(✰) message posté Mar 2 Déc 2014 - 1:39 par Invité
Il était un peu plus de sept heures du soir et, comme nous nous trouvions à la période de l’année où la nuit tombait rapidement – beaucoup trop rapidement même –, il faisait sombre depuis quelques heures déjà sur la capitale anglaise. Les lumières de la ville illuminaient les rues encore bondées par les Londoniens qui rentraient du travail et les toujours aussi nombreux touristes qui avaient décidé de traîner un peu plus longtemps dans ces rues qui commençaient peu à peu à revêtir les décorations habituelles des fêtes de fin d’année – bien que nous n’étions pas encore en décembre – ou qui étaient tout simplement à la recherche d’un restaurant dans leur moyen pour le dîner de ce soir. En tout cas, je faisais partie de cette première catégorie de gens qui sortaient à peine de leur boulot et rentraient tranquillement chez eux après une longue journée de travail intensif. Ma boîte avait miraculeusement réussi à conclure un contrat avec un client important et les heures supplémentaires étaient tout ce qu’il y avait de plus habituel dans ces circonstances.
Il était donc presque sept heures et demie lorsque je posai enfin le pied chez moi. Après avoir refermé la porte derrière moi, je jetai comme à mon habitude mes clés dans cette sorte de saladier posé sur le meuble de l’entrée que j’avais acheté exprès à cet effet et j’enlevai le manteau qui me couvrait de ce froid qui s’était abattu depuis plusieurs jours sur la capitale pour le suspendre à côté de vestes et autres pardessus sur le porte-manteau vissé au mur près de la porte d’entrée. Je me dirigeai ensuite tel un mort-vivant qui errait la nuit dans les rues à la recherche de quoi nourrir son estomac vide vers mon canapé dans le but de m’y affaler, totalement vidé de mes forces après cette journée plutôt chargée, et la tête penchée en arrière, je fermai les yeux quelques secondes afin de les reposer un peu – après tout, j’avais passé des heures et des heures scotché à l’écran de mon ordinateur et ce n’était pas parce que je portais des lunettes que cela allait empêcher la fatigue d’atteindre mes yeux.
Cependant, j’eus à peine le temps de souffler qu’une odeur très étrange émana de ma cuisine et un sentiment de panique m’envahit quelque peu. Je tentai alors de me rassurer en analysant cette senteur inhabituelle qui n’était déjà pas une odeur de brûlé, ce qui me soulageait déjà d’un poids puisque je n’avais pas très envie de me rendre compte que ma cuisine était en feu. Je décidai donc d’en avoir le cœur net et j’entrai dans ma cuisine légèrement en désordre – c’était bien entendu un euphémisme – avec un Sharona au milieu du chaos.
- Je peux savoir ce que tu es en train de faire ?... lui demandai-je alors, espérant une réponse satisfaisante sur les raisons de ce carnage.
Sharona K. García-Brown
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(✰) message posté Dim 7 Déc 2014 - 0:26 par Sharona K. García-Brown
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ft. Tyler J. Lewis && Sharona K. Garcia-Brown
Jeudi 27.11.2014 • Kensington
Je crois que le courant est plutôt bien passé avec Ivana. Je crois qu'on pourrait bien s'entendre, et que, peut-être, je vais pouvoir vivre quelque part où j'aurais pas le sentiment de squatter honteusement le domicile de quelqu'un d'autre. J'adore Tyler, c'est pas la question, et il a beau faire des blagues pourries sur mon statut de réfugiée ici, je crois qu'au fond, je sais bien que ça le dérange pas que je sois là, mais... moi si. Je suis très heureuse de le retrouver après toutes ces années, mais j'ai pas envie d'être dépendant de lui indéfiniment, et il en a certainement pas envie non plus. Et peut-être qu'un mois, c'est normal pour trouver un nouveau logement, mais pour moi, ça aura définitivement été trop long. Alors là, voir que la situation va se débloquer, ça me met plutôt de bonne humeur. Et cette période de l'année aussi.
Enfin, Thanksgiving, toujours. Mon anniversaire, je l'ai bien passé sous silence, pourtant c'était il y a juste quarante-huit heures. J'ai rien dit simplement, j'ai fait comme si c'était un jour comme les autres, même si ça y est, j'ai vingt-et-un ans. L'âge légal pour boire de l'alcool dans mon pays d'origine, la majorité dans tous les états, à présent. Mais on s'en fout, je suis plus là-bas. Majeure, ici, je le suis depuis un moment, et même dans mon Texas natal, d'ailleurs. Et boire, j'aurais pu le faire ici avant cette semaine aussi, mais j'en ai jamais eu envie. Peut-être qu'un jour, il faudrait que j'essaie. On verra. Je suis pas sûre de vouloir me réveiller le lendemain sans savoir ce que j'ai pu foutre de ma soirée, avec un mal de crâne terrible et une envie constante de vider le peu que mon estomac réussit à contenir. Non, sans façon. Et Happy Birthday to you, c'était pas vraiment le refrain que j'avais envie d'entendre.
Bon à vrai dire, les actions de grâce, pas trop non plus. Mais... je sais pas. Faut croire que les traditions ont la vie dure. Et puis peut-être que c'est une excuse pour marquer le coup. Je vais enfin avoir un chez moi bordel ! Et j'ai un job, aussi banal soit-il, qui me permet de subvenir à mes maigres besoins, que demande le peuple ? C'est justement ce genre de choses pour lequel on se montre reconnaissant à Thanksgiving n'est-ce pas ? Du coup les traditions qui ont déjà la vie dure à la base se sont légèrement imposées à moi, on va dire. Bon, sauf que préparer un dîner pareil, c'est pas aussi facile à faire que ça avait l'air de l'être pour la gouvernante de mes parents... Et ça fait des heures que je galère dans la cuisine de Tyler dans l'espoir de reproduire un peu ce dont je me souviens. Les recettes trouvées sur le net ont l'air bien, à la base, mais je suis vraiment pas née cuisinière... Je me débrouille dans la vie de tous les jours, mais là c'est franchement un autre niveau et... Oui bon, je me suis un peu battue avec la dinde. Avec sa farce aux marrons, surtout. La purée encore, ça va, je crois, je finis par ça et les haricots verts parce que voilà, ça me semblait plus simple, mais je suis même pas sûre de moi pour les tartes que j'ai tenté de faire aussi. Pommes, noix de pécan et citrouille, c'est joli à voir à la base, c'était drôle à tenter et ça avait pas l'air si compliqué, mais j'ai franchement des doutes sur les qualités gustatives de tout ça. Et un seul four, c'était franchement pas assez, j'ai aucune idée de si le temps de cuisson était correct, j'ai dû lâcher l'affaire pour que la dinde ait quand même le temps de cuire, et je crois que je suis en train d'oublier...
« Fuck... »
Les haricots verts ont légèrement roussi, ok. La cuisine est un vrai chantier, je vais passer la journée à tout remettre en ordre demain mais... bon au moins j'aurais essayé. Et c'est pas plus mal que Tyler soit pas rentré trop tôt parce que je suis déjà pas complètement prête quand la clef tourne dans la serrure que sinon, je crois que les trois quarts auraient été encore crus... J'ai entendu le tintement caractéristique de son trousseau dans le petit saladier-vide-poches de l'entrée, et ses pas vers le salon, tandis que je finissais de récupérer ce que je pouvais de légumes, et de regarder d'un air circonspect les canneberges pas vraiment liées en sauce que je sais même pas exactement pourquoi ça a pas fonctionné...
« Je peux savoir ce que tu es en train de faire ?... »
J'ai sursauté, pourtant je sais qu'il est rentré, mais je suis tellement à courir partout et pas satisfaite du tout que... bah là, je suis un peu prise en faute, hein ? Enfin le résultat à l'instant, c'est que le plat de sauce m'échappe des mains et que les canneberges sucrées à peine cuite se retrouvent répandues sur le sol au milieu de morceaux de faïence.
« Dinner ?... Sort of... »
Je me suis retournée vers lui, tentant un sourire un peu forcé et... bon ok, c'est catastrophique là, je vois bien mais...
« Tu sais que je laisserai rien dans cet état, hein ? Ta cuisine sera étincelante demain, promis. Je voulais juste marquer le coup quoi... »
Je suis ridicule, hein ? Roh allez quoi, tu sais ce que c'est Thanksgiving, après tout...
Invité
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(✰) message posté Ven 12 Déc 2014 - 17:23 par Invité
Je détaillai avec une attention quelque peu catastrophée l’état dans lequel Sharona avait laissé ma cuisine après la préparation de ce qui semblait être le repas de ce soir. On se serait presque cru dans la ville ravagée de Bagdad après les bombardements aériens de l’armée américaine et britannique lors de la Bataille de Bagdad en 2003 – bien que je n’avais aucune idée de à quoi ressemblait la capitale de l’Irak après ce genre d’attaque… Je lui demandai donc ce qu’elle était en train de faire pour avoir mis ma cuisine dans cet état de désolation la plus totale – et ce n’était pas peu dire…
- Dinner ?... me répondit-elle alors de manière tout ce qu’il y avait de plus logique (bien que sa voix comportait une pointe d’incertitude) puisque j’avais bien évidemment compris qu’elle n’était pas en train de faire du repassage – je n’étais étonnamment pas aussi stupide que ce que pourrait penser certaines personnes. Sort of... Tu sais que je laisserai rien dans cet état, hein ? tenta-t-elle ensuite de me rassurer en essayant en plus de m’apaiser avec un petit sourire qui n’avait rien de très naturel. Et je me demandais si elle pensait réellement que son petit jeu allait fonctionner parce qu’il était tout simplement évident (et elle était au courant de ce fait depuis très longtemps à présent) que seul les hommes pouvaient m’amadouer de cette façon, et encore ! Ta cuisine sera étincelante demain, promis. Je voulais juste marquer le coup quoi...
- Marquer le coup pour quoi ? demandai-je alors, ne sachant sincèrement pas à quoi elle faisait référence. Et il me suffit d’un simple petit coup d’œil au repas qu’elle était en train de préparer – principalement la dinde qui rôtissait toujours dans le four – pour que cela fasse tilt dans ma tête. Après tout, il n’y avait qu’une seule fête où nous mangions de la dinde aux marrons un jeudi du mois de Novembre (du moins, aux Etats-Unis) : Thanksgiving. Je vois… Tu sais qu’ici, Thanksgiving, ça n’existe pas ?... précisai-je donc quelque peu inutilement puisque Sharona devait très certainement savoir que cette fête américaine (et quand je disais « américaine », je parlais du continent) n’était pas célébrée en Europe. Et ce n’était pas parce que j’étais malheureusement à moitié Américain à cause de mon homophobe de père – et aussi parce que ma mère avait eu l’inintelligence de me mettre au monde aux Etats-Unis et que ce pays pratiquait le droit du sol – que je me mettais à célébrer toutes les fêtes de ce pays. C’était même plutôt le contraire. Mais il était vrai qu’il existait tout de même une grande différence entre Sharona et moi : la jeune femme ayant grandi aux Etats-Unis dans une famille très certainement 100% américaine, tandis que j’avais pour ma part été élevé en Angleterre dans une famille américo-britannique. Je crois que la dinde est en train de crâmer… lui fis-je remarquer alors, en remarquant une fumée épaisse s’échapper du four.
Sharona K. García-Brown
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(✰) message posté Ven 12 Déc 2014 - 18:25 par Sharona K. García-Brown
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ft. Tyler J. Lewis && Sharona K. Garcia-Brown
Jeudi 27.11.2014 • Kensington
Je vois bien qu'il est pas super content et en même temps, je vois bien l'état de la cuisine autour de moi et... ok, c'est Bagdad, ouais. Et je sais bien que ça sert à rien que je tente de l'amadouer, mais... Bah foutu pour foutu en même temps. Ca devait pas ressembler à ça. Il aurait dû arriver avec tout de prêt et juste à mettre les pieds sous la table. Raté. Complètement foiré, même. Mais promis, il y paraîtra plus demain. Juste... je voulais essayer. Bon bah on aura compris que je suis ni une parfaite maîtresse de maison, ni une cuisinière émérite. Surtout pas le deuxième point, d'ailleurs.
« Marquer le coup pour quoi ? »
Grand moment de solitude pour moi. Je sais bien, pourtant qu'on est en Angleterre et qu'ici, forcément, Thanksgiving n'existe pas. Mais je crois que j'ai du mal à intégrer le fait qu'il n'est pas vraiment américain, et que ça, ça fait pas du tout partie de ses habitudes. Pour moi, en revanche, c'est tout le contraire. Mais j'aurais sans doute dû faire une croix dessus, comme sur tout le reste, je suppose... Et je sais pas quoi répondre, du coup, parce que je me sens instantanément très con. Un grimace, et je m'apprête quand même à ouvrir la bouche, sans toujours trop savoir ce que je vais pouvoir dire, quand il reprend la parole.
« Je vois… Tu sais qu’ici, Thanksgiving, ça n’existe pas ?... - Ouais je sais... Mais... »
Mais pas grand chose, en fait. D'autant moins que mes petites lubies, envies d'américaines et leurs explications sont clairement pas primordiale à cet instant-là parce que...
« Je crois que la dinde est en train de crâmer… - FUCK !! »
J'ai juré combien de fois, ensuite, en attrapant le premier torchon qui passait pour sortir ladite dinde du four sans (trop) me brûler ? Aucune idée. Et c'est raté aussi parce que j'ai merdé et touché un bout de grille malgré tout, outch... La dinde a effectivement crâmé, mais j'espère pourtant encore qu'on pourra en récupérer quelque chose. Je tousse déjà, ouvre la fenêtre pour évacuer un maximum de fumée et éviter de m'asphyxier davantage, regarde sincèrement désolée les haricots pas forcément mieux lotis que la dinde, les tartes pas forcément assez cuites et les purées bien tristes toutes seules dans leur coin. Si y a qu'elles de mangeables, je fais quoi ?
« C'est un désastre... » murmuré-je dans mon coin, sous la hotte allumée à fond, avant de me tourner à nouveau vers Tyler. « Ok, je suis pas la cuisinière de l'année, hein... Mais y a peut-être quand même quelque chose à en tirer ?... »
Non, en fait, réponds pas, je sais que tu vas me basher, je serais la première à le faire dans la situation inversée. N'empêche que... Je garde encore un tout petit peu d'espoir. C'est peut-être pas très beau à voir, mais y a peut-être quand même une petite chance pour que j'aie pas fait ça pour rien... Bon à voir sa tête, je tente même pas de lui proposer de s'installer pour dîner, je crois que c'est pas la peine. Un autre coup d'oeil à ma "cuisine" et... Ok. Phase de test alors ? Mouais, je suis pas très convaincue non plus.
J'ai attrapé un couteau pourtant, jeté un regard dans sa direction genre "bon bah quand faut y aller...", et détaillé un morceau de chair dans la dinde, juste de quoi pouvoir l'enfourner, après avoir retiré la partie effectivement brûlée et...
« Bon d'accord, c'est infect. »
J'ai quand même avalé ce que j'avais dans la bouche parce que ça se fait pas de recracher, en théorie j'ai été élevée mieux que ça - mais pas par mes parents - et je suis restée quelques secondes, les mains appuyées sur le plan de travail, dos à lui. Je suis un boulet, mais genre grave, hein ? Et le calme étrange de la cuisine n'a pas duré bien longtemps, parce qu'en quelques dizaines de secondes, ensuite, j'ai tout attrapé et tout vidé dans la poubelle, un peu trop rageuse pour être vraiment pas atteinte par tout ça. D'autant que si ça se trouve, y avait quelque chose de potable, j'ai pas tout testé après tout. Mais non, tout a fini à la benne, de toute façon, j'aurais été toute seule si j'avais tenté de dîner de ça, et même si je dis rien, même si j'esquisse un sourire contrit, l'air de rien que quand je repose le regard sur Ty en détachant le tablier noué dans mon dos - ouais parce que malgré tout, j'avais essayé de faire ça bien -, ça me bouffe de même pas être capable de faire ça.
Je me suis lavé les mains, ai détaché mes cheveux que j'avais sagement noués pour faire la cuisine, et j'ai refermé la fenêtre et éteint la hotte, en me listant tout ce que je pourrais faire pour faire disparaître l'odeur de carbonisé et en me traitant un peu de tous les noms. Et puis je me suis rapprochée de lui, quand même légèrement embarrassée, une main sur la nuque.
« Désolée... C'est pas vraiment comme ça que je m'étais imaginé ça... »
Je suis pas très douée pour les grands discours à la base, encore moins pour les excuses... Tu m'en veux pas trop, dis ?
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(✰) message posté Mer 17 Déc 2014 - 1:36 par Invité
J’avais beau posséder un passeport américain, avoir cinquante pour cent de sang états-unien qui coulait dans mes veines et perdre mon accent britannique chaque fois j’avais le malheur de discuter avec des Yankees, je ne me considérais absolument pas comme un citoyen de ce pays qui avait récemment perdu sa première place de puissance économique mondiale au profit de la Chine. Après tout, j’avais reçu une éducation purement anglaise, et bien que mon père avait tout de même tenu à conserver certaines traditions importantes de la culture américaine – telles que Thanksgiving ou encore le 4 juillet –, je les avais rapidement et intentionnellement mises de côté une fois que j’eus claquer définitivement la porte du domicile familiale à l’âge de 18 ans. Enfin, je ne célébrais de toute manière aucunes fêtes – qu’elles soient américaines ou anglaises –, à l’exception du Jour de l’An.
- FUCK !! se mit alors à crier Sharona lorsque je lui fis remarquer que sa dinde était en train de crâmer, perçant ainsi mes pauvres tympans au passage… Elle se précipita donc vers le four, torchon en mains afin de ne pas se brûler, et elle en sortit notre supposé plat de ce soir, non sans quelques difficultés tout à fait compréhensibles puisque le récipient était sans le moindre doute bouillant. Et puis, il y avait également cette fumée épaisse qui en sortait et nous prenait aux bronches, nous faisant ainsi tousser à en cracher nos poumons. Donc, tandis que Sharona eut la bonne idée – pour une fois – d’ouvrir la fenêtre de la cuisine, je fis demi-tour dans le salon afin d’y ouvrir également les fenêtres dans le but que les odeurs s’échappent le plus rapidement possible, mais aussi pour éviter que l’alarme incendie qui s’y trouvait ne se déclenche et ne nous fasse profiter de sa mélodie clairement… insupportable. C'est un désastre... l’entendis-je se plaindre une fois de retour dans la cuisine. Ok, je suis pas la cuisinière de l'année, hein... Mais y a peut-être quand même quelque chose à en tirer ?... Et je ne répondis qu’avec une grimace très éloquente sur ce que j’en pensais réellement. Après tout, il n’y avait pas besoin de goûter pour voir que cela allait être immangeable. Mais la jeune fille se montra quelque peu bornée – ou bien elle avait beaucoup trop d’espoir quant à ce plat dont je ne doutais pas qu’elle avait mis du cœur à préparer – et elle tenta de goûter à la dinde dont il ne restait pas grand-chose lorsqu’on avait enlevé la partie charbonneuse. Bon d'accord, c'est infect, conclut-elle enfin, se forçant tout de même à avaler le morceau qu’elle venait de mettre dans sa bouche. Désolée... C'est pas vraiment comme ça que je m'étais imaginé ça...
- Eh bien, moi non plus, fis-je en constatant l’état catastrophique de ma cuisine. Enfin, faut voir le bon côté des choses : j’ai échappé à une grave intoxication alimentaire, tournai-je donc cela sur le ton de l’humour. Allez, viens ! Je t’invite à resto, finis-je presque par imposer, n’ayant de toute façon pas trop le choix – à moins qu’elle se sentait prête à tenter le diable et manger le peu de choses consommables dans tout ce qu’elle avait préparé, mais elle serait alors seule sur ce coup…
Nous laissâmes donc temporairement la cuisine dans cet état – Sharona m’avait de toute façon promis de tout ranger et nettoyer demain – et nous prîmes la direction de Earl’s Court, un petit quartier situé entre Hammersmith et Kensington, afin d’y manger dans un restaurant italien délicieux au nom si caractéristique de Zizzi.
- Je sais que c’est pas la dinde aux marrons que tu voulais, mais j’espère que ça te conviendra quand même, demandai-je tout de même confirmation, ne voulant pas vraiment la décevoir pour cette fête qui n’avait peut-être aucune importance pour moi, mais qui en avait pour elle. Nous nous installâmes donc à la petite table pour deux que l’on nous avait indiqué et nous commençâmes à zieuter le menu composé principalement de pizza.
Sharona K. García-Brown
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(✰) message posté Jeu 18 Déc 2014 - 0:37 par Sharona K. García-Brown
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Jeudi 27.11.2014 • Kensington
Je m'étais de toute façon pas vraiment attendue à ce qu'il fête Thanksgiving, à vrai dire, ça m'a un peu pris cette semaine, un peu en dernière minute en définitive, cette envie de quand même faire quelque chose - parce que finalement, quoi que j'en aie pensé jusque-là, y a des choses pour lesquelles je pourrais vouloir remercier Dieu, moi aussi, même si y en a d'autres pour lesquelles faudrait sérieusement qu'il m'explique ce que je lui ai fait. Mais j'aurais franchement aimé réussir à faire ça correctement. Raté.
Je suis un putain de boulet qu'il se traîne à la cheville, là, non ? J'exagère sans doute, n'empêche que là, c'est un peu tout ce qui me passe par la tête, même si j'ai quelques réflexes qui vont bien pour limiter la casse - manquerait plus que l’alarme incendie vienne nous bousiller les tympans en prime, quoi... Je tiens un peu à garder mes cinq sens - si tant est qu'on n'en ait que cinq - même si je suis en train de me flinguer celui du goût avec ce vain espoir que quelque chose soit récupérable dans tout ça. Ce qui n'est manifestement pas le cas, et je suis, juste complètement navrée. C'était vraiment pas le résultat que j'escomptais.
« - Eh bien, moi non plus. Enfin, faut voir le bon côté des choses : j’ai échappé à une grave intoxication alimentaire... »
Je grimace, je vois bien qu'il fait de l'humour, mais je suis assez blasée, à vrai dire. Ca m'empêche pas de rajouter un « mais euh ! » tout ce qu'il y a de plus mature, juste avant qu'il ne poursuive sur sa lancée.
« Allez, viens ! Je t’invite à resto... »
Je vois pas trop bien comment refuser ça, en même temps, vu l'état de la cuisine et mes horreurs. Alors je hoche simplement la tête, un petit sourire contrit pour toute réponse. Chose promise, chose due, et même si on cohabite pas depuis très longtemps, je crois qu'il sait qu'il peut compter sur moi, quand je dis quelque chose, je le fais, donc oui, sa cuisine sera propre comme un sou neuf demain. Mais pour ce soir, clairement, c'est mort, et le resto est une bonne idée, même si c'est pas ce que je voulais à la base. J'avais qu'à pas être aussi nulle en cuisine... On dirait qu'il lit dans mes pensées, d'ailleurs, comme on approche du Zizzi - du nom du restaurant, et rien d'autre, sinon je n'irai pas jusque-là, clairement.
« Je sais que c’est pas la dinde aux marrons que tu voulais, mais j’espère que ça te conviendra quand même... - Bah... C'est pas vraiment le détail du menu qui compte, n'est-ce pas ? »
Et je le montre sans doute pas très bien, mais je suis franchement touchée que tu t'inquiètes de ça, tu vois ? J'inspecte la carte avec un intérêt évident, d'autant qu'une garniture à base de figues, de coppa et de tomates cerises me fait de l'oeil. A vrai dire, je commence à avoir terriblement faim - bon signe, donc - sans doute un peu parce que j'ai passé des heures en cuisine en prime, et je me penche vers Ty, souriante, l'air de rien, comme si la scène de sa cuisine n'avait jamais existé.
« Tu sais ce que tu prends, toi ? »
La question banale par excellence, mais qui ne l'a pas posée dans ce genre de situation ? Je sais juste pas encore que la pizza aussi, ça n'arrivera pas. Y a des jours comme ça, quand ça veut pas...
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(✰) message posté Ven 19 Déc 2014 - 1:51 par Invité
Sharona et moi étions donc assis à une petite table pour deux dans un coin plutôt tranquille du restaurant, quelque peu bruyant à cette heure de la soirée. Et ce n’était pas parce que nous étions attablés à un endroit plus ou moins épargné par le bruit des personnes mangeant et discutant aux alentours que nous étions pour autant cachés. Il nous était au contraire tout à fait possible de voir la petite salle du restaurant dans presque tout son ensemble avec ces différentes tables pratiquement toutes occupées. Une salle que je connaissais d’ailleurs assez bien pour y avoir déjà été mangé quelquefois avec mon meilleur ami.
- Bah... C'est pas vraiment le détail du menu qui compte, n'est-ce pas ? fis Sharona après que je lui aie demandé si cela ne la dérangeait pas trop de manger italien à la place de la traditionnelle dinde aux marrons, ce par quoi je répondis par un simple « Certes. ».
Nous nous mîmes ensuite à examiner attentivement la carte que le serveur – qui nous avait placés peu avant – nous avait tendue, mais je ne mis pas longtemps à choisir – étant plus ou moins familier avec les plats servis dans ce restaurant. Je passai donc rapidement aux boissons – alcoolisées, bien évidemment –, hésitant entre un petit rosé bien fruité ou un vin blanc.
- Tu sais ce que tu prends, toi ? me demanda alors la jeune Américaine qui se trouvait être temporairement ma colocataire – si vous m’aviez dit un jour que je cohabiterai avec quelqu’un (une femme, de surcroît), je lui aurais sans le moindre doute rit au nez.
- Je vais prendre la fungi et... un verre de rosé, fis-je tout en fermant une bonne fois pour toute le menu puisque je savais que je ne changerai pas d’avis. Et toi ? lui retournai-je la question, plus par politesse que par réel intérêt – elle allait de toute façon passer commande auprès du serveur comme la grande fille qu’elle était, cela n’apporterait donc pas grand-chose de savoir ce qu’elle allait prendre en avance.
Une fois notre commande passée auprès du serveur qui était revenu rapidement après nous avoir vus tous les deux fermé le menu que nous tenions entre nos mains, un silence – qui ne me gênait pas particulièrement puisque j’étais justement ce genre de personnes peu loquaces – s’installa entre nous et mon regard vagua alors sur la salle presque totalement bondée.
- T’as contacté tes parents depuis que tu es arrivée ici ? finis-je par demander, tout de même intéressé par sa situation familiale. Après tout, ce n’était pas parce que ma propre situation familiale était totalement bousillée par la connerie de mes parents – et peut-être aussi un peu la mienne… – qu’il devait en être de même pour Sharona. Et donc, je ne souhaitais absolument pas que la jeune femme coupe totalement les ponts avec sa famille sur un simple coup de tête, préférant qu’elle tente au moins de discuter avec eux.
En tout cas, si je m’appliquais à écouter attentivement la Texane répondre à ma question, mon attention me fit malheureusement défaut lorsque, par le plus grand des malheurs, mon regard tomba sur deux silhouettes familières qui se levaient de table dans le but évident de partir. Deux silhouettes que je n’avais pas vu depuis un peu plus d’un moins et que j’avais quitté furieux après que l’une d’elles m’ait jeté son verre d’alcool à la figure pour une petite blague tout ce qu’il y avait de plus innocente en plus… Quant à l’autre, je remarquai simplement une fois de plus que ces mots qu’il m’avait avoué il y avait de cela près de deux mois n’étaient que des paroles en l’air puisqu’il semblait vivre le parfait amour avec ce gigolo que je ne pouvais à présent plus blairer.
Sharona K. García-Brown
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(✰) message posté Ven 19 Déc 2014 - 19:48 par Sharona K. García-Brown
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Jeudi 27.11.2014 • Kensington
Je lui ai souri quand il a évoqué le changement drastique de menu qu'on était parti pour faire, et j'ai rien rajouté à son « certes... » somme toute assez conclusif. Je me suis merdée, on est là, on va dîner tranquillement et je remettrais tout en état ensuite. C'est pas vraiment le Thanksgiving habituel, pour personne, mais... ça me va. On est tous les deux, là, et c'est bien tout ce pourquoi j'ai à remercier le Seigneur je crois bien. Ca, et la rencontre d'Ivy et d'un proprio assez cool pour m'accepter comme locataire.
« Je vais prendre la fungi et... un verre de rosé. »
J'ai jeté un oeil à la pizza qu'il nommait, hoché la tête et repassé une partie de la carte avant de rester complètement sur ma première idée.
« Et toi ? - Fichi e pomodorini... Je dois dire ça avec un accent cooooomplètement pourri. »
J'ai hésité quand le serveur est revenu nous voir à suivre Tyler sur un verre de rosé. Et je l'ai pas fait, je me suis contentée d'une eau pétillante, que je suis sûre de pouvoir boire. A vrai dire, j'ai encore jamais touché à une goutte d'alcool, et je suis pas sûre de vouloir commencer maintenant. Ou peut-être que si, parce qu'il va sans doute en falloir un peu pour que je réponde à cette question.
« T’as contacté tes parents depuis que tu es arrivée ici ? »
Cette question-là. Celle qu'il faut pas. Celle qu'il est tout à fait en droit de se poser, cela dit. Mais à laquelle je suis, vraiment pas sûre d'avoir envie de répondre.
« Non... »
Le serveur a commencé par amener nos boissons, et finalement, je le lui ai demandé, ce verre de vin. Je verrais bien. Au pire je le laisserai à Ty. Et sinon, je me vengerais dessus pour la première fois de ma vie. Et en bonne petite américaine bien rangée - ah ah - j'aurais attendu 21 ans pour ça, si c'est pas magnifique, j'ai même le droit, maintenant. Et j'ai attendu d'avoir le fameux verre, donc, en main et d'avoir vaguement trinqué avec mon hôte pour étoffer quelque peu ma réponse, pour l'heure pour le moins laconique.
« J'ai pas vraiment grand chose à leur dire, de toute façon. Tout ce qu'ils ont toujours fait, ça a toujours été pour eux. Faudrait pas que quoi que ce soit vienne ternir la jolie petite image qu'ils renvoient à tout le monde. »
J'ai pas vraiment envie de rentrer dans les détails, mais n'empêche que... C'est balot quand même, leur aînée s'est barrée y a déjà trois ans, et la petite a mis les voiles aussi, avant même la majorité absolue, ça la fout mal, hein ? Mais qu'est-ce que ça change après tout ? De toute façon, ils étaient jamais là... Sauf pour m'envoyer dans des camps à la con, ou des centres psy. A se demander pourquoi ils nous ont eues, Kas' et moi.
« La seule chose qui les gonfle, maintenant, qui fait qu'ils ont encore fait sonner mon ancien téléphone - par le biais de la gouvernante même, des fois que je sois assez con - c'est que ça ruine leur réputation tout ça. Je suis sûre qu'ils ont monté un bobard pour faire genre devant les voisins... »
Je parle dans le vide, là ? Mon verre a drastiquement perdu de son contenu, mais il m'est pas encore monté à la tête... pourtant c'est pas moi dont l'attention divague, là. Et je vois le regard de Tyler s'assombrir, fixer un point un peu plus loin dans mon dos. Je suis pas très discrète, mais je m'en fous, je me retourne pour voir deux gars s'éloigner, par main dans la main, mais manifestement assez proches. Une main sur une épaule pour tout contact, et pourtant, je crois qu'on comprend pas mal la proximité de ces deux-là. Et ça fait tilt.
« Tiens, le Chapelier Fou et le Dandy Zombie... »
Je les ai dans mon téléphone, de même qu'une bonne vingtaine de personnes croisées à Halloween.
« Tu les connais ? »
Me dis pas non, c'est écrit sur ton front. La question qui me taraude réellement, c'est plutôt « c'est quoi l'histoire pour que ça te fasse tirer cette tête ? » mais pour l'instant, je m'abstiens. N'empêche que j'aimerais bien savoir lequel est passé dans ses bras, parce qu'ils sont quand même sacrément mignons l'un comme l'autre... Pas comme si ça m'était jamais arrivé de commenter ses conquêtes de la nuit, de toute façon, c'est même super drôle quand c'est en compagnie du voisin... Bon ce soir, évidemment, j'ai bien le sentiment que drôle, ça va pas tout à fait être le terme approprié...
Invité
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(✰) message posté Dim 21 Déc 2014 - 0:35 par Invité
Après avoir passé commande auprès du serveur – plutôt attirant dans son genre, je devais bien avouer –, je tentai maladroitement de faire la conversation à Sharona – ce qui était quelque chose de plutôt extraordinaire venant d’un type comme moi qui préférait les instants de silence aux discussions banales et sans intérêts… J’osai donc aborder un sujet quelque peu glissant en lui demandant si elle avait contacté ses parents depuis qu’elle avait quitté son pays natal pour venir emménager en Angleterre. Je n’étais, certes, peut-être pas la personne la mieux placée pour discuter des problèmes familiaux de la jeune femme – étant donné que je n’étais en contact avec aucun des membres de ma famille (à l’exception de ma sœur qui semblait vouloir s’accrocher à notre lien fraternel telle une moule à son rocher) depuis que j’avais claqué la porte de la maison familiale il y avait presque dix ans à présent –, mais j’avais justement assez d’expérience dans le domaine pour connaître l’importance d’avoir une famille à ses côtés. Et si j’étais totalement dénué de cette qualité qu’était l’empathie, cela ne m’empêchait tout de même pas de souhaiter que Sharona vivre autre chose que ce par quoi j’avais dû passer à son âge…
- Non... me répondit-elle alors. Et ce ne fut que lorsque le serveur revint avec nos boissons – un verre de rosé pour moi et un verre de vin pour elle – qu’elle continua ses explications sur le pourquoi du comment. J'ai pas vraiment grand chose à leur dire, de toute façon. Tout ce qu'ils ont toujours fait, ça a toujours été pour eux. Faudrait pas que quoi que ce soit vienne ternir la jolie petite image qu'ils renvoient à tout le monde.
Et cela devait être à peu près à ce moment-là que l’attention sans faille que je lui avais portée jusque-là ne fonde comme neige au soleil pour se diriger vers deux personnes que je connaissais malheureusement que trop bien. Deux personnes qui, d’ailleurs, étaient celles que j’avais très certainement le moins envie de croiser parmi tous les gens qui vivaient dans cette putain de ville. Mais le destin semblait trouver un malin plaisir à s’acharner sur moi vu le nombre de mauvaises surprises dont j’avais été victime ces cinq derniers mois, et il n’avait apparemment pas l’intention de me lâcher…
- Tiens, le Chapelier Fou et le Dandy Zombie... fis remarquer Sharona, sans que je ne comprenne vraiment de quoi elle voulait parler. Tu les connais ?
- … Non… finis-je par répondre après un long moment de silence durant lequel je n’avais fait que les suivre du regard jusqu’à ce qu’ils quittent ensemble le restaurant, pas tout à fait aux bras l’un de l’autre, mais presque… Et la rage que j’avais ressenti lors de notre rencontre impromptue de la dernière fois se fit tout à coup ressentir, ce qui eut pour conséquence direct de me faire boire mon verre de rosé cul sec. Je hélai ensuite notre serveur, qui venait de prendre la commande d’une table juste à côté de la nôtre, afin de lui demander un autre verre. Tu devrais quand même les appeler, continuai-je alors notre conversation précédente comme si absolument rien ne venait de se passer. Tu n’as sûrement pas envie de te retrouver comme moi dix ans plus tard à passer tous tes Thanksgiving et Noël toute seul, n’est-ce pas ?...
Sharona K. García-Brown
I walk this empty street on the boulevard of broken dreams.
(✰) message posté Sam 27 Déc 2014 - 16:20 par Sharona K. García-Brown
Fucksgiving
ft. Tyler J. Lewis && Sharona K. Garcia-Brown
Jeudi 27.11.2014 • Kensington
Je me fiche pas mal de la tronche du serveur, là, le sujet de conversation qu'on aborde me plait pas beaucoup. Alors venant de n'importe qui d'autre, j'aurais certainement pris la mouche et peut-être même viré la table avant de partir en trombe. Mais là, c'est Tyler, et s'il y a bien une personne avec qui je peux envisager de parler de mes parents, c'est lui. Sauf que ce soir, j'en ai vraiment aucune envie. Je me suis quand même surprise à lui répondre, même si c'est pas vraiment très positif, jusqu'à ce que je m'aperçoive que son attention déviait légèrement. Je crois que je mettrais facilement ma main à couper qu'il a pas entendu la fin de ce que je disais, trop occupé à mater le Chapelier Fou et le Dandy Zombie qui s'éclipsaient. Et quand je lui ai demandé s'il les connaissait, le « Non… » un peu trop rageur avec lequel il m'a répondu, une fois que les deux hommes ont quitté notre champ de vision me fait froncer les sourcils. Son verre de rosé vidé d'un trait, il en a commandé un autre. Mouais, mais sinon ça te fait rien, là, hein ?
« Tu devrais quand même les appeler. Tu n’as sûrement pas envie de te retrouver comme moi dix ans plus tard à passer tous tes Thanksgiving et Noël toute seule, n’est-ce pas ?... - Oh bah... Je serais pas toute seule, je viendrais t'emmerder. »
Grand sourire crétin sur le visage, j'avale à mon tour une gorgée de vin, pas vraiment connaisseuse, essayant au passage de déterminer si j'aimais bien ce truc-là ou pas. Au fond, il a peut-être raison. Je sais pas si je vais pas regretter, à force, d'avoir coupé les ponts avec mes parents, mais en même temps, ils ont pas été très cool non plus, entre tout ce qu'ils m'ont foutu dans la tronche, ce qu'ils m'ont révélé à l'arrache, comme ça, sans préparation, et le coup qu'ils m'ont fait là, avec le blocage de ma carte, c'est bon, va falloir du temps avant que je leur pardonne. Un jour, peut-être, cela dit, je finirais par reprendre contact. Peut-être. Pas ce soir en tous les cas, et j'ai reposé mon verre, regardant Ty vider à nouveau le second.
« Je devrais appeler mes parents, peut-être... Et toi tu devrais pas dire que tu les connais pas ces deux types alors que le fait de les voir ensemble te fout à ce point en rogne. C'est lequel qui te plaît ? Le grand tout fin à gueule d'ange ou le plus baraqué genre chippendale ? »
Les deux ont leur charme, je dois avouer. Et ça a beau faire un petit mois que je suis là, j'ai jamais vu Tyler dans cet état d'esprit-là alors je suis un peu surprise... Et même si je trouve ça touchant, je trouve aussi ça triste que ça soit un mec déjà avec quelqu'un d'autre sur lequel il craque manifestement...