Blake Isaac Dwight

Je suis né en plein mois de décembre 1994, causant la tourmente d'un jeune couple qui n'avait absolument pas prévu mon arrivé. Blake Issac Kahn, tel était mon nom de naissance. Mon père, John Kahn, n'avait que 19 ans, ma mère, Roxanne, à peine 18. Totalement immatures pour gérer un enfant, et pourtant, persuadés d'être capables de mieux faire que tout le monde. Mon père était apparemment un petit dealer, enfermé entre quatre murs peu de temps après mes 4 ans. Ma mère ne pouvait pas gérer un enfant et n'avait aucun revenu, tout était toujours réglé par mon géniteur qui faisait pousser les billets dans ses plants d'herbes. Forcément lors de son incarcération, les services sociaux se sont emparés du petit bébé que j'étais encore, et a alors commencé la rude épreuve des familles d'accueil. Elles n'ont pas le droit de s'attacher, nous non plus, alors on en change tous les six mois, ou les deux ans, ça dépend des places disponibles, et du caractère de l'enfant, en l’occurrence, moi. Au début je suivais, j'étais paumé, muet, perdu, et avec l'horrible sensation d'avoir été sauvagement arraché aux miens, ou peut-être, abandonné ? J'étais mal, et mon mutisme en était la conséquence.

Et puis j'ai eu 7 ans, et j'ai rencontré les Dwight. Ils ne parvenaient pas à avoir d'enfant, et ils avaient craqué sur mes jolis yeux bleus. Que Dieu leur pardonne leur erreur. Je suis devenu un Dwight, l'enfant tant attendu, l'enfant chéri, le centre du monde, le centre d'attention. Mes nouveaux parents ne courraient pas sur l'or, mais j'avais tout ce que je voulais, parce que leur seule hantise, était que leur petit trésor ne les aime pas. Il me suffisait de faire un sourire pour avoir la dernière figurine de Batman. Mon mutisme avait disparu avec eux, mais il avait laissé place à un gamin arrogant, mesquin, le genre même du petit trop pourri gâté. J'avais conscience que je ne méritais pas tout ce que j'avais, que je n'avais pas le sang des Dwight, qu'ils ne m'aimeraient jamais autant que s'ils m'avaient fait, et qu'à l'évidence, je n'étais pas élevé comme s'ils m'avaient fait. Dans le salon, il n'y a pas de photo de ma naissance, rien avant mes sept petites années. Et le passé hante vite un gamin, même si on espère qu'il était trop jeune, et qu'il aura très vite tout oublié. Moi je n'ai jamais rien oublié, si ce n'est le visage de mes vrais parents. Mais qu'importe, ce n'était que deux sales enfoirés, incapables de garder et d'aimer leur unique fils. J'étais aimé par les Dwight, mais il me manquait toujours quelque chose, et il me manquera toujours quelque chose.

A l'école je deviens un temps le casse-coup qu'on veut suivre, parce que je dis tout ce que je pense, et mes mots sont perçants et cassants. Même avec les brutes. Mais j'en joue rapidement trop. Je deviens un peu trop cassant, un peu trop méchant, c'est trop arrogant. Alors petit à petit, mes amis deviennent des ennemies, et très peu m'entourent. Je sais que je perds tout ceux à qui je tiens, alors plus le temps passe, et plus j'empêche quiconque de pousser le portail de mon histoire, comme ça, c'est tellement plus simple.

L'adolescence, les premiers émois, les premières histoires. Au lycée je m'affirme de plus en plus, je suis un peu égocentrique, j'ai du verni noir aux ongles, je suis gringalets, je porte des slims, on m'enfile l'étiquette du petit gay mesquin, sans même rien savoir de moi. Non je ne suis pas gay, du moins, jusqu'ici. Mais ça m'amuse qu'on se fasse des films à mon sujets, alors je ne rétorque rien, je laisse les rumeurs, jusqu'à ce que l'on me surprenne au bras d'une jolie blonde. Et quand les rumeurs se taises, je m'empresse de coller n'importe quel idiot qui passe par là, histoire de laisser planer le mystère. Le lycée, c'est aussi la caverne aux conneries. La drogue, l'alcool, les soirées, les beuveries. Les disputes avec les vieux. Mes parents en ont marre de mes conneries, je ne respecte plus rien, ni les couvres feu, ni le bordel que je fous à l'appart'. Et puis j'invite n'importe qui à n'importe quelle heure. Eux qui voulaient tant un enfant, les voilà entiché d'un délinquant qui sèche les cours, parce que ça ne l'intéresse pas. Je ne veux pas finir dans un bureau, je ne veux pas faire de grandes études, et pourtant, c'est ce que papa veut. Que le nom des Dwight soit si bien placé. Ils veulent que je rejoigne une bonne université, une belle voix comme le droit. Mais ça ne m'intéresse pas, et je n'ai pas envie de me fouler, alors je prends un cursus Histoire, la seule chose qui semble m'intéresser un temps soit peu. Je crois que j'aimerais pourquoi pas, devenir historien, travailler dans les archives ou encore mieux, devenir archéologue, chercheur, j'en sais rien, découvrir des trucs cassés et miteux pour compléter nos livres d'histoires. C'est surtout pour avoir une ambition...

Mon père, il ne le supporte pas, et pour me réveiller et me couper de mes mauvaises habitudes, il m'envoie dans une université parisienne. Je crois que c'est là que tout à explosé entre mes parents et moi. J'avais encore l'impression d'être abandonné, et je me souviens encore avant mon départ, avoir hurlé à la figure de mon père, que de toute évidence, je n'étais pas l'enfant prodige qu'ils pensaient avoir obtenu à la loterie. Malheureusement il n'existe pas de service après-vente dans les adoptions. Je suis parti, et je ne suis jamais revenu. Je l'ai faite cette année d'étude à Paris, et je n'en suis même pas mécontent, parce que j'ai découvert l’émancipation. Pour survivre, ayant tout coupé avec mes vieux, j'ai travailler à Disneyland une année entière, mes beaux yeux bleu me permettant de devenir un parfait prince charmant. Bon ok, c'était pas très glorieux, mais l'expérience vaut le détour. Et quand vous vous prenez pour le centre du monde, une couronne sur la tête, c'est plutôt bon.

Après l'été, j'ai regagné Londres pour le campus Britannique. J'ai laissé le costume du Prince pour le tablier du Starbuck, et j'ai repris mon petit chemin, en solitaire, ou presque. Mon entourage se limite à mon meilleur ami, ma meilleur ami, et probablement tous ceux qui me détestaient encore même après un an d'absence. Rien n'a changé depuis Septembre dernier, et surtout pas moi...