions oppressantes qui emprisonnaient mon âme.  Même lorsque j'étais triste et brisée. Même lorsque je t'étais maltraitée et rejetée. Je revenais toujours, le cœur battant vers l'extrême, les bras tendus vers l'inconnu. « Non. J’ai été en colère et un peu perdue, aussi. Mais je n’ai pas été triste, le seul conseil que je pourrais te donner est de ne pas t’attarder sur quelqu’un qui ne s’est pas donné la peine de faire partie de ton existence.   » J’acquiesçai frénétiquement. Nous vivions dans un monde hostile, peuplé de  gens égoïstes et malhonnêtes. Mais je n'étais pas sûre de pouvoir refréner ma culpabilité. Il ne me manquait pas, et c'était justement la raison de mon malaise. Les paroles de Heaven entraient en moi. Je les absorbais sincèrement, de toutes mes forces. Je m'accrochais à chaque syllabe en m'efforçant de garder un sourire imperturbable. Quelque part, je l'enviais toujours. Le destin avait usé sa face du médaillon et même si elle était aussi terne et rouillée que la mienne, Heaven avait réussi à garder son étincelle éternelle. La serveuse s'approcha de notre table, interrompant le fil de mes pensées. Heaven passa la commande et je me contentais d'hocher la tête afin de confirmer ses choix. «  Je prendrais un thé vert avec ça, aussi. Elsa ? » Je souris en me penchant de nouveau vers le menu. « Ce sera une tisane de camomille, merci. » Soufflai-je poliment avant de me retourner vers mon amie. « J'ai entendu dire que c'était un tonique nerveux. C'est un bon calmant naturel, tu devrais t'y mettre aussi. » Raillai-je en joignant mes mains sur mes genoux. Je me souvenais d'une enfant bien soignée et souriante. Mais je me connaissais aussi ses crises de colère et les versants explosifs de sa personnalité. Combien de fois, avais-je bien pu me disputer avec elle pour des futilités d'usage ? J'avais cessé de tenir le compte, tout comme j'avais cessé de rejeter mon affection pour elle.  
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() message posté Dim 4 Oct 2015 - 14:02 par Invité

Elsa & heaven — growing apart doesn't change the fact that for a long time we grew side by side; our roots will always be tangled. I'm glad for that. ✻ ✻ ✻ Peut-être avaient-elles été un duo sans s’en rendre compte. Peut-être avaient-elles été des meilleures amies sans jamais vouloir l’admettre. Maintenant qu’elle pouvait observer son enfance avec un certain recul, Heaven constatait qu’Elsa avait été la personne qui l’avait connu réellement. La personne qui avait eu connaissance de ses états d’âme. La personne qui avait vu ce qu’il se passait chez elle, à l’intérieur même de sa demeure. La personne qui avait su ce que cela signifiait de s’appeler Howard-Clark. Peut-être leur relation n’avait-elle pas été simple mais elles avaient eu une connexion qu’Heaven n’avait encore retrouvé nulle part ; elle avait beau raconter certaines étapes de sa vie, elle avait beau se confier sur certaines périodes, personne n’avait vu comme Elsa avait pu le voir. Personne n’avait compris comme Elsa avait pu le comprendre. Certes, elles avaient passé de longues années à s’envier ; certes, tout n’avait pas eu le même sens pour Elsa. Cependant, elle avait été là. Elle avait été là, dans son quotidien. Elle avait été une figure importante de son enfance. Elle avait été une rivale, une amie, une ennemie, peut-être. Elle avait été tout un tas de choses. Tout un tas de nom. Tout un tas de définitions.
Mais elle avait été quelque chose. Et cela était sans doute le plus important.
Heaven n’ignorait pas qu’elles avaient chacune eu le temps de vivre une centaine d’existences différentes avant de se retrouver ainsi, assise l’une en face de l’autre. Elsa avait découvert sa maladie. Elsa avait vu le monde. Heaven, quant à elle, avait sombré dans l’addiction. Heaven, quant à elle, avait essayé mille-et-un domaines avant de finalement trouver sa voie. Elles avaient toutes les deux connus passions, déceptions. Elles avaient toutes les deux eu le temps de se détacher des gamines qu’elles avaient un jour été pour devenir des femmes, des femmes pas encore tout à fait mature mais des femmes quand même. Elles étaient grandes, maintenant. Leurs enfances se trouvaient derrière elles, malheureusement.
Heaven ne regrettait pas son enfance mais regrettait sa jeunesse, quand tout lui paraissait plus facile. Elle avait peut-être encore eu l’emprise de ses parents mais elle n’avait pas connu la honte, le tribunal, l’effet qu’avait l’héroïne dans ses veines. « De toute façon tu n'as pas le choix. Une lady tient toujours ses promesses. Sinon y a des malédictions et des mauvais présages de nobles, » commenta Elsa et elle esquissa un sourire. Elle secoua la tête, levant doucement les yeux au ciel. Ses doigts, quant à eux, passèrent dans sa chevelure blonde pour remettre en place quelques mèches folles, avant de finalement se blottir contre son bedon. Ces gestes étaient naturelles. Comme si elle avait toujours eu ce côté-là de sa personnalité qui sommeillait en elle et, ce, même si elle n’avait jamais pensé pouvoir avoir l’instinct maternel un jour. « Toi aussi tu t’es fait laver le cerveau par ma mère pour dire ça ? J’ai l’impression de l’entendre me parler. »  Un sourire flottait toujours sur ses lèvres. Son ton était légèrement amusé, même si ses paroles soulevaient presque un point sensible.
Heaven avait l’habitude. L’habitude de parler de sujets interdits. L’habitude de mettre les deux pieds dans le plat parce qu’elle ne connaissait absolument aucune limite. « Ce sera une tisane de camomille, merci, » répondit Elsa à la serveuse qui hocha la tête avant de se retirer, récupérant les menus chics de ce petit café. Heaven reporta son attention sur son amie d’enfance alors qu’elle s’apprêtait à reprendre la parole. « J'ai entendu dire que c'était un tonique nerveux. C'est un bon calmant naturel, tu devrais t'y mettre aussi. » Heaven balaya presque instantanément sa proposition d’un geste de la main ; elle était amusée, cependant, par les sous-entendus qu’Elsa venait de lui faire. A vrai dire, elle ne savait pas exactement ce qu’elle savait sur ce qu’elle avait bien pu vivre à New York. A vrai dire, elle ne savait pas exactement tout ce qu’elle avait bien pu entendre non plus. Cela intriguait presque Heaven, maintenant qu’elle se rendait compte qu’elle en savait probablement plus qu’elle ne désirait l’admettre. « Je suis une personne très calme, je ne vois pas de quoi tu parles, »  dit-elle avec conviction. « Qu’est-ce qui te fait dire ça ? »  Elle observa Elsa avec une étincelle curieuse au fond du regard ; elle tenta de décrypter son expression, notant que la perte de son père continuait de l’habiter malgré tout. Elle ne le releva pas, cependant ; si Elsa n’en parlait pas plus d’elle-même, cela voulait sans doute signifier qu’elle n’avait pas envie de s’éterniser sur le sujet.
Au lieu de quoi, Heaven prit une profonde inspiration. « Je ne sais pas si tu te souviens, mais quand on était plus jeune, tu m’as obligé à te promettre qu’un de mes fils serait ton futur mari… »  commença-t-elle avant de se mettre à rire. « Je ne peux définitivement pas tenir cette promesse, je suis désolée pour les malédictions que ça nous attirer, tout ça. » Elle haussa les épaules, comme pour montrer qu’elle était prête à assumer, comme pour montrer qu’elle était prête à les affronter. Puis, finalement, après une nouvelle hésitation, elle reprit la parole. « Mais, à la place, je me demandais si tu ne voulais pas être sa marraine. »  Elle ponctua ses mots d’un sourire presque timide. Timide parce qu’elle ne savait pas ce qu’elle allait lui répondre. Timide parce que cela faisait un moment qu’elles ne s’étaient pas vu, toutes les deux, et qu’elles n’avaient jamais vraiment eu l’occasion de s’apprécier à leur juste valeur ; mais cela lui paraissait presque une évidence. Cela faisait longtemps qu’elles ne s’étaient pas vues, non. Mais elle avait l’impression que c’était uniquement parce qu’elles ne s’étaient pas vraiment quittées.
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() message posté Sam 7 Nov 2015 - 15:35 par Invité

“Because never in my entire childhood did I feel like a child. I felt like a tiny person all along―the same tiny person that I am today.”  Je plissai les yeux en lui souriant. Je n'arrivais pas  toujours pas à nommer l'objet de notre affection mutuelle. Avant mon diagnostique, Heaven n'était qu'un parasite. Une gamine lumineuse, faite de strass et de paillettes. Tandis que moi, j'étais l'ombre fade qui se versait dans les champs afin de capturer les rayons du soleil. Je l'avais jalousé. Je l'avais envié en bafouant les règles de bienséance et de bonne conduite. Puis, au moment où j'avais le plus besoin d'une personne, sa silhouette filiforme s'était dessiné au fond du couloir. Sa démarche nonchalante l'avait porté jusqu'au centre de la grande salle de séjour et elle m'avait tendue une épaule réconfortante à travers les vapeurs brumeuses de Glastonbury. Je fis le moue en m'accrochant aux rebords de la table. Personne ne pouvait m'épargner l'incertitude et la peur de la maladie, mais l'étreinte de Heaven m'avait insufflé le courage de défier le monde à nouveau. Après tout, j'étais revenu à Londres grâce à elle. « Toi aussi tu t’es fait laver le cerveau par ma mère pour dire ça ? J’ai l’impression de l’entendre me parler. »  Je pouffai de rire en secouant les épaules. Elle n'avait pas tord. J'avais baigné dans son univers durant toute mon enfance. Ma mère avait été gouvernante. Elle avait insisté pour que je m’imprègne de grâce et de noblesse malgré mon absence de caste. J'avais bu ses paroles comme une idiote, espérant qu'il suffisait d'y croire assez fort pour devenir une princesse. Mais tout cela me semblait simple et dérisoire à présent. Il n'existait pas de rang pour une fille estropiée. Je crispai les doigts de ma main douloureuse. Le Parkinson m'avait tout pris. Je pouvais m'en rendre compte lorsque je me donnais la peine de réfléchir. « Bah quoi ? Parfois, je trouve ses théories vraiment intéressantes. » Je hochai la tête avant de continuer ;  « Le mythe du sang bleu, par exemple. Peut-être que c'est une image abusive mais j'aime bien sa connotation poétique. Les bien-nés ont le teint pâle et diaphane qui laisse transparaître de jolies veines bleues. C'est une bonne couleur. » Déclarai-je en terminant mon discours par un geste dramatique de la main. La serveuse prit note de nos commandes avant de prendre congé. Je m'amusais à provoquer Heaven par habitude. Nous avions toujours entretenu une relation complexe ; à la fois complice et conflictuelle. Je luttais constamment pour avoir son approbation, tandis qu'elle attendait quelque chose d'autre de moi. Quelque chose que je ne savais pas lui donner. Je relevai le menton en la fixant d'un air perdu. Chacune d'entre nous était en mesure d'examiner ses erreurs, ses négligences et ses mauvaises habitudes. Chacune d'entre nous acceptait de pardonner sans réellement connaître l'étendue de nos blessures respectives. « Je suis une personne très calme, je ne vois pas de quoi tu parles, qu’est-ce qui te fait dire ça ?   » Je pressai mon poing sur ma bouche en lui faisant un clin d’œil. Elle ne m'avait jamais raconté ses aventures à New York, mais ma mère avait gardé contact avec certaines personnes issues des hautes sphères. Il m'arrivait d'intercepter quelques bribes de conversations ; un lieu, un prénom, un soupir … Tous ces petits fragments qui constituaient une information complète lorsque je les assemblais dans ma tête. « Tu sais, Glasto est une petite ville. Les gens s'occupent comme ils peuvent. Ils disent tout et son contraire. » Je haussai les épaules, lui signifiant que je ne croyais pas toutes les rumeurs. En réalité je m'en fichais éperdument. Lorsque je regardais Heaven, je ne voyais pas une adolescente difficile ou fugueuse. Je ne voyais pas une junkie ou une rebelle. A mes yeux, elle était ce parasite nocturne qui avait éclot comme un papillon et qui avait traversé les allées sombres du jardin pour atterrir sur le bord de ma fenêtre. Les commérages étaient passés de mode de toute façon. « Je ne sais pas si tu te souviens, mais quand on était plus jeune, tu m’as obligé à te promettre qu’un de mes fils serait ton futur mari… » Elle se mit à rire et je la suivis dans son euphorie avec amusement, sans réellement comprendre où elle voulait en venir. « Je ne peux définitivement pas tenir cette promesse, je suis désolée pour les malédictions que ça nous attirer, tout ça.    » Je m'arrêtai tout à coup, les sourcils froncés, les lèvres pincées. Quoi ? J'étais trop vieille pour son fils ? Elle me jetait comme ça ? « Mais... » J'étais prête à protester, à exprimer mon indignation en listant toutes les raisons logiques et illogiques qui lui interdisaient de rompre cette promesse. Mais elle haussa les épaules, interrompant le flux de mes pensées. Mais, à la place, je me demandais si tu ne voulais pas être sa marraine. » Je lui adressai un regard interrogative et elle me sourit avec une sincérité poignante. Je frissonnai en me redressant sur mon siège. J'aurais pu réfléchir. Me demander si j'étais réellement capable d'endosser une telle responsabilité. Mais mon cœur battait si fort – puis je n'étais pas une personne très portée sur les analyses de risque et les réflexions méthodiques. Une sensation de bien être étrange coulait dans mes veines. J'aimais les enfants. J'avais toujours été douée pour jouer et rire avec allégresse, et malgré le désordre et la méchanceté qui régnaient dans le monde, je voulais l'accompagner dans cette nouvelle aventure. Je voulais être la marraine de son fils. Prise d'une impulsion joviale, je joignis les mains sur ma poitrine en me relevant. « Tu peux pas revenir sur ta parole cette fois ! » M'exclamai-je en sautillant sur place. « Je suis presque une bourge ! Oh mon dieu, on va avoir un bébé ! On va avoir un bébé ! » Répétai-je en riant. Je roulai des yeux avant de me calmer. Je rajustai les plis de mon bustier et m'assis gracieusement, comme si de rien n'était. « Alors au cas, ce n'était pas clair. Oui je le veux. » Couinai-je alors que la serveuse rapportait nos commandes. Je me jetai sur ma tisane et avalai une gorgée dans la précipitation. « Trop chaud. »Sifflai-je en tirant la langue.  
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() message posté Mer 11 Nov 2015 - 20:42 par Invité

Elsa & heaven — growing apart doesn't change the fact that for a long time we grew side by side; our roots will always be tangled. I'm glad for that. ✻ ✻ ✻ Au fond, elles n’étaient pas bien différentes. Elles étaient toutes les deux des blondes aux traits fins, angéliques, des blondes pas très hautes, légèrement caractérielles mais adorables dans leur genre aux dires de certains—exaspérantes aux dires des autres. Il n’y avait eu absolument aucune raison valable et tangible pouvant expliquer pourquoi cela avait été Heaven et non pas Elsa qui avait vu le jour chez les Howard-Clark. Cela aurait pu être l’inverse. Elsa aurait pu toucher du doigt ses grands rêves de princesse et de contes de fées. Elsa aurait pu vivre cette existence qu’elle avait toujours aspiré connaître, cette vie qui lui faisait envie et qu’elle jalousait dans ses pires instants, dans ses pires moments. Et, Heaven, quant à elle, aurait pu avoir un quotidien plus calme, une routine plus apaisante, loin des ordres et des règles de ses parents. Heaven aurait pu être plus heureuse, d’une certaine manière, en ne vivant jamais dans cette bulle dorée qui l’horripilait tant.
Elle ne savait pas où est-ce qu’elle aurait été, en cet instant. Elle ne savait pas si elle aurait mieux réussi, si sa vie aurait été un véritable enfer. Parce qu’après tout, on savait toujours ce qu’on perdait mais jamais ce que l’on gagnait ; elle aurait très bien pu abandonner cette existence de lady, de princesse, d’élite conditionnée, pour se retrouver dans les bas fonds de la misère, cette misère qu’elle avait eu la chance de ne jamais connaître malgré les fautes et les horreurs que les Howard-Clark lui avait montré à la place.
Elle se plaignait toujours. Elle avait l’habitude de le faire. Mais le monde n’était jamais noir ou blanc ; son quotidien et son enfance, sa famille et son rang, quant à eux, étaient peints de nuances de gris.
On pouvait refaire le monde avec des suppositions, oui. Mais, généralement, les personnes préféraient s’imaginer des existences plus belles, bien plus parfaites que celles qui ondulaient dans leur réalité ; jamais quelqu’un n’allait se demander s’il aurait pu connaître bien plus de peines  encore si les choses avaient été différentes. Heaven savait tout cela. Heaven savait qu’elle aurait sans doute pu connaître pire. Heaven savait que sa situation n’avait pas été si désagréable, que, malgré tout ce qu’elle pouvait en dire, elle avait eu de la chance au cours de sa vie. Elle n’avait jamais connu le besoin, même lorsqu’elle était partie de chez elle. Personne n’avait jamais abusé d’elle. Pourtant, elle trouvait encore le moyen d’idéaliser ce qui ne s’était jamais passé. Ce qui n’avait jamais eu lieu. « Bah quoi ? Parfois, je trouve ses théories vraiment intéressantes. Le mythe du sang bleu, par exemple. Peut-être que c'est une image abusive mais j'aime bien sa connotation poétique. Les bien-nés ont le teint pâle et diaphane qui laisse transparaître de jolies veines bleues. C'est une bonne couleur, » déblatéra Elsa et Heaven esquissa un sourire en l’écoutant. Elle n’était pas la seule à idéaliser des situations qu’elle enviait. Sur ce point, Elsa et elle se ressemblaient bien plus qu’elles ne voulaient sans doute l’admettre ; elles vivaient dans leurs pensées, vivaient dans leurs espoirs, vivaient dans leurs désirs improbables et irréalisables.
Et le pire, dans tout cela, était sans doute qu’elles y croyaient de tout leur coeur. « Tu sais, Glasto est une petite ville. Les gens s'occupent comme ils peuvent. Ils disent tout et son contraire, » lui expliqua-t-elle. Heaven l’observa, presque intriguée, se demandant ce qu’Elsa avait bien pu entendre là-bas, dans cette petite ville où les rumeurs rythmaient les existences des personnes restantes. Elle se doutait que les pires horreurs sur elle devaient aller bon train, surtout maintenant que Lord Howard-Clark était derrière les barreaux pour homicides volontaires. « Certaines choses doivent être vraies, j’imagine, »  finit-elle par admettre en haussant les épaules. « Les oreilles trainaient souvent dans le manoir de mes parents et les Howard-Clark ont toujours été le sujet préféré du commun des mortels. »  Elle esquissa un sourire, l’ironie teintant ses paroles quand elle parla des autres en les désignant comme les mortels. Elle ne le pensait, pas, non. C’était simplement une référence de plus à sa mère qui n’avait absolument aucune considération pour ces personnes qui avaient simplement eu moins de chance qu’eux.
Pour ces personnes comme Elsa.
Heaven ne put s’empêcher de sourire quand elle observa la réaction d’Elsa à sa proposition ; celle-ci poussa des cris d’allégresse comme si elle venait d’entendre la meilleure nouvelle du monde. Cela lui fit chaud au coeur, réellement ; c’était sa manière, également, de s’excuser d’avoir toujours eu ce qu’Elsa désirait et d’avoir osé s’en plaindre plus souvent que nécessaire. « Tu peux pas revenir sur ta parole cette fois ! Je suis presque une bourge ! Oh mon dieu, on va avoir un bébé ! On va avoir un bébé ! » s’exclama-t-elle et Heaven continua de rire. « Alors au cas, ce n'était pas clair. Oui je le veux. »  C’était sa mère qui n’allait pas être heureuse d’apprendre la nouvelle ; après tout, Elsa était la fille de la gouvernante, cette personne inférieure. Elle ne méritait pas ce titre. Elle n’était pas comme eux, comme les Howard-Clark.  Heaven chassa ses pensées au moment où la serveuse vint déposer leurs nombreuses commandes sur leur table, et Elsa se précipita sur sa tasse avant de s’étouffer à moitié. « Trop chaud. » Heaven leva les yeux au ciel, amusée. « Respire. Je ne viens pas de te demander de m’épouser, non plus, »  lui dit-elle, taquine. Avec le temps, elle avait fini par oublier la candeur, l’innocence, et la présence d’Elsa lui rappelait que leurs existences n’étaient pas forcément une damnation. « Techniquement, je ne sais pas si tu as le droit de te faire appelée Lady Elsa, maintenant… »  reprit-elle en levant le nez en l’air, mimant l’extrême réflexion. « Mais peu importe, les titres sont passés de mode de toutes manières. »  Elle prit sa tasse pour glisser un morceau de sucre à l’intérieur, ses yeux posés sur Elsa sans qu’elle ne détourne une seule fois le regard.
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