(F) HAILEE STEINFIELD, soeur, confidente, meilleure amie.

« On doit encore déménager ? » Assis dans la salle d'attentes, je tournais la tête vers ma sœur. Son regard était concentré sur le téléviseur, je n'arrivais pas voir son expression, mais je n'en avais pas besoin. Je savais exactement comment elle se sentait en ce moment et je me sentais légèrement coupable. Le truc est que je n'ai jamais connu mon père, tout comme ma sœur n'a jamais connu le sien. Disons que ma mère n'est pas la personne la plus stable. Alors que je n'avais que cinq ans et Violet un, on lui a retiré notre garde en attendant qu'elle fasse un peu de ménage dans sa vie. Pendant ce temps, nous étions trimbaler de famille d'accueil en famille d'accueil. Violet était jeune et ne prenait pas trop conscience de ce qui se passait, mais moi oui. Ça ne me plaisait pas du tout pour être honnête. Vivre chez des inconnus qui se permettre de te donner des ordres et de se prendre pour tes parents, ça ne me mettait pas très à l'aise. Du coup, lorsqu'on devait trouver une autre famille, j'étais heureux. Je me disais que peut-être un jour, il allait songer à nous ramener à la maison. Ma mère ne nous méritait pas, mais c'était mieux que de jouer les orphelins. Malgré tout, c'était comme ça que nous étions, même si nous avions une mère toujours présente. Je ne dis pas que nos expériences étaient mauvaises. Au contraire, les gens étaient sympathiques et accueillant, c'était tout simplement moi le problème. Selon moi, rien de cela était normal et pourtant, tout le monde agissait comme si se l'était. La première famille avait été un échec par ma faute. En fait, à chaque fois c'était de ma faute. Préférant ne pas jouer les hypocrites, je ne me gênais pas de leur montrer comment j'aimais vivre chez eux. De son côté, Violet était un ange et si ce n'était pas de moi, elle aurait déjà trouvé sa place. Mais bon, notre contrat stipulait que nous devions rester ensemble et je ne me voyais pas faire autrement. « Oui, mais ce n'est pas grave. Au moins, on reste ensemble. » Ma sœur était ma vie et ça même qu'à onze ans. Ensemble, nous avions déjà vécu beaucoup de choses et j'avais l'impression que c'était la seule qui pouvait me comprendre, même si elle n'était toujours pas assez mature. Vivre sans elle, impossible. Elle tourna finalement la tête vers moi avec un mince sourire. Elle glissait doucement vers moi avant de venir déposer sa tête contre mon torse me permettant d'enlacer mes bras autour d'elle.  

Le soir même, je m'étais rendu à la chambre de ma sœur. Habituellement, c'était elle qui venait me rejoindre pour que l'on regarde les Simpsons ensemble, mais pas aujourd'hui. « Hey, tu viens pas regarder les Simpsons ? » Elle était assise à son bureau, dos à moi et ne daignait même pas m'adresser la parole. Je fronçais les sourcils, confus. « Violet, tu m'entends ? » « Je t'entends, mais comme tu peux le voir, je t'ignore. » Quoi ? Je repensais à ma journée et à ce que j'avais bien pu lui faire pour qu'elle m'en veuille, mais rien ne me vint à l'esprit. À vrai dire, je ne lui avais pas beaucoup parlé aujourd'hui mis à part au petit-déjeuner et au dîner. « Tu m'ignores ? J'ai fait quoi ? » Elle venait tout juste d'avoir douze ans, le temps des caprices. Voilà comment je le voyais. Elle se retourna d'un coup vers moi en me lançant un regard énervé que je soutenais pendant un moment. « Je ne sais pas... Tu as tout simplement mis la grange en feu sans même t'excuser. Tu aurais bien pu nous faire mettre dehors... encore une fois. Mais bon, je sais que tu t'en fous alors ça me sert à rien de te le dire. » J'étais surpris par ses paroles et surtout par le ton qu'elle utilisait. Ce n'était pas dans ses habitudes de me parler ainsi, je pouvais même sentir mon cœur se serrer légèrement. Je ne savais même pas quoi lui répondre, car au fond, elle avait raison. Je me sentais mal d'avoir fait ce que j'avais fait et risqué de mettre la grange des Grayson à terre. Par contre, devant les familles, je préférais me montrer dur et indifférent. C'était plus facile selon moi. « Je les aime bien et j'aimerais bien rester ici. Ce n'est pas aussi facile pour moi de déménagé tout le temps. » Sur ces paroles, elle retourna à ce qu'elle faisait tandis que moi j'étais retourné à ma chambre pour réfléchir. En fait, dans tout ça, j'avais été égoïste avec elle. Je faisais passer mes besoins en prenant pour acquis qu'elle allait me suivre partout sans broncher. Aujourd'hui, elle avait décidé de mettre son pied à terre et je ne lui en voulais pas. Elle avait droit à son mot elle aussi. Donc, le lendemain, je m'étais excuser auprès de mes tuteurs pour mon attitude et pour la grange, ce qui rendit ma sœur heureuse et c'était tout ce qui comptait. Je devais prendre soin d'elle et m'assurer qu'elle soit bien, moi je passais après elle.