“It was nice growing up with someone like you — someone to lean on, someone to count on... someone to tell on! A brother is a friend given by Nature. We are family.” ✻ Robin l'aimait. Plus je le regardais et plus je réalisais à quel point il s'était attaché à Anna. Je me redressai en silence, incapable de combler cette distance qui s'était instaurée entre nous depuis le bal de fin d'année, incapable de conforter mon meilleur ami dans sa douleur ou de trouver les mots justes et apaisants qu'il attendait. Pourtant, ce n'était pas l'éloquence ou les belles paroles qui manquaient. Je n'avais tout simplement pas de force, pas d'espoir à partager. Je croisai les bras sur mes genoux avant de grincer des dents, certainement pour me donner un peu plus de contenance. J'avais si peur de briser le silence qui nous entourait. Des voix venues d'un monde inconnu raisonnaient dans mon esprit. Elle troublaient mes pensées, et à présent, je songeais à ce soir là. J'avais passé de longues heures plongé dans mes réflexions. J'avais avertis Annabelle que ses mensonges ne pouvaient pas durer, qu'elle devait montrer son vrai visage mais elle s'était obstiné à suivre les voies du cœur au lieu de rester lucide. Je me mordis la lèvre inférieure avant de siroter mon whisky, le regard perdu dans la pièce. La lumière se reflétaient sur les murs lisses du bureau avant de caresser les traits allongés de Robin. Il se forçait à sourire, mais je pouvais percevoir les étaux du désespoir se refermer sur lui.
Parles-moi... Je lui adressai un regard suppliant, même si je savais qu'il ne me confierait jamais ses pires désillusions. C'était un super héros. Il n'avait aucune faiblesse, aucune rature. Il se conformait à l'image de la perfection que je lui avais imposé depuis l'enfance. Il restait impassible et seul dans la pénombre. Mon cœur se serra. Je devais être fou pour que la trahison de sa petite amie me touche autant. Je ne doutais pas des sentiments de la jeune brune, c'était son comportement qui me laissait sceptique. C'était une vieille amie d'Ellie. Je m'étais laissé embarqué dans leurs jeux de manipulation et je le regrettais amèrement. J'aurais dû pincer les lèvres et me rendre chez Robin pour tout lui dire. J'aurais dû le faire passer avant tout le reste, mais une part de moi, même si elle lui était loyale, ne pouvait pas se résigner à le blesser délibérément. Alors, j'avais lâchement attendu que les autres le fassent. Je soupirai avant de me retourner vers lui en arborant un sourire insouciant. Je cachais mes émotions derrière la surface. Je me complaisais dans cette trêve pour le retrouver, mais je demeurais hanté par la peur de le perdre à nouveau. Il serra sa prise sur son verre avant de m'adresser son attention ; «
Je me suis toujours demandé comment tu faisais pour encore réussir à prendre correctement des photos vu l’état dans lequel on se retrouvait à chaque fois. Tu commençais à boire deux heures après moi, avoue. C’est pour ça que tu avais plus de mal que moi à t’en remettre le lendemain ? » Je retrouvais son ton moqueur et plein de raillerie, mais le silence revint bien assez vite prendre possession de la pièce. Un frisson traversa mon dos alors que je changeais de position. «
Je suis à moitié écossais. Je te le répètes depuis des années, ça veut tout dire.» Protestai-je en riant avant de m'arrêter dans mon élan. Mon regard sombre se posa sur Robin. J'observai l'inflexion de ses doigts, la courbure de sa silhouette et la flexion de ses jambes accroupies sur le siège. La gêne était toujours là, mais j'étais résigné à la vaincre. J'étais résigné à combattre cet instant de malaise parce que pour la première fois, ce n'était la colère qui régissait mes pensées mais la honte. Cette une sensation terrible me saisissait par la gorge et qui me donnait l'impression que je pouvais m’étouffer à n'importe quel moment. «
Je préférerais pouvoir la détester sans continuer de l’aimer ou… l’inverse. » Je fis la moue en battant des cils. Je détestais Eugenia tout en l'aimant. Ou peut-être l'aimais-je tout en la détestant ? J'étais bien incapable d'entremêler mes sentiments, car la simple vision d'elle avec son petit-ami me rendait fébrile. Je déglutis en vidant mon verre à sa suite.«
J'aimerais bien aussi, mais ce n'est pas aussi simple …» Déclarai-je avec sincérité. Ce n'était qu'un murmure, un souffle qui s'évanouissait sous mon menton. Je souris en me servant un dernier fond. Ma secrétaire, Mlle Jones, allait probablement débarquer d'une seconde à l'autre afin de me prévenir de l'imminence de ma réunion avec le département de finances. «
En gros je n’ai que l’embarras du choix c’est ce que tu essais de me faire comprendre ? » Son rire était communicatif. Je le rejoignis dans l'euphorie avant de me redresser. «
Ce que j'essaie vraiment de te faire comprendre c'est que, même quand toutes les filles du monde auront fini par te lasser, je serais là avec ma bouteille de whisky, mon appareil photo et mon air de crooner.» Je le bousculai légèrement. «
Au pire je deviens gay, ça sera peut-être plus simple. On n’est moins compliqué que les filles, non ? » Je plissai le front. Je n'étais pas aussi sûr de cette éventualité. Parfois, je trouvais les hommes encore plus compliqués que les femmes. Ils étaient bourrés de testostérone, de fausse fierté et de compétition. Je levai les yeux au ciel. «
Je pense que l'idéal c'est de parvenir à se contenter tout seul...Sur le plan émotionnel...» M'empressai-je d'ajouter pour qu'il n'y ait pas de confusion. Il me remercia et je lui adressai un hochement de tête, probablement trop ému pour émettre le moindre commentaire. Ce n'était pas une amitié ordinaire. Robin était le grand frère que j'aurais dû avoir. La moitié de mon cœur frissonnait dans sa poitrine tandis que l'autre se mourrait dans ma cage thoracique. J'esquissai un faible rictus alors qu'on frappait à la porte. Je pressai l'épaule de mon ami en me levant. «
Ils doivent m'attendre en salle de conférence, mais on se voit ce soir d'accord ? On sort dîner en ville et je piocherais pas dans ton assiette pour t'embêter. » Proposai-je en me dirigeant vers mon bureau à nouveau.