"Fermeture" de London Calling
Après cinq années sur la toile, London Calling ferme ses portes. Toutes les infos par ici (flashback) we always see our worst selves. w/theodore 2979874845 (flashback) we always see our worst selves. w/theodore 1973890357
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() message posté Sam 20 Déc 2014 - 21:56 par Invité
we always see our worst selves. our most vulnerable selves. we need someone else to get close enough to tell us we’re wrong. someone we trust. ;; there comes a time when you have to let go all the words, all the teaching and trust the infinite. ✻✻✻ Je posai mes mains sur le dossier posé sur mes cuisses, avant de prendre une profonde inspiration et perdre mon regard dans la salle d’attente du commissariat de police de Londres. Je détaillai les différents visages autour de moi, cherchant presque à deviner pourquoi ces individus se trouvaient entre ces quatre murs, à attendre. Je les détaillai en cherchant presque à enquêter sur eux, à mon tour, en sondant uniquement leurs traits tirés par la fatigue. Peut-être n’était-ce que pour des banalités. Peut-être étaient-ils en train de vivre un tournant de leur existence. Peut-être était-ce pour relater des faits graves et condamnables. Prise d’une bouffée d’anxiété, je baissai le regard pour poser les yeux sur mes mains abimées par le froid, abimées par les efforts. Et pourtant, malgré la peau rougeâtre et les gerçures, cela me paraissait bien futiles par rapport à ce que j’avais enduré le matin même au centre de rééducation de l’hôpital. La douleur physique n’était pas une chose qui m’arrêtait, d’ordinaire. Cela n’était pas un état qui me contraignait de m’arrêter et je me découvrais un certain courage lors de ces pires moments de mon existence.
Pourtant, malgré ma ténacité, malgré la résolution que j’avais à ne pas me laisser abattre et à continuer, j’avais voulu rendre les armes une centaine de fois en exécutant les exercices que l’on m’avait contrainte de faire. La douleur avait irradié mes muscles atrophiés. Le peu de force que j’avais retrouvé dans mes jambes m’avait paru si faible que soulever des barres légères comme une plume avec mes jambes m’avait arraché de longues plaintes. Le pire était sans doute l’incapacité de savoir ce qui allait réellement advenir de mes jambes. De moi. Cela était un traitement expérimental, après tout ; si les médecins avaient trouvé un moyen de réparer certaines de mes connexions nerveuses, ils tâtonnaient, espérant s’approcher de l’exploit relevant du miracle. Il était dur de m’accrocher à ces espoirs illusoires. Il était dur d’y croire et d’avancer, aveuglée par la part d’ombre de la science encore inexplorée.
On m’avait prévenu que le chemin serait long et sinueux, douloureux et décourageant. Cependant, je ne m’étais pas attendu à ce que cela soit aussi difficile.
Mes doigts tremblaient aux simples souvenirs de cette matinée douloureuse et mes inspirations calmes et mesurées n’y faisaient rien pour me calmer. Je fermai doucement les paupières pour retrouver un semblant de contenance, puis les rouvrit en défiant du regard le mur en face de moi. Je refusais d’abandonner, même si mon corps me suppliait le contraire. Voir mes jambes bouger ce matin, au gré de ma volonté, même si cela n’avait été que d’un simple centimètre, avait valu tous les efforts du monde. J’esquissai un demi-sourire en me redressant.
J’attendais, j’attendais encore et toujours. J’attendais pour réparer les erreurs que j’avais commises sous la colère. Mes doigts effleurèrent l’inscription Julian Fitzgerald sur une des pages du dossier, et je repensai à tout ce qui avait bien pu se passer. La noyade, l’abandon. Les coups, la fuite. J’avais porté plainte contre lui, encouragée par mon père qui s’était fait frapper sans avoir rien demandé, encouragée par la pneumonie qui m’avait accablé par sa faute. J’avais porté plainte contre lui sous l’effet de la colère et sous l’impulsion. Et, au final, je regrettais. Je regrettais parce que cela avait été me comporter comme une enfance. Je regrettais parce que cela lui avait montré à quel point cela m’avait touché, à quel point il m’avait fragilisé. Je déglutis avec difficulté, l’air manquant à mes poumons affolés.
Nous n’avions plus rien à nous dire, lui et moi. C’était fini. Fini. Fini. Ce mot résonnait dans mon crâne et, malgré les jours qui avaient bien pu s’écouler, l’amertume de cette vérité envahissait encore ma bouche.
On finit par m’appeler, et je me rendis jusqu’à l’un des bureaux, libres, du commissariat de police où m’attendait une femme de la cinquantaine, les cheveux grisonnants. Je lui adressai un pâle sourire avant de me racler la gorge. « Bonjour. » lui lançai-je, mais celle-ci ne répondit pas, ni à ma politesse, ni à mon sourire. Avec un réflexe presque désarmant, je baissai le regard avant de finalement me rappeler que je m’étais promis d’être forte. D’être fière. Je m’accordai cinq secondes de répit avant de finalement accepter de relever la tête et soutenir son regard froid. « Je vous écoute. » grinça-t-elle avec dédain. Je devais être la dixième personne qu’elle devait voir de la journée. La dixième personne venue se plaindre, venue faire une déclaration, venue avec son dossier sous le bras. La dixième personne venue l’importuner dans sa misérable existence. Pourtant, j’aurais aimé être à sa place. J’aurais aimé pouvoir porter l’uniforme et appartenir à la police de Londres. Elle ne savait pas la chance qu’elle avait.
Elle vivait mon rêve.
Je finis par attraper mon dossier sur mes genoux, et je lui tendis. Je notai son regard insistant sur mon fauteuil, et ma mâchoire se serra ; au fil des secondes, au fil du temps qui s’écoulait, je ressentais un profond sentiment de révolte à l’encontre de cette femme. « Je suis venue il y a une semaine pour porter plainte contre un certain Julian Fitzgerald. Je suis ici pour demander à suspendre les poursuites. » Je pus facilement lire l’exaspération dans son regard et, sous le bureau, je jouai avec les ongles de mes doigts pour refouler l’anxiété qui se déversait dans mes veines. Je le savais, je le sentais. Les prochaines minutes allaient être longues, tourmentées par d’innombrables questions et de soupirs agacés.
Ce fut à ce moment-là que je le vis. Que Theodore Rottenford entra dans mon champ de vision, comme une brève illusion. Mon regard se posa entièrement sur lui avant que je ne me souvienne de ses dernières paroles à mon encontre et, dans un raté de mon cœur, je reportai mon attention sur la femme qui s’occupait de mon cas comme si je ne l’avais pas vu.
Mon passé était tout ce qui me restait. Mon passé était ce qui me réconfortait, le plus souvent. Cependant, dans le tableau idyllique que je me peignais de mon ancienne existence, il y avait néanmoins des tâches sombres ; Theodore en faisait partie.
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Theodore A. Rottenford
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() message posté Lun 22 Déc 2014 - 23:23 par Theodore A. Rottenford
‘‘Curiosity is the lust of the mind and its greatest weakness.’’ Je trainais des pieds dans les longs couloirs de la criminelle. Mon regard ombrageux se perdait dans la section laboratoire et expertise, tandis que je m’avançais vers l’ascenseur. Je sillonnais les lieux depuis quelques semaines déjà, hésitant à demander une analyse ADN  ou une preuve irréfutable de ma parenté, mais plus je m’éternisais dans mes pensées, plus je réalisais que Jazz était déjà encrée en moi. Malgré mes appréhensions premières, et mes angoisses continuelles, je ne parvenais pas à me détacher de son existence douce et délicate. J’avais vécu toute ma vie dans la hantise de perdre les plus chers, alors je m’étais évertué à dresser une distance entre mon cœur et ma raison. Mais Jasmine était là, et je l’aimais déjà de manière  inconditionnelle. Ses éclats de rires malicieux étaient un souffle de vie dans les ténèbres qui m’emprisonnaient. Ses gazouillis d’oiseaux et ses pleurs affamés, berçaient mon quotidien si monotone et si triste. Je songeais à mon père et à ses relations particulières. Je songeais à mes fraudes fiscales et aux dangers multiples que je bravais tous les jours. Je n’avais plus qu’une seule hantise – si je mourrais ; elle était seule.  La peur était un sentiment horrible ; je savais que je m’avançais vers le poignard aiguisé des miens. Je l’avais toujours su. Après tout, le milieu de la pègre était impitoyable ! Mais c’était la première fois que la sensation d’injustice marquait son territoire dans mon cœur. Mes chaussures rasaient le sol dans un son mat que je n'entendais qu’à moitié, submergé par mes angoisses internes et mes terribles secrets. Je m’arrêtais devant la rampe des escaliers et dans un excès de lassitude, je décidais de dévaler les marches une à une- avec une application toute particulière. Mon cerveau était en effervescence, et malgré mes efforts acharnés pour tenir le rythme, mes fonctions intellectuelles souffraient de mon manque de motivation. Je devenais évasif, insouciant, et très grevant, avec mon équipe. Je soupirai en atteignant le hall d’entrée. Comme d’habitude, il y’ avait un monde fou à la réception. Les agents me saluèrent d’un air solennel tandis que j’esquissai tout simplement de la tête, espérant que mon manque d’entrain inhabituel passe inaperçu. Je passai devant les bureaux du commissariat lorsqu’un fauteuil roulant attira mon regard. Instinctivement, je m’approchais de la jeune femme assise en face d’Ingrid Martinez– L’agent de communication le plus frigide du service.

Eugenia me reconnut tout de suite. J’en étais sûr ! Mais elle tourna la tête, feignant l’ignorance. Un sourire malsain se traça sur mon visage déformé par la fatigue et longues veillées nocturnes. Je m’approchai d’Ingrid qui se redressa brusquement afin de présenter ses respects. Je fis un signe de la tête, en regardant le dossier de Ginny. La curiosité n’avait jamais fait partie de mes traits de caractère, mais c’était une valeur qu'on m’avait forcé à adopter à l’école de police. Esprit vif et vaillant. L’envie de savoir si un Homme a tué ou non, est l’une des passions les plus insatiables de l’âme policière. Mon chef de patrouille avait grossièrement déformé cet extrait du dictionnaire du diable afin de rendre notre rôle dans la société plus poétique – mais malgré ses joutes verbales maladroites, et les frénésies prometteuses que les enquêtes suggéraient, je ne m’étais jamais senti l’âme policière. Sans doute parce que j’étais infiltré dans un monde étranger. J’arquai un sourcil ; une plainte contre X pour coups et blessure / non assistance à personne en danger.


« Je prends le relai Agent Martinez. » Lançai-je d’un air poli, surligné de quelques vibrations mesquines. Elle fronça les sourcils, avant de me tendre le dossier d’un air ronchon.

« Mlle … Lancaster. » Fis-je mine de deviner en survolant les fiches d’identité. « Veuillez me suivre jusqu’à mon bureau. »

Je fis quelques pas dans le couloir avant de me retourner vers elle.

« Vous ne vous souvenez probablement pas du chemin. J’ai été promu, c’est pour cela. » Railla-je en lui ouvrant la porte. « Après vous. »

Je m’installai derrière mon énorme bureau en bois vernis en joignant les deux mains. Je me souvenais d’Eugenia Lancaster ; une jeune fille téméraire, casse-cou, et incroyablement collante. Je l’avais suivi depuis ses débuts à l’école de police, parce qu’elle était très motivée d’un côté, et parce que j’appréciais sa compagnie de l’autre. Nos patrouilles improvisées dans les rues sombres et malfamées du quartier chinois, avaient leur charme, jusqu’au jour où elle s’était dressé contre moi.  Si l’envie de savoir était l’une des passions les plus insatiables de l’âme policière. La sienne était maladive et extrêmement dangereuse.

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() message posté Mar 23 Déc 2014 - 23:56 par Invité
we always see our worst selves. our most vulnerable selves. we need someone else to get close enough to tell us we’re wrong. someone we trust. ;; there comes a time when you have to let go all the words, all the teaching and trust the infinite. ✻✻✻ Croiser son regard avait suffi à raviver les souvenirs d’une autre vie qui sommeillaient au plus profond de mon être. Je me revis plus jeune. Plus enjouée. Je me revis plus téméraire. Plus assurée. Le rapport que j’avais avec ce que représentait la personne de Theodore Rottenford était particulier ; il me rappelait des souvenirs de mes espérances passées mais aussi de mes plus profondes craintes, craintes animées par la réalité du monde dans lequel je vivais. Je l’avais admiré et il m’avait déçu. Il m’avait enseigné tout ce que je savais et je m’étais dressée contre lui. Notre relation avait été paradoxale depuis son tout début ; nous avions été tous les deux bien trop impliqués dans ce que nous avions été pour réellement être retenu par l’autre. Je poussai un soupir en évitant son regard, l’ignorant avec superbe comme il me l’avait demandé lors de notre dernière entrevue. Ses dernières paroles à mon encontre me revinrent en mémoire si vite, aussi vite que mon cœur pouvait bien battre. Elle tournait sans cesse dans mon esprit fatigué.
Je fis de mon mieux pour les balayer de mes pensées. Mais je ne parvins qu’à me concentrer à moitié sur la femme d’âge mur en face de moi. Je déglutis avec difficulté, déstabilisée par l’apparition de Theodore.
Il y avait des choses que j’avais réussi à oublier. Des choses que j’avais enfermées au fond de mon être pour les laisser à ce que j’avais un jour été, pour les laisser reposer en paix. Cependant, au bout d’une période donnée, les souvenirs revenaient bien plus vifs qu’auparavant ; ils me percutaient de plein fouet et me blessaient presque. Ignorer mon passé n’était que m’aveugler toute seule. Ignorer mon passé n’était que temporaire parce qu’après tout, on ne pouvait pas vivre bien longtemps en prétendant être une personne que l’on n’est pas. Je pris une profonde inspiration en me focalisant sur la personne en face de moi ; cependant, une ombre vint assombrir le coin de ma vision, et je levai les yeux sur Rottenford.
Je fis de mon mieux pour masquer mes émotions. Pour ne pas montrer le bref tremblement qui avait habité mes mains désorientées. En face de moi, l’agent se redressa avec brusquerie. J’esquissai un sourire en coin en soulignant à quel point elle était bien plus impressionnée par Theodore que je ne l’étais. « Je prends le relai Agent Martinez. » lui dit-il après avoir parcouru les fiches de mon dossier d’un simple coup d’œil. Celle-ci mit du temps avant de rendre les armes et lui tendre. Mes yeux papillonnèrent entre les deux personnes, avant de ne s’arrêter sur Theodore. « Mlle… Lancaster. Veuillez me suivre jusqu’à mon bureau. » Je levai les yeux au ciel quand il fit mine de lire mon nom de famille sur mon dossier, et je débloquai les roues de mon fauteuil pour le suivre. Je jetai un vague coup d’œil par-dessus mon épaule, qui me permit de voir que la dénommée Martinez était déjà passée à autre chose.
Je n’avais été qu’un nom de plus sur un papier, pour elle. Un numéro dans une série infinie d’individus.
Mon cœur battait d’une manière désordonnée tandis que je suivais Theodore. Je ne comprenais pas l’intérêt soudain qu’il avait pour moi ; cela était la première fois que je le croisais depuis notre dernière conversation et j’avais eu la sensation qu’il avait été plutôt clair dans ses propos. Il avait menacé ma vie. Il m’avait menacé, moi, si je venais à continuer d’être dans son existence après avoir franchi les limites du raisonnable en faisant mes recherches sur lui. Dans sa marche, il se retourna vers moi. « Vous ne vous souvenez probablement pas du chemin. J’ai été promu, c’est pour cela. » me dit-il. J’arquai un sourcil, avant qu’il n’ouvre la porte d’un bureau. « Après vous. » Je pénétrai dans la pièce et je l’observai avant que mon regard ne se pose sur l’imposant bureau. Je le regardai s’installer derrière avant de finalement me rendre compte que je m’étais arrêtée d’avancer dans ma contemplation. Il avait été promu, oui. Mais sans doute pas à n’importe quelle place. Mes yeux observateurs notèrent l’aspect froid de la pièce, caractérisant l’être psychorigide qui habitait les lieux. Je notai la plaque, également, indiquant son nouveau statut au sein de la police. Puis, finalement, je vins me poster de l’autre côté de son bureau, et je l’observai en silence quelques instants.
J’aurais aimé pouvoir sonder son esprit. Pouvoir savoir ce qu’il pensait en cet instant précis. J’avais peur mais je me sentais en confiance. J’avais peur mais je ne désirais pas faire demi-tour. Tout en continuant de le regarder dans les yeux, je me raclai la gorge. « Plutôt pas mal, votre promotion. » commentai-je. « Félicitations, je présume. » Quelque part, je savais que cela n’était pas qu’au mérite qu’il avait hérité d’une telle position. S’il avait coupé court à mes recherches sur lui assez rapidement, cela ne m’avait pas empêché d’en apprendre suffisamment sur lui pour savoir qu’il n’était pas blanc comme neige. Je pris une profonde inspiration, avant d’hausser les épaules. « Et je suis sûre que cela vous dispense de vous occuper des plaintes du commun des mortels. » continuai-je. Mon regard se perdit dans son bureau tandis que j’observai les dossiers, rangés soigneusement, et l’aspect épuré de la pièce. J’avais une centaine de questions à poser mais je savais qu’avec une personne comme Theodore, je n’en avais le droit qu’à très peu.
Après tout, ne m’avait-il pas lui-même enseigner de réfléchir avec mon cerveau plutôt avec mes interrogations constantes ? Il avait été celui à me pousser à me débrouiller par moi-même et obtenir ce que je désirais sans compter sur les autres. Face à lui, j’avais la sensation d’être démunie. Comme si l’élève se retrouvait finalement devant son maître après s’être perdu en cours de route. « Je pensais que vous ne vouliez pas me revoir. Vous avez été plutôt clair sur la question, d’ailleurs. Vous pensiez que je n’aurais pas réussi à m’en sortir avec l’agent Martinez ? » J’eus un sourire en coin en continuant de l’observer. J’aurais sans doute mieux fait de partir. Mais je ne parvenais pas à laisser tomber. Cela était comme s’il lançait une nouvelle partie et que j’étais déterminée à jouer – et gagner.
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Theodore A. Rottenford
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() message posté Lun 29 Déc 2014 - 12:05 par Theodore A. Rottenford
‘‘Curiosity is the lust of the mind and its greatest weakness.’’ Eugenia scrutait les coins du bureau imposant d’un œil critique, mais seule son aura bienveillante et son visage malicieux, captivaient mon attention. « Plutôt pas mal, votre promotion. Félicitations, je présume… Et je suis sûre que cela vous dispense de vous occuper des plaintes du commun des mortels. » Lança-t-elle avec une once de soulèvement. Je la fixais avec application, incapable de briser la quiétude du silence qui me submergeait. Elle n’avait rien perdu de sa curiosité ou de son penchant policier ; je pouvais sentir son entrain habituel lutter contre sa condition particulière. J’esquissai une ébauche de sourire en me tournant vers la machine expresso. Je lui adressai un regard, avant de sortir une recharge de capsules. « Café. » Affirmai-je d’un ton sec, au lieu de l’inviter courtoisement. J’abandonnai les préceptes de la bienséance, et les convenances surfaites, comme si le temps ne s’était jamais interposé entre nous. Mes mains glissèrent sur la surface lisse du bois, avant de harper le dossier de la jeune femme. Il n’était certainement pas de mon ressort de répondre à des enquêtes aussi mineures et dérisoires, mais je croyais au destin. Ginny était apparu comme un enchantement, un mercredi après –midi alors que je déambulais comme une âme en peine dans les longs couloirs du commissariat. Et j’avais besoin de concentrer mon énergie sur autre chose ; que les doutes et les questions existentielles. Mes doigts se crispèrent sur le papier tandis que je découvrais la déposition; il était grossièrement décrit qu’elle avait subi un traitement abusif par un certain Fitzgerald. Je plissai les yeux en analysant la situation. Pourquoi se rétracter si près du but ? Il était clair qu’elle était en position de force – ses circonstances atténuantes, ou plus cruellement son handicap, pouvaient attendrir n’importe quel jury dans la planète Terre, et ce même en cas de litige. Or ce n’était pas le cas, et elle n’avait même pas besoin d’aller jusqu’au tribunal pour écraser son agresseur. Les crachotements du filtre m’extirpèrent de mes pensées ; je fis un tour sur mon fauteuil avant de récupérer les deux petites tasses. Je me penchai lentement vers Eugenia.

« Je pensais que vous ne vouliez pas me revoir. Vous avez été plutôt clair sur la question, d’ailleurs. Vous pensiez que je n’aurais pas réussi à m’en sortir avec l’agent Martinez ? » Renchérit-elle sur le ton du défi. J’haussai les épaules avec désinvolture.

« Cette déposition est bourrée de fautes. »Grommelai-je en retenant le nom de l’agent responsable du sacrilège – Pas de prime de fin d’année pour Robinsen. Je me redressai nonchalamment sur mon siège. Je roulai des yeux vers les grandes roues de la jeune femme ; c’était la première fois que je la croisais depuis son accident. J’en avais eu vent ; mais je ne m’étais jamais autorisé à lui rendre visite. Je n’étais ni son ami, ni son collègue. Notre relation étrange avait pris fin à la minute où elle avait essayé de percer ma carapace, inconsciente des dangers qui pouvaient la tarauder. Je n’étais pas un agent comme les autres. J’étais infiltré bien malgré moi. Je portais les espérances politiques de ma famille sur les épaules, et tellement d’autres choses. Je soupirai d’un air déconfit avant de me concentrer sur la requête d’Eugenia. Je bus une lampée de café afin d’accompagner mes gestes mélancoliques.

« Vous voulez donc retirer votre plainte. Vous connaissez la procédure ; il faut que je m’assure que vous ne subissez aucune pression. » J’arquai un sourcil en lui faisant face. « Mlle Lancaster, êtes-vous victimes d’un quelque conque chantage ? Même affectif ? Avez-vous peur en cet instant ? » M’enquis-je en laissant mon esprit machiavélien prendre le dessus sur ma raison . Je titillais ses cordes sensibles en défiant tout ce qu’elle avait pu être par le passé ; courageuse, téméraire, insubordonnée et têtue. « Si je peux me permettre … La gamine que je connu n’aurait jamais abandonné aussi facilement. Je le sais. J’en ai malheureusement fait les frais nombre de fois. » Raillai-je en reprenant ma boisson fumante. Les saveurs de caféines éveillaient mon esprit torturé. Je me laissai tomber en arrière d’un geste noble, et arrogant. Je n’avais peut-être pas acquis mes titres de manière conventionnelle, mais je m’appliquais dans mon travail avec cœur et droiture. Mes fraudes ne concernaient que les ordres de la mafia – Certes ma vocation m’avait été imposée, mais c’était la mienne. J’étais là, envers et contre tous.

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() message posté Sam 3 Jan 2015 - 20:31 par Invité
we always see our worst selves. our most vulnerable selves. we need someone else to get close enough to tell us we’re wrong. someone we trust. ;; there comes a time when you have to let go all the words, all the teaching and trust the infinite. ✻✻✻  Malgré les menaces, malgré nos différends, malgré la tournure qu’avait pris notre relation singulière et invraisemblable, je savais que je lui devais énormément. Je savais qu’il avait été une de ces rares personnes ayant influencé l’essence même de ce que j’étais, m’ayant influencé, moi, au plus profond de mon être. Ma mère était celle qui m’avait rendu innocente et candide ; sa présence apaisante et sa bonne humeur communicative m’avaient bercé durant toute mon enfance et m’avait retenu dans ma pureté. Ma sœur, quant à elle, m’avait obligé à devenir forte et courageuse ; par amour pour elle, j’avais enduré critiques et dégradations, remarques et moqueries. Grâce à Julian, j’avais appris à être attentive et à aimer plus que je ne pouvais bien m’aimer ; j’avais appris à le placer avant moi dans l’ordre de mes priorités, à sans cesse penser à lui avant de penser à moi. Et, Theodore, lui, m’avait formé pour être comme lui. Theodore, lui, m’avait encouragé dans la voie dangereuse que j’avais choisie, m’incitant à me débrouiller et à développer mon esprit d’analyse et ma curiosité. Je lui devais beaucoup, oui. Sans doute plus que je n’osais l’imaginer. Quelque part, il avait représenté l’idéal que je m’étais donné pour objectif, auparavant. Il avait été mon modèle et mon mentor. Il avait toujours imposé le respect dans mon cœur et mon être ; je l’avais presque tenu en demi-Dieu sur Terre avant de finalement le voir chuter dans mon estime. Le voir sombrer.
Je parlais mais je savais que je n’obtiendrais absolument aucune réponse. Je parlais mais je savais que je ne posais pas les bonnes questions, pas ces questions auxquelles il était sans doute enclin à répondre. Ces questions qu’il désirait peut-être que j’énonce. Cela était comme si notre jeu perpétuel ne s’était jamais arrêter. Cela était comme si nous nous étions quitté la veille et que notre nouveau cas n’était que notre relation elle-même. « Café. » dit-il d’un ton qui trancha l’air. Je l’observai se lever jusqu’à la machine et j’esquissai un sourire en coin avant de lui répondre. « Sucre. » Mon ton avait été semblable au sien. Ses inférieurs auraient sans doute été horrifiés de m’entendre lui manquer de respect de cette manière, mais cela était ma façon de lui montrer que je n’avais pas changé.
Qu’au fond, j’étais toujours la même.
Il finit par me donner ma tasse et je la disposai correctement devant moi, sur un coin de son bureau. Il retrouva sa place et je vis son regard couler sur mon fauteuil ; je fis de mon mieux pour conserver la tête haute, pour le défier du regard, pour lui prouver que j’étais forte et intouchable. Prouver. Prouver. Prouver. Je n’avais fait que cela durant des mois, lorsque nous avions encore eu un semblant de lien. Son regard parcourut mon dossier et je compris que je ne m’étais pas trompée. Je n’aurais pas de réponses à mes questions voilées. Je n’avais donc pas posé les bonnes. « Cette déposition est bourrée de fautes. » commenta-t-il dans un bougonnement. J’haussai les épaules, me souciant guère de l’état de mon dossier. Je voulais simplement couper court à la procédure. Les fautes d’orthographe ne faisaient pas partie de ma liste de priorités, aussi nombreuses puissent-elles être.
Theodore but une gorgée de café et mon regard se perdit sur ma tasse avant que je ne reporte mon attention sur lui. « Vous voulez donc retirer votre plainte. Vous connaissez la procédure ; il faut que je m’assure que vous ne subissez aucune pression. Mlle Lancaster, êtes-vous victimes d’un quelque conque chantage ? Même affectif ? Avez-vous peur en cet instant ? » me demanda-t-il. Je pouvais presque voir la satisfaction habiter son regard. Malgré les mois qui s’étaient écoulé, j’avais la sensation qu’il parvenait encore à me cerner. Il n’était pas à cette place pour rien. Malgré toutes les affaires dans lesquelles il devait tremper, cela ne lui retirait en rien son talent. « Si je peux me permettre… La gamine que je connu n’aurait jamais abandonné aussi facilement. Je le sais. J’en ai malheureusement fait les frais nombre de fois. » J’enfonçai mon dos dans le dossier de mon fauteuil. Je balayai ses affirmations d’un revers de la main, sentant la bile envahir ma bouche. L’agent Martinez était peut-être désagréable, mais j’avais la sensation qu’elle aurait sans doute tout fait pour se débarrasser rapidement de mon cas. Theodore, lui, n’avait pas la même détermination. C’était un jeu dangereux dans lequel je m’étais retrouvé sans le vouloir. « La gamine que vous avez connu était également incroyablement impulsive. » répondis-je d’un ton évasif. « Je n’ai pas réfléchi en déposant cette plainte. Je l’ai fait sur un coup de colère. C’était puérile de ma part et maintenant que je me suis rendue compte de mon erreur, j’essaye de réparer les dégâts avant qu’il ne soit trop tard. » Je me raclai la gorge. J’avais déjà énoncé cette vérité à voix haute en la présence de Julian. Cela n’avait pas été facile à admettre ; cependant, face à Theodore, j’avais la sensation que cela était d’autant plus dur. D’autant plus difficile.
Cela était comme lui avouer que je continuais de faire des erreurs, encore et encore, n’apprenant jamais de mon expérience et recommençant sans cesse à prendre les mauvaises décisions. Mais peu importait. Je finis par prendre ma tasse de café et la portai à mes lèvres pour la boire d’une traite ; le shot de caféine réchauffa mon estomac et je la reposai sur le bureau. « Vous savez aussi bien que moi que je peux mentir si je le souhaite. Donc je vais vous affirmer que je ne subis aucun chantage, même affectif, et ma plainte va être retirée. » Je semblais être dotée d’une confiance que je ne connaissais même pas. Mon comportement n’était que le reflet de ce qu’il m’avait toujours appris. J’étais dans l’immense théâtre de mon existence. Je jouais un rôle. Le rôle qu’il m’avait attribué.
J’avais été son élève, après tout. Il m’avait tout enseigné.
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() message posté Mar 6 Jan 2015 - 18:10 par Theodore A. Rottenford
‘‘Curiosity is the lust of the mind and its greatest weakness.’’  J’avais su à la minute ou j’avais croisé son regard incroyablement pétillant qu’Eugenia n’était pas une fille comme les autres. Certes sa douceur et son innocence étaient frappantes, parfois même répugnantes, mais elle avait un sens particulier pour l’enquête et l’analyse. La première fois qu’on me l’avait présenté, ce n’était qu’une gamine ambitieuse qui faisait du bénévolat dans la section criminelle du commissariat. Elle était chargée de l’archivage des preuves illicites ou inutiles, en attendant d’intégrer sa formation pratique. Je n’avais pas accepté sa candidature, mais on l’avait assigné sous ma tutelle. Bien sûr que j’avais répugné à la prendre sous mon aile. Je m’étais même montré grossier face à mes supérieurs, signifiant que mon rôle s’étendait au-delà des limites du danger, et qu’un fardeau ne pouvait que ralentir mon ascension.  C’était le passé. Je souris d’un air narquois, je l’avais jugé impunément et elle m’avait fait regretter cet affront mille fois sans s’en rendre compte. Je me rappelle qu’elle s’était montrée incroyablement têtue, malgré mes recommandations et mes aboiements féroces. J’avais remarqué au bout de quelques semaines que l’ordre alphabétique de mes dossiers était complètement perturbé. Un sacrilège lorsqu’on connait mon penchant insensé pour le contrôle, et mon tempérament glacial. Elle avait subi mes foudres sans broncher, avant de me signaler qu’il était plus judicieux de suivre une chronologie plus pertinente que celle de l’alphabet. J’avais réalisé ce jour-là, qu’il ne suffisait  pas d’acharnement et de travail assidu pour réussir, mais aussi d’inventivité. Eugenia était la bouffée de fraîcheur qui gardait mon esprit en éveil. Elle m’avait accompagné dans mes raisonnements peu orthodoxes, et mes infiltrations nocturnes malgré mon refus de l’impliquer sur le terrain. Je passai un doigt sur le rebord de ma tasse afin de ponctuer mes souvenirs. Elle aurait fait un excellent agent, c’était indéniable ! « Sucre. » Grinça-t-elle sur le ton de l’insubordination. Je retins un rire, amusé par la vivacité de son esprit. Elle avait du répondant, c’était déjà ça.  Je survolais les feuilles de son dossier, faussement intéressé par ses mésaventures. Ce qui m’intriguait allait au-delà du papier et des conventions. Je voulais élucider ses mystères, l’essence même de son identité. C’était triste qu’elle ne puisse plus poursuivre ses grands rêves. Non. C’était triste qu’elle pense ne plus pouvoir poursuivre ses grands rêves – certes il n’était plus question de frénésie et de traque en temps réel dans une clairière sombre armes en main, mais elle pouvait toujours faire valoir la justice du haut de son perchoir. J’en étais persuadé, malgré les directions différentes que nos chemins avaient pris.

Je m’attardais sur ses motifs, me moquant presque de la frivolité de ses décisions. J’étais toujours contre le retrait des plaintes, c’était un principe.« La gamine que vous avez connu était également incroyablement impulsive. Je n’ai pas réfléchi en déposant cette plainte. Je l’ai fait sur un coup de colère. C’était puérile de ma part et maintenant que je me suis rendue compte de mon erreur, j’essaye de réparer les dégâts avant qu’il ne soit trop tard. »  Se justifia-t-elle, le regard fuyant. Je penchai la tête afin de concentrer mon ouïe sur ses paroles, et tout ce que j’entendais n’était que mensonges et désolations. Il était toujours trop tard. Ce Julian Fitzgerald était déjà fiché par les autorités, même si elle annulait ses poursuites. « Vous savez aussi bien que moi que je peux mentir si je le souhaite. Donc je vais vous affirmer que je ne subis aucun chantage, même affectif, et ma plainte va être retirée.»  Elle se lova contre son siège avant de boire son café d’une traite. Mon cœur se serra lorsqu’elle déposa la tasse à même le bureau, mais je ne pouvais pas la blâmer. Je n’avais pas proposé de sous-tasse, trop obnubilé par les perspectives de jeux et d’amusements qui s’offraient à moi. Je me penchai avec un mouchoir afin d’essuyer la surface lisse du bois. Je me débarrassai de sa tasse vide, et de la mienne par la même occasion, puis je me postai en face d’elle, et sans m’en rendre compte je me mis à dessiner des cercles fermés sur mon bloc-notes.

« C’est ennuyant. Ce que tu dis m’ennuies … » Tranchai-je en quittant mon rôle de mentor. Je la tutoyai subitement, faisant tomber toutes les barrières qui nous séparaient. « L’élève dépasse la maître. J’admire ton assurance mais je n’ai pas envie de retirer ta plainte. Je le ferais, parce que la loi m’oblige à suivre la procédure, mais je ne suis pas un homme conventionnel. Tu le sais. » Je ris avec légèreté en joignant les deux mains . « Mes crimes restent impunis, alors pour compenser je dois punir tous les autres. C’est le grand équilibre de la vie. C’est une façon poétique de te dire que Julian Fitzgerald m’a assez pourri comme ça. » Raillai-je avec subtilité. Je me souvenais de ses longues escapades à Liverpool, et de ses veillées nocturnes. Elle me présentait parfois des rapports bâclés, ou froissés à cause de ses déplacements nombreux. Je fis la moue. « C’est le même gars n’est-ce pas ? » A croire que tous les hommes dans sa vie finissent par dévoiler les crocs. Personne n’est parfait.
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() message posté Sam 10 Jan 2015 - 16:07 par Invité
we always see our worst selves. our most vulnerable selves. we need someone else to get close enough to tell us we’re wrong. someone we trust. ;; there comes a time when you have to let go all the words, all the teaching and trust the infinite. ✻✻✻  Theodore incarnait les rêves que j’avais pu avoir. Il me remémorait une existence antérieure et lointaine, des souhaits devenus poussières et oubliés volontairement dans les tréfonds de mon être. J’avais voulu être à sa place. J’avais été déterminée à lui prouver que j’avais mes chances. Que je valais plus que les autres. Que je valais la peine. Je m’étais accrochée malgré tous les mots assassins qu’il avait bien pu m’adresser. Je m’étais accrochée coûte de coûte, indémontable, imperturbable, poussant mon courage aux limites du raisonnable. J’avais enduré ses excès acides pour lui prouver que je pouvais garder la tête haute. Pour lui prouver que je voulais aller plus loin, que je méritais son attention et son temps.
Pour lui prouver que je n’étais pas une moins que rien, un être qu’il pouvait écraser en un revers de la main.
J’aimais me répéter, parfois, que j’avais réussi à me faire une place dans son quotidien. Qu’il avait fini par cesser de me dénigrer à un moment donné, même si cela ne voulait pas forcément dire qu’il me portait dans son cœur ; je savais que l’on ne pouvait se faire aimer d’une personne comme Theodore mais j’avais eu l’espoir, qu’au moins, j’avais su me faire respecter pour ce que j’étais et ce que je valais. Cela avait été mes seuls souhaits, mes seules espérances, face à l’être qu’il incarnait et l’influence qu’il possédait dans le monde de la criminalité et des enquêtes policières. Je m’endormais parfois en songeant à cette cohabitation que nous avions eu durant de longues semaines, en songeant à l’application que j’avais eu à faire les choses. Je n’avais jamais eu peur d’aller à contre-courant et j’avais souvent payé les conséquences de mes actes ; il m’avait souvent fait la morale mais j’avais cru percevoir, à plusieurs reprises, une lueur au fond de son regard. Une lueur que je n’avais jamais réussi à analyser. Une lueur que j’avais fini par observer d’un meilleur œil, pensant que cela n’était pas forcément quelque chose de fondamentalement mauvais.
Mais, après tout, nous ne pouvions jamais réellement savoir avec un être comme Theodore. Il était aussi vaste que l’espace. Que la galaxie. Qu’une mer déchainée, qu’une houle infatigable. Il était insondable et impénétrable. Il était imposant. Et, malgré les mois entiers durant lesquels je l’avais côtoyé, je n’avais toujours pas réussi à le cerner complètement. « C’est ennuyant. Ce que tu dis m’ennuie… L’élève dépasse le maître. J’admire ton assurance mais je n’ai pas envie de retirer ta plainte. Je le ferais, parce que la loi m’oblige à suivre la procédure, mais je ne suis pas un homme conventionnel. Tu le sais. » me déclara-t-il et je serrai la mâchoire en l’observant. Je le détaillai du regard, me persuadant que je n’avais pas peur de ses yeux froids et de son expression lisse. Je le savais psychorigide et appliqué. Je le savais malhonnête et brillant. Mais quelles étaient toutes ces choses que je ne savais pas encore de lui ? Je savais qu’il existait mille et un faits que je n’avais pas encore découvert. Je m’étais arrêté dans mon élan, après tout. Je m’étais arrêté en plein vol. « Mes crimes restent impunis, alors pour compenser je dois punir tous les autres. C’est le grand équilibre de la vie. C’est une façon poétique de te dire que Julian Fitzgerald m’a assez pourri comme ça. C’est le même gars n’est-ce pas ? » J’esquissai un sourire en me souvenant de ces jours, peut-être plus heureux, où je m’étais faite incendier par un Theodore hors de lui. Son obsession pour la perfection avait été malmenée par certaines de mes rares négligences passées. Je l’observai, tandis qu’il était face à moi. « Bien sûr que c’est toujours le même. Décidé à te pourrir l’existence jusqu’à la toute fin, j’en suis sûre. » lui répondis-je avec une pointe d’amusement. « Je n’ai pas tant de gars que cela dans mon existence, vous savez. C’était forcément le même gars. » J’haussai les épaules avec délibération avant de me racler la gorge.
Ce que Theodore ne savait sans doute pas, c’était qu’il n’y avait eu que lui.
Ses paroles raisonnèrent dans mon esprit et je me surpris à me demander si Theodore continuait ses écarts de conduite ou s’il avait cessé. J’eus presque un rire pour moi-même lorsque je me fis la réflexion que cela ne serait sans doute pas une gamine comme moi qui le ferait s’arrêter dans son élan ; il n’en avait sans doute rien eu à faire, de mon avis et de mes idéaux. Il m’avait simplement menacé pour m’écarter du passage.
Il m’avait simplement menacé pour être tranquille et poursuivre.
J’eus envie de recommencer, presque. J’eus envie de mettre mon nez dans ses affaires et de reprendre mes recherches où je les avais arrêtées sous la contrainte ; puis, au bout de quelques instants, je sentis mon cœur s’emballer dans ma poitrine. Cela était la première fois. Cela était la première fois que je laissais un libre cours à mes pensées lorsque cela concernait mes anciennes pratiques et mes anciennes espérances. Cela était la première fois que je me laissais aller, que j’acceptais l’idée que je n’en avais pas tout à fait fini avec les recherches et la criminalité. « Vous ne trouvez pas cela injuste de punir les autres tandis que vous ne prenez pas la peine de respecter la loi vous-même ? » lui demandai-je en sortant de ma torpeur. « Enfin, cela ne sont pas mes affaires. Vous me l’avez bien fait comprendre. Cependant, je refuse que vous vous acharniez sur Julian pour satisfaire votre culpabilité voilée de ne pas faire régner l’ordre et les lois dans vos propres affaires personnelles. » Je savais que mes paroles étaient dangereuses, que faire ce genre de remarques ne m’étaient probablement pas permis. J’avais toujours respecté Theodore ; au-delà du fait que je m’étais appliquée à lui tenir tête, je lui avais toujours accordé un profond respect et une reconnaissance sans limite. Mais la vérité était une chose qui blessait ; et, dans ce que j’avais pu apprendre sur lui, un sentiment d’injustice ne m’avait jamais réellement quitté.
J’étais née pour me battre pour la vérité et la justice. Née pour ces rêves que je n’avais plus. Née pour cette vie qui n’était plus la mienne.
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Theodore A. Rottenford
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() message posté Mer 14 Jan 2015 - 23:10 par Theodore A. Rottenford
‘‘Curiosity is the lust of the mind and its greatest weakness.’’  Il y’ avait une ombre soupirante au fond de mon cœur ; chacune de mes paroles semblait raisonner dans le vide avant de transcender dans la pièce froide. Mon regard sombre, presque ténébreux se posa successivement sur Eugenia et son fauteuil roulant. Je ne la jugeais pas. Je ne critiquais pas. Je ne faisais qu’analyser. Mon esprit grouillait en effervescence, et pendant une fraction de secondes je redevenais l’homme téméraire et imposant que j’étais. J’oubliais mes craintes, et le destin déchu de Jasmine. J’oubliais mes responsabilités et les pressions de mon patriarche. Un sourire narquois déforma les courbures de ma bouche fine, et je me penchai avec désinvolture sur les tas de papiers. L’écriture désordonnée  se brouillait devant moi, et je réalisais avec effarement que cette gamine s’était éloignée des sentiers battus. Elle avait perdu ses espoirs et ses ambitions. C’était bête. Je pouvais facilement retrouver l’étincelle désinvolte qui animait son regard olive. Ses froncements de sourcils subtils et ses grands airs de réflexion n’avaient pas changés. A mes yeux, elle n’avait pas changé d’un pouce. Je me lovai dans mon siège ; elle avait toujours cette même innocence infantile et je ne pu retenir un certain instinct de protection. Bien malgré moi, je la comparai à ma propre fille ; Jasmine. Dans un monde vaste et cruel, elle avait besoin de guidance et de fantaisie. La foi était un concept surfait, mais si j’avais réussi à me contenir au sein de la religion ; Ginny pouvait aussi. Je joignis les deux mains sur mon bureau. La pègre irlandaise avait bien des défauts, mais dans le chemin périlleux vers la justice, il y’avait les valeurs familiales, et la majesté de l’église. Le clan reconnaissait toute la miséricorde du culte, et je reconnaissais le clan depuis la naissance. Je déglutis avec lenteur en me concentrant sur les paroles de la jeune insolante. «Bien sûr que c’est toujours le même. Décidé à te pourrir l’existence jusqu’à la toute fin, j’en suis sûre. Je n’ai pas tant de gars que cela dans mon existence, vous savez. C’était forcément le même gars.»  Je saisissais une pointe d’amusement dans sa voix. Je fus interloqué par cet échange tout à coup complice. Mes pensées se chevauchaient entre méfiance et affection. Je ne me l’avouais que rarement, mais malgré ses lacunes, et son entêtement parfois éprouvant, Lancaster avait été de loin l’élément le plus prometteur de sa promotion. Je le savais. Elle, certainement pas.

Je levai les yeux au ciel afin de détailler l’architecture subtile des murs du commissariat. J’avais imposé mes propres standards avant d’élire domicile dans la pièce spacieuse. Il y’ avait un rangement de dossiers importants, un comptoir avec un machine à café, et même un dressing en forme d’antichambre pour nourrir toutes mes obsessions démesurées ; des vêtements de rechange, une toilette complète, une brosse à dent, de l’antiseptique, et quelques instruments de tortures mesquins.  Je souris en fixant le visage flegmatique d’Eugenia. Je savais pertinemment que je perdais mon temps à essayer de converser; elle était très bornée. « Vous ne trouvez pas cela injuste de punir les autres tandis que vous ne prenez pas la peine de respecter la loi vous-même ? Enfin, cela ne sont pas mes affaires. Vous me l’avez bien fait comprendre. Cependant, je refuse que vous vous acharniez sur Julian pour satisfaire votre culpabilité voilée de ne pas faire régner l’ordre et les lois dans vos propres affaires personnelles.  »  Je retins un éclat de rire démentiel, afin de garder plein pouvoir sur la situation. Il ne s’agissait pas de partager mes idéaux ou mes valeurs. Je gribouillai sur sa demande de retrait de plainte, avant de la jeter dans un coin.

« Affaire classée. Satisfaite ? » Je me relevai prêt à la congédier avec courtoisie. « Je ne m’acharne pas contre Julian. C’est toi. » Fis-je remarquer avec désinvolture avant de contourner mon siège. « Je te raccompagne. Tu habites à Hammersmith maintenant, n’est-ce pas ? » Je le savais parce que je m’étais enquis de sa situation il y’ a quelques temps, mais il n’y avait pas besoin de tergiverser. « C’est sur ton dossier. » Anticipai-je afin de calmer ses ardeurs. Je savais qu’elle avait un penchant presque mortel pour les questions inappropriées. Je lui avais appris bien des choses, mais je n’étais jamais parvenu à limiter sa curiosité dévorante. Subtilité, Eugenia. Subtilité. Elle avait le droit de tout savoir, mais la mesure était une valeur qui lui manquait cruellement. Je frôlai son bras en croisant son fauteuil, puis je me dirigeais vers la porte les épaules larges, et le dos dressé en i. Ma journée n’était pas encore terminée, mais je n’avais pas envie de l’emprisonner entre quatre murs.  Eugenia était un esprit libre, et l’esprit libre appartenait aux vents désinvoltes de l’hiver. Je sortis la clé de mon audio coupée sport avant d’appuyer sur le bouton. Je savais qu’elle couinerait au loin, attendant patiemment que je la conduise dans les rues étroites de Londres.  
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() message posté Ven 16 Jan 2015 - 23:01 par Invité
we always see our worst selves. our most vulnerable selves. we need someone else to get close enough to tell us we’re wrong. someone we trust. ;; there comes a time when you have to let go all the words, all the teaching and trust the infinite. ✻✻✻  J’étais animée par la soif de savoir. Par l’envie de comprendre. L’univers était infini et, pourtant, je cherchais encore un moyen de l’appréhender dans sa totalité comme s’il était possible pour l’esprit d’un être humain de tout connaître. J’avais été ainsi depuis mon plus jeune âge ; cela avait été comme si mon avenir avait été tout tracé bien avant que je ne comprenne réellement l’ampleur de mes ambitions. Je n’avais fait qu’empirer avec le temps. Je n’avais fait que repousser les limites, jour après jour, m’enfonçant dans cette personnalité que je me forgeais et dans mes principes d’autodidacte que je m’attribuais. Ma mère n’avait compris qu’à moitié l’intérêt que j’avais eu pour la police et les enquêtes ; mon père, lui, avait été plus méfiant et m’avait supplié de faire attention à moi. De réfléchir. De prendre la bonne décision avant qu’il ne soit trop tard.
Au final, il avait été trop tard pour moi bien avant que je n’ai le temps de choisir.
Il était même parvenu à repousser le moment où j’avais été sensé intégrer les rangs de l’école de police ; je lui avais accordé trois ans afin de me donner le temps d’étudier à la Law School du King’s College. J’avais accompli mes deux premières années sans la moindre embuche, travaillant comme une forcenée et me voyant attribuée des notes bien au-delà de mes espérances. J’avais trouvé le temps pour faire des stages et compléter mon cursus, accumulant les mérites en demeurant aveuglée par ce que je voulais réellement. Je n’avais jamais eu l’occasion de terminer ma troisième année. J’avais été hospitalisée juste avant les examens de fin d’année.
Tout s’était terminé dans un dernier éclat teinté de réussite éphémère. Je n’avais jamais trouvé le temps de savourer mes victoires, trop obnubilée par le futur, et l’on m’avait coupé les ailes dans mon envol. J’avais eu un objectif et des ambitions, mais je n’avais jamais eu le courage nécessaire pour poursuivre mes efforts après mon accident de voiture ; je n’avais pas réussi à me faire à l’idée que tout cela puisse encore avoir un sens. Il ne m’avait manqué que très peu de choses pour être finalement diplômée ; je savais, au fond de moi, qu’il m’aurait suffi de la session de rattrapage pour obtenir un petit bout de papier certifiant que je n’étais pas une bonne à rien. Mais je n’avais pas pu. Je n’avais pas réussi. J’y repensais chaque jour, chaque instant et, pourtant, le courage me manquait à chaque fois que j’étais prête à céder. Ces études au King’s College avait été le synonyme d’ascension plus rapide dans la police, une fois mon heure venue ; j’avais refusé de tout mon être et de toute mon âme qu’elles ne deviennent qu’un lot de consolation pour une demoiselle brisée.
Je fixai Theodore avec une arrogance retenue par le respect, et je me revoyais. Je me revoyais gamine candide courir partout entre les murs de la Law School et ceux du commissariat, entrainant dans mon sillage rapport d’enquêtes et dissertation avancée sur certains articles de loi. Dans la frénésie de mon quotidien, j’avais réussi à travailler et voir Julian ; travailler et m’entrainer ; travailler et m’amuser à ma manière. Et, maintenant qu’il ne me restait plus rien, je ne parvenais même plus à trouver du temps pour vivre. « Affaire classée. Satisfaite ? » me lança-t-il et je revins sur Terre. Je le vis poser mon dossier sur son bureau et j’esquissai un sourire en coin. J’avais connu Theodore plus dure en affaire. J’étais presque déçue, maintenant que cela était derrière moi, qu’il rende les armes aussi facilement. « Je ne m’acharne pas contre Julian. C’est toi. » ajouta-t-il. Je fronçai les sourcils tandis qu’il se levait de son fauteuil ; il le contourna avec soin avant de marcher jusqu’à moi. C’était le signal. Le signal pour moi de m’en aller. Le signal de repartir à mon quotidien tranquille rythmé par mes espoirs brisés en mille morceaux ; le signal qui m’indiquait qu’il fallait que je lâche prise sur mes rêves.
Une nouvelle fois.
J’avais du mal. Tant de mal. Mais n’était-ce pas le propre des rêves ? N’était-ce pas leur principe même ? Que l’on ait du mal à les laisser nous échapper ? Je me perdais. Dans mon esprit, dans mes pensées, dans mon être, dans mes interrogations. Mais j’avais la sensation que je ne faisais que cela. Je ne faisais que me perdre. « Je te raccompagne. Tu habites à Hammersmith maintenant, n’est-ce pas ? C’est sur ton dossier. » m’indiqua-t-il. Je fronçai les sourcils. J’étais née avec un esprit de contradiction rare ; et, en cet instant, je refusai de le croire. Il s’avança vers moi, frôlant mon bras en passant à mes côtés, m’invitant à le suivre. « C’est étrange, j’étais persuadée que vous faisiez semblant de lire ma paperasse de citoyenne du bas peuple londonien. » commentai-je avant de finalement poser mes mains sur mes roues. Je donnai deux coups afin de passer l’encadrement de la porte ; je le suivis en silence, mes pensées s’égarant dans tous les détails que j’avais pu noter lors de notre entrevue. Son regard avait été vague, en parcourant les pages de mon dossier. Il avait passé bien plus de temps à me fixer qu’à lire les lignes. Il était possible qu’il ait retenu certaines informations au fond de son subconscient ; cependant, même si Theodore était une personne indéniablement brillante, cela me paraissait fort peu probable qu’il se souvienne d’une adresse exacte parmi l’amas d’informations qu’il avait dû survoler en un temps limité. « Mais, oui, c’est exact. Hammersmith. » finis-je par reprendre. « C’est gentil de me proposer de me raccompagner… Même si, pour être tout à fait honnête, je suis presque sûre qu’une part de vous conspire contre moi afin de me tirer une balle et jeter mon corps dans la Tamise. » Mon ton avait été tranquille bien que mes craintes soient réelles. Réelles et encrées dans mes veines. Theodore était un homme que l’on pouvait difficilement cerné ; chacun de ses gestes étaient motivés par ses pensées impénétrables. Insaisissables. Et je ne réussissais pas à le déchiffrer, malgré tout l’acharnement que je pouvais mettre en œuvre pour le faire. « Peu importe. Je ne suis plus à cela près. » Je balayai mes propos de la main en continuant de le suivre dans les couloirs. En continuant de le suivre, malgré tout.
Quelque part, j’avais la sensation que, si j’avais tout abandonné, s’il m’avait rejeté, il n’avait jamais réellement cessé d’être mon supérieur.
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() message posté Jeu 5 Fév 2015 - 3:00 par Theodore A. Rottenford
‘‘Curiosity is the lust of the mind and its greatest weakness.’’  Le monde était encore indéchiffrable. Les étoiles s’alignaient dans un ciel sombre et gluant, mais malgré toutes les logiques, et les lois de la gravité, je ne parvenais pas à apercevoir l’espoir déroutant et le cœur frêle de l’innocence. C’était des notions qui m’échappaient entre les doigts. J’étais comme un lévrier affamé s’élançant dans la course contre la souris mécanique qu’il ne pouvait jamais rattraper. Je suppose qu’Eugenia ne connaissait pas ce sentiment. Au-delà de la tristesse qui l’habitait, elle semblait avoir une part de rêve au bout du regard. Elle ne se donnait pas les moyens, mais je savais qu’elle pouvait surmonter les obstacles afin de briller de mille feux, tout comme elle était supposée le faire avant l’accident. Je crispai ma mâchoire en feignant un sourire aimable, mais je savais qu’elle n’y croirait pas. Mon visage ne se prêtait pas facilement à la compassion – j’avais des valeurs strictes encrées dans mon esprit. L’indulgence, la pitié, ou la sollicitude, me faisaient horriblement défaut, mais mon silence n’était pas toujours intimidant. Parfois, je me perdais dans la contemplation de la beauté et de la magnificence. Parfois j’avais si peur d’emprisonner Jasmine dans ma cage dorée. Je voulais apprendre toutes les démarches à suivre pour combler son enfance, mais mon cœur était enveloppé de glace. Il n’y avait rien de bon en moi ; j’étais pourri jusqu’à la moelle. J’en avais parfaitement conscience, et une part de moi, ne supportait pas de se détacher de mon passé. Le visage poupin de ma fille me hantait, m’insufflant la vie, et des émotions nouvelles – mais je n’étais qu’un inconnu paré d’arrogance. Ce que je ressentais n’était qu’une ombre, un jeu de contraste et  ma pire faiblesse. Je passai furtivement ma main sur la croix qui ornait mon cou afin d’effleurer la miséricorde.  " La voie des humains n'est pas en leur pouvoir, et il n'est pas donné à l'homme qui marche de diriger ses pas." La force du Dieu éternel m’entourait tout le temps, mais les paroles pieuses et puissantes qu’il prononçait à travers les pages de la bible me semblaient parfois si injustes. Quel que soit ma quête ; je finissais toujours par choisir le sang. C’était ma destinée inévitable, celle que je ne pouvais commander ou diriger. Je soupirai en scrutant les coins de la pièce ; j’aurais tellement aimé me réfugier dans mon antichambre afin de badigeonner mes mains d’antiseptique. Ce geste était certes, stupide et maladif, mais il me créait l’illusion d’une sécurité qui n’existait pas dans ma réalité.

Je contournai le bureau d’un pas lent avant d’adresser un regard à la jeune brune. Elle répondait à chacun de mes mouvements, par de longs et majestueux silences. Au bout de quelques années passées à travailler ensemble, elle avait peut-être fini par comprendre que je n’étais pas un homme de la bonne parole. Je gardais mes interrogations secrètes, comme si dévoiler les fluorescences de ma réflexion était un signe de faiblesse. Je n’aimais pas partager ; elle non plus. Nous n’étions pas très différents, et pourtant je peinais à la retrouver au juste milieu. Eugenia était l’enfant que j’avais un jour été ; mal à l’aise, taciturne, et incomprise. « C’est étrange, j’étais persuadée que vous faisiez semblant de lire ma paperasse de citoyenne du bas peuple londonien.   » Rétorqua-t-elle avec un brin de sarcasme qui ne m’échappait pas. Elle traversa l’encadrement de la porte tandis que je m’engouffrais dans le couloir, sourire aux lèvres. Je restai quelques instants à ses côtés avant de la semer de quelques enjambées.  « Mais, oui, c’est exact. Hammersmith. C’est gentil de me proposer de me raccompagner… Même si, pour être tout à fait honnête, je suis presque sûre qu’une part de vous conspire contre moi afin de me tirer une balle et jeter mon corps dans la Tamise.  Peu importe. Je ne suis plus à cela près. » Je m’arrêtai brusquement, lui barrant le passage. Mes yeux nuancés par le vice se posèrent sur son visage pâle. Je ne croyais pas au péché originel, les Hommes étaient faits de poussières et de lumières. Ce n’était pas mal d’exprimer sa nature bestiale. Ce n’était pas mal de vouloir s’accrocher à la facilité, même si cela était synonyme d’injustice. Je me penchai avec recueillement vers elle, les mains postées de part et d’autre de ma taille. « Je ne tire jamais en premier. » Murmurai-je à bonne distance de son oreille. « Je ne fais que défendre une cause – et quelques personnes. » Je me redressai. « Combien de temps encore, devrais-je supporter ton vouvoiement diabolique ? Tu crois que parce que tu es ironique je ne peux pas apprécier les semblants de respect que tu m’accordes, mais tu te trompes, Ginny … » C’était ainsi qu’elle se faisait appeler à l’époque. Je plissai les yeux en continuant ma marche glorieuse vers l’extérieur.

Les phares clignotants de mon cabriolet s’extirpaient dans le crépuscule, avant de capturer mon attention. Je me demandais comment mon coffre minuscule pourrait contenir le fauteuil de mon invitée, alors je songeais à le déposer sur la banquette arrière – mais l’image horrifiante de toute la boue et les poussières collés aux roues me percuta. Je retins mon souffle en sentant un frisson de dégout traverser mon dos. Ma tête me tournait, et je dû me faire violence afin de ne pas sombrer dans la paranoïa. J’étais bien parvenu à transporter Elliana à l’hôpital malgré ses blessures et le sang qui gouttait sur mes tapis.  Je déglutis avec difficulté.  « Tu préfères peut-être prendre un taxi ? » Hasardai-je fermant les poings. Mauvaise idée ! Goujat ! Impoli ! Freak ! J’ouvris la portière avant avec lassitude. « Tu peux monter toute seule, n’est-ce pas ? » M’enquis-je sans broncher.  
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