(✰) message posté Ven 17 Avr 2015 - 18:42 par Will T. Stark
j’aimerais être un flan. un flan aux abricots.
Thomas & Joey.
Un jeu de crétin ? Peut-être bien, mais c’était notre jeu ! ✻✻✻ Si ça continuait j'allais être en retard. Cela ne changeait pas de d'habitude cependant, je suis toujours en retard. Même avec toute la bonne volonté du monde, j'étais sûre que j'arriverais encore à être en retard, alors je n'essayais même plus de prendre de l'avance. Seulement, il fallait quand même que je me dépêche un peu plus, sinon j'allais vraiment être très en retard. Et comme je devais aller travailler, il ne fallait peut-être pas que j'abuse encore. J'étais arrivée assez souvent en retard au barfly et je me doutais qu'à un moment ou un autre, ils ne l'accepteraient plus. Le souci était que j'avais besoin de se travail. Parce qu'il était bien beau de ne pas vouloir se faire aider par ses parents, encore fallait-il pouvoir y parvenir. Et je préférais faire des efforts que de dépende d'eux. Ou pire encore, que de devoir demander de l'argent à mes frères et sœurs. Tout, mais pas ça. Enfilant le tee-shirt avec le logo du bar, j'enfilais le premier jean qui me tombait sur la main, avant d'essayer de mettre mes chaussures en même temps. Bien évidemment, c'était totalement mission impossible et je réussis seulement à perdre plus de temps. Allumant une cigarette, je pris ma veste et mon sac, avant de partir presque en courant pour tenter encore d'arriver à l'heure. Peine perdue, j'avais déjà cinq minutes de retard. Une fois en bas de l'immeuble, j'eus l'impression que j'allais mourir, d'avoir essayé de courir pour descendre les marches. Je jetais ma cigarette, avant d'entrer dans le métro, tout en envoyant un message pour prévenir que j'étais coincée dans le métro. L'excuse la plus facile, qui était à moitié vrai. J'arrivais enfin, avec plus d'un quart d'heure de retard, totalement essoufflée. Un poumon n'allait pas tarder à se faire la malle, j'en étais sûre. « Désolée... Le métro... Coincée... » Les gros yeux de mon patron, me montraient bien qu'il était sceptique, mais ne dit rien. Rapidement, j'allais poser mes affaires avant de commencer mon service. Ce n'est pas le meilleur boulot du monde mais j'en avais eu des pire. Et puis les bons jours, il est facile de se faire des bons pourboires et c'est une très bonne motivation supplémentaire pour rester ici. Je ne peux pas me plaindre. Le job est cool, mes collègues aussi et dans l'ensemble les clients sont sympa. Il arrive que des gros lourds se posent ici, mais ils sont rapidement remit à leur place. Non, vraiment j'aurais pu trouver bien pire. Pourtant, cela ne m'empêche pas d'arriver en retard ou bien de faire juste ce qu'il faut. Je ne suis pas de celle qui se tue au travail, loin de là. Si j'avais pu gagner de l'argent sans rien faire, j'aurais tout de suite signé. Malheureusement, la seule option possible pour cela était de demander de l'aider à ma famille et c'était hors de question. Je ne veux pas leur donner une raison de plus de me voir comme la grosse naze de la famille. J'arrive très bien à me débrouiller toute seule ou presque. Il m'arrive de demander de l'argent à mes parents, mais c'est assez rare et c'est vraiment une de choses dont je suis la plus fière. Être indépendante, est une chose que j'ai attendue toute ma vie. Ce n'est pas pour rechuter maintenant.
Après plus de deux heures de services non stop, je m'autorise une pause cloque, pas vraiment approuvée, mais plus que nécessaire. Deux heures sans cigarettes c'est déjà très long. Mais dans heures sans cigarettes à travailler et à supporter des gens c'est encore pire. Malheureusement, cela ne dura pas et rapidement, j'étais de retour dans la salle à servir des clients encore et encore. Le mode pilot automatique activé, le sourie coincé sur mon visage, comme si j'étais la fille la plus heureuse du monde. Je déteste cela, mais c'est un fait vérifié, un sourire aide à avoir plus facile un pourboire. Tout comme un décolleté. Manque de chance, les tee-shirt d'ici, ne sont pas prévus pour cela. Il faut donc redoubler d'effort pour arriver à gratter un peu d'argent en plus aux clients. Et il y a des jours, ce n'est vraiment pas facile. Aujourd'hui est un de ces jours. Depuis le début de mon service, n'ai pas pu réussir à me faire deux pounds de plus, ce qui est vraiment ridicule. Pour ce prix-là, je pourrais arrêter de sourire comme la reine des imbéciles, mais non. Je sais très bien, que si je le fais, je vais me faire engueuler et je n'ai pas besoin de cela en plus. Nouvelle table, nouveaux clients et un visage qui ne m'est pas inconnu. Je bloque complètement, ayant l'impression d'être en train d'halluciner. Mais non, j'en suis sûre, je connais cette personne. « C'est pas possible. Qu'est-ce tu fais ici ? » Je suis sûre de moi, même si quelque part une petit voix, me dit qu'il vaudrait mieux que je ne me plante pas. Mais non, c'est bel et bien Thomas devant moi. Je savais qu'il habitait à Londres par sa cousine, mais de là à le croiser ici, c'était deux choses totalement différentes. Je ne l'avais pas revu depuis la France, Paris plus exactement. C'était marrant, parce qu'à l'époque j'étais déjà serveuse, même si nous étions dans un autre pays désormais. Le temps avait passé aussi, mais je l'avais reconnu immédiatement. Je n'avais pas pu l'oublier, lui qui arrivait à m'énerver à peu près tout le temps, comme s'il avait un don pour cela. Même si j'avais réussi à rester véritablement énervé contre lui très longtemps. Je n'aurais pas pensé le croiser ici, ni ailleurs d'ailleurs. Normalement Londres était suffisamment grand pour réussir à ne jamais se voir. J'étais pourtant contente de le voir, dans le fond je l'aimais bien, même si jamais je ne lui aurais dit. Je n'avais pas envie qu'il choppe la grosse tête non plus. Ma seule hantise était qu'il puisse me parler de sa cousine, que je me faisais un point d'honneur à ne penser. « Qu'est-ce que je vous sert ? » Il ne fallait pas non plus que j'oublie ce pourquoi j'étais là. Servir les clients et rester agréable. Deux choses totalement incompatibles de nature pour moi.
(✰) message posté Sam 25 Avr 2015 - 15:48 par Invité
Je m’écrasai lentement contre la table. Je n’entendais rien. Enfin, presque rien. J’étais crevé, comme d’habitude. Et il était trop tard pour songer à rentrer. Peut-être que j’allais m’endormir ici. Vous vous posiez sûrement la question. Pas moi. Moi, je savais que je ne dormais pas. Que ce soit dans mon lit ou accoudé à la table d’un bar, cela ne changeait strictement rien. Il fallait que ça change. Il fallait que je trouve un moyen de récupérer mes heures de sommeil. Mes jours de sommeil. Mes années de sommeil. Sauf qu’elles étaient parties mais que j’étais resté, comme un con, là, à me dire que ça allait s’arranger. J’étais assez vieux pour comprendre qu’une fois qu’on était résigné, rien ne s’arrêtait jamais. On tombait et puis, finalement, n’était-ce pas tout aussi confortable de rester sur le sol ? Je n’avais pas vraiment la force que me relever, quoiqu’il arrive. Et alors j’étais là, au fond d’un bar, et je décidai de m’éteindre jusqu’à ce qu’un serveur daigne m’apporter quoique ce soit. Vodka, probablement. On ne pouvait pas fumer à l’intérieur ? Bordel, la nuit n’était pas assez avancée pour cela. Je serrai les dents. L’alcool comme remède à mon absence de faim ? Histoire d’oublier à quel point j’étais pathétique et misérable, tapi dans l’ombre, la peau blafarde, la barbe mal rasée ? Je ne m’attendais plus à rien. Je voulais écouter mais n’entendais plus grand-chose. On jouait sur une sorte de petite scène aménagée. Quelques reprises de vieilles chansons de blues que j’avais connu par cœur, il y a longtemps. Quelque chose d’assez hypnotisant, qui me berçait presque, mais pas moyen de me rappeler du morceau en question. La voix du chanteur était trop nasillarde, le rythme de la batterie trop lent, les accords de guitare trop mous. J’étais bien critique pour un type qui ne savait jouer d’aucun instrument et dont la voix était rauque et grave, plus vraiment capable de chanter. J’ai pu, un jour, mais plus aujourd’hui, c’était ça, ma putain de devise. Ma putain de résignation, comme si je ne voyais plus que ça au milieu des ruines et que je me forçai à m’y plonger parce que j’avais presque peur de voir le reste. Thomas, t’es qu’un pauvre lâche. Les résignés assument, toi tu te caches. Ouais. Personne ne me trouverait. J’étais au moins fort à ce jeu-là. Rien n’était perdu lorsque l’on ne se rendait pas compte de la défaite.
« C’est pas possible. Qu’est-ce que tu fais ici ? » Des mots qui me semblaient assez proches pour m’être adressés. J’ouvris les yeux et me redressai lentement pour constater la présence d’une jeune fille devant moi, le regard absolument surpris et un certain agacement au fond de la voix. Mais t’es qui, je te connais, toi. Son visage éclaira mon esprit : il fallait que je la retrouve, que je fouille assez rapidement dans ma mémoire pour y attraper le bon souvenir. Heureusement que je n’avais pas encore eu ma vodka quotidienne. Joey. Un nom qui, à l’instant même où il apparut dans mon crâne, me fit sourire. Joey, la gamine un peu folle qui traînait avec ma cousine. Que j’avais complètement perdu de vue d’ailleurs, la dernière fois que j’avais croisé ses cheveux raides et brillants, elle arpentait sans relâche les rues de Paris à la recherche d’aventures. Oh, c’était une fille sympa. Assez électrique et un peu arrogante. Le genre que j’aimais emmerder parce que, étrangement, ça ne me lassait jamais de le faire. Probablement parce que c’était facile, mais Joey avait le don de me faire rire lorsqu’elle s’emportait pour si peu – peut-être que mon « si peu » était son « c’en est trop », après tout. L’échelle de la résistance. C’était parce qu’elle était trop jeune. Elle n’était pas encore résignée. Je jetai des coups d’œil à droite et à gauche puis relevai mon regard vers elle et imitai son air surpris en haussant les sourcils de manière exagérée. « Bah si, c’est possible. C’est bien moi. » Je me penchai en avant et m’accoudai à la table, amusé. « J’m’ennuie. Ce type chante faux. » conclus-je en désignant le leader du groupe qui reprenait les classiques d’un geste mou. Une lueur moqueuse se logea dans mes prunelles lorsque Joey se força à adopter à nouveau une attitude professionnelle. « Qu’est-ce que je vous sers ? » Oh, tu me vouvoies maintenant ? C’en était presque surprenant, elle risquait de me faire sursauter si elle continuait les sauts d’humeur. Je pianotai sur la table, l’observant quelque secondes avec malice avant de figer mes doigts maigres et lui répondre : « Un black russian, s’vous plait. » Parce que de un, non, je ne changeais jamais ma boisson au bar et de deux, autant la vouvoyer avec désinvolture moi aussi. Ce n’était pas comme si c’était franchement important. Les rencontres fortuites de ce genre faisaient presque partie d’un autre univers. Elle s’éclipsa et je m’éteignis de nouveau, non sans suivre sa silhouette des yeux jusqu’à ce qu’elle disparaisse. Joey Marshall. Une sacrée gamine, ouais. Je me permettais de la considérer comme telle parce qu’on avait plus de dix ans de différence, pas vraiment parce que je la trouvais immature. Au contraire. Elle était même plutôt indépendante et responsable. Avec des défauts, comme tout le monde, mais elle m’avait laissé un souvenir positif à l’époque. Je ne savais pas vraiment ce qu’elle pensait de moi, à part que j’étais chiant – cependant ça ne comptait plus vraiment, ça, n’est-ce pas ? J’étais le cousin de sa copine. Je n’avais pas vu Artémis depuis longtemps d’ailleurs, c’était peut-être l’occasion de prendre de ses nouvelles. Mais ce que Joey foutait à Londres, mystère. Elle ne tarda pas à revenir avec ma boisson. J’avais posé mon menton sur mes bras croisés et clignai simplement des yeux en souriant pour la remercier. Puis, avant qu’elle ne reparte, ma voix grinça : « Si t’as rien à faire pendant ta pause clope, t’auras qu’à venir me voir. » Tant de choses à savoir. Tant de questions à poser. Tant de minutes à passer à griller des cigarettes en faisant tout pour l’emmerder.
Je ne sais combien de temps plus tard, je me levai et sortis du bar. Je m’adossai au mur, en retrait, évitant la lumière du lampadaire qui jouxtait la porte d’entrée. Je regardai le ciel et craquai mon allumette avec détachement. Je n’avais plus vraiment conscience de fumer. C’était le sixième doigt de ma main terrifiante. Brûlant et corrosif. Je tournai la tête quelques minutes plus tard. Je devais en être à ma seconde cigarette. Des gens sortaient du bar en riant pour allumer les leurs. Et je tombai inévitablement sur la silhouette attendue. Je me décollai du mur et lui fis face, satisfait qu’elle soit finalement là. Je cherchai mon paquet et mes allumettes dans ma poche puis lui lançai. « Attrape. » Joey méritait bien que je lui offre une clope ou deux. Et puis, ça me faisait presque plaisir, quelque part au fond de moi, de la voir ainsi dans un contexte si différent. Comme si je pouvais à nouveau tout apprendre d’elle. Dommage que je ne puisse pas lui rendre la pareille : on n’apprenait plus rien de moi depuis longtemps. Je crachai la fumée et penchai la tête. « Tu te tapes encore ma cousine ? » Ma voix était parfaitement calme, à peine insolente. Mais c’était brusque. Je ne savais même pas si elles se voyaient encore. Si elles étaient mariées ou si elles se haïssaient. Je m’en moquais. Je voulais juste faire réagir Joey en étant direct et franc. Mon côté fantaisiste allait apparaître bien assez tôt, il ne fallait pas qu'elle s'inquiète.
Will T. Stark
MEMBRE
» Date d'inscription : 26/03/2015
» Messages : 7237
» Pseudo : stardust. (Margaux).
» Avatar : /
» Âge : /
(✰) message posté Sam 23 Mai 2015 - 1:31 par Will T. Stark
j’aimerais être un flan. un flan aux abricots.
Thomas & Joey.
Un jeu de crétin ? Peut-être bien, mais c’était notre jeu ! ✻✻✻ Décidément, j'allais réellement finir par me demander si j'avais bien fait de venir m'installer à Londres. Je savais dès le départ, que cela n'allait pas forcément être le plus évident, étant donné que presque tous mes frères et sœurs habitent la ville aussi, mais retrouver des personnes du passé, c'est assez perturbant. Je ne m'étais pas attendu à tomber sur Thomas, surtout ici-même au Barfly. Thomas, le cousin d'Artémis, je n'avais pas pensé à lui depuis... En réalité, je n'ai jamais pensé à lui. J'ai toujours été plus intéressée par sa cousine et inversement. J'avais toujours vu Thomas avec elle, nous n'avons jamais été amis, seulement des connaissances. La différence d'âge avait été une des raisons principales au fait de ne pas avoir cherché à faire plus amples connaissances. La deuxième, c'est qu'il avait toujours eu le don de m'énerver. Un don et je pense une énorme envie de me mettre hors de moi à chaque fois. Je n'ai jamais su comment il était toujours parvenu à réussir à m'énerver aussi facilement. Peut-être que je prends les choses trop à cœur aussi. Mais c'est sûrement un mélange des deux qui m'avait donné envie de le pousser sous un bus, lorsque nous nous étions vus. Je garde cependant, aussi des bons souvenirs de soirées passées avec lui et Artémis. Artémis, j'avais essayé de ne pas penser à elle, sans réellement de succès. Et tomber sur son cousin ce soir, ne va sûrement pas m'aider. Une chance que je n'ai pas bue d'alcool où je serais bonne pour l'appeler et dire des choses que je pourrais regretter. Le problème c'est que, là tout de suite, je suis au travail et que je n'ai pas le temps de penser à mon ancienne copine dans l'immédiat. Je suis simplement ici pour sourire, servir des gens et ne pas me laisser déborder par mes souvenirs ou autre chose personnelles dans le genre. De toute façon, je n'ai pas envie de penser à elle. Cela ne servirait à rien, alors autant éviter de me faire du mal pour que dalle. Non, pour le moment, je suis une gentille serveuse, qui attend de prendre la commande de son client, avant d'aller faire la-dite commande et se plaindre auprès de ses collègues. Je hausse des épaules avant de lui répondre, « désolée, mais c'est la soirée au rabais. Les bons chanteurs ne sont là que le weekend. » Moi aussi je peux prendre un ton blasait pour parler. Il a pourtant raison, ce type chante faux et si quelqu'un pouvait aller l'achever, ce serait fortement apprécié. Mais je ne peux pas, alors en attendant de prendre sa commande, je tape machinalement taper mon crayon contre mon carnet. Je n'en ai même pas besoin, pour une seule commande, mais c'est une habitude que j'ai prise. Je ne bosse pas ici depuis très longtemps et pourtant, j'ai l'impression d'avoir été serveuse toute ma vie. Le pire dans tout cela ? Je n'aime même pas être utile et servir les gens. Mais c'est bien payé, je peux boire gratuitement et je n'ai pas le courage de chercher un autre boulot pour le moment. Je hoche la tête pour lui faire comprendre que j'ai enregistré sa commande, avant de me diriger vers le bar. Thomas, ici. C'est bizarre quand j'y pense. Après tout ce temps, loin de Paris et pourtant, nous voici réunis à Londres. je croirais à ces conneries de destin que je serais déjà en train de me dire que je dois appeler sa cousine. Mais non. C'est simplement une coïncidence, pas de quoi en faire toute une histoire.
Le temps de donner une addition à une autre table, je suis de retour pour lui servir son verre. Je ne m'attends à rien, je ne suis même pas sûre que nous ayons quoique ce soit en commun de toute façon. Je me contente de poser son verre et m'apprête à repartir, quand il me propose de se parler pendant une pause cloque. J'essaie de ne pas penser à ne cigarette, sinon je vais être détestable jusqu'à ce que j'ai terminé mon service. Il me reste moins d'une heure à faire, mais je ne sais pas s'il sera encore là, passé ce temps. Je verrais cela tout à l'heure. Je me contente d'un « okay », en guise de réponse, avant de retourner faire mon boulot. Je n'ai rien de prévu après le boulot et je n'ai rien à perdre, alors pourquoi pas essayer de fumer une cigarette, faire semblant de vouloir savoir ce que devient l'autre. Pourquoi pas évoquer des souvenirs et continuer chacun notre vie dans notre coin. Attendant la fin de mon service, avec une grande impatience, principalement pour pouvoir fumer, mais aussi pour pouvoir arrêter de jouer les serveuses, je continue de travail comme il se doit jusqu'au dernier moment. Ce n'est pas encore la fermeture du bar, heureusement pour moi, j'échappe à cela ce soir. Une fois l'heure arrivée, je termine ce que je fais, pose des affaires, change de tee-shirt et sort dehors. Je n'ai sur moi que mon paquet de cigarette, briquet et mon téléphone. Je n'ai pas besoin du reste pour le moment. Je ne sais pas s'il est encore là, cela sera la surprise. Je mets à peine le pied dehors, que je me retrouve face à lui. J'ai soudainement l'impression d'être revenue en France. Réflexe je tends le bras quand il me lance quelque-chose. Des cigarettes et des allumettes, parfait. J'en sors une du paquet, craque une allumette et d'un seul coup, c'est le paradis. Sa question est légèrement étonnante, j'en conclus qu'il ne doit pas avoir parlé à Artémis depuis un moment, ou bien elle ne parle pas de moi. Je ne sais pas lequel des deux me rendrait le plus triste. Je garde son paquet dans la main, tire de nouveau sur ma cigarette, avant de lui répondre. « T'attaques directement hein ? Non, elle est repartie en Irlande. » C'est la version courte. La plus simple et facile à raconter. Elle ne se sentait pas bien ici, elle a décidé de repartir, moi pas. Fin de l'histoire. Je prends une deuxième cigarette de son paquet, avant de m'avancer pour le lui rendre. « Londres. Qu'est-ce que tu fais ici ? » Je me rends compte que finalement je ne le connais absolument pas. Je n'ai jamais cherché à le connaître, ce qui explique tout. Il était le cousin d'Artémis, point barre. Rectification il était le cousin pénible, d'Artémis. Dans le fond, je me fou de savoir toute sa vie et de le connaître réellement, mais se retrouver ici, ce soir, c'est quand même marrant. Enfin, c'est surtout étrange. Je ne me souviens pas qu'elle m'ait parlé qu'il habitait ici. Ou peut-être que si et je n'ai pas écouté. L'un dans l'autre, cela revient au même c'est une surprise totale. Du genre, à me faire penser à Paris et à elle. Je m'adosse au mur, un peu en retrait de la porte d'entrée, je n'ai pas envie de passer mon temps à voir les clients entrer et venir. Je les supporte assez pendant mes services. « J'en conclus que vous ne vous êtes pas parlés depuis quelques temps. Ou bien qu'elle ne parle pas de moi. » Je tire de nouveau sur ma cigarette, simple constatation. Je n'ai aucunement envie qu'il ai pitié de moi. Notre histoire fait partie du passé, je m'y suis faite. Mais c'est toujours agréable de savoir que l'on a compté dans la vie de l'autre.
(✰) message posté Mer 10 Juin 2015 - 22:31 par Invité
« Désolée, mais c’est la soirée au rabais. Les bons chanteurs ne sont là que le weekend. » Je fis la moue, presque déçu. Elle avait cette sorte de regard assassin qu’elle m’avait toujours lancé lorsque je l’ennuyais trop. Enfin, pas vraiment assassin. Plutôt assez désinvolte et je-m’en-foutiste, comme le mien dans mes bons jours. Mes yeux passèrent des musiciens à Joey et je la détaillai, un mince sourire aux lèvres. Le hasard, ma pauvre, quelle plaie n’est-ce pas ? J’aimais bien Joey. Elle était mignonne, téméraire, indépendante, amusante, avec son regard si jeune et ses manières si déplacées. Je haussai finalement les épaules, moqueur, et elle repartit vers le bar. Je suivis le mouvement de sa silhouette mais ma vue se brouilla vite. Trop de bruit. Trop de couleurs. Pas assez de lumière. Je reposai ma tête entre mes bras, épuisé. Je fermai les yeux un instant. La musique me berça malgré son manque de qualité. Je voulais dormir. Par tous les moyens. N’importe où. Cela n’avait aucune espèce d’importance. Je finis par ouvrir à nouveau les yeux pour attendre patiemment ma boisson.
Elle ne tarda pas à revenir et posa mon verre sur la table, ce qui me fit me redresser, finalement. Elle répondit à ma proposition d’un vague okay que je comprenais. Pourquoi avais-je décidé tout d’un coup de lui parler ? De saisir cette occasion ? Je m’ennuyais probablement trop et je n’avais pas l’habitude de croiser des têtes connues dans des endroits pareils. Les visages, je les oubliais. J’aurais pu oublier celui de Joey, mais étrangement son nom m’était revenu après une maigre réflexion. Peut-être parce que je l’associais à Artémis. La copine marrante de ma cousine. J’allais finir par désigner chaque personne avec ce genre d’étiquettes, à force d’égarer leur véritable prénom. Je pouvais soutenir des conversations sans jamais connaître celui de mon interlocuteur. J’étais assez fort, assez hypocrite. Je m’en moquais assez pour réussir à le faire. Mais Joey se souvenait de moi également. Je trouvais ça presque bizarre, presque inattendu. Nous nous connaissions à peine. Le cousin con de ma copine, voilà ce qu’elle devait se dire, voilà comment elle devait m’appeler au fond d’elle. Je pouvais la comprendre. Je n’avais jamais été tendre avec cette gamine. Toujours cinglant, réprobateur et sarcastique. C’était devenu une routine que j’aimais bien, jusqu’à ce que l’on se perde de vue. Jusqu’à ce qu’elle suive Artémis je ne sais où dans le monde. Jusqu’à ce qu’elle quitte Paris, que je retourne à Londres, que nos chemins se séparent, que l’on s’oublie. Je la regardai disparaître de nouveau puis sirotai ma boisson, pensif. Viendrait-elle ? Je l’ignorais. Elle aurait toutes les raisons de ne pas le faire. Je n’avais pas revu Artémis depuis quelques temps mais je savais qu’elle allait bien. Elle allait toujours bien. Je n’avais pas besoin d’une Joey sortie de nulle part pour le savoir.
« T’attaques directement hein ? Non, elle est repartie en Irlande. » Je plissai des yeux et recrachai la fumée de ma cigarette, amusé par sa remarque. Au cas où elle aurait oublié mon tempérament et ma franchise. Mais j’étais toujours là pour lui rappeler. Oh. Vous avez rompu. Dommage. Voilà les mots qui me traversèrent l’esprit. La situation était étrange. J’en comprenais presque son malaise, plus tôt dans la soirée. Je devais lui rappeler Artémis. Je devais lui évoquer des souvenirs auxquels elle ne voulait pas penser. Mais je n’étais pas Artémis. J’étais presque le contraire absolu de cette fille – c’était probablement pour cela que nous nous entendions si bien d’ailleurs. « Londres. Qu’est-ce que tu fais ici ? » Je haussai les sourcils et laissai échapper un petit rire amusé. « Figure-toi que je vis dans cette ville depuis longtemps. T’étais probablement pas née, je te pardonne. » Si, elle était née lorsque je m’étais installé à Londres, néanmoins je n’en manquais jamais une pour l’ennuyer un peu. N’as-tu donc rien d’autre à faire, Tom ? Mais non, non, justement. Joey sans Artémis restait Joey. Une autre femme. Et je n’avais rien d’autre à faire que de la redécouvrir ce soir. « Désolé pour vous deux. Vous étiez chouettes. » finis-je par lui souffler, saupoudrant mes mots d’une légère ironie, presque affective. Mais je ne mentais pas, pour une fois. J’avais passé des moments très agréables en leur compagnie, à découvrir la capitale française et ses nombreux secrets, ses nombreuses surprises. Joey était rafraîchissante. Je ne lui avais jamais dit et je ne comptais pas le faire, mais elle était le genre de fille qui ne voulait pas se convaincre que c’était le cas. Alors c’était inutile de vouloir essayer, elle s’en rendrait bien compte un jour. « J’en conclus que vous ne vous êtes pas parlés depuis quelques temps. Ou bien qu’elle ne parle pas de moi. » Elle avait adopté sa voix de jeune désabusée, un peu amère, histoire de me faire comprendre qu’elle en parlait sans vraiment en parler. Sans vraiment vouloir savoir ce que je pensais réellement. Je souris et finis par m’approcher d’elle. « Elle a tendance à disparaître de la surface du globe sans prévenir personne, donc non, on ne s’est pas parlés depuis un bon moment. Mais c’est pas grave, on va s’amuser sans elle. » répondis-je ensuite avec malice. Je passai à côté d’elle et jetai un coup d’œil à l’intérieur du bar, pensivement. Je ne voulais pas laisser Joey s’en aller, juste comme ça. L’idée de rentrer chez moi en traînant des pieds, de savoir pertinemment que j’avais perdu une nouvelle soirée dans ma vie, de me coucher sur mon matelas sans jamais réussir à m’endormir, cette fameuse idée me déprimait d’avance. Je m’adossai de nouveau au mur et tournai la tête vers Joey. « J’ai pas d’argent mais j’ai encore soif. Tu crois que ça pose problème ? » m’enquis-je alors, feignant la crédulité. « Ce serait bien que tu chopes une ou deux bouteilles au bar. Et à manger, pour une fois que j’ai faim. » Je ramenai ma cigarette à mes lèvres fines et étirées en un étrange sourire. « T’inquiète pas, je rembourse ce weekend. Tu m’as promis qu’il y avait de bons chanteurs. » Je passai ma main dans mes cheveux. Et on s’est promis tacitement qu’on allait pas parler de ma cousine, hein ? Ce serait con de briser l’ambiance.
Will T. Stark
MEMBRE
» Date d'inscription : 26/03/2015
» Messages : 7237
» Pseudo : stardust. (Margaux).
» Avatar : /
» Âge : /
(✰) message posté Ven 24 Juil 2015 - 19:36 par Will T. Stark
j’aimerais être un flan. un flan aux abricots.
Thomas & Joey.
Un jeu de crétin ? Peut-être bien, mais c’était notre jeu ! ✻✻✻ Le meilleur moment de ma journée est sans aucun celui de la cigarette après le service. Je ne peux bien évidemment pas fumer comme je le veux pendant le boulot, ce qui a tendance à me rendre encore plus sur les nerfs. Enfin de toute façon, n'importe quelle soirée fini par me mettre sur les nerfs. Je supporte difficilement les clients, encore moins quand il y a des enfants dans le coin, ce qui finit toujours par me rendre de mauvaise humeur. Bonne comédienne, du moins je le pense, j'arrive toujours à terminer mon service sans tuer personne ou crier sur un client. Mes collègues en revanche... Peut-importe, je ne travaillt pas pour me faire des amis, mais parce que j'ai besoin d'amis. Heureusement, il y a quand même quelques personnes avec lesquelles je m'entends bien, ce qui me facilite le travail. Il n'empêche que je suis toujours la plus heureuse du monde, quand arrive l'heure de mon service et que je peux, enfin, sortir pour m'en griller une. Ce soir ne fait pas exception à la règle. Encore mieux, je n'ai pas à sortir mon paquet, elle m'est offerte par Thomas. Tient, voilà une chose que je n'aurais pas cru possible. Je l'ai pas revu depuis la France, il y a longtemps. Nous n'avons jamais été amis, un peu plus que des connaissances à la limite, mais rien de plus. Il n'a rien à voir avec sa cousine et pourtant sa présence me fait penser à elle. Heureusement pour moi, je sais faire la part des choses. Pourtant, parler d'elle est un passage obligé. Elle est la seule chose que nous ayons en commun, la personne qui a fait que nous nous connaissons. Personnellement, je me serais bien passée de connaître sa famille, du moment que je l'avais à mes côtés. Mais ce soir elle n'est plus là et je me retrouve avec son cousin. Ironie. Je lève un sourcil quand il me répond, avant que je naisse vraiment ? Je ne relève pas, dans le fond je m'en moque un peu. C'est une question comme une autre, pour faire un semblant de discutions, une question banale qui n'engage à rien. En revanche, le sujet Artémis semble être inévitable. Il n'y a pourtant plus grand-chose à dire. Nous ne sommes plus ensemble, chacune a récupéré sa vie, après presque un an à la partager avec l'autre, point. Je n'ai pas envie de savoir ce qu'elle est devenue. Je ne lui en veux pas, elle n'a pas supporté Londres, je ne me serais pas vue lui imposer de rester ici pour moi. Elle est rentrée chez elle, je suis restée ici et avec le temps, nous avons fini par ne plus nous donner de nouvelles. Chacune tournant la page sur cette histoire. J'ai quand même parfois le sentiment que cela a été un énorme gâchis. Enfin, les choses sont ce quelles sont, je ne vais pas changer l'histoire. Je tire une nouvelle fois sur ma cigarette avant de répondre. « Merci. » Oui, je trouvais aussi que nous étions chouette ensemble, mais je ne veux pas me mettre à lui parler de tout cela. Il n'est pas psy, je ne suis pas du genre à vouloir me "venger" sur le cousin de mon ex et je suis sûre qu'il se moque pas mal de mes états d'âmes.
Pas besoin de continuer de parler d'elle. Elle n'est plus là. De toute façon, je ne comprendrais jamais les gens qui ne cessent de parler de leur ex, de raconter les mêmes histoires encore et encore, pour finir par ennuyer tout le monde avec cela. Je suis d'accord avec Thomas, pas besoin d'elle pour s'amuser. S'amuser ensemble par contre, je suis plus septique. Certes, je me souviens avoir passé de bonnes soirées en sa présence, mais le fait d'avoir Artémis avec moi, n'y était pas étranger. Je termine ma deuxième cigarette tout en l'écoutant. Boire à l'œil quand on connaît quelqu'un qui travaille dans un bar, semble être la chose que tout le monde attend. Combien de mes amis viennent ici avec l'espoir de ne pas payer. Il faut reconnaître que c'est pratique, pour moi principalement, mais c'est aussi vrai pour les autres. « Boire à l'œil, hein ? T'as de la chance, que je ne dise jamais non à un verre. » Ça c'est un fait vérifié, il faut vraiment que je sois malade pour que je refuse un verre. À mon âge pourquoi ne pas en profiter ? « En revanche, pour la bouffe je ne garantis rien. » Vu l'heure, je ne sais pas si c'est possible et puis il y a un mcdo dans le coin s'il a vraiment faim. Je réfléchis un instant à qui travail ce soir et s'il est possible d'en profiter. Il y a la petite nouvelle qui n'ose pas trop, mais qui ne dit rien et des anciens qui ne se gênent pas. Normalement, il n'y a pas de soucis. « Si tu veux bien me rejoindre quand t'as terminé ta cigarette. Pas question que je boive dehors devant le bar, j'ai une réputation à tenir. » En réalité je me fou pas mal de ce que les gens peuvent bien dire, mais boire dehors, devant le bar où je travaille ne m'emballe pas vraiment. Il n'y a que la cigarette qui pourrait me faire changer d'avis, mais je suis tellement habituée à sortir pour en profiter, que ce n'est plus vraiment dérangeant. Sans lui laisser le temps de répondre, je rentre de nouveau, allant directement me poser au bar. Je ne sais pas s'il veut boire la même chose ou changer, alors autant attendre. J'en profite pour discuter avec un collègue qui se plaint de l'autre con qui travaille avec nous. Une chance qu'il ne soit pas ce soir, sinon il aurait été bien plus difficile d'en profiter. Il applique les règles minutieusement et ne fait jamais d'écart, alors boire à l'œil... J'ai toujours envie de rigoler et de ne pas l'écouter quand il est là, malheureusement je sais qu'il a une forte influence sur le patron et je n'ai pas envie de me remettre à chercher un autre boulot pour le moment. C'est un vrai plaisir d'être assise et de voir les autres travailler. Pas besoin d'aller voir les clients et d'être souriante sans arrêt. Je suis du côté que je préfère dans un bar, cliente. Enfin, une cliente qui travaille ici et qui peut boire sans payer, c'est encore mieux. Voilà pourquoi je tiens à garder ce boulot le plus possible, il y a clairement pas mal d'avantages.
(✰) message posté Dim 16 Aoû 2015 - 1:03 par Invité
« Merci. » répondit-elle simplement. Je portai la cigarette à mes lèvres avec un demi-sourire. Elle semblait mélancolique sans vouloir l’admettre. Je lui accordais que c’était étrange de se retrouver là. Je n’avais pas l’habitude de parler avec n’importe qui sous prétexte que je les connaissais, ou pire, qu’ils me connaissaient sans que je ne parvienne à les replacer dans mon esprit. Mais Joey, si. Joey, elle était apparue devant mes yeux avec ce même regard désinvolte que j’avais observé durant mon séjour en France, et elle n’avait pas vraiment changé. Le genre à ne pas vouloir montrer son affection, à vouloir snober un peu, peut-être pour intriguer, ou simplement parce que bon, au fond, elle s’en foutait royalement. La deuxième option me semblait d’ailleurs plus adéquate. Elle ne restait auprès de moi que pour les clopes gratuites, je le savais. Mais j’avais besoin de briser la routine et quitte à rencontrer un visage connu, autant qu’il serve à quelque chose. Je méprisais la mélancolie. J’avais cette terrible résignation concernant le passé. J’étais bloqué dans le présent de toute façon, figé, incapable d’avancer ou de reculer. C’était mon calvaire à moi, je lui laissais ma cousine avec générosité. « Boire à l’œil, hein ? T’as de la chance, que je ne dise jamais non à un verre. » Je lui adressai un sourire complice : elle n’avait pas changé sur ce point-là non plus. Ce n’était pas vraiment une question d’âge, en tout cas pas pour moi. Je ne refusais jamais un verre non plus, et certainement pas lorsqu’il était gratuit. « En revanche, pour la bouffe je ne garantis rien. » Je haussai les sourcils. Peut-être que si je lui demandais plus gentiment, ça marcherait. Et puis, je pouvais m’en passer. Je ne mangeais plus depuis assez longtemps pour pouvoir résister une heure ou deux, le temps de trouver de l’argent quelque part. Je plongeai ma main dans ma poche : au toucher, je ne pus deviner que quelques centimes se battant en duel, pas une seule livre. « Fais de ton mieux, j’aviserai ensuite. » répliquai-je avec ironie, comme si je lui faisais passer un examen. C’en était presque drôle. Cela me donnait presque des idées pour la suite.
Elle tourna la tête et observa l’intérieur du bar, détaillant chaque recoin du comptoir. « Si tu veux bien me rejoindre quand t’as terminé ta cigarette. Pas question que je boive dehors devant le bar, j’ai une réputation à tenir. » Je laissai échapper un léger rire alors qu’elle s’éclipsa dans l’atmosphère chaleureuse de l’établissement sans m’accorder le temps de lui répondre. Joey Marshall, on s’en fout de ta réputation. Au pire, tu m’accuses, ça passe. J’étais l’un de ces êtres nocturnes qui ne révélaient leur vrai visage qu’une fois la nuit tombée. Mais, à son âge, car oui, cette fois-ci, c’était une question d’âge, je savais que ma réputation était aussi quelque chose à laquelle je tenais : l’aigle solitaire et droit que l’on n’ose pas suivre de peur de ne pas savoir voler aussi haut, aussi vite que lui. Aujourd’hui, cela m’importait si peu que je me surprenais parfois moi-même de ma propre médiocrité. Je venais tout de même de demander à une fille de voler de l’alcool pour moi. Elle avait accepté, elle devait être habituée. J’écrasai ma cigarette sous la semelle de ma chaussure avant de pénétrer à nouveau dans le bar. Je repérai Joey, discutant avec ses collègues au comptoir et je m’avançai lentement pour la rejoindre. Je m’installai à ses côtés et plantai mon regard dans le sien. « Un whisky. » dis-je simplement avant de reprendre d’une voix faussement hésitante : « S’il vous plait, madame. » Après tout, il allait être gratuit. Elle méritait tout de même que je fasse ce vague effort de politesse. Même si celui-ci sonnait si faux dans ma gorge – je n’étais plus habitué à être aimable.
Une fois mon verre servi, je tournai la tête et balayai du regard la salle, y cherchant ce que je n’y avais pas trouvé à l’heure précédente : probablement de la compagnie. Les silhouettes gesticulaient dans la pénombre pourpre propre à l’endroit et je décelai la blancheur de quelques sourires radieux dans l’ambiance tamisée qui régnait. La musique n’avait pas cessé et elle appelait le public improvisé à s’avancer sur la piste. Le groupe avait changé, je préférais d’ailleurs ce qui se jouait à présent et je plissai des yeux, diverti par ce qui se passait. Mais je n’avais pas oublié Joey. Loin de là. Je lui avais bien dit qu’on l’on pouvait s’amuser sans Artémis, et je comptais tenir parole. Sans vraiment savoir pourquoi, simplement pour lui prouver que je pouvais être sympa. Ou bien peut-être que j’avais juste envie de l’emmerder ce soir. Mieux valait qu’elle soit avec moi. Un connard que l’on connait valait mieux que celui que l’on ne connaissait pas. A mon sens, en tout cas. « Tu devrais proposer à l’une d’entre elles d’aller danser. » m’enquis-je finalement en lui désignant un groupe de fille qui avaient probablement son âge, éméchées, sûrement prêtes à tout pour passer une bonne soirée. Je penchai la tête d’un air innocent. « Si t’arrives à me rapporter dix livres, histoire que je me paye un truc à manger, tu pourras me lancer un défi à ton tour. » Je laissai l’ébauche d’un sourire glisser sur mon visage. Je m’ennuyais probablement trop mais j’étais trop paresseux, trop fier pour rentrer chez moi aussi tôt dans la nuit. J’avais oublié si je travaillais le lendemain. Cela n’avait aucune importance. J’avais simplement besoin de voir cette jeunesse agir, oui, cette jeunesse que je ne pouvais pas retrouver, s’estompant petit à petit des traits figés de mon visage, cette jeunesse que je voyais dans celui de Joey, m’imaginant tel l’aigle solitaire à nouveau alors que je n’en avais gardé que les pires défauts en vieillissant. Les autres étaient encore capables de voler, moi non. Mes oiseaux de nuit, voilà comment je les appelais. Toutes ces silhouettes que j’avais autrefois été et dont j’essayai aujourd'hui de deviner le but, la destination, alors qu’ils rôdaient dans la ville, seuls ou bien en meute, une fois la nuit tombée. J’avais l’impression de les accompagner partout où ils allaient. Mes oiseaux de nuit. Et Joey en faisait partie.
Will T. Stark
MEMBRE
» Date d'inscription : 26/03/2015
» Messages : 7237
» Pseudo : stardust. (Margaux).
» Avatar : /
» Âge : /
(✰) message posté Mer 26 Aoû 2015 - 14:55 par Will T. Stark
j’aimerais être un flan. un flan aux abricots.
Thomas & Joey.
Un jeu de crétin ? Peut-être bien, mais c’était notre jeu ! ✻✻✻ Depuis tout à l'heure, j'ai l'impression qu'Artémis va arriver d'une seconde à l'autre pour ne pas nous laisser seuls tous les deux trop longtemps, comme à Paris. Mais je sais que cela n'arrivera pas. Elle est repartie en Irlande et nous ne sommes plus à Paris. C'est la première fois que je passe autant de temps seule avec Thomas, ce qui est étrange. Je n'aurais pas pensé passer une soirée avec lui, encore moins un soir après le travail, mais c'est en bonne voix pour. Je ne compte plus le nombre de personnes qui essaient de profiter de mon travail pour boire à l'œil. et Thomas ne fait pas exception. Il a de la chance que je suis de bonne humeur, sinon il aurait pu se brosser un moment, avant de me voir lui offrir un verre gratuitement. Mais je ne suis pas contre un verre moi-même, là tout de suite. La soirée n'a pas été horrible. Rien d'inhabituel. Le travail en lui-même n'est pas le plus chiant de tout ce que j'ai fait, même si je déteste toujours autant devoir servir les gens. Mais rien que pour l'alcool gratuit, je prends sur moi. Je peux sans aucun doute offrir un verre ou deux à Thomas, mais je ne sais pas pour la nourriture. Déjà, parce que je n'ai pas franchement envie de m'emmerder à aller vérifier, ce qui est une bonne raison. « Et quoi, si ce n'est pas possible tu boiras plus ? » "Fais de ton mieux", il est marrant. Comme si j'en avais quelque-chose à faire de ce qu'il veut. Il devrait déjà être heureux de pouvoir boire sans payer. Sur quoi je l'abandonne devant le Barfly, pour entrer de nouveau. Je suis partie il y a à peine cinq minutes et me voici de nouveau à l'intérieur. Il y a des jours où je passe clairement plus de temps à mon travail qu'à mon appartement. Pour le prix que je paye, je devrais peut-être envisager de dormir directement ici. Cela fait des semaines que je me dis qu'il faut que je cherche un ou une colocataire, mais j'ai toujours quelque-chose de mieux à faire avant. Et ce n'est pas en rentrant après tout cela, que je vais pouvoir chercher. Je ne suis plus à un jour près de toute façon. Je rejoins Tony, qui semble s'ennuyer à mourir, malgré le monde présent dans le bar. Il n'a même pas l'air étonné de me voir de nouveau ici, l'habitude sans doute de me voir profiter des avantages d'être serveuse. Je jette un coup d'œil dans la salle. Il y a pas mal de monde, comme tout le temps. Un groupe chante ou plutôt essaie, ils n'ont pas l'air encore au point. Déprimée de voir la tête des clients, je me retourne pour faire face à mon collègue, le temps que Thomas me rejoigne. Je suis surprise de l'entendre être aussi polie, ayant l'impression de prendre dix ans dans la tronche au passage. « Mais quelle politesse. » Je me lève de mon fauteuil, tout en me penchant en avant, pour chercher une bouteille derrière le bar, sans réellement me lever. Il me faut quelques secondes, avant de trouver la bonne bouteille. « Tu peux me passer deux verres ? Ou trois, si tu veux te joindre à nous... » Je sais qu'il travaille, mais cela ne nous arrête pas quelques-fois. Après avoir décliné mon offre tout en me donnant les verres, il va s'occuper des clients qui viennent d'arriver. Je sers deux verres, avant d'en donner un à Thomas. Sans attendre j'en prends une gorgée, qui passe à la perfection. On devrait nous autoriser de boire en travaillant, je suis sûre que ce serait bien plus amusant pour tout le monde. Enfin, pour moi, ça c'est une évidence. Je suis en train de prendre une autre gorgée quand la voix de Thomas, me sors de mes pensées. Il délire là, non ? « Les faire danser ? Tu crois vraiment que j'ai que ça à faire ? » Là tout de suite, j'aimerais qu'Artémis arrive. Il y a bien une raison, pour que nous n'ayons jamais réellement passer de temps tous les deux. Je dois reconnaître une chose, je suis sûre que cela serait marrant de les voir essayer de danser. Vu leurs talons et leur état, je suis presque sûre qu'aucune d'elles, ne pourraient tenir une chanson. Ce n'est pas pour autant, que je me bouge. Je n'ai aucune envie d'aller parler à une d'elles, surtout pour lui faire plaisir. En revanche, sa deuxième proposition est déjà plus intéressantes, même si ce n'est pas vraiment de cette façon, que je me voyais passer mon temps après le travail. J'imaginais plutôt une douche, des clopes et m'écrouler sur mon lit. Au fond, je me demande pourquoi je reste. Enfin, il n'est pas difficile d'obtenir dix livres, surtout en demandant à la bonne personne. Je ne sais pas non plus pourquoi je rentre dans son jeu. Pour prouver que je suis plus que l'ex-copine de sa cousine ? Peut-importe, je termine mon verre cul sec, avant d'aller voir Tony. Il ne me faut pas longtemps pour qu'il accepte de me prêter de l'argent. L'avantage d'être une collègue adorable, qui en plus porte des shorts quand il fait chaud. J'ai remarqué que cela aide pour les pourboires, mais aussi pour se faire aider au travail. Parfois, j'ai l'impression que c'est trop facile. Je reviens vers Thomas, lui posant le billet juste à côté de son verre. « C'était presque trop facile... » Je me ressers un verre, tout en me demandant qu'une cigarette serait la bienvenue. Je déteste ne plus pouvoir fumer dans les bars. « Qu'est-ce que ce groupe est naze... » J'ai presque envie d'aller chanter à leur place, pour arrêter le massacre. Je ne supportais déjà pas de les entendre en travaillant, mais rester là et les écouter de mon plein grès, c'est vraiment aimer se faire du mal. Sans l'alcool gratuit, il est évident que je ne serais pas restée ici. Je n'arrive même pas à réfléchir, pour rendre la pareille à Thomas, avec tout ce bruit pour rien.
(✰) message posté Dim 13 Sep 2015 - 16:21 par Invité
« Et quoi, si ce n’est pas possible tu boiras plus ? » Je ricanai en haussant les sourcils. Comme si ça pouvait arriver. Nous ne nous connaissions pas très bien mais elle savait que je ne refusais jamais un verre. Et elle était barman. Cela ne pouvait être qu’une simple coïncidence de la retrouver ici, ou pas. C’était peut-être un signe du destin, même si cela faisait longtemps que je n’avais pas cru en l’avenir. Elle relèverait mon défi juste pour prouver son point. Immature ? Peut-être mais je jouais bien le jeu aussi. Je haussai les épaules alors qu’elle s’éloignait. Essaye encore. Elle ne m’aimait pas particulièrement. Pourquoi ne rentrait-elle pas simplement chez elle pour s’écraser dans son lit douillet ? De mon côté, j’avais l’excuse de ne pas pouvoir, de ne pas savoir dormir. J’avais l’excuse d’en avoir assez d’être seul. Je finissais par parler au mur, par imaginer un autre visage dans le miroir, déformé, différent, simplement pour pouvoir m’adresser à quelqu’un d’autre qu’à mon propre reflet. Difficile d’avoir le dernier mot contre soi-même Thomas. J’avais de la chance d’être tombé sur Joey. J’avais le souvenir qu’elle aimait bien me contredire. Et je pouvais jouer le rôle du cousin chiant. Je n’avais pas besoin d’Artémis pour qu’elle profite de ma charmante personnalité. Je la rejoignis au bar alors qu’elle tirait une gueule d’enterrement. « Mais quelle politesse. » Elle paraissait surprise. Je ne l’étais pas vraiment, je parlais toujours avec une ironie sous-jacente à ma voix, à mes mots. Cette courtoisie faisait partie du jeu, mais je haussai les sourcils et hochai légèrement la tête d’un air entendu. Bah évidemment. Je pouvais être charmant, elle s’acharnait seulement à remarquer ce qui l’énervait chez moi. L’absence d’Artémis y était probablement pour quelque chose. Mais cela ne l’empêcha pas de se pencher en avant pour saisir une bouteille et de s’adresser à son collègue : « Tu peux me passer deux verres ? Ou trois, si tu veux te joindre à nous … » Il déclina l’offre mais fournit tout de même les verres attendus, puis il disparut dans la salle alors que de nouveaux clients arrivaient.
« Les faire danser ? Tu crois vraiment que j’ai que ça à faire ? » Je balayai la pièce du regard et haussai les épaules, convaincu et nonchalant. « Bah clairement, oui. » Mais elle n’était pas de mon avis. Elle n’était jamais de mon avis. Ce qui lui plaisait le plus, c’était de me contredire. Je l’avais remarqué à Paris, et ici encore je le voyais, ponctuant mes demandes et mes affirmations par un peu de sarcasme. Elle ne m’énervait pas, elle m’amusait. Il y avait mille façons d’être un peu rebelle lorsque l’on était jeune et elle, elle avait choisi de cracher sur ces aînés condescendants qui l’emmerdaient nuit et jour. Sa répartie n’était pas assez cinglante, mais elle était en bonne voie. Je posai mes prunelles sombres sur le groupe de filles que je lui avais indiqué quelque secondes plus tôt. Je comprenais son manque d’engouement. « T’es timide. Je comprends. » Elle se serait peut-être faite recaler de toute façon. Un coup de poing dans sa fierté qu’elle se forçait à polir pour faire bonne figure devant moi. Comme si j’étais le type qui avait lui-même une fierté à défendre. Tu m’as bien observé Joey ? Je n’avais pas grand-chose à perdre, à part quelques clopes à offrir, mais j’ai encore un ou deux paquets cachés dans mon sac, embaumant les copies de mes élèves de l’odeur âpre d’un cancer à venir. Elle finit par se lever pour retourner voir le même collègue et lui demander de l’argent, ce qui accepta de faire sans même discuter. Comme s’ils s’étaient concertés pour jouer la scène. Elle revint vers moi et glissa le billet sur le comptoir, dans ma direction. « C’était presque trop facile … » Je secouai la tête, à la fois déçu et amusé. « Tu triches. Ça compte pas, t’es pas allée danser. » Je savais que ça ne faisait pas partie du défi. Qu’elle venait de me rapporter dix livres et que c’était à son tour. Mais je notais qu’elle tordait un peu les règles à sa guise. Facile, elle connaissait les lieux par cœur.
« Qu’est-ce que ce groupe est naze … » Je hochai la tête, pour une fois que nous étions d’accord, marmonnant mon approbation. Je penchai la tête, pensif, en les observant. Ils jouaient comme des pieds et chantaient plutôt faux. Même moi, j’aurais pu improviser quelques accords plus entraînants. Dans l’hypothèse de retrouver une quelconque affinité avec la guitare en durant la minute suivante, mais je n’avais pas été mauvais dans mon adolescence. Quel brun ténébreux ne savait pas claquer quelques notes, après tout ? Je me raclai la gorge et me penchai vers Joey. « Cela dit, je te mets au défi de faire mieux. » J’en oubliais le défi qu’elle devait me lancer à son tour, mais elle avait triché, alors je reprenais les rênes. Je ne me souvenais pas d’une gamine aussi blasée. Londres l’avait probablement changée. Londres changeait tout le monde. Londres faisait de ses habitants des esclaves d’une routine à laquelle ils finissaient par ne plus pouvoir échapper. C’était le problème de toutes les grandes villes : on n’était qu’un individu parmi des milliers d’autres. Nous n’avions pas vraiment d’importance, vus du ciel. « Je suis sûr que tu as un talent caché pour le chant. » J’ignorai si je l’avais déjà entendu chanter. Dans un bar comme celui-ci, à Paris, peut-être. Cela n’était pas impossible. Mais ce n’était pas ce qui m’intéressait. Je me demandais si elle savait briser sa routine. Si elle pouvait, l’espace d’une soirée, oublier son envie fatale et terne de rentrer chez elle.