Meluzine ++ It's not a love affair

Meluzine est née à Bréda, dans le sud des Pays-Bas. Avant elle, une sœur cinq ans plus âgée. Au début, ce nouveau statut de grande-sœur mettait des étoiles dans les yeux de la concernée. Elle pourrait faire office de maman, quand la leur n’est pas là. Elle pourrait la protéger, faire d’elle une petite princesse toute belle, toute mignonne. Elle pourrait même aider sa maman à lui acheter de jolies robes, des jouets et puis parfois elles pourraient aussi jouer ensemble, lorsque Meluzine serait un peu plus grande. Tout ça, elle se l’était imaginée en tant que nouvelle grande-sœur. Des dessins elle en faisait par dizaine à l’école, et une fois rentrée espérait que ses parents accepteraient de les attacher au-dessus du berceau de l’enfant. Comment refuser autant d’attention, de toute façon ?

Meluzine grandit comme une enfant normale. Sa grande-sœur continue de la gâter et elle est choyée par ses deux parents. C’est une petite fille qui demande beaucoup d’attention, qui s’attache déjà facilement aux gens et qui est avide de découverte du monde qui l’entoure. Sa curiosité fait qu’elle apprend à marcher relativement tôt, et qu’importe l’adulte autour d’elle, il doit garder un œil dessus, afin de lui éviter de faire n’importe quoi, parce que déjà petite, sa témérité commence à pointer le bout de son nez. Sa petite sœur fait preuve de beaucoup d’attention, et mine de rien, ça délaisse ses parents d’un petit poids, ne serait-ce que le temps d’une dizaine de minutes.

Lorsque Meluzine est âgée de six ans, Madame Coolidge décède d’une maladie qu’on lui avait diagnostiqué seulement quelques mois plus tôt. Autant dire qu’il était trop tard, mais ce détail elle s’était bien gardée de le dire. Ne voulant pas réduire à néant la joie de vie de ses filles, mais également de son mari, c’est tout naturellement qu’elle a vécu ses derniers jours, en sachant que son chemin était tout tracé. Il ne lui restait que quelques semaines, quelques mois. Elle les a vécus proche des siens, elle les a aimé du mieux qu’elle a pu et elle a donné à ses filles toute la force et tout l’amour qu’elle pouvait leur donner. Persuadée qu’elle a pu être un semblant de mère correcte, c’est avec une sagesse d’esprit qu’elle est partie, en regardant une dernière fois ceux qu’elle aimait. Avec leur père, ses filles ne risquaient rien, il était un très bon père et elles sont des filles exceptionnelles, pense-t-elle.

A l’enterrement de sa maman, Meluzine a eu l’impression que son monde s’est effondré. Son père est pourtant resté un homme impassible et si elle a pu compter sur le soutient de sa sœur, un fossé s’est creusé entre elle et son paternel. Pourquoi, comment. Elle n’en sait rien, mais elle aurait aimé qu’il prenne son rôle de papa à cœur ce jour-là. A l’école, Meluzine est dans sa bulle. Elle est montrée comme la petite fille à plaindre, parce qu’elle n’avait plus de maman. A la sortie des classes, voir ses camarades courir pour enlacer leurs parents, alors qu’elle n’avait que sa grand-mère qui semblait s’en préoccuper la blesse, mais elle ne peut pas leur en vouloir, alors elle se réconforte en se disant qu’au moins, sa grand-mère va s’occuper d’elle, au moins le temps d’une après-midi.

Un an plus tard, Monsieur Coolidge décide de s’envoler pour l’Angleterre, ou plus précisément pour Londres. Selon lui, il était temps d’avancer et de recommencer une toute nouvelle vie, à trois avait-il dit. Meluzine y a cru, elle avait même l’impression que son père allait enfin s’ouvrir à elles dans cette nouvelle vie. Elle retrouvait le sourire, petit à petit. Une nouvelle maison, une nouvelle chambre et même un chien. Comme si tout ça allait aider à oublier la mort de leur mère. C’est maladroit, mais Meluzine a envie de se dire que son père essaie de faire des efforts, alors elle positive, et elle continue de grandir.

Ce que Meluzine n’imaginait pas, c’était probablement qu’à peine cinq mois après leur arrivée, elle allait rencontrer la nouvelle femme qui partage la vie de son père. Une femme totalement différente de sa mère, avec qui elle ne s’entend pas, qu’elle ne veut pas connaitre non plus. Pire, qui la fait fuir. Elle passe ses journées chez ses amis proches, chez son meilleur ami principalement, chez qui elle se sent beaucoup mieux accueillie. Elle a moins l’impression d’être étrangère, elle grandit à sa façon, en cherchant à se raccrocher à l’un, ou à l’autre.

A l’âge de quinze ans, Meluzine prend goût au monde de la nuit. Elle aime l’ambiance, mais semble fascinée par ces personnes qui animent ces soirées, ou plus communément appelé : DJ. Elle se lie d’amitié avec l’un ou l’autre et petit à petit, elle apprend le métier elle aussi. Une passion qu’elle découvre, un nouveau monde dans lequel elle se sent bien, mais qui lui permet surtout de s’éloigner de sa vie, de son père, de sa sœur. A dix-huit ans, elle trouve un appartement qu’elle partage avec une de ses copines. Son statut de DJ et les petites présentations qu’elle fait ça et là lui permettent de payer le loyer, en plus de l’argent de papa. Tout ce qui en découle aussi d’ailleurs. Elle commence également des études en psychologie, persuadée qu’elle pourrait se comprendre elle-même sans devoir mettre un pied dans le cabinet de l’un d’entre eux. Parler d’elle, de sa famille ou de sa maman lui procure une réelle angoisse, alors autant essayer de faire partie de ces psychologues. On oublie souvent que ce sont les cordonniers les plus mal chaussés.

Il y a un an, au détour d’une soirée animée, Meluzine rencontre Sevan. Un homme d’affaire riche, un homme d’affaire qui a des hôtels dans le monde entier. Un bon coup, aussi, avec qui elle partage une relation passionnelle mais conflictuelles. Et pour cause : monsieur refuse de se stabiliser, monsieur a besoin de plusieurs « elle ». Jusqu’à aujourd’hui. Leur relation a évolué, eux aussi. Des disputes, il y en a toujours, mais quelque chose a changé. Désormais Meluzine est la seule, la seule qui compte. Chacun a quelque chose à avouer à l’autre, mais pour l’heure, ils se contentent simplement de rassembler les mots pour le faire. Le temps passe, l’heure tourne, ils y arriveront forcément.