A travers la fenêtre du vestiaire je voyais les rayons du soleil se bousculer derrière les nuages. C’était une belle journée, mais même si dehors le soleil brillait, ici j’avais l‘impression qu’une ombre s’était abattu juste devant moi, recouvrant tout ce qu’il pouvait y avoir de beau dans ce bas monde.
Il est mort. Je ne pouvais me résigner à croire ça. Je ne pouvais l’accepter. Ma voix tremblante interrogea mon meilleur ami, mais un silence se fit entendre pendant plusieurs secondes avant que je ne reconnaisse le timbre de sa voix à travers le combiné.
« Je … Je sais pas … » Sa voix était presque aussi tremblante que la mienne, voir même brisée et je su. A l’instant même où le son de sa voix se fit entendre, je su que tout ceci n’était pas une mauvaise blague.
« Ils ont dit qu’ils avaient retrouvé ses papiers et un corps … Ewan … est … » Je secouai la tête à la négative comme si ce simple geste pouvait changer la réalité. Comme si refuser d’entendre les mots qui allaient suivre allait les faire disparaitre et changer quoi que ce soit. On ne pouvait pas lutter contre la tragédie, je le savais, je le savais que trop bien et pourtant une petite parcelle de moi espérait que si je refusais d’accepter la réalité, si j’envoyais le destin se faire foutre, ça changerait la donne. On pouvait peut-être être plus fort que lui. Il le fallait.
«Putain Robin … Il est … » Les larmes ne menaçaient plus de s’écouler à présent, je les sentais déjà parcourir les creux de mes joues. Je n’étais plus capable de retenir mes sanglots alors que j’attendais qu’il prononce les mots que je ne voulais pas entendre.
« … Mort … » Sa voix sembla se briser un peu plus et l’annonce fit eut l’effet d’une bombe qui ravagea tout sur son passage après l’explosion.
« NON » lançai-je indigné alors que brutalement je me relevai et vins écraser mon poing contre la porte métallique de mon casier. Mes phalanges mes brûlaient, mais je ne sentais pas la douleur. C’était comme si soudainement je laissai ressortir une rage cachée au fond de moi depuis des mois et des mois. Une rage et une colère dont j’ignorais jusqu’alors l’existence. Une colère qui semblait l’emporter sur la tristesse. Ma main se crispa sur le téléphone. Le sort semblait s’acharner sur nous. Qu’avions nous fait pour être ainsi puni ? On avait forcément dû faire quelque chose de travers, sinon pourquoi est-ce qu’on était obligé de supporter ça. Pourquoi tout semblait s’effondrer autour de nous ? Pourquoi tout allait de travers ? Me mordant la lèvre inférieure je rapprochais d’une main tremblante mon téléphone de mon oreille, mais aucun son ne sorti de ma bouche. Une boule s’était formée dans ma gorge, m’empêchant d’exprimer ma colère. Je ne su pas pourquoi la seule image que me vins en tête fut le jour de la fusillade à l’hôpital. Ewan était là, allongé sur un lit d’hôpital. Il avait fait un arrêt cardiaque. Il aurait pu y rester, mais il s’était battu pour rester en vie. Alors où était la logique dans tout ça ? Il y en avait forcément une ? Il y en avait toujours une. Pourtant j’avais beau chercher, je ne la trouvais pas. Pourquoi fallait-il que ça arrive, pourquoi maintenant, pourquoi dans de telles conditions ? Le destin ? Il se foutait royalement de nous !
« … Fait chier… » murmurais-je d’une voix presque inaudible alors que je reculais de quelques pas pour venir m’asseoir sur le banc derrière moi. J’essuyai d’un geste las les larmes sur mon visage.
« Mais putain qu’est-ce qu’ils ont foutu… » Ma voix n’était plus frêle, elle laissait à présent mon indignation prendre place.
« Je… j’arrive pas à croire que ce soit vrai Julian… C’est… » Je secouai la tête en laissant échapper un long soupir.