to make you feel my love. (sage)

peut-être que c'était écrit. peut-être que c'était une histoire qui devait se répéter. grandir sans sa mère, tu connais. ça a toujours été une blessure dans ton coeur. un trou que t’arrives à peine à combler. tu gardes néanmoins toujours une photo de ta mère dans ton portefeuille. comme un doux souvenir inexistant à tes oreilles. tu ne l’as jamais connue. ses traits ne se dessinent que grâce aux récits de ton père. ceux si réconfortants et pleins de larmes. + c'est sans doute pour cela que tu gardes une relation assez privilégiée avec ton père. cela a longtemps été vous deux contre le reste du monde. c'est lui qui a toujours été là pour toi. il était parfois maladroit et un peu penaud mais au final, tu sais qu'il s'en est très bien sorti avec toi. plus que bien même. il était alors ton pilier, ton grand repère dans la vie. celui sur lequel t’as toujours pu compter quoi qu'il advienne. +  il faut dire que vous aviez tellement en commun. surtout l'art. ton père était un peintre amateur. t’adorais, petite, te glisser dans son atelier qui sentait encore la peinture fraîche. t’adorais aussi le regarder peintre pendant des heures. c'est de lui que tu tiens tout ça. ton côté artiste est tout autant en avant que chez toi. voire même plus encore chez toi. rappelons que t’as toujours été vue comme une fille excentrique, exubérante. ils te pensaient folle, tu te disais artiste. tes cheveux étaient d'ailleurs son terrain favori. + pourtant, tout change. c'est bien connu. le monde tourne et les gens n'arrêtent pas de bouger. c'est ainsi. l'année de tes douze ans, fut un tournant décisif pour toi. son père rencontra une femme. elle n'avait rien contre. pourquoi pas. mais le fait de partager ton père était une perspective qui te rebutait. le pire fut l'année suivante quand ton père lui annonça qu'ils attendaient un enfant. c'est là que ça commença. ce sentiment. cette sensation de trop, d'être la cinquième roue du carrosse. tu savais très bien que ton père l'aimait et que tu serais jamais reculée sur une aire d'autoroute. mais c'était différent. le bébé monopolisait l'attention. ton père n'était plus si à l'écoute, plus si présent. une situation qui t'a beaucoup bouleversée mais dont t’as gardé la souffrance. a quoi bon ? + a partir de là, tu tentas de fuir le plus possible la maison familiale. l'atmosphère rose bonbon et enfantine te donnait des sueurs froides. t’avais besoin d'air, de sortir et de voir du monde. faut dire que tu ne faisais pas partie de ces personnes qui n'avaient pas d'amis. bien au contraire. si t’intriguais beaucoup notamment grâce à son style décadent, t’étais aussi connue pour ton sourire et ta gentillesse.  + c'est ainsi que tu le rencontras. durant l'une de ses sorties à vouloir refaire le monde. c'était à la fête foraine. t’avais la bouche pleine de barbe à papa et le coeur empli d'une nouvelle émotion. si pure, si touchante. c'est ce qu'on appelait l'amour. drôle de sentiments pour une gamine de seize ans. c’était la première fois. mais il te faisait entrevoir le monde. et mieux encore, l'infini. c'était si étrange. mais si beau. +  et ça te faisait rayonner, sage. le sourire toujours collé à tes lèvres. l'amour te rendait belle, si colorful. c'était indéniable. ton entourage s'en était même aperçu. ton père en premier. il avait tenté de te parler. de te mettre en garde peut-être. t’as jamais trop écouté. tu n’en faisais qu’à ta tête, sage. peut-être que t’aurais du. peut-être que ça aurait tout changer. qui sait ? + parce que vous vivez tout à fond. clairement. sage, c'était une passionnée. tu pouvais que vivre ça à fond. c'était plus fort que toi. malgré les disputes. malgré les mots dits trop forts. parce qu'il y en a eu. oh que oui. peut-être trop. peut-être que ça aurait du vous alerter. peut-être que ça aurait du vous mettre la puce à l'oreille. mais rien. vous étiez bien trop aveugles. bien trop amoureux. l'amour rend aveugle dit-on. c'est sans doute vrai. + jusqu'à à un certain point. le point de non retour. le paroxysme de la limite imposée. vous l’atteignez. vous êtes jeunes. trop. vingt-six ans, c’est à peine le début. t’étais pas préparée à ça. tu ne t’attendais pas à ça surtout. parce qu’il a fini par partir. alors que toi tu t’attendais à voir la bague. c’est la valise que t’as vue. un coup en plein cœur. une situation que tu comprends pas. il te dit que c’est toi. que t’as changé. peut être. mais c’est lui qui a tout détruit. en partant. pas toi. mais au fond de toi. peut être qu’il a raison. tu veux pas trop l’admettre. c’était ton premier amour. celui que t’as aimé durant dix ans. peut être que t’as fini par l’aimer plus par habitude que par désir. c’était devenu une mécanique pour toi. une routine qui a fait mourir votre couple à petit feu. + tu voulais alors l’oublier. parce que finalement tu l’avais dans la peau. dix ans, c’est pas rien pour un couple. c’est une éternité en années hollywood. tes amies ont fini par te conseiller d’aller t’amuser. d’oublier grâce à d’autres bras. tu les as suivi. c’était pas trop ton truc. mais au final, tu t’es laissée entrainée de bon cœur. ca t’a fait du bien. de simplement te laisser aller. t’as bu. t’as dansé. et t’as failli être avec un autre gars. un inconnu qui te plaisait pas mal. mais t’as fini par abandonner. par te recroqueviller comme une petite fille terrifiée. + mais de cette soirée t’en retiens autre chose. cette fille. tu l’as vu de loin. tu lui as même pas parlé. t’es simplement passée. mais tu l’as vu. son regard. le genre de regard que t’as pas vu depuis longtemps. si ce n’est jamais en fait. c’était étrange. t’avais jamais envisagé autre chose. autre chose que les garçons du moins. dans les contes que te lisait ton père, y avait jamais deux princesses. ou deux princes. peut être que tu t’es formatée toute seule. peut être que quand t’as grandi et que t’aimais beaucoup des actrices, tu pensais que c’était rien. que t’étais comme tous les fans qui avaient parfois des crushs de même sexe pour les stars. c’est si simple quand c’est si loin. mais tu peux pas te mentir là. tu l’as senti. peut être que tu finiras par oublier tout ça. après tout, peu de chance que tu la recroises. alors que faut que t’arrêtes d’y penser. c’est sans doute mieux au final.