and i stain every heart that i use to heal the pain + halex

It is harder to love somebody than to walk away from them. ✻✻✻ Ses prunelles vertes fixaient intensément la silhouette d’Alex à travers la vitre. Ses mains étaient posées de chaque côté du lavabo. Elle détaillait chacun des mouvements du chirurgien avec intérêt et concentration. Ses gestes étaient précis et sûrs. Il ne tremblait pas, il n’hésitait pas. Vraiment à la hauteur de sa réputation. Le nourrisson était sa patiente, mais la chirurgie réparatrice n’était pas sa spécialité. Julia était née avec une malformation ; une fente labio-palatine ou, autrement dit, un bec-de-lièvre. Ses parents avaient attendu exactement quatorze mois pour cette opération. Hanna avait suivi la petite Julia depuis sa naissance, elle l’avait vu grandir et évoluer avec cette malformation. Pendant plus d’un an. Et il avait le culot de la faire sortir de la salle. Elle soupira, avant d’allumer le robinet pour se laver les mains. Encore quelques minutes, et l’opération serait terminée. Juste quelques minutes. Elle frottait frénétiquement le savon contre la peau délicate de ses doigts. La colère colorait les traits de son visage. Ses sourcils étaient froncés, accentuant les rides entre ces derniers. La réaction d’Alex était injuste à ses yeux. Il aurait pu simplement la réprimander, il n’était pas obligé de lui ordonner de quitter le bloc. Hanna ne se rendait même plus compte de son comportement. Sa présence à ses côtés lui était tellement familière. L’espace d’un instant, elle avait oublié qu’ils n’étaient pas seuls. Qu’ils étaient entourés d’internes et d’infirmiers. Hanna avait quitté la pièce sans broncher, parce que sa patiente était plus importante qu’une vilaine querelle. Mais la situation ne lui plaisait pas pour autant. Pour qui se prenait-il ? Une douleur dans sa main gauche détourna son attention de la table d’opération. Sa peau était à vif, rosée, par ses frottements incessants. Elle jeta le reste du savon dans le lavabo et attrapa de quoi s’essuyer les mains. Hanna avait vu leur histoire s’étaler, elle avait entendu les murmures et les rumeurs, elle avait vu les regards. Même si aujourd’hui ils n’étaient plus ensemble, ils partageaient toujours un nom et des habitudes. Se parler comme s’ils étaient au milieu de leur cuisine, en faisait partie. Alex était le seul homme qu’elle avait réellement aimé. Il l’avait fait vibrer, frissonner. Grâce à lui, elle savait qu’avoir des papillons dans le ventre n’était pas qu’une métaphore. Sa main attrapa instinctivement le médaillon qu’elle portait autour du cou. Une photo d’Ethan y était bien cachée, où ses yeux clairs brillaient avec malice et son sourire s’étendait jusqu’à ses oreilles. La mort d’Ethan n’était pas vraiment un secret, mais elle n’aimait pas en parler. A côté de ce médaillon, elle y avait attaché sa bague de fiançailles. Pour une raison qu’elle ne comprenait pas, elle n’avait pas réussi à lui rendre. Alors que lui s’obstinait à vouloir sauver quelque chose qui ne pouvait peut-être pas l’être. Un bruit à sa gauche la ramena brusquement à la réalité, loin de ses pensées. Un des internes qui venait d’arriver. Hanna le fusilla du regard, avant de quitter la pièce pour aller dans la salle de garde la plus proche. Elle savait pertinemment qu’Alex la suivrait là-bas. La salle était vraiment sommaire : deux lits, un placard, des couvertures. Il faisait sombre. Hanna alluma la lumière, avant de retirer son calot en soupirant. Ses boucles rousses tombaient en cascade sur ses épaules. Sa colère ne voulait pas se dissiper. Si elle avait dépassé les bornes, lui aussi. On n’a plus besoin  de toi, Hanna, avait-il dit. Sans même lever les yeux vers elle. Et même pas Docteur. Le toupet ! Elle s’adossa contre le mur, les bras croisés au dessus de sa poitrine. Les minutes défilaient, et Hanna ne parvenait pas à se calmer. Sa poitrine bouillonnait. C’était une opération courante, presque banale. Il ne fallait même pas trois heures pour la terminer. Et pourtant, ils n’avaient pas réussi à rester dans la même pièce aussi longtemps. Trois malheureuses heures. La porte s’ouvrit finalement, révélant Alex. Leurs regards se croisèrent, mais Hanna ne se détacha pas du mur. « Je peux savoir ce qui t’a pris ? » S’enquit-elle, le plus calmement possible. Chercher la confrontation ne servait clairement à rien. Mais c’était plus fort qu’elle. Elle ne pouvait pas laisser passer ça.