(✰) message posté Jeu 26 Mar 2015 - 14:39 par Invité
“ And yes, I’ll admit, I am jealous. I’m jealous of every minute you spend with him, of every concerned expression you send his way, of every tear shed, of every glance, every touch, and every thought. I want to rip him to pieces and purge him from your mind and from your heart. But I can’t because I am dead.” ✻ La douceur de son corps me semblait presque irréelle. Les battements de mon cœur excédé par la pureté de mes sentiments se faisaient de plus en plus violents dans ma poitrine. Je posai délicatement mes doigts sur ses épaules avant de me rétracter plein de retenue. La vie me semblait bien trop grande pour que je puisse combattre la fatalité. Je soupirai sur son cou, laissant mon souffle chatouiller la naissance de sa poitrine aguicheuse. J’étais un soldat malade, mon âme à l’agonie errait sans jamais trouver la terre promise. Je n’étais pas croyant. Olivia portait tout le fardeau de ma foi et de mes croyances, cependant elle ne semblait toujours pas comprendre que sa proximité me rendait fébrile. Mon corps fragilisé par les carences alimentaires, ne pouvait pas suivre le cours de mes désirs malgré ma volonté de me satisfaire. Mes tatouages romantiques avaient perdu l’éclat de mes confessions. Divine Olivia, accueille-moi à nouveau au sein de ta lumière. Je déglutis en me laissant sombrer dans la solitude. L’impression de flotter dans une dimension parallèle ne ma quittait jamais. Je ne la repoussais pas volontairement. Ce n’était qu’un réflexe désespéré de mon esprit amoureux, voulant garder sa dignité intacte. Je touchais ses cheveux scintillants avant de sourire – Je ne savais même pas qu’elle préférait les avoir plus courts. Cette révélation s’immisça dans mes veines comme une fièvre viscérale. Je veux réapprendre à te découvrir, je veux que tu m’aimes tel que je suis maintenant, mais je te regarde et j’aperçois ta déception. Je ne suis plus l’homme que tu as épousé. Je ne suis qu’une pâle copie de l’avenir que tu espérais secrètement. Les plis de la couvertures drapaient mes blessures mais je ne m’étais jamais senti aussi nu. A chaque fois que son odeur délicate chatouillait mes narines, tous les visages silencieux de mes frères d’armes s’abaissaient vers moi. Ils me sondaient avec cruauté car j’avais survécu à notre serment de mourir pour l’Amérique. « Tu n'aimes pas ? » S’enquit-elle, mais j’étais trop absorbé par mes visions d’horreur pour lui répondre. « C'est pas grave. C'est juste beaucoup plus pratique comme ça. » Je me tortillai légèrement afin de la blottir contre ma poitrine. Elle était adorable lorsqu’elle feignait l’indolence. Je lui adressai un regard sombre, puis obéissant à une impulsion subite, je penchai ma bouche vers la sienne. J’effleurai ses lèvres avant de m’éloigner avec un sentiment de gêne étrange au bout de la langue. Seule mon ombre pouvait lui avouer la profondeur de mon affection.« Je suis désolé. » Susurrai-je sans la regarder. Ma mâchoire tremblait comme lors de notre première fois ensemble. Je ne pouvais pas encaisser une nouvelle défaite, je fermai les yeux. Tu es la seule pour moi.
Elle se pencha sur moi, même après que je l’ai repoussé, afin de réciter nos vœux de mariage ; « Je te prends comme époux pour le meilleur et pour le pire … Dans la richesse et la pauvreté, dans la maladie et l'adversité, je promets de t'aimer et de te chérir tout au long de ma vie. » Je la regardais avec une expression vide. Je ne parvenais même plus à revenir vers les jours heureux que nous avions partagés. Pouvait-elle se rappeler pour deux ? Je me mordis la lèvre inférieure en refoulant mon émotion. J’aurais voulu lui réciter des paroles réconfortantes à mon tour, mais tout me semblait si dérisoire. « Pour le pire. Dans l’adversité. Ce n’était pas des paroles en l’air, Isaac. Je les pensais toutes. » Elle effleurait à peine mon visage. J’aurais jamais pensé me noyer dans les méandres de mon amour pour elle. Je posai ma main sur la sienne afin d’arrêter ses manœuvres bienveillantes, puis d’un simple geste je la positionnai sur moi. « La réalité est bien pire que toutes les horreurs que tu as pu imaginer, Olivia. » Des corps déchiquetés, morcelés, et disposés dans des énormes entrepôts puants. Les souterrains du désert afghan se constituaient de cellules de boucheries pour les marines américains. Je n’avais pas survécu impunément. J’avais souillé mon honneur en acceptant les ordres dirigés contre mon propre pays. Il était hors de question qu’ils abattent le sniper d’élite, et j’aurais été complètement stupide de passer devant une chance de revoir ma femme. Oui, j’ai tué pour toi. « Je ne veux pas que tu te retiennes pour moi. Je sais que je ne suis pas la personne la plus forte du monde… Mais je te jure que je peux t’accepter tel que tu es. Même si tu es ravagé. Tu te souviens quand j’ai perdu notre bébé ? J’étais dévastée mais tu t’es occupé de moi. C’est à mon tour, Isaac. Laisse-moi m’occuper de toi. » Je secouai la tête, la gorge serrée. Il ne se passait pas un seul jour sans que je ne pense à l’enfant que nous avions perdu. C’était un petit garçon, j’en étais convaincu. Tout du moins, je l’espérais tellement. Si je m’étais tué, peut-être aurais-je rejoins ce rêve un peu fou que nous avions de fonder une famille dans la guerre, mais tu sais les coups de poignard qu’on me donnait à la poitrine ne faisait que me renverser. Je suis immortel dans mon désespoir. J’aurais tant voulu imaginer un seul et unique jour empli de ravissement mais la culpabilité qui me rongeait ne me laissait aucun répit. Je n’étais qu’un fantôme disparaissant dans l’horizon. Pourquoi suis-je ici ? Mes muscles vibraient toujours sous l’effet de l’anticipation. Je n’avais pas besoin qu’elle s’occupe de moi. Je voulais récupérer ma vie. Comment faire pour que tu m’aimes à nouveau ? Je la regardais avec intensité avant de lever mon poing et de cogner trois fois sur ma tête, signifiant que je la couvrais. Elle avait le droit de tenter une approche au fond de l'abysse. C’était plus facile de communiquer en utiliser les signes militaires. J’hochai la tête avec recueillement avant de faire circuler mon pouce sur son cou et de l’immobiliser à quelques centimètre de moi. « Je t’ai déjà prévenu – j’ai dis que tu devais retourner au lit. » Murmurai-je captivé par la profondeur de son regard pailletté. Je me redressai afin d’écraser violemment ma bouche contre la sienne. Il n’y avait plus d’échappatoire. Je ne pouvais plus l’avoir mais en cet instant, j’avais l‘impression qu’elle m’appartenait comme avant.
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(✰) message posté Dim 29 Mar 2015 - 17:39 par Invité
do monsters make war or does war make monsters? ;; build me back together till i am wiser, till i am worthy. it is a strange thing to love one's damnation. but perhaps not so strange, when she is also your salvation. ✻ ✻ ✻ Son corps contre le mien. Le bruit apaisant de sa respiration. Son torse qui s’élève et qui s’abaisse en rythme. J’avais rêvé une centaine de fois d’un instant semblable et pourtant, désormais, j’avais l’impression que le vide dans ma poitrine n’était que d’autant plus grand. J’aurais aimé avoir le droit de l’aimer autant que j’avais bien pu l’aimer. J’aurais aimé avoir le droit de l’aimer aussi fort que mon cœur semblait le désirer. Cependant, avec toute la retenu qui pouvait m’habiter, je me refusais de céder aux appels de mes sentiments. Peut-être n’avais-je plus le droit. Peut-être ne m’était-ce plus autorisé. J’avais fauté. Il était différent. Nous avions évolué dans des univers parallèles, s’accrochant à nos souvenirs sans même songer, un seul instant, qu’ils n’étaient que le pâle reflet de ce que nous avions été un jour. Un pâle reflet de ce que nous n’étions plus. Le pâle reflet d’un autre monde, un monde auquel nous n’appartenions plus et que nous ne reverrions plus. Ma voix était douce et calme, masquée dans un murmure, enveloppée dans la quiétude de l’instant. Pourtant, au fond de moi, je continuais de me battre avec mes sentiments, je continuais de me battre avec ce que j’étais, je continuais de me battre avec tout ce que je désirais mais que je n’aurais probablement jamais. J’aurais aimé connaître la marche à suivre mais je savais, au fond de moi, qu’il n’existait pas réellement de solution. Que j’étais condamnée à appréhender les situations quand elles s’offraient à moi. Que je devais me débrouiller, réagir selon mes instincts, agir comme bon me semblait. Mais comment étais-je supposée bien faire. Comment étais-je censée m’adapter à lui quand il semblait avoir tant changer. Comment étais-je censée l’aider quand il refusait mon aide. Il me repoussait mais je restais, il me sermonnait de partir mais je ne l’écoutais pas. Je savais pertinemment que cela n’était pas l’approche la plus intelligente mais je refusais de rendre les armes tant qu’il ne m’avait pas fait comprendre, de manière claire et précise, qu’il ne voulait plus de moi. Parce qu’au fond, je me raccrochais à cela. Je me raccrochais à cet espoir que, malgré ses invitations à le laisser, il ne désirait pas réellement ne plus être en ma présence. Je me raccrochais à cet espoir qu’il m’aime, qu’il m’aime quand même, qu’il m’aime, ne serait-ce que d’une manière infime. Qu’il m’aime et qu’il se souvienne de nous. Faisant écho à mes paroles, il s’approcha doucement de moi sans que je ne m’y attende. Dans une caresse, ses lèvres frôlèrent les miennes avant qu’il ne recule la tête, trop vite à mon goût, trop vite pour mon cœur. Mes yeux se posèrent dans son regard et j’esquissai un sourire que j’aurais aimé rassurant pour lui signifier que cela n’était pas grave ; pour lui faire comprendre que j’avais l’impression que ses lèvres étaient encore contre les miennes, que je pouvais encore les sentir m’embrasser. « Je suis désolé. » dit-il et je secouai la tête. Je ne voulais pas qu’il s’excuse comme s’il y avait un mal dans ses gestes. Je ne voulais pas qu’il considère que m’embrasser était une faute. Parce que cela n’en était pas une. Du moins, pas à mes yeux. « Tu n’as pas à t’excuser. » marmonnai-je avant de me redresser. Avant de lui rappeler nos vœux de mariage, avant de lui rappeler les promesses que j’avais bien pu lui faire, avant de lui rappeler ce que nous étions l’un pour l’autre. Je ne savais pas ce qui était le plus difficile, au fond ; faire semblant d’être suffisamment forte ou songer, ne serait-ce qu’un seul instant, qu’il puisse rejeter ces mots que nous nous étions dits plus jeunes. Ma vie était ainsi faite, depuis son retour. J’avais peur, constamment. Peur de le perdre à nouveau. On disait qu’avec le temps, cela était plus facile. On disait que le départ d’une personne était toujours plus difficile la première fois. Mais je n’étais pas d’accord ; la perspective qu’il puisse filer entre mes doigts de nouveau ne faisait qu’engranger une terreur au fond de mes entrailles que je ne pouvais ignorer. « La réalité est bien pire que toutes les horreurs que tu as pu imaginer, Olivia. » me confia-t-il. Il m’avait arrêté dans mes gestes, me refusant tout contact, presque. Je le laissais me positionner au-dessus de lui et je le surplombais, la tête penchée près de son visage. J’aurais aimé qu’il sache J’aurais aimé qu’il comprenne. J’aurais aimé qu’il finisse par admettre que je n’avais pas peur de la réalité, que je voulais l’affronter avec lui. Je l’observai me regarder. Je l’observai faire un signe militaire qui m’était étrangement familier, et je ne pus m’empêcher de sourire doucement. J’avais l’impression que cela signifiait qu’il m’autorisait à être là. Qu’il m’autorisait à me trouver près de lui. Qu’il m’acceptait dans ses bras, malgré tout, malgré le temps, malgré les épreuves. Qu’il m’acceptait, moi. J’aurais pu avoir les yeux humides, en cet instant. J’aurais pu connaître une vague de larmes. Mais je m’appliquai tant à intérioriser ma douleur que mes yeux restaient incroyablement secs. « Je t’ai déjà prévenu : j’ai dit que tu devais retourner au lit. » me dit-il, sa main logée dans mon cou, son regard emprisonnant le mien. Nous étions proches, oui. Je pouvais sentir l’air qu’il expirait courir sur ma peau. Je pouvais presque palper la chaleur de sa peau. « Et je te dis que je reste. Toujours. » lui répondis-je d’une voix basse. Puis, finalement, il se redressa. Puis, finalement, ses lèvres vinrent retrouver les miennes et j’enroulai mes bras autour de son cou, déstabilisée par la violence de ses gestes mais apaisée, apaisée qu’il soit venu à moi. Je me demandai s’il se rendait compte à quel point je pouvais le serrer fort, si fort, contre moi. Je me demandai s’il se rendait compte à quel point j’étais presque désespérée en répondant à son baiser, à quel point mon corps réagissait à sa proximité. Mon cœur battait fort et rapidement. Mon cœur tambourinait dans ma poitrine et me donnait la sensation d’être vivante. Je m’écartai doucement de lui, embrassant doucement l’arête de sa mâchoire du bout de mes lèvres. Mes mains, elles, cheminaient doucement dans son dos, le touchant comme s’il était précieux, comme s’il était fragile. « Tu me manques. » murmurai-je finalement, continuant de l’embrasser à chaque parcelle de son visage que mes lèvres pouvaient bien approcher. « Même quand tu es avec moi, j’ai l’impression que tu me manques. » Peut-être mon cœur pouvait-il que ressentir un manque, un vide, une absence. Pourtant, Isaac était là, sous mes doigts. Pourtant Isaac était là, contre moi. Mais cela était la première fois, oui. La première fois que j’avais l’impression de me retrouver face à mon mari.
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(✰) message posté Ven 17 Avr 2015 - 23:10 par Invité
“ And yes, I’ll admit, I am jealous. I’m jealous of every minute you spend with him, of every concerned expression you send his way, of every tear shed, of every glance, every touch, and every thought. I want to rip him to pieces and purge him from your mind and from your heart. But I can’t because I am dead.” ✻ Je me sentais démuni de tout. Je n’avais pas de famille. Je n’avais pas de maison. Je n’avais pas de patrie. Ma rage se consumait dans ma poitrine sans que je ne puisse me dérober de sa prise. Chaque souffle qu’elle versait sur ma peau me rappelait que je l’avais abandonné pendant quatre longues années. Je n’osais pas imaginer la douleur d’un deuil, mais je comprenais chacune des motivations qui avaient animées ses gestes. Le fait qu’elle ait quitté la Nouvelle-Orléans, le silence qu’elle avait maintenu avec mes parents, mon alliance qui pourrissait sous terre, les mensonges dont elle couvrait son quotidien, ses coucheries post-traumatiques … Je pouvais tout comprendre. Cependant, ma tristesse était toujours présente. Elle s’ancrait sur mes cicatrices afin de rajouter une trace indélébile à mon malheur. Personne ne pouvait connaitre le fond de ma pensée. Personne ne pouvait me rendre ma liberté ou les hommes que j’avais perdus. Mes yeux perçants clignèrent dans le crépuscule. Olivia, moi aussi j’ai envie de pleurer. Ce serait tellement hypocrite que je lève le voile sur mes faiblesses après t’avoir sermonné tout ce temps. Je veux m’en aller ; j’ai l’impression d’être un imposteur. Je ne suis pas un civil. Je suis une machine. Même, lorsque je suis seul – j’ai l’impression que le plafond me tombe dessus. Je ferme les yeux et tes grands yeux terriblement bleus se dessinent derrière mes paupières. Je ne sais plus si tu reviens pour me sauver ou pour me détruire. Je pressai mon pouce contre son menton d’un air profond. L’éclat de son visage me transportait vers une galaxie différente. Le gout de ses lèvres sucrées drapait encore ma bouche close, même après que j’aie mis fin à notre étreinte. C’était étrange, mais je pouvais ressentir l’illusion d’un baiser volé lorsque je passais ma langue sur mes commissures. Les pointes de ses cheveux dorés chatouillaient le bout de mon nez, et je lui souris avec lenteur. « Tu n’as pas à t’excuser. » Je la regardais d’en bas. Son expression se confondait avec mes souvenirs. Toute sa dévotion envahissait mes veines mais je refusais de retrouver ses lueurs réconfortantes. Je refusais de m’emprisonner dans les promesses d’un avenir meilleur. Je m’enfonçais dans la céramique de la baignoire en l’attirant au fond de mon abysse. Il y avait un million de visages qui rodaient autour de ma tête ; les fantômes de mon commando détruit par l’ennemi. Je les avais tous mené vers la mort. Je leur avais survécu. La culpabilité me rongeait jusqu’à la moelle. Je soupirai en posant mes mains sur les épaules d’Olivia. « Mais – je ... Je- suis – quand même - désolé … » Articulai-je avec difficulté. Mes émotions formaient une boule dans ma gorge, m’empêchant de lui avouer mes pires secrets. Mes traits s’allongèrent afin de trahir mon désarroi extrême. Je ne voulais pas m’excuser, mais j’avais l’impression qu’elle méritait de m’entendre prononcer ces mots au moins une fois. Il ne s’agissait pas seulement du baiser ou de notre intimité. Je me sentais responsable pour tout le chaos qui troublait le cours paisible de son existence. Olivia n’aurait jamais dû croiser mon chemin. Elle n’aurait jamais dû accepter de m’épouser tout en sachant pertinemment que j’envisageais une carrière militaire. J’y pense parfois. A notre fils – Je l’ai rejoint dans l’au-delà pendant de longues nuits avant d’être ramené à la vie. Je sais qu’il te ressemblait et je sais que si tu ne m’avais pas suivi dans mes lubies pour la guerre, vous seriez toujours là. Tous les deux. Elle portait en elle tout l’amour du monde. Je suivais les rythmes paisibles de sa voix mélodieuse – elle m’enivrait comme une berceuse divine. « Et je te dis que je reste. Toujours. » Murmura-t-elle avec une douceur infinie. Je frémis en l’embrassant goulument. Mon cœur battait dans mes tempes, alors que la salle de bain semblait tournoyer autour de moi. Ses mains traçaient de longs sillons sur mon dos courbé. Pouvait-elle sentir les saillies de mes os se courber sous ses caresses délicates ? Je logeai ma tête dans sa poitrine en fermant les yeux. Mes lèvres effleuraient les bretelles de son pyjama avec retenue. J’étais perdu. Je ne savais pas si j’avais le droit de m’aventurer aussi loin. Mon désespoir grandissait au fur et à mesure qu’elle se rapprochait de moi. Le compte à rebours était lancé ; 3 – 2 – 1. « Tu me manques. Même quand tu es avec moi, j’ai l’impression que tu me manques. » Je me mordis la lèvre inférieure en secouant la tête. Non, ne me dis pas ces choses ! Les souvenirs percutaient mon esprit dans un cri déchirant, et pour la première fois depuis mon retour, je me sentis vivant. J’avais rêvé de cet instant depuis si longtemps. Elle bisouta les courbures de mon visage troublé. Je m’accrochais aux vestiges de plaisir qu’elle m’insufflait comme si la mort m’attendait au tournant. Ma voracité jaillit soudainement, menaçant de la mener à la damnation. « Je ne sais pas être romantique. » Susurrai-je en la serrant très fort. Je la voulais tellement. L’air frais s’abattait sur moi comme une pluie drue, afin de fermenter les ardeurs de mon âme esseulée. Je déglutis en humant les parfums boisés qui s’échappaient de sa peau délicate avant de toucher les coins de sa bouche. Les râles de ma respiration laborieuse transcendaient au gré de mes feux passionnés. Je sentis ma verge se réveiller après une éternité de dormance. Nous étions si proches, qu’il m’était presque impossible de percevoir les limites entre mon désir et le sien. J’étais aveuglé par mes pulsions. Toutes mes émotions étaient dupliquées, et je devais avouer que je ne contrôlais rien. J’avais beau me concentrer sur la présence d’Olivia, elle n’en demeurait pas moins une créature aguicheuse en face d’un homme en manque de chair. Je me déhanchai lentement afin de me libérer de la pression, mais poussé par un élan d’érotisme complètement fou je me collai contre ses cuisses serrées. Pars, Olivia. Pars s’il te plait. Je ne veux pas t’aimer comme ça.
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(✰) message posté Dim 19 Avr 2015 - 21:10 par Invité
do monsters make war or does war make monsters? ;; build me back together till i am wiser, till i am worthy. it is a strange thing to love one's damnation. but perhaps not so strange, when she is also your salvation. ✻ ✻ ✻ Nous étions tragiques, quelque part, comme si la vie s’appliquait à nous détruire l’un et l’autre. Je savais, au fond de moi, que son retour tait un cadeau du ciel mais, dans mes plus grands élans de lucidité ou d’idiotie, je savais également que cela était comme un poison. Un poison qui venait me ronger de l’intérieur. Un poison qui me détruisait, d’une manière ou d’une autre, qui me détruisait quoi que je puisse bien faire. J’aurais aimé savoir, j’aurais aimé comprendre, j’aurais aimé avoir une solution. Mais je n’avais le droit qu’à un seul miracle ; mon mari était revenu d’entre les morts, répondant à mes prières les plus folles. Cela avait été mon seul et unique vœu. Les cieux ou le destin ne pouvaient plus me venir en aide maintenant qu’ils avaient exaucé mon souhait, me laissant seule avec mes incertitudes, me délaissant avec mes peines et mes profondes interrogations. Et, lui, de son côté, n’avait guère le droit de se sentir mieux. Isaac s’était toujours appliqué à rester digne et à masquer ses émotions, mais je savais que, au fond de lui, il ne connaissait que des désillusions. Des désillusions successives. Il avait été retenu captif durant quatre années. Quatre années à, sans doute, espérer mourir. Quatre années à perdre son humanité toute entière. Quatre années à se demander quand est-ce que tout serait terminé. Quatre années pour, finalement, s’en sortir. S’en sortir après avoir fait le deuil de sa propre existence une centaine de fois. S’en sortir pour finalement ne jamais réellement revenir chez soi, parce que son chez soi avait été détruit avec ce qu’il avait été, là-bas, en Afghanistan. Puis, bien au-delà de cette errance personnelle, il était revenu pour me retrouver, moi. Moi, cette femme indigne, moi, cette épouse qu’il ne reconnait sans doute qu’à moitié. J’ai changé, Isaac. J’ai changé et j’en suis désolée. Tu as emporté une partie de moi au fond du désert afghan et tu l’as laissé là-bas avec ton ancienne personnalité. Ton ancien toi. Nous sommes tous les deux morts, Isaac. Nous sommes tous les deux morts parce que je faisais partie de toi et toi de moi. Il accumulait sans doute les déceptions, également. L’alliance que je n’avais pas gardée. Londres que j’habitais désormais. Les hommes que j’avais connus sans m’attacher à leurs physiques ou ce qu’ils étaient. J’étais si désolée de ne pas être à la hauteur qu’entendre ses excuses ne faisaient que me blesser, d’une certaine manière, me rappeler que je ne le méritais pas. Que je ne le méritais plus. « Mais je... Je suis quand même désolé… » continua-t-il et je fermai douloureusement les paupières, n’étant pas d’accord avec lui mais refusant de le contredire. Refusant de lui faire de la peine en élevant la voix. Refusant de le voir s’énerver après moi pour avoir simplement exprimer mes opinions à voix haute. Ses gestes étaient pressés et chargés de violence, d’une certaine manière, sa bouche se pressant contre la mienne avec désespoir. Ses gestes étaient pressés et loin de tout ce que j’avais pu connaître en sa compagnie, son corps me paraissant étranger. Cependant, je me disais que cela n’était pas si grave. Cependant, je me disais qu’il avait passé tant de temps à vivre en dehors de la réalité qu’il avait besoin de s’habituer de nouveau à aimer. Qu’il avait besoin de temps, autant de temps que j’aurais la patience de lui donner. Sous ses caresses pressées et ses doigts agités, je sentais mon cœur se décomposer. Sous ses mouvements saccadés et son souffle court, j’entendais mes sentiments faire écho jusque dans les tréfonds de ma cage thoracique ; « Je ne sais pas être romantique. » m’admit-il et je caressai doucement l’arête de sa mâchoire. « Tu l’as été, un jour. » marmonnai-je avec douceur. Je voulais qu’il entende la confiance que je pouvais bien avoir en lui. Je voulais qu’il se rende compte que j’aurais pu mettre ma vie entre ses doigts sans même y réfléchir à deux fois. « Tu as juste besoin de temps. Et nous en avons. » repris-je. « On a tout le temps qu’on veut, Isaac. » Sous moi, je sentis sa virilité se manifester et mon cœur se mit à tambouriner dans ma poitrine. Je ne savais pas si j’étais prête, non. Je ne savais pas si j’étais prête pour que l’on franchisse le pas une nouvelle fois, après des jours et des jours à n’avoir l’impression que nous n’étions que les fantômes de nous-même. Cependant, je ne bougeais pas, alors qu’il se pressait contre moi avec ferveur ; mes bras étaient toujours pendus autour de son cou alors que son souffle parcourait ma peau. Je sentais l’impatience qu’il ressentait. Cette impatience qui me rendait réticente et concernée. Cette impatience que j’aurais aimée moins grande, sans doute, plus mesurée. Mais, quelque part, Isaac avait toujours eu une conception machiste du mariage, machiste de notre couple ; je ne m’y étais jamais opposée, j’avais toujours respecté. Quelque part, j’avais aimé être sa femme, j’avais aimé l’union que nous avions connu. Pourtant, en cet instant, le devoir que j’avais envers lui concernant notre vie sexuelle me paraissait presque malsain. Me paraissait presque inapproprié. Trop rapide. Pourtant, je voulais. Je le voulais de tout mon cœur. Et j’étais perdue. Perdue entre mes principes et mes désirs, perdue entre ce que je lui devais et ce qu’il désirait. Cette situation me paraissait imparfaite et étrange et j’aurais aimé pouvoir y mettre un frein ; j’étais mal installée et mal à l’aise, surtout après la conversation que nous avions bien pu avoir quelques heures plus tôt. « Doucement. » chuchotai-je mais je n’étais même pas sûre qu’il ne m’entende. Mes lèvres continuaient de parcourir la peau de son menton, l’arête de sa mâchoire, la surface de ses joues. J’espérais qu’il comprenne mes intentions à travers les gestes tendres que je pouvais avoir, comme si je pouvais, de cette manière, lui réapprendre la délicatesse et la douceur. Je lui faisais confiance. Je lui faisais confiance de tout mon cœur même si je savais, au fond de moi, qu’il n’était plus l’homme que j’avais un jour connu.
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(✰) message posté Mer 22 Avr 2015 - 23:22 par Invité
“ And yes, I’ll admit, I am jealous. I’m jealous of every minute you spend with him, of every concerned expression you send his way, of every tear shed, of every glance, every touch, and every thought. I want to rip him to pieces and purge him from your mind and from your heart. But I can’t because I am dead.” ✻ Je me penchai comme un corps mourant qui aspirait à rejoindre la quiétude des cinq éléments. Cette agonie prolongée qui refusait de s’éteindre, le simple fait d’exister sans raison valable, la douleur inhérente à chaque échec … Tous ces poisons se répandaient dans mon système. Je ne me faisais plus confiance. Mes réactions dépassaient ma volonté et ma conscience des choses. Olivia ne pouvait pas comprendre. Elle ne pouvait pas saisir toute l’ampleur de mon mal-être. Mon effroi la dépasserait toujours, malgré toute la bienveillance du monde et ses efforts de bonne conduite. J’avais parcouru des millions de KM avant de revenir, mais la distance qui nous séparait en cet instant me semblait insurmontable. Je ne pouvais plus retrouver mon reflet dans les profondeurs de son regard bleu pailleté. C’est ici que je m’essouffle. J’avais envie de m’en aller, de retrouver un semblant de liberté autre part, mais lorsque je fermais les yeux, je réalisais que je portais en moi les barrières de ma prison. J’étais éternellement captif de mes frayeurs. La gravité tragique de mon existence enlaçait mon âme comme une vielle amie ; Agrippe-toi à mon cou. Enfonce, tes ongles dans mon peau et accompagne moi jusqu’au fond de mon cachot secret. Je n’ai plus aucune chance de retrouver la grâce. Le mauvais sort ne m’accorde plus aucune attention. C’est le seul endroit où je peux t’emmener. Je la touchai avec une douceur brûlante et sans doute un peu de dépit. Elle ne m’avait pas trompé – loin de moi cette mauvaise pensée, mais elle avait exploré les plaisirs charnels avec d’autres hommes. Elle avait réussi malgré son immense chagrin et son deuil éprouvant à trouver une échappatoire. Combien de temps pouvait durer un orgasme ? Trois secondes ? Quatre ? Ce n’était qu’un battement de cil éphémère dans le chaos qui nous entourait. Je me concentrais sur les bruits de ma respiration saccadée. Ma poitrine allait exploser, assaillie par un mal encore plus profond. La guerre me collait à la peau. Je marquais toutes ses horreurs sur ma peau avec une résolution effrayante, de peur que mon identité militaire ne finisse par se dérober de ma prise. Mes excuses m’écorchaient la gorge, chaque mot que je pouvais prononcer me coutait. Mes bras se posèrent sur son dos avant de la retenir contre mon visage las. Je t’aime tellement mais exprimer mes sentiments me semble impossible. Je suis un peu ivre. Mon esprit vacille sans cesse, emporté par l’écume. Et je n’ai plus rien à te dire. Elle caressait suavement l’arrête de ma mâchoire, mais tous ses gestes affectueux n’étaient qu’une brise de vent inopportune. Je me faufilai entre les fantômes de mon commando, à mille lieux de Londres et de ma baignoire en céramique. « Tu l’as été, un jour. Tu as juste besoin de temps. Et nous en avons. On a tout le temps qu’on veut, Isaac. » Elle se fourvoyait. J’étais triste de l’admettre, mais le temps ne faisait que creuser le fossé qui nous séparait. N’avait-elle pas encore compris que la mort était trop puissante pour être vaincue ? Je me pressai contre ses cuisses avec une ferveur mêlée à la misère d’être vivant sans mes camarades. Ma virilité se réveillait comme un monstre sanguinaire, bravant les tissus et tous les obstacles qui me séparaient de l’absolution. Olivia se laissait faire, ses bras étaient pendus à mon cou avec un désespoir que je ne pouvais pas percevoir sur le moment. J’écrasai mes paumes sur ses cuisses serrées afin de me cogner contre son bassin. Je ne l’avais pas encore ébranlé, mais mon corps menaçait de s’effondrer si je ne fusionnais pas incessamment avec elle. Je faisais de mon mieux pour contrôler mes pulsions, cela dit, je n’étais pas seul dans ma tête. Il y avait une centaine de voix graves, me sommant de plonger au péril de ma vie. Les bourdonnements dans mes oreilles étaient insupportables. J’étais ailleurs, transi par le ressac d’une mer lointaine. Mes lèvres survolèrent sa bouche voluptueuse avant de s’anéantir au creux de la vague. « Doucement. Je ne l’entendais pas. Doucement quoi ? Pourquoi ? Je vivais une forme extrême d’anxiété. Mon esprit s’élevaient au-delà de mes espérances et comme un oiseau suicidaire, je fonçais vers la terre ferme à une vitesse vertigineuse. Je t’avais prévenu de mon ignominie mais tu es Olivia Marshall, tu vois le bien partout. Regardes-moi ma chère et tendre femme, je me consume et je t’emporte dans les flammes qui m’habitent. Tu aurais mieux fait de rester sous ta couette luxueuse. Tu n’aurais jamais dû t’aventurer dans l’antre du démon. J’espérais intérieurement que ce n’était qu’une hallucination- l’un des nombreux cauchemars qui hantaient mon sommeil. Il faisait nuit, j’avais froid et j’étais affalé dans l’humidité de la salle de bain seul. Olivia n’était pas là. Elle dormait ailleurs, à l’abri de mes folles lubies. Je secouai la tête en fermant les yeux. J’essayais de combattre ma douleur de toutes mes forces. J’essaie vraiment, Olivia. Mes gestes fiévreux trahissaient ma pire révélation ; j’étais un violeur. Un homme incapable de faire l’amour à l’être qu’il chérissait le plus au monde. Je baise comme une bête en rut. Je me redressai au bord de l’implosion avant de l’étreindre avec violence. Je comptais mes déhanchements arythmiques contre son intimité 1 – 2 – 2,5 … Un grognement m’échappa avant que je ne la repousse avec horreur. Je renonçais à la sensuelle souffrance d’une première rencontre. Je renonçais à tout ; à son corps, à son âme, à ses lèvres, à son parfum. Les poignards acérés de ma conscience s’enfonçaient dans ma gorge nouée. Ce n’était pas ma mort qui la pesait le plus, mais ma présence à ses côtés sous les faibles ombres du crépuscule. Je le savais avec certitude. « Lève-toi s’il te plait – Va dans te lit et ne te retournes plus vers moi. » Articulai-je avec difficulté. Je consentais à fixer sa silhouette s’éloigner à tout jamais. Je consentais à la perdre car je ne le méritais plus. Maintenant tu sais pourquoi je suis désolé. Je ne peux plus reconquérir ton amour- pourtant je te veux tellement …
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(✰) message posté Jeu 23 Avr 2015 - 18:02 par Invité
do monsters make war or does war make monsters? ;; build me back together till i am wiser, till i am worthy. it is a strange thing to love one's damnation. but perhaps not so strange, when she is also your salvation. ✻ ✻ ✻ Doucement. Peut-être avais-je été idiote de lui demander une telle chose, après quatre ans de captivité, après quatre ans sans aucun rapport. Peut-être avais-je été sotte de croire qu’il pourrait s’y conformer, de croire qu’il m’écouterait. Je me rendis compte à l’instant même où il se pressait avec insistance contre mon bas-ventre ; mais, avant que je ne puisse dire quoi que ce soit, avant que je ne puisse articuler le moindre mot pour lui demander d’arrêter, il se fraya un passage dans mon intimité, brutalement, ne prenant même pas le soin de s’assurer que j’étais prête. Que mon corps, lui, était prêt. Je retins un gémissement, la douleur venant s’articuler à chacun de ses coups de reins. Mes doigts s’agrippèrent aux bords de la baignoire, et je fermai les yeux avec violence. Tout allait trop vite pour que mon esprit se rende réellement compte de ce qu’il se passait ; en cet instant même, je ne parvenais qu’à me focaliser sur la douleur, cette douleur qui léchait les parois de de mon bas-ventre. « Isaac… » murmurai-je. J’aurais voulu être plus assurée. J’aurais voulu mais je ne parvenais qu’à ressentir toute la détresse qui m’assommait, toute cette panique qui m’absorbait. « Isaac, s’il te plait… » S’il te plait, arrête. J’ai mal, Isaac. Je n’eus pas le temps de faire une troisième tentative pour lui parler qu’il se retira, me rejetant ailleurs. Dans de grands gestes précipités, je me reculai de l’autre côté de la baignoire, me recoquillant contre les parois en céramique. « Lève-toi s’il te plait. Va dans le lit et ne te retourne plus vers moi. » me dit-il et, durant plusieurs secondes, je le toisai sans répondre la moindre chose. J’avais encore du mal à assimiler sa brutalité, sa violence, son manque d’attention. J’avais encore du mal à conceptualiser ce qu’il venait de se passer, comme si, dans mon monde, cela ne pouvait pas se produire. Puis, une douleur vive se manifesta une nouvelle fois dans mon bas-ventre, et je me redressai en tremblant. Je passai une jambe, puis l’autre, en dehors de la baignoire, et me retrouvais debout, dans la salle de bain, les jambes flageolantes. Je baissai le regard sur mon corps, avant de remettre correctement la bretelle de mon haut, puis replacer correctement mon short en dentelle. Après, seulement après, je fis un pas en arrière avant de me détourner, refermant la porte de la salle de bain derrière moi. Je ne me mis qu’à pleurer une fois arrivée au bout du couloir.
✻✻✻
Des murmures vinrent me chatouiller l’oreille, et je finis par ouvrir les paupières. Je fixai le plafond, immobile, seule dans mon lit, avant de finalement me redresser. Je passai un gilet sur mes épaules, puis sortis de ma chambre. Après quelques pas, je ressentis une gêne ; ce n’est qu’après un instant que je me rappelai des évènements, et je sentis toutes les couleurs de mon visage disparaître. Je passai devant la porte de la salle de bain, mais celle-ci était toujours close, et je ne cherchais pas à me glisser à l’intérieur. Sans un bruit, je me dirigeai dans la cuisine, ne rencontrant personne sur mon chemin. Je me servis une tasse de café avant de filer sur le balcon fleuri de mon appartement, priant pour que personne ne me suive, priant pour que mes frères et sœurs n’aient pas la merveilleuse idée de me tenir compagnie. Je n’avais pas la force, non. Pas la force de leur offrir un grand sourire. Pas la force de les écouter même si, Dieu seul savait, à quel point j’aimais me préoccuper de leurs problèmes. Le vent balaya mon visage, tandis que le grand ciel bleu semblait annoncer une belle journée ; les températures étaient bien plus chaudes que d’ordinaire mais je ne pus m’empêcher de réprimer un frisson en refermant la porte derrière moi. Cependant, retourner à l’intérieur me paraissait exclu. Cependant, prétendre sans avoir pris le temps de me retrouver avec moi-même me paraissait insurmontable. Alors, je restai là, m’appuyant contre le garde-corps du balcon, portant ma tasse à mes lèvres pour boire une gorgée de mon café. J’avais l’impression que tout n’était qu’un mauvais rêve. Tout semblait y contribuer, d’ailleurs ; j’avais l’impression que des détails m’échappaient, que mon esprit refusait de reconstruire la scène. J’étais confuse, tremblante. Mon cœur battait douloureusement dans ma poitrine à chaque fois que je pouvais ressentir, une nouvelle fois, ses coups de reins bestiaux. Il ne m’avait pas respecté, non. J’avais l’impression d’avoir été traitée comme une trainée, de ne pas mieux valoir, également. Je secouai la tête pour chasser toutes les pensées parasites qui pouvaient venir se loger sous mon crâne, mais rien n’y fit ; je revivais encore, avec horreur, la violence déguisée en passion d’Isaac, je revoyais encore son regard perçant dans la nuit. J’entendais encore sa respiration courte. J’en vins même à me demander s’il avait cherché à me procurer du plaisir avant qu’il ne s’introduise en moi ; mais absolument rien ne me revenait. J’étais persuadée que cela n’avait pas été le cas. J’étais persuadée qu’il n’avait pas songé à moi. J’étais presque sûre, même, qu’il ne m’avait pas embrassé ailleurs que sur les lèvres et qu’il n’avait pas eu une seule caresse à mon intention. Je secouai la tête vers dépit, buvant une nouvelle gorgée de café ; le liquide chaud brûla ma gorge mais j’avais l’impression que c’était le prix à payer pour oublier les souffrances de mon cœur. Il m’avait brusquée. Choquée, même, choquée malgré mes efforts pour tenter de faire la part des choses. Je ne parvenais pas à me retirer ces images du crâne. Je ne parvenais à cesser de songer à la douleur, aux coups qu’il avait infligés à mon estime. Je ne parvenais pas à cesser de trembler. De trembler comme si j’étais en danger. Et, quand j’entendis la porte qui séparait le balcon de mon appartement, je sursautai.
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(✰) message posté Ven 24 Avr 2015 - 2:16 par Invité
“ And yes, I’ll admit, I am jealous. I’m jealous of every minute you spend with him, of every concerned expression you send his way, of every tear shed, of every glance, every touch, and every thought. I want to rip him to pieces and purge him from your mind and from your heart. But I can’t because I am dead.” ✻ Ses cheveux dorés se fanaient dans son dos, tandis que je regardais sa silhouette disparaitre au bout d’un long couloir sombre. Je fermai les yeux afin de chasser cette vision d’horreur. Je n’avais pas réussi à fermer l’œil de la nuit. La culpabilité me rongeait comme un terrible fléau. Je ne saurais probablement jamais conforter Olivia dans la douleur que je lui infligeais. Nous étions éternellement perdus parmi les simulacres du passé. Je me recroquevillai dans la baignoire, le torse frémissant sous la pression d’un froid incommensurable. Je chassais mes idéaux d’un geste las avant de cogner ma tête contre mes poings. Olivia, peut-être que tu perds ton temps avec moi. Il n’y a plus rien à sauver après quatre années d’isolation. Je pris une grande inspiration afin de fuir la présence maléfique qui sommeillait dans ma poitrine. Je n’avais pas demandé à porter ce fardeau, la guerre s’était soudainement acharnée sur moi. Je n’étais qu’un soldat désabusé, un homme qui ployait à chaque coup bas. Les sifflements des fouets hantaient ma léthargie et je me surpris à sursauter à plusieurs reprises. Il n’y avait plus aucune raison à mon malheur. J’étais rentré sain et sauf, mais les lames qui avaient transpercé mon cœur avaient laissé une trace indélébile sur ma peau. Le diable avait volé mes souvenirs, me laissant dépourvu de toute identité. Je recherchais au creux de ma mémoire, mais je ne savais plus me retrouver. Je me mordis la lèvre inférieure avant de me relever. Mes pieds nus glissèrent sur le carrelage glacé. J’étais probablement trop faible pour réaliser l’ampleur de ma détresse. Je rajustai mes vêtements avant de plonger mon regard dans le miroir. Qui est cet inconnu qui me dévisage ? Les murs qui nous séparaient devenaient de plus en plus espacés. Je vacillais sans cesse vers la lueur au bout du tunnel pour finalement tomber entre les flammes de l’obscure. Je poussai une longue plainte avant d’écraser mon poing contre les réflexions de mon image. Mes phalanges craquèrent, mais je n’esquissai pas le moindre mouvement de recul. Je laissai le sang teinter mon ignoble main – cette même main qui avait repoussé Olivia sans aucune once de tendresse. La froideur de la pièce s’infiltrait violement dans mes os, mais je restais insensible à ses morsures douloureuses. J’aurais voulu t’aimer autrement mais mon corps refuse de m’accorder cette faveur. Je suis légalement mort. La petite étincelle d’amour que je croyais ressentir au fond de mon âme n’était qu’un leurre. C’était mon fantôme qui adorait Olivia. Je passai ma main sous le jet d’eau brûlante avant d’utiliser une serviette pour stopper mes saignements. Mes gestes mécaniques se mêlaient à toute la misère de mon existence, puis je finis par rassembler tout mon courage. J’ouvris la porte de la salle de bain afin de disparaitre à mon tour dans le long couloir obscur.
Les murs de la maison semblaient me suivre du regard. Ils critiquaient certainement mon manque de tact et de romantisme. J’haussai les épaules en me dirigeant vers la cuisine. Je pris une petite bouteille d’eau minérale et une pomme verte. Mes mouvements se noyaient dans le froid infini. Je chancelai avant de m’accouder au comptoir. Je venais de bafouer mon unique espoir. La clarté du jour s’élevait vers les arcs du plafond et l’horrible chute des chœurs mélodiques de mon enfance troublait le cours de mes pensées. Je me levai d’un bond avant d’ouvrir les portes coulissantes du balcon. Elle était là – j’avais presque oublié à quel point elle pouvait être belle sous les lumières du soleil. Je papillonnai des yeux avant de la rejoindre. Je me faufilai entre ses silences comme une ombre soupirante. Je remarquai sa posture calme et la tasse de café fumante entre ses mains tremblantes. « Tu es réveillée. » Constatai-je avec lenteur. J’osais à peine balbutier quelques accords face à son expression profondément triste. Mes doigts emprisonnèrent la rampe avec lassitude. Pardonne la témérité de mes gestes, ce n’est qu’une façon minable de trouver un peu de puissance. Tu es la voix du divin lorsque je ne peux plus parler. Tu es mes yeux lorsque les voiles de la nuit descendent sur mon cachot. Lèves-toi et libère ta colère. Je me postai en face d’elle. Les cris de mon cœur se déchiraient au creux de ma conscience. « Je t’ai blessé … » Je fronçai les sourcils. Je t’ai blessé et je ne sais pas comment faire pour me repentir. Je tendis mes mains vers son menton avant de me rétracter sans la toucher. Je retins ma respiration. Je me mordis la langue. Je clignai des yeux. Je feignis un sourire. Je m’adonnai à toutes les expressions humainement possibles, mais aucun geste ne pouvait racheter l’ignominie de mes actes. « Tu peux me frapper … » Je la suppliai du regard avant de m’agenouiller sur le sol. Mes jambes claquèrent sous le poids de ma silhouette flegmatique mais je n’avais même pas la force de gémir. « Je suppose que je ne suis plus très doué. » J’avais vogué dans le désert en ne croisant que les mirages de son visage, j’avais besoin de sa présence dans ma vie, mais maintenant qu’elle se tenait près de moi, j’étais incapable de me comporter dignement. « Je suis tellement désolé. » Murmurai-je au bord de la folie. Les souffles du vent semblaient s’exulter face à mes échecs, mais je tentais de rester digne face à leurs moqueries. Je relevai lentement mon visage, les traits déformés par l’expression de ma profonde exaspération. Ne me laisse pas seule, lumière aimée.
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(✰) message posté Ven 24 Avr 2015 - 17:01 par Invité
do monsters make war or does war make monsters? ;; build me back together till i am wiser, till i am worthy. it is a strange thing to love one's damnation. but perhaps not so strange, when she is also your salvation. ✻ ✻ ✻ Je sentis mon corps tout entier se raidir quand je l’aperçus. Quand je le vis. Quand il s’approcha de moi. Les souvenirs, ces mêmes souvenirs que mon esprit s’était appliqué à oublier, ressurgirent pour se faire une place dans mes pensées. Un frisson parcourut mon échine et je détournai la tête, mes yeux se posant sur les rues aimées de Londres. Du haut de mon immeuble, je voyais les personnes se presser sur les trottoirs, le portier de ma résidence attendre patiemment devant la grande porte d’entrée. Du haut de mon immeuble, le monde paraissait plus simple, plus routinier, plus distant. Quand Isaac se posta à mes côtés, je m’étais perdue à contempler le chapeau d’une personne âgée, qui attendait patiemment son chauffeur, une aura sophistiquée autour d’elle. Je ne tournai pas la tête vers mon mari. Je pris sur moi, également, pour ne pas tourner les talons et partir, partir avant qu’il ne commence à parler, partir avant que mon cœur ne finisse par exploser, exploser à cause de toutes les émotions qui pouvaient le tourmenter. Quelque part, j’avais l’impression d’être en danger en sa présence, et ce sentiment m’était presque insupportable. Mes yeux glissèrent sur ses mains qui accrochaient le fer du garde-corps du balcon, et je notai le tissu enroulé autour d’un de ses poings. J’étais presque sûre qu’il avait trouvé un moyen de se blesser mais je détournai la tête pour ne pas me poser de questions supplémentaires ; en cet instant, cela était comme si mon corps tout entier refusait de s’en faire pour lui, de s’inquiéter de ses peines. Il désirait se concentrer sur moi, sur mes douleurs, sur ma colère et mes peurs. Je fermai doucement les paupières, prenant une, puis deux, profondes inspirations. J’aurais aimé me calmer. J’aurais aimé passer à autre chose. Mais je n’y parvenais pas. Les larmes qui avaient coulé sur mes joues avaient laissé des empreintes acides sur ma peau, cicatrices de mon âme éraflée et de ma foi déchirée. J’avais cru en mon mari. J’avais été persuadée qu’il était bien incapable de me faire du mal, d’être mon ennemi, comme il avait pu lui-même l’évoquer lors de nos retrouvailles. Mais ma gorge était si serrée qu’elle témoignait de l’horreur qui m’habitait ; comme si, quelque part, je me rendais compte que sa violence pouvait toucher tout le monde. Tout le monde, et donc n’importe qui. Même moi. « Tu es réveillée. » finit-il par dire. Je ne répondis pas à sa constatation, me réconfortant dans mon silence. J’étais en colère contre lui, en colère sans doute injustement mais je tenais, quand même, à garder une certaine contenance. A ne pas le blesser avec mes propos. A tout garder pour moi. Si je ne pouvais pas prétendre ou feindre d’aller bien, je comptais sur le silence pour me soutenir. « Je t’ai blessé… » Un frisson s’étendit sur mes bras pour ponctuer ses paroles, mais je ne rendis pas les armes ; je demeurai de marbre, froide comme la glace, sans doute. Je ne me tournai pas vers lui. Je ne prononçai pas le moindre mot. Et cela me coutait. Cela me coutait d’être silencieuse, cela me coutait de ne rien exprimer. Surtout en cet instant où les souvenirs refusaient de me laisser tranquille ; surtout maintenant que j’avais l’impression de revivre ses coups de reins et son absence de respect. « Tu peux me frapper… » ajouta-t-il avant de s’agenouiller à mes côtés. Je ne baissai pas la tête vers lui, demeurant droite. « Je n’ai jamais levé la main sur toi. Ce n’est pas aujourd’hui que ça risque de changer. » Ma voix était froide, étranglée, presque, au fond de ma gorge. Je demeurai interdite face à ce qu’il avait bien pu me dire, presque vexée qu’il puisse envisager que je sois capable le frapper, moi, moi qui ne l’avait jamais giflé de ma vie entière. J’avais toujours été bien trop calme et rationnelle pour en venir aux mains ; il était rare, d’ailleurs, que j’entre en conflit avec qui que ce soit d’une quelconque manière. Malgré toute la colère et l’incompréhension qui pouvaient m’habiter, lui faire du mal physiquement ne m’avait pas effleuré l’esprit. « Je suppose que je ne suis plus très doué. Je suis tellement désolé. » Elles étaient là, ses excuses. Ses excuses qui ne me suffisaient pas. Ses excuses qui ne parvenaient pas à faire la balance avec ce que je pouvais ressentir par sa faute. Il m’avait blessé dans mon amour propre et dans mes sentiments, bien au-delà du fait de m’avoir fait du mal physiquement. Doucement, je m’écartai de lui comme pour donner de l’espace à mon esprit pour réfléchir, mais rien n’y fit. « Plus très doué ? » répétai-je, ma voix portant dans les aigus sans que je ne puisse rien y faire. « Même un adolescent de seize ans sait que quand on lui dit doucement c’est que l’autre n’est pas encore prêt. » Je me battais avec mes propres larmes, ces larmes qui montaient à mes yeux. Mes mains s’agrippèrent à ma tasse de café avec désespoir, en vain ; mes membres tremblaient si fort que je renversais quelques gouttes du liquide brûlant. « Tu m’as traité comme si j’étais une pute, Isaac. Est-ce que tu as pensé ne serait-ce qu’une seule fois à mon propre plaisir ? Non. Parce que si ça avait été le cas, ça ne m’aurait pas fait aussi mal. » Je passais une main sur mes yeux, avant de coincer des mèches de cheveux derrière mon oreille. J’y repensais. J’y repensais sans cesse, à sa brutalité, sa violence. J’y repensais, encore et encore, me demandant à quel moment j’avais pu lui envoyer les mauvais signaux, à quel moment j’avais pu commettre une erreur. « Je sais que tu as vécu un enfer pendant quatre ans… Je comprends que tu sois dépassé, que tu me rejettes, que tu ne veuilles pas de Jasmine, que tu ne saches plus te conformer à la société, que tu m’en veuilles parce que j’ai continué d’avoir une vie sexuelle. Je te le jure. Je me fais à tout ça. Je suis prête à m’adapter à énormément de choses. Mais je suis ta femme. Pas une ennemie à qui tu peux faire du mal. Pas une prostituée que tu peux baiser sans aucun respect. » Parce qu’Isaac, au fond, c’est ça qui m’a blessé. La douleur physique n’a absolument rien avoir avec les blessures que tu as pu m’infliger au cœur. J’ai eu l’impression de ne pas compter, Isaac. De n’être qu’un corps comme j’avais bien pu l’être pour tous ces types avec qui je me suis envoyée en l’air. Un corps sans importance. Un corps qu’on ne respecte pas. Un corps bon qu’à baiser.
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(✰) message posté Lun 4 Mai 2015 - 22:38 par Invité
“ And yes, I’ll admit, I am jealous. I’m jealous of every minute you spend with him, of every concerned expression you send his way, of every tear shed, of every glance, every touch, and every thought. I want to rip him to pieces and purge him from your mind and from your heart. But I can’t because I am dead.” ✻ Je retrouvais la quiétude du salon. Les petites décorations s’élevaient dans le silence, éteintes et irréelles. A vrai dire, tout le décor me semblait étranger. Je me faufilais tristement entre les meubles, lorsque soudain, les péripéties de la soirée me revinrent à l’esprit ; j’avais manqué de violer Olivia. Ma chère et tendre Olivia. Il y avait des mots qui me brûlaient les lèvres, tant de passions cachées sous les voiles de l’injustice. Je refusais de me l’avouer, mais je me sentais si démuni lorsqu’elle s’éloignait de moi. Je lui avais demandé de me quitter. Je me souviens, lui avoir fait promettre de continuer après ma mort afin d’honorer ma mémoire. Cependant, j’étais asservi par son regard abyssal et son air coupable. C’était trop dur à encaisser. Mon âme était vouée à l’absolu. Je sais que rien n’est parfait. Je sais que tu m’as aimé jusqu’à l’impossible ; mais au-delà de ta promesse de continuer sans moi, il y avait mon vœu solennel de te revenir. Je t’avais dis que je ne mourrais pas au front mais tu n’y as pas cru. Je tremblais sans savoir m’arrêter. Mes réflexions s’évanouissaient dans le vide incommensurable qui enlaçait ma poitrine. Je n’étais qu’une bête dissimulée derrière un mince film de discipline et d’humanité. Ma condition aurait facilement pu faire objet d’un long débat, mais peu m’importait si c’était un mauvais sort, ou les coups que l’on m’avait infligés qui m’avaient transformé en monstre. Ce que les psychologues pouvaient analyser n’avait aucune importance à mes yeux, puisque tous leurs diagnostics ne pouvaient extirper la rage de mon être. Je possédais tout simplement deux natures qui se chevauchaient au gré des jours et des nuits. En m’enrôlant dans l’armée de terre, je n’avais jamais songé à toutes les conséquences qu’auraient mes décisions sur notre futur commun. Olivia était ravagée par la peine tandis que je me noyais dans la honte. Je me débattais constamment contre mes démons, mais malgré tous mes efforts, malgré toutes mes bonnes résolutions et l’aide que mes proches pouvaient m’apporter, je ne faisais que fauter à nouveau. Je m’approchai d’elle d’un pas hésitant. Je l’observais longuement sans retrouver la moindre trace de bienveillance sur son visage ; seules les larmes acides marquaient encore ses joues empourprées. Je me crispai en secouant lentement la tête. J’étais rongé par la culpabilité mais aussi, par une sensation étrange d’avoir vengé une partie de ma dignité. L’homme blessé, mon maudit doublon caricatural, portait en lui la marque du chaos. J’étais en train de détruire mon couple – ma raison d’être, mon seul espoir de rédemption. Je levais les bras avant de plaquer mes mains contres mes oreilles bourdonnantes. Il ne fallait pas que je m’écoute. Ma propre conscience m’imprégnait par le mal. Je suis mon ennemi. Je m’agenouillais, faisant le mort avant de me dresser sur mes jambes repliées. « Je n’ai jamais levé la main sur toi. Ce n’est pas aujourd’hui que ça risque de changer. » Pourtant, elle aurait dû. Tout le monde m’avait frappé à un moment ou à un autre de ma captivité. Les chefs des talibans, les recrues fraîchement débarquées, les souillons et les hommes de main – j’étais le défouloir de toute une population opprimée. C’était un supplice de voir quel point fantastique de reniement de soi, j’avais atteint. Mes bras maigres se tendirent dans le vide alors que mes cheveux se dressaient à l’arrière de mon crâne. La cachexie mangeait la moitié de mes muscles, et parfois de mon âme. J’hochai la tête d’un air absent. Mes souvenirs m’emportaient au loin, entre les dunes brûlantes du désert Afghan et les cris de guerre. « Plus très doué ? » Siffla-t-elle en montant dans les aigus. Je plissai les yeux, perdu dans ma mélancolie. « Même un adolescent de seize ans sait que quand on lui dit doucement c’est que l’autre n’est pas encore prêt. » Elle me reprochait mon manque de tact, mais je n’entendais que les zozotements désagréables de ces mots cruelles qu’elle me crachait en pleine face. Je le méritais probablement - je le méritais toujours de toute façon. « Tu m’as traité comme si j’étais une pute, Isaac. Est-ce que tu as pensé ne serait-ce qu’une seule fois à mon propre plaisir ? Non. Parce que si ça avait été le cas, ça ne m’aurait pas fait aussi mal. » Je plaquai mes mains à nouveau contre mes oreilles, mais j’avais beau maintenir une forte pression contre mes tempes, les fluctuations graves de ses accusations s’enfonçaient jusqu’au plus profond de mon cœur. Elle refusait de me frapper, mais les coups mesquins qu’elle m’assignait étaient pires que tout. Je ne pouvais pas le supporter. Je me mis à vaciller au rythme de ma respiration saccadée, dans l’espoir vain de détourner mon attention de la réalité. « Je sais que tu as vécu un enfer pendant quatre ans… Je comprends que tu sois dépassé, que tu me rejettes, que tu ne veuilles pas de Jasmine, que tu ne saches plus te conformer à la société, que tu m’en veuilles parce que j’ai continué d’avoir une vie sexuelle. Je te le jure. Je me fais à tout ça. Je suis prête à m’adapter à énormément de choses. Mais je suis ta femme. Pas une ennemie à qui tu peux faire du mal. Pas une prostituée que tu peux baiser sans aucun respect. » Je secouai frénétiquement la tête. Mon cœur s’écrasait contre ma cage thoracique avec acharnement ; j’aurais tant voulu qu’elle me fasse confiance à nouveau. Je ne voulais pas lui faire mal. Je ne voulais pas la blesser dans son égo ou dévaloriser toute la profondeur de mon attachement pour elle. De tous les hommes sur terre, j’étais le seul à l’avoir chéris jusqu’à la déraison. J’étais devenu presque fou en imaginant sa silhouette étreindre mon corps éclopé dans l’humidité de mon cachot. Je m’étais damné pour la retrouver, après soixante-quinze jours, encore et encore, jusqu’à ce que les années s’accumulent et que la réalité finisse par entrer en collision avec mon univers perdu. Mon amour n’était qu’un délire de psychopathe jusqu’à ce qu’elle se matérialise devant moi. J’enfonçai mes ongles dans ma peau avant de laisser échapper une longue plainte douloureuse. Le désespoir embuait mes yeux pâles alors que je relevais la tête vers les arcs d’un ciel lointain. « FERME- LA ! » Tremblai-je en sentant la bile me monter. Je chancelais encore, comme une épave malmenée par les vagues d’une mer déchainée. Ferme-là, par pitié ! Je ne peux plus t’entendre. Je ne veux plus te voir. Tu ne comprends pas et je ne peux pas t’expliquer parce que je suis dépassé par l’horreur de mon vécu. Ferme-là, pars si tu le veux mais ne me parles plus comme ça ! Mon visage s’assombrit alors que je bataillais contre les premiers symptômes d’une crise d’angoisse. Je sentais les pointes acérées des lames picoter mes membres blessés avant de s’enfoncer dans ma chair. Je me cambrai violement avant de rester immobile, en position fœtale sur le sol. « Tu ne sais rien du tout. Ce n’était pas l’enfer pendant quatre ans, c’était pire … L’enfer aurait été que je meurs avec le souvenir merveilleux d’avoir vécu. Pas de devenir comme ça ! Je n’ai jamais rien demandé. J’ai prié mais depuis quand les Dieux exhaussent-ils des miracles pour les mécréants ? » Marmonnai-je en serrant ma prise sur mon visage. Maintenant, je dois vivre avec le poids d’avoir tout gâché. J’ai atterri dans un antimonde, une dimension parallèle ou mon bonheur est inversé. Je n’ai jamais demandé à revenir ici.
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(✰) message posté Ven 8 Mai 2015 - 15:04 par Invité
Do monsters make war or does war make monsters? ;; build me back together till i am wiser, till i am worthy. it is a strange thing to love one's damnation. but perhaps not so strange, when she is also your salvation. ✻ ✻ ✻ J’avais fini par le comprendre. Par comprendre que les blessures mentales étaient bien souvent pires que les blessures physiques. Que tout ce qui se passait dans notre tête était beaucoup plus prenant que tout ce qui se passait dans notre corps. Alors, non. Cela ne me surprenait pas. Alors, non. Cela ne me surprendrait plus. Je ressentais encore l’ombre d’une gêne dans le bas ventre mais mon esprit paraissait détenir le monopole de ma douleur, comme s’il ne se formalisait même plus de mes blessures. Je ne savais plus comment gérer les émotions qui affluaient dans mes pensées. Je ne savais plus comment m’en sortir. Je ne savais plus comment réagir, également. J’étais fatiguée de prendre sur moi. J’étais fatiguée de conserver un sourire quand il se bornait à creuser la distance entre nous. J’étais fatiguée de supporter ses sautes d’humeur. J’étais fatiguée d’être la seule à être courageuse. J’étais fatiguée de continuer d’avancer. De continuer d’avancer alors que je n’avais plus aucun espoir. Parce que oui, Isaac. Tu as beau mettre tes mains sur les oreilles. Tu as beau tenter d’ignorer mes paroles. La vérité est quand même là. Je n’y crois plus. Je n’y crois plus parce que, quand je finis par me dire que la situation ne pourrait pas être pire, tu trouves toujours un moyen de nous trainer vers le fond. Je n’y crois plus parce que, malgré le reste, j’ai toujours cru que tu m’aimais encore. Que j’avais encore de l’importance à tes yeux. Et, maintenant, je ne parviens même plus à en être sûre. C’était dur de remettre en cause mon existence toute entière. C’était dur de le voir m’échapper, m’échapper alors qu’il était encore vivant, m’échapper en emportant ses sentiments avec lui. J’ai la constante envie de pleurer, Isaac. Tu me vois pleine d’entrain et joyeuse. Tu me vois prendre soin de toi et te laisser un certain espace personnel. Mais, la vérité, c’est que tes silences me pèsent. Mais, la vérité, c’est que j’ai beau tout faire pour toi, tu ne m’acceptes pas dans ton monde. Tu ne t’en rends sans doute même pas compte, non. Mais c’est le cas. Tu ne me voies plus. Tu ne me regardes plus. Je ne suis qu’une figurante dans ta réalité de rescapé. Je ne pouvais pas vivre pour nous deux. Je ne pouvais pas avancer pour nous deux. J’étais trop faible. J’étais trop blessée. « FERME-LA ! » Sa voix résonna jusque dans mes os, parcourant mes veines, faisant palpiter mon cœur abimé. Je dus me faire violence pour ne pas laisser un sanglot m’échapper, et je l’observai se recroqueviller sur le sol. Non, je ne voulais pas me la fermer. Non, je ne voulais pas me taire, pas cette fois. J’avais contenu mes propres paroles bien trop longtemps. J’avais accumulé bien trop de peines pour parvenir à encore les contenir. Mais la surprise qu’il lève la voix de cette manière me laissa muette. Me choqua. Me brisa, également, parce qu’elle ne fit que confirmer mes impression, parce qu’elle ne donna raison. Isaac Von Ziegler ne m’aurait jamais parlé de cette manière. Isaac Von Ziegler ne se serait jamais comporté de la sorte en ma présence. J’étais la seule de nous deux à faire des efforts pour que tout se passe bien ; et, au fond de moi, j’étais persuadé que s’il n’en faisait pas, cela était sans doute parce que je ne comptais pas assez. « Tu ne sais rien du tout. Ce n’était pas l’enfer pendant quatre ans, c’était pire… L’enfer aurait été que je meurs avec le souvenir merveilleux d’avoir vécu. Pas de devenir comme ça ! Je n’ai jamais rien demandé. J’ai prié mais depuis quand les Dieux exhaussent-ils des miracles pour les mécréants ? » s’apitoya-t-il et je sentis mon bras trembler de colère. « Personne n’est là pour écouter tes prières, Isaac ! Cesse d’attendre un miracle qui n’arrivera jamais. Cesse de te cacher derrière une excuse pareille pour justifier tes actes. Tu as vécu pire qu’un enfer mais ça ne change rien. Tu es responsable de ce que tu fais, désormais. Toi et toi seul. » Cela n’était que le pâle reflet de tout ce que je pouvais penser. Le pâle reflet de ma constante frustration, de mes constantes peines. Le pâle reflet de ce quotidien qui me pesait plus que nécessaire. J’étais fatiguée, oui. Lasse. Je n’en pouvais plus d’être la seule à mon comporter en adulte. Je n’en pouvais plus d’être la seule à prendre responsabilité pour ce qu’il se produisait. Je voulais qu’il reconnaisse. Je voulais qu’il reconnaisse qu’il ne me traitait plus de la même manière. Je voulais qu’il reconnaisse qu’il ne m’avait pas respecté. « Je ne sais rien de ce qu’il s’est passé, c’est vrai, mais c’est parce que tu ne t’es jamais donné la peine de me raconter, alors que tu sais très bien que je ne te jugerai pas. » repris-je, la gorge serrée. Je pris une profonde inspiration, tentant en vain de garder un ton égal, ignorant la position d’enfant dans laquelle il se tenait. J’étais sans doute trop dure avec lui, mais je refusais de le prendre en pitié pas quand c’était à mon tour d’avoir mal, pas quand c’était à mon tour d’être triste. « Qu’est-ce que tu veux que je te dise, Isaac ? Tu as vu comment tu te comportes avec moi ? Les silences que tu m’imposes ? L’attitude que tu me réserves ? Je n’ai pas été ta femme ces derniers moi, non. Et hier j’ai eu l’impression d’être ta pute. Je ne vais pas me taire pour te faire plaisir. Je ne vais pas me taire parce que tu me le demandes. Parce que je suis fatiguée, Isaac. J’ai l’impression que tout ce que je fais ne rime à rien parce que tu n’en as strictement rien à faire. » Isaac, je t’aime. Tu le sais que je t’aime. Mais je ne suis pas sûre de pouvoir continuer à t’aimer à contre-sens. Ca fait trop mal. Ca me détruit. Et, le pire, c’est que tu ne t’en rends même pas compte.