(✰) message posté Sam 1 Nov 2014 - 23:39 par Invité
“What happens when people open their hearts?"... "They get better.” ― Haruki Murakami, Norwegian Wood
Les longues nuits, elle les connaissait, elle les vivait lorsqu’elle devait se rendre à des soirées mondaines, des fêtes où elle dansait jusqu’à tôt le matin mais cette nuit-là… était au-dessus de tout. Le temps ne lui avait jamais paru aussi long, et autant contre elle. C’était comme si les secondes se transformaient en minutes, et les heures en jours. Ce long couloir blanc et parfaitement éclairé avait maintenant des allures d’hôpital et d’un chemin menant tout droit à la mort. Plus l’attente devenait longue, plus son humeur tirait vers le pessimisme le plus total. Elle avait arrêté ses aller-retour incessants et attendait, appuyée contre le mur en face de cette porte. Sa tête était lourde à force de ressasser les pires scénarios possibles.
Derrière cette porte, Julian se faisait opérer. Et depuis qu’il l’avait franchi il y avait plusieurs heures à présent, il n’en était rien sorti. Même pas une personne pour la rassurer. Combien de fois elle avait maudit Alexandre pour ne pas avoir pensé à faire sortir quelqu’un de temps à autre pour la tenir au courant de la situation ! Après tout, ce n’était pas un véritable hôpital, loin de là. Ils se trouvaient dans une villa luxueuse où des jeunes filles - qui aidaient à la tâche - étaient sorties de nulle part pour prendre part à cette opération, apparemment fascinante. Le genou de Julian semblait être vraiment dans un état critique et les chirurgiens en eux y voyaient un cas intéressant. Pour elle, c’était bien le cadet de ses soucis, elle voulait juste savoir si tout se passait bien. Alors qu’elle avait une confiance aveugle en son ami, elle s’était surprise à angoisser soudainement, sans explication. Peut-être qu’après leur “entrevu” à l’extérieur, elle se sentait un peu plus responsable de lui et… proche ?
Un soupir de soulagement lui échappa lorsqu’enfin la porte s’ouvrit. Elle eu à peine le temps de le voir allongé sur ce lit que les jeunes femmes le transportèrent dans une autre pièce. Alexandre vint à sa rencontre, un sourire satisfait sur le visage. La pression retomba légèrement, ce n’était pas une expression alarmée ou inquiète alors ça devait être bon. Il lui expliqua en quelques mots que l’opération s’était révélée plus compliquée que prévue mais que tout allait bien, il allait avoir besoin de repos et devait donc rester sur place pendant quelques jours. Puis, une rééducation allait devoir être organisée. Son genou avait beaucoup subi, il devait se remettre tout en continuant à exercer. En gros, à ce qu’elle avait compris, trop pressée d’aller le voir, Julian devait se reposer mais continuer à marcher à dose raisonnable, encadré de massages quotidiens. Il préféra attendre son réveil pour entrer dans les détails, voyant qu’elle ne l’écoutait qu’à moitié.
Elle du appeler tout le self contrôle qui lui restait pour s’empêcher de courir jusqu’à la pièce où on l’avait déplacé. A la base, cela devait sans doute être une chambre splendide au vu de la décoration mais tous les appareils médicaux qui encadraient le lit sur lequel il dormait changeaient complètement l’ambiance de l’endroit. La scène l’effraya presque. Le voir comme ça lui déchirait le coeur alors qu’il y avait quelques heures à peine, il était encore là à faire sa crise de jalousie, débordant de force. Doucement, elle s’approcha de son lit. Elle avait beau se répéter qu’il était sain et sauf et que son genou allait être en meilleure forme à présent, elle ne pouvait s’empêcher de ressentir un malaise. Il semblait si affaibli, si pâle. Elle s’était réellement inquiétée pour lui et restait alerte. Lorsqu’elle lui caressa tendrement les cheveux, elle s’aperçue à son grand désarroi que sa main tremblait. Oui, elle s’était inquiétée mais en réalité, elle avait été morte de peur. Ses doigts glissèrent sur son visage pour s’attarder sur sa joue. Une bouffée d’émotions lui monta à la gorge, elle avait presque du mal à respirer. Puis lentement, elle parcouru le long de son bras et lui saisit la main avant de s’asseoir sur le fauteuil juste à côté.
“Dieu merci, tout s’est bien passé.” murmura-t-elle en tenant sa main contre son visage. Sa voix tremblait, elle sanglotait presque.
Athénaïs était croyante mais pas jusqu’à assister aux messes du dimanche, non. Elle savait juste qu’elle avait foi et qu’à ce moment-là, elle remercia le ciel de tout son coeur. Elle venait à peine de le retrouver, il était hors de question qu’on le lui arrache. I will never let you down.
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(✰) message posté Mar 4 Nov 2014 - 22:52 par Invité
The beauty of the dark, is the beauty of you.
La beauté de l’obscurité voilait le monde tout entier. Je rêvais mille nuances de gris sans jamais trouver de repos. Quelle sensation délicieuse de planer sans aucune attache ! Mon esprit voguait au-delà des limites autorisées. J’avais longtemps pensé que l’imagination humaine possédait un secret exquis, une force immuable et immortelle. De longs nuages cheminaient autour de ma tête avant de se dissiper quelque part entre mes flancs. Je m’accrochais à mes espoirs comme un idiot – Tout n’était que flocons et sucreries dans l’au-delà. Peut-être qu’au détour d’un couloir, je pourrais croiser les visages familiers d’âmes profondes et captives. Peut-être que si je me laissais le temps d’explorer, je trouverais la délivrance et l’absolution. Je bougeais mes doigts engourdis dans le vide. Il y’ avait des fils partout autour de moi. Je me languissais d’un éclat de lumière salvateur. Mon corps ensommeillé refusait de se mouvoir au gré de ma pensée. Ce n’était pas juste !
Mon cœur était en feu, animé par ma volonté de me redresser. Je sentais mon sang bouillonner dans mon système vasculaire à la recherche d’alternatives surréalistes. Je déglutis en tentant de contrôler mon rythme respiratoire. Ma poitrine s’élevait divinement avant de retomber contre le matelas – Je n’y arrivais pas. Combien de temps s’était-il écoulé depuis ma transe ? Je m’égarais dans l’espace-temps comme un vagabond. Mes délires étaient-il réels ? Car il me semblait que j’étais enlacé par une étreinte chaleureuse et mortelle. Je succombais lentement avant d’heurter le sol. Mes joues étaient tout à coup gelées, tracées par de longs sillons humides. Je pleurais ? Pourquoi ? J’étais triste ? Ma salive était tout à coup amère. Après des heures la bouche close, je sentais mon haleine pourrir au contact de mes muqueuses. Je fronçai les sourcils avant de tousser. Ma tête tournait, étourdie par les danses des ombres de mon imaginaire. Je papillonnai des yeux plusieurs secondes avant de pouvoir filtrer les lumières. La chevelure dorée d’Athénaïs m’agressait les rétines. Je fermais à nouveau les yeux : Que se passait-il ? J’étais alité et elle tremblait comme une feuille. Je me cambrai dans un élan de panique. Mes poumons étaient en apnée, incapables d’inhaler l’air correctement.
« Athénaïs … » Murmurai-je au bord de l’agonie. J’avalais l’air par bouffés. L’anesthésie ne me réussissait pas – Mon estomac était tordu dans une inflexion anormale. Tout le poids des injustices se reposait sur mon nombril suintant. Je lui lançai un regard, perplexe avant de rouler les yeux dans la pièce. Je redécouvrais le décor. Les murs placides étaient grossièrement ornés de tableaux et d’affiches publicitaires des années 90. Ce n’était pas réellement une chambre d’hôpital – plus un espace détente. Après quelques minutes de divagations, mon premier réflexe fut de relever le voile sur ma jambe gauche. Je fixais mon genou boursoufflé comme s’il s’agissait d’une abomination de la nature. Je ne ressentais rien, à part quelques fourmillements et une légère vibration. Je me laissai tomber en arrière. Je dégoulinais de sueur, puis au bout d’un moment je finis par comprendre que j’avais froid. Je me roulai sous les draps comme un enfant.
« Alex doit beaucoup t’apprécier. Tu es admise en salle de réveil aussi facilement. » Lançai-je d’une petite voix. Je n’avais pas perdu mon sarcasme habituel. C’était bon signe. Je plissai les yeux en sa direction, luttant contre une envie irrépressible de dormir. « Je dois avoir une mine effroyable. » Grinçai-je en sentant mes yeux larmoyer à nouveau. Je serrais la mâchoire avant d’esquisser un rictus à mi-chemin entre la grimace et l’amusement. Elle était là, comme promis. Elle était restée à mes côtés tout le long. Je fis un effort pour enjoliver mon expression. C’était ma façon de la remercier.
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(✰) message posté Mer 5 Nov 2014 - 20:57 par Invité
Après des heures d’attente dans ce couloir pour qu’il sorte de la salle d’opération, l’attendait encore plusieurs autres heures pour qu’il se réveille. Le temps ne pouvait pas défiler plus lentement, maintenant qu’il était sous sa surveillance, elle ne tenait plus, elle voulait qu’il se réveille car elle n’arrivait pas à être sereine. Elle repassait en boucle dans sa tête ces images de séries télé américaines où le patient ne se réveillait pas ou était subitement en train de convulser. Jamais elle n’avait pensé être dans ce genre de situation un jour et elle espérait ne plus le vivre. Attendre le réveil d’un proche était atroce, le silence auparavant agréable n’était plus qu’un poids en plus.
Ne tenant plus en place, elle ordonna des directives tout en surveillant Julian. Il était incroyablement tôt et aucune boutique n’était censée être ouverte. Cependant, une heure plus tard, on lui apportait ce qu’elle avait demandé. Presque soulagée de faire quelque chose, elle se précipita pour accueillir la commande. Délicatement, elle souleva le fin papier, et huma la délicieuse odeur qui s’en échappait. Une explosion de parfums. C’était des fleurs. La pièce, malgré la décoration, lui semblait trop froide et rien de mieux qu’un beau bouquet pour égayer tout ça. Évidemment, pour passer le temps, elle avait demandé les fleurs séparément. Plus petite, sa mère lui avait enseigné l’art floral, nécessaire pour son rôle d’épouse disait-elle. En les installant avec soin sur une table, son coeur se réchauffa empli de souvenirs d’enfance. Puis, elle s’attela à la tâche. D’abord une rose puis un oeillet blanc… Jusqu’à le finir. Elle s’était amusée à déplacer plusieurs fois telle fleur ou telle feuille pour voir le rendu, finalement, elle était satisfaite. Julian allait pouvoir l’admirer rien qu’en ouvrant les yeux, la table était située pile en face son lit. Leur odeur s’était propagée dans toute la pièce quand soudain, l’horreur la frappa. Et s’il était allergique aux fleurs ? Elle connaissait tellement de monde allergiques au pollen, catastrophe ! Avant qu’il ne puisse se réveiller, elle allait le tuer. Bon tant pis, elle voulait qu’il voit son travail alors le bouquet allait rester sagement sur la table.
Elle reprit place dans le fauteuil, se couvrit d’une couverture en laine qu’on lui avait apporté et mit ses écouteurs avant d’attraper la main de Julian. Elle se plaisait à croire que peut-être dans son sommeil, il sentait qu’elle était là et puis, elle avait trop peur qu’il disparaisse si jamais elle s'assoupissait. You seemed so interested, could you tell me was it real or was it all in my head ? La musique l’endormait, elle posa sa tête sur le lit, juste à côté de leurs mains. Elle se sentait mélancolique et seule, elle avait hâte qu’il se réveille. I live through pictures as if I was right there by your side. Sa playlist défilait, elle était incapable de dire combien de temps elle avait attendu. Why am I the solo player in this game for two.
Allez savoir pourquoi c’était trop déprimant, les chansons s’étaient données rendez-vous. Ce n’était pas bon pour son moral alors elle enleva les écouteurs et se cacha sous la main de Julian. Elle était chaude. Malgré cette couverture, elle mourrait de froid. C’était comme s’il lui donnait de la tendresse… sans le savoir. Un murmure la sortit de ses songes.
« Athénaïs … »
Enlevant délicatement sa main de sa joue, elle se redressa brusquement. Enfin ! Pendant son sommeil, elle avait tellement de choses à lui dire mais maintenant qu’il était éveillé, les mots lui manquaient. Elle l’observait, silencieuse, submergée à nouveau par les émotions. Elle s’était tellement inquiétée. Ses paupières se soulevaient difficilement mais pourtant, il tentait de se relever, quel curieux, c’était incroyable ! Avant de se rouler dans ses draps, oh, il était trop mignon. Elle saisit la couverture de laine sur ses épaules pour le recouvrir, le voir agir comme un enfant était un extra, c’était juste inattendu.
« Alex doit beaucoup t’apprécier. Tu es admise en salle de réveil aussi facilement. » Elle sourit, il venait de se réveiller et c’était tout ce qu’il avait à dire ? « Je dois avoir une mine effroyable. » Il essaya d’esquisser un sourire, mais il était plus dans les vappes qu’autre chose.
D’une voix douce, elle lui demanda : “Comment est-ce que tu te sens ?” puis poursuivit : “Tu peux te rendormir, repose-toi.”
Elle avait attendu tout ce temps pour lui dire de se rendormir ? Effectivemment, il la rendait...
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(✰) message posté Mar 11 Nov 2014 - 0:01 par Invité
The beauty of the dark, is the beauty of you.
Mes souvenirs voguaient autour de ma tête comme un filet de fumée obscure. Je ne voyais plus clair, perdu dans un univers brumeux. Tout me semblait morose, et incroyablement austère. Ma poitrine était lourde d’émotions et de douleurs. Je papillonnai des yeux sans pouvoir distinguer les traits familiers d’Athénaïs, pourtant j’adorais contempler sa beauté sauvage et me laisser envoûter par les mouvements suaves de sa bouche. Je me sentais étrangement seul. Mon cœur s’était brisé un million de fois avant de se relancer dans une course effréné contre le temps. Je me crispai sous ma couette en grelottant. Ma peau frémissait avant de se tendre dans un spasme désagréable. Je me redressai, le trouble dans l’âme et la peur au ventre. Je n’avais aucune idée du pronostic de l’intervention – j’étais vivant, c’était déjà ça. Je déglutis avec difficulté avant de lui adresser un sourire terne.
“Comment est-ce que tu te sens ? Tu peux te rendormir, repose-toi.” Demanda-t-elle avec douceur.
Je croyais presque voir les vibrations de ses cordes vocales extirper l’air afin de caresser mon visage placide. Ma tête me tournait, mais mon cœur demeurait toujours insatisfait dans sa misère. Je ne bougeais pas. Je restais planté là, au milieu des ruines et des cendres d'un pays que javais détruit. Je baissai les yeux.
« Eau … S’il te plait … » Articulai-je avec une lenteur presque humiliante pour un journaliste de ma trompe. Les mots sonnaient creux dans ma gorge, et ma langue était encore trop engourdie par les substances anesthésiques qu’on m’avait perfusé. Ma fatigue était cosmique et insurmontable. Je laissai ma tête retomber en arrière ; je me sentais si démuni, si désabusé. Je me souvenais de ma première opération, et des médecins qui m’interrogeaient sur les circonstances de ma chute mensongère. Malgré ses violences et ses sautes d’humeurs démentielles, j’avais aimé mon père d’un amour inconditionnel et inébranlable. Je l’avais compris et j’avais pardonné ses erreurs. Je soupirai – J’aurais peut-être dû tout avouer aux services sociaux et abandonner le dernier vestige qui restait de ma famille. Mais j'étais trop lâche pour me battre contre la fatalité de mon destin. J'étais trop jeune pour faire la part des choses, et m'enfuir. Je me mordis la lèvre inférieure en gémissant.
« Je n’aime pas dormir. » Lançai-je d’une petite nouée. « Tu le sais. »
J’avais pour habitude de passer mes nuits à écrire ou à fumer. Le sommeil était un état de faiblesse qui me terrifiait. Je songeais que je n’étais plus conscient de mes actes ou de ma vie, et cette perspective me déchirait. J’arquai un sourcil en mimant une expression sereine. Tout du moins j’essayais. Je me tournais lentement vers Athénaïs – sa chevelure dorée ondulaient gracieusement autour de son visage rongé par l’inquiétude. Et même dans une pareille situation, elle restait magnifique. Son aura princière ne la quittait jamais, et l’espace d’une seconde, je me sentais ridicule à ses côtés. Elle m’inspirait un sentiment d’infériorité qui se dissipait violemment avant de revenir à la charge. Je n’étais qu’une éternité de déceptions, tandis qu’elle pétillait comme une nuée d’étoiles dans la giboulée d’hiver. Elle me sauvait après de longues années de maints voyages et d’éloignements. Elle me sauvait parce qu’elle était la princesse et moi la gamin rêveur et rejeté. Je remarquai enfin la collection florale qui ornait ma table de chevet – et même si j’étais incapable de différencier les senteurs boisées de l’antiseptique, je m’émerveillais devant son attention délicate.
« Les fleurs sont jolies, mais ça fait trop girly. » M’amusai-je en lui tendant la main. « Tu es adorable. Je pourrais y prendre gout. » Toussotai-je en plissant les yeux.
J’avais été opéré du genou, et pourtant chaque cellule de mon corps s’enflammait au moindre mouvement. Je ne voulais pas me vanter de posséder un grand savoir en médecine, mais je savais au fond de moi, que j’étais fatigué de guérir. Cette réparation était vaine. Je retombais immanquablement dans mes vices, brisant encore et encore mon corps éclopé sans personne pour me rattraper dans ma chute.
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(✰) message posté Ven 28 Nov 2014 - 19:25 par Invité
Son réveil était comme une délivrance, inconsciemment, il chassait ses peurs et sa solitude. Son coeur s’emplissait d’une douce chaleur en le voyant papillonner des paupières, il revenait à la vie comme il lui revenait. Elle posa sur lui un regard attendri, elle avait eu tellement peur, il était inutile de le nier. Une part d’elle lui en voulait, il n’avait pas le droit d’avoir un tel impact sur elle, pas maintenant, pas après toutes ces années à fuir, à repousser l’idée même qu’elle avait pu y être attachée. Elle avait bien eu raison de créer toute cette distance, que lui aurait-il fait sinon ? En une misérable soirée, ponctuée de phrases savamment maniées, il avait abattu ses barrières, réduit en cendres ses efforts. Et plus elle le regardait, et plus elle se sentait stupide.
D’une voix douce, un léger sourire aux lèvres, elle murmura : “Et c’est cet homme qui m’a séduite ?”
Son état était tel qu’il parvenait à peine à articuler correctement une phrase, elle ne l’avait jamais vu aussi bas, aussi peu maître de lui. Elle ne doutait pas que cette situation devait lui coûter énormément, sa fierté était grande, comme la sienne. Dans le cas inverse, dans un élan d’arrogance, elle aurait catégoriquement refusé sa présence. Combien même s’il avait refusé, elle n’aurait rien écouté. Cela ne pouvait marcher que dans un sens, et il y avait une sorte d’injustice mais après tout, ce n’était pas plus mal. Elle n’aimait pas se sentir dominer.
D’un geste, elle attrapa la bouteille d’eau à ses côtés et remplit un verre incroyablement raffiné, rien à voir aux gobelets dans les hôpitaux. Alexandre désirait-il leur rappeler qu’ils se trouvaient dans sa demeure ? Délicatement, elle l’aida à se relever et apporta le verre à sa bouche. Il semblait si affaibli, l’image lui fendait le coeur. Cependant, le liquide semblait le raviver quelque peu, il arrivait à mieux s’exprimer.
« Je n’aime pas dormir. Tu le sais. »
Décidément, de cette manière, il ressemblait à un véritable enfant. Intérieurement, elle fondait littéralement. Vulnérable, il était si adorable. Ce n’était pas plus mal qu’elle le voit ainsi, cette facette la subjuguait. Julian aimait travailler et avoir le contrôle sur ses affaires, elle le savait alors le voir presque grelotter sous sa couverture la surprenait. Certes, il restait un humain mais dans son optique, il était impossible de venir à bout de sa prestance. Elle l’avait toujours admiré, il était peut-être l’une des rares personnes qui la faisait se sentir petite. La balance retrouvait son équilibre, même lui pouvait se sentir faible à certains moments.
« Les fleurs sont jolies, mais ça fait trop girly. Tu es adorable. Je pourrais y prendre gout. »
Elle ne pu s’empêcher de sourire à sa remarque, il restait fidèle à lui-même. Toujours quelque chose à redire mais elle le prenait bien, c’était sa manière de la complimenter. Quelques heures auparavant, il avait évoqué son enfance plutôt sanglante, elle se demandait si personne ne s’était jamais réellement occupé de lui ? La question lui démangeait, mais ce n’était pas le moment. La réponse semblait presque évidente, elle se sentit soudainement triste, elle ne pouvait pas se résoudre à imaginer un Julian battu et rejeté. Tout ce qu’elle désirait à cet instant, lui donner l’amour dont il avait toujours manqué en cent fois, non mille fois plus intenses. Elle désirait prendre soin de lui et le couver de sa lumière jusqu’au jour où il s’y habituerait. En resserrant sa prise sur sa main, elle caressa légèrement sa joue de l’autre.
“Tu dois arrêter de te surmener ou de prendre sur toi, tu peux tout me laisser, je suis capable de supporter ta souffrance.”
Lentement, ses yeux se fermèrent, l’effet des médicaments l’emportait. Elle était incapable de dire s’il avait entendu ses dernières paroles, cependant, la promesse était faite, elle sera là, à ses côtés, quoi qu’il arrive.