"Fermeture" de London Calling
Après cinq années sur la toile, London Calling ferme ses portes. Toutes les infos par ici (fb) animal kingdom - young theomas 2979874845 (fb) animal kingdom - young theomas 1973890357
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() message posté Mar 21 Avr 2015 - 9:41 par Invité

2001 ♦ leave off losings, and take on winnings, erase all mortal ends, give birth to only new beginnings, in a billion years of morning and a billion years of sleep

La porte de l’amphithéâtre claqua en se refermant et je levai les yeux au ciel, agacé. Aucune délicatesse. Aucune dignité dans leurs gestes. Je me retrouvai seul. Ils avaient fini par comprendre que j’aspirai à ces moments d’isolation durant lesquels je pouvais me confronter à moi-même. Me parler. M’entendre respirer pendant quelques minutes et rêver. Parfois je m’endormais, la tête posée entre mes bras croisés sur la table. Parfois je mangeais une pomme juteuse sans en laisser un seul pépin – trognon y compris. Parfois je fixais le ciel par la fenêtre et voyais les oiseaux danser sur la voûte bleutée qui enrobait le monde. Parfois je lisais aussi, l’un des nombreux livres que j’avais dans mon sac. L’un d’eux se trouvait sur la table, à quelques centimètres de mon visage et j’en observai la reliure, un sourire serein posé sur les lèvres. Et parfois je réfléchissais. Je voyais dans mon esprit les visages de tous mes camarades et j’avais l’impression qu’ils se ressemblaient tous. Qu’ils disaient tous la même chose. Qu’ils avaient tous les mêmes intérêts. Et que, malheureusement, aucun d’eux n’avaient compris quoique ce soit au monde dans lequel nous vivions. L’odeur du bois verni assaillit mes narines et je fronçai le nez : un vieux bois lisse. Tout ce que j’exécrai le plus au monde. J’étais le feu qui allait tout brûler de toute façon. C’était ce qu’ils avaient dit en sortant – sur le ton de la plaisanterie, certes, mais tout de même. On peut pas laisser Knick tout seul, il risquerait de cramer le bâtiment. Et c’était ce que je voulais faire, putain. Recouvrir le sol d’essence et balayer l’espace des flammes ardentes de la révolution. J’y croyais. Je levai les yeux au plafond : c’était , mon perchoir adoré sur lequel je serai juché pour voir le monde brûler. Je voulais assister à sa renaissance puis m’envoler en aigle solitaire. Je ne voulais pas le conduire, ce monde. C’était un idéal qui ne me convenait pas. Je désirais simplement être présent lors de l’éveil de sa beauté la plus pure. Le changement n’était qu’évolution. Tu veux changer le monde ? La voix de mon père résonna dans mon crâne et je fermai les yeux, déjà excédé. Rends-toi d’abord compte que t’en fais partie. Je n’avais pas envie de changer. Tout me semblait si simple en réalité. Il me suffisait d’être un peu plus orgueilleux que les autres, et la réussite germait d’elle-même. J’apparaissais peut-être comme un être destructeur et utopiste, je n’en restai pas moins sûr de mes idées et de mes valeurs. Un axe droit au milieu du chaos. J’allais le suivre jusqu’au bout. Je savais déjà qu’il me mènerait en enfer. Mais je me moquais que l’on brûle mon âme. J’allais incendier celles de tous les autres. Et j’étais un aigle – je volais au-dessus des flammes.

Si tu veux changer le monde, tu dois d’abord réaliser que tu en fais partie. C’était la devise de mon père lorsque je m’emportais trop à table. Parce qu’il considérait que je n’allais jamais changer. Que j’étais voué à une sorte de désillusion. Mais la désillusion, je l’avais déjà eu. Vous savez, quand on se rendait compte que le monde était laid, finalement. Que les hommes étaient laids et mal rasés. Que les femmes étaient laides et échevelées. Que les animaux avaient plus de morale que les humains eux-mêmes. Que le feu, c’était ça, la solution. Je trouvais quelque chose de libérateur dans l’autodestruction. La satisfaction de soi n’existait plus, si ce n’était dans sa simplicité la plus pure. Le seul moyen de croire au bonheur était de regarder là où il ne cesserait jamais d’exister, n’est-ce pas ? Mais cette connerie était un putain d’arc-en-ciel : on s’approchait et il reculait. Alors on rêvait qu’on l’avait atteint et puis on finissait par ouvrir les yeux. C’est ça ta désillusion, papa. Sauf qu’il me regardait toujours avec cet air blasé et cette foi protestante qui me fatiguait terriblement. Comme quoi Dieu avait choisi ses élus et qu’on était ou non prédestiné à fouler le sol de Son royaume. Qu’on le savait lorsque l’on vivait une vie heureuse, prospère et agréable, proche du Seigneur. Et tu veux tout brûler ? Ouais papa, je veux brûler ton Dieu parce que ça, c’est de la désillusion. Maintenant observe mon regard ardent et vois à quel point je te demande d’aller te faire foutre. Je me redressai soudain, pris d’un besoin de bouger. On avait cours dans une demi-heure, j’avais tout mon temps. Le soleil caressait mon visage et je profitai des derniers effluves de l’été avec satisfaction. Comme si j’avais besoin d’un accord et qu’on me le donnait en cet instant. Un accord pour quoi ? Étendre mes ailes et montrer ma liberté ? Oh, mais mon orgueil n’était-il pas mon trait de caractère le plus célèbre de toute l’université ?

Je me levai finalement et grimpai sur une table. Je commençai à marcher sans pouvoir me débarrasser de l’image de mon père, coincée dans mon esprit bouillant. Et arrête de voler toutes les allumettes de la cuisine, tu commences vraiment à être chiant, Tom. Non, tout sauf ça. Tout sauf la morale paternelle. Mais qui étais-je pour juger ? Si j’avais un fils tel que moi, je me serais sûrement inquiété pour lui, pour sa santé, pour son avenir. Même s’il me répétait qu’il voyait clairement son avenir, droit devant lui. J’avais peut-être abandonné l’idée d’être père un jour en voyant comment mon propre géniteur se débrouillait. Mais, d’une manière ou d’une autre, je n’allais pas donner naissance à d’autres Hommes. J’allais simplement offrir au monde sa renaissance en priant pour qu’il reste vierge. Peut-être que c’était ça, mon utopie en fin de compte. Me tenir fier au milieu des ruines recouvertes d’une Nature qui avait repris ses droits. Un âge d’or impossible. Les Hommes me semblaient trop bruyants. Ils étaient trop nombreux. Je n’étais pas un dieu, je n’acceptai pas les gens dans mon royaume. Je créais simplement un autre monde dans lequel je pouvais dormir paisiblement et ne plus rêver de flammes. Malheureusement, je craignais qu’il ne soit trop tard. J’avais vendu mon âme aux enfers et je me laissais fondre pour atteindre le bonheur. Mais fondre pour ces idéaux-là ne me dérangeait pas. Je n’étais pas altruiste, j’étais utopiste et je ne comprenais pas que l’on puisse s’opposer à mes idées. Elles étaient pourtant si belles, si justes, si droites. Elles pouvaient mettre tout le monde d’accord. Non ? Et j’imaginais le bonheur ardent qui nous attendait tous et je ne pouvais que me dire : si. Je sortis mon paquet de cigarettes de ma poche et craquai une allumette. Je soufflai la fumée en regardant droit devant moi. Le bureau vide du professeur. Je me tenais debout sur la table, immobile et élancé vers le ciel, je plissai des yeux avec un mépris discret et continuai à fumer lentement, profitant seconde après seconde de mon insouciance et de mon irrespect. J’étais seul et j’observais. J’étais tout simplement intouchable.

La porte s’ouvrit néanmoins et je fronçai les sourcils. Non, sérieux ? Ma demi-heure n’était pas finie, loin de là, et on venait déjà perturber la grâce qui s’emparait de moi. Allez tous vous faire foutre, songeai-je en me retournant dans un soupir. Mes yeux noirs se posèrent sur la silhouette qui était apparue au coin supérieur gauche de l’amphithéâtre. Je levai le menton pour le toiser. Je n’éteignis pas ma cigarette et ne descendis pas de la table. Je penchai la tête pour le détailler de façon à ce qu’il se rende compte qu’il m’avait dérangé. Il était grand et bien bâti mais aussi jeune que moi. Ses cheveux châtain foncé étaient coiffés et ses yeux, dont je ne pouvais pas deviner la couleur de là où je me trouvais, m’observaient avec un sérieux presque déconcertant. Je passai ma main dans mes boucles négligées et haussai les épaules, perplexe. Il comptait faire quelque chose ou simplement se tenir là, à me regarder avec cet air suffisant ? Oh, je pouvais être suffisant. Je pouvais tout être. Je m’adaptais selon les situations. Mais ce que je voulais, là, c’était être seul. Et il avait brisé cela. Je me grattai la nuque et m’adressai finalement à lui. « Le cours commence dans une demi-heure. » Tu peux donc aimablement te casser, merci. Il ne me fit pas le plaisir de comprendre mon message subliminal. Il y avait des gens butés sur cette terre. Ne le voyant pas réagir, je me résignai en pensant qu’il se lasserait de mon personnage avant que je ne me lasse du sien. Il pouvait rester dans son coin, il ne me dérangeait pas tant que ça finalement. L’ombre que mes flammes faisaient danser sur les murs. Elle était toujours là, n’est-ce pas ? Je lui accordai un sourire amusé – le premier de beaucoup, probablement – avant de me tourner et de marcher à l’autre extrémité de la table. Je m’arrêtai à mi-chemin et lui jetai un nouveau regard un peu moqueur. Quelque chose me gênait terriblement en lui. Toute son attitude reflétait quelque chose qui m’empêchait de me concentrer de nouveau sur mes pensées antérieures. Cela m’énervait, évidemment, mais je restai impassible. Il ne dégageait absolument rien. Il était lisse et froid. J’étais froid, mais je n’étais pas lisse. J’avais le relief déchiqueté des montagnes écossaises dans mon esprit affûté. Lui, au contraire, avait la placidité déroutante d’un lac, sans sa poésie et sa sérénité. Quelque chose se cachait sous la surface. Un monstre ? Étions-nous donc deux éléments opposés d’un même paysage ? Je clignai quelques fois des yeux avant de reprendre. « Bah reste pas planté là. Tu fais peur, limite. » Sans réussir à expliquer pourquoi, je désirais le voir s’approcher. Pour pouvoir reculer, pour que cela ait un sens. Ma main voulait passer dans sa chevelure pour l’ébouriffer d’un geste taquin, histoire de briser cette glace qui recouvrait son corps. Je portai la cigarette à mes lèvres, mes mouvement s’avérant se diriger vers une sorte de séduction étrange et déplacée, puis je croisai mes mains dans le dos et marchai à reculons jusqu’au bout de la table afin de ne pas le quitter des yeux. Il n’y avait pas de place pour deux aigles sur le même perchoir. N’avait-il pas compris cela en arrivant ? Il semblait coriace pourtant, ce rapace.
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Theodore A. Rottenford
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() message posté Dim 3 Mai 2015 - 20:02 par Theodore A. Rottenford
“I am depent on you Thomas, so lower your eyelids to die with me in the dark.” Donc : La plupart des hommes refusent de nager sans avoir appris à le faire. Instinctivement, ils redoutent la noyade. Après tout, ils ont été crée pour évoluer sur la terre ferme et non pour sombrer dans les profondeurs de l’océan visqueux et inconnu. C’est assez logique. Instinctivement aussi, les hommes ne sautent pas du hauts des bâtiments parce qu’ils ne savent pas voler. Ils ne prennent pas la peine de réfléchir ou de penser non plus, puisque ce n’est pas un acquis. La vie se résume aux actes simples et naturels ; respirer, manger, dormir, baiser parfois – ou tout le temps, en fonction des gouts… Daaa c’était trop stupide pour moi. Je plaquai mes mains sur mon visage avant de bailler. Je n’étais pas défaitiste par nature. Je méprisais les gens pour le plaisir. Je ne ressentais aucune compassion, aucune sympathie – rien du tout. Les visages défilaient sous mon regard sombre, identiques à des poupées de cires éclopées. Ils suivaient le même standard avec la même allure monotone et triste. Mais où va le monde ? Je relevai lentement mon visage vers les arcs du ciel, attendant un miracle divin ou un signe annonciateur d’une catastrophe imminente. J’aimerais que la tragédie de l’existence détruise tout sur son passage. J’aimerais que la mort foudroyante emporte toute trace de quiétude sur la planète, ainsi les germes de l’humanité pousseront à nouveau ; plus vaillants et plus impitoyables. Ma perception des choses était peut-être cruelle ; mais l’insouciance de la jeunesse me créait l’illusion d’un pouvoir absolu. Mon père pensait que j’étais un vrai génie de la douleur. Mes talents pour les affaires de la pègre s’étaient manifestés à un âge très précoce, contrairement à mon frère – plus dissipé et détaché de la famille. Ma petite sœur quant à elle n’était qu’une ombre volatile. Je ne savais pas l’aimer correctement. C’était un orchestre féminin, à elle toute seule. Toute sa vie était rythmée par des événements théâtrales que personne ne semblait comprendre, puisqu’elle s’était auto-proclamée incomprise, paria et laissée pour compte. Je ne savais pas d’où elle tirait tout ce vocabulaire à son âge. L’autre monde lui avait certainement fait signe en effleurant son âme d’un peu trop près. A dix ans, elle était déjà complètement tarée.

On se retrouve après les cours, Teddy. Les promesses de dépravations de mon meilleur ami raisonnaient encore dans mes oreilles. J’entendais son rire démoniaque fuser tout autour de mon esprit. Je ne pouvais songer à sa perte sans être déchiré par une sensation de chagrin profonde. Nous étions voués au même avenir incertain après tout. Un jour, il sera chef de la mafia de Belfast et je m’amuserais à saper son autorité avec véhémence. Je n’en ferais qu’à ma tête, et il vivra avec mon amitié sur la conscience. Un sourire taquin se traça sur mon visage alors que je me penchais pour contempler les jambes dénudées des étudiantes de dernière année – plus vieilles, plus expérimentées et plus sexy que les autres. Je glissai le long des couloirs d’un air pensif avant de me résigner à retrouver la calme de la salle de cours. Je pensais que me ranger du côté de la solitude pourrait adoucir mes mœurs, mais je me voilais la face encore une fois. Au loin, une silhouette grise et irrégulière transcendait dans le vide afin de troubler le cours de mes profondes réflexions. C’était Thomas Knick – ta – mère, quelque chose comme ça. J’avais entendu parler de son esprit vif et de ses délires révolutionnaires. C’était un antisocial, incapable de gagner l’affection de la foule et pourtant il daignait encore combattre la fatalité sans être armé. Mes yeux gris sombre, presque noir, se perdaient sur les marches de l’amphithéâtre tandis que son visage pâle se tournait vers moi. Il avait une cigarette coincée entre les lèvres. Je ne pouvais pas distinguer les traits de son expression en détails, mais il me suffisait de m’attarder sur sa posture vaniteuse pour comprendre que j’étais en présence d’un prédateur vorace. J’haussai les épaules avec désinvolture afin de renvoyer une image propre et orgueilleuse à mon tour. « Le cours commence dans une demi-heure. » J’arquai un sourcil tout en restant silencieux. Il reste une demi-heure et tu la gaspilles à fumer ? Tu crois que l’odeur nauséabonde de ta cigarette se sera évaporée d’ici là ? Où tu penses marquer ta trace dans l’histoire peut-être? Les volutes de fumées sont une essence fugace et fugitive - insaisissable, oui, mais bientôt elle s’écrase contre les murs délabrés de l’université pour disparaitre à tout jamais. Pathétique ! Ma première impression de ce gars était peu glorieuse, mais contrairement aux autres, il avait eu le mérite d’attiser un sentiment étrange au fond de ma poitrine. Le feu grouillait dans mes veines comme un mal terrible et inadmissible. Je croisai mes bras en suivant ses mouvements dans la pièce. Il bougeait lentement, comme une étoile dansante et resplendissante, mais je l’imaginais déjà tomber. Parce que les étoiles se transforment en poussières – et que les hommes comme moi, balayent la poussière d’un revers de main. « Bah reste pas planté là. Tu fais peur, limite.» Grinça-t-il, me sortant de ma torpeur. Je me raclai la gorge sans esquisser le geste. Je ne voulais pas obéir à ses fantasmes, ni m’approcher de sa nicotine malveillante. Je soupirai lentement avant de m’adosser au mur. « Non. Tu pues. » Claquai-je en serrant les dents. Je fronçais les sourcils, alors que mon corps se penchait involontairement en avant – défiant mon autorité et succombant aux charmes déraisonnables de mon camarade de classe. Je fis quelques pas avant de me raidir entre les rangées désertes. « Viens. » Soufflai-je d’une voix captivante, l’invitant à rétrécir la distance qui nous séparait. Etrangement, je voulais toucher sa cigarette et la fourrer dans ma gorge acérée. Je voulais gouter à sa drogue malsaine pour lui prouver que ce n’était pas ses addictions qui le rendait lamentable, mais l’objet de sa présence même à mes côtés. Il n’y avait pas de place pour deux aigles sur un perchoir ? Pourtant, je n’en voyais qu’un.

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() message posté Mar 5 Mai 2015 - 18:03 par Invité
« Non. Tu pues. » Je m’immobilisai et haussai les sourcils, amusé. Avait-il donc peur que je le brûle avec ma cigarette ? Je le toisai sans ciller. Il s’adossa au mur et soutint mon regard. La fameuse glace inébranlable. Il avait parlé, c’était déjà un net progrès. Je portai à nouveau le filtre à mes lèvres, une lueur de défi au fond des yeux. Je pouvais passer outre ses commentaires. S’il m’énervait trop, je savais jouer le traître de l’histoire et ainsi le faire sombrer. Mais avait-il de la dignité ? Impossible de le deviner : il était lisse et je glissais sur le rocher qu’imitait sa peau pâle. Je plaçai ma main sur mon cœur et adoptai un air navré. « Tu me blesses. » Au moins, j’avais une odeur. Un caractère. Des sentiments. Je ne me prenais pas pour un buste de marbre, bombant ma poitrine pour paraître plus grand. J’étais déjà grand. J’étais sur mon perchoir, là, juché sur cette table étroite, et je m’y déplaçai sans même calculer mes mouvements. Je savais que je n’allais pas tomber. J’étais au bord du gouffre mais celui-ci ne m’attirait pas. J’avais les yeux rivés vers le ciel. J’y étais déjà. Ne me vois-tu pas voler ? Je devinai un désir dans son allure étrange. Il venait de se pencher en avant pour s’approcher, finalement. Je souris, satisfait, mais n’esquissai pas le moindre geste pour réduire la distance à mon tour. A lui de s’envoler. Il descendit quelques marches et je l’observai, tournant lentement la tête au rythme de ses pas hautains. Aux aguets. Il ne voyait pas l’aigle, il devait voir le chat. Nous ne semblions pas faits pour nous entendre, et pourtant je ne voulais plus qu’il s’en aille. Il n’avait dit que quelques syllabes détestables, mais il était captivant. Car il dissimulait tout. Il se limitait à une brève phrase alors que je me laissais toujours aller à des ornements, des fioritures dans ma voix mélodieuse. Incapable de m'en tenir au sens, je tournai simplement autour. Ainsi je parlais avec une désinvolture qui en agaçait plus d’un. C’était ma fierté. Pouvoir maîtriser les émotions d’un homme par le simple ton de ma voix. Lui, au contraire, était clair et précis. Il frappait les hommes comme s’il plantait un pieu dans la glace. Figure-toi que j’ai fait fondre la glace il y a longtemps. Tu ne me briseras pas ainsi, tu le sais bien.

« Viens. » Un ordre. Tiens-donc. Étonnant. Mon sourire s’accentua. Il se tenait debout à l’opposé de la table sur laquelle j’avais élu domicile et me lançait un regard froid et autoritaire. Il voulait savoir quelque chose. Obtenir quelque chose, de moi probablement. Surtout ne jamais me laisser avoir autant de pouvoir sur un autre. Le mystère marchait-il donc ? Cela me semblait trop facile. Il n’était pas du genre à se laisser avoir par le gamin révolutionnaire qui fumait ses longues cigarettes dans les salles de classe. J’étais un vulgaire microbe à ses yeux. Je le ressentais ainsi. Mais ce n’était pas moi comme dans personnellement. C’était tout le monde comme dans généralité. Je vivais pour ce sentiment de supériorité. J’aurais pu prétendre l’avoir créé, mais je n’avais même pas vingt ans. On ne me battait pas à mon propre jeu. Quant au jeu des autres, j’en apprenais les règles pour mieux pouvoir tricher. Il ne ferait pas exception. J’esquissai un pas vers lui, puis un autre, la cigarette plantée dans la bouche et les mains dans le dos. Je glissai comme un chat sur cette table jusqu’à en atteindre l’extrémité opposée. Je baissai mes yeux sombres vers lui et saisis ma cigarette, soufflant lentement la fumée dans sa direction, sans pour autant qu’elle gagne son visage figé. Je comprends que tu ne vois pas d’aigle. Je n’étais pas qu’un simple animal. Ce garçon m’attirait. J’avais beau soutenir son regard, j’y rencontrais une frontière infranchissable. Il cachait quelque chose. Je voulais savoir quoi. C’était aussi simple que cela. Balayons le reste, tu sais très bien que ce ne sont que des futilités. Là, quelque part, au milieu de ta cage thoracique, je perçois un diamant luisant et noir. Je l’entends battre, mais c’est tout. Il n’est peut-être qu’une illusion. Je l’ignore, mais je veux en avoir le cœur net.

Je descendis souplement de mon perchoir et m’adossai simplement au bord de la table, les mains plaquées dessus, les bras tendus. Toi, viens. Je veux savoir ce que tu me veux. Je penchai la tête, toujours souriant. Je n’avais pas honte de jouer un jeu pareil. La séduction déplacée. Soit il y jouait aussi et dans ce cas, tout pouvait devenir très amusant. Soit il s’en moquait, et cela me faisait rire à mon tour. Soit ça l’agaçait, mais j’étais né pour agacer, cela ne ferait que me conforter dans mon idée. Je ne connaissais pas son nom. Probablement près du ciel mais aussi de la terre. On apprenait tant sur les gens en écoutant les sonorités de leurs prénoms. « T’as oublié le mot magique. » finis-je par répondre après avoir retiré ma cigarette de mes lèvres. « Heureusement que je suis un type sympa. » Je me décollai alors de la table, penchant mon buste en avant pour m’approcher encore. Je passai à côté de lui, les yeux rivés vers le sol dans une attitude pensive – et probablement moqueuse, mais qu’est-ce qui ne l’était pas chez moi, je vous le demande. Je tournai lentement autour de lui d’une démarche désinvolte et élégante puis me replaçai en face de lui et haussai les sourcils avec malice et dédain. « C’est quoi ton nom ? » J’avais probablement dû le croiser. Malheureusement, il fallait un peu plus qu’une simple ébauche de visage dans mon esprit pour que je puisse me rappeler de lui. N’oubliez pas qu’il faisait toujours partie de la généralité. Il se noyait dans l’infinité des hommes que j’avais rencontrés. Il leur ressemblait toujours. Mais nous étions seuls aujourd’hui. Il était temps que j’en dessine un dans ma mémoire. Pour pouvoir m’identifier à lui jusqu’à ma mort. Pour pouvoir le comprendre dans ses moindres détails et mieux réussir à l’achever le jour où je jugerai cela nécessaire. Il était grand, beau et lisse. Il était surtout temps que je fissure cette glace et que sa peau immaculée soit marbrée du rouge de sa colère, pompant le sang qui coulait dans ses veines jusqu’à le faire exploser. J’en étais capable. Personne n’était infaillible. Il était temps de brûler les ailes de l’aigle prétentieux, aussi splendide soit-il. « A moins que tu ne parles pas aux inconnus. C’est plus prudent, je te l’accorde. » raillai-je en ponctuant mes mots d’un mince sourire. Il était temps d’ouvrir son ventre pour y retrouver le joyau noir qui s’y cachait.
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() message posté Jeu 14 Mai 2015 - 16:01 par Theodore A. Rottenford
“I am depent on you Thomas, so lower your eyelids to die with me in the dark.” Toujours du latin et du grec. Toujours ce qu’il y avait de plus compliqué pour exprimer des idées simples et banales. Sa voix mélodieuse transcendait dans la pièce froide et solitaire avant de se faufiler vicieusement dans ma peau. Son visage était sombre, dénaturé, édulcoré et pourtant si captivant. Je retins mon souffle en suivant ses mouvements disharmonieux. Il n’était pas aisé à saisir, mais j’étais d’ores et déjà prisonnier de son allure noble et détachée. Les arabesques de sa chevelure noire me renvoyaient immanquablement vers les ombres imaginaires des bois de Belfast. J’avais passé mon enfance à courir derrière une présence maléfique sans en effleurer le plumage, mais aujourd’hui, à la lumière d’un monde nouveau, cet étudiant pompeux m’apparaissait comme une forme d’absolution. Je fantasmais sur les fumées grises qui enlaçaient sa mâchoire, mais c’était lui qui fumait les poisons de la nicotine. Je formulais des proses furieuses à son égard, mais c’était lui qui agissait de manière antipathique. Je me sentais triste et désemparé en constatant que je n’étais pas complètement isolé. Il y avait une autre version du grand génie de la douleur, plus admirable et plus imposante encore. Je joignis mes mains sur ma poitrine en sifflant entre mes dents, comme pour consoler ou gronder mon esprit. Me voilà, devant un inconnu dont l’image était visiblement identique à la mienne. « Tu me blesses. » Murmura-t-il en feignant une expression navée. J’arquai un sourcil en roulant des yeux. Je commençai à descendre les marches avec lenteur avant de tendre les bras dans le vide. Mes doigts dansaient allègrement au gré d’une symphonie muette dont j’étais l’unique maestro. Il ne pouvait pas comprendre. Il ne pouvait pas entendre les grandes cloches de mon église saluer sa dépouille pourrissante et mes grands pas pressés claquer contre les graviers du cimetière. Je veux tellement te blesser. Je me mordis la lèvre inférieure en lui souriant chaleureusement. J’étais le tueur macabre qui tombait amoureux de sa victime avant de lui ôter brusquement la vie. La folie s’inclinait dans mon regard abyssal avant de s’effondrer en mille poussières d’étoiles, plus dense et plus belle que jamais. Je me penchai avec recueillement en trainant mes pieds puis dans un élan de détresse, je finis par appuyer ma tête contre le mur. Je te laisse l’aigle et le perchoir. Je suis la bête sauvage dissimulée sous l’habit de l’humanité et l’homme hypocrite caché derrière la fourrure du géant. Mes canines acérées vibrent sous les plis de mes vêtements impeccables, toujours avides de sang et de caractère. Tu pues et j’adore ça. Je fermai les yeux en retrouvant la quiétude de mes pensées, mais l’écho de ses paroles raisonnait encore dans mes oreilles. D’où lui venait cette voix grave, caressante et envoutante ? Il s’approcha de moi. C’était étrangement agréable de le voir obéir à ma requête, même si j’étais quelque peu déçu. Je me l’étais imaginé plus grand et plus fort, alors que sa silhouette était mince et élancée. Il me rappelait quelqu’un mais je n’arrivais pas à savoir exactement qui. Le visage de Jamie flotta derrière mes paupières avant que je ne secoue furtivement la tête. Impossible ! Quelle horreur ! Mes bras se croisèrent sur mon buste glacé alors que je me cambrais, vacillant au rythme lassé de sa démarche pompeuse. Il était lent, pensif et très certainement méprisant. Son attitude ne me touchait pas – Il y avait assez de chaos autour de mon cœur pour que son dédain me semble futile, mais je n’abandonnais pas les fils qui nous reliaient pour autant. J’avais envie de jouer au bord du ravin en sa compagnie. Je voulais le pousser et le rattraper à la dernière minute. Dis-moi, Thomas qui tombera le premier ? Il baissa les yeux en gardant sa cigarette voluptueusement calée entre les commissures de sa bouche. « T’as oublié le mot magique.» J’haussai les épaules avec désinvolture. Aller à tout hasard ; connard ? « Heureusement que je suis un type sympa.» Ses longs doigts se renversèrent sur le bois des tables alors que les clameurs et les chuchotements des étudiants arpentaient les couleurs de la faculté. Ils étaient tout proche et pourtant, aucun cri aigu, aucune présence autre que celle de cet inconnu, ne pouvait me sortir de ma torpeur. Il m’arrachait de ma crypte afin de m’inviter à rejoindre les reliefs profonds des bois. Ma gorge se serra alors que j’imaginais sa nicotine s’infiltrer dans ma bronches immaculées. Il se plaça lentement devant moi, et à nouveau sa stature vaniteuse me rappela quelqu’un. Je plissai le front dans un effort de concentration extrême. J’avais un don pour la mémorisation, mais le déni m’empêchait de reconnaitre mon propre reflet dans le miroir. C’était l’instinct de la bête qui grouillait dans mes veines- mon obsession pour le pouvoir et la suprématie. Je sentis mes viscères se serrer dans mon abdomen alors qu’il continuait son ascension. « C’est quoi ton nom ?» Soudain, un craquement troubla le cours de mes réflexions. Il me rendait fébrile. Il pensait venir vers moi, mais j’avais l’impression qu’un double perdu de mon âme me revenait après une longue séparation. Tout en marchant, il me regarda avec l’éclat scintillant de la révolution. Son souffle effleura ma joue mais je rejetais sa chaleur et sa tendresse. Je l’attendais, lui, figé dans un antimonde meublé de cadavre et de piques ensanglantés. « A moins que tu ne parles pas aux inconnus. C’est plus prudent, je te l’accorde. » Railla-t-il en étirant sa bouche vicieuse. Je me noyais dans mes troubles avant d’inhaler l’air gorgé de fumée. Il me fallut quelques secondes avant de m’éveiller. « Knickerbadger. » Déclarai-je avec lenteur. « Je m’appelle Knickerbadger. » C’était vrai. Je m’en rendais enfin compte, du moins j’en avais l’impression. Je partageais son identité mais j’étais trop loyal à ma famille pour mener ma propre rébellion. « Alors, donne-moi mes cigarettes. » Je pouvais faire tout ce que je désirais dans cette salle. Un élan de liberté se glissa dans mon dos alors j’apparaissais sous l’éclat du jour, avec les traits lamentable de mon compagnon.
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() message posté Mar 19 Mai 2015 - 11:50 par Invité
Silence. Il respirait mon souffle empoisonné. J’aimais ses manières. Son dégoût. Ses yeux qui se levaient au ciel car il méprisait nos différences et, par-dessus tout, nos points communs. Nous nous ressemblions pour la simple et bonne raison que nous étions tous les deux au même endroit, au même moment. Et que cela ne m’arrivait jamais. N’avais-je pas la réputation d’être en avance sur les autres, tapissant leur chemin de poudre pour mieux les incendier ensuite ? Ou me la créais-je simplement pour moi-même, histoire de me conforter dans mon orgueil ? J’ai un surnom, connard. D’un surnom naissait la fameuse réputation. Je l’appréciai, ce surnom. On me le donnait partout où j’allais, comme s’il était inscrit sur mon front. Knickerbadger, cette connerie est beaucoup trop longue à prononcer. Je détestais devoir me répéter. Imaginez deux secondes lorsque je devais l’épeler. Mon interlocuteur s’éveilla soudain et je le toisai toujours, attentif et détestablement charmant. « Knickerbadger. » Non, ça c’est le mien. Vais-je vraiment devoir me répéter ? « Je m’appelle Knickerbadger. » Je plissai les yeux et penchai la tête. Oh. C’était amusant, ça. Je souris discrètement mais il avait le regard assez perçant pour en deviner l’ébauche. Non, tu ne l’es pas. Tu ne le seras jamais. Tu ne supporteras pas les flammes ni la douleur. Tu ne voudras pas vivre une vie sans aimer. Mais j’étais un garçon courtois et je le laissai glisser dans ma peau pour savoir ce qui s’y cachait. Il n’y trouverait rien. C’était tout ce qu’il y avait à trouver n’est-ce pas ? Un vide gorgé de cendres. Il avait l’air si propre, il sentait si bon, il se tenait si droit. Et voilà qu’il me demandait de le corrompre lui aussi. « Alors, donne-moi mes cigarettes. » Je m’approchai encore. Ne me demande pas ça. Je ne résiste pas aux jeux tels que celui-ci et je sais que tu vas perdre. Son mépris n’était rien comparé au mien. Mais puisqu’il tenait tant à prendre mon identité, peut-être qu’il pourrait en tirer des leçons concluantes. Je l’ignorais. Je n’étais pas à sa place, n’est-ce pas ?

Je finis par sortir mon paquet de cigarettes et lui tendre, mon sourire s’étant accentué. Tu ne me connais pas. Tu t’aventures là où tu n’as pas de prise. Il était si lisse, ses traits parfaits sculptés dans une roche céleste et je me délectai de son mystère avec extase. Joue à être moi, je t’en prie. Il était trop glacé pour vouloir tout brûler. Nous nous complétions donc. J’étais le feu qui consumait des forêts entières et il était la neige qui habillait les troncs calcinés après mon passage. Dans un autre univers, nous aurions pu changer le monde ensemble. Et dans un autre encore, il était moi et j’étais lui. Je voulais sentir le givre qui marbrait sa peau dans mes veines les plus bouillantes. Je voulais qu’il fonde en me sentant entrer en lui. Je coinçai à nouveau mon filtre entre mes lèvres et mes doigts glissèrent jusqu’à ma poche pour saisir mon paquet d’allumettes. Je lui lançai adroitement. Pour être moi, il fallait être un chat. Il fallait être aux aguets, tout le temps, et pourtant sembler désintéressé à longueur de journée. Il fallait vouloir changer le monde sans prêter attention au fait que oui, en effet, on en faisait partie. Mais je ne voulais pas changer. Je voulais me regarder en lui et me trouver meilleur. Je l’étais. Je parlais mieux que lui. Je souriais mieux que lui. J’étais plus désinvolte, plus téméraire. J’étais concerné par tout et rien à la fois. Je m’échappais des situations critiques comme une fumée qui filait entre les doigts. Les blocs de pierre, eux, restaient bloqués et subissaient. Je veux te voir essayer de disparaître rien que pour avoir le bonheur de réussir à te retrouver. Mais jusqu’à où devais-je aller, exactement ? L’appeler Thomas ? Faire croire à tout le monde qu’il était moi ? Noyer mon identité et devenir invisible puisqu’il me l’avait dérobée ? Je n’étais pas quelqu’un de lisse. Il ne pourrait pas accueillir mon âme sans qu’elle ne fissure sa peau parfaite au passage. Nous nous attirions mutuellement. Je regrettai à cet instant de ne pas savoir son véritable prénom : nous aurions pu procéder à un parfait échange. Voilà que je me retrouvais sans rien. Dépouillé. Il m’avait pris par surprise. Mais j’osais croire qu’il se lasserait de me porter en lui. Dommage, j’avais tendance à m’accrocher avec beaucoup de détermination lorsque je voulais quelque chose. Je voyais sa noirceur et il goûtait à la mienne : elle me plaisait terriblement. Ce n’était pas correct, certes, mais peu m’importait. Je n’étais personne. Fin et fragile comme une feuille d’automne. Et cependant, l’automne ne venait-il pas à bout de la magnificence de l’été ? J’étais l’homme qui apparaissait à peu feutrés, l’inconnu triomphant à chaque fois, générant les combats et la colère de l’esprit rien qu’en souriant. J’étais le défi éphémère : on me rencontrait et on voulait me vaincre, même si cela n’avait aucun sens, même si j’allais disparaître de votre vie et de votre mémoire à la seconde même où je m’en irai. Et quoique. Je voulais le marquer au fer rouge, celui-là. Tatouer mon prénom sur le rebord de son crâne pour qu’il sache que j’étais en lui à jamais. Il jouait avec le feu, il se brûlait, c’était si classique que cela m’ennuyait presque. « Ravi. » Et non, pas de nom de famille en retour. Il assumait son rôle. Peut-être finirait-il par m’appeler par son prénom, à force de ne pas savoir comment finir ses phrases.

L’effervescence du couloir ne nous atteignait pas. Nous étions au bord d’une joute verbale poignante, cinglante, presque sanglante. Je voulais le voir craquer cette allumette et griller le bout de sa cigarette avec ma désinvolture. Tu es arrivé, tu m’as vu, tu me connais à présent. Tu sais qu’il n’y a qu’un pas entre toi et moi : le feu. Alors allume la et laisse la te consumer pour l’éternité. Il n’avait pas d’issue possible. Il était piégé, s’étant emmêlé lui-même dans mes filets. Etrange, n’est-ce pas. Et il s’imaginait prédateur ? Il s’imaginait dangereux ? Je me connaissais mieux que personne. Je savais comment me bousculer. Je savais comment me détruire. Je savais comment me tuer. Etait-il à ce point le reflet du mépris que j’avais pour moi-même ? Je l’avais rencontré il y a quoi … une minute ? Déjà je le savais dans mes veines, dans mes muscles, à la recherche du moyen de me faire ployer. Mais le feu faisait fondre la glace, c’était toujours la même chanson. « Alors vas-y. Explique-moi comment tu comptes changer le monde, Knick. » Et s’il était un aigle, il ne tarderait pas à sentir mes griffes lui taillader les ailes jusqu’à ce qu’il tombe la tête la première dans l’abysse qui le transperçait de toutes parts. Nous regardons en toi et nous voyons ta noirceur. Nous voyons ta chute. Ne le remarquait-il pas ? Il s’en moquait peut-être. Ou bien il l’observait mais il ne voulait pas le croire. Il ne voulait pas croire à sa perte. Et en cela, oui, il me ressemblait terriblement.
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Theodore A. Rottenford
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() message posté Lun 1 Juin 2015 - 21:13 par Theodore A. Rottenford
“I am depent on you Thomas, so lower your eyelids to die with me in the dark.” Je le toisais du regard en nourrissant dans mon esprit la conviction qu’il était comme une bête sauvage dissimulée derrière un mince vernis de courtoisie et d’humanité. Ses longs cheveux ébouriffés drapaient l’expression mauvaise de son visage, mais je pouvais encore percevoir l’éclat luisant du prédateur qui sublimait ses yeux noirs. Il était aussi attirant que la nuit éternelle. Les voilages de la brume opaque tombaient sur ses épaules afin de le pousser vers le trône impérial de l’aigle solitaire. Mon cœur se serra lorsque je m’approchais de sa silhouette élancée. Il apparaissait inoffensif, mais son bec acéré pointait derrière son masque de fadeur afin de titiller mes instincts les plus brutaux. J’aurais pu me lancer dans un long et éprouvant débat sur la vraie nature de Thomas Knickerbadger, mais je savais que cela lui importait peu de savoir s’il était humain ou pas. Ce que les autres pensaient de lui ne revêtait aucune importance à ses yeux. Je le savais. Je le voyais. J’étais lui. Mon souffle brûlant se déversait sur mon menton avant de s’évanouir entre les plis de ma chemise. Tu peux m’entendre ? Je viens jusqu’à toi. Je souris d’un air carnassier. Il existait beaucoup de points en communs entre le chien et le loup, entre le ver et le serpent, sans que la cohabitation entre ces espèces ne soit possible. Une haine fatale m’opposait déjà à Thomas – parce qu’il vivait indéfectiblement dans mon espace. Cette salle était à moi. Le plafond, les murs et l’air ambiant m’appartenaient puisque j’en avais décidé ainsi. Je refusais d’être dépend d’une quelconque similarité. Nous étions deux ennemis qui s’affrontaient à l’intérieur d’une même âme, d’un même individu et d’une seule entité. Il me tendit son paquet de cigarette avec désinvolture. Mon esprit tanguait vers les flammes ravageuses de sa rébellion, alors que la fièvre s’infiltrait sous ma peau glacée afin de me condamner à la dérision. La plupart du temps, Thomas était indéniablement malheureux. Il pouvait rendre les autres aussi malheureux et lamentables car toutes les personnes qui s’approchaient de lui rencontraient un seul aspect de sa personnalité ; le feu. Heureusement, je n’avais pas peur de me brûler. Je n’avais peur que de l’indiscipline, de la déloyauté et du déshonneur. L’histoire de ma famille n’était pas un fardeau. Je l’aimais de la manière la plus folle et la plus extrême qui soit. Il me jeta une boite d’allumette au moment où j’enlevai mon manteau. Je la récupérai avec agilité avant de l’écraser entre mes mains. Je suis toi, c’est ça le jeu ? Je pinçai la bouche en calant une cigarette entre mes lèvres. Je m’avançai nonchalamment vers les escaliers avant de m’assoir confortablement au fond des gradins de l’amphithéâtre. Je secouais allègrement la tête avant de mimer chacun de ses gestes avec arrogance. Je découvrais avec surprise, mais aussi avec un sentiment fulgurant du destin, à quel point il était agréable d’ôter mon masque de froideur afin de me noyer dans l’inconnu. « Ravi. » Les fluctuations de sa voix raisonnaient comme des silhouettes fugaces qui s’évanouissaient dans l’écume de la mer. Je ne pouvais réprimer mon excitation lorsque les effluves de la nicotine – sa nicotine, enlaçaient ma gorge. Mes yeux embrumés se posèrent sur les jointures de sa mâchoire robuste. Pouvais-je manier les mots avec autant d’aisance si je courbais les traits de manière impudente ? Ma langue claqua contre mon palais alors que je suçais ma première bouffée de poison. Ma trachée vibra avant de se consumer au contact de la chaleur. Tu ne m’impressionne pas. Tu me révulse et c’est tellement mieux. Mes muscles tremblaient, assailli par les douceurs de l’extase. J’étais transporté par la frénésie à chaque fois que mon regard se posait sur son profil vaniteux. Je croisai les jambes avant de m’accouder au rebord de la table. Je voulais être l’objet de son désespoir passionné et l’entrainer dans une chute inéluctable – puisque de toute façon, le fond de l’abysse m’attendait et me voyait. Il semblait croire que le feu pouvait vaincre le froid. Il avait sans doute raison, mais le givre s’infiltraient jusqu’aux tréfonds de mon âme. Il fallait tellement plus qu’une flammèche pour me faire fondre. Il fallait tellement plus que lui.

« Alors vas-y. Explique-moi comment tu comptes changer le monde, Knick.» Je me retournai. Tiens, je le méprisais déjà – Il était hors du temps tandis que j’étais prisonnier de la pègre irlandaise. Il était libre et inatteignable tandis que j’étais contraint par ma propre force. Je relevai la tête afin de souffler les volutes de fumée qui s’étaient engouffrées dans mes poumons. Je résistais tant bien que mal à l’envie de tousser, mais les lueurs humides qui emplissaient mes yeux, trahissaient mes faiblesses. Thomas se dérobait de ma prise à chaque fois que je pensais le reconnaître. Il se retournait prestement, se baissait puis disparaissait dans les échos d’un million de pensées. Nous étions les deux personnes placées au premier rang des fidèles, main dans la main – cœur contre cœur. Je souris d’un air narquois. « Oh mais oui. » Déclarai-je avec lenteur. « Prend-moi dans tes bras. Toi et moi, on peut changer le monde. L’union fait la force. » J’agitai mes doigts afin de chasser les cendres calcinées qui s’étaient formés au bout de ma cigarette. « Chers frères et sœurs chrétiens. C’est comme ça que le pasteur s’adresse à l’assemblée. C’est comme ça que je rallie les gens à ma cause. En miroitant l’illusion d’une dévotion sacrée. C’est ma révolution ; régner. » Je feignais une grimace de dégout avant d’hausser les épaules en riant d’un air mauvais. « Oups, je me suis trompé de personnage. Être Knick c’est tellement fade, je m’excuse. Je craignais que les journées se succèdent aussi grises et insignifiantes les unes que les autres. Je devrais peut-être en venir au rasoir pour mettre fin à mon enfer. Tu vois, le point en commun entre tous les rebelles, c’est qu’ils meurent à mi-chemin de la gloire. C’est comme ça que m’ait venu ma vocation. Je veux mourir avant d’avoir admis que j’étais un être futile et sans influence. » Je pris deux taffes d’un coup avant de rejeter la fumée par mes narines. La situation exigeait un certain égoïsme sentimental, une adresse verbale et un déracinement solennel. Je ne l’égalais peut-être pas dans ces domaines, mais je pouvais me servir de ses armes le temps de le faire tomber. Entends-tu le grincement de mes ongles qui s’enfoncent dans le marbre afin de marquer ton nom. Parce que moi, je saurais l’écrire quand tu seras parti.

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() message posté Mer 17 Juin 2015 - 12:53 par Invité
Je l’observai m’imiter. Il le faisait très bien. Il malaxa un instant les allumettes entre ses larges paumes avant d’en sortir une pour la craquer d’un geste sec. J’inspirai en même temps que lui lorsqu’il laissa le tabac entrer dans ses poumons. Il aima ça, étrangement. Il aima ça comme on aimait notre première cigarette. On la détestait d’abord parce qu’elle nous brûlait, mais tout paraissait bien plus doux ensuite, comme recouvert d’un tapis de cendres ressemblant à une neige magique et céleste. Je déglutis alors qu’il souffla le nuage de fumée. Alors Tom, c’est agréable de fumer tes cigarettes ? Je me grattai la nuque sans lâcher la mienne. Sans le lâcher lui. Je suivis ses mouvements de mes yeux noirs. Il se dirigea vers le fond de l’amphithéâtre et j’attendis qu’il s’y installe avant de me mettre en marche à mon tour. Je grimpai les marches qui nous séparaient et ralentis à mesure que je m’approchai de lui. Ma cigarette était à nouveau plantée entre mes lèvres et je la saisis agilement pour la lancer un peu plus loin. Elle mourut en une pluie d’étincelles que je n’observai pas. Mon interlocuteur me captivait. Sois moi. C’est ça qui me captive, tu sais ? Pouvoir me voir bouger, pouvoir me voir vivre, pouvoir me voir fumer. Lui ne m’intéressait pas. Son dédain était amusant, mais sans plus. Il brûlerait probablement avec les autres. Je glissai au rang qui précédait celui où il s’était installé et fis courir mes doigts sur le bois jusqu’à m’arrêter devant lui. Je levai les yeux vers son visage de marbre et lui souris avec acidité. Il voulait tousser. Je penchai la tête pour admirer ses yeux qui supportaient difficilement la chaleur et le poison. Ses veines n’avaient plus qu’à gonfler de douleur et j’aurais ri avec amertume, mais il restait immobile. Tu n’aimes plus ça finalement ? La cigarette brûle donc ton corps sain et propre ? Je n’avais pas besoin de l’écorcher vif, il se consumait seul. Il n’y avait aucune bravoure dans ses gestes, simplement une fierté détestable qu’il ne voulait pas laisser partir. Elle était un peu comme la mienne et j’appréciai ses observations, la façon avec laquelle il m’avait adopté en lui. Il n’avait plus qu’à grimper sur la table et parler au silence pour que l’on nous confonde parfaitement. Ce jeu était baisé d’avance, j’ignorais quel était mon rôle dans l’histoire puisqu’il m’avait volé le mien, mais l’invisibilité m’habillait bien. Elle me convenait, quelque part. J’étais son ombre, le suivant même dans les endroits les plus sordides et les plus mystérieux. J’étais peut-être celui qui le poussait à y aller, d’ailleurs. Quoique. Ses yeux opaques et sévères savaient se repérer dans les ténèbres sans que je ne sois là pour le guider. La noirceur coulait dans ses veines. Il n’avait pas besoin de mon feu pour éclairer le chemin sinueux qu’il avait emprunté. Il marchait déjà droit tout seul. Il savait où se cachaient les pièges car il les avait posés lui-même et c’était moi qui le suivais en réalité. Moi et ma démarche irrégulière et élégante, mes fines jambes qui paraissant si fragiles, à pas de loup sur un velours noir et dangereux. Moi, en retrait, derrière lui, comme son ombre se reflétant sur les murs et dansant devant les flammes de l’enfer qu’était devenu son esprit. Je l’imaginais sans le connaître. C’était ainsi que je jugeais. C’était ainsi que je parlais et il devrait faire de même pour mériter de me dérober mon prénom aussi impunément.

A mes mots, il se tourna vers moi et me jeta un regard noir et moqueur. Il m’imitait bien, tout de même. Il souffla la fumée qu’il retenait dans ses poumons, manquant de justesse de tousser, à nouveau, puis me répondit d’une manière solennelle, brillante et profondément cynique. « Oh mais oui. » Je souris et me délectai de ses lentes paroles brodées du dédain qu’il avait pour l’homme qui s’était infiltré sous sa peau. « Prends-moi dans tes bras. Toi et moi, on peut changer le monde. L’union fait la force. » Les cendres de sa cigarette se perdirent parmi les grains de poussière qui habillaient la salle et je gardai mon sourire, trouvant son ironie délicieuse. Thomas vit seul. Thomas brûlera les autres, il ne connait pas le mot union. S’il l’utilise, c’est pour se foutre de la gueule d’une communauté qu’il trouve décadente sans même y avoir pris part. Sans même se considérer comme l’égal des autres. Et mon reflet l’avait compris aussi bien que moi. Il poursuivit : « Chers frères et sœurs chrétiens. C’est comme ça que le pasteur s’adresse à l’assemblée. C’est comme ça que je rallie les gens à ma cause. En miroitant l’illusion d’une dévotion sacrée. C’est ma révolution ; régner. » Il me méprisait. Il était vraiment mon reflet. Il était ce moi terrible qui me parlait parfois, la nuit. Il était les mots que mon père aurait pu prononcer si celui-ci n’avait pas été aussi franc, aussi dur, aussi dénué d’ironie et d’humour. Il était le jugement que tous me portaient sans relâche en me voyant pour la première fois. Nous te détestons, Tom, car tu es le symbole de ce dont nous avons peur, ce en quoi nous avons arrêté de croire, mais nous t’aimons car tu es charmant et que tu nous forces à ne pas te haïr, simplement en nous faisant rire au bon moment, en nous faisant rire des mauvaises choses, des sujets tabous qui n’inspirent d’habitude que la tristesse ou la sobriété, le retrait, le sérieux sur les visages. Et je crachais sur la religion qu’il parodiait aujourd’hui. Dans ma peau, il pouvait le faire. Dans ma peau, il pouvait tout faire, il était libre. Libre de blesser, libre de transgresser les règles, libre de blasphémer et de dire tout ce qu’il n’avait jamais osé dire. Une fois qu’il m’aurait rendu mon enveloppe charnelle, c’est moi qui devrais assumer ses actes. C’est moi qui devrais en supporter la douleur. Mais je ne ressentais pas la douleur. C’était une sensation si prosaïque, si vulgaire, elle ne m’atteignait pas. « Oups, je me suis trompé de personnage. Être Knick c’est tellement fade, je m’excuse. Je craignais que les journées se succèdent aussi grises et insignifiantes les unes que les autres. Je devrais peut-être en venir au rasoir pour mettre fin à mon enfer. Tu vois, le point en commun entre tous les rebelles, c’est qu’ils meurent à mi-chemin de la gloire. C’est comme ça que m’est venue ma vocation. Je veux mourir avant d’avoir admis que j’étais un être futile et sans influence. » Il avait choisi de me détester. De prendre mon esprit et de me peindre ses traits les plus absurdes. Il faisait ce que faisait mon père, mais de manière beaucoup plus cinglante, n’hésitant pas à appuyer là où cela faisait mal. Dommage. Encore une fois, je n’avais pas mal. Je ne cillai pas tout d’abord, le contemplant alors qu’il fumait de nouveau. Il faisait ce que faisait mon père. Il faisait surtout ce que je faisais moi, tout le temps. J’inspirai et laissai un mince sourire glisser sur mes lèvres, grattant pensivement le bois de la table. Il prédisait mon – notre – futur avec une assurance qui ne me surprit pas. Je haussai les épaules avant de me pencher vers lui. « La gloire, c’est pas un truc de rebelle. Ils sont beaucoup trop altruistes pour se soucier d’eux-mêmes. » chuchotai-je malicieusement. « Ils meurent pour le peuple, pour la liberté. Pas parce qu’ils ont peur de ne pas réussir et de devoir essuyer leur échec. » Je parlais des rebelles comme des êtres que je côtoyais mais dont je ne faisais pas partie. Et c’était le cas. Je me moquais des tyrans et de la résistance. Tout cela disparaîtrait un jour, pourquoi continuer de s’en soucier. « Tu te vois comme un rebelle, Tom ? Je doute que tu arrives à en supporter la véritable signification. Je crois que tu veux mourir avant d’admettre que tu n’en es pas un. » Je croisai mes doigts sur la table et lui accordai un regard sulfureux et assuré. « Ne penses-tu pas qu’il est plus beau de regarder le monde se détruire lui-même pour y redescendre ensuite et vivre éternellement ? Tu ne mourras pas à mi-chemin d’une soi-disant gloire. Tu mourras seul. » Ma voix était glaciale. Je savais quel rôle je jouais. J’étais mon père, enfin, la fraude qu’il m’inspirait. Puisque mon admirable interlocuteur avait décidé d’être un imposteur, j’avais le droit de mentir moi aussi. J’avais le droit de m’emparer d’une identité et de la profaner. Ces identités mourraient toutes un jour, autant en profiter tant qu’on en avait encore le temps.
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() message posté Lun 3 Aoû 2015 - 18:08 par Theodore A. Rottenford
“I am depent on you Thomas, so lower your eyelids to die with me in the dark.”   Fais-moi tomber, tu es l’élu.  Mes lèvres frémissaient au contact de la fumée. Ma gorge était parcourue par les spasmes d'un sentiment étrange. On m'avait toujours conditionné à servir la mafia. J'étais fait de larmes et de lumière, et il me fallait conserver toutes les natures singulières de mon âme. Cependant, Thomas se dégageait de mon imagination comme une ombre éphémère. Il se perdait dans les contradictions du monde, comme il se flattait dans les courants de sa révolution ridicule. Je plissai les yeux en l'observant avec sévérité. Quand tu seras fatigué de ce long voyage vers la désillusion, tu reviendras vers le commun des mortels. Je ne le connaissais pas et pourtant l'éclat de génie que je remarquais au fond de ses prunelles goudronneuses me captivait. Je remarquais chacun de ses gestes. Je suivais chacune de ses inflexions, non pas pour mimer la magnificence de l'être mais pour mieux le mépriser. J'étais un homme-caméléon. Je portais mille visages, et aujourd'hui, il m'était impossible de retrouver mon apparence habituelle. Il se faufilait parmi les gradins alors que je demeurais tapi dans le silence. Ma poitrine dansait au rythme de sa démarche solennelle. Elle balançait comme une brindille d'herbe sous le vent, emportée par les flammes noires du désespoir. Oui, car c'était ce que je percevais en cet instant. Le désespoir. Le défaitisme. La rage mal placée d'un esprit solitaire qui voulait se hisser au-delà des autres. Les similarités entre deux passions contradictoires : lui pour sa propre personne et moi pour ma famille spirituelle. Les traces du trèfle à quatre feuilles marquaient la pointe de ma peau translucide afin de renvoyer mes pensées vers les valeurs de la communauté. Les irlandais avaient toujours vécu en minorité. Les premiers immigrés en Amérique s'étaient pliés face à la puissance des italiens, toujours plus nombreux. Il n'y avait pas assez de place pour deux grands seigneurs, alors le drapeau vert, blanc et orange avait été traîné dans la boue. Les O'connor ne volaient pas pour atteindre une quelconque absolution. Au début, c'était un geste humanitaire qui visait à sauver le peuple affamé perdu outre mer. C'était le principe du héros qui volait aux plus riches pour donner aux plus démunis. Puis le trafic de drogue était né, et toutes les missions véreuses de la pègre s'étaient transformées en vendetta. Il fallait réécrire l'histoire mais les dirigeants se succédaient en suivant le même schéma. Promesses, pouvoirs, mensonges et vengeances. J'assumais parfaitement l'horreur de mon rang.Tom est-il possible que tu sortes des nuages qui recouvrent tes yeux ? Il parlait avec un accent campagnard grossier tandis que ma langue tranchait les mots avec flegme et assurance. J'avais grandi dans l'environnement naturel de l'arrière pays de Belfast, mais on m'avait contraint à quitter l'insouciance de la nature trop tôt. On avait exigé que je parle avec l'éloquence de l'étudient de la capitale anglaise. Encore un masque. Je me redressai en suçant le filtre de ma cigarette. Les vapeurs de la nicotine s'engouffraient dans mes poumons comme un poison. Elles tapissaient la surface lisse et luisante de ma chair avant de percer mes bronches immaculées. Je déglutis en exerçant une petite pression sur ma mâchoire. J'avais presque le vertige. Je me tenais presque droit. J'étais presque moi.  Ma salive avait un goût amer mais je gardais une expression froide et impassible. Tom était tout près de moi, si bien que je faillis le saisir par le bras pour le retenir dans la ronde infinie de l'existence. Je l'observais pensif, vigilant, ou plutôt rêveur et perdu entre les plis de sa chevelure ténébreuse. Ses mains étaient crispées contre sa bouche. Je les regardais aussi, ragaillardi et en même temps fragilisé par le tabac. Je me sentais effarouché par sa proximité, comme s'il me jugeait du haut de son perchoir. Je m'appliquais à lui ressembler mais je ne prêtais aucune attention à ce qu'il faisait réellement ici, dans une salle de cours vide et silencieuse. Je m’intéressais uniquement à la tension qui régnait entre nos cœurs fendus. Je me demandais laquelle de nos deux poitrines méritait de conserver l'entité entière, lequel de nous deux pouvait-il supporter d’accueillir les moitiés d'un seul être. Thomas était plus grand mais j'étais plus menu. J'avais du muscle, de la force, de la répartie et de l'intelligence. Je gagne. Je murmurais presque cette constatation, puis lorsque je tendis les bras pour recevoir ma couronne, un sentiment de surprise et d'épouvante indescriptible envahi mon esprit. Comme pour me contredire, mon buste frémit. Mes pensées se chevauchaient avant de s'écraser contre les parois squelettiques de son visage. Tu gagnes. Je secouai la tête. Impossible. Si j'étais lui et qu'il était moi, quelle différence y avait-il réellement entre ma victoire et sa défaite ?

« La gloire, c’est pas un truc de rebelle. Ils sont beaucoup trop altruistes pour se soucier d’eux-mêmes. Ils meurent pour le peuple, pour la liberté. Pas parce qu’ils ont peur de ne pas réussir et de devoir essuyer leur échec. » Il me parlait comme si je faisais partie de lui, comme si notre conversation n'était pas un aparté mais un monologue interne, caché de tous, dissimulé aux yeux du monde. Je l'écoutais avec attention. Je retenais chaque sifflement de sa voix enchanteresse alors qu'il vomissait ses paroles sur ma carapace impénétrable.  « Tu te vois comme un rebelle, Tom ? Je doute que tu arrives à en supporter la véritable signification. Je crois que tu veux mourir avant d’admettre que tu n’en es pas un. » Il croisa ses doigts sur la table et j'en fis de même. Son regard était sulfureux, intense et noir. Le mien n'avait aucune signification particulière. Mes yeux se détachaient de mon corps. Mes iris restaient fixes. Je me fichais de sa puissance. Elle suivait son cours avant de s'épandre dans la pièce. Et lorsqu'il aura vidé sa coupe, il ne lui restera plus rien. Il ne sera plus qu'une enveloppe charnelle, une coquille vide abandonnée sur le verge. «  Ne penses-tu pas qu’il est plus beau de regarder le monde se détruire lui-même pour y redescendre ensuite et vivre éternellement ? Tu ne mourras pas à mi-chemin d’une soi-disant gloire. Tu mourras seul.  » J'arquai un sourcil. Il tombait dans la démesure, dans le gigantisme de la vanité. Bien sûr qu'il allait mourir seul. Nous mourrions tous seul. J'émis un petit rire moqueur. Mes cordes vocales vibraient doucement alors que je me pendais au cou du destin. Les choses ne pouvaient plus changer. Il était trop tard pour que je lui rende son identité. Son échec était devenu le mien. «   Rebelle. » Déclarai-je en relevant la tête vers le plafond. «   J'aime bien ce mot. Je l'utilise pour avoir une position, mais je n'ai pas vraiment de raison ou de cause à défendre. Je dois attendre la chute du monde ? Peut-être que je devrais me rebeller contre les sociétés de gel coiffants ou contre la régit de tabac qui fabrique des cigarettes trop courtes et addictives. Je ne sais pas. C'est ça mon problème. Je ne sais pas mais je fais le malin quand même. » Je baissai subitement ma garde. Je ne savais plus si c'était lui que je jugeais ou si mes remarques me concernait moi, Theodore Rottenford, le fils prodige du grand avocat de la pègre. Je pris une expression grave. «   Je veux mourir avant de perdre mes convictions, avant de me faire prendre par la vie. Je serais seul mais les autres croiront que je n'avais pas peur. » J'haussai les épaules avec lassitude. «   Tu me diras que leur avis ne compte pas à mes yeux, que je m'en fous. Et c'est vrai. Mais quand je ne serais plus là, c'est eux qui véhiculeront tout le prestige que je laisse derrière moi. » J'écrasai mon mégot contre le bord de la table avant de le jeter à ses pieds. Je souris puis je me relevai pour descendre les marches. Mes talons claquaient contre le carrelage, animant mon désir de sombrer dans son univers stérile. J'hochai la tête avant de tendre ma paume ouverte vers lui une seconde fois ; aller une cigarette pour le grand penseur.  
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() message posté Mer 19 Aoû 2015 - 0:06 par Invité
« Rebelle. » souffla-t-il en relevant la tête. Ce mot sonnait à la fois si juste et si faux entre ses lèvres. Cela m’arracha un nouveau sourire. Parlons de ce qu’est être un rebelle, puisque nous refusons tous les deux de nous laisser appeler ainsi. Peu de lettres et pourtant une signification si profonde. On me les gravait sur le front, ces lettres, sans que j’y prête attention, sans que je l’accepte, sans que j’en sois touché. On me voyait, on observait mes gestes, ma démarche, mon éloquence, mon arrogance, la façon que j’avais d’exister au-dessus des autres, et c’était ce mot qui sortait des gueules de tous ces animaux, des plus jaloux aux plus haineux, des plus admirateurs aux plus détachés. Mais je n’avais que faire de l’opinion générale. Elle disparaîtrait en même temps que moi. C’était fou à quel point être en vie était devenu  une mode : cela nous passait comme le vent de l’automne disparaissait au printemps. On n’était pas nés dans la bonne génération. Où se cachent les couleurs, la joie, la tendresse ? Pourquoi la jeunesse s’ennuie-t-elle de la lumière ? Thomas, réponds-moi. J’inspirai alors qu’il poursuivit : « J’aime bien ce mot. Je l’utilise pour avoir une position, mais je n’ai pas vraiment de raison ou de cause à défendre. Je dois attendre la chute du monde ? Peut-être que je devrais me rebeller contre les sociétés de gels coiffants ou contre la régit de tabac qui fabrique des cigarettes trop courtes et addictives. Je ne sais pas. C’est ça mon problème. Je ne sais pas mais je fais le malin quand même. » Je levai les yeux au ciel, amusé par sa remarque. Parce qu’il y avait aussi ceux qui me prenaient pour un petit malin. J’attendais le jour où ils verraient leur monde s’enflammer. J’y étais déjà préparé, j’imaginais ces braises chaque jour. Je vivais déjà dans ce monde-là, j’aimais déjà le reflet incandescent du feu dans mes prunelles devenues écarlates. Je savais déjà que les cendres de nos espérances seraient la prochaine mode. Que l’on porterait ces couleurs sur nos peaux blêmes, fatiguées par un soleil trop bouillant, par une foule grandissante, par le désir de voler sans savoir étendre nos ailes. Je voulais savoir qui il était réellement. Il me disait des choses que j’avais entendues mille fois auparavant. « Je veux mourir avant de perdre mes convictions, avant de me faire prendre par la vie. Je serai seul mais les autres croiront que je n’avais pas peur. » Il me cernait quelque part, cependant, je sentais son esprit se refermer autour du mien. Mais il était la paume d’acier alors que j’étais la fumée insaisissable. Il pouvait toujours prier pour m’attraper, la nature rattraperait ses croyances stériles. « Tu me diras que leur avis ne compte pas à mes yeux, que je m’en fous. Et c’est vrai. Mais quand je ne serai plus là, c’est eux qui véhiculeront tout le prestige que je laisse derrière moi. » Je me penchai en arrière et admirai un instant sa silhouette. Je voulais m’y retrouver. Je voulais voir mes traits dans son visage émacié mais ils disparaissaient à mesure qu’ils s’y peignaient. Etait-il trop faible pour m’emprisonner entre les crevasses de sa peau de marbre ou bien assez fort pour me repousser ? Cette tension me passionnait. Il n’était pas un rebelle, il n’était pas le petit con qui jouait au plus malin, il possédait une profondeur inouïe. Un noir d’encre semblait ôter toute couleur à ses yeux et pourtant je les voyais toujours bleus. Deux identités se battaient en duel au-delà de son masque de platine et je voulais croire à tout prix que l’une d’entre elles avait mon allure, mon flegme, mon sourire. Parce que si l’on pouvait me reprocher justement quelque chose, c’était mon orgueil. Le monde tournait autour de moi car il m’appartenait. Car j’avais compris avant tous les autres comment il fonctionnait.

Il me tendit sa patte d’animal à la recherche d’une nouvelle cigarette et je m’accoudai à la table, posant mon menton sur la paume de ma main, penchant la tête, plissant des yeux d’un air sulfureux et laissant s’échapper la fumée de ma cigarette entre mes dents luisant de cet éclat carnassier dont il détenait également le secret. Nous ressemblions à deux prédateurs à court de proies, se toisant et se demandant qui deviendrait le gibier. Mais aussi à deux adolescents inlassablement attirés l’un vers l’autre, incapables de l’assumer, de le reconnaître ou même simplement de le savoir, mais nous ne pouvions nous empêcher de maintenir une proximité conséquente entre nous. J’écrasai mon mégot sous la table avant de le laisser tomber avec nonchalance dans une pluie d’étincelles puis sortis à nouveau mon paquet de cigarettes. J’en allumai une, m’accordai une bouffée de tabac puis la glissai entre ses doigts de roi. Parce que c’était ce dont il avait l’air, assis comme il l'était, satisfait comme il l’était, figé comme il l’était. Je laissai le paquet et les allumettes en plan, sans me servir. Dernière cigarette. Arrête d’être moi, tu ne fais ça que pour que je te les file gratuitement. A quoi bon discuter, à quoi bon inverser les rôles puisque nous pensions chacun avoir raison de notre côté. Puisque chaque mot ne servait qu’à nous planter un peu plus l’un dans l’autre. Nous n’étions plus qu’un de toute façon, dans notre bulle, seuls entre ces quatre murs et ces grains de poussière. « Je crache sur le prestige. Et je n’ai pas besoin des autres, je t’ai toi à présent. Tu es celui qui restera vivant. » Je semblais lui offrir un cadeau empoisonné dans le creux de ma paume qui paraissait si douce. Je reprenais mon identité d’un claquement de doigts, il n’était plus que mon ombre s’il décidait de rester anonyme, s’il ne daignait me faire part de son véritable nom. Ce jeu m’avait lassé. « Je ne suis pas un artiste. Je ne veux pas que l’on se souvienne de moi. Je ne veux pas laisser de traces. » Ma silhouette avait l’étoffe de ces créatures que l’on rencontrait parfois dans nos rêves. On leur parlait durant quelques minutes et à notre réveil on les avait oubliées. Seule ce sentiment de maturité restait gravé dans notre cœur sans que l’on puisse en deviner l’origine, et pourtant on avait un désir brûlant de suivre cet instinct nouveau, ce désir de changer les choses. « Je ne suis bon qu’à parler, qu’à convaincre. Les actes véritables, le prestige comme tu dis, ce seront les autres dont tu parles qui les accompliront, qui les mèneront à terme. Je préfère être le spectateur dans cette histoire : on ne viendra jamais me blâmer et pourtant je suis nécessaire au succès de la pièce. » Je pinçai mes lèvres en un sourire moqueur : « All the world’s a stage, je me permets même un cliché de notre trésor national. » Puis je redeviens sérieux sans perdre l’éclat malicieux de mon regard : « Mais tu triches. Dis-moi ton nom, nous sommes loin d’être à égalité dans ces conditions. » Je me penchai en avant, complice et narquois : « Malgré tout je gagne quand même. » J’inventais les règles de ce jeu de toute façon. Il ne pouvait que me suivre s’il ne voulait pas devenir la proie dans notre duo félin et enragé.
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Theodore A. Rottenford
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() message posté Lun 5 Oct 2015 - 23:25 par Theodore A. Rottenford
“I am depent on you Thomas, so lower your eyelids to die with me in the dark.”   Je plissai les yeux en me concentrant sur sa grosse voix et ses gros sourcils. Autour de nous, le silence inconfortable laissa place aux rires de plus en plus soutenus des étudiants. Je passai derrière la table en le toisant du regard. Pouvait-il voir que je posais sur lui les yeux envieux d'un animal en cage ? Il était libre de prendre position. Il pensait. Il existait, bordel ! Je sentais sa force pulser à travers mes veines alors que je laissais tomber ma muselière d'homme de main. J'avais volé ses nuances colorées et son éloquence pertinente. Mes lèvres glacées se fermaient sur sa cigarette, embrassant les contours aiguisés de ses poisons. Bientôt mes vêtements seraient imbibés par son odeur, celle du tabac écœurant et froid. Mes cheveux deviendraient longs et ondulés. J'aurais des boucles indisciplinés et un air revêche pour séduire les jeunes collégiennes. Je voulais que cet instant dure une éternité. Je voulais m'enfoncer dans le noir et le suivre comme un spectre nébuleux. Cependant, mon esprit m'interdisait d'imaginer ce qui se produirait si je devenais réellement Knickerbadger. J'étais perdu dans mes réflexions, incapable de faire l'analogie entre ses pensées et les miennes. Je me retournai lentement, le cœur incertain. Mon visage se penchait dangereusement vers son paquet de cigarettes. Mon corps s'engourdissait au fur et à mesure que je m'aventurais dans son univers. Chaque seconde à ses côtés m'ôtait un peu d'authenticité. Tout ce que je faisais, c'était me noyer dans ses chaussures trop grandes. J'aurais pu l'égorger à ma guise si le contexte de notre rencontre avait été différent. Si nous étions à Belfast, éclairés par la lumière de la lune dans un entrepôt abandonné de la mafia. Oui, je l'aurais probablement fait. «  Je crache sur le prestige. Et je n’ai pas besoin des autres, je t’ai toi à présent. Tu es celui qui restera vivant.  » Sa voix était lente et mesurée. Il m'était presque impossible de percevoir toutes les subtilités de ses paroles. Les vapeurs du tabac s'embrouillaient dans mon esprit. J'arquai un sourcil, puis je m'esclaffai bruyamment – sans raison. Il était redevenu Thomas. Mais grâce à lui, j'avais été capable de m'abandonner une dernière fois à des jeux superficiels, de rechercher des réponses éphémères à des questions existentielles, d'être un animal resplendissant en plein jour. Tout au long de mon existence, je n'avais jamais connu cet état exceptionnel de perdition. Je ne fumais pas. Je ne parlais pas impunément. J'apprenais seulement à devenir une meilleure version du cliché irlandais. «   Je ne suis pas un artiste. Je ne veux pas que l’on se souvienne de moi. Je ne veux pas laisser de traces.. » Je haussai les épaules avec désinvolture. Je n'étais pas un artiste non plus et j'aspirais exactement à la même chose ; être discret, ne jamais laisser de traces. Pourtant, il n'y avait aucune similitude entre nous. Il était blasé et j'étais un meurtrier. Je me redressai en brisant la cigarette qu'il venait de m'offrir. Maintenant que j'étais revenu égal à mes principes, je ne voulais plus de ses péchés. La dépendance, la sensualité et le sexe avaient pour moi un arrière-goût amer de faute. Une saveur délicieuse mais oppressante dont un homme d'esprit devait se méfier. Mais je ne jugeais pas Thomas ; il avait été mon hôte et j'étais reconnaissant de me mélanger à sa noirceur. «   Je t'ennuie déjà, Tom ? Je pensais tenir pendant quelques minutes encore. Je suis déçu. » Je roulai des yeux avant de lui faire face. Mes yeux cherchaient l'éclat vermeil du prédateur derrière les arabesques de ses boucles brillantes. J'étais destiné à le toucher, à retirer ses écailles pointues pour découvrir les contours amorphes d'une âme agonisante. «   C'est quoi ton délire ? Une vie facile, une mort rapide ? » Je soupirai en joignant les mains sur la table. Ce genre de parcours n'était pas pour nous. Je le savais. J'en avais la certitude. Nous étions envahi par la nostalgie dévorante d'une époque qui avait existé indépendamment de nos exigences. Peut-être qu’aujourd’hui un nouveau cycle s'ouvrait dans notre destin commun. « Je ne suis bon qu’à parler, qu’à convaincre. Les actes véritables, le prestige comme tu dis, ce seront les autres dont tu parles qui les accompliront, qui les mèneront à terme. Je préfère être le spectateur dans cette histoire : on ne viendra jamais me blâmer et pourtant je suis nécessaire au succès de la pièce. » Je penchai la tête en l'écoutant avec attention. Un sourire moqueur ornait mon expression placide et je me surpris à sentir la chaleur de son souffle sur ma peau. Ses mots m'appartenaient encore. Il ne le réalisait pas complètement, voilà tout. « All the world’s a stage, je me permets même un cliché de notre trésor national.  » Le monde une pièce de théâtre. Lui un spectateur passif. S'attendait-il à ce que je cite une icône du romantisme malheureux pour me hisser à son niveau ? Je n'étais là que pour le plaisir. Je n'avais pas de vocation pour les livres ou de réelles prédispositions littéraires. We know what we are, but not what we may be. Chaque geste avait des conséquences qui étaient inscrites dans le grand livre de Dieu. Nous étions tous identiques et pourtant si modulables. Une erreur, une colère. Il n'y avait pas réellement de différence. Il suffisait de si peu pour condamner une âme au froid et au désespoir. Je gardais le silence en suivant les râles de sa respiration régulière. Thomas se redressa un instant, puis il se pencha vers moi. «   Mais tu triches. Dis-moi ton nom, nous sommes loin d’être à égalité dans ces conditions. »  Nous étions à la fois complices et rivaux. La glace et le feu. Deux éléments opposés et pourtant, la disparition du premier accompagnait la déchéance de l'autre. « Malgré tout je gagne quand même. » Je relevai le bras avant d'enfoncer mes ongles de rapace dans son poignet. Il se trompait. Il n'y avait pas de victoire dans un combat entre prédateurs. Il y avait la survie, la mort et le déclin. J'en avais pris conscience à un très jeune âge en observant mon père et ses amis. Ils ne gagnaient jamais. Ils tuaient tout simplement. «   C'est les perdants qui gagnent. Moi, je ne veux pas laisser de trace. » Je me redressai légèrement, en utilisant ses propres mots contre lui. «   A moins que tu veuilles porter ma marque sur le front. Je peux faire un effort, je suis une âme charitable parfois. » Mes yeux brillaient dans la pénombre. L'agitation à l'extérieur de la salle de cours avait subitement cessé d'exister. Mon corps était une arme que j'utilisais pour contrer les attaques ennemies. Pour faire le bien et surtout le mal. Je m'inclinai vers son oreille. «   Moi, c'est Theodore Rottenford. » Soufflai-je suavement, faisant preuve de bonne foi. J'essayais d'égaliser les compteurs et de le laisser mener à terme sa quête dérisoire du pouvoir qu'il clamait de pas désirer. La victoire et le prestige, les notions se chevauchaient. Il me décevait déjà. Thomas, le révolté par dépit.
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