i don't wanna go to school, i just wanna break the rules. (jonas)

Il court dans les rues de Londres, se frayant un chemin dans la foule pour rejoindre la maison familiale. Certains regards curieux lui jettent un regard à son passage, mais Jonas ne voit personne. Pressé par le temps, il ne se permet aucune distraction possible qui l’obligerait à s’arrêter quelques instants. Sa sœur et sa mère doivent l'attendre depuis un moment, et avec un peu de chance, elles n'ont pas encore commencé à déjeuner. Elles n'auraient jamais osé. Ce n’est que dix minutes après qu’il est sur le perron, encore essoufflé par sa petite course. Quand la porte s’ouvre, Reagan lui offre un sourire malicieux. « Tu me dois une place de concert, » qu’elle déclare en guise de salutation alors que son aîné roule des yeux, non sans en être amusé. Elle est encore jeune, mais elle a déjà le sens des affaires. Elle a décidément bien appris ses leçons. Elle avait parié qu’il serait encore une fois en retard. Forcément, la compétition ne lui avait pas fait peur et il lui avait déclaré, non sans arrogance, que ce ne serait pas le cas. Force est de constater qu’elle avait eu raison. Les vieilles habitudes ont la vie dure. Il lui ébouriffe les cheveux, ce qui a le don de la faire grogner, en gardant toute même sa bonne humeur. Si Jonas parvient à l’agacer à chaque fois qu’il leur rend visite, elle ne lui a jamais voulu plus de quelques minutes, parce qu’après tout, c’est son rôle de jouer les grands frères relous et c’est son rôle à elle, de le dépouiller. « Years & years ? » Elle acquiesce, les yeux brillants et s’autorise enfin à lui laisser le passage dans la petite maison. L’odeur familière des plats de sa mère réveille aussitôt sa faim, qui lui tiraille l’estomac. Pas de répit pour le jeune homme, sa petite sœur ne le quitte pas d’une semelle, lui racontant les dernières nouvelles de la famille. Son père a eu cette idée géniale de leur proposer des vacances d’été à Liverpool et forcément, elle est sur les nerfs depuis cette annonce. Surexcitée, Jon écoute ses récits avec un sourire bienveillant, et se permet parfois quelques remarques sarcastiques, qui ne parviennent pas à la descendre de son petit nuage. Elle arrête son monologue seulement pour le laisser saluer leur mère. Dans la cuisine, la femme est en pleine préparation du dessert. Elle s’applique, et quand Jonas jette un coup d’œil au-dessus de son épaule, il se met à rire. « Elle est un peu bizarre ta pâte, non ? » Elle sursaute, en fait presque tomber son moule, puis se retourne pour faire face à son fils, hilare. « Arrête de te moquer, la prochaine fois, je m’abstiendrai de vous faire plaisir. » Elle garde son sourire, mais sa voix est néanmoins sévère. Jonas retient une remarque, mais le regard qu’il lui lance est bien assez significatif pour sa mère. Elle l’a vu grandir, elle le connait par cœur. Mais elle s’abstient de tout commentaire et s’approche simplement pour le serrer dans ses bras. Elle passe une main dans ses cheveux, remarquant sa nouvelle coupe et lui demande de déguerpir de sa cuisine. Il avait l’habitude de préparer les plats pour la famille mais à présent qu’il ne vit plus avec eux, il n’a plus aucun droit sur cette salle. Cela dit, elle ne refuse jamais les petits plats qu'il lui amène dès qu'il en a l'occasion. Avant de rejoindre Reagan, il s'arrête. « T’as dû oublier les œufs, m’man. » – « Va-t-en ! »  - « Ça va, je m'en vais. » L'ambiance est bon enfant. A table, la discussion est enjouée, et animée. Reagan ne s'arrête de parler que lorsqu'elle prend une bouchée et leur mère n'oublie jamais de leur faire deux-trois sermons. Son second mari n'a pas pu les rejoindre pour le déjeuner, mais il est dans toutes les bouches. Jonas n'a jamais eu l'occasion de le lui avouer, mais il est lui profondément reconnaissant de tout ce qu'il fait pour la famille. Ils n'en ont jamais parlé, mais s'il avait eu à choisir, sans aucun doute qu'il l'aurait préféré à son propre père. Son père, il n'existe plus à ses yeux, il n'est qu'une simple poussière sur la Terre qu'il aurait aimé pouvoir nettoyer avant qu'il ne rencontre sa chère petite mère. Et si Jon est celui qui lui rappelle son premier mari, il n'a jamais été aussi proche de sa famille que depuis le départ de Mr Baedeker.  Lorsque vient l'instant des séparations, le jeune homme s'éternise plus longtemps qu'il ne le devrait. Il joue avec les mèches de Reagan, qui râle, sous les regards tendres de la dame. En quittant les Annesley cet après-midi - le nom que porte son beau-père - Jonas a déjà pris son prochain rendez-vous avec les deux amours de sa vie et l'énième pari que cette fois-ci, il arrivera à l'heure.


Sa journée se termine. Enfin. Plus longue qu’à l’ordinaire, il ne pensait jamais pouvoir s’en sortir. Un peu plus et Jonas se tournait vers le suicide. Il ôte son casque, entre dans la pizzeria, range ses affaires et les clés du scooter qu’on lui a légué pour le boulot, et s’autorise une petite cigarette à l’extérieur en attendant sa commande. Forcément, l’idée de pouvoir bénéficier de certains avantages lui plait beaucoup et il n’hésite pas un seul instant à en profiter dès qu’il en a l’occasion, surtout s’il peut le faire avec sa bonne copine. Cece a prévu de ramener les bières et la connaissant, elle a très certainement prévu un beau programme pour la soirée. Affalé contre le mur de l’établissement, l’un de ses collègues commence la conversation sur les dernières rumeurs qui courent depuis la dernière soirée que toute l’équipe a partagée. Y’a cette fille qui a couché avec le manager, mais qui a finalement avoué – après un quatrième verre de vodka – qu’elle avait le béguin pour le livreur – et par livreur, elle parlait bien de Jonas. Celui-ci fronce des sourcils, intrigué par cette histoire, plus encore quand son ami lui raconte qu’elle a toujours essayé d’attirer son attention, sans jamais y parvenir. C’est plutôt drôle qu’il lui dise cela, surtout quand le jeune homme rétorque qu’elle n’est jamais allé plus loin que des remarques acides à son sujet. Ca l’amuse quand même de voir que toute cette haine qu’elle lui montre, est en réalité une technique de drague. C’est sûr qu’avec une fille comme Cece, aussi facile à vivre, on ne cherche pas dans le plus compliqué. Ils n’ont pas vraiment l’occasion de terminer cette discussion qu’on l’appelle pour sa commande. Après avoir salué toute la clique, et s’être attardé plus longtemps sur la demoiselle – qui fait mine d’être occupée pour ne pas avoir à lui adresser la parole – Jonas se dirige vers son appartement. Il a volontairement laissé ses clés à Cece, lui expliquant qu’il finirait plus tard qu’elle et qu’elle avait donc tout le loisir de foutre le bordel avant son retour, tant qu’elle apportait le pack de bières. Sans arrière-pensée aucune, ils ont l’habitude de vivre chez l’un, comme chez l’autre, sans que cela ne devienne étrange entre eux. Ou presque, parce que depuis la nuit qu’ils ont partagé, les choses ne sont plus véritablement les mêmes. Il entend du boucan derrière la porte de son appartement et se doute qu’elle a dû profiter de son absence. Après quelques coups, elle ne tarde pas à lui ouvrir et Jonas, dans un sourire espiègle, lui tend la pizza. « Livraison de pizza ! Ca te fera 8£. » Elle esquisse un sourire, tandis qu’il entre et pose la boite sur la table. Il remarque les bouteilles, mais aussi les sachets de bonbons, de chips et autres cochonneries qu’elle a dû apporter avec elle. Cece s’approche pour regarder les pizzas déjà découpés, et prendre une part. « Mais tu peux aussi payer en nature si tu préfères, » qu’il rétorque en se tenant près d’elle, son visage à quelques centimètres du sien. Son regard croise celui de la brune, et le temps d'un instant, Jonas a la sensation qu'elle est prête à recommencer leur petit ménage. Presque. Cece finit par rouler des yeux et par s'éloigner de lui. « Rêve pas, don juan. » Il glousse, s'approche à nouveau, et parvient à lui voler un baiser sur la joue, qu'elle prend avec un sourire malicieux. Jonas n'est pas dupe, elle fait simplement bonne figure mais il est convaincu qu'elle n'est pas aussi catégorique qu'elle le laisse penser. « C'est pas ce que tu disais la dernière fois. » La dernière, c'était y'a pas si longtemps. Et à en croire les souvenirs qu'il avait gardé de la nuit, elle n'avait pas été déçue. Pas le temps de s'étendre sur le sujet, comme à son habitude, Cece s'éloigne déjà vers la télévision pour s'installer devant le canapé, mimant l'indifférence. « J'vois pas de quoi tu parles. » Evidemment.