I Love you but i hate you ► Ausnow

Ce jour-là j’étais particulièrement excité car c’était la première fois que j’avais l’occasion de prospecter un client, ou devrais-je dire une cliente. D’habitude mon patron me mettait dans les pattes les personnes les plus détestables du milieu, toutes celles dont personne ne voulait s’occuper, si bien pour me rester, que pour être débarrassé. Aujourd’hui je faisais un nouveau pas dans ma carrière, j’avais un rendez-vous d’affaire pour le déjeuner avec un jeune mannequin qui commençait à faire fureur et que tout le monde s’arrachait, oui mais le hic était qu’elle avait tendance à s’emballer un peu trop et à finir dans les tabloïds dans des positions assez suggestives.

En discutant avec elle, je compris bien vite qu’elle tentait plutôt de me draguer que de m’interroger sur mes capacités à être son attaché de presse. Je me pris au jeu histoire de conclure l’affaire, après tout peu importe la manière dont j’aurai obtenu cette signature, tant que tout le mérite m’en revient. Malheureusement, je descendis bien vite du petit nuage sur lequel je me trouvais lorsque Snow fit son apparition, comme une furie elle renversa son café sur ma cliente tout en jouant les divas avant de s’en aller. J’étais comme qui dirait complètement étonné de la voir ici, mais en même temps agréablement surpris qu’elle ne s’en soit pas prise à moi alors que je n’avais pas hésité à la tromper lorsque notre histoire était devenue un peu trop sérieuse à mon goût. Les sentiments profonds et moi ça faisait deux il fallait avouer. Par contre ma cliente démarra au quart de tour et me mit tout sur le dos, comprenant que je n’étais qu’un enfoiré qui collectionnait les filles. J’essayais de lui expliquer que c’était l’ancien moi et qu’aujourd’hui j’avais changé et que j’étais sérieux dans ma démarche avec elle, mais elle ne voulut rien entendre. Je déposais de l’argent sur la table rapidement pour régler l’addition avant de me lancer à la poursuite du fauteur de trouble qu’était la jeune femme. Hey Snow ! Attends-moi ! Si tu avais l’intention de te donner en spectacle c’est réussi, tu viens d’avoir ta revanche tu m’as fait louper ma première occasion de faire mes preuves dans mon boulot, je te félicite. Alors qu’elle tentait de s’échapper, je me mit pile devant elle si bien que sans s’en rendre compte elle me percuta et se retrouva face à face avec moi, nos visage se frôlant presque. J’ai trouvé ça super mignon de ta part d’être jalouse certes, mais la prochaine fois essaye au moins de savoir si je compte la mettre dans mon lit ou pas avant de t’énerver. Je levais ma main, venant frôler son bras légèrement pour lui donner un frisson, un frisson que je ne connaissais que trop bien pour l’avoir ressenti moi aussi à plusieurs reprises à son contact. Avoue que tu me trouves toujours aussi irrésistible. Lui dis-je en riant. La taquiner était un art dans lequel j’excellais au plus haut point.

La jeune femme avait un aplomb qui me déstabilisait presque. Elle avait toujours ce même regard perçant qui à l’époque me faisait déjà craquer, et voir cette haine mélangé à l’amour dans ses yeux me rendait presque encore plus dingue d’elle qu’à l’époque. J’avais toujours été fan des relations compliquées, je n’étais pas un mec facile et non je n’étais pas non plus du genre fidèle. Pourtant elle était sans doute la première fille à m’avoir fait douter sur ce point, j’étais prêt à m’engager, je l’avais envisagé, d’ailleurs ce soir-là j’allais lui demander d’être ma petite amie officiellement. Cela dit, après une réflexion qui avait duré le temps d’une soirée dans un bar, j’avais décidé que c’était plus simple pour moi de tout gâcher plutôt que de faire face à mes sentiments. L’amour après tout, qu’est-ce que ça apporte de bon ? On finit par souffrir, par être malheureux et finalement on recommence encore et encore dans l’espoir que ce soit différent alors que ça ne l’est vraiment jamais. Je fis le mec déconcerté lorsqu’elle m’accusa de prévoir de coucher avec la jolie blonde qui partageait ma table auparavant. Non mais arrête tu es ridicule, bien évidemment que j'envisageais de coucher avec elle en dehors de ma réunion de travail, elle est jolie, je suis célibataire et je suis un homme. Je n’arrive pas à croire que tu ais fait ça… je riais immédiatement après avoir fini ma phrase car au final voir cette fille pleine de café et tempêter contre moi alors que je n’y étais vraiment pour rien avait été une belle distraction. Okay j’allais certainement prendre cher de la part de mon patron mais il fallait avouer que ça valait le coup. Malgré tout je sentais bien que je ne la laissais pas insensible, elle avait toujours des sentiments pour moi-même si elle essayait de le nier par tous les pores de sa peau. Je savais que je lui avais fait du mal et je le regrettais profondément mais ce n’était la faute de personne, simplement de mon immaturité. Tu crois que j’ai envie de rire ? Tu pourrais au moins me regarder dans les yeux au lieu de m’éviter après ce cirque que tu viens de me faire. Lorsqu’elle se recula brutalement, je n’hésitais pas un instant a refaire un pas vers elle. Je la pris contre moi, posant ma main dans le creux de son dos et venant l’embrasser comme j’avais l’habitude de le faire auparavant. Moi aussi je suis content de te revoir, Snow. Ajoutais-je sans appel avant de finalement me détacher d’elle, toujours ce petit rictus amusé au coin des lèvres. Je savais que la manière dont je m’y prenais était loin d’être orthodoxe mais je ne pouvais pas simplement reproduire les même erreurs qu’auparavant, je devais au moins régler cette histoire, trop de personnes en avait souffert, et moi plus qu’elle ne le pensait.

Elle n’arrivait sans doute plus à penser clairement, j’aurais voulu avoir dit qu’elle était jolie simplement pour l’embêter mais à vrai dire, elle l’était réellement et c’était bien évidemment ce qui devait l’embêter. Après tout, elle était aussi d’une beauté à couper le souffle et n’avait sans doute rien à envier à un mannequin de renom. Elle avait tort d’être jalouse d’elle, car s’il y avait bien une chose dont elle pouvait se vanter, c’était de m’avoir permis d’aimer pour la première fois, bien que je me sois refusé à l’accepter. Cela me tuait de l’admettre mais elle me faisait quelque chose même après toutes ces années j’avais du mal à me dire que tant de temps était passé car pour moi c’était comme si je ne l’avais jamais quitté. Arrête de l’insulter s’il te plaît tu vaux mieux que ça, tu sais très bien que tu es magnifique toi aussi, et encore plus quand tu t’énerves d’ailleurs, voir cette petite fossette sur ton visage a été la première chose qui m’a fait craquer quand tu t’acharnais sur moi. Je notais chaque réaction qu’elle avait, chaque geste, chaque impression qu’elle me donnait pour pouvoir comprendre si elle m’en voulait réellement ou si j’avais encore une chance de pouvoir faire amende honorable et qu’elle me pardonne. Je me doutais bien qu’elle ne voudrait sans doute pas me sauter dans les bras et faire comme si rien ne s’était passé, mais je ne voulais plus faire du mal autour de moi comme à l’époque où j’étais pratiquement un junkie, j’avais changé et maintenant la seule chose qu’il me manquait était de tomber amoureux, de tomber réellement amoureux. Je n’avais pas eu la chance de le ressentir car ce sentiment était pour moi comme une malédiction. Après avoir découvert que j’avais un frère jumeau, le mystère s’était enfin éclairci, si je n’avais jamais pu aimer quelqu’un d’autre c’est simplement que cela ne suffisait pas à combler le grand vide qu’avait laissé la perte de mon jumeau, de la seule personne qui pouvait comprendre comment je fonctionnais même si nous étions totalement différent. Ce problème étant maintenant pratiquement résolu, je pouvais enfin me pencher sur autre chose, sur ma peur de m’engager, ma peur de m’ouvrir et de laisser quelqu’un me rendre vulnérable. Tu penses vraiment pouvoir me faire peur ? Tu n’as jamais été capable de me faire du mal, il n y a que moi qui ait réussi à l’époque à te détruire, tu crois que tu auras plus de chance aujourd’hui ? Je lui parlais presque sèchement même si ma voix restait tout de même calme et posée. Je ne voulais pas la faire fuir, tout ce que je voulais c’était une deuxième chance. Maintenant arrêtons de jouer un moment, je ne t’ai jamais oublié, j’ai fait une énorme connerie en couchant avec cette fille et ça ne voulait rien dire pour moi, si je l’ai fait c’était seulement pour que tu me vires de ta vie. Parce que je pensais que je ne te méritais pas à l’époque mais maintenant j’ai changé. Une fois ma tirade terminée je la lâchais enfin, presque dégouté d’avoir pu ouvrir mon cœur à ce point, c’était si nouveau pour moi que je ne le supportais pas, je lui tournais le dos pour commencer à marcher, j’avais le vent dans les oreilles, j’espérais secrètement qu’elle était toujours derrière moi, qu’elle me bondirait sur le dos comme avant mais ça c’était avant.

Tandis que j’avais réussi à lui faire perdre ses derniers repères, j’étais parti, parti sans crier gare, j’en avais assez de cette image erronée qu’elle avait de moi, je me rendais compte qu’à l’époque où je l’avais connu j’étais quelqu’un de mauvais, de toxique pour elle et même si je pouvais parfois être le plus génial des petits copains, il suffisait d’un claquement de doigt pour que je devienne le pire des enfoirés. Aujourd’hui, elle réveillait ces vieux démons en moi, une fois de plus j’essayais de m’ouvrir à elle sans vraiment y arriver, tout ce que je faisais c’était lui enfoncer encore et toujours un poignard dans le cœur. Tandis que je marchais, je m’arrêtais net, fermant les yeux et soupirant, je baissais la tête dans le vide réfléchissant à tout ce qu’elle venait de me dire. Je la dégoutais, elle aurait certainement voulu ne jamais avoir croisé ma route, et pourtant je sentais au plus profond de mon être qu’elle était toujours amoureuse, je ne comprenais pas pourquoi elle refusait de me pardonner, je venais de lui prouver que je pouvais être un gars complètement différent. Je n’avais aucune idée du fait que je l’avais atteinte aussi profondément. Machinalement je m’étais retourné pour voir si elle était toujours dans mon champ de vision, et je m’aperçus bien vite qu’elle était là, elle était assise désemparée, des larmes coulant sur son visage, des soubresauts la prenant de temps à autre marquant clairement le profond chagrin qu’elle ressentait. Je revins doucement vers elle, une boule était coincée au fond de ma gorge, j’avais presque le souffle coupé, je ne voulais pas de ça pour elle, comme elle l’avait dit elle méritait bien mieux que ça. Snow… écoute je suis désolé si à l’époque j’étais un gros enfoiré, et te revoir ici ça n’a fait que ressurgir mon côté idiot. En réalité, j’ai changé et je sais que c’est un peu tard mais j’aimerais m’excuser. Je savais que ce ne serait sans doute pas suffisant mais ce poids sur mes épaules était devenu trop lourd à porter, je voulais non seulement oublier mon ancienne vie pour me concentrer sur ma vie d’adulte mais aussi régler les problèmes que j’avais pu causer auparavant. Bien évidemment j’étais toujours un connard imbu de sa personne, mais ce n’était pas pour autant que je désirais faire souffrir ceux que j’aimais. Etre une déception pour mes parents avait déjà été suffisamment cuisant comme échec pour en plus finir complètement seul et abandonné. Je m’asseyais face à la jeune femme, prenant sa main un instant, sachant qu’elle la retirerait sans doute bien vite de mon étreinte. J’aimerais bien être le mec que tu mérites d’avoir, mais c’est dur pour moi. Je n’ai pas l’habitude de tout ça et à l’époque c’était même inconcevable que je sois dans une relation durable avec quelqu’un. J’avais déjà du mal à m’occuper de moi-même, alors avoir une copine… enfin bref tout ça pour dire que je ne t’embêterai plus, tu m’as oublié, tu as tourné la page et je ne mérite pas ton pardon de toute manière. je m’affalais dans ma chaise, résolu à entendre son verdict, le jugement affreux qui viendrait me rappeler à quel point je n’étais pas digne d’aimer ou d’être aimé.

Sans un mot, sans un geste, je restais là à la regarder s’effondrer, elle ne se gênait pas pour me rappeler toutes les conneries que j’avais pu faire, elle les énumérait même. C’était presque risible, comme sortit tout droit d’un livre d’histoire où le méchant aurait voulu tester les limites de la balle princesse jusqu’à ce qu’elle périsse par sa faute. Dans notre cas j’étais bien évidemment le méchant garçon, malgré tout je ne pouvais pas passer ma vie à m’excuser, j’avais fait le maximum elle n’allait pas non plus passer sa vie à pleurer pour moi ou à me regretter il était temps de grandir, de devenir adultes et de ne plus se laisser prendre au piège dans des histoires de sexe et des amourettes de quelques semaines. Elle avait l’air plus forte au début c’est certains, mais le fait de me revoir après tout ce temps avait sans doute fait l’effet d’un électrochoc sur elle, et j’en venais à espérer que nous ne nous soyons pas croisés. Ecoute Snow, je ne peux rien faire de plus, ce qui est fait est fait, je me suis excusé, je sais que ça ne répare rien mais j’espère que tu comprends que je suis sincèrement désolé. Laisse-moi te prouver que j’ai changé, je sais que tu tiens encore à moi, et moi aussi je tiens à toi, je ne veux pas qu’on se quitte comme ça sur des pleurs et des cris. Qu’est ce que je pouvais faire de plus ? Rien. J’avais envie de l’emmener loin de tout cela, le bruit de la rue, le regard des gens m’indisposait, mais il fallait avouer aussi qu’elle faisait un cinéma digne des plus grandes actrices, je n’allais pas me mettre à genoux pour la supplier de me pardonner non plus, si elle ne jouait pas les gamines l’espace d’un instant elle comprendrait que je n’étais plus le même, et qu’il était temps de laisser le passé au passé. Un cœur brisé peut toujours se réparer au fur et à mesure du temps et je lui offrais cette chance. Malheureusement elle préférait sans doute vivre avec les regrets de notre relation ratée, c’était dommage pour elle, je n’allais pas la poursuivre, ou même lui faire la cour pendant des heures, ce n’était pas mon genre et elle le savait très bien. Moi tout ce que je cherchais en ce moment c’est quelque chose de simple, que ce soit sérieux ou non j’étais prêt à l’assumer, mais je voulais que les choses soient claires. Plus besoin de tourner autour du pot, cela ne vaut que pour les filles que l’on veut mettre rapidement dans son lit, pas pour des filles comme Snow pour qui je ressentais quelque chose de fort. Mais il fallait croire que j’avais passé mon tour, ma chance était désormais bien loin et je devais me rendre à l’évidence même si elle m’aimait encore de toute façon elle ne pourrait jamais me pardonner mes actes. Bon je dois y aller, je pense que mon patron doit se demander où je suis passé, si je ne suis pas déjà viré d’ailleurs, si tu veux vraiment qu’on discute et pas entre deux cris ou deux pleurs, rejoins moi chez moi ce soir, voilà ma carte mon adresse est juste en bas. Si tu ne viens pas je saurai que c’est définitivement terminé et si tu viens alors inutile de me reprocher les choses du passé, je suis ici pour repartir à zéro et pour grandir un peu, pas pour être le gosse de riche à qui tout est dû que tu as connu. Je vins lui donner un baiser sur le front tandis que je me levais pour partir, puis sans plus de cérémonie, je repris ma route et monta dans le premier taxi qui se trouvait là, c’était bien trop dur pour moi d’entendre tous ces reproches en pleine face alors que j’essayais d’y échapper depuis si longtemps