You won't change my mind, I'll change yours ~ Gabriel

Gabriel arpentait les couloirs du studio avec fierté, le torse droit, le regard persan, il se sentait comme chez lui. Des souvenirs de son époque à la télévision à la tête d’un programme phare lui revenait en mémoire, il se rappelait aussi avec beaucoup de colère sa déprogrammation et l’époque qui suivit. Gabriel s’était toujours imaginé comme un leader, un esprit supérieur guidant l’autre dans sa réflexion, la télévision était le vecteur le plus adapté pour faire entendre sa voix. En devenant animateur radio bien malgré lui, il ne s’était pas imaginé un seul instant retourner devant la caméra, or, désormais il était un invité de choix. Ses propos polémiques créaient le buzz et l’époque frileuse de progrès sociale était une aubaine. Est-ce qu’il croyait à tout ce qu’il disait? Globalement oui, est-ce qu’il en rajoutait fortement pour faire parler de lui? Certainement. Evidemment, il se faisait beaucoup d’ennemi mais certaines personnes trouvaient aussi une certaines justesse dans ces propos. Avant Gabriel parlait beaucoup de fait de société, de marché du travail, d’immigration dont il était beaucoup moins radicale que ce que l’on pouvait croire. Il avait d’ailleurs surpris tout le monde en affirmant que la venue de peuple étranger, qu’importe la couleur, pouvait être une aubaine pour un pays car cela apportait un regard neuf et que la société ainsi que les frontières étaient des choses en mouvement par nature. Cela était de l’époque ancienne, son nouveau secteur de prédilection était les moeurs amoureuse, sexuelle, les hommes et les femmes. Cette fois, n’attendait pas un discours progressiste, Gabriel était un bon macho persuadé d’être dans le vrai.

Aujourd’hui, il était donc invité pour débattre avec Déborah, une femme hystérique liée à divers mouvement féministe. Il l’a connaissait déjà, les deux faisaient vraisemblablement un bon duo télévisuel, ce qui embêtait Gabriel. Il en avait marre que chacune des personnes avec qui il devait travaillé soit une femme. Les femmes ne parlaient que d’un seul sujet : leur droit, or il avait bon espoir de continuer sa carrière en parlant de chose plus sérieuse et plus grave. Mais voilà, il était né à une époque où le féminisme faisait vendre.
Elle était donc là, ils se saluèrent sèchement. Leurs idées étant radicalement différentes, le débat allait être houleux et l’audimat probablement bon. En plus le sujet du jour était la journée de la femme, une invention grotesque et un prétexte pour de nombreuses femmes d’avoir un cadeau. Gabriel était fortement opposé à cette idée qui n’avait aucun sens pour lui. Le voilà en coulisse, attentant que le présentateur l’appelle pour le rejoindre sur le plateau.

Une fois les deux ennemis sur le plateau, le présentateur vedette, H. Smith connu pour être un excellent orateur et sa facilité à gérer les débats les plus houleux, les présenta rapidement pour ceux qui ne les connaissaient pas encore. Il expliqua ensuite le sujet du jour qui avait pour interrogation : « La journée des droits des femmes, une journée encore nécessaire? ». Le présentateur donna ensuite la parole : « Au vu de la journée, mademoiselle Chamberlain, à vous l’honneur. » Gabriel le coupa net, commençant ainsi les hostilités. « Justement, voilà déjà un problème monsieur Smith, ces femmes qui se disent féministes rejettent catégoriquement en bloque toute forme de galanterie sous prétexte que c’est une forme de sexisme alors qu’il s’agit juste d’une histoire d’éducation. Mais vu qu’en cette journée spéciale pour la demoiselle ici présente, je vais lui faire plaisir et prendre la parole le premier. » Eclat de rire léger dans la salle après ce premier petit pique. Il avait aussi fait exprès de l’appeler mademoiselle car il savait pertinemment que cela la rendait folle de rage. Gabriel n’était pas progressiste mais il n’était pas un con non plus. Il se rendait très bien compte qu’utiliser ce terme pour parler d’une femme en plein débat télévisé n’était pas correct. Il continua cependant à prendre la parole. « Tout d’abord, j’aimerai vous remercier de m’avoir invité ici et je préfère mettre les choses au clair tout de suite. Certaines personnes disent que je hais les femmes, au contraire je les aime, vous pouvez le croire » dit-il sur un ton légèrement coquin « mais à la place de faire une journée pour les femmes, pourquoi pas faire une autre journée de réflexion sur l’avancement actuelle des droits des hommes avec un H majuscules? Je veux dire par là, que notre société est plus divisé que jamais, que les écarts de salaire sont de plus en plus énorme, nos frères qui travaillent en usine ou dans les mines ont parfois moins de droit que les femmes à leur actuelle! Alors pourquoi ne pas reporter cette lutte à plus tard? Nous pourrions tous nous consacrer à remettre le pays sur pieds. Nous ne sommes pas dans un pays qui pratiquent l’excision, un pays où les femmes sont violés dans toute les rues, où les femmes ne peuvent faire d’étude ni même voter alors reportons les dernières broutilles et concentrons nous sur ce qui importe vraiment le Royaume-Unis.» Après cette première tirade, il regarda d’un air satisfait sa camarade comme pour dire « bon courage avec ça ». Il commençait directement en mettant les pieds dans le plat et il n’avait pas finit.