(Julian) F*** that, I can do anything

Let the battle commence ...

Mon cœur battait la chamade, martelant ma poitrine ankylosée par tous les coups que j’avais subis.  Je retins mon souffle en faisant un énième tour de piste. Ma sueur chaude ruisselait le long de mon visage, collant mes cheveux d’habitude ébouriffés sur ma tête. Je m’étais réveillé aux aurores afin de commencer ma journée comme elle se le devait.  A peine sorti du lit, je m’étais précipité au club de fitness. Le sport de combat était définitivement la chose que je préférais le plus dans ma vie, après l’écriture et le sexe bien sûr. Je ne m’étais pas entrainé depuis très longtemps. Il fallait dire que mon déménagement à Londres s’était accompagné par beaucoup de préoccupations et de soucis d’ordre logistique et émotionnel.  Je retins ma respiration en songeant à toutes les tuiles qui m’étaient tombées dessus. Il fallait dire que ces derniers temps, mon manque de maitrise et cette colère dont regorgeait mon corps pourrissaient un peu mes relations sociales. Je devais lâcher prise, et évacuer tout ce surplus de stress.

Moi, et les coups c’était tout de même une longue histoire : Mon père avait commencé à me tabasser, quelques temps après la mort de ma mère, lorsque son taux l’alcoolémie avait commencé à toucher le plafond. Je devais avoir 13 ou 14 ans. Je ne pouvais pas compter le nombre de fois où j’avais dû être transporté à l’hôpital, ou pas : Fracture de la clavicule gauche, fêlure des deux dernières côtes, luxation de l’épaule, rupture du ligament croisé … Mon corps regorgeait de séquelles, palmarès glorieux de mon enfance joyeuse. Je serrais les poings en me dirigeant vers le sac de sable. Je tapai sur le témoin à main nue, avec toute la force et la rage dont j’étais capable. La douleur ne me faisait plus peur, tant qu’elle était physique. En ce qui concerne les maux du cœur, j’avais encore un peu de mal à gérer. Je me dirigeai vers les vestiaires afin de me changer, lorsque David, l’entraineur, m’interpella pour une séance en groupe. Je n’étais pas très friands des rencontres à deux, mais je rejoins la salle quand même. J’avais toute la journée devant moi, et quelques exercices en plus ne feraient pas de mal à mes muscles engourdis. Je remis en place le bandage sur la plaie qui ornait ma cuisse droite, serrant le nœud à son paroxysme. Je ne voulais pas risquer d’être déconcentré en plein combat.

David présenta la séance comme étant un moment de détente, pour relâcher la pression du quotidien et libérer la bête. Je me surpris à sourire, amusé par tant de bêtise et par la mauvaise qualité littéraire de cette phrase. Il nous désigna des paires avant de se diriger vers le centre de la pièce. Il se mit à gesticuler dans tous les sens, dévoilant ses talents de guerrier raté. J’eus un soupir. Mon binôme était là.

« Salut! Tu vas bien?  T'es nouveau comme moi ou ça fait longtemps que tu viens? »

Il avait l’air gentil. Trop gentil, même. Sa voix, et son ton sympatiques eurent le don de m’irriter. Je n’étais pas habitué à ce que les gens se préoccupe de moi, ou m’abordent de manière aussi cru. Je le regardai de haut.

« Je suis nouveau ici, mais pas dans le domaine. » Répondis-je. « Je crois que ma gueule en dit long sur mon expérience en l’art du combat … » Raillai-je en désignant mon arcade ouverte et ma joue encore violacée par ma dernière bagarre au bar de JOE.

« Je suppose que je vais devoir y aller molo avec toi. »

Je me redressai.

« Au fait, moi c’est Julian. Mais tu peux m’appeler Lip. » Souris-je avant d’expliquer. « Je sais ça n’a rien à voir. Mon deuxième prénom c’est Philip. »

Let the battle commence ...

Je le fixais d’un air dégagé. Ma tendance à regarder les autres que je ne connaissais pas de haut, n’avait rien à voir avec une quelconque méchanceté, j’avais juste pris l’habitude de regarder les gens de travers. Après des années de rejet au lycée, et avoir déambulé en haillons dans les rues de Londres à la Clodo, je crois que c’était un peu légitime de ressentir de la haine envers les humains. Je déglutis lentement. Je n’étais pas particulièrement doué pour les relations sociales: aider les autres, guider les moins expérimentés … Tout cela me passait par-dessus la tête. J’avais appris tout ce que je connaissais par moi-même. A mon sens, l’université n'était qu'un ensemble d'années d’auto-formation et de stages à la photocopieuse, en attendant de rencontrer le bon piston qui allait tout changer.

Je reportais mon attention sur mon ‘’coéquipier’’. Il m’avait l’air d’être complètement différent de moi. Son aisance de langage, et son sourire amical, avaient le don de me foutre les boules. Je crois qu’au fond de moi je l’enviais d’être équilibré et sociable. Après tout je n'avais aucune idée de comment faire pour ce genre de choses.

« Ce serait probablement une bonne idée parce que je n'ai aucune expérience en la matière à vrai dire...  » Me dit-il.

Je me raclai la gorge, prenant dans mon fort intérieur la décision de faire un effort d’intégration, aussi minime soit-il. Après tout nous allions nous battre, j’osais espérer que les mots ne nous serait plus d’aucune utilité d’ici quelques instants.

« On ira à ton rythme. » Rétorquai-je. « On a pas trop le choix de toute façon. »

J’essayais de demeurer le plus humble possible, ignorant mes sales pulsions d’être égoïste et détestable. Cela me faisait du bien quelque part, de retrouver une part de normalité. Je n’avais pas toujours été un salop fini. Il fut un temps, lointain certes, ou j’avais de l’humour, de l’intégrité et de loyauté. Bien sur, tout en gardant un semblant de transcendance. Cela va s’en dire. Je ramenai une mèche rebelle à l’arrière de mon crane tout en continuant à le fixer. Le jeune homme, Jonah, ne m’avait pas l’air chétif. A vrai dire, il me semblait être assez sportif dans son genre, et son manque d’expérience en combat ne ternissait en rien l’image viril que renvoyaient ses biceps bien formés.

«  Je m'appelle Jonah, enchanté!  Mais je n'ai pas vraiment de surnom.... »

Je souris à sa remarque. La vérité c’est que Lip n’était pas qu'un simple surnom. Ma défunte mère avait choisi mon deuxième prénom. Je crois que je m’y raccrochais comme au dernier souvenir d’un être cher que j’avais perdu. J’haussais les épaules avec désinvolture, chassant les quelques bribes de chagrin qui me submergeaient.

«  Alors? Tu veux me montrer des techniques de base ou tu veux commencer direct? »

« Je ne te cache pas que je ne suis pas très porté sur les bases et les techniques. A mon sens, il faut y aller au feeling pendant un combat. Ce n’est pas ta manière de te tenir droit, ou l’angle que prend ton bras avant de donner un poing qui fait la différence. C’est ton instinct. »

Le combat, c’était une question de survie ! Je l’avais appris à mes dépends pendant mes longues années de souffrance avec  mon père. Je l’avais aussi appris à l’université lors de mes prises de têtes avec mes camarades éméchés, ou juste lorsque je me laissais emporter par l’appel du sang en grand impulsif que j’étais. Je lui souris d'un air hautain. Encore.

« Ce ne sont pas les conseils que tu espérais. Mais je vois la chose comme ça. »

«  J'espère que ce n'est pas ici que tu t'es fait cela. Il y a quand même des règles, non? »

Il avait désigné mon visage d’un air interloqué et je ne pus m’empêcher de rire. Je ne me moquais pas de lui, c’est juste qu’on m’avait pointé du doigt trop souvent à cause de mes blessures de guerre superficielles. J'avais subis tellement pire par le passé!

« Je me  suis battu dans un bar. » Avouai-je. « Je suppose qu’il y a des règles en effet, mais je n’ai pas lu le manuel en venant. » Le taquinai-je. « Je crois que je vais en transgresser quelques une sans m’en rendre compte. »

Je me cambrai, faisant craquer les vertèbres de mon bassin avant de tendre les bras vers mon adversaire. Mon visage était impassible, ne laissant montrer aucune émotion. Je serrais la mâchoire.

« Règle numéro 1 : L’effet de surprise ! » Sifflai-je, fendant l’air en sa direction.

Esquive ! Esquive, mec !

Let the battle commence ...

Je devais avouer que je prenais un malin plaisir à torturer mon jeune ami. Je n’étais d’aucune aide. A vrai dire, je tirais tous les avantages possibles de son manque d’expérience. Une façon comme une autre de me prouver que j’étais le meilleur, et de flatter mon égo surdimensionné. Même si ce n’était pas tout à fait réglo. Mes muscles étaient engourdis par les efforts que j’avais fourni de si bon matin, mais je ne comptais pas en démordre pour autant. J’adorais pousser mon corps dans ses retranchements. J’avais vécu toute ma vie dans la crainte de mon père. J’avais passé mes journées tapi dans le noir, les poings serrés, attendant que sa batte de baseball vienne s’écraser contre mes os et ma pauvre dignité. Il m’avait brisé, certes, mais il m’avait aussi élevé en guerrier. A présent, plus rien n’avait d’importance. Finir à l’hôpital, me casser le nez ou autres coups et blessures. Tout cela m’était égal. Pas que je sois courageux, ou follement ténébreux. C’est juste que j’avais abandonné. J’avais fini par lâcher prise … Mon corps était un punching-ball. Soit, let it be !

Je reportais mon attention sur Jonah, le regardant avec toute la férocité dont j'étais capable. Au fond, dominer notre combat et amocher son visage, étaient les premières bases de combat qu’on m’avait appris. Au fond, je crois que je lui apprenais à se battre à ma manière.

« Okay. On fera comme tu dis alors … Tant que tu ne m'envoie pas à l'hôpital... » Me répondit-il d’un ton intègre. Décidément ce jeune homme n’était définitivement pas comme moi. Je souris.

« J’ai déjà fini au poste de police pour coups et blessures ce soir-là. Je crois que j’ai eu mon compte. On va essayer de pas te casser quelque chose. » Le taquinai-je, tout en gardant une certaine hauteur.

J’étirai les muscles de mon visage en grimaçant. Ce n’était pas spécialement douloureux, juste pénible à sentir. Ma peau semblait raide et paralysée. Comme si ma dernière séance d’injections de botox avait été complètement ratées. Je posai une main crispée sur ma mâchoire. Le salop du bar n’y était pas allé de main morte, il fallait l’avouer !

« J'espère que l'autre mec est moins amoché que toi... »

J’éclatai de rire. Jonah était perspicace. C’était sûrement la première fois que je sentais une connexion entre nous. J’adorais ce trait de caractère chez une personne, avant que je ne lui envois mon poing dans la figure. Je me repris avec lenteur.

« Je ne veux pas me vanter mais on a dû le porter jusqu’en cellule de dégrisement. » Lançai-je avec désinvolture. « J’aurais pu le tuer … » Le taquinai-je.

Bon c’était méchant de terroriser ce jeune garçon ! J’avoue. Mais la tentation était si forte, et je n’étais qu’un être faible et brisé. Je me faisais une raison en plissant les yeux et en prenant un air moins sérieux. Avec tous ces signes, il allait tout de même piger que ce n’était qu’une blague de mauvais gout !

Je clignai des yeux. Je l’avais à peine frôlé de mon premier poing, mais le second s’était pressé contre sa joue droite. Jonah eut un mouvement de recule avant de foncer sur moi à son tour. Il avait de la détermination ! Je devais avouer que je commençais à bien l’apprécier. Sa jambe frôla la mienne, pendant une fraction de seconde, me faisant perdre l’équilibre mais par un grand miracle, ou simplement par instinct, je pu me reprendre, évitant ainsi à ma tête de saluer le sol d’un peu trop près.

« Pas mal ! » Avouai-je dans le ton de la rigolade. « Tu vois, pas besoin de règles. Tu peux foncer » Raillai-je.

Bon je disais un peu n’importe quoi. Il est clair qu’il fallait éviter les organes vitaux, le crâne, et les bijoux de famille. Mais bon, ce n’était qu’un détail. On ne pouvait tirer aucun plaisir en ménageant ses coups. Avoir mal, il n’y avait que ça de vrai dans un combat.Je m’accroupi, coudes en avant, en direction de ses côtes. Jonah eut un mouvement de recul, tel que je l’avais prédit. Je me redressai donc d’un coup, afin de tordre son bras et de bloquer son articulation scapulo-humérale. J’entendis un léger grincement, mais je ne lâchai pas prise. Il me semble que je venais de lui froisser quelque chose.

« Woops! » Feignais-je sans pour autant quitter ma position.

Let the battle commence ...

« Aille! T'as vraiment aucun scrupule, hein? » M’avait-il lancé après mon premier coup de poing.

Dans le mille ! Je n’avais vraiment aucun scrupule, que ce soit lors d’un combat ou dans ma vie de tous les jours. Mon cœur battait la chamade, injectant mon corps ecchymosé de ce venin brûlant qui réveillait tous mes sens bestiaux. J’avais grandis dans la violence, je savais à quel point c’était mal et barbare de se  plonger dans des combats de coqs sans intérêt. Mais j’étais trop friand de frénésie et d’adrénaline pour arrêter de martyriser mon corps. Je maniais déjà l’art de la terreur psychique à la perfection, laissant mes collègues de travail faire les frais de mon caractère froid et intransigeant. Exploiter mon potentiel sur un terrain différent, était presque une nécessité. Je soupirais en sentant le gout ferreux du sang emplir ma bouche. J’avais sûrement ouvert une ancienne plaie lors de mon mouvement effréné. Un sourire malsain se traça sur mon visage.

« Je pense juste que ce serait con de ne pas profiter des occasions qui se présentent… Tu baisses ta  garde, je frappe. » Raillai-je.

A peine le temps de finir ma phrase que Jonah me donnait un coup dans le ventre. Le bougre avait suivi mon conseil à la seconde près. J’avais envie d’éclater de rire, si ce n’est que la douleur sourde qui tenaillait mes entrailles bloquait toute arrivée d’air dans mes cordes vocales. J’esquissai tout de même un sourire. De bonne foi. Je savais que Jonah avait du potentiel, je savais que ses bras musclés n’étaient pas là que pour faire joli !

« Tu te défends pas mal. » Soufflai-je en me laissant tomber sur le sol.

Mes jambes tendues tiraient sur les muscles adducteurs de ma cuisse. Je grinçai des dents en me tenant le flanc droit. Quelle idée de pivoter pour éviter son coup ! Quelle idée de pivoter du côté droit ! Je voyais flou; un nuage de vapeur blanche avait obscurcit ma vue, et  le temps d’un battement de cil je cru apercevoir le visage de ma mère me sourire. Mes yeux me jouaient de sales tours. Je retins mon souffle avant de gémir.

« Ne t’inquiète pas. Ce n'est pas de ta faute!» Rassurai-je le jeune homme en faisant un geste de la main. Je pressentais son inquiétude, ou peut-être même sa culpabilité envers la situation. Il avait le profil du mec gentil après tout.

« J’ai une cote pétée depuis l’âge de 14 ans. Elle ne se remettra jamais en place, mais elle me titille parfois. » Lui expliquai-je pour éviter à sa conscience de sombrer dans un tourbillon de remords.

Mon visage était  en sueur, mais je n’en démordais pas pour autant. Mon sourire de gogole tatoué sur les lèvres, je tentai de me relever en homme. Bon, le premier essai ne fut pas très concluant, mais au bout de ma quatrième tentative je pus me tenir sur mes deux jambes, biensur la main toujours postée sur mon flanc douloureux.

« Ça ne t’ennuie pas qu’on continue dans … 5 minutes. » Lançai-je d’un ton dégagé. « En général, la douleur finie par se taire dans ses environs là. »

Je me dirigeai vers ma bouteille d’eau posée dans un coin de la salle d’entrainement. Je me penchai en soupirant avant de pouvoir m’hydrater. God, ce que je détestais perdre la face comme ça ! Spécialement devant un inconnu peu expérimenté.

Let the battle commence ...

Son regard compatissant qui se posait sur moi était un supplice. Je prenais sur moi pour ne pas être impoli. J’avais du mal à contenir mes émotions. La rage qui m’habitait était si dure à gérer. J’avais été usé et abandonné par les personnes que j’aimais le plus. Pour chaque guerrier qui mourrait, ils en auraient couronné un autre. Pour chaque partie de moi qui se perdait, ils en trouvaient une autre à détruire.

« Ça va? » S’enquit-il.

Mais je ne lui répondis pas.

La douleur ne suffisait pas à me stopper. J’étais assez borné pour me relever après chaque coup bas. J’avais assez d’endurance pour prendre sur moi et défier le monde qui m’entourait. La violence faisait partie de mon histoire, elle avait bouleversé le cours de mon développement mais je m’étais habitué à la frénésie de la chasse. J’avais appris à me délecter de chaque sensation forte, de chaque montée d’adrénaline. C’était ça être un combattant. C’était ça grandir dans l’antre du démon. Mon corps se ployait sous la pression de mes cotes déformées. Mon mouvement brusque avant dû les dévier de leur trajectoire. Je sentais mon poumon se comprimer dans l’étroitesse de ma cage thoracique. Ma gorge se dilata, avide d’oxygène ou de n’importe quelle source de vie. J’ouvris la bouche en haletant. L’eau ruisselait le long de ma bouche et de mon cou, mais je ne parvenais pas à contrôler ma détresse respiratoire. Je bougeais seul, me tenant au mur froid et aux rampes en métal. Je croyais dur comme fer que je pouvais m’en sortir sans aucune aide. Je m’étais évertué à me redresser durant des années, tuant chacune de mes faiblesses, délaissant chacune de mes ratures.

« Je suis désolé en tout cas d'avoir ramener cette vieille blessure en avant plan. Mais au moins, maintenant, je connais ta faiblesse!   »

Je levai les yeux en souriant du mieux que je pouvais.

« Oh mais tu en as encore plein à découvrir. Mon corps regorge de creux et de déformations.» Raillai-je en serrant ma prise sur mon flanc.

Mes cotes brisées étaient ma plus ancienne blessure de guerre. Mon père m’avait pris par surprise ce soir-là. Je l’avais toujours su dérangé mais je n’avais jamais pensé qu’il pourrait dépasser les limites du bon sens. Il m’avait toujours bousculé ou acculé d’agressivité verbale, mais jamais je n’avais songé qu’il y avait un monstre à l’intérieur de son cœur meurtri. Je m’accoudai au mur en soupirant. Mes blocages à la poitrine, s’estompaient peu à peu.

« Tu ne serais pas mieux de rester assis ou même t'allonger? T'as vraiment pas l'air bien...   »

Ses conseils partaient d’un bon sentiment, mais je n’avais pas besoin de sa sollicitude. Je n’avais pas besoin d’être attaché plus que nécessaire au commun des mortels. Mon esprit vacillait à un rythme inconnu des Hommes. Je m’étais autoproclamé habitant des ténèbres.

« On serait pas mieux d'arrêter tout simplement? Il faudrait que tu te reposes!   »

Je roulai les yeux. Ma langue claqua contre mon palais sec. Mes yeux plissés se posèrent sur son visage pâle. Il avait la marque des gens incorruptibles. Mais j’avais été abattu dans la nuit par les peuples de mes ancêtres. La confiance était un concept dérisoire et sans aucun intérêt.

« Pourquoi es-tu si intéressé par mon sort.  » Lançai-je entre deux soupirs. « Ne t’inquiète pas je ne compte pas porter plainte pour non insistance à personne en danger.  J’ai déjà traversé la douleur. Je connais mon corps. Et je vais bien.»

Je  répugnais à m’abandonner à sa douce amitié. Je refusais de me laisser envahir par les halos de lumières et de pureté qu’il dégageait. Mes muscles se contractèrent tout à coup. Je glissai sur le sol sans changer d’expression.

« Es-tu intrigué, petite chose ?  » Me moquai-je d’un air dégagé.