you are my hero. (egan)

Bloomsbury, si Robbie a pris un appartement dans ce quartier, ce n'est pas totalement par hasard. La proximité de son meilleur ami était un avantage considérable. La plupart du temps, Robbie passait chez eux pour passer un moment avec Egan et Grace, mais cette fois ils avaient décidé de se boire quelques verres dans le pub du coin entre adultes. Ils ont bien mérité un moment de détente après quelques gardes assez intenses à la caserne, Robbie adorait son métier, mais il pouvait parfois être très éprouvant. C'était relaxant de passer du temps avec Egan, lui aussi connaissant les mêmes péripéties au boulot. Même s'il ne le disait pas souvent, Robbie avait une admiration sans borne pour Egan, la façon dont il menait tout de front, son métier fatiguant, élever sa fille toute seule. C'est pour ça que Robbie n'hésitait jamais à aider son meilleur ami pour lui rendre la vie plus facile. Quand il pénètre dans le bar, son pote est déjà là, assis à une table, Robbie lui donne une tape sur l'épaule en passant avant de prendre place en face de lui. « Désolé, j'ai dû faire un crochet par la casa Callaghan, mon abruti de petit frère avait fait sauter l'électricité et personne savait comment la remettre. Donc on m'a appelé à la rescousse. ». Il soupire tout en autant son manteau. Malgré qu'il ait quitté la maison familiale depuis quatre ans maintenant, ses frères et sœurs même devenus grands continuaient à l'appeler pour un oui ou pour un non à la moindre occasion. Robbie restait le grand frère toujours présent quel que soit le besoin. « Et le proprio qui m'annonce que je vais devoir déménager à la fin du mois parce qu'il a trouvé un acheteur pour l'appart, rien ne va. ». Il s'agite un peu sur sa chaise, tapant de la main sur la table, rester inactif n'est pas toujours facile pour ses membres. Il savait qu'il allait retomber sur ses pieds de toutes les manières, il avait déjà commencé à chercher un nouvel appartement ou une colocation. Puis dans tous les cas, il pourrait toujours venir squatter quelques nuits sur le canapé d'Egan le temps de trouver une solution. Sa main finit par se saisir de la carte pour voir ce qu'il compte boire, espérant qu'il y trouvera la marque de son whisky favoris. Ses yeux s'illuminent en constatant que son whisky est bien présent dans la liste des boissons et à un prix raisonnable en plus, cette soirée s'annonçait bonne finalement. Pourtant Robbie trouve encore le moyen de râler à propos d'autre chose, râler c'est un peu sa marque de fabrique de toute manière. « Puis j'avais un cadeau pour Grace et j'ai oublié de le prendre... c'est bon promis j'arrête de râler. La forme toi ? ». Rien qu'à la mention de Grace, un sourire avait envahi le visage de Robbie. Il adorait cette gamine, qu'il avait vu grandir au cours des années. Il en était un peu gaga par moment, faisant tout ce qu'elle voulait, jouant avec elle à n'importe quel jeu et lui offrant des cadeaux. Parfois, il regrettait de ne pas avoir connu cette joie avec son fils, de le voir grandir, apprendre à marcher, lire, rigoler. Il aimerait pouvoir parler à Egan de son fils, qu'il vient juste de retrouver après avoir refusé de s'en occuper sept ans plus tôt, mais il était trop flippé par la réaction qu'il pourrait avoir. Lui qui avait tout sacrifié pour s'occuper de sa fille. Alors que Robbie avait choisi la solution de faciliter comme un lâche, même s'il avait ses raisons à l'époque, il avait toujours su que c'était une mauvaise décision et c'est sans doute pour cela qu'il n'avait jamais parlé à personne de cet enfant qu'il n'avait pas reconnu.

J'ai déposé Grace chez ma mère, ce soir j'ai rendez-vous avec Robbie, mon meilleur ami. On se connaît depuis un bout de temps lui et moi. Il a vu toute les facettes de ma personnalité pour tout vous dire, surtout celle de mon adolescence chaotique et il est resté tout le temps, la preuve que certaines personnes sont de vrais amis. On a les même passions et surtout le même métier qui nous rapproche. Il est toujours très sympa avec Grace et elle l'adore aussi. Si bien que quand je lui ai dis que je voyais Robbie elle voulait venir avec moi. J'ai du la convaincre que de rester chez sa mamie serait mieux pour elle, parce que son papa risquait de rentrer tard et que quand elle serait grande, elle pourra à son tour rentrer tard. Elle a rigolé et puis m'a dit que tout irait bien. Je me suis accroupi à son niveau histoire de savoir ce qui pourrait ne pas aller. « Je suis en sécurité avec mamie et tu n'est pas obligé de compter cinq fois pour vérifier la porte tu sais.» Elle m'a déposé un baiser sur la joue. La vérité sort de la bouche des enfants. Mes TOCs deviennent envahissant et elle a beau n'avoir que douze ans, elle aussi s'en rends compte. Je suis parti et j'ai fermé la porte. Je suis resté un moment devant la porte à me demander si je n'avais rien oublier. J'ai compter cinq fois avant de me décider à partir. J'ai toujours besoin de vérifier les choses cinq fois, parfois plus. Je m’énerve quand je fais ça mais je ne peux pas m'en empêcher.

Je suis arrivé avant l'heure au bar ou on a l'habitude de se retrouver. Robbie est arrivé et il n'avait pas l'air au meilleur de sa forme. Quelque chose avait l'air de le préoccuper. La famille Callaghan est assez surprenante une fois qu'on les connaît, mais je l'ai ai toujours bien apprécier, même si je dois reconnaître que son frangin en a fait des belles. Je n'ai jamais eu de frère, alors que mon père en a des tas, ce qui fait que j'ai des tas d'oncles aussi d'ailleurs, mais passons et revenons à Robbie.

« Il ne l'avait jamais encore fait ça. Quel âge il a maintenant? Le temps passe tellement vite, que j'ai tendance à oublier les anniversaires de tout le monde, sauf celui de ma fille évidement, de ma mère et du tiens.»

Comment pourrais-je oublier l'anniversaire de ma fille? Sans elle je ne serais sûrement pas devenu pompier et j'aurais fini par mal tourné. Elle est devenu mon équilibre, comme l'avait été Anna. Anna … Je me demande bien ce qu'elle a pu devenir, si elle est marié, si elle eu un autre enfant et si elle a fait le même coup à un autre. Je lui en veux encore énormément et je crois que je ne pourrais jamais oublié qu'elle nous a abandonné tous les deux. J'écarquille les yeux lorsqu'il me dit que son proprio le vire à la fin du moins.

« Merde, ce n'est pas génial, tu sais que tu sera le bien à la maison, Grace t'adore en plus.»

Je vois bien qu'il n'est pas au meilleur de sa forme. Je suis touché qu'il pense autant à ma fille, comme toujours d'ailleurs. Depuis qu'elle est né il a toujours été adorable.

« T'en fais pas, elle est beaucoup trop gâtée. Ça roule, enfin comme d'habitude mais toi on dirait que y a autre chose. Tu n'es pas comme d'habitude.»

Je n'ai pas de réels problèmes à part mes TOCS et je suppose qu'il a l'habitude de me voir avec, ils sont apparut quand Anna est partie et que je me suis retrouvée tout seul avec Grace qui venait d'avoir trois mois. Je n'ai jamais considéré ça comme une maladie et je refuse de le voir comme tel. Je ne suis pas malade.

Robbie ne peut s'empêcher de rigoler à la remarque sur les anniversaires, parce qu'il a lui-même un peu de mal de se rappeler de tous. Entre ses frères et soeurs, sa mère, Egan, Grace et ses autres collègues de la caserne, il y avait de quoi faire. Heureusement que les téléphones avaient été inventer pour lui sauver la vie, rien de mieux qu'une alarme pour vous rappeler l'anniversaire d'un proche. Surtout si cela permet de faire plaisir à quelqu'un. Celui qu'il oublie le plus souvent c'est son propre anniversaire, le dernier était lors d'une garde de nuit, en rentrant chez lui il avait foncé directement dormir zappant totalement quel jour on était. « Vingt-trois ans, aux dernières nouvelles il organise des paris illégaux sur des matchs de boxe, j'ai pas vraiment cherché à en savoir plus. C'est le jour où il aura un travail normal que je m'inquiéterai. ». Robbie avait fait quelques conneries dans sa jeunesse comme la plupart des gens, mais son petit frère avait atteint des sommets, en finissant au commissariat trop souvent pour que Robbie soit en mesure de garder des comptes. « T'en fais pas, elle est beaucoup trop gâtée. Ça roule, enfin comme d'habitude mais toi on dirait que y a autre chose. Tu n'es pas comme d'habitude. ». C'est le problème quand on se connaît depuis aussi longtemps, on est capable de lire les attitudes de l'autre assez facilement. D'ordinaire, Robbie n'a honte de rien en ce qui concerne Egan, il lui parle de tout sans peur d'être jugé, mais cette fois le sujet est délicat. Robbie a peur de décevoir son meilleur ami s'il lui avoue son secret qu'il a gardé depuis plus de sept ans maintenant. Toutefois, Robbie sait qu'il faut qu'il lui en parle, si quelqu'un peut le comprendre c'est bien son meilleur ami. Pour la première fois, il va parler de son fils à quelqu'un et il est mort de trouille. Ce grand gaillard qui n'hésite pas à rentrer dans des bâtiments en flamme est paniqué à l'idée que son meilleur pote puisse le détester, quelle ironie. Prenant une grande inspiration il décide de se lancer avant de changer d'avis ou de se dégonfler. « Bon j'ai quelque chose à t'avouer, je te demanderai de me laisser finir avant de m'engueuler ou de poser des questions. ». Face au visage d'Egan, il commence à se demander si c'était vraiment une bonne idée de lui parler de ça à lui. Il aurait peut-être mieux fait de tâter le terrain en commençant par une de ses sœurs. C'est trop tard pour faire marche arrière maintenant. « J'ai un fils de sept ans, Jacob. J'en ai jamais parlé à personne. ». Rien que de dire ça, il sent un poids invisible s'enlever de ses épaules. Pourtant, il sait bien que ce n'est pas suffisant comme explications et qu'Egan mérite d'entendre toute la vérité. « J'ai merdé, quand elle m'a annoncé qu'elle était enceinte, j'ai été surpris et je lui ai dit que je voulais pas de l'enfant. ». Ses yeux sont fixés sur la table n'osant plus relever le regard de peur de découvrir la réaction de son ami. Il doit sûrement le détester. « Je croyais pas pouvoir gérer un enfant en plus de ma mère et de mes frères et sœurs à l'époque. Je l'avais jamais vu jusqu'à y a quelques semaines, sa classe a visité la caserne et je l'ai reconnu. ». Sa rencontre avec Jacob avait été l'un des moments les plus flippant de sa vie, mais aussi l'un des plus émouvant. Il serait incapable de décrire ce qu'il avait ressenti quand il avait mis les yeux sur son fils pour la première fois. « Je sais pas comment m'y prendre maintenant, pour faire partie de sa vie. ».

Je souris lorsqu'il me rappelle l'âge de son frère. A vingt-trois ans … il en a fait des belles. On est un peu tous pareille, heureusement que l'on a grandit aussi depuis nos vingt-trois ans, parce que des bêtises on a a fait aussi et j'en ai peut-être plus que lui. Je ne peux pas m'empêcher de me reconnaître quand il parle de son frère. J'étais un peu comme lui, je tournais mal et puis Anna est arrivée et Grace surtout et tout ça à changé ma vie.

« Il s’arrangera avec l'âge, tu verras, il a de qui tenir.»

Je lui souris, il a un grand frère formidable, je ne doute pas que ça ira pour son frère. Il faut juste le temps qu'il se rende compte que la vie est précieuse et qu'elle a un prix. Quand il se rendra compte de ça, il changera. Je suis inquiet lorsqu'il me dit qu'il a quelque chose à m'annoncer. Je crains le pire, je ne sais pas pourquoi, mais vu la tête et la préoccupation que ça lui cause, j'ai l'impression qu'il va m'annoncer quelque chose de grave. Je le laisse parler donc puisqu'il me le demande. Je suis en effet surpris par son annonce. Je ne m'attendais pas du tout a ça. Ça me fait bizarre et je me sens un peu vexé qu'il e m'en ai pas parlé avant, mais je ne peux pas réellement lui en vouloir. Je comprends, que ça lui ai fait peur, j'ai eu aussi énormément de mal à me faire à l'idée que j'allais être peur. C'était effrayant.

« Wouah. Eh bien, quand tu as quelque chose à m'annoncer, c'est du lourd, mais je suis content que tu finisse par m'en parler et rassure toi je ne t'en veux absolument pas que tu n'ai rien dit avant. J'ai eu aussi des doutes quand Anna m'a avoué être enceinte, tellement de doutes, que le fait que tu en ai eu me semble normal. C'est vraiment bien que tu puisse le voir, mieux vaut tard que jamais.»

Je lui lance un sourire rassurant, espérant qu'il m'en dise plus sur cette histoire. Je ne compte pas en rester là, je veux savoir plus de choses. Il sait bien que je suis curieux, que je vais chercher à avoir plus de détails, plus de renseignements, autant sur son petit garçon, que sur la fille en question. Tant qu'il ne m'annonce pas que c'est Anna, je ne lui en voudrait pas. Je sais que c'est impossible de toute manière, elle n'a jamais refais surface et il me l'aurait dit bien avant, là je ne lui aurais pas pardonné. Je suis impatient d'entendre la suite.

« Wouah. Eh bien, quand tu as quelque chose à m'annoncer, c'est du lourd, mais je suis content que tu finisse par m'en parler et rassure toi je ne t'en veux absolument pas que tu n'ai rien dit avant. J'ai eu aussi des doutes quand Anna m'a avoué être enceinte, tellement de doutes, que le fait que tu en ai eu me semble normal. C'est vraiment bien que tu puisse le voir, mieux vaut tard que jamais. ». Si Robbie avait été une fille, il aurait probablement fait le tour de la table pour faire un câlin à son meilleur ami, mais comme c'est un gros dur il lui adresse un sourire soulagé. Il en vient même à se demander pourquoi il s''était monté autant la tête sur la réaction d'Egan, bien sûr qu'il allait le soutenir quoi qu'il ait fait. Il espère que les autres membres de son entourage auront une réponse aussi positive. Puis son meilleur pote a toujours les mots pour le rassurer, que le fait de flipper quand on apprend qu'on va être père est une réaction normale. Cela n'empêche pas Robbie de s'en vouloir d'avoir perdu sept ans à ne pas faire partie de la vie de son fils, seulement parce qu'il avait eu peur. « Le truc c'est que je sais pas vraiment si je vais pouvoir le voir, enfin c'est compliqué...sa mère s'est pas montrée très chaleureuse quand je lui ai parlé, elle veut pas que je le vois pour le moment. ». Il comprenait les craintes d'Hazel, il avait ressurgit dans sa vie sans prévenir après près de huit ans sans nouvelles. Il n'en pouvait plus d'attendre un signe, qu'elle prenne contact avec lui pour lui dire qu'il pourra enfin voir son fils. Il a l'impression d'avoir déjà perdu tellement de temps, que chaque jour de plus sans pouvoir rattraper le temps perdu lui semble insoutenable, mais il s'est promis de faire les choses convenablement. Malgré tout, il ne voulait pas foutre le bordel dans la vie de son gamin, détruire tout son quotidien. « Je sais pas si tu te rappelles Hazel, c'est elle la mère. ». Il y a de grandes chances qu'il s'en rappelle, tellement elle avait été importante pour Robbie à l'époque. La fille qu'on regrette toujours d'avoir perdu et pour laquelle tout le monde demande pourquoi vous l'avez laissé filer. Robbie avait dû inventer une histoire à dormir debout pour expliquer leur rupture à l'époque, pour ne pas avouer qu'elle était enceinte. « Disons qu'on s'est pas quitté dans de très bons termes, j'ai dit des trucs assez horribles à l'époque, je pensais pas qu'elle m'en voudrait encore autant pour ça. ». Pour dire vrai, Robbie ne s'était pas vraiment posé de questions sur Hazel, se focalisant plus sur Jacob. Il s'était imaginé que les deux adultes seraient capables de mettre leur rancœur de côté pour l'intérêt de leur fils. Robbie réalise soudain qu'ils n'ont rien à boire pour le moment et compte bien y remédier au plus vite. « Tu veux boire quoi ? Je t'invite, pour la séance de psy que tu m'accordes ? ». Malgré la lourdeur de la conversation, il arrive quand même à trouver son rire. Egan est une oreille merveilleuse quand il a besoin de vider son sac et il compte bien le remercier comme il peut.

Je n'ai pas a me demander pourquoi Robbie ne m'a rien dit. Je le connais assez bien pour savoir qu'il devait avoir peur de ma réaction ou de celle des autres. Il sait pourtant que je ne suis pas du genre à critiquer ses choix. On fait tous des erreurs, on prends tous des décisions que l'on regrette parfois, ce n'est pas pour autant que je lui jetterais la pierre. Il m'en parle parce qu'il est près, n'importe qui peut comprendre ça. J'espère pour lui qu'il pourra revoir son fils, le fait que ça soit visiblement compliqué avec la maman ne doit pas beaucoup l'arranger. Il ne mérite vraiment pas ça, Robbie est une personne formidable et ça me fait un peu de peine de savoir qu'il ne peut pas voir sa famille.

« Il faut lui laisser un peu de temps, elle se rendra compte que tu es quelqu'un de bien. Laisse le temps faire les choses. Je sais bien que c'est plus facile à dire qu'à faire et que j'ai l'air d'un vieux moralisateur, mais crois moi, je sais de quoi je parle.»

Je lui donne une petite tape sur l'épaule. Il me dit alors qu'il s'agit d'Hazel, oui je crois que je me souviens d'elle. Quand j'étais avec Anna, lui était avec Hazel. Je me doutais que c'était sérieux entre eux et je m'étais d'ailleurs posé des questions à leur séparation, du coup je crois que je commence à comprendre ce qui a du lui passer par la tête.

« C'est pour ça que vous vous êtes séparés?»

Je suis pratiquement certain que c'est pour ça. Je n'ai pas là non plus mon mot à dire, j'aurais aimé savoir la vérité c'est évident et j'aurais aimé qu'il ai assez confiance en moi pour me parler de tout ça avant. Je suis un peu vexé pour le coup mais ce n'est pas ça qui va briser notre amitié, même s'il aurait pu me dire tout ça.

« Essaie de lui montrer que tu es près à assumer tes responsabilités, que tu sera là pour ton fils et que tu veux rattraper le temps perdu.»

Je lui souris lorsqu'il me propose un verre. Je ne suis pas psy, loin de là, j'en aurais même plutôt besoin d'un alors ça me fait sourire, je suis juste attentif c'est tout.

« T'es mon meilleur ami Robbie, je ne vais pas te laisser avec tes ennuis, tu sais bien que tu peux tout me dire. »

J'ai donc accepté de prendre un verre, après tout on est là quand même pour ça à la base, donc je ne pouvais pas refuser et un petit verre de temps en temps, ce n'est pas dramatique.

Egan était le mieux placé pour comprendre sa situation. En plus, d'être son meilleur ami depuis tellement d'années qu'il le connaissait sur le bout des doigts, il était papa lui aussi. Pas le genre de papa comme à la caserne, qui ont trois gamins, une femme, un chien et deux hamsters. Non, un papa célibataire, qui doit faire des sacrifices pour son enfant. Robbie culpabilisait d'autant plus qu'il avait vu toutes les épreuves qu'Egan avait traversé avec Grace, alors de se dire qu'il avait fait subir la même chose à Hazel était difficile à admettre. Puis quand Egan parlait, tout semblait plus rassurant, comme si finalement tout allait finir par s'arranger. S'il suffisait de temps pour qu'Hazel décide qu'il avait le droit de voir son fils, alors il lui laisserait tout le temps qui lui faudra. Même s'il risque bien de tourner en rond jusque là. Il était loin de le considérer comme un vieux moralisateur comme il avait pourtant l'air de le penser, mais plus comme un vieux sage, bien qu'ils soient du même âge. « C'est pour ça que vous vous êtes séparés ? ». Il hoche la tête un peu penaud, parce qu'il aurait voulu avoir une histoire plus glorieuse pour expliquer leur rupture, mais ce n'est pas le cas. Il a simplement été lâche. Devant le soutien sans faille que lui affiche Egan, Robbie se sent con, de s'être renfermé sur lui-même, d'avoir porté ce poids sur sa conscience pendant autant d'années sans se rendre compte que ses proches auraient pu l'aider. C'était clair que si son meilleur ami avait été au courant avant, il aurait tenté d'aider Robbie de toutes les façons possibles. « Essaie de lui montrer que tu es près à assumer tes responsabilités, que tu seras là pour ton fils et que tu veux rattraper le temps perdu.». Encore une fois il hoche la tête, tout semblait si facile quand il le disait comme ça, mais la réalité était bien différente quand on se retrouve avec une Hazel en colère et peu coopérative en face de soit. Pourtant, pas question qu'il baisse les bras maintenant. Robbie fait signe à un serveur qui passe près de leur table et commande deux whisky, de sa marque préférée bien évidemment. « T'es mon meilleur ami Robbie, je ne vais pas te laisser avec tes ennuis, tu sais bien que tu peux tout me dire. ». Il le savait maintenant et il n'aurait définitivement pas dû douter de lui. Robbie se passe une main dans les cheveux, foutant encore plus le bordel dans sa coupe de cheveux par la même occasion. « Je sais, par contre j'ai pas d'autres nouvelles chocs à t'apprendre. Donc maintenant que j'ai fini de monopoliser la parole et l'attention, tu vas pouvoir me raconter ce qui se passe dans ta vie ? ». Même s'ils travaillaient au même endroit, ils avaient tout de même du mal à trouver du temps seul à seul pour parler de choses sérieuses. Robbie ne s'en plaignait pas, il adorait l'atmosphère joyeuse et bonne enfant qui régnait à la caserne la majorité du temps. « Dit ça a rien à voir, mais tu saurais pas qui s'est amusé à mettre des photos de clowns dans mon casier ? ». Les clowns étaient sa seule phobie et malheureusement ses collègues l'avaient découvert récemment, il avait donc découvert des photos recouvrant l'intégralité de son casier quelques jours auparavant. Malgré son enquête, il n'avait pas encore retrouvé le coupable, tout le monde niant formellement son implication. Au moins, il savait que si Egan avait des informations, il lui en ferait part.

C'est étrange de me dire que Robbie à un fils. Je me demande bien pourquoi il ne me rien dit. Il sait pourtant que je suis passé par là, que je ne l'aurais pas jugé de quelques façon que se soit. Il le sait très bien, je suis un peu déçu en réalité, il à sûrement une très bonne raison, la peur évidement, cela n'empêche pas qu'il aurait dû m'en parler. Je me sens un peu évincé, c'est idiot je sais bien. Mieux vaut tard que jamais. Je souris quand il me dit que c'est à mon tour de lui raconter ma vie, je hausse les sourcils. Je n'ai rien de spécial à dire.

« Il ne se passe rien d'extraordinaire, tu sais bien.»

Je lui fais un petit sourire. Je n'aime pas tellement parler de moi. Je suis plus facilement à l'écoute des autres qu'à parler de moi. J'aime ma vie, je n'ai aucune raison de ne pas l'aimer, ce n'est pas le souci, c'est juste que j'ai toujours eu du mal à me confier. J'avais Anna avant, mais quand elle est partie j'ai perdu toute la confiance que j'avais et je me suis méfier de tout le monde, alors je continue aujourd'hui et c'est même pire. Je n'arrive pas à avoir confiance, à me dire qu'une femme sera différente d'elle et qu'on ne me laissera pas tomber comme une vielle chaussette. Je n'ai plus que ma fille dans ma vie, plus qu'elle et quelques rares amis comme Robbie en qui j'ai évidement une confiance particulière puisqu'on se connaît depuis l'enfance.

« Enfin … Grace à compris que j'avais des tocs, elle me l'a fait remarqué l'autre jour et je ne sais pas tellement comment je dois le prendre. Plus elle grandit, plus j'ai l'impression que ça empire.»

C'est agaçant de toujours tout vérifier, de vouloir toujours tout contrôler, de refermer la porte cinq fois pour être sur qu'elle soit bien fermée, de refaire les mêmes gestes plusieurs fois. Je m'agace à faire les choses toujours en cinq fois et parfois c'est embêtant dans mon métier, parce que je n'ai pas toujours le temps de tout vérifier quand on est en intervention. Il faut aller vite et je n'ai pas l'occasion de faire les choses plusieurs fois, là je dois me contrôler, c'est le seul moment d'ailleurs ou je sais me contrôler, sans ça, c'est toujours la même chose. Les gens me regardent parfois bizarrement quand je refais les mêmes choses plusieurs fois et ça en devient insupportable.

« Il ne se passe rien d'extraordinaire, tu sais bien.». Robbie hausse un sourcil pas vraiment convaincu, parce que lui et Egan étaient tellement similaires sur certains points, sans doute pour ça qu'ils étaient devenus meilleurs amis. Pas très bavards tous les deux et n'aimant pas spécialement parler d'eux, ils avaient trouvé leur propre façon à eux de communiquer. Il suffisait parfois d'un regard. Ils leur étaient déjà arrivés d'exploser de rire en plein milieu de la caserne simplement après s'être regardé, ce qui laissait toujours perplexe le reste de leurs collègues. Robbie lui rend un sourire encourageant, parce qu'il y a toujours quelque chose à raconter surtout quand on a un enfant. Il ne se lasse jamais d'entendre les nouvelles passions de Grace ou le dernier événement dans sa petite vie. « Enfin ... Grace a compris que j'avais des tocs, elle me l'a fait remarquer l'autre jour et je ne sais pas tellement comment je dois le prendre. Plus elle grandit, plus j'ai l'impression que ça empire. ». Robbie grimace un peu en entendant ça, mais il faut reconnaître que ce moment semblait inéluctable. Tout le monde se rendait compte des tocs d'Egan et ce n'était plus qu'une question de temps avant que sa fille finisse par en comprendre le sens. Après tout, c'était elle qui était le témoin le plus fréquent des obsessions de son papa. Robbie ne savait pas trop comment réagir, le sujet des tocs de son ami était toujours délicat. Avec son besoin irrépressible de sauver les gens, il avait tendance à vouloir tout arranger, mais dans cette situation il était impuissant, complètement démunie, incapable de dire ou faire quoi que ce soit pour que ses tocs disparaissent. Pourtant, il aurait tout donné pour que ce soit le cas. « Outch. T'en as parlé avec elle depuis ? ». Si la situation était déroutante pour Egan, elle devait l'être également pour la petite fille. Robbie ne savait pas trop quoi dire, c'était un sujet qu'il n'abordait jamais de lui-même attendant qu'Egan évoque le sujet de lui-même. Il était déjà arrivé à Robbie de s'embrouiller avec certains de ses collègues pompiers à cause des tocs d'Egan, ils avaient mis en doute les capacités du jeune homme et refusant de l'avoir dans leur équipe. Robbie avait failli en venir aux mains, protestant qu'aucun incident n'était jamais arrivé lors d'une intervention et que de toute façon Egan ne prendrait jamais le risque de les mettre tous en danger. Robbie avait une confiance aveugle en son ami et savait à quel point il aimait son métier de pompier. « Tu sais t'es un papa génial, qu'elle sache pour tes tocs y changera rien. ». Robbie hésitait souvent à évoquer le sujet d'un traitement à son ami, oui depuis le temps il avait épuisé toutes les pages possibles concernant les tocs sur google. Ils n'avaient plus aucun secret pour lui et il savait que des différents traitements existaient pour réussir à gérer ces obsessions qui peuvent gâchées la vie.

Je bois une gorgée de mon verre et regarde Robbie, il sait que j'ai du mal avec mes tocs, que je n'aime pas en parler parce que tout le monde me trouve un peu bizarre quand ils savent ce que j'ai. Je ne suis pourtant pas fou. Je suis seulement obligé de tout vérifier plusieurs fois, plus que les autres et ce depuis mes dix-huit ans. Je me suis fait à mes tocs, les autres pas vraiment. J'ai toujours l'impression qu'on m'observe et je n'aime plus vraiment ça. J'aimais ça à l'époque du collège, quand je me prenais pour un caïd et que j'aime qu'on ai les yeux sur moi, mais Anna à tout changée. Je lui en ai fait voir de toutes les couleurs, je le sais et c'est peut-être bien à cause de ça qu'elle est partie, même si l'arrivée de ma fille à tout changé, il n'en reste pas moi que je sais que son départ est entièrement de ma faute et ça je n'arriverais jamais à l'accepter. Elle m'avait laissée un mot sur l'oreiller. « Egan je pars. Prends soin de Grace.» pas d'explications, juste un foutu mot que je garde depuis toujours sur moi, histoire de me souvenir à quel point j'ai pu être con. Ma fille à beau être intelligente je ne suis pas certain qu'elle soit encore prête à comprendre. Je n'ai pas envie de lui imposer ça.

« Je ne sais pas si c'est une bonne idée. Je …»

Je n'arrive juste pas à en parler. C'est comme si tout revenais à chaque fois à Anna au jour ou elle m'a quitté. Je refuse de dire que je suis malade. Je n'aime pas ce terme et je n'ai pas envie qu'on prenne en pitié. Ce n'est rien du tout et cela finira par passer, j'en suis convaincu, même si au fond c'est de pire en pire. Je crois que j'ai vraiment besoin de me soûler ce soir. Je bois une autre gorgée sentant l'alcool me brûler la gorge. Si tout ça était différents, je ne serais sûrement pas là à broire du noire. J'adore ma fille, il n'y a pas de doute là-dessus, c'est juste que j'ai un peu de mal à être célibataire. J'ai toujours connu Anna et ça a été difficile d'être jeté si facilement.

« Je n'ai pas envie qu'elle prenne pour un cinglé ou pour un malade mentale. Je sais ce que les gars disent de moi. Je les entends parler, je n'ai pas envie qu'elle dise la même chose.»

Je sais que mes collègues ne sont pas tous aussi compatissant que Robbie, même si je n'ai jamais vraiment eu de problèmes au travail et que le capitaine de la brigade est au courant aussi, je me doute bien que ça doit jaser et je n'ai pas envie que ma fille voit ça.