Only lonely for u

Lorsque la jeune femme pénétra dans son immense bureau, un frisson le parcourut tout entier. « Méghan… C’est un réel plaisir que de te revoir. Que me vaux l’honneur de ta visite ? » La jeune femme n’aurait su dire si son irritabilité augmenta à cause de l’ironie qu’il avait employée dans sa voix ou à cause de la réaction qu’exprima son corps en croisant son regard. Dario Davenport se trouvait à présent face à elle et n’avait nullement pris la peine de se lever lorsqu’elle était entrée dans son bureau. Depuis la place qu’il occupait, Dario avait tout le loisir de l’observer. Passant de ses hauts escarpins à ses longues jambes interminables ainsi qu’à sa silhouette élégante et svelte, il arrêta la folle virée aérienne de son regard sur le visage de la nouvelle arrivante, appréciant ses traits fins et presque hautains qui caractérisaient l’ancienne aristocratie italienne. Il la connaissait depuis toujours, leur famille étant étroitement liée. Se sentant observée, Meg déglutit péniblement tout en détournant le regard. Des mois qu’elle ne l’avait pas vu et sa présence l’oppressait toujours autant. Et pourtant, elle s’était persuadée depuis tous ces mois d’avoir dépassé ce stade…« Dario …» Elle avait tout simplement murmuré ses paroles en guise de salutation tout en serrant un peu plus la poigne de sa main sur son sac. « Je t’en prie, assieds-toi.» Dario lui signala d’une main distraite les fauteuils face à elle. Sa voix calme et posée contrastait vivement avec l’état d’anxiété qu'il ressentait et il se félicita mentalement d'avoir réussi à garder un tel contrôle de lui-même. Még se dirigea la tête haute vers l’un des deux fauteuils qui se trouvait face au bureau et y prit place tout en plaçant son sac sur ses genoux, comme en une brève tentative de se protéger. Le cœur au bord des lèvres, elle osa enfin rencontrer pour la seconde fois son regard. Mais assaillie par un tourbillon d’émotions déconcertant et par une vague de souvenirs, elle ne put le maintenir bien longtemps, élargissant le sourire de son interlocuteur. Et pourtant, elle se devait de se montrer forte afin de lui faire comprendre qu’elle était tout à fait capable de gérer ce genre de situation.
Il n’avait pas changé. De par ses cheveux impeccablement coupés, ses traits impeccablement dessinés et uniquement entaché par une fine cicatrice qui lui barrait le sourcil droit, il dégageait toujours le même charme ravageur qui avait su l’hypnotiser des années auparavant. Une légère barbe de quelques jours ornait sa mâchoire carrée et ses yeux verts laissaient percevoir une étincelle rieuse chaque fois qu’ils se posaient sur elle. Cette même étincelle qu’elle lui avait connu dix ans auparavant… Il portait une chemise bleue ciel qui révélait sa parfaite musculation et qui soignait à la perfection les muscles de ses bras et de son torse. Enfin, le seul élément perturbateur du tableau qu’elle avait sous les yeux n’était ni plus ni moins que le bruit d’un stylo qu’il maniait entre ses puissantes mains, l’actionnant et le dés-actionnant en un geste totalement songeur et automatique. « Je n’ai que cinq minutes à te consacrer. Comme tu l’auras remarqué, tu n’es pas la seule que je dois recevoir. » Sa façon de la presser irrita un peu plus la jeune femme, qui cette fois-ci, réussit sans aucun mal à rencontrer son regard et à ne pas ciller. Elle n’était pas là pour jouer à un petit jeu avec lui, ni pour prendre du bon temps, au contraire. Elle n’avait qu’une seule requête à lui formuler. Une seule. Et elle serait par la suite débarrassée de ce calvaire. « Je te remercie d’avoir accepté de me recevoir à la dernière minute...», commença-t-elle tout en pesant chacun de ses mots. « Viens-en au fait. » Son ton cassant la fit sursauter et elle ouvrit des yeux ébahit. La bonne entente serait donc de courte durée. Még avait subitement envie de sortir précipitamment de la pièce en courant. Au diable cet homme ! Mais elle ne devait pas, pour son frère elle devait garder son sang-froid et la tête haute. Après tout, il comptait sur elle et elle ne pouvait pas le décevoir. « J’ai besoin de ton aide. », lâcha-t-elle enfin en retenant son souffle. « Mais encore ? » demanda-t-il en arquant un sourcil. « Comme tu t’en douteras certainement, ça concerne l’entreprise de Liam … » Dario plissa les yeux et recommença une enquête un peu plus détaillée de la jeune femme qui se trouvait face à lui. Leur dernière rencontre remontait à présent à de nombreux mois en arrière et maintenant qu’il pouvait l’observer de plus près, il se rendit compte qu’elle avait l’air exténué et qu’elle semblait avoir perdu un peu plus de poids qu’il ne lui en était nécessaire. Néanmoins, elle restait tout à fait exquise à ses yeux et son corps ne tarda pas à réagir. Comme si les années ne s’étaient jamais écoulées et qu’il était revenu à ses vingt-et-un ans. Impatiente de l’entendre réagir face à ses confidences, Meg ne sut si continuer à s’expliquer ou attendre à ce qu’il ne réponde quelque chose à ce qu’elle venait de dire. De plus, le regard inquisiteur qu’il avait posé sur elle ne l’aidait pas du tout à se détendre. « Il ne te reste que trois minutes. », répondit-il avec l’intention de la presser. Levant les yeux au ciel pour lui montrer son exaspération, elle ressentit avec effarement que son chignon était sur le point de céder. Relevant une main tout contre celui-ci, elle en retira les fines barrettes noires qui le retenaient encore en une façon qui défiait les lois de la gravité avant de secouer la tête pour laisser ses cheveux tomber en une lourde cascade de boucles brunes sur ses épaules. Tant pis pour son apparence, elle n’avait à présent plus rien à perdre. Elle planta alors une nouvelle fois son regard dans celui de son interlocuteur et non sans en comprendre la raison, celui-ci s’obscurcit instantanément. « J’ai dirons-nous quelques difficultés à gérer son entreprise. En feuilletant ses revenus, je me suis rendue compte de plusieurs déficits budgétaires. Je ne sais pas ce qu’il s’est passé au cours de ces huit derniers mois mais c’est comme si Liam n’avait plus fait attention à ses dépenses ou comme s’il vivait au-dessus de ses moyens… » Silence. «  Que me demandes-tu au juste ? » La coupant dans son élan, Meg referma sa bouche tout doucement, retenant une fois de plus son souffle.
Les yeux verts qui rencontraient les siens brillaient à présent d’un éclat rieur.
Oui, Dario se délectait tout particulièrement de cette rencontre et plus encore de voir cette femme lui demander son aide. « Tu le sais très bien. », termina-t-elle par chuchoter non sans rompre le contact entre leurs regards. Son cœur battait à présent la chamade et une douce chaleur prenait possession de son bas-ventre chaque fois que le regard adverse vagabondait à sa guise sur son corps en une fluide caresse aérienne. «  Je veux te l’entendre dire. » Meg fronça les sourcils. Qu’essayait-il de prouver ? Qu’il était le dominant et elle la pauvre sotte qui venait lui demander son aide parce qu'il était le meilleur ami de son frère mourrait sur un lit d'hôpital après un grave accident de voiture ? Il devait probablement prendre un malin plaisir à la voir souffrir. Il était hors de question qu’elle ne lui donne le moindre avantage. « Je ne sais pas à quel jeu malsain tu joues, mais Liam est ton meilleur ami depuis toujours. Ne pourrais-tu pas..? » Nouveau silence. «  De combien sommes-nous en train de parler ? » Décidément la couper devenait une habitude chez lui. Prise une nouvelle fois au dépourvue, Meg tenta de rassembler le peu de courage qu’il lui restait. « Un demi-million de dollars. » L’homme face à elle émit un sifflement strident prouvant à quel point il s’agissait d’une somme exorbitante à ses yeux. Il accentua son petit manège avec le stylo qu’il tenait dans une de ses mains tout en se calant confortablement contre le dossier de son grand fauteuil de bureau. « C’est une sacrée somme ce que tu me demandes. » «  Ce n’est pas pour moi, tu sais bien que… » « Il me faut une garantie. » «  Pardon ? » Intriguée, Meg se mit à réfléchir à toute allure. « Oui, je ne peux pas débourser une telle somme sans avoir la garantie qu’elle sera utilisée à bon escient et convenablement remboursée. », expliqua-t-il lentement non sans perdre une miette de sa réaction. « Nous pouvons concevoir cet entretien comme un prêt qui te sera remboursé sur plusieurs années avec les intérêts, évidemment. Je pourrais me mettre en contact avec mes avocats et… »  « Non. Je veux beaucoup plus que ça. Un demi-million de dollars ce n’est pas rien, Méghan. » La jeune femme frissonna, chose qu’elle faisait chaque fois qu’il prononçait son prénom avec son fin accent italien. « Que veux-tu ? » Silence. « C’est simple… C’est toi que je veux. » Mais comment cet homme aurait-il pu se douter qu’elle n’était que sa perdition et qu’elle conduirait instantanément son cœur à la morgue ? Non, en cet instant même, il n’avait pas pu le savoir et avait payé très cher ses actes et envies…