"Fermeture" de London Calling
Après cinq années sur la toile, London Calling ferme ses portes. Toutes les infos par ici follow me, i'll be your river. (linny) 2979874845 follow me, i'll be your river. (linny) 1973890357
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() message posté Lun 1 Déc 2014 - 13:36 par Invité
it’s a big bad world outside
“maybe believe or maybe don’t care. shit, maybe there is no god in the big white clouds up there. maybe live long, or maybe die young. or maybe live every day like it’s your last day under the sun. we go out on our own it’s a big bad world outside. carrying our dreams and all that they mean. trying to make it all worthwhile.”



Je ne sais pas. Je n’ai jamais su. Ai-je les yeux de ma mère, la force de caractère de mon père ? Pensent-ils parfois à moi ? Se sont-ils aimés ? Suis-je une erreur ? Le résultat d’une grossesse accidentelle ? Je ne sais pas. Et je ne saurai jamais. Ce sont des questions qui me traversent l’esprit, parfois. Mais des questions auxquelles je ne veux aucune réponse. Ma vie est telle qu’elle est. J’ai été élevé par des parents incroyables. Ce sont eux, mes parents. Mes vrais parents. Eux, et personne d’autre. Alors même si ces questions sont légitimes, je veux qu’elles restent hors de ma vie. Je ne veux pas qu’elles m’atteignent. Alors je n’en parle jamais. Je ne parle jamais de ma naissance, de mon adoption. Ce sont des choses que je garde enterrées. Comme pour me protéger, ou pour dissimuler d’éventuelles failles. Je crois que si je les laissais ressurgir, ces failles pourraient s’avérer plus destructrices que ma maladie. C’est tellement facile de les ignorer. De faire comme si elles n’existaient pas. Et d’écouter ces jeunes. Les écouter me parler de leurs blessures, de leurs passés. C’est comme si j’étais fait pour aider. Pour écouter. Mais pas pour être entendu, ni pour être aidé. Il n’y a personne pour gratter mes sourires en se demandant ce qui se cache derrière. Il suffit de faire semblant pour aller bien. Du moins aux yeux des autres. C’est ridiculement facile. Assis sur un banc au milieu de la foule, je regarde les passants. Je les regarde et je me demande combien d’entre eux font semblant d’être heureux. Combien d’entre eux mentent à leur femme, ou à leurs amis. Puis il y a des visages sur lesquels c’est évident. Ce sont des visages seuls, pensifs. Perdus par la musique que déverse une paire d’écouteurs. Quand j’étais gosse, je voulais sans cesse parler aux inconnus que je voyais pleurer dans la rue. Je voulais les aider, leur offrir un câlin ou au moins un sourire. Je me souviendrais toujours de ce que ma mère m’a dit. « Tu ne peux pas aider tout le monde Lior. Certaines personnes sont tristes, d’autres sont heureuses. Mais ce ne sont jamais les mêmes. On ne peut pas être heureux sans avoir été un peu malheureux. Tu comprends ? De quoi pourrait-on se réjouir si tout allait toujours bien ? » Je sais qu’elle disait vrai. Mais c’est pourtant plus fort que moi. Je me sens concerné par la vie des autres, et tant pis si personne ne se sent vraiment concerné par la mienne.

Cela fait environ une vingtaine de minutes que j’observe. Que j’observe le marchand de journaux au coin de la rue, les piétons traverser la route lorsque le feu passe au vert, les enfants qui rentrent de l’école. Mais à l’intérieur de la foule, personne ne se regarde. Tout le monde est concentré sur sa personne, et sur rien d’autre. « J’espère qu’il n’y aura pas trop de monde dans le métro. » « Je ferais mieux d’aller racheter du lait. » « Si le chat a encore foutu le bordel… » J’imagine les pensées tristement égoïstes de tous ces gens. Puis j’aperçois une jeune femme en fauteuil roulant. Elle semble gênée, comme si elle n’était pas à sa place, comme si elle voulait disparaître. Je me rends compte qu’elle a besoin d’aide. Que le trottoir devant elle n’est pas adapté aux personnes à mobilité réduite. Il ne s’abaisse pas au niveau de la route, ce qui pourrait s’avérer dangereux si elle essayait de descendre seule. Pourtant, personne ne l’aide. Personne ne la regarde. Alors je me lève et m’approche d’elle. Je ne suis pas encore à son niveau qu’un sourire se dessine sur mon visage. Je la connais. Comment l’oublier. De toutes mes rencontres, la nôtre est celle que je préfère. « Bonjour Eugenia. » Je m’accroupis un instant à ses côtés, en souriant d’un air amusé. « On dirait bien que je suis votre sauveur aujourd’hui. » Je lui lance ensuite un clin d’oeil, avant de me relever et d’attraper son fauteuil. J’attends que le feu passe au vert, puis je la fais doucement descendre du trottoir. Et nous traversons la route. Enfin, la moitié de la route, puisque je nous arrête en plein milieu. « Imaginez un peu que je décide de rester là, avec vous. En plein milieu de la route. » Le feu des piétons passe au rouge, et celui des voitures au vert. Bien sûr, elles se mettent à nous klaxonner. Alors je lâche le fauteuil, et agite les bras pour leur faire signe de se calmer. Je me retourne ensuite vers les piétons derrière nous, et hausse la voix. « Soit vous êtes des humanoïdes extrêmement défectueux, soit vous êtes tristement égoïstes. J’espère que la prochaine fois, vous vous battrez pour avoir la chance de faire traverser une si jolie demoiselle. » Puis je me retourne, attrape à nouveau le fauteuil d’Eugenia, et nous hisse sur le trottoir d’en face. « Je suis obligé de faire quelque chose de mal pour compenser avec ma bonne action. Du coup j’ai décidé de vous kidnapper, même si je ne sais pas encore où vous emmener. » Et je commence à pousser le fauteuil à travers la foule.
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() message posté Lun 1 Déc 2014 - 17:44 par Invité
she was a genius of sadness, immersing herself in it, separating its numerous strands, appreciating its subtle nuances. she was a prism through which sadness could be divided into its infinite spectrum. ;; it is often in the darkest skies that we see the brightest stars. ✻✻✻ Des personnes passaient devant moi. Elles le faisaient sans me voir. Sans me voir réellement. Du moins, cela était ce qu’elles prétendaient ; malgré la migraine qui me prenait et qui envahissait chacune des cellules de mon cerveau, j’étais encore capable de noter le vague coup d’œil qu’elles me jetaient, toutes, avant de détourner le regard et se hâter ailleurs. Se hâter ailleurs comme si rien n’était. J’esquissai un vague sourire gêné, fixant avec obstination mes doigts abimés pour ne plus avoir à rencontrer leurs yeux chargés de pitié. A leur place, j’aurais sans doute fait pareil. J’aurais évité mon propre regard. J’aurais cherché à me distancer, mal à l’aise, désireuse de ne plus partager le même air. Nous étions tous élevés dans la peur de la différence, après tout.
Et j’étais différente. Malgré tout ce que je pouvais penser, je l’étais.
Je me focalisai sur ma respiration encore laborieuse, chassant toutes les pensées de mon esprit. J’étais jugée guérie de ma pneumonie par les médecins, mais j’avais encore l’impression de ressentir quelques effets secondaires. Mes poumons avaient encore du mal à trouver de l’air. Je suffoquai de temps à autre, en proie à des crises d’angoisse. J’avais la sensation de me noyer dans mes pires instants de panique, me remémorant à chaque fois la sensation qui m’avait envahie lorsque Julian m’avait lâché dans la mer. Cela faisait déjà une poignée de semaines, mais cela me hantait. Encore et encore. Encore et toujours. Je frissonnai, frictionnant mes mains contre mes cuisses, cherchant à chasser mon anxiété sans y parvenir. A la fin de ma convalescence, j’étais retournée à Londres, le cœur brisé et l’être déchiré par la maladie. Chaque jour, avant mon retour, m’avait semblé être pire que le précédent ; je n’avais cessé de penser à Julian, de songer à mon handicap, de maudire ce destin qui continuait de m’en vouloir. J’avais cru mourir une fois. Deux fois. Cent fois. Mourir de désespoir. Mourir de fatigue. Et j’étais rentrée. Rentrée chez ma sœur, dans la capitale, dans le cocon réconfortant de notre appartement. Mon quotidien avait repris son cours. J’avais retrouvé cette vie imparfaite mais qui semblait valoir la peine d’être vécue. Et, contre toutes attentes, je m’étais accrochée. Je m’étais accrochée parce que cela était la seule chose que je savais réellement faire.
Je me mordis l’intérieur de la joue avant de relever la tête et observer les passants aller et venir autour de moi. Je n’étais pas habituée à m’aventurer dans le centre de Londres seule. Je me retrouvais prisonnière de ma propre condition, de la manière la plus idiote qui soit. Je poussai un soupir désespéré, fusillant du regard le trottoir inadapté. Cela semblait être absolument rien. Une marche trop haute. Une marche trop haute que l’on enjambe avec une précaution feinte, une marche trop haute que les enfants sautent avec joie. Mais, dans mon cas, cette marche trop haute faisait la différence. Elle me bloquait. Elle m’emprisonnait. Je n’osais même pas demander de l’aide dans mon besoin. Je n’osais même pas déranger les autres, ces autres qui m’évitaient parce que cela était sans doute la chose la plus simple à faire pour eux. Alors, j’attendais. J’attendais simplement qu’une solution s’offre à moi. Mon sourire ne quitta pas mes lèvres et mes yeux se chargeaient de hurler ma détresse. « Bonjour Eugenia. » Je fronçai les sourcils en entendant la voix s’adresser à moi, et je redressai la tête. Mes yeux se posèrent sur Lior, déjà en train de s’accroupir pour se mettre à ma hauteur. Mon visage se fendit dans un immense sourire, sincère cette fois-ci. J’avais l’impression d’avoir eu le temps de vivre une existence entière depuis notre dernière rencontre.   « Bonjour, Lior. » lui répondis-je. Il était là, mon signe du destin. Il était là. Il enchaina aussitôt. « On dirait bien que je suis votre sauveur aujourd’hui. » Il m’adressa un clin d’œil avant de se redresser. Il n’eut pas besoin d’une seule indication de ma part ; il attrapa les poignées de mon fauteuil pour me faire traverser le passage piéton inadapté, me faisant doucement descendre du trottoir.
Je poussai un soupir de soulagement, avant qu’il ne s’arrête au milieu du passage piéton. Je fronçai les sourcils en relevant la tête vers lui, de peur qu’il ne soit essoufflé par l’effort ; je le trouve en train de sourire. L’incompréhension se peignit sur mon visage. « Imaginez un peu que je décide de rester là, avec vous. En plein milieu de la route. » lança-t-il au même instant où le feu passa au vert pour les voitures. Mon cœur rata un battement et je sursautai en entant les klaxons s’élever tout autour de nous. Nous étions en train de bloquer la circulation. Je posai les mains sur mes roues, prête à avancer sans lui, mais je n’en fis rien. Je demeurai silencieuse, la respiration affolée, incapable de dire ou de faire quoi que ce soit. « Soit vous êtes des humanoïdes extrêmement défectueux, soit vous êtes tristement égoïstes. J’espère que la prochaine fois, vous vous battrez pour avoir la chance de faire traverser une si jolie demoiselle. » Mon regard se reporta sur lui. Je fronçai les sourcils, jetant un coup d’œil aux piétons à qui il venait tout juste de s’adresser. Gênés. Cela fût le seul mot qui me vint en observant leurs visages décomposés. Il me fit finalement avancer, et je me tassai au fond de mon fauteuil. Gênée. Cela fût le seul mot qui me vint en pensant à ce qu’il venait de se passer. Je vivais en dehors du temps, en dehors du monde. Je vivais ailleurs parce que l’univers me semblait étranger à mon cœur, étranger à mon corps. Je n’avais pas l’habitude de me faire remarquer. Malgré ma condition et mon besoin d’aide constant, je me tuais à tenter de me faire oublier par le monde entier. « Je suis obligé de faire quelque chose de mal pour compenser avec ma bonne action. Du coup j’ai décidé de vous kidnapper, même si je ne sais pas encore où vous emmener. » m’adressa-t-il, me tirant de mon flot de penser. Je ne saisis pas ses paroles pendant une poignée de secondes, et je finis par me mettre à rire. « Vous êtes complètement cinglé. » lui lançai-je. Cinglé de me pousser à travers la ville. Cinglé de me défendre auprès de ces personnes qui ne faisaient qu’agir comme tout le monde. Cinglé de rester en ma compagnie, surtout. « Cinglé et amateur, en plus de cela. Aucun kidnappeur sur cette Terre n’enlève quelqu’un sans savoir quoi faire de la personne en question. » Il m’amusait. En temps normal, je détestais être poussée par une personne tierce ; cependant, en cet instant, cela me semblait être normal. Juste. Opportun. Je contrôlai mes inspirations, tandis que nous avancions à travers la foule. A travers les autres. « C’était quoi, le numéro de tout à l’heure ? » lui demandai-je alors d’une petite voix. « Ils ne faisaient rien de mal. » Je lui adressai un sourire. J’aurais aimé lui demander comment il allait. Où en était sa maladie. Cependant, pour le peu de temps que j’avais pu le connaître, je savais que Lior n’était pas une personne qui parlait d’elle-même ; il vivait pour les autres. Je n’étais même pas sûr qu’il se souvienne de penser à lui de temps à autre. Il s’oubliait. Il s’oubliait sans hésiter ne serait-ce qu’une seule seconde.
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() message posté Mar 2 Déc 2014 - 13:36 par Invité
it’s a big bad world outside
“maybe believe or maybe don’t care. shit, maybe there is no god in the big white clouds up there. maybe live long, or maybe die young. or maybe live every day like it’s your last day under the sun. we go out on our own it’s a big bad world outside. carrying our dreams and all that they mean. trying to make it all worthwhile.”



« Bonjour Lior. » Elle se souvient de moi, malgré l’éternité qui semble nous séparer du jour de notre rencontre. Les arbres ont eu le temps de perdre leurs feuilles deux fois, la neige de tomber puis de s’en aller, et les fleurs de peindre un peu de couleurs dans nos paysages. Et je n’ose même pas imaginer ce qu’elle a dû vivre, elle. Mais une chose me saute aux yeux. Elle a besoin d’être réparée. C’est comme s’il lui manquait quelque chose. Une étincelle, sans doute. Mais une étincelle primordiale, une étincelle essentielle. Alors j’engueule les piétons derrière nous, et je le fais pour elle. Parce que l’égoïsme fait partie de ces choses qui étouffent les étincelles. Et eux, ils ont été égoïstes avec Eugenia. Ne rien leur dire serait comme d’approuver ce qu’ils viennent de faire. Ou plutôt ce qu’ils viennent de ne pas faire. Je crois que l’humanité n’est plus qu’une simple notion. Une notion dont on parle dans les livres, dans les dictionnaires, ou alors dans les émissions de télé. Comme s’il ne s’agissait plus de notre nature. À croire que l’Homme s’est émancipé de son humanité. Je nous hisse finalement sur le trottoir qui nous fait face, rendant aux voitures la liberté de rouler sur la vie des autres. Et je fais part à mon otage de mon intention à son égard. La kidnapper. Oui, c’est tout à fait ce que je compte faire. La kidnapper hors du monde, hors de son monde. De celui qui l’écrase, de celui qui l’étouffe. Je veux l’emmener ailleurs. Dans une autre dimension. Quelque part où son étincelle pourra se raviver doucement, en toute sérénité. Je n’ai pas encore d’endroit précis en tête, et c’est à ça que je réfléchis en poussant son fauteuil à travers la foule. Mais je suis coupé par le rire d’Eugenia. Et ça me fait quelque chose, de l’entendre rire. Ça accroche un peu de joie au fond de mon estomac. « Vous êtes complètement cinglé. » J’hausse les épaules. Après tout, c’est sans doute vrai. Je suis peut-être un peu cinglé. Même si, à mes yeux, essayer de faire en sorte que quelqu’un aille mieux me semble plutôt sensé. « Cinglé et amateur, en plus de cela. Aucun kidnappeur sur cette Terre n’enlève quelqu’un sans savoir quoi faire de la personne en question. » À mon tour, je laisse échapper un rire. Je ne sais pas encore où nous allons, mais à nous entendre rire, je crois que nous sommes sur la bonne voie. « Je vous l’accorde, je suis un amateur. C’est bien la première fois que je kidnappe quelqu’un. Pour ce qui est d’être ‘complètement cinglé’, je vous avoue que ça me blesse au plus haut point que vous pensiez ça de moi. » Je me tais un instant avant de reprendre. « De ce fait, je vais devoir alourdir votre peine. » C’est drôle. C’est drôle de jouer ce rôle avec elle. C’est comme si quelque part, nous étions déjà ailleurs. Dans notre propre monde. Intouchables. Hors d’atteinte. Au foyer, c’est comme ça que ça marche. Les jeunes s’inventent des personnages. Des personnages qui refusent de parler pour certains, des gros durs pour d’autres. Ce sont leurs carapaces. Et ils vivent à travers elles, un peu par procuration. Ils se donnent un genre pour oublier qui ils sont vraiment. Pour oublier leurs blessures. Sauf qu’avec Eugenia, c’est différent. Je ne veux pas qu’elle oublie ses blessures. Je veux qu’elle les dépasse. Qu’elle prenne le dessus. Je n’ai pas la prétention d’y arriver, mais j’ai la ferme intention d’essayer.

« C’était quoi, le numéro de tout à l’heure ? (…) Ils ne faisaient rien de mal. » Je la vois me sourire, alors j’installe finalement son fauteuil à côté d’un banc, et m’y assieds pour que nous soyons plus ou moins à même hauteur. Je lui rends ensuite son sourire, avant de répondre. « Ils ne faisaient rien, justement. C’est ça qu’ils ont fait de mal. » Je plonge mes pupilles à l’intérieur des siennes, pour la première fois. Je n’avais pas souvenir que ses yeux étaient aussi intensément verts. C’est comme s’ils venaient contraster avec sa chevelure. Quoi qu’il en soit, je ne détache pas mon regard du sien. « Il fallait bien que quelqu’un leur ouvre les yeux. Alors je l’ai fait. Je ne suis pas sûr qu’ils en retiennent quoi que ce soit, mais il fallait que je leur dise quelque chose. » Je tourne alors ma tête pour regarder la foule, devant nous. La foule pour qui, à nouveau, nous n’existons plus. « Ça fait du bien de crier parfois. Vous n’en avez jamais ressenti le besoin ? » Je repose mes yeux sur le visage d’Eugenia. Je suis presque sûr qu’elle a déjà ressenti ça. Cette boule au fond de son ventre, prête à exploser. Le seul moyen de la faire vraiment sortir, c’est d’hurler. D’hurler à s’en briser la voix. Alors je me mets à hurler, aussi fort que mes cordes vocales me le permettent. « On devrait se tutoyer ! » Comme si de rien n’était, le visage toujours sérieux, je reprends (sans hurler cette fois). « C’est vrai, on devrait se tutoyer. Vous êtes d’accord ? » Puis mes oreilles sont distraites par un violoniste, un peu plus loin. Un de ceux que l’on croise partout, mais que personne ne regarde. Un peu comme nous, en fait. Alors sans plus attendre, je me lève et pousse le fauteuil de mon otage jusqu’à lui. Je cherche un billet au fond de mon porte-feuille, et le dépose dans le chapeau vide à ses pieds. Et une idée folle s’empare de moi. « C’est vrai que j’ai l’air cinglé, mais je pense qu’on devrait danser. » Je sais qu’elle est en fauteuil. Mais je sais aussi que je pourrais la porter quelques instants, et que nous pourrions tournoyer au rythme du violon.
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() message posté Mar 2 Déc 2014 - 18:19 par Invité
she was a genius of sadness, immersing herself in it, separating its numerous strands, appreciating its subtle nuances. she was a prism through which sadness could be divided into its infinite spectrum. ;; it is often in the darkest skies that we see the brightest stars. ✻✻✻ J’avais toujours été une solitaire. Une personne sauvage. Une personne en marge de la société. J’avais toujours vécu dans un monde différent, différent et lointain, m’enfermant dans mes pensées et mes convictions sans jamais chercher à me mêler à la foule. J’avais grandi sans l’aide des autres. Sans le soutien des autres. Sans la présence des autres. Je m’étais forgée un caractère sans me baser sur les limites de la société, sans être influencée par les autres, sans trouver de frontière de bienséances dans mon esprit. En contrepartie, ma sœur avait été la jumelle parfaite. La jumelle rayonnante. La jumelle forte et imposante. La jumelle que l’on regarde avec fierté lorsque l’on est parent ; la jumelle que l’on admire lorsque l’on est ami. Je n’avais été qu’une ombre durant tout le temps de notre courte vie. Je n’avais été que son ombre à elle, pâle copie de son physique attirant et de ses manières de duchesse. Je n’avais pas gagné à être connue et je m’en étais fichée ; j’avais toujours songé que la solitude était faite pour moi et que, inversement, j’étais faite pour la solitude.
Cela avait été seulement lorsque le monde n’avait plus voulu de moi que je m’étais rendu compte que j’avais toujours eu besoin de lui. Personne n’était réellement seul. Personne n’était réellement reculé dans son propre univers. Nous suivions tous le mouvement, d’une certaine manière, à notre rythme et à notre façon. C’était la manière dont le monde fonctionnait. Et, lorsque l’on devenait différent, nous restions sur le bord de la route et le temps continuait. Continuait sans nous.
Ma solitude m’oppressait et, pourtant, je ne faisais rien pour l’éloigner de mon âme brisée. Je demeurais dans ma bulle. Dans mon univers. Je demeurai loin, si loin que j’étais persuadée de m’être perdue sans pouvoir retrouver mon chemin. Je subissais. Je subissais parce que cela était ma façon de me battre avec mon quotidien ; je n’avais rien d’une guerrière ou d’une personne courageuse. Je ne faisais qu’endurer, à chaque fois un peu plus. Ma condition me faisait mal. Le regard des autres me blessait bien plus encore. Les murmures sur mon passage semblaient être des coups de couteau en plein cœur. Je n’aimais pas attirer l’attention sur moi. Je n’aimais pas attirer l’attention sur moi et Lior l’avait tout de même fait. Mais je ne parvenais pas à lui en vouloir. Tout du moins, pas réellement. « Je vous l’accorde, je suis un amateur. C’est bien la première fois que je kidnappe quelqu’un. Pour ce qui est d’être ‘complètement cinglé’, je vous avoue que ça me blesse au plus haut point que vous pensiez ça de moi. » J’aurais pu avoir peur de l’avoir blessé dans ses sentiments mais le ton de sa voix m’indiquait que cela n’était pas réellement le cas. Qu’il jouait dans le grand théâtre de nos existences. Mes doigts demeurèrent posés sur mes cuisses tandis qu’il continuait de me pousser à travers la foule. Silencieuse. J’étais silencieuse. Parce que, à travers mon silence, j’avais fini par apprendre que cela était le meilleur moyen de ne pas heurter les principes et les convictions des autres. Je ne savais pas encore comment était réellement Lior. Je ne savais pas encore quelles étaient les choses à dire et à ne pas faire. Alors, je ne parlais pas. Cela était plus facile pour nous deux. « De ce fait, je vais devoir alourdir votre peine. » J’esquissai un sourire amusé. Je balayai ses propos d’un geste de la main, lui montrant que cela ne m’importait plus réellement.
Il avait déjà pris possession de mon fauteuil. Il m’emmenait déjà ailleurs, loin, très loin de ces rues pleines de passants refusant de me regarder dans les yeux. Si ces actions pouvaient être appelées peines, j’étais prête à endurer toutes les souffrances de ce monde hostile.
Puis, les mots dépassèrent ma pensée quant à la manière dont il avait bien pu réprimander les autres passants. Il ne me répondit pas immédiatement, s’arrêtant sur un banc pour s’asseoir et se retrouver à ma hauteur. Il m’observa dans les yeux et je sentis son regard sonder mon âme, creuser dans mes pensées et dans ce que j’étais. Je dus me faire violence pour ne pas détourner la tête et je me redressai pour retrouver une certaine contenance. « Ils ne faisaient rien, justement. C’est ça qu’ils ont fait de mal. » me répondit-il alors. Je me mordis anxieusement l’intérieur de la joue, comprenant ce qu’il sous-entendait mais incapable d’adhérer à sa façon de penser. Pour moi, cela était normal. Pour moi, c’était sa réaction lui qui n’était pas ordinaire, et non pas l’ignorance que l’on m’avait infligé. « Il fallait bien que quelqu’un leur ouvre les yeux. Alors je l’ai fait. Je ne suis pas sûr qu’ils en retiennent quoi que ce soit, mais il fallait que je leur dise quelque chose. » Je l’observai avant de secouer la tête. Je retins quelques instants ma respiration avant de pousser un soupir ; mon regard se perdit dans la rue, cherchant ces mêmes expressions gênés que j’avais pu croiser quelques minutes auparavant. Je retournai mon visage vers Lior. « Je ne suis pas d’accord. » lui dis-je simplement avec l’ébauche d’un sourire sur les lèvres. Cela était un sourire désolé. Désolé d’être plus terre à terre. Désolée de ne plus croire en l’humanité et de ne plus compter sur les autres. Désolé que je sois ainsi. « Vous n’aviez pas le devoir de leur dire quelque chose, tout comme ils n’avaient pas besoin qu’on leur ouvre les yeux. Le monde est ainsi fait, Lior. Tout le monde m’observe comme si je n’étais pas normale et rien ni personne ne pourrait les inciter à agir d’une façon différente. Parce que c’est comme ça. Je suis… Différente. Et on a peur des différences. » J’étais tendue. Tendue parce que je savais que mes paroles pouvaient soulever des colères chez des personnes animées par un sentiment d’injustice. J’entendais déjà la voix de Julian me hurler que je n’étais qu’une défaitiste. Une faible. Une personne larmoyante. Je secouai vaguement la tête, tentant de chasser mes souvenirs de mon esprit.
Mais rien n’y faisait. Ils demeuraient là. Ils étaient imprimés à mes pensées.
Lior se retourna dans la direction dont nous venions durant quelques instants, avant de reporter son attention sur moi. Il y avait une étincelle qui brillait dans ses yeux et qui m’hypnotisait presque. La vie semblait habiter ses prunelles et il était plus éclatant que le Soleil. Il brillait. Il iradiait. « Ça fait du bien de crier parfois. Vous n’en avez jamais ressenti le besoin ? » me demanda-t-il et je n’eus pas le temps de répondre. Il était déjà en train de crier et les passants se retournaient dans notre direction, affolés par le ton de sa voix. « On devrait se tutoyer ! » s’égosilla-t-il, avant de reprendre calmement. « C’est vrai, on devrait se tutoyer. Vous êtes d’accord ? » J’étais incapable de savoir ce qu’il était capable de faire. Il était imprévisible et volatile, comme s’il existait en dehors de la réalité et qu’il avait trouvé son monde ailleurs. Je l’observai en cherchant à comprendre comment une personne comme lui pouvait être habité de cette manière. Aucune réponse ne me vint. Cela était sans doute parce qu’il n’en existait pas. Il n’attendit aucune réponse de ma part. Il était déjà en train de se révéler pour m’emmener ailleurs. Il me faisait penser à un oiseau. Un oiseau allant et venant, ne répondant à aucune attache. Il m’arrêta devant un violoniste de rue, à qui il glissa un billet. « C’est vrai que j’ai l’air cinglé, mais je pense qu’on devrait danser. » me lança-t-il et ma réponse ne se fit pas attendre. « Hors de question. » J’observai les touristes qui écoutaient le musicien avec intérêt. Dans ces instants-là, je n’étais pas le centre de l’attention ; le regard des autres était tourné ailleurs et cela m’arrangeait. J’y trouvais un temps de répit. J’y trouvais un instant où je pouvais me contenter de respirer et cesser de m’inquiéter du regard des autres. « Désolée de devoir le dire, mais je ne danse pas. » poursuivis-je. « Tout comme je ne crie pas, je ne kidnappe pas les autres, je n’aide pas mon prochain, je n’attire pas l’attention sur moi… Je me contente de vivre, en réalité. C’est plutôt triste comme existence, mais je m’en sors plutôt bien. » J’haussai les épaules en posant mes mains sur mes roues pour m’en aller. Lior cherchait à bien faire. J’étais persuadée qu’il n’y avait pas eu un seul moment dans son existence où il avait voulu du mal de quelqu’un. Je me raclai la gorge, presque gênée d’être ainsi. Presque gênée d’être désolée pour ce que j’étais. « Par contre je tutoie les autres, donc c’est avec plaisir que je le fasse avec toi, Lior. Tu voudrais pas plutôt me kidnapper dans un café plutôt que me forcer à danser ? » Je l’observai. Je tentai de deviner ce qu’il pouvait penser mais rien ne me vint réellement. J’avais l’impression d’être confrontée à une langue étrangère. Une langue étrangère que je ne connaissais pas mais qui résonnait quand même mélodieusement dans mes oreilles. Peut-être était-ce cela, la beauté d’une rencontre. La beauté d’apprendre à connaître quelqu’un. Il nous était inconnu aux premiers abords, mais il était, incontestablement et irrémédiablement, plus attirant que la gravité elle-même.
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() message posté Mer 10 Déc 2014 - 15:08 par Invité
it’s a big bad world outside
“maybe believe or maybe don’t care. shit, maybe there is no god in the big white clouds up there. maybe live long, or maybe die young. or maybe live every day like it’s your last day under the sun. we go out on our own it’s a big bad world outside. carrying our dreams and all that they mean. trying to make it all worthwhile.”



« Je ne suis pas d’accord. » Je ne suis qu’à moitié surpris. Je crois que la majorité des gens ne serait pas d’accord avec moi. Parce que l’attitude qu’ont eu ces passants est devenue une normalité. Parce que la société a changé, et qu’elle est impitoyable. Et c’est quelque chose qui me met hors de moi. Quelque chose que je ne supporte pas. Je voudrais pouvoir changer les choses. Pouvoir me battre pour la solidarité, pour l’égalité. Un peu à la manière de Nelson Mandela pendant l’apartheid. La société séparait les hommes de par leur couleur de peau. Et ça a été quelque chose de « normal » pendant longtemps. Jusqu’à ce qu’un mouvement s’éveille, jusqu’à ce que la population ouvre les yeux. Et Nelson s’est battu toute sa vie pour ça. Il n’a jamais baissé les bras. Alors je ne baisserai jamais les miens. Et tant pis si personne ne me suit, tant pis si personne ne me comprend. Je ne changerai pas mon attitude, ni même ma façon de penser. Même si mon idéal est une cause perdue. « Vous n’aviez pas le devoir de leur dire quelque chose, tout comme ils n’avaient pas besoin qu’on leur ouvre les yeux. Le monde est ainsi fait, Lior. Tout le monde m’observe comme si je n’étais pas normale et rien ni personne ne pourrait les inciter à agir d’une façon différente. Parce que c’est comme ça. Je suis… Différente. Et on a peur des différences. » Je secoue la tête, le visage triste. Je sais que je ne peux pas défendre ma position. Qu’aider les autres fait partie de moi, et que ça me pousse à vouloir changer le monde. Et je sais qu’aux yeux d’Eugenia, je me bats dans le vide. Alors je ne réponds rien. Ce qui ne veut pas dire que j’abandonne. Loin de là. Je garde mes arguments pour plus tard. Je me contente de changer de sujet. Et je me mets à crier. Parce que ça fait du bien de crier. C’est comme de lancer une fusée de détresse pour se faire repérer par un bateau au large. Sur le moment, on ne pense plus qu’à ça. Qu’à montrer qu’on existe. Qu’on est là. Et qu’on est fort. Le reste n’a plus d’importance. La maladie n’existe plus, les fauteuils roulants ne sont plus que superflus. Je ne connais pas Eugenia par coeur. Pas encore. Mais j’arrive à lire en elle. Et je sais qu’elle ne criera pas. Je sais qu’elle préfère disparaître, passer inaperçue. Comme tout à l’heure, avant que je ne lui fasse traverser la route. Je crois que ce ne sont pas les autres qui la jugent le plus sévèrement. C’est elle-même. Elle-même qui se voit différente, elle-même qui se considère comme un fardeau. Je voudrais qu’elle se regarde différemment. Qu’elle puisse se voir à travers mes yeux. Alors je cherche un moyen de lui changer les idées. Un moyen de l’emmener ailleurs qu’ici, et de tout oublier. Le violon attire mon attention. Et je me dis qu’elle est là, l’opportunité de tout oublier. Je voudrais qu’elle danse. Qu’elle s’accroche à mon cou, et que je la porte au rythme de la musique. Puis qu’elle oublie. Qu’elle oublie le regard des autres autour, qu’elle oublie ses jambes, qu’elle oublie même ses bras. Et qu’elle ait la sensation de voler. « Hors de question. » Sa réponse ne se fait pas attendre. Elle ne veut pas danser. C’était prévisible. « Désolée de devoir le dire, mais je ne danse pas. (…) Tout comme je ne crie pas, je ne kidnappe pas les autres, je n’aide pas mon prochain, je n’attire pas l’attention sur moi… Je me contente de vivre, en réalité. C’est plutôt triste comme existence, mais je m’en sors plutôt bien. » Je fais la moue, en haussant les épaules. Puis Eugenia pose ses mains sur ses roues, comme pour partir. « Par contre je tutoie les autres, donc c’est avec plaisir que je le fasse avec toi, Lior. Tu voudrais pas plutôt me kidnapper dans un café plutôt que me forcer à danser ? » J’acquiesce, par dépit, avant de m’agenouiller devant elle. Je sais qu’elle veut s’éloigner d’ici, d’où les mains sur ses roues. Mais je plonge mon regard dans le sien, l’empêchant d’avancer un instant. « Je ne te forcerai à rien Eugenia. Je ne veux pas te mettre mal à l’aise. » Je lui souris, avant de reprendre. « Mais ce n’est pas parce que tes jambes ne fonctionnent pas que tu ne peux pas danser. Je sais que pour beaucoup, la danse ne consiste qu’à se tenir sur ses jambes et à tournoyer. Mais pour moi c’est plus que ça. » Je détourne le regard, pour le poser sur le violoniste. « Tu sais, je travaille dans un foyer avec des jeunes en difficulté. Je suis… éducateur spécialisé. Je les aide à aller mieux. » Je repose mon regard sur Eugenia. « Et il y a cette petite fille, toujours à part. Elle est en surpoids, et affreusement mal dans sa peau. Alors à chaque fois qu’elle va mal, on met de la musique à fond, jusqu’à ce que les murs se mettent à trembler, et on danse. » Je me lève, et me mets à danser, comme pour illustrer mes paroles. « Comme ça. » Je ferme les yeux, et je danse. Un peu n’importe comment, mais je m’en fous. Puis au bout de plusieurs secondes, je m’arrête et m’agenouille à nouveau devant Eugenia. « Elle me dit toujours que danser, ça la libère. Qu’elle oublie tout. Son physique, et le regard des gens. Alors je voulais voir si ça te ferait du bien à toi aussi. » J’hausse les épaules en souriant. « Mais je comprends que tu préfères aller boire un café. Même si je préfère les chocolats, j’avoue. » Je me relève alors, et attrape son fauteuil. « Oh, et tu n’es pas différente. Tu l’as dit toi-même. Tu ne cries pas, tu ne kidnappes pas les gens, tu n’aides pas les autres, tu préfères rester discrète. Tu n’es pas différente. » Je lui lance un clin d’oeil, avant de nous pousser à travers la foule, à la recherche d’un café.
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() message posté Mer 10 Déc 2014 - 19:56 par Invité
she was a genius of sadness, immersing herself in it, separating its numerous strands, appreciating its subtle nuances. she was a prism through which sadness could be divided into its infinite spectrum. ;; it is often in the darkest skies that we see the brightest stars. ✻✻✻ Je n’étais pas à l’aise avec ce que j’étais. Avec ce que le destin m’avait contrainte de devenir. Je n’assumais pas ma condition ni même mon besoin d’aide constant. Je désirais être oubliée mais mon quotidien s’appliquait à me rappeler, chaque jours et chaque heure, que je ne pourrais jamais m’en sortir seule. Traverser une rue. Attraper un article sur la plus haute étagère dans un magasin. Voyager. M’adapter et adapter mon entourage. Je subissais. Je subissais les aléas de ma colonne brisée. Je subissais les conséquences de mon accident, les conséquences de cet instant d’inattention qui m’avait couté ma vie toute entière. Je ne savais pas comment j’étais censée m’y faire, un jour. Je ne savais pas comment je parviendrais à être suffisamment courageuse. J’avais la sensation constante de ne pas être à la hauteur et de ne pas valoir les peines des autres. Je me détestais de retenir ma sœur jumelle en arrière. Je me détestais d’être une source d’angoisse constante pour ma mère. Je me détestais d’avoir besoin de soins aux coûts exorbitants, d’être le sujet d’expériences scientifiques qui donnaient de l’espoir aux autres et qui continuaient de me décevoir. Je m’en voulais pour mille-et-une chose, ne trouvant du réconfort que dans mes souvenirs ; je m’appliquais à disparaître, à me reculer, à cesser d’être aussi imposante dans l’existence des autres. Je me perdais dans l’oubli et dans l’envie de soulager les autres de ma présence.
Je me perdais dans ma peur de la pitié. Cette pitié qui me brûlait les rétines. Je me perdais dans mon malaise constant d’être observée. Ce malaise qui rongeait chaque cellule de mon corps. Je rêvais de danser mais je refusais d’être vue. Je rêvais de crier mais je refusais d’être entendue. Je rêvais de vivre mais je refusais d’être heureuse. Je me refusais tout. Je me refusais le reste.
Et je voyais cette déception dans le regard de Lior qui ne fit qu’accroitre ma peine. Je m’en voulus d’être ainsi. Je m’en voulus d’y attacher de l’importance. Après tout, je n’étais bonne qu’à cela ; me refuser des choses et m’en vouloir. Disparaître et souffrir, souffrir parce que cela était la seule sensation que mon corps et mon cœur acceptait encore de ressentir. « Je ne te forcerai à rien Eugenia. Je ne veux pas te mettre mal à l’aise. Mais ce n’est pas parce que tes jambes ne fonctionnent pas que tu ne peux pas danser. Je sais que pour beaucoup, la danse ne consiste qu’à se tenir sur ses jambes et à tournoyer. Mais pour moi c’est plus que ça. » m’expliqua-t-il. Son ton était doux et conciliant, comme s’il s’adressait à une enfant, tandis qu’il s’agenouillait devant moi pour emprisonner mon regard avec ses yeux. Après tout, n’était-ce pas ce que j’étais ? Une enfant ? J’étais perdue, perdue dans mon existence. Je me retrouvais confronter avec une réalité que je ne parvenais pas à admettre. Et je voyais au fond de ses yeux la bonté qui l’animait. Je voyais au fond de ses yeux qu’il valait sans doute mille fois mieux que moi et que je ne méritais pas son intérêt. Il vivait pour sauver les autres. Que faisait-il lorsque les âmes ne désiraient pas être secourues ? « Tu sais, je travaille dans un foyer avec des jeunes en difficulté. Je suis… éducateur spécialisé. Je les aide à aller mieux. Et il y a cette petite fille, toujours à part. Elle est en surpoids, et affreusement mal dans sa peau. Alors à chaque fois qu’elle va mal, on met de la musique à fond, jusqu’à ce que les murs se mettent à trembler, et on danse. Comme ça. » Il se releva pour danser. Danser comme si le monde autour de lui n’existait pas. Je l’observai avec de grands yeux, perdue quelque part entre l’incompréhension et l’admiration, perdue quelque part entre l’amusement et l’envie. L’envie d’être comme lui. Parce qu’il avait l’air libre. Libre comme un oiseau, libre de faire ce qu’il désirait. Libre tout simplement parce que le reste ne comptait pas. Il s’arrêta dans ses gestes pour retrouver sa place initiale, un genou à terre devant moi. « Elle me dit toujours que danser, ça la libère. Qu’elle oublie tout. Son physique, et le regard des gens. Alors je voulais voir si ça te ferait du bien à toi aussi. Mais je comprends que tu préfères aller boire un café. Même si je préfère les chocolats, j’avoue. » ajouta-t-il avant de se relever. J’esquissai un sourire en haussant doucement les épaules. « Pour être tout à fait honnête, je préfère le thé. Mais j’évite de le crier sur tous les toits, parce que c’est cliché. » J’avais murmuré mes paroles, tandis qu’un air désolé s’était peint sur mes traits.
Il me voyait sans doute comme une âme de plus à aider. Comme une âme de plus à secourir. Mais étais-je censée lui dire que je ne valais pas la peine qu’il s’attarde sur mon cas ? Je ne désirais pas le décevoir. Je ne désirais pas qu’il s’épuise en tentant l’impossible. J’étais brisée. Brisée à l’image de ma colonne vertébrale. Brisée par mes souvenirs et mes envies. Brisée par mes sentiments et mes espoirs. Il attrapa mon fauteuil. « Oh, et tu n’es pas différente. Tu l’as dit toi-même. Tu ne cries pas, tu ne kidnappes pas les gens, tu n’aides pas les autres, tu préfères rester discrète. Tu n’es pas différente. » ajouta-t-il avec un clin d’œil. Mon regard se perdit sur lui avant qu’il ne me pousse à travers la foule une nouvelle fois. Je n’étais pas d’accord avec lui. Je n’étais pas d’accord avec le monde. Je n’étais pas d’accord avec ces principes humanistes qui cherchaient sans cesse à soulager le poids sur mes épaules. Je n’étais pas d’accord. Je n’étais pas d’accord avec moi-même, presque, perdue par cet esprit de contradiction qui m’habitait. Je m’éclaircis la gorge, mon regard se perdant sur les passants qui nous doublaient. « Avec la manière dont tu le dis, on dirait presque que cela est une mauvaise chose. » notai-je, un léger sourire décorant mes lèvres. Cela n’était pas un reproche, mais une constatation, une constatation sur la manière dont ses paroles résonnaient au creux de mes oreilles. « Mais je suis d’accord, quelque part. La normalité est affreusement ennuyante. » Je repensais à ses paroles. A la manière dont il avait semblé être dépité par mes propres mots. A la manière dont il semblait être inépuisable. A la manière dont il se vouait corps et âme pour les autres. Je me demandais si, avec un esprit comme le sien, mon existence aurait pu être différente. Différente et bien plus accueillante. « Je suis désolée de ne pas avoir autant de facilité à me ficher du reste du monde. Pour la peine, je vais te dire un secret. » finis-je par ajouter. « Je danse. Quand je suis seule, chez moi, à l’abri des regards et des jugements, je danse. Pas avec mes jambes, bien entendu, parce que je doute qu’elles puissent un jour le supporter. J’improvise des chorégraphies avec mon fauteuil comme si c’était normal. J’oublie tout aussi. Mais je ne peux pas le faire quand je suis avec les autres, Lior. Parce qu’avec eux, je ne parviens pas à oublier. » J’haussai doucement les épaules. J’avais des brins d’espoir, devant moi. Je savais que je pourrais sans doute me lever un jour, me tenir debout, à l’aide d’attèles et de volonté. Mais je ne serais jamais comme les autres. Si la science continuait d’avancer à son rythme, cela ne pourrait jamais me permettre de retrouver toutes mes capacités. J’aurais toujours une allure différente, une allure rafistolée avec des objets métalliques. Fauteuil. Attèle. Déambulateur.
Danser libérait. Mais je ne serais jamais libre comme un oiseau. On m’avait coupé les ailes.
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() message posté Lun 22 Déc 2014 - 15:17 par Invité
it’s a big bad world outside
“maybe believe or maybe don’t care. shit, maybe there is no god in the big white clouds up there. maybe live long, or maybe die young. or maybe live every day like it’s your last day under the sun. we go out on our own it’s a big bad world outside. carrying our dreams and all that they mean. trying to make it all worthwhile.”



« Pour être tout à fait honnête, je préfère le thé. Mais j’évite de le crier sur tous les toits, parce que c’est cliché. » Un sourire se dessine sur mon visage, tandis que nous nous frayons à nouveau un chemin à travers la foule. Je ne sais pas pourquoi, mais j’aurais parié qu’elle préférait le thé. Peut-être parce que comme elle le dit si bien, c’est cliché. Et qu’à me yeux, elle n’est pas différente des autres. Enfin si, bien sûr qu’elle l’est. Mais pas dans le sens dont elle le pense. Pas parce qu’elle est en fauteuil, ou parce qu’elle a besoin qu’on l’aide à traverser la route. Mais parce qu’il s’agit d’une belle personne. Et même si elle est mal à l’aise quand les regards se posent sur elle, même si la discrétion semble être sa manière de vivre, il suffit de la regarder sourire. Il suffit de la regarder sourire pour comprendre. Pour voir qu’à travers cette carapace, qu’à travers ce mal être, se cache une belle personne. Une belle personne qui ne demande qu’à sourire, qu’à rire, qu’à vivre. Seulement, elle a pris la mauvaise route, le mauvais chemin. Alors qu’importe le temps que ça prendra, j’ai décidé de l’emmener dans la bonne direction. « Avec la manière dont tu le dis, on dirait presque que cela est une mauvaise chose. » J’arrive à apercevoir un léger sourire se dessiner sur ses lèvres. « Mais je suis d’accord, quelque part. La normalité est affreusement ennuyante. » Je lâche un léger rire, tout en slalomant entre les passants qui une fois encore, semblent faire comme si nous n’existions pas. Puis mes yeux se plissent, et je lui réponds d’un air amusé. « C’est une très mauvaise chose, en effet. » Bien sûr, je plaisante. « Et la normalité est affreusement ennuyante, c’est vrai. Tu es affreusement ennuyante. C’est pour ça que je m’entête à te kidnapper, tu vois. Parce que tu es tellement ennuyante que je me réjouis de passer du temps avec toi. » J’arbore alors un sourire victorieux, comme pour souligner ma plaisanterie. Je sais que c’est assez dingue. Qu’Eugenia et moi ne nous connaissons que très peu. C’est vrai, nous avons discuté ensemble que quelques fois lorsque nous étions à l’hôpital, il y a maintenant plus d’un an. Sinon rien. Strictement rien. Jusqu’à aujourd’hui. Mais pourtant, j’ai l’impression de la connaître déjà par coeur. Peut-être que c’est insensé, mais c’est pourtant ce que je ressens. « Je suis désolée de ne pas avoir autant de facilité à me ficher du reste du monde. Pour la peine, je vais te dire un secret. (…) Je danse. Quand je suis seule, chez moi, à l’abri des regards et des jugements, je danse. Pas avec mes jambes, bien entendu, parce que je doute qu’elles puissent un jour le supporter. J’improvise des chorégraphies avec mon fauteuil comme si c’était normal. J’oublie tout aussi. Mais je ne peux pas le faire quand je suis avec les autres, Lior. Parce qu’avec eux, je ne parviens pas à oublier. » Mes yeux s’illuminent alors, un peu à la manière de ceux d’un enfant le jour de Noël. Eugenia danse. Seule, certes. Mais qu’importe, elle danse. C’est sûrement insignifiant pour certains, mais pour moi ça veut dire beaucoup. Ça veut dire qu’elle se lâche, qu’elle décompresse, qu’elle s’envole. Et étrangement, ça me comble de joie. Seulement maintenant qu’elle vient de me l’avouer, je n’ai plus qu’une envie : la voir danser, et danser avec elle. Alors je m’arrête net au milieu de la foule, et me place devant elle, mes yeux suppliants capturant les siens. « Je sais qu’on a prévu de rejoindre un café, mais maintenant que je sais ça… » J’affiche une petite moue. « J’ai affreusement envie d’aller chez toi pour te regarder danser. » À nouveau, je m’agenouille devant elle. Mais cette fois-ci, pas seulement pour être à sa hauteur. Pour la supplier. « Et je sais aussi que ce n’est pas très malin. Te kidnapper pour t’emmener chez toi… » J’hausse les épaules en souriant, avant d’attraper ses mains dans les miennes. « S’il te plait Eugenia. » Je ne la lâche pas du regard, toujours en gardant ses mains dans les miennes. « Et la prochaine fois qu’on se voit, c’est à toi de me kidnapper. Où tu veux, pour faire ce que tu veux. Je promets même de ne pas être aussi ennuyant que toi. » Je lui lance un clin d’oeil taquin, tout en attendant sa réponse. J’espère sincèrement qu’elle acceptera. Qu’elle me laissera entrer dans son monde, et qu’elle me fera confiance. J’ai compris qu’elle essayait de mettre une distance entre elle et les autres, qu’elle n’arrivait pas à se lâcher face à eux. Mais je voudrais qu’elle puisse le faire avec moi, sans aucune crainte. Je voudrais être celui qui la libèrera des chaînes dont elle s’est rendue prisonnière.
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() message posté Sam 27 Déc 2014 - 22:09 par Invité
she was a genius of sadness, immersing herself in it, separating its numerous strands, appreciating its subtle nuances. she was a prism through which sadness could be divided into its infinite spectrum. ;; it is often in the darkest skies that we see the brightest stars. ✻✻✻ La sensation d’être une déception. Une déception aux yeux de cette personne que je ne connaissais que trop peu. Elle se déversait dans mes veines. Elle recouvrait ma peau et envahissait l’air. Je détestais ressentir cela, de manière si intense et si ferme, à un tel point que mes poumons se comprimaient tous seuls dans ma cage thoracique fébrile. Je détestais ressentir cette gêne envahissante, cette gêne d’être celle que j’étais. J’aurais aimé lui dire que je n’étais pas qu’une chanson triste. J’aurais aimé lui dire que ma vie n’était pas qu’une succession de mesures tourmentées par des notes de musique mélancoliques. J’aurais voulu pouvoir lui affirmer que, parmi toutes ces croches et double-croches sombres et maladroites, il y avait aussi des noirs et des triolets plus colorées, des blanches et des points d’orgue chargés d’une joie de vivre traduisant le monde candide dans lequel je pouvais bien vivre lorsque j’étais loin des autres. Lorsque j’étais seule, enfermée dans cet univers que je m’étais créé, cet univers qui m’accueillait quand le reste me tourmentait. J’étais persuadée que cela aurait suffi à Lior, de le comprendre et de savoir cela. J’étais sûre que cela m’aurait suffi à moi, d’avoir l’occasion de lui prouver et de lui montrer que je n’étais pas fade, fade et terne. Mais je demeurai enfermée dans les limites que j’avais imposées à mon propre esprit, à mes propres rêves et mes propres espoirs. Je m’étais emprisonnée toute seule dans une cage d’interdictions et de retenue, dans une cage qui m’empêchait de vivre.
En société, je ne faisais que survivre. Parfois, je me plaisais à croire que, lorsque j’étais seule, mon existence toute entière valait la peine d’être vécue, d’une certaine manière.
Un enchainement d’imperfections. J’avais toujours eu conscience de ce que j’étais, au plus profond de mon être. Je n’avais que très rarement ressentie le besoin de m’excuser pour ce que j’étais, de m’excuser d’être telle que j’étais. Cependant, en cet instant précis, j’avais l’impression que le voile qui masquait mon véritable visage ne suffisait plus. Qu’il ne convenait pas à cet homme débarqué de nulle part. Je ressentais le besoin de prouver mille et une merveilles à Lior sans qu’il ne m’ait réellement rien demandé. Quelque part, la simple pensée de ne pas être à sa hauteur m’était intolérable. Je voulais qu’il comprenne. Je voulais qu’il comprenne que je voulais être rayonnante sans parvenir à pouvoir réellement l’être
Je ne le connaissais pas, pourtant. Je l’avais croisé qu’une poignée de fois au cours de mon existence toute entière. Il avait été une ombre, un fantôme dans la vie que j’avais mené, dans les étapes que j’avais traversé. Pourtant, j’avais l’impression de le connaître. Pourtant, j’avais l’impression qu’il occupait déjà une place à part dans mon cœur et dans mon être. J’esquissai malgré moi un sourire, amusée par notre discussion, amusée par la facilité avec laquelle nous pouvions converser. Je n’avais jamais réellement peur de l’offenser ; j’étais simplement animée, constamment, par la crainte de ne pas être à la hauteur de sa liberté. « C’est une très mauvaise chose, en effet. Et la normalité est affreusement ennuyante, c’est vrai. Tu es affreusement ennuyante. C’est pour ça que je m’entête à te kidnapper, tu vois. Parce que tu es tellement ennuyante que je me réjouis de passer du temps avec toi. » me lança-t-il et je dus me faire violence pour ne pas rire à ses paroles. Il avait cette aura de bonne humeur qui semblait capturer chaque pensée négative de mon esprit. Il avait cette aura pour transformer mes bémols en dièse, mes gammes mineures en gammes majeures. L’orchestre de mon existence entrait dans un nouvel acte, dans une nouvelle introduction rythmée par sa joie de vivre communicative.
Pourtant, je savais qu’il avait une vie qui n’était guère facile. Je savais qu’il était ainsi malgré toutes les épreuves qu’il vivait. Je l’enviai pour sa force de caractère, pour sa façon d’être si confiant et si généreux à la fois. Je ne pus m’empêcher de tenter de tenter de me rattraper en lui confiant une partie de ce monde que je m’étais créée dans mes instants de solitude. En lui confiant que je dansais, à ma manière, que je dansais pour me libérer moi aussi. Il m’arrêta au beau milieu de la foule sans se soucier des personnes que l’on dérangeait dans leur trajectoire. Il s’agenouilla en face de moi, presque suppliant. « Je sais qu’on a prévu de rejoindre un café, mais maintenant que je sais ça… J’ai affreusement envie d’aller chez toi pour te regarder danser. Et je sais aussi que ce n’est pas très malin. Te kidnapper pour t’emmener chez toi… » Ses mains attrapèrent les miennes et je me sentis rougir. Rougir parce qu’une centaine de questions et d’exclamations vinrent embrouiller mon esprit vivace. Je secouai la tête en signe de désapprobation. « S’il te plait Eugenia. Et la prochaine fois qu’on se voit, c’est à toi de me kidnapper. Où tu veux, pour faire ce que tu veux. Je promets même de ne pas être aussi ennuyant que toi. » Il me fit un clin d’œil et je me sentis rougir de plus belle.
Comme une enfant, je plongeai mon regard sur mes genoux, avant d’y trouver nos mains jointes. Mon rythme cardiaque s’affola tout seul dans ma poitrine et je me focalisai sur ma respiration pour retrouver une certaine contenance ; mon esprit, lui, était bien trop occupé à peser le pour et le contre pour s’attarder sur les états d’âme de mon cœur. Je finis par relever la tête, cherchant son regard. « Tu me promets de ne pas avoir pitié ou de te moquer de moi ? » lui demandai-je doucement. Au fond, j’avais tant de peurs que toutes les lister dans mon esprit me perdrait. « Enfin, je pense que je n’ai pas le choix de toutes manières. Direction Hammersmith, du coup. Droit devant ! » Je donnai une légère pression sur ses doigts avant de les relâcher. Je sentais le feu de mes joues les abandonner, bien que l’appréhension envahissait une nouvelle fois mon être, ma peau, mes veines, mon cœur. Mais qu’étais-je censée faire ? Lutter ? Lutter ne servirait à rien. Cela ne changerait rien. Je me raclai doucement la gorge. « En échange, quand je te kidnapperais… Je voudrais que tu m’emmènes au centre où tu travailles. » dis-je en levant les yeux au ciel pour réfléchir. « Vous allez faire un sapin de Noël ? Parce que, sans me vanter, je suis très douée pour les décorer. Même si je ne peux atteindre que la partie inférieure. » J’eus un sourire en coin en l’observant, tentant de canaliser ma propre hilarité.
J’étais une balade triste. Une chanson mélancolie. Un orchestre écrit en gramme mineure, pleine de bémols. Cependant, je conservais des mesures pleines d’espoir. Des mesures plus douces, agréables. Plus heureuses. Et j'aimais croire que cela lui suffirait autant que sa présence à lui pouvait me suffire.
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() message posté Ven 23 Jan 2015 - 23:58 par Invité
it’s a big bad world outside
“maybe believe or maybe don’t care. shit, maybe there is no god in the big white clouds up there. maybe live long, or maybe die young. or maybe live every day like it’s your last day under the sun. we go out on our own it’s a big bad world outside. carrying our dreams and all that they mean. trying to make it all worthwhile.”



La vie est une succession d’événements. Une succession de rencontres et de séparations. De déceptions et de joies. De surprises et de révélations. De mauvaises choses et de bonnes choses, même si tout n’est qu’une question d’interprétation. Ma vie n’a pas toujours été simple. Il y a eu mon adoption, d’abord. Il m’a fallu du temps. Du temps pour réaliser que les liens du sang ne sont pas toujours aussi forts que ceux du coeur. Et alors, j’ai tiré un trait sur mes parents biologiques. Je me suis promis de ne jamais les chercher. Et je tiendrai cette promesse. Je ne suis pas rancunier, ils avaient sans doute de bonnes raisons lorsqu’ils ont décidé de me laisser à d’autres. Tout comme j’ai de bonnes raisons de ne jamais les chercher. Ils ne font pas partie de ma vie. Mes parents, ceux qui m’ont élevé, eux oui. Et je n’en veux pas d’autres. J’aurais pu interpréter les choses différemment. J’aurais pu me lamenter sur mon sort. Mais cela aurait été trop facile, et je serais devenu un brouilleur de noir. Il y a eu la tentative de suicide de mon meilleur ami, ensuite. Lorsqu’il a perdu ses parents. J’aurais pu le regarder s’anéantir, et m’anéantir avec lui. Mais j’ai décidé de l’aider. De lui tendre la main, et de le faire avancer. Il va mieux aujourd’hui, même si nous avons perdu contact il y a bien longtemps. Il vit à New York aux dernières nouvelles. Et grâce à lui, j’ai trouvé ma vocation. Celle de venir en aide aux jeunes en difficulté. Ces jeunes, je les croise tous les jours. Ils ont des histoires qu’on n’oserait à peine imaginer. Ils sont couverts de cicatrices, ont perdu leur famille, sont mal formés de naissance. Parfois, ils baissent les bras. Ils perdent espoir. Essaient de s’enfuir. Certains essaient même de mourir. J’en ai sauvé plus d’un. Mais j’ai assisté à plusieurs enterrements. À chaque fois que ça se produit, j’ai la sensation d’échouer et de mourir un peu aussi. Mais au final, ça me renforce. Ça me donne davantage de hargne et de courage pour leur venir en aide. Pour les protéger, et leur apprendre à vivre comme il faut. Leurs vies sont des successions d’événements. De rencontres et de séparations. De déceptions et de joies. De surprises et de révélations. « Mais tout n’est qu’une question d’interprétation. » C’est ce que j’essaie de leur apprendre. Ils ne doivent pas s’arrêter aux obstacles. Ils doivent se concentrer sur la manière dont les franchir. Ils ne doivent pas être aveuglés par leurs blessures. Ils doivent leur laisser le temps de cicatriser. Ils doivent vivre et s’épanouir, rire aux éclats et danser à en perdre l’équilibre. Ils doivent se sentir libre. Libre d’être qui ils sont, et qui ils ont envie d’être. Qu’importe le reste. C’est ce que je fais. C’est comme ça que je vis. Qui serais-je pour leur apprendre de telles choses et ne pas en tenir compte ? J’oublie les obstacles qui me barrent la route. J’oublie même les risques. Je vis, voilà tout. Je vis avec ma maladie.

« Tu me promets de ne pas avoir pitié ou de te moquer de moi ? » Le rouge lui est monté aux joues. Elle a laissé son regard se perdre sur ses genoux plusieurs instants, mais maintenant ses pupilles ont retrouvé les miennes. « C’est promis. » Je lui offre un sourire rassurant, sans la quitter des yeux. « Enfin, je pense que je n’ai pas le choix de toutes manières. Direction Hammersmith, du coup. Droit devant ! » Ses doigts donnent une légère pression aux miens, puis nos mains se relâchent. Elle se racle alors la gorge, avant de poursuivre. « En échange, quand je te kidnapperais… Je voudrais que tu m’emmènes au centre où tu travailles. » Un sourire s’étire sur mon visage. Je suis content qu’elle veuille venir au centre. Il me tarde déjà de la présenter aux jeunes. Sans doute parce que je sais qu’ils vont l’adorer. « Vous allez faire un sapin de Noël ? Parce que, sans me vanter, je suis très douée pour les décorer. Même si je ne peux atteindre que la partie inférieure. » Je finis par me relever, en lui lançant un clin d’oeil. « Marché conclu ! Cette année, tu seras notre décoratrice de Noël en chef. » Elle n’a pas idée d’à quel point sa proposition me fait plaisir. Elle sera la première visiteuse extérieure du centre. D’habitude, ce sont des médecins ou des psychologues qui nous rendent visite. En général, les gens évitent ce genre d’endroits. Alors, qu’elle veuille venir et s’occuper du sapin de Noël, c’est une surprise à laquelle je ne m’attendais pas. Je pose une main sur son épaule, quelques secondes, comme pour la remercier. Puis je reprends ma place derrière son fauteuil, et nous nous remettons en route. Tout en nous frayant un chemin à travers la foule, je repense à la réaction d’Eugenia quand je lui ai demandé d’aller chez elle pour la regarder danser. Je repense à la manière dont elle a rougi, et à son regard fuyant. Alors à nouveau, je nous arrête en pleine marche. « Tu sais, je ne veux pas te forcer à quoi que ce soit. » Je m’agenouille devant elle, comme à mon habitude. « Je parle de ta réaction de tout à l’heure. Je ne veux pas te mettre mal à l’aise. J’ai tendance à oublier que danser n’est pas une partie de plaisir pour tout le monde. » Cela n’a rien à avoir avec le fait qu’elle soit en fauteuil, et j’espère qu’elle sait que ce n’est pas pour cette raison que je lui dis ça. Je lui offre finalement un sourire. « Je peux simplement te déposer chez toi, si tu préfères. » Mes yeux se plissent alors, et une moue s’affiche sur mon visage. « Rappelle moi de ne jamais tenter une carrière dans le kidnapping. Je serais pitoyable. » Je capture son regard, à nouveau. Elle est libre de choisir. Et j’espère intimement qu’elle choisira de danser. Parce qu’elle est là, sa liberté.
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Anonymous
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() message posté Sam 24 Jan 2015 - 23:15 par Invité
she was a genius of sadness, immersing herself in it, separating its numerous strands, appreciating its subtle nuances. she was a prism through which sadness could be divided into its infinite spectrum. ;; it is often in the darkest skies that we see the brightest stars. ✻✻✻ J’étais handicapée. C’était un fait. Une condition. J’étais handicapée et rien ne pourrait réellement changer cela ; malgré toutes les opérations, malgré tous les espoirs, malgré toutes les métaphores destinées à atténuer ma propre réalité, c’était ainsi et demeurerait comme cela. J’étais handicapée et je resterai infirme jusqu’à la fin de mes jours. Jusqu’à la fin de ma vie imparfaite. J’étais handicapée et je resterai prisonnière de mon propre corps parce qu’il était devenu mon endroit de confinement personnel. Parfois, j’avais l’impression que mon esprit se rendait malade d’être ainsi enchainé. D’être ainsi arrêté dans ses élans d’allégresse. J’avais toujours été vive. J’avais toujours bougé dans tous les sens, au rythme du vent et de mes envies. Je n’avais eu aucune limite et aucune crainte. J’avais simplement vécu. Vécu en courant des kilomètres. Vécu en me précipitant sur les plages de Cardiff, ma ville natale. Vécu en hurlant de joie et en sautant dans tous les sens. Vécu, encore et encore, vécu jusqu’à l’épuisement de mon corps incapable de suivre le rythme de mon âme intenable. Je conservais au fond de mon être ces envies de grands espaces et de liberté enfantine. Mais cela ne m’était plus possible. Mais cela m’était interdit. J’étais piégée là, sur cette chaise. Piégée parce que, désormais, cela était l’adjectif qui me convenait le mieux. Je ne pouvais plus marcher. Je ne pouvais plus courir. Je ne pouvais plus grimper où bon il me semblait ; je ne pouvais plus aller et venir au gré du vent, au gré de mes envies les plus folles. Je ne pouvais plus. Triste phrase qui traduisait la réalité de ma vie qui s’était arrêté au milieu d’une phrase. Elle dépeignait la nostalgie qui m’envahissait à chaque fois que j’y songeais. Elle criait l’injustice qui me parcourait les entrailles quand j’y pensais trop longtemps. Mais, par-dessus tout, j’avais l’impression que cela était le jugement des autres qui m’handicapait le plus, bien au-delà de mes jambes immobiles et de mes passions entravées.
Cela était le jugement des autres qui m’empêchait de vivre.
Je vivais dans la peur constante de croiser les regards que l’on pourrait bien me jeter. Je comprenais la gêne et la répulsion. Je comprenais que l’on ait du mal à accepter les personnes différentes. Cependant, cela ne m’aidait pas à m’y faire. Comprendre ne me donnait pas un mode d’emploi pour accepter. L’acceptation n’allait pas de pair avec la compréhension. Je ne parvenais pas à garder la tête haute lorsque j’entrapercevais la pitié des autres ; je ne parvenais pas à être forte ou à être courageuse. Je n’avais pas suffisamment d’amour propre pour me placer au-dessus de tout cela. Au-dessus de toutes ces choses qui avaient des allures d’épreuves. J’aurais aimé être invisible. J’aurais aimé être oubliée. Je faisais tout pour cela, d’ailleurs ; je me taisais bien souvent, me plaisant dans mes longs silences. Je ne sollicitais presque jamais de l’aide et je me débrouillais comme je pouvais. En soi, j’aurais pu continuer d’être intenable. J’aurais pu continuer d’être intrépide et de satisfaire mes envies les plus folles. Mais je n’y parvenais plus. Je n’y parvenais plus parce que les autres avaient pris une nouvelle position dans mon existence. Ils m’arrêtaient. Ils m’arrêtaient dans ce que j’étais. « C’est promis. » La promesse de Lior résonna dans mon esprit et j’esquissai un sourire en continuant de parler. Je savais que je pouvais lui faire confiance. Je savais qu’il était différent, différent des autres, différents de tous. Je ne le connaissais pas et pourtant. Et pourtant. Ces mots résonnaient comme les plus belles évidences de ce monde. « Marché conclu ! Cette année, tu seras notre décoratrice de Noël en chef. » déclara-t-il avant de se relever et repartir. Mon cœur battait étrangement dans ma poitrine. Cela était comme s’il se souvenait qu’il pouvait être autre chose que mélancolique ou malheureux. Comme s’il se souvenait que, lui aussi, avait le droit d’être heureux de temps à autre.
Bien entendu que j’avais peur. Bien entendu que je ne savais pas dans quoi j’allais m’aventurer. Bien entendu que les regards de ces gamins auxquels il tenait temps comptaient énormément et m’effrayaient comme tout le reste ; cependant, en sa compagnie, j’avais l’impression d’être autre chose. J’avais la sensation de ne plus être une poupée de porcelaine brisée que personne ne désirerait avoir. Il me réparait. Doucement, à sa manière, à coup d’excès d’allégresse et tout en nuance, il me réparait. Morceau par morceau.
Je fus surprise lorsqu’il s’arrêta une nouvelle fois. Je fronçai les sourcils en levant la tête dans sa direction. « Tu sais, je ne veux pas te forcer à quoi que ce soit. » commença-t-il avant de s’agenouiller à ma hauteur. Quelque part, j’étais partagée quant à cette habitude qu’il prenait. Je ne cessais de me répéter que cela n’était qu’un moyen de plus pour que l’on me remarque. Pour que l’on me voie. D’un autre, j’appréciais. J’appréciais qu’il refuse de me prendre de haut comme le reste du monde pouvait le faire. « Je parle de ta réaction de tout à l’heure. Je ne veux pas te mettre mal à l’aise. J’ai tendance à oublier que danser n’est pas une partie de plaisir pour tout le monde. Je peux simplement te déposer chez toi, si tu préfères. » poursuivit-il. Je l’observai en me mordillant l’intérieur de la joue. Je ne savais pas quoi lui dire. Pas quoi lui répondre. « Rappelle-moi de ne jamais tenter une carrière dans le kidnapping. Je serais pitoyable. » Je me mis à rire. Ses yeux rencontrèrent mon regard et je fus incapable de détourner les yeux. Il y avait une lueur dans son regard. Une lueur qui hurlait à la vie. Une lueur presque hargneuse qui s’accrochait à tout ce qu’il pouvait bien avoir. Je ne parvenais pas à cesser de l’admirer. Je demeurai persuadée qu’il était capable d’affronter le monde entier sans départir de son courage. « Compte sur moi pour te le rappeler jusqu’à la fin de tes jours. » lui répondis-je sur le ton de la confidence. Il n’était pas fait pour cela, mais au fond, j’étais contente qu’il ait tenté de mettre en œuvre le pire kidnapping de l’humanité. Il me changeait les idées. Il était comme un rayon de soleil dans l’obscurité de mon existence triste et nostalgique. « Non, non. Tu ne me mets pas mal à l’aise. Je suis tout le temps mal à l’aise, à vrai dire. » poursuivis-je en haussant les épaules. « Je veux le faire. Vraiment. Même si après je serais contrainte de te tuer parce que tu risques de raconter à tout le monde que tu as vu une fille en fauteuil danser… » J’esquissai un sourire. Mon cœur se serrait encore dans ma poitrine, par peur, par anxiété. Mais je me demandais. Je me demandais si cela n’était pas plus facile avec le temps. Si toutes ces sensations finiraient par m’abandonner lorsque je comprendrais que Lior était réellement différent.
Parce qu’il l’était. Il ne m’observait pas comme une poupée brisée, non. Il m’observait comme si je pouvais être réparée.
Et je voulais y croire. Je voulais croire que je pouvais être réparée.
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