"Fermeture" de London Calling
Après cinq années sur la toile, London Calling ferme ses portes. Toutes les infos par ici lonely held coffee cups like broken animals (thomas) 2979874845 lonely held coffee cups like broken animals (thomas) 1973890357
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() message posté Sam 5 Mar 2016 - 16:21 par Invité


✻✻✻ Mes yeux glissèrent sur les visages pressés du métro, comme si je voyais une peinture devant laquelle je pouvais s’éterniser. En réalité, je ne pouvait pas atteindre le niveau de concentration nécessaire ; rester devant une peinture, aussi belle et passionnante soit-elle, n’était pas dans ma personnalité. Je ne pouvais commenter la beauté de l’art pendant des heures, je ne pouvais en tirer des informations personnelles sur l’artiste. Je pouvais seulement l’examiner d’un œil fin et m’amuser des détails pittoresques que j’arrivais à extirper. C’était ce que je faisais, assit, oubliant la vieille femme qui me parlait à mes côtés. Je m’imaginais milles et unes histoires sur les passants, des gens que je voyais pour la première fois et que je ne reverrais jamais. Ce passage intempestif du métro ne m’avait jamais effrayé. Le passage, c’était comme cela que se décrivait ma vie avant de venir à Londres et de m’y installer. Avant de redécouvrir avec stupeurs tous les coins et les recoins de la capitale, que je n’avaiz jamais eu le temps de découvrir plus jeune. J’avais cru connaître la ville, mais mes souvenirs de mes premières années s’étaient rapidement effacés devant la multitude de ville dans lesquelles j’avais posé mes valises. Le ciel gris s’était fondu dans les immeubles haussmanniens de Paris, les vieux théâtres londoniens  avaient disparu devant les temples japonais. La langue anglaise, elle, s’était improvisée en sons gaéliques, en sifflement portugais et onomatopées italiennes.  Je m’étais vite rendu compte à mon retour, que non, je n’étais pas anglais. Ce n’était pas une question du sang qui pouvait couler dans mes veines – irlandais ; j’oubliais volontiers celui de mon père- mais la réalisation que je n’avais jamais vécu dans cette ville, que je ne m’étais jamais habitué aux contours, aux personnes y vivant. Quand j’y étais retourné pour la fin de mon lycée, Londres m’était apparue comme une énième ville dans laquelle j’allais vivre, une parmi tant d’autres, et j’avais rapidement fait mes bagages pour retourner à Paris. Je ne m’étais jamais dit qu’un jour j’allais me poser ; après tout c’était le passage qui me décrivait.
Et pourtant, alors que j’arrêtai mon imagination pour sortir de la rame de métro, c’était à Londres que j’avais trouvé un métier qui s’annonçait définitif. C’était à Londres que je vivais avec mon meilleur ami, dans un appartement sûrement trop grand pour deux, et une chienne. Beaucoup de choses me retenaient ici, dans la capitale anglaise. Et j’étais encore hésitant, ignorant combien de temps je pouvais rester de la même manière, à vivre ainsi et ignorer l’appel du large. Pour le moment, les voyages que j’effectuais pour mon travail faisaient l’affaire. Mais ils avaient diminué depuis mon rapatriement de Palestine, et je sentais déjà l’effet de la monotonie, mes doigts tapant des compagnies d’avion sur internet sans savoir réellement ce que je faisais.
Je devais voir Elsa, et j’étais heureux à cette perspective, pourtant je ne pouvais m’empêcher de ressentir un pincement au cœur à l’idée de voyager. Je passai une main dans mes cheveux, contemplant quelques secondes la façade du bâtiment dans lequel vivait Elsa, en colocation avec un type que je voulais éviter. Si j’étais aussi bien avec Elsa, c’était en partie parce qu’elle n’avait jamais fait de remarque sur mon envie de voyager, de partir dès que l’envie me prenait. Elle l’avait toujours accepté, même si je savais que la distance était difficile des deux côtés. Soupirant, j’entrais dans l’immeuble, et je poussais quelques minutes plus tard la porte de l’appartement, Elsa m’ayant donné les clefs quelques jours plus tôt. Son travail en tant que serveuse l’obligeait à rentrer un peu plus tard que moi, et nous avions convenu de mon arrivée pour que je puisse préparer le diner. Cela m’allait parfaitement, et l’appartement fermé m’avait annoncé que nous serions seuls ; pas de colocataires étranges.
Je jetais un coup d’œil amusé au bordel ambiant, les livres par terre me forçant à effectuer de longues enjambées, et je me demandai comment Elsa pour vivre ici. Les tasses de cafés et les mégots de cigarettes me firent froncer les sourcils, puis je me dirigeais vers la cuisine, où je posai le sac que je portai depuis chez moi. Ni Graham ni moi n’étaient maniaques, pourtant, notre appartement était bien plus propre et organisé, surtout la cuisine, immaculée et nonobstant utilisée constamment. Mais j’avais vécu plus de six ans au Japon, et je m’étais habitué aux espaces réduits ; le désordre rendait impossible la vie là-bas, alors je m’étais contraint au rangement.
Les minutes défilaient tandis que je m’attelais à la tache de sortir ce que j’avais amené, tâchant de ne pas regarder l’état des choses dans le frigo. Je posai les macarons sur une assiette, avant d’en manger un, sortant mon téléphone pour jouer et faire passer le temps. Au bout d’une dizaine de minutes et plusieurs niveaux de Candy Crush plus tard, je soupirai, descendant de la table de travail sur laquelle j’étais assis. J’ouvris un tiroir au hasard, et jurai tout bas devant l’état des couteaux. J’en pris un, l’aiguisant contre un autre. « Elsa, grouille toi, » grommelai-je, continuant mon activité, les yeux perdus dans le vague. Je n’avais pas grand chose à faire dans cet appartement que je ne connaissais pas, et qui n’était guère en ma possession. D’un coup, la porte d’entrée s’ouvrit, et je me précipitai vers le vestibule, les couteaux toujours dans ma main. Mais au lieu d’une tête blonde et d’un sourire, c’était un homme au visage blasé, le visage pâle encadré par des cheveux noirs. Je manquai de trébucher, avant de cacher d’un coup les couteaux derrière mon dos, comme si de rien n’était. « J’ai rendez-vous avec Elsa, elle m’a donné les clefs. » Je m’expliquai rapidement, les mots suivant de trop près les précédents. J’imaginai volontiers que me voir avec les mains suspicieusement dans le dos n’était pas ce que Thomas pensait rentrer et voir. « Bartholomew, je ne sais pas si tu te souviens, » soufflai-je, un rire gêné dans la gorge. J’avais une envie assez intense de me frapper la tête contre le mur, mais j’estimai que j’avais passé assez de temps à l’hôpital. « Macarons ? »
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() message posté Sam 19 Mar 2016 - 16:12 par Invité
Tu devrais rentrer, Tom. Le visage pâle de ma collègue se détachait dans la pénombre et elle n’eut pas besoin de prononcer les mots pour que je les comprenne. Je restai immobile, le menton posé sur mes bras croisés, le corps avachi sur la longue table en bois verni, symétrique et identique à toutes les autres. La bibliothèque se vidait peu à peu. Je pianotai nonchalamment sur mon gobelet vide et relevai les yeux vers elle. Ouais, je devrais. Elle m’adressa un mince sourire navré et haussa les épaules, s’avouant vaincue par mon mutisme. Elle pouvait lire l’acrimonie que j’exprimai à chaque seconde de mon existence dans le bleu des veines qui tigraient mes avant-bras. Elles luisaient d’un éclat étrange dans la pénombre, comme si ma peau était devenue translucide et que je me transformais en fantôme à la tombée de la nuit. Je relâchai mes muscles, ma tempe rencontrant la manche de ma chemise, et plissai des yeux en observant le ciel s’ambrer, ourlé de crépuscule. Les nuages semblaient saigner et le soleil mourir en roi. C’était toujours le même spectacle et il m’ennuyait profondément. Je soupirai en entendant ma collègue s’éclipser, lâchant des salutations dans un souffle auquel je ne pris pas la peine de répondre. Ils finissaient tous par me connaître. Ils finissaient tous par ne plus attendre de réaction de ma part. J’étais à moitié mort, j’économisais ainsi mes forces et ma salive pour les choses les plus importantes. Être poli n’en faisait plus partie depuis longtemps. Les aiguilles qui tiquaient constamment dans mon esprit étaient une amère berceuse. Elles ne faisaient que me rendre plus minutieux, plus dépendant. Combien de temps avant la prochaine clope ? Je savais, je me résignais même au fait qu’il s’agirait là de la raison pour laquelle j’allais me lever et m’en aller. Les étudiants eux-mêmes ne me voyaient plus. Je dormais à moitié à une poignée de mètres d’eux mais ils n’y prêtaient pas attention. Un cadavre de chat échoué sur un bureau. La vanité semblait naître d’elle-même, mais je n’avais pas le cœur à peindre.

Et la cigarette fut, me traînant à travers les couloirs déserts de l’université, jusqu’à me tirer sur les marches, le parvis, les dalles poussiéreuses, guidant mes mains vers mes poches usées, attirant l’allumette à elle et me laissant enfin respirer son parfum d’agonie. Sept minutes en moins à vivre. Elles aussi, je les comptais. Elles aussi, elles me guettaient. Je ne me souvins pas d’être entré dans le métro. La cage de ce serpent-là n’avait plus aucun secret pour ma carcasse d’aigle, alors je laissais courir la routine sans même la rattraper, sans même la regarder car elle était comme un rêve que j’oubliais au réveil pour le refaire le lendemain. Je ne me souvins pas des silhouettes que je croisai dans le ventre du reptile lorsqu’il rampa sous la ville pour me recracher chez moi. Je ne me souvins pas du crissement de ses écailles contre les rails métalliques qui l’enchaînaient à la terre. Il laissait derrière lui comme une traînée rance, un tapis de lœss ocre et sale qui n’appartenait qu’à lui. Ce n’était pas grave de ne pas s’en souvenir. Je pouvais toujours faire l’effort un jour prochain. Je ne me souvins pas de comment j’atteignis la porte d’entrée de mon immeuble et je crus bon de penser que c’était mieux ainsi. Que quitte à ne pas dormir, quitte à ne plus supporter son reflet dans le miroir et le froissement des draps contre son squelette malade, mieux valait qu’une brume d’indifférence recouvre tous ces maux lorsque cela était possible. Mes paupières se plissèrent à mesure que je retrouvai le code au fin fond de ma mémoire, puis je m’engouffrai à l’intérieur du bâtiment sans plus attendre, terminant une millième cigarette le dos collé aux boîtes aux lettres, les nerfs vibrant comme les câbles de l’ascenseur qui mettaient bien trop de temps à s’ébranler. Et puis le palier, et puis l’appartement. La porte claqua et mon manteau glissa au sol comme pour désosser un peu plus l’allure, découvrant ainsi la chemise fatiguée qui m’habillait de morgue et de désinvolture. J’entendis comme un fracas et mes prunelles sombres se braquèrent sur la silhouette filiforme qui se dessina devant moi. Elsa m’avait dit qu’elle ne serait probablement pas là ce soir. Ce qui m’étonna le plus fut qu’il ne s’agissait manifestement pas d’elle, mais d’un type gauche et nerveux, crispé car surpris, les mains soigneusement croisées dans son dos et un mince sourire froissé étirant ses lèvres. Je penchai la tête, mes pupilles se dilatant pour s’habituer à l’obscurité passive et habituelle des lieux. Le pire, c’était qu’il ne m’était pas inconnu. « J’ai un rendez-vous avec Elsa, elle m’a donné les clefs. » Je fronçai les sourcils et le dédain se lut comme un éclair sur mon visage, puisque je restai silencieux et interrogateur. Il y avait un plaisir félin à les voir patauger pour si peu. « Bartholomew, je ne sais pas si tu te souviens. » Son rire m’agaça mais je le compris. Je relevai le menton, impassible. Oui, je me souvenais, et ça me changeait. Il avait sûrement dû traîner avec Elsa afin qu’elle réalise ses rêves de princesse. Triste vérité que de constater qu’elle vivait dans un cachot. « Macarons ? » Mais c’était qu’il avait de l’humour en plus. Elle les choisissait avec soin.

Mes doigts glissèrent dans mes cheveux et firent semblant d’y remettre un peu d’ordre, mais mes mèches se nouèrent autour d’eux pour les asphyxier. Je me mis en mouvement pour traverser le séjour. « Te fous pas de moi. » grinçai-je doucement à son attention. L’ombre parmi les ombres. Je baissai les yeux vers ses bras qu’il tordait contre ses flancs et ne cillai pas avant de relever mes iris d’ébène vers son visage. Il avait l’air gêné, ayant perdu une place qu’il n’était même pas certain d’avoir eue un jour. Il paraissait vouloir disparaître sous mes prunelles car, semblait-il, il me suffisait d’un mot ou deux pour le faire fondre en larmes. Je ne me croyais pas si éloquent, si tranchant. Pourtant sa présence m’agaçait. Parce qu’il remarquait mes anomalies et qu’il ne pouvait s’empêcher de juger. Juger de cet endroit où Elsa avait décidé de vivre. Juger de l’individu qui partageait son toit, doutant de pouvoir lui donner le nom d’homme tant il ressemblait à une statue de ferraille forgée dans le ressentiment. Juger, car j’imaginais son jugement et que je lui arrachais des lèvres pour qu’il n’ait pas à le contenir plus longtemps. « Fais comme chez toi sinon. » raillai-je sombrement en jetant un coup d’œil aux macarons colorés qui trônaient effectivement sur le plan de travail de la cuisine. « Après tout, t’as les clefs. C’est un peu chez toi. » Mon ton était orné de cet éternel détachement qui ne cherchait qu’à piquer mon interlocuteur à vif. Il m’insulte mais il le fait sans même y penser, sans même le penser. Juste parce qu’il peut le faire. C’était là l’art et la manière de maîtriser une conversation. Je soupirai. « Détends-toi, je vais pas te bouffer. » marmonnai-je en désignant ses bras hagards d’un geste évasif. « T’es probablement pas le premier type qu’elle ramène en pensant que je ne suis pas là, en plus. » Je sortis une cigarette et m’appuyai contre le bureau, les yeux rivés vers le matelas dont les draps qu’Elsa avait lissés avec précaution le matin-même cachaient bien des tourments, bien des secrets auxquels Bartholomew ne pouvaient même pas songer. L’avait-elle fait ? Avait-elle profité de mes absences régulières pour inviter des inconnus dans mon appartement ? S’était-elle sentie coupable ensuite lorsque j’étais revenu ? Je l’ignorais. Elle était assez amoureuse et désespérée pour le faire. J’étais à mon tour assez froid et taciturne pour m’en moquer. L’odeur de la sueur et du désir était la même partout, c’était une poésie mielleuse et mauvaise que de vouloir lui donner la moindre singularité. Voilà que cette singularité avait les clefs de chez moi à présent, et que je la notais dans la lueur que la flamme de mon allumette et l’extrémité rougeoyante de ma cigarette engendrèrent dans les iris du jeune homme, ainsi que sur son sourire à moitié brisé.
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() message posté Mar 5 Avr 2016 - 0:52 par Invité


✻✻✻ Les minutes passaient avec lenteur, tandis que Bartholomew cherchait quelque chose à faire. Elsa était en retard, et pourtant il ne savait pas pourquoi il en était aussi surpris. Il connaissait ses horaires, il savait où elle travaillait. Avec Graham. Il avait été jaloux un jour, de ces deux corps qui s’étaient liés sans lui en parler, de ces deux personnes qui étaient tout pour lui, et qui pourtant ne l’avaient pas considéré comme tel, à leur tour. Mais Bartholomew avait grandi seul, ne passant jamais plus de quatre années successives dans le même pays, et il s’était toujours trop attaché à ses amis. Il n’avait pas eu de demi frères et sœurs avec lesquels il était proche. Il n’avait que sa mère, ses longs cheveux blonds et son sourire contagieux. Mais quand Elsa lui avait annoncé sa relation avec Graham, il avait eu ce sentiment étrange de trahison. Le même qu’il avait ressenti quand son père lui avait annoncé qu’il avait d’autres demi-frères et sœurs, parce que le Lancaster le plus âgé n’arrivait pas à maintenir une seule relation et se retrouvait toujours avec des femmes enceintes. Il s’était senti trahi parce qu’il avait eu d’être de trop, de n’être pas assez important pour avoir un rôle plus grand. Mais il avait sourit, il avait remis la mèche blonde d’Elsa derrière son oreille avant de la prendre dans ses bras et de la féliciter pour avoir réussi à capter l’intention de Graham. Il n’avait pas menti ; il avait été soulagé en un sens, de savoir sa meilleure amie avec l’australien, même s’il le connaissait assez pour avoir eu peur des conséquences. Mais les deux étaient adultes ; Barty ne pouvait rien faire de plus que de les regarder de loin. Il n’avait pas été sûr d’avoir la force de faire plus.
Mais leur relation s’était brisée, déclenchement une vague de satisfaction rapidement suivie d’une déferlante de culpabilité. N’était-ce horrible de sa part, de son rôle de meilleur ami, de se sentir aussi soulagé en voyant la distance qui s’établissait peu à peu entre deux corps précédemment liés ? Alors, il avait coupé la poire en deux. Il avait engueulé Elsa d’être tombée dans les bras d’un homme comme Graham et avait mis son poing dans le visage de l’homme en question. Il n’avait pas trahi son amitié pour les deux, se coupant seulement, une partie pour chacun des protagonistes. C’était le moins qu’il puisse faire, après tout.
De retour à Londres, alors qu’après avoir habité plusieurs mois avec ses sœurs il emménageait enfin avec Graham –n’était-ce pas le rêve de tout jeune homme, de faire une colocation avec son meilleur ami ?-, il avait appris qu’Elsa travaillait en tant que serveuse pour Graham. Il ne s’était ni offusqué ni senti trahit. Il avait muri, enfin du moins il l’espérait. Il savait désormais qu’il était un couard sentimental, qu’il ne méritait peut-être pas les doux yeux de Reagan, ni ceux d’Elsa. Mais l’une semblait lui accorder un nouveau sourire, et l’autre lui donnait les clés de son appartement. Il était un couard, mais un lâche heureux, chanceux. Sans le vouloir, il se retrouvait dans une situation parfaite, et il se demandait ce qui allait lui tomber dessus. Le karma est une pute, et ceci était la seule vérité qu’il emportait partout dans ses voyages.
Le karma était tellement une pute, que ce n’était pas Elsa et sa blondeur éclatante, et son rire tonitruant qui passait la parte alors qu’il se dirigeait vers le bruit, des couteaux en mains. Non, c’était son colocataire, aussi froid qu’elle était chaude, aussi ennuyé qu’elle était ennuyante. Bartholomew se mordit doucement la lèvre ; elle était stupide sa réaction face au grand et fin professeur de langue. Le Lancaster faisait la même taille que l’autre, mais ses muscles se devinaient sans mal sous la chemise qu’il portait, et son corps ne menaçait pas de s’envoler s’il ouvrait la fenêtre. Celui de Knickerbadger si. Et Bartholomew ne prit même pas la peine de se demander comment on pouvait être aussi mince et toujours pouvoir vivre ; pas quand son regard s’était perdu dans les mégots de cigarettes, les tasses vides dans lesquels s’éternisaient encore des grains de cafés.
Il était un fossile ; un être trop vieux pour être encore aujourd’hui en parfait état. On admirait sa résistance au temps ; on s’épouvantait de la condition de vie qu’il menait. Une sorte de relique des temps passés, aux cheveux sombres tombant négligemment sur des sourcils foncés. Une blanche neige des temps moderne dont la compagnie de sept nains s’était métamorphosée en une serveuse blonde. « Te fous pas de moi. »
Bartholomew leva rapidement les yeux, le plongeant sans peine dans ceux du professeur. Sa gène s’évapora pour laisser place à de l’agacement. Peut-être qu’il était trop bon, trop gentil, l’irlandais, mais le ton et la familiarité du langage qui lui parvenait étaient énervants. « Fais comme chez toi sinon. » Bartholomew suivit le regard de l’autre homme, se redressant quand il le vit se poser sur les macarons. Oui, il n’était pas professeur de langue ; il n’avait pas fait de doctorat. Mais il s’en moquait. Un sourire étira légèrement le coin des lèvres de Barty ; il était presque sûr être plus doué que le brun en matière de langue. « Après tout, t’as les clefs. C’est un peu chez toi. » Le sourire s’agrandit, et le corps de Barty se décontracta, reposant ses épaules sur le mur derrière lui. Peut-être que Thomas était un grand cynique, mais Barty un grand nonchalant, une fois la gène passée. « Détends-toi, je vais pas te bouffer. » Il leva un sourcil, amusé. Non, effectivement qu’il n’allait pas se faire dévorer. L’autre était trop mince pour pouvoir avaler un bon steak, alors il n’était pas question de digérer un être vivant. « T’es probablement pas le premier type qu’elle ramène en pensant que je ne suis pas là, en plus. »
L’irlandais laissa ses bras redescendre, ses doigts jouant légèrement avec le manche des couteaux. Il semblait se retrouver, la main engagée dans une activité presque nostalgique. Les autres n’ont sûrement pas pu rentrer dans l’appartement ; il faut un certain courage pour affronter l’odeur, » dit-il en souriant, faisant allusion à la fumée de cigarette qui accompagnait Thomas comme une cape d’élégance et morbidité. « J’imagine que c’est un non pour les macarons ? Il se retourna quelques secondes pour poser les couteaux derrière lui, trouvant sa position presque cliché avec eux. « Ce n’est pas leur couleur qui te dérange non ? Avec Elsa, tu devrais être habitué... » Il laissa sa tête se pencher en direction de son épaule droite, son regard encore centré sur le professeur. Peut-être faisait-il parti de ces hommes qui n’osaient pas toucher à la couleur rose sous peine de croire leur masculinité envolée. Il en doutait, tandis que ses yeux glissèrent rapidement sur les os saillants du cou de l’universitaire. « C’est plutôt dommage, ils sont bien réussis, » soupira t’il, se passant une main lasse dans sa tignasse brune.

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() message posté Mer 15 Juin 2016 - 11:30 par Invité
L’expression sur le visage de Bartholomew changea. Ce n’était pas difficile à remarquer, puisque ses gestes se firent plus souples et ses membres se détendirent. Il gagnait en confiance et cela me soulagea presque : je n’étais pas d’humeur à m’occuper d’un type gauche et évasif – et il semblait être tout à fait capable d’être de ce genre-là. Je le laissai me toiser et haussai les épaules. Contre quoi voulait-il gagner, exactement ? Je vis l’assurance teindre ses prunelles, accompagnée d'un peu d’irritation et d'une pointe de vigueur. L’éclat d’une lame apparut, reflétant la lumière qui s’échappait de la cuisine. Mes sourcils se froncèrent et je penchai la tête, presque surpris. Il les maniait avec adresse et je crus un instant me souvenir qu’Elsa m’avait parlé du fait qu’il était cuisinier avant de me rappeler que cela n’avait aucune importance et que ça ne m’intéressait pas. Je soufflai la fumée de ma cigarette en lui lançant un regard interrogateur, mais il s’enveloppait à présent d’un voile de nonchalance et de désinvolture qui m’agaça, puisque j’étais fatigué et que oui, j’aurais préféré rentrer chez moi pour trouver un appartement vide. Il avait dû le deviner, il était loin d’être idiot. « Les autres n’ont sûrement pas pu rentrer dans l’appartement ; il faut un certain courage pour affronter l’odeur. » Un sourire froid se dessina sur mon visage, constatant sa répartie comme s’il s’agissait d’une poussière logée entre mes cils. Je n’avais jamais eu l’occasion de véritablement parler avec le jeune homme qu’Elsa m’avait toujours dépeint comme le meilleur des meilleurs amis. Il l’était, probablement. Encore une fois, j’étais le problème, l’âme en peine, le type maigre, malade et acariâtre qui n’avait ni foi ni loi et qui ne parvenait pas à ne serait-ce qu’accepter la politesse gênée de cet homme charmant. Le fait était que je n’avais jamais été du genre à être conciliant et que son attitude gauche s’était présenté comme une mauvaise conclusion à une journée fatigante, me privant de l’exutoire enfumé que constituait mon appartement. Elsa ne s’en rendait pas compte. Mais Elsa ne se rendait jamais compte de rien. « Tu veux des félicitations pour ton courage à toi ? » raillai-je dans un souffle qui marquait à la fois mon ironie et mon irritation. Après tout, il avait réussi, surmontant la terreur qu’inspirait mon parfum de nicotine. C’était qu’il devait y tenir, à sa belle blonde intrépide.

« J’imagine que c’est un non pour les macarons ? » Il déposa les couteaux sur la table avec cette même nonchalance et je levai les yeux au ciel avant de soupirer. « Ce n’est pas leur couleur qui te dérange non ? Avec Elsa, tu devrais être habitué … » Mon regard se posa de nouveau sur les pâtisseries qui trônaient dans la cuisine, une pile soignée et d’une fameuse couleur rose et pralinée comme on en voyait peu. Cela m’amusa, pour tout avouer, car je voyais dans cette attention tout ce qu’Elsa ne parvenait pas à deviner d’elle-même. Mais j’étais peut-être trop franc, trop blasé, trop observateur. Je laissai malgré tout un rire silencieux s’échapper de ma gorge, une seconde de moquerie sans que je ne sache réellement si celle-ci allait à l’encontre de Bartholomew ou simplement d’une société qui interdisait à des types comme moi d’aimer les macarons ou une couleur pareille. Dans tous les cas, j’aurais eu raison de le faire. C’était beau d’être la victime, parfois. Importuné par un presqu’inconnu dans son propre foyer ou tiraillé par des lois tacites qui me rendaient toujours plus désinvolte. Bordel, qu’ils sont beaux ces macarons, c’est bien vrai. Bravo à toi l’ami. Mes prunelles se reposèrent sur Bartholomew qui conclut dans un souffle : « C’est plutôt dommage, ils sont bien réussis. » S’attendait-il à ce que je le félicite, à nouveau ? Il aurait dû se douter que je n’étais pas le genre de type à m’extasier sur le courage et les exploits d’un cuisinier auquel on posait peut-être un lapin dans l’endroit qui, ma foi, semblait être le plus dangereux du monde. Tu en ressortiras avec le cancer, cadeau de la maison. Je t’assure que les nôtres sont très réussis aussi. Je me demandais comment tous ces hommes qui gravitaient autour d’Elsa sans relâche n’étaient pas encore parvenus à l’extirper de cette cage monstrueuse dans laquelle elle vivait depuis des mois. Je haussai les épaules, pensif. Il fallait croire que les contes n’étaient plus ce qu’ils étaient jadis. Il était une fois, un cuisinier nonchalant. Il était une fois, un camé déguisé en professeur. Il était une fois, une princesse qui s’en foutait de tout justement parce qu’elle était une princesse, mais pour rendre l’histoire plus triste, on lui donnera Parkinson et on verra comment elle se débrouillera. Mal, très mal, trop mal, terriblement mal. Enfermons-la avec un être que l’on n’appelle homme que parce qu’il ressemble un tant soit peu à un être humain et vous aurez la plus belle définition du désespoir, parce qu’elle réussira quand même à l’embrasser et à le faire pleurer. Chienne de vie.

Je fixai Bartholomew avec un sourire fin, cette fois. Je m’avançai d’un pas vers lui et mes chaussures se frayèrent un chemin parmi les livres qui jonchaient le sol. Je les poussai avec lassitude avant de soupirer à mon tour. « Je suis anorexique. Et t’es pas médecin. » Mon ton feignait d’être navré, laissant un air consterné glisser sur mon visage. « Pas sûr que ça rentre dans la liste des choses que je suis capable de manger. » Non, je ne voulais pas qu’il se sente particulièrement mal de savoir ma condition après m’avoir provoqué comme on pouvait railler un homme qui boitait sur son incapacité à ne pas pouvoir courir. Non, et j’avais d’ailleurs parlé avec un tel détachement qu’on aurait pu croire que je présentais une profession quelconque. Thomas, anorexique, connard vétéran, devin en herbe. Je portai le filtre à mes lèvres sans le quitter des yeux. « Je voudrais pas les gâcher, ils sont si réussis. » repris-je finalement avant de me diriger vers la cuisine. La machine à café trônait au milieu du plan de travail et je ressentis une puissance salvatrice en poussant sur le bouton pour l’allumer. Je me retournai vers le placard pour en sortir deux tasses – car oui, j’avais malgré tout un sens de l’hospitalité, même s’il n’était pas inné. Je fis glisser la seconde jusqu’aux macarons à l’attention de Bartholomew avant de m’appuyer sur le rebord et le fixer de nouveau. « Tu peux ranger les couteaux. Vu mon état, il y a peu de chance pour que je meurs assassiné. Mais qui sait, les miracles arrivent. » Mes lèvres s’étirèrent en un énième sourire, cherchant sans relâche comment ne pas laisser l’agacement devenir une contrainte. J’étais un cynique, ça ne devait pas m’atteindre. Les maladies se pressaient à ma porte pour m’achever, un coup de couteau dans le cœur me paraissait être un trop beau retournement de situation. « Bon alors t’es lequel déjà ? Celui qui l’a plaquée avant de partir au Japon ou celui qui a fait du mannequinat en Italie ? » Je fronçai les sourcils en fumant de nouveau, presqu’inconscient de la manière brutale avec laquelle je le réduisais à un malheureux titre, comme une vague histoire qu’Elsa s’était acharnée à me raconter sans parvenir à obtenir mon entière attention – qui y était réellement arrivé un jour, franchement ? Mais je faisais un effort qu’il prendrait sûrement pour une nouvelle raillerie. A part s’il était assez subtil pour jouer au même jeu que moi et faire abstraction pour s’en tenir aux faits. Je suis anorexique. J’aime pas les macarons. Elsa vit avec moi. Et malgré tout, t’es chez moi, donc tu surveilles ton langage. Les faits.
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