"Fermeture" de London Calling
Après cinq années sur la toile, London Calling ferme ses portes. Toutes les infos par ici On est quand même pas venu pour beurrer des sandwichs - kaspar 2979874845 On est quand même pas venu pour beurrer des sandwichs - kaspar 1973890357
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On est quand même pas venu pour beurrer des sandwichs - kaspar

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() message posté Mer 15 Avr 2015 - 14:50 par Invité
Chaque famille a ses secrets
luna & kaspar

« Tu vas où encore ? »
Prise en flagrant délit de fuite, Luna s’immobilisa sur le pas de la porte, la main encore sur la poignée qu’elle venait de tourner en tentant de faire le moins de bruit possible. Oh, comme elle regrettait le temps où son frangin et sa cousine ne jouaient pas encore les Cerbères aux portes de l’Enfer.
« J’t’en pose des questions ? » Répondit-elle sèchement en pivotant sur elle-même pour découvrir un Milo, les bras croisés sur son torse, la mine sévère. Bon sang, comme il avait l’air sérieux en cet instant !
« Y en a marre, Luna ! Tu rentres, tu sors, on passe des journées entières sans se voir, et tu ne me dis rien ! »
« Nous ! » S’exclama une deuxième voix, avant que la tête de Roxane dépasse de l’embrasure de la porte de la cuisine, une cuillère pleine de Nutella aux lèvres. « Tu ne nous dis rien ! »
« Maman… » Dit-elle en regardant sa cousine. « Papa… » Cette fois son regard se porta sur son frère. « J’ai 22 ans, je suis une grande fille, je vis ma vie, ok ? »
« Tu l’as dit toi-même, il y a des règles à respecter dans cette maison, tu ne peux pas aller et venir comme bon te semble. » Rétorqua l’Italien, en se donnant des airs d’adulte responsable, tout ce qu’il n’était pas.
« Oui, et c’est moi qui dicte les lois ici, et qui décide qu’elles ne s’appliquent pas à moi. » Lui répondit-elle calmement contrairement à la tempête qui menaçait en elle.
« Et de quel droit ? » Roxane, cette fois.
« A qui appartient la maison ? » Demanda-t-elle.
« A Valentina. » Répondit Roxane en souriant. « Elle était facile, celle-là. » Parada-t-elle auprès de son acolyte, fière d’elle.
« Et qui est Valentina par rapport à moi ? »
« Ta tante. » S’exclama Milo en levant un bras triomphant. « Trop simple ! »
« Et à qui a-t-elle bien voulu confier les clés de sa maison ? » Silence de la part des deux autres. « Ma maison, mes règles, point barre. »
« Putain, elle nous a eu sur ce coup ! » S’insurgea Roxane, furieuse contre elle-même, alors que Milo tapait du pied le sol carrelé.
« Si ça vous intéresse tant que ça, je vais juste faire un tour. » Les informa-t-elle en passant la porte. Non mais oh, depuis quand elle devait rendre des comptes à Tic et Tac ? Mais déjà, ils ne l’écoutaient plus, ils étaient en train d’élaborer un plan pour se faire adopter par Valentina. La brune soupira, avant de disparaître par le portail ouvert.

Est-ce que c’était de sa faute à elle, aussi, si elle devait sans cesse courir à droite et à gauche pour régler tout un tas de problèmes ? Aussi, quand elle avait décroché son téléphone ce matin-là, elle ne s’était pas vraiment attendue à se retrouver convoquée dans je ne sais quel cabinet de notaires. Convoquée, c’était un faible mot. Après la dernière année qu’elle venait de passer, Luna commençait sérieusement à se demander si elle n’était pas maudite, genre « tu auras la méga poisse sur les treize prochaines années à venir pour avoir oublié qui tu étais » version Mufasa sous LSD. Enfin voilà quoi, vous voyez le principe. Du coup, elle se retrouvait à prendre le métro londonien en direction de Picadilly Circus, et Dieu seul savait qu’elle allait le regretter tellement la zone regorgeait de touristes. Ça allait lui rappeler, au choix, le séjour chez Milo à Rome avec cette foutue fontaine où le bas peuple s’amusait à balancer des pièces à la pelle en veux-tu en voilà, ou alors la pitoyable tentative que les deux Italiens avaient faite de voir la fameuse Casa di Giulietta lorsqu’ils s’étaient retrouvés à Vérone, là où c’était mission impossible juste pour mettre un pied devant soi, et tout ça juste pour un bout de cour, un balcon qui n’était même pas celui de la tragédie et une statue dont tout le monde s’amusait à peloter les seins en métal sous prétexte que ça portait chance en amour (des foutaises, puisque les deux avaient testé et rien ne s’était produit). En sortant de la station, elle prit une grande inspiration pour se motiver. Ce qu’elle pouvait regretter l’Italie et ses petites villes tranquilles hors saison touristique. Parce qu’à Londres, ça ne s’arrêtait JAMAIS. Bon, vu le boulot qu’elle venait de se trouver, elle n’aurait pas dû s’en plaindre. Mais ç’aurait été mal connaître Luna. A grand renfort de coudes dans les côtés et d’écrasage d’orteils, elle parvint à s’orienter dans Regent Street et trouver enfin le cabinet dans Heddon street. L’écho de ses pas pressés se répercutait contre les hauts murs de ces ruelles étroites, lui donnant le sentiment paradoxal d’être à la fois incroyablement seule et tout de même poursuivie. Elle était les deux. Elle était seule, les ruelles restant désespérément désertes en cette heure extrêmement matinale, et poursuivie, poursuivie par le temps qui ne cessait de défiler sans tenir compte de ses besoins à elle. Il fallait qu’elle fasse vite, qu’elle se montre rapide et efficace. Alors elle se pressait, affrontant l’air frais de ce début de matinée humide en resserrant les pans de sa veste militaire contre son cou. Elle avait oublié de prendre son chèche en partant. Elle ne l’oubliait jamais d’ordinaire, mais ce matin elle était partie trop vite, à peine coiffée et toujours pas maquillée. Et bizarrement, c’est lorsqu’elle ne l’avait pas autour du cou, noué dans ses cheveux, ou fourré au fond de son sac, qu’il lui arrivait des merdes. Il s’en fallait de peu pour qu’elle puisse prêter des vertus porte-bonheur. Dans sa course un peu rapide, elle croisa un couple s’encanaillant dans une ruelle obscure. S’ils la contemplèrent avec surprise, elle ne leur prêta aucune attention particulière. Elle avait d’autres chats à fouetter, un objectif qu’elle pouvait enfin apercevoir.

« Bonjour, je viens voir Maître Hartwig. »
La secrétaire, à l’air aussi aimable qu’une porte de prison couverte de rouille, ne releva pas la tête de son ordinateur tandis qu’elle continuait à pianoter sur son clavier. Luna et sa patience légendaire déjà mise à rude épreuve avec le gros bordel nucléaire que cette pseudo convocation avait foutu dans sa tête, se racla poliment la gorge pour lui signaler qu’elle avait plutôt intérêt à lâcher son PC si elle voulait pas finir la tête encastrée dedans. En vain.
« Bon, écoute Einstein. » Commença-t-elle en respirant profondément pour garder son calme, les deux mains crispées sur le comptoir et les yeux fermés pour ne pas prendre le risque de voir la tête de la nana et de la lui exploser. « Là, tu vois, je suis à deux doigts, mais vraiment deux tout petits doigts, deux doigts de bébé, et encore un bébé atteint de nanisme, tu vois ? Je suis donc à deux doigts de sauter par-dessus le comptoir, de t’attraper par les cheveux, et de te faire cracher tes dents une par une à force de taper ta tête contre ton clavier d’ordinateur. » Elle rouvrit les yeux, et dans un sourire crispé lui demanda : « Tu saisis ? » La secrétaire, mâchoire décrochée mais enfin décidée à la regarder, se contenta de hocher la tête sans dire un mot. « Bien. Alors, on va arrêter gentiment d’écrire sur l’ordinateur, ok ? Bien. Maintenant qu’on est d’accord sur ce point, j’aimerais que tu m’ouvres ce putain de portique afin que je puisse aller rencontrer Hartwig et lui dire deux mots sur sa façon de convoquer les gens comme ça au petit matin alors que la normalité voudrait qu'à 7 heures on dorme. » Elle claqua sa main sur le comptoir et reprit sa respiration en tâchant de calmer ses nerfs à vif. La femme hésita un instant, préférant certainement garder le silence, ou espérant se rendre invisible ou disparaître en flaque d’eau, mais constatant qu’elle n’avait aucun de ces supers pouvoirs, se racla la gorge avant de souffler faiblement.
« Je peux pas mademoiselle. » C’est à ce moment-là que la tête de Luna heurta le bois du comptoir, tandis qu’elle gémissait de frustration. L’assistante sauta sur ses deux pieds, et s’empressa de tapoter la main de la dame, comme si ça avait le pouvoir de la réconforter. « Il  faut attendre que le second héritier arrive. Monsieur Hartwig a bien préciser qu’il ne vous recevrait que lorsque les deux héritiers seraient là. Je suis désolée mademoiselle. »
« Deuxième héritier ? Non mais c’est quoi encore ces conneries ? » Demanda-t-elle en relevant la tête, regard noir et tronche de bombe atomique prête à faire péter Hiroshima et Nagasaki. Le timing était excellent, car c’est l’instant précis où la porte s’ouvrit sur un jeune homme.
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() message posté Jeu 16 Avr 2015 - 23:05 par Invité
Trois jours. Cela faisait trois jours. Trois jours que le facteur m'avait réveillé dès son premier service pour me tendre une lettre qui avait besoin de signature pour qu'elle puisse être réceptionnée.
Au début, j'ai trouvé ça louche. Moi, recevoir un courrier si important? La peur m'avait d'abord envahi. Lorsque j'ai vécu à la rue, je n'avais pas pratiquée des choses très légales et peut être m'avait-on rattrapé sur ces coups là. C'était un peu idiot, parce que cela était passé depuis longtemps et que je n'avais rien fait de très grave en soi. Je n'avais tué personne, blessé personne ni mettre en danger la vie d'autrui. Voler des portefeuilles n'avait pas été très malin, mais c'était l'unique solution que j'avais trouvé pour vivre, quand je ne demandais pas la charité près de la gare King's Cross en attendant qu'un âme généreuse puisse accepter de me donner un sous ou un sandwich pour pouvoir manger. En général, on m'ignorait. J'étais jeune, et c'était inconcevable qu'un être humain de mon âge vive dans la rue. Au pire des cas, je m'en sortirais mieux... pourtant, je savais ce qu'était la famine. Je savais ce que ça faisait de "mourir de faim", littéralement. Si des gens n'avaient pas été là pour moi au moment opportun, je ne serais probablement plus de ce monde à l'heure qu'il était. Ces gens là, je leur devais la vie, et là aussi, littéralement. Malheureusement, l'un d'entre eux n'était plus de ce monde mais je persistai à lui faire hommage en me rendant toutes les semaines sur sa tombe et en lui apportant de nouvelles fleurs pour la fleurir.

Lorsque ledit facteur avait repris route, je m'étais interrogé sur la nature de cette lettre puisque c'en était une. Qui pouvait m'écrire quelque chose d'aussi important? Était-ce une erreur de personne? Cette impression s'était intensifiée à la lecture du courrier. La lettre m'invitait cordialement à me rendre dans un cabinet de notaire situé à côté de Piccadilly afin de pouvoir récupérer l'héritage d'une vieille tante aujourd'hui décédée. Il me fallut relire plusieurs fois le courrier pour que je puisse saisir l'importance CAPITALE de ces mots.
J'ai d'abord pensé à une erreur. J'y pensais toujours d'ailleurs. Pourtant, la réception de ce courrier avait fait naitre en moi quelque chose que je n'avais jamais eu auparavant : l'espoir d'avoir un bout de famille quelque part dans le monde et de pouvoir les rencontrer. Cette simple pensée faisait battre mon cœur à cent à l'heure mais je refusais de m'emballer trop rapidement. Si cela devait être effectivement une erreur, je voulais que la déception ne m’envahisse pas trop. Je serais en colère évidement, mais au moins je me serais préparé psychologiquement à ça.

Pourtant, le matin du grand jour, j'avais fait un énorme effort de présentation physique. Tout comme pour le premier rencard que j'avais fait pour Ivana, je m'étais battu avec mes cheveux pour pouvoir les tenir en place. J'avais enfilé une chemise d'une couleur pas trop voyante que j'avais soigneusement repassée ainsi qu'un pantalon noir. Malheureusement, je dus emmener mes converses avec moi étant donné que je n'avais pas d'autres paires de chaussures et cela me fit penser que, lorsque j'en aurais les moyens, il faudra que je pense à investir dans une paire plus classe, quitte à les cirer de temps en temps.
J'avais pris la route en tremblant doucement. Il était très tôt ce matin là si bien qu'il n'y avait pas encore trop de monde dans le métro. Je soupirais. En fait, ça m'avait complètement rendu parano. Je voulais que ça soit vrai. Je le désirais fortement. Tant pis pour la déception, j'aurais au moins pu rêver quelques jours si cela devait réellement être une erreur.
Quand je parvins devant le cabinet du notaire, je pris une profonde inspiration avant de rentrer. Puis j'ouvris la porte et entrai timidement dans le hall. Je pus apercevoir la présence d'une jeune femme qui semblait ne pas être de très bonne humeur à en juger sa manière d'être ainsi que la secrétaire qui s'occupait de l’accueil.
Silence de mort.

"Heum... bonjour?" fis-je, timidement.
Quelque peu déconcerté, je m'approchai du comptoir. C'était la première fois que je faisais ça et je ne connaissais pas les procédures, s'il y en avait.
"Je.. suis là pour.. l'héritage."
J'avais eu du mal à exprimer ces mots là, parce que ça sonnait encore comme un rêve pour moi. J'avais tendu le papier à la dame, visiblement secouée et avais jeté un coup d’œil à la jeune femme à côté. Je ne l'avais jamais vue de ma vie et l'inverse serait plus qu'étonnant. Aussi sociable que je pouvais être dans la vraie vie, je n'osais exprimer le moindre mot à son égard. J'avais du mal à ne pas trembler, par la pensée de ce qui allait suivre. J'avais tellement hâte, mais j'appréhendais également cet instant.
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() message posté Mar 21 Avr 2015 - 11:44 par Invité
Chaque famille a ses secrets
luna & kaspar

Je ne saurais trop vous dire comment les choses se sont passées. Ni de quelle manière je l'ai rencontré. Je crois que je me suis simplement retournée, et il était là. Si je l'avais rencontré ailleurs, à un autre moment, dans d'autres circonstances, je n'y aurais peut-être pas prêté attention. Sûrement pas. Un jeune homme d'environ mon âge, voire plus jeune, qui se serait noyé dans la foule de tous ces gens que je croisais chaque jour. Ignoré avant d'être connu. Pris pour l'inconnu qu'il ne serait jamais plus à mes yeux. En quelques mots, quelques gestes, il avait su briser ce miroir de brume dans lequel je vivais. Alors je lui avais fait face. Et je l'avais vu. Non pas de la manière dont je voyais le monde autour de moi. Mais tel qu'il était véritablement. Non plus comme un gamin perdu mais comme un homme à la recherche de quelque chose. Ce quelque chose que je ne comprenais pas, que j'ignorais. Ce furent peut-être ses paroles étranges qui captèrent mon attention, ou bien la lueur que je voyais briller dans ses yeux. Son simple « je n'en sais rien », totalement désemparé et honnête ; ou qu'il m'eut tourné le dos comme jamais personne ne l'avait fait. Au fond, moi non plus je n'en savais rien. Je me rappelle m'être simplement approchée de lui, et d'avoir saisi sa main comme je l'aurais fait d'une simple valise. Sans arrière-pensée, ni réelle intention. Dans le seul but de m'accaparer ce petit ange qui scintillait dans la nuit. Mais le problème, c'est que lorsqu'on trimballe partout sa valise avec soi, on en vient à ne plus vouloir s'en séparer. On la remplit de souvenirs, de choses personnelles, de choses indispensables. Elle devient indispensable. Alors on ne veut plus la perdre, on en vient à en prendre soin. Et finalement... A l'aimer. Kaspar, c'était tout ça et bien plus que je ne saurais le dire. C’était un amour hors du commun, fraternel, maternel, comme une mère avec son enfant, une sœur avec son jeune frère.

Voilà ce qu’écrirait Luna quelques mois plus tard dans le journal qu’elle avait toujours tenu sur son ordinateur. Les sentiments que Kaspar lui avait inspiré à son insu. Mais revenons-en au présent si vous voulez bien.

Alors leurs regards se croisèrent, alors le temps s’arrêta, alors son cœur se mit à battre dans sa poitrine, lui rappelant qu’elle était en vie, qu’elle était vivante. Couleurs, chaleur; chaleur, couleurs. Il semblait à Luna qu’elle n’était plus rien d’autre que ces sens, plus qu’un corps et ses terminaisons nerveuses innombrables et électriques. Ses récepteurs sensoriels vibraient, débordaient; fourmillant de mille informations foisonnantes, changeantes et concentrées sur deux concepts simples et pourtant complexes: couleurs, chaleur. Couleurs, chaleur. Couleurs miroitantes et moirées, tourbillonnantes et animées d’un continuel mouvement disparate, insensé, sans but ni fin. Constante évolution dans les formes et les coloris bariolés; trajectoires insensées; étrange remous qui était pour Luna - si tant est qu’on puisse appeler Luna cet être fait de sensations brutes - une chose à la fois dangereuse et source de vie. Et chaleur. Chaleur qui découlait, lui semblait-il, de ce mouvement perpétuel et incessant. Chaleur relative et anormale, cependant, car, sans être extrême, elle ne s’accompagnait de nul sentiment de bien-être. Peut-être d’ailleurs n’était-ce que qu’une aigre tiédeur, ou même une simple moiteur, qui imprégnait chaque pore et chaque cellule de Luna, la baignant dans une aura molle et silencieuse. Couleurs, chaleur. Longtemps il n’y eût rien d’autre que ces perceptions, impressions fugaces et impalpables. Puis les contours des choses se précisèrent. Des bruits se firent entendre peu à peu; d’abord un bourdonnement désagréable et sourd, puis un brouhaha animé et de plus en plus clair. Des mots jaillirent de temps à autre, prononcés dans une langue qu’elle connaissait et ne reconnaissait pas, mais le bourdonnement entre ses oreilles recouvrait le bruit les conversations qui ne se devinaient alors, légères, qu’à travers une rumeur ou un murmure. Luna, qui commençait lentement à prendre conscience de son être et de son propre esprit, observait la scène sans se demander même où elle se trouvait. Elle contemplait, comme on regarde un film absorbant devant lequel on oublie son propre nom, la personne face à elle, si loin et si proche à la fois.

La secrétaire les avait fait passer dans une salle d’attente un peu plus classe que le hall d’entrée. On pouvait même estimer le revenu moyen du grand patron des lieux rien qu’aux tableaux accrochés au mur – facilement dans les cinq mille livres sterling par mois – qui aurait permis de nourrir un village africain pendant toute une année. Assis face à face l’un de l’autre, Luna n’osait pas spécialement regarder Kaspar. Elle essayait de décortiquer les rares informations qu’elle avait à sa portée, alors qu’il en avait visiblement reçu un peu plus qu’elle puisqu’il avait parlé d’héritage. S’ils étaient deux héritiers, cela voulait donc dire qu’ils faisaient partie de la même famille. Et ça, pour Luna, c’était un peu trop d’un coup à digérer. Elle venait à peine de retrouver son père biologique, et voilà qu’on lui lâchait quoi ? Un frère ? Non, ils ne se ressemblaient pas assez physiquement pour être frère et sœur. Peut-être un cousin, ou quelque chose dans ce style-là. En attendant de plus amples réponses aux questions qu’elle se posait seule dans sa tête, elle continuait de garder l’illusion d’une jeune femme sereine.

L’illusion. C’était ça son vrai métier aujourd’hui, elle était passée maîtresse dans l’art de l’illusion. Elle était la plus grande illusionniste de Londres. Parfois, elle arrivait même à se tromper elle-même. Elle y parvenait assez souvent même, elle était assez douée pour ça. Se persuader que tout allait bien, que sa vie était facile, belle, longue, et l’avenir radieux, et dans un sens, elle n’avait pas spécialement tort, la vie est belle en soi, elle n’était pas en train de crever de faim dans un pays du tiers-monde, ni mariée de force à l’âge de 12 ans, grand-mère avant ses 25 ans. Elle n’avait qu’à claquer des doigts pour obtenir ce qu’elle souhaitait, absolument tout ce qu’elle souhaitait, elle n’avait à se soucier de rien, les autres s’arrangeaient pour qu’elle ait à en faire le moins possible, sans effort, tout était facile, à portée de main. C’était une vie simple, facile, sécurisée. Luna était jeune, belle, intelligente, on n’attendait rien d’elle, on ne misait pas sur elle, on la laissait libre. Elle pouvait se distraire comme elle le souhaitait, fréquenter qui elle voulait, aller où elle voulait, vivre comme elle le voulait. Elle avait une famille aimante, des parents formidables, un agenda bien rempli, alors de quoi aurait-elle à se plaindre ? Rien. Elle avait été gâtée par la vie, qui lui avait tout offert, sauf le droit de s’en plaindre. Les gens n’avaient pas idée de ce qu’elle cachait en elle, de ce qu’elle protégeait en son sein, cette douleur sourde pas si enfouie que ça, habilement dissimulée sous un sourire et un rire communicatif. Ils n’en avaient rien à foutre, ils ne creusaient jamais. Et pour quoi faire ? Ils se contentaient de la surface, c’était tellement plus simple, et puis ça leur donnait l’impression de connaître l’autre dans un monde où on ne se connaît même pas soi-même. Elle était Luna, la brune, la souriante, la pleine de vie, la jeune femme à l’humour corrosif, celle avec qui on est assuré de passer un bon moment. Et c’était très bien ainsi, c’était la facette qu’elle appréciait le plus aussi, celle qui lui permettait d’apprécier ce qu’elle avait, ce qu’elle n’avait pas, et ce qu’elle pourrait avoir. Mais quand il arrivait que son sourire se fissure et que son regard se fasse plus sombre, alors on ne comprenait pas. Luna, triste ? Impensable ! Ça ne pouvait et ne devait pas arriver dans leur joli petit monde des apparences. Et quoi, crétin ? Vous pensiez qu’elle était née avec une atrophie du cœur qui l’empêchait de ressentir ce qu’un humain est en droit de ressentir ? Lorsque la musique se faisait plus profonde, que les lumières se tamisaient et les regards s’échappaient, c’était là, sournois et vicieux, ça s’insinuait en elle, glissant sous sa peau comme un serpent de glace, les idées noires l’assaillaient, et elle n’avait d’autre choix que de se laisser submerger. Son visage perdait de son éclat, son regard se vidait, elle observait les autres autour d’elle, leurs corps se mouvant au rythme d’une chanson insipide. Elle les voyait chanter, danser et rire. Elle enviait leur insouciance, leur candeur et la facilité avec laquelle ils abordaient cette vie. Elle oubliait que quelques instants plus tôt elle était eux, et que elle aussi elle avait chanté, elle avait dansé, elle avait ri. Elle oubliait qu’elle aussi, elle avait sa part d’insouciance et de candeur. Elle oubliait tout. Elle s’oubliait, elle se perdait. Elle avait l’impression qu’en quelques secondes, ils avaient eu le temps de dresser un mur infranchissable devant elle, une paroi de verre qui lui permettait de les voir, mais jamais de les rejoindre. Comme le lapin d’Alice, elle se répétait qu’elle était en retard, en retard, toujours en retard. Personne ne l’attendait nulle part, et c’était sûrement ça le problème. Elle était seule. Dans cette vie, dans une autre, elle était seule. Elle avait eu toutes les cartes en main, et elle avait choisi de faire voler son jeu, juste pour le plaisir de les voir virevolter jusqu’au sol. Et maintenant, elle n’avait plus le temps de les ramasser pour en choisir quelques-unes. Les cartes ne l’avaient pas attendue, les bonnes cartes n’attendaient jamais. Alors elle fermait les yeux, et dans sa tête, ils chantaient toujours, ils dansaient toujours, ils riaient toujours. Etait-ce pour la narguer ? Elle songea à son anniversaire au mois d’octobre. Une année de plus. Elle n’avait que 22 ans. Qu’en serait-il lorsqu’elle en aurait 30 ? Elle avait l’impression que le monde se vidait autour d’elle, chacun devant sérieux, adulte, époux, père… Et elle ? Elle, elle était restée figée dans le temps. « Quoi de neuf dans ta vie Luna ? » Toujours la même réponse : rien. Jamais rien de neuf. Elle n’évoluait pas, elle n’avançait pas, elle restait là et elle observait le train passer, en se disant qu’elle finirait bien par attraper un wagon, jusqu’à ce qu’il n’en reste aucun, et que le train ne soit plus qu’une tâche sombre dans le lointain. Finalement, elle ne servait à rien. Elle ne vivait pour rien. Elle n’était qu’un passé trouble, sans avenir.

Et puis un jour, une main se tend. Luna ne la distinguait pas encore clairement, mais elle savait que c’était sa chance, sa dernière, alors elle la prit. Assis tous les deux dans la salle d’attente, elle finit par relever les yeux vers Kaspar. Elle avait abandonné toute animosité dans le hall d’entrée, et puis son mauvais caractère n’avait jamais été dirigé contre le jeune homme. « Dis… » Elle attira son attention doucement. « Tu sais pourquoi on est là en fait ? »
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() message posté Jeu 23 Avr 2015 - 17:46 par Invité
L’air était pesant, à moins que ce soit moi qui étais trop nerveux. La secrétaire était rassurée de me voir arriver et je peinais à dévisager l’autre personne à côté de moi. C’était une jeune femme, d’environ mon âge, peut-être plus âgée – enfin, j’avais tendance à faire plus jeune que mon âge physiquement parlant – que je n’avais jamais vue de la vie. Elle était dans un état de nervosité, du moins, c’était ainsi que je la voyais. Sa peau était blanche et elle avait une mine fatiguée, sans doute dû à l’heure matinale dans laquelle nous nous trouvions. Je me souviendrais toute ma vie de ce moment, de la manière dont elle était habillée, de ses longs cheveux bruns et ses yeux verts feuille. Je n’avais pour le moment aucune idée de qui elle pouvait être ou représenter pour moi. Je ne savais même pas ce qu’elle faisait là. Peut-être pour un autre héritage ? Ou alors le même que le miens ? Comme j’avais du mal à réaliser ce qui m’arrivait, je ne réfléchissais pas vraiment. J’étais encore trop concentré dans ce qui allait suivre par après.

La secrétaire finit par se lever et nous guider jusqu’à la salle d’attente. Là-dessus, l’inconnue et moi nous installâmes l’un à côté de l’autre. La secrétaire nous avertit que le notaire avait été prévenu de notre arrivée et qu’il ne devrait pas tarder. Il fallait dire qu’à cette heure-ci, nous devions sans doute être les premières personnes qu’il rencontrera de la journée mais il devait faire un peu d’organisation dans ses dossiers avant de nous recevoir. Quoique, je ne connaissais absolument pas le métier de notaire, mais j’imaginais que c’était ainsi que ça se passait.
Quand elle repartit, un silence pesant s’installa. On n’entendait que le son de l’aiguille retentit : tic, tac, tic, tac, et ainsi de suite. De toute ma vie, je ne m’étais jamais senti ainsi. Quoique, ces derniers jours, c’était un peu ma spécialité. J’avais appris il y a à peine quelques jours que ma copine attendait un enfant et depuis, j’étais tendu comme un élastique. Ajouté à cela la nouvelle du POTENTIEL héritage, je me retrouvais un état de nervosité plus que je ne l’avais jamais été, pas même les fois où on m’avait menacé  avec une arme à feu braquée sur la tempe ou à quelques mètres de mon front.
C’était idiot, me disais-je, de penser à une erreur. Les  gens qui se spécialisaient dans l’héritage ne pouvaient pas se tromper. Oh, quoique, il devait parfois y avoir quelques erreurs, comme partout, mais c’était chose rare, non ? A moins qu’on m’ait confondu avec un autre Hansen ? Je ne devais pas être le seul Hansen vivant en Angleterre, ou même à Londres. Peut-être y en avait-il même un pas trop loin de chez Theodore. Mais des Kaspar, il ne devait pas y en avoir par milliers par ici. J’étais conscient que mon prénom ne trainait pas à tous les coins de rue. A moins d’une erreur d’administration, il y avait peu de chance possible. Et si, lorsque nous entrerions dans le cabinet, le notaire d’aperçoit que ce n’était pas moi qu’il attendait mais un autre Hansen ? Est-ce que la fille à côté de moi s’appelait aussi Hansen ? Oh, une minute. Peut-être pas. Il pouvait y avoir tellement de changement de nom que ça n’était pas chose obligatoire.
« Dis… Tu sais pourquoi on est là en fait ? »
Je sursautai comme une grenouille lorsque je l’entendis parler. Mes pensées m’avaient égaré et j’avais presque oublié son existence tellement j’étais concentré. Je lui jetai un regard à la fois inquiet et surpris, avant de cligner des yeux et de me ressaisir.
« Oh, excusez-moi, je suis un peu nerveux » me justifiai-je alors, embarrassé. « Et pour vous répondre, je… ne sais pas pourquoi on est là moi non plus. Je crois savoir qu’il y a une question d’héritage, d’une vieille dame. Mais je ne sais pas qui elle est ni même ce qu’elle représente pour moi. »
Pause silencieuse. Plus j’y pensais, plus mon excitation s’agrandissait. Je mourrais d’envie de connaitre si j’étais bien là pour quelque chose, et si c’était le cas, découvrir ce qui allait en résulter. J’avais peur d’être déçu, car même si je me retrouvais ici pour une bonne raison, j’avais peur que cela ne dure qu’un instant. De ne pas pouvoir m’étendre sur le sujet. Qu’on me dise « Voilà ce dont vous héritez, mais je n’en sais pas plus en ce qui vous concerne » ou quelque chose comme ça.
« Et toi ? »
Il y avait Elle aussi. Elle était là pour une raison, elle aussi. Et si nous étions réellement attachés d’une manière ou d’une autre, peut-être pourrait-elle m’offrir des réponses à des questions que je me suis posée toute ma vie. Sauf si elle est aussi perdue que moi. Mais rien n’empêchait d’enquêter ensemble si jamais… Ah, chut moi ! J’étais en train de trop réfléchir. Une chose après l’autre !
« Au fait, comment tu t’appelles ? »
A ces mots, la porte s’ouvrit et un petit homme avec des lunettes rondes comme Harry Potter fit son apparition. Il se présenta comme le notaire et nous fit signe de le suivre. Au moins, l’attente n’aura pas duré longtemps.
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() message posté Lun 27 Avr 2015 - 17:14 par Invité
Chaque famille a ses secrets
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A peine le temps de répondre à la question formulée par Kaspar que le notaire entrait dans la place et leur demandait de les suivre jusqu’à son bureau. Là, sans prendre ni gants ni pincettes, il fit les présentations pour tout le monde. Luna avait l’impression de ne plus comprendre les mots qui sortaient de la bouche de cet homme qui, s’il avait effectivement les mêmes lunettes qu’Harry Potter, ressemblait davantage à l’oncle Dursley. Il parlait de la famille d’Aquino en Italie, et elle eut tout le mal du monde à se concentrer. Victoria d’Aquino, qu’elle n’avait pu rencontrer qu’une seule fois par le biais de Julian – son oncle, pas son ex. Ça devenait compliqué – et dont elle se rappelait très peu de choses mis à part sa tendance à la prendre pour sa mère Rachele. Il faut dire que Luna était le portrait craché – brun certes – de la fille de Victoria, et son Alzheimer n’aidant pas, elle avait été incapable ou presque de comprendre qui était cette petite brune que Julian lui ramenait à la maison. Ainsi, l’âge avancé de sa toute nouvelle nonna avait eu raison d’elle. Ruminant l’information, Luna eut à peine le temps de relever la tête quand le notaire annonça leur lien de parenté, à elle et Kaspar. Entre les différentes plaintes comme quoi ils avaient été tous les deux difficiles à retrouver, elle entendit bien le mot « cousin » être prononcé. Et comme si la nouvelle ne méritait pas le temps d’être digérée, le notaire leur annonçait qu’il n’avait eu que pour devoir  de les retrouver pour les envoyer à Rome, et ce illico presto s’il vous plaît ! Il leur avait déjà appelé un taxi, et leurs places sur le prochain vol pour Rome étaient déjà réservées. Aussitôt les deux furent mis dans ledit taxi, et ce ne fut que là que Luna se tourna enfin vers Kaspar, avec le même étonnement, la même incompréhension que lui dans les yeux.

Lorsqu'ils entrèrent dans la salle d'attente, Luna commença à faire quelques exercices respiratoires pour se détendre. Elle savait déjà que cela ne servirait à rien, sa phobie de l’avion était inguérissable. Elle avait beau avoir conscience de tout ce qui se disait au sujet du moyen de transport le plus sûr du monde, elle n’arrivait pas à vaincre cette peur. Elle ne savait pas d’où elle venait. Elle était amenée à se déplacer régulièrement quand Rossella la renvoyait en Italie tous les étés, la plupart du temps elle s’arrangeait pour ne pas avoir à grimper dans un avion, préférant le train ou la voiture. Lorsqu’elle n’avait pas le choix, elle cédait, bien entendu, et prenait l’avion. Le Xanax était son grand ami dans les moments de grande angoisse mais elle avait horreur de prendre un tranquillisant, elle n’aimait pas ne plus se sentir sous son contrôle, elle aimait encore moins avoir du mal à formuler une idée clairement. Mais elle finissait par se résigner à avaler un cachet lorsqu’elle était seule ou alors épuisée, rien ne servait de lutter à ce moment-là. Elle doutait que Kaspar ait pu remarquer quoi que ce soit dans son comportement, les deux cousins nouvellement réunis ne se connaissaient pas encore assez pour savoir s’ils avaient l’un ou l’autre une attitude qui différait de celle habituellement affichée. Durant le trajet en taxi, Luna avait commencé par se tendre, puis s’était renfrognée. Le chauffeur avait semblé comprendre ce qu’il se passait : il faut dire qu’il était habitué à toutes sortes de passagers, et reconnaître les atteints d’une peur chronique de l’avion n’était plus trop difficile. C’était avec un petit sourire d’encouragement à l’attention de la jeune Italienne qu’il les avait laissés à l’aéroport, se faisant mentalement la remarque qu’ils formaient un drôle de petit couple. Nerveuse Luna se leva et se mit à faire les cent pas dans la salle d’attente de l’aéroport. Ils avaient fait enregistrés leurs bagages, l’avion serait bientôt annoncé.  Alors qu’elle attaquait sa troisième traversée de la salle, elle jeta un coup d’œil à son compagnon d’infortune. Il ne semblait pas plus à l’aise qu’elle, voire même peut-être encore plus effrayé, et un instant, elle se demanda s’il n’avait pas lui aussi peur de l’avion. Elle alla s’asseoir à côté de lui, et commença à lui parler, de tout et de rien, de ses amis, de sa vie, essayant de l’amener – et s’amener elle-même – à oublier qu’ils allaient monter dans un engin qu’elle redoutait plus que la peste. C’était comme ça qu’elle avait confié presque les moindres détails de son existence à un cousin que deux heures avant encore, elle ne connaissait pas du tout.

Une famille. Un concept que Luna avait depuis longtemps oublié. Depuis l’enfance, elle s’était considérée comme seule au monde, suite au séjour en orphelinat. Et aujourd’hui alors qu’elle s’était accoutumé à l’idée de ne plus avoir de famille, voilà que non seulement elle retrouvait son père, mais en plus un cousin au nom à consonance nordique débarquait de nulle part. Et quel cousin. Kaspar lui rappelait Milo par tant d’aspects, jeune homme drôle et intelligent et déjà tant abimé par la vie. Allongée dans son lit en plein cœur de Rome elle écoutait dans la chambre obscure la respiration à présent régulière du nouveau membre de la famille. Elle avait le sentiment qu’il avait eu du mal à s’endormir, et c’était très probablement dû au stress de leur situation. En plus, ils devaient même partager une chambre d’hôtel – qui, heureusement, comptait deux lits simples. Autrefois c’était la respiration de Milo qu’elle écoutait ainsi en cherchant le sommeil quand ils étaient petits et qu’elle écoutait les bruits de la maison. Luna avait tant changé depuis son retour à Rome. Elle avait commencé à faire son deuil. Grâce à Milo. Aux côtés du jeune homme elle s’était épanouie, était revenue à la vie. Aujourd’hui elle était en paix avec elle-même. Enfin presque car si Luna n’arrivait pas à dormir, c’était pour une raison bien précise… Et elle ne trouvait pas le sommeil car ses pensées la ramenaient constamment à Londres et à l’homme qui lui en voulait. Il était vrai qu’elle ne l’avait pas prévenu ni de son retour, ni de ce nouveau départ, qu’elle avait immanquablement rejeté tous ses appels. Il lui manquait. Il fallait bien l’avouer, passer autant de temps loin de lui, en sachant qu’il lui en voulait, était une véritable torture psychologique, un supplice de Tantales moderne. Luna se retourna pour la énième fois sur son matelas et soupira. Elle ne trouverait jamais le sommeil, pas sans Milo ou Achille auprès d’elle. Elle inspira profondément et tâcha de se détendre, ignorant la migraine qui lui vrillait le crâne. Elle avait appris à faire avec ses douleurs, des douleurs chroniques qui se tenaient éloignés d’elle à Londres mais se réenclenchaient dès qu’elle quittait la ville. Elle jeta un coup d’œil vers la table de chevet. Demain on leur expliquerait à quoi ils devraient s’en tenir question héritage, elle devait dormir… rien que quelque heures, ce n’était qu’un somnifère après tout … Elle referma ses doigts sur le petit cylindre de plastique orange. Un seul comprimé… Elle croqua le cachet et déglutit, se rallongea sur les oreillers et soupira. Attendant un sommeil chimique sans rêves …

Le regard perdu dans les documents, accumulant de la pointe de son stylo des détails qui resteraient probablement sans importance, elle allongea le bras pour atteindre son portable qui faisait vibrer avec lui la quasi-totalité de tout ce qui se trouvait sur la table de chevet. Après les récents évènements au Népal, elle avait d’abord eu un sursaut justifié, et avait même envisagé d’aller se planquer dans un encadrement de porte avant de comprendre qu’il  s’agissait de son téléphone, et donc, de ce fait, que nul séisme n’était à craindre, alors la jeune femme avait levé un œil agacé vers la petite chose noire et bruyante.  Le portable en main, elle hasarda un bref coup d’œil sur l’écran puis décrocha en soupirant, déjà. « Oui Milo ? Non, Milo. Oui, oui, je te confirme que je suis toujours en vie, pourquoi ? Non, je t’assure que ma voix n’est pas bizarre, peut être que la réception est mauvaise, mais c’est bien moi, et je suis… hein ? Tu veux pas essayer de respirer normalement ? Là j’ai un peu l’impression de parler avec le fils spirituel de Darth Vador quand même…. Bah oui, c’est moi, qui veux-tu que ce soit d’autre ? Non je ne suis pas à la maison, et non tu ne peux pas monter vérifier que je suis bien en vie et que je respire toujours. Mais je te confirme que je suis toujours en vie, hein. Par contre, je dois t’avouer que je songe sérieusement au suicide depuis que j’ai décroché le téléphone quand même… Oui… Oui d’accord. Promis je ferais attention en rentrant… Oui, je regarderais des deux côtés de la route avant de traverser et… quoi ? Une charrette ? Parce que tu crois qu’on croise souvent des charrettes en plein Rome ? T’as bu ? Oui, oui, OUI ! Ça va, c’est bon ! Oui, je te jure de faire attention aux charrettes avant de traverser la rue ! Satisfait ?... non, m’oblige pas à faire ça, s’il te plait. Non ! Non, Milo, non ! Bon, tu me foutras la paix après ? D’accord… Croix de bois, croix de fer, si je mens, je vais en enfer… Voilà. C’est bon là ? Ok, alors retourne à ta sieste, et rends-moi service, à ton prochain cauchemar débile, oublie-moi. » Sans aucune explication à l’intention de son cousin, elle reposa le téléphone sur la table de chevet après avoir mis fin à la conversation, et reprit sa lecture de la prose de leur nonna. Ce ne fut qu’après une bonne minute de silence qu’elle daigna relever les yeux vers Kaspar. « C’était Milo. » Non, sans blague ? « Il a rêvé que je me faisais écraser par une charrette. » Normal. « Du coup, il voulait me mettre en garde contre les charrettes. » Encore plus normal. « Sinon, ça va toi ? » Parfaitement bien !
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() message posté Ven 8 Mai 2015 - 20:35 par Invité
Ce qui se passa lorsque le Notaire nous reçu parut complètement dingue ! Ce petit homme à lunettes nous présenta l'un l'autre et je sus que l'inconnue avec moi s'appelait Luna et qu'elle venait d'Italie. Il présenta aussi la défunte et nous expliqua le lien qu'il y avait entre nous. Il m'informa que normalement, la somme que j'allais empocher devait être attribuée à mon père mais qu'étant défunt et ma mère aussi, il avait fallu trouver un héritier et que j'avais été désigné. Comme je n'étais plus en Norvège, il leur avait fallu trouver ma trace pour finalement y parvenir tant bien que mal. Ainsi, le cabinet de notaire en Italie voulait tout les deux nous voir afin d'être plus explicite et de nous attribuer de qui nous était dû.

Sur le champs.
Quand il parla d'un taxi en bas de la rue, j'avais ouvert de grands yeux, surpris et pris au dépourvu. J'avais tourné la tête vers Luna en l'interrogeant du regard mais elle semblait aussi perdue que je l'étais. Y avait-il une caméra cachée quelque part ? Si c'était le cas, je ne trouvais pas ça amusant, en particulier dans la période que j'étais en train de traverser.
Mais cela semblait très sérieux. On nous entraîna donc dans la voiture qui nous attendait. Le chauffeur démarra et j'avais la sensation de me faire enlever. Pourtant, c'était très réglementé. Apparemment, on avait téléphoné à nos boulots respectifs pour leur prévenir de notre absence, mais pas à nos proche. Ça, c'était à nous de nous en charger.
Sauf que là, j'étais trop abasourdi pour prendre mon téléphone et appeler Ivana, Nate et les autres. A vrai dire, j'étais complètement perdu, comme un petit chiot qu'on emmenait dans sa nouvelle famille sans qu'il sache où il allait et ce qui allait devenir de lui.

Ce fut qu'une fois arrivé à l'aéroport que je pensais à prendre mon téléphone et envoyer un message à Ivana. J'avais du le réécrire plusieurs fois, parce que je ne savais pas comment lui annoncer les choses. Après quoi, j'en envoyai un à Nate. Je fermai les yeux en essayant de digérer la chose.
Je venais d'apprendre que j'avais de la famille quelque part. Que la fille qui était avec moi, Luna, en faisait parti même si nous n'avions pas un lien familial direct ou très proche. Elle était une cousine lointaine venant d'Italie. Ah oui, voilà. J'avais de la famille EN ITALIE. Je n'avais jamais su cela de ma vie. Grand mère ne me l'avait jamais dit. Je doutais qu'elle était au courant cela dit. Je lui avais tellement posé de question au sujet de mes parents, mais de manière évidente, elle savait plus de chose sur ma mère, qui était sa fille, que mon père, qu'elle n'avait vu que rarement.
Je ne réalisai toujours pas, c'était trop tôt. Luna semblait aussi contrariée que je l'étais. Nous étions deux personnes complètement noyé dans l'incompréhension et chacun de nous étions en train d'avaler la pilule.
J'avais passé le voyage en avion en silence, quoique mes doigts pianotant sur les rebords trahissaient ma nervosité. Luna semblait être dans le même cas que Nate : phobique de l'avion. Si j'étais moins sur le cul, je lui poserais tout plein de question ou du moins, j'essaierais de faire sa connaissance. En revanche, là, de suite, nous n'étions pas en état de discuter.

Arrivé en Italie, je me réjouissais même pas d'être là. Si nous n'étions pas parti si soudainement, j'aurais été enchanté, même très enchanté. Je ne pus tout de même pas m'empêcher de regarder le paysage. Je n'étais jamais allé en Italie de ma vie et je trouvais les alentours très beaux. C'était très différent de l'Angleterre et déjà un peu plus proche de l'Egypte, pays du bassin méditerranéen aussi. Je ne savais pas parler un mot Italien mais j'imaginais que le notaire que nous allions voir nous parlerait en Anglais. Si ce n'était pas lui, ce serait un interprété.  Autrement, je ne comprendrais rien à ce qui se passerait. Luna semblait déjà être plus calée sur la langue mais je me trompais peut être.

Nous n'avions pas vraiment discuté durant la soirée. Je n'étais pas d'humeur au bavardage et Luna non plus. Nous avions donc brièvement dîner avant de regagner la chambre qui nous avait été réservée. Une chambre que nous partagions à deux, dans deux lits simples et séparés. Je ne savais pas pour elle, mais je n'avais pas su m'endormir. Par moment, j'étais parvenu à somnoler, mais Morphée n'avait pas voulu de moi. En même temps, je ne l'avais pas vraiment cherché non plus.
Au bout d'un moment, le téléphone de Luna. En même temps qu'elle, je sursautai. Alors elle échangea quelque mots avec quelqu'un je ne connaissais évidement pas. Je ne savais pas de quoi elle parlait et je ne cherchais pas à le savoir. J'étais encore trop absorbé dans mes pensées, dans ce qui se passait. Mes pensées étaient purement rivées sur Ivana. Avait-elle cru à ce que je lui avais dit ? Je l'espérai. Si ça n'était pas le cas, je ne pourrais pas lui en vouloir. C'était assez absurde ce qui se passait et un peu traumatisant sur les bords. Et puis, j'aurais tellement aimé être à ses côtés, car nous avions besoin d'être à deux dans un moment pareil. Je voulais la soutenir, être là auprès d'elle, la rassurer tout comme j'avais aussi besoin d'être rassuré. J'avais tellement besoin d'elle et sans doute elle de moi. J'avais l'impression de la trahir alors que je ne faisais rien de mal.

« C’était Milo. »

Ces mots me firent sortir de ma torpeur. Je sursautai en me rendant compte que Luna avait fini e discuter et qu'elle s'adressait à moi désormais. Je me tournai vers elle en lui adressant un regard à la fois curieux, qui ne comprenait pas et aussi fatigué.

« Quoi ? »
« Il a rêvé que je me faisais écraser par une charrette. » poursuivit-elle. « Du coup, il voulait me mettre en garde contre les charrettes. »

Je la fixai du regard en essayant de trouver le sens de ses paroles. Pourtant, elle était bel et bien en train de me parler Anglais et non pas une autre langue, genre italien. Cependant, ça aurait pu être le cas que ça m'aurait fait le même effet.

« Oh. »
« Sinon, ça va toi ? »
- Si ça va ?

Une vague d'émotion m'envahit à ce moment là. Cela signifiait que j'étais à deux doigts de craquer et cela malgré moi.

« Non, ça va pas. Je suis parti de Londres comme un voleur, j'ai pu prévenir ma petite amie mais je me demande si elle croit réellement à ce que je lui ais dit. De plus, je viens d'apprendre que j'ai de la famille en Italie alors que jamais de ma vie ils ont donné signe de vie et que je me pensais être seul au monde. Sans compter que ma copine attend un enfant et que par conséquent, je traverse une période pas vraiment terrible. J'ai besoin d'être avec elle et... et voilà que je me retrouve ici, en quelques heures, pour... un héritage, dont je ne sais même pas de quoi il s'agit encore. Si jamais on tombe sur des dettes, là je crois que je serais bon pour la pendaison ! »

J'avais dit tout cela un peu à la hâte, sans réfléchir. J'étais fatigué, sur les nerfs et ça n'était pas contre elle que j'étais en colère mais contre l'organisation de ce truc. J'avais envie de lui dire que j'étais content de faire connaissance avec elle, mais dans l'actuel contexte de la chose, c'était pas encore possible.

« Je suis désolé » finis-je par dire en me calmant un tant soi peu, me rendant compte que ma réaction pouvait être mal interprétée. « C'est juste que... j'aurais aimé que les choses se passent autrement. Ça n'est pas contre toi que je me fâche évidement, parce que tu es dans le même cas que moi.. mais... j'aimerais qu'il m'arrive un peu de bon truc là, en ce moment. »

J'en arrivais à  un stade où je ne savais même plus ce que j'étais en train de dire. Je posais même mes mains sur mon visage pour ne pas me montrer tellement j'avais honte de moi.
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() message posté Mer 20 Mai 2015 - 18:36 par Invité
Chaque famille a ses secrets
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Luna laissa Kaspar faire son petit coup d’éclat sans dire un seul mot. Elle encaissa les révélations qu’il lui faisait inconsciemment, à savoir la grossesse de sa petite-amie, et comprit qu’il avait certainement beaucoup plus de raison de s’angoisser qu’elle. Elle aurait voulu le rassurer et lui dire que tout allait bien se passer, mais elle n’arrivait pas à trouver les mots sur le moment. Elle se doutait bien que l’énervement du jeune homme n’était pas vraiment dirigé contre elle. Visiblement, il avait été trop stressé la veille quand elle lui avait parlé du peu qu’elle savait de la grand-mère d’Aquino, puisqu’il avait l’air de ne pas s’en souvenir. « Je suis désolé » Luna releva la tête, qu’elle avait baissée, et le regarda. « C'est juste que... j'aurais aimé que les choses se passent autrement. Ça n'est pas contre toi que je me fâche évidement, parce que tu es dans le même cas que moi.. mais... j'aimerais qu'il m'arrive un peu de bon truc là, en ce moment. » La jeune italienne sourit  doucement alors qu’il se cachait le visage dans les mains, et posa sa main sur les siennes pour qu’il la regarde. Elle lui fit le sourire le plus encourageant qu’elle pouvait pour qu’il comprenne qu’elle ne lui en voulait pas de son petit agacement.

« Je comprends, t’en fais pas. » Elle ne fit pas durer le contact entre eux deux, car même si elle pouvait se montrer très tactile, elle ne savait pas ce qu’il en était de lui, et elle ne souhaitait pas le mettre mal à l’aise. « En fait, je crois que tu pourrais avoir une bonne surprise. » Sans perdre son sourire, elle se mit à lui réexpliquer ce qu’elle avait déjà raconté le jour précédent, à savoir que Victoria d’Aquino était une riche veuve souffrant d’Alzheimer, que, de ce qu’elle avait pu comprendre de ce que son nouvel oncle retrouvé lui avait dit, la dame avait été conservatrice d’un  musée d’art et grande amatrice de tableaux datant de la Renaissance, et qu’il y avait peu de chance pour qu’ils tombent tous deux sur un héritage comportant des dettes. « En fait, d’après ces documents, » continua-t-elle en lui désignant des papiers couverts de phrases en italien, « elle n’aurait été mise au courant de ton existence il n’y a pas très longtemps, après des recherches qu’elle a fait faire pour retrouver la descendance de sa sœur. Moi, elle m’a rencontrée l’an dernier une ou deux fois, mais avec sa maladie, elle me prenait pour ma mère biologique. »

Luna soupira lentement et regarda ses doigts qu’elle triturait machinalement. Cette nouvelle famille retrouvée lui faisait regretter de ne pas avoir commencé à chercher plus tôt que l’année précédente. Elle s’était toujours sentie si mal à l’aise dans sa famille adoptive. Et puis là, même avec Kaspar, elle se sentait bien. Elle finit par jeter un coup d’œil à sa montre. Ils avaient rendez-vous chez le notaire dans l’après-midi, et il était encore relativement tôt dans la matinée. « Ça sert à rien de rester là à cogiter. Ça te dit qu’on aille faire un tour dans Rome un peu ? Je te servirai de guide. »
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() message posté Lun 1 Juin 2015 - 7:51 par Invité
Je m'en voulais de m'être emporté. Dans un sens, j'estimai avoir le droit d'être en colère après ce qui venait de se passer, non pas contre elle, mais contre... ça. Le fait que les gens vous prennent au dépourvu alors que vous, vous avez une organisation de prévue et qu'en prime, ça n'était pas le moment de venir faire chié. Heureusement, j'avais envoyé un message à toutes les personnes pour leur prévenir que je ne serais pas là, mais c'était plutôt hallucinant. C'était comme si je me faisais kidnapper et que je me laissais faire. Ça arrivait souvent de faire ce genre de chose ou comment ça se passait ? Il y avait déjà eu des plaintes de déposées ou bien ?
J'étais furieux. J'avais du mal à retrouver mon calme. J'étais dans un pays dont je ne parlais pas la langue et dont je ne savais pas dire un mot si ce n'était que le famous « Ti amo » que l'on disait à sa ou son bien aimé(e). Voilà. Et puis Ciao aussi. Mais mon vocabulaire italien ne s'étendait pas au delàs. Du coup, c'était comme arriver soudainement dans un autre monde. Je ne m'y étais pas préparé et je me sentais perdu. Heureusement, je n'étais pas tout seul. C'était peut être égoïste de penser ça, mais si Luna n'était pas là, je serais réellement en panique. Sa présence me rassurait un peu, même si elle n'avait rien fait pour ça.

« Je comprends, t’en fais pas. »  
Un petit sourire parvint à apparaître sur mes lèvres. C'était pas grand chose, mais me sentir compris m'apaisait. Au moins, je n'étais pas fou et ma colère était juste.
« Merci. » prononçai-je timidement, mais content.
« En fait, je crois que tu pourrais avoir une bonne surprise. » m'étonna-t-elle.
Ma colère avait laissé place à la surprise. Une bonne surprise ? Que voulait-elle dire par là ? Connaissait-elle la situation mieux que moi ? En fait, on avait si peu échangé de conversation, que ça pourrait être le cas finalement.
« Ah ? »
Et puis là, elle se mit à me parler d'une certaine Victoria d'Aquino. Le notaire avait expliqué ce qui me liait à cette dame sauf que, vu ce qui s'était passé, je n'avais pas pris le temps d »y songer réellement. Ça me tombait dessus comme ça, comme un coup de massue, alors forcément, pour la réjouissance, ça allait venir plus tard. Elle me parla de tableau de la Renaissance et du fait qu'il y avait peu de chance pour que l'on se retrouve coltinés à des dettes. Je comprenais l'importance de ces mots. Cela signifiait « argent ».
« En fait, d’après ces documents, » Elle me montra les papiers concernés.  « elle n’aurait été mise au courant de ton existence il n’y a pas très longtemps, après des recherches qu’elle a fait faire pour retrouver la descendance de sa sœur. Moi, elle m’a rencontrée l’an dernier une ou deux fois, mais avec sa maladie, elle me prenait pour ma mère biologique. »
J'ouvris en grand la bouche. J'étais en plein rêve là, c'était pas possible. En fait, je vivais ce que vivais les héros des films farfelus que j'avais pu voir dans ma vie. Une dame qui était appartement liée à ma famille et qui avait découvert mon existence il n'y avait pas longtemps ?
« Quoiiiiiiiiiii ? » ne pus-je m'empêcher de dire en guise de réaction. « Mais... le notaire a précisé que ça devait être à la base attribué à... mon père. »
Je gloussai à l'avoir dit. Mon père... j'avais toujours vécu ma vie sans lui, forcément, puisqu'il était décédé avant que je naisse. Mais les mots prononcés là, le rendait vivant. J'avais vu sa tombe lorsque nous étions allé en Norvège et m'étais longtemps recueilli devant. Ça m'avait fait une sensation si étrange... Mais bon, les choses étaient telles qu'elles étaient. Le fait d'avoir « de la famille » qui était au courant que j'existais, ici, en Italie... me faisait donc comprendre que j'avais des origines italiennes, pour commencer. Et aussi qu'il y avait des gens... de MA famille. A moi, Kaspar Felix Hansen, qui avait toujours vécu avec a grand mère britannique et uniquement elle.

Le fait que Luna me proposa de sortir faire un tour dans Rome me fit sortir de mes pensées. Je clignai des yeux en hochant la tête, étant soudainement ramené à la réalité.
« Hein ? Oh, oui, oui, bonne idée ! »
De toute façon, ni elle ni moi semblait être apte à dormir, là, de suite. Se dégourdir les jambes dans cette nouvelle ville allait pouvoir nous occuper... et c'était l'occasion parfaite pour mieux discuter tous les deux. Après tout, elle faisait parti de ma famille. De ma famille. Whouah !
Une fois dehors, je me mis enfin à la confidence. J'avais besoin de parler, vraiment.
« Tu sais, je... c'est vraiment bizarre ce qui arrive là, pour moi. Je ne sais pas comment s'est passé ta vie mais la mienne... piooou... elle est digne d'un film de super héros. »
Ma grand mère me l'avait souvent dit d'ailleurs.
« Tu sais le schéma typique... l'orphelin qui se retrouve tout seul à devoir venger ses parents ou quoi... Je n'ai jamais connu mon père et ma mère. Enfin... j'ai connu très très peu ma mère, tellement peu que je n'en ai pas le moindre souvenir, j'étais trop jeune quand elle est morte. »
Ça me faisait de la peine malgré tout. Parler de la mort de mes parents me faisait pas autant « mal » que si je les avais bien connu et qu'ils avaient trépassé au cours de mon enfance, mais ça me faisait quand même quelque chose.
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() message posté Ven 26 Juin 2015 - 14:25 par Invité
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Aussitôt dit, aussitôt fait, les voilà tous les deux qui se retrouvaient dehors, à l’air libre, dans les rues de Rome. Et comme l’atmosphère un peu pesante de la chambre ne les oppressait plus, Kaspar avait commencé à se confier un peu.
« Tu sais, je... c'est vraiment bizarre ce qui arrive là, pour moi. Je ne sais pas comment s'est passé ta vie mais la mienne... piooou... elle est digne d'un film de super héros. »
Luna resta silencieuse, l’invitant à continuer sur sa lancée. Elle trouvait ça drôle – pas dans le sens hilarant, mais dans le sens légèrement comique – qu’en tant que cousins, leurs vies respectives aient chacune été meublées de rebondissements loufoques. Comme le disait si bien le jeune homme, des vies dignes de film.
« Tu sais le schéma typique... l'orphelin qui se retrouve tout seul à devoir venger ses parents ou quoi... Je n'ai jamais connu mon père et ma mère. Enfin... j'ai connu très très peu ma mère, tellement peu que je n'en ai pas le moindre souvenir, j'étais trop jeune quand elle est morte. »
La jeune femme sortit son paquet de cigarettes et son briquet de la poche de sa veste et glissa une clope entre ses lèvres avant de l’allumer d’un geste qui se voulait désormais expert en la matière. La première expiration de fumée évacuée, elle songea un instant à l’endroit où elle pouvait les emmener tandis qu’elle lui raconterait elle-aussi les affres de sa vies.
« J’ai vécu dans un couvent jusqu’à l’âge de sept ans. »
Leurs pas les menaient tranquillement vers la piazza di Spagna, même si Luna doutait qu’en cette heure tardive, il y ait encore beaucoup de touristes sur place. Le quartier était trop chic pour eux, mais c’était quelque chose à voir.
« C’était en Toscane, pas très loin de Florence. Milo… » Elle rejeta une nouvelle bouffée de nicotine. « L’abruti qui pense qu’on risque de se faire écraser par une charrette… » lui remémora-t-elle. « Il y était aussi. On n’est pas lié par le sang, mais si je devais décrire notre relation, Milo est mon frère. A la vie à la mort quoi. Bref, on s’est fait adopter dans ces eaux-là… »
Une fois arrivés sur la place, elle fut surprise de constater qu’elle s’était trompée, le lieu était encore très animé. Plus par des jeunes de leur âge d’ailleurs, probablement réunis pour quelque occasion sportive ou autre. Elle haussa les épaules et essaya de continuer sa route en espérant que Kaspar suivrait.
« Et puis ma « mère » a trouvé un poste sur Londres. » Elle avait mimé les guillemets avec ses doigts, pour montrer qu’elle faisait bien la différence entre la femme qui l’avait adopté et sa mère biologique. « Pas eu le choix, j’ai suivi. »

Luna avait repéré une place pour qu’ils puissent s’asseoir sur les escaliers célèbres de la place. Elle la désigna du menton à Kaspar, et ils s’installèrent d’un commun accord. Sa cigarette était déjà presque finie, aussi elle écrasa le mégot sur le sol. Elle n’avait jamais vraiment été le genre de filles qui pouvaient rester assises sans rien faire pendant des heures, aussi elle ne mit pas longtemps avant de se relever, incitant Kaspar à ne pas bouger le temps qu’elle revienne. Quand elle reparut, ce fut avec deux canettes de coca-cola dans les mains et une barquette de frites. Trop stressée dans l’avion, elle avait été incapable d’avaler le plateau repas qui leur avait été servi. Elle se réinstalla à côté de son nouveau cousin – même mentalement, le terme lui faisait toujours un drôle de sentiment dans le ventre.
« Mes parents biologiques ne m’ont pas abandonnée par contre. Le jour de ma naissance, ma mère s’est fait renverser par une voiture. Elle est morte au bloc. »
Elle piocha une frite dans la barquette qu’elle avait posée entre eux deux.
« Et les médecins ont dit à mon père que j’étais morte. »
Luna ne souhaitait pas entrer dans les détails de ce mystère qu’était sa naissance, non pas parce qu’elle ne voulait pas en parler, mais simplement parce qu’elle n’avait, à l’heure actuelle, aucun élément qui expliquait ce qu’il s’était passé à l’époque.
« Enfin bon, je suis revenue en Italie il y a deux ans et Milo m’a aidée à retrouver ma famille biologique. C’est comme ça que j’ai pu rencontrer Victoria. Mais ta comparaison est plutôt bonne : des vies de film de super-héros… »

Elle laissa le silence s’installer tranquillement entre eux deux, entrecoupé toutefois par l’animation des jeunes gens de la place.
« Dis… Hansen, c’est de quelle origine ? »
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