in the night, I hear 'em talk, the coldest story ever told. (noa)

Noa se tenait accoudée devant les bougies depuis une bonne demi-heure tandis que sa grand-mère se démenait dans la cuisine. Lui donnant un petit coup de hanche, elle observa sa petite fille d’un œil inquiet. « Tu es sûre que ça va ma chérie ? » La petite blonde se contenta de hocher la tête en souriant avant de prendre un plat des mains de son ainée. Le fait était que sa tante avait tout simplement crée une polémique en voulant se marier avec un abruti fini et la matriarche de la famille Eaton ne l’avait toujours pas supporté. Noa se préparait surtout psychologiquement à devoir supporter toute la tribu au grand complet en sachant pertinemment que ça partirait en pugilat. Une heure plus tard, comme par magie, la grande maison se retrouva investie des cousins, cousines, tantes, maris, petit-amis et tout ce qui s’en suivait sans que blondie ne s’en rende compte. « Elle est où ma sœur ? » Noa observa son père avec un regard qui disait : je ne m’appelle toujours pas madame Irma comment veux-tu que je le sache ? Lâchant un soupir en passant une main sur son visage elle inclina la tête vers sa grand-mère. « Nana est vraiment prête à la tuer. Ça me ferait presque peur ! » Un petit sourire en coin, Adam acquiesça en silence avant d’éclater de rire devant la mine dépité de sa fille. « Peut être qu’il n’est pas si con que ça. » - « Abba, tu sais pas faire semblant. De toute façon, elle peut pas le ramener à Kippour, connaissant Nana elle va passer sa journée à dire que c'est pêché. » Répondit la jeune femme en secouant la tête, amusée. Soudainement, sa tante apparut sur le balcon, un grand sourire aux lèvres. Noa avait l’impression d’être entourée d’enfants de cinq ans, surtout lorsqu’il y avait une ‘crise’ au sein de la famille. Le regard que lança son père à sa sœur voulait tout dire et ce fut avec un mélange de malice et de suspicion qu’il la serra dans ses bras. « Tu n’as pas emmené ton prince charmant ? » - « Je ne vais pas l’envoyer tout de suite dans la gueule du loup frangin. » Répondit Eden en faisant une mine faussement outrée. Secouant la tête, blondie alla dans le salon et tomba sur sa grand-mère qui avait l’air sur le point de détruire toute la maison. « C’est le grand pardon aujourd’hui, alors tu pardonnes ! » - « Pardonner quoi. Ma propre fille qui me trahie. » - « Tout de suite les grands mots, elle est amoureuse c’est tout. » - « Amoureuse, amoureuse. Mes fesses oui. » - « Grand-mère. On pardonne on a dit. » Poussant le plus gros soupir de l’histoire des soupirs, elle tourna les talons en faisant de grands gestes tout en marmonnant dans sa barbe. Noa ne put retenir un fou rire et elle dû s’accroupir tel GI Joe pour éviter le coussin que sa grand-mère venait de lui envoyer au visage. « Pourquoi tant de haine ? Si c'est comme ça, moi je me pointe pas à la syna. » Lança la jeune femme avec une mine boudeuse. « Je vais t'y ramener par la peau des fesses, ça va te faire tout drôle. » - « Je me sens tellement flouée dans cette famille. » Lâcha la jeune femme en croisant les bras sur sa poitrine, un air théâtral collé sur le visage. De toute manière, les femmes de cette famille avaient un véritable don pour devenir dingue en moins d'un quart de seconde. Ce n'était plus avoir le sang chaud, c'était carrément être timbré. Toujours est-il que Noa ne pouvait s'empêcher de penser que sa grand-mère en faisait beaucoup trop. Après tout, personne ne connaissait ce jeune homme, seuls les aprioris subsistaient et ce n'était jamais une bonne chose. Il n'avait pas la meilleures des réputations - certes - mais il ne fallait tout de même pas faire tout un plat pour rien, surtout qu'il s'agissait de sa fille.

Owen se tenait accoudé sur le rebord du balcon, lançant un regard plus que suspect à Noa. La jeune femme sentait bien depuis quelques jours que quelque chose ne tournait pas rond, elle avait un don pour ce genre de choses. Sentir quand tout était sur le point de foutre le camp. C’était ça son truc. Ça et ne pas spécialement à vouloir creuser. Il fallait être tout à fait honnête, personne n’avait envie de baisser les armes dans une situation qui leur échappe totalement. Un mois plus tôt il avait eu une proposition pour un poste à l’autre bout des Etats-Unis, poste qu’il aurait accepté – après mainte réflexion. Proposition qui s’était révélée être caduc une semaine auparavant. Leur couple avait commencé à se dégrader à ce moment là. Pile à ce moment là pour être plus exacte. La blondinette n’était pas dupe, quelque chose était parti en vrille sans même qu’elle s’en rende compte. Plus elle y réfléchissait, moins elle ne trouvait de raison et cela avait le don de rendre Noa dingue. « Il y a quelque chose dont je voudrais te parler. » Commença-t-il après plusieurs minutes de silence. La jeune femme tira une longue bouffée sur sa cigarette, s’attendant au pire. Se tournant vers elle, elle pouvait aisément lire la gêne sur son visage. « Ça fait longtemps qu’on a pas vraiment parlé, par rapport à notre relation. » Noa se contenta d’hocher la tête, c’était donc à ce moment là qu’il allait tout bonnement réduire son cœur en cendre. La vérité était qu’avec lui, elle avait eu ce fameux sentiment et elle avait espéré que son instinct ne l’a menait pas en bateau. De toute évidence, elle avait eu tout faux. « Tu sais que je suis un peu con. Je nous vois vraiment devenir des amis, des amis très très proches tu vois ce que je veux dire ? » La jeune femme dû se retenir pour ne pas laisser échapper un rire amer. Il devait se moquer d’elle, elle ne voyait que ça. Littéralement se foutre de sa gueule. Se décalant histoire de mettre de la distance entre eux, elle finit sa cigarette sans un mot. Elle savait que si elle ouvrait la bouche, rien ne pourrait sortir. Se rapprochant de Noa, Owen passa une main sur son dos que la jeune femme dégagea d’un mouvement d’épaule. Voilà, c’était là. Finalement c’était là. Pile le moment où elle senti la tristesse l’envahir soudainement. Le moment où elle se sentit complètement perdue. Comme si on venait de lui arracher une partie d’elle même.  

« J’ai un truc à te dire. » Noa fronça les sourcils en observant sa cousine qui semblait bien agitée. Secouant les épaules l’air de dire : ‘tu lâches le morceau ou faut payer ?’ elle ne pouvait s’empêcher de penser au pire. « Je crois que j’suis homo. » Dana venait de dire ça le plus naturellement du monde sous l’air quelque peu médusé de sa cousine. « Non mais si tu fais ça, ta mère elle meurt. » - « Et toi ? » - « Bah moi je m’en fous, si t’es heureuse c’est le plus important. » Répondit Noa légèrement vexée par ce retour de question. Elle n’arrivait pas vraiment à croire qu’elle puisse lui demander ça. Ce n’était pas parce qu’elles étaient juives que soudainement, Dana serait la nouvelle pestiférée de la famille. « Alors ça te dérangerais pas ? » - « Moi non. Ce qui m’inquiète c’est ta mère en fait. » C’était bien peu dire. La tante de blondie avait des idées bien arrêtées qui parfois étaient vraiment difficile à contourner. Elle était butée, bornée et complètement timbrée, ce qui n’arrangeait pas tout ça. Le fait était que la mère de Dana était le stéréotype même de la mère juive qui était sur-protective et qui ne pouvait se faire à l’idée de ne jamais avoir de petits enfants. Tirant une bouffée sur sa cigarette, Noa dévisageait la jeune femme avec un petit sourire narquois. « C’est qui l’heureuse élue ? » Haussant les épaules, la principale intéressée de répondit rien avant de longues minutes. « Personne. C’était juste pour voir si t’étais aussi tarée que le reste de la famille. » Interloquée, Noa lui jeta un coussin sur l’épaule avant de jurer en hébreu devant Dana, complètement hilare. « J’ai la gueule d’avoir des réactions archaïques moi ? » - « Bah non, déjà que tu nous as ramené un goy. » La petite blonde lâcha un énorme soupir avant de lui servir une autre tasse de café. « Sinon t’as d’autres idées à la con comme ça ? » - « Change pas de sujet, revenons à nos moutons, il en est où l’autre abruti ? » - « Le mouton est pas casher déjà. » - « Comme si ça te posait un problème. » Lui lançant un regard de tueuse russe, Noa alluma machinalement une autre cigarette sachant pertinemment que sa cousine ne lâcherait pas le morceau si facilement. Pourtant, la jeune femme n’avait aucune envie de parler de ce garçon, elle n’en ressentait ni l’envie, ni le besoin. Du moins, tout était relatif. Elle avait ‘besoin’ d’en parler, dans le sens où la jeune femme avait toujours besoin de comprendre certaines réactions. Toujours est-il que pour l’instant, si le sujet revenait sur le tapis, elle allait être soit très en colère soit plus que triste. Dans tous les cas, elle ne voulait rien ressentir. Plus pour lui.

Noa était plus qu’en retard pour rendre les sketchs d’une robe de mariée et pourtant elle était en train de bruncher avec sa cousine comme si de rien n’était. La vérité était toute simple : elle était dépitée, en colère et elle rongeait son frein depuis quasiment une semaine. Dans ce genre de moment, elle n’arrivait plus à dessiner décemment et cela avait le don de la rendre encore plus dingue. Pour tout dire, elle n’entendait même pas Dana lui raconter ses merveilleuses vacances à Cabo. Soudainement, un jeune homme se mit à gesticuler devant la vitre du restaurant sous le regard médusé des deux jeunes femmes. « C’est qui ce dingue ? » Questionna sa cousine en lui lançant un regard presque apeuré. Arquant un sourcil, Noa haussa les épaules sans dire un mot. Pourtant, il ne semblait pas prêt à s’arrêter là puisqu’il mima le fait de venir les rejoindre. « On appelle la police quand ? » Demanda alors Dana en se retournant histoire de voir si il n’y avait personne d’autre derrière elles. « La police, tout de suite tu abuses, ça ne serait pas une de tes conquêtes par hasard ? » - « Je me souviens de toutes mes conquêtes d’abord. » Répondit la jeune femme du tac au tac, un air narquois collé sur le visage. « Flora ! Ça fait des jours que je cherche à te joindre, tu te planques ou quoi ? » De toute évidence, il y avait erreur sur la personne et il n’avait pas l’air de s’en rendre compte. Regardant derrière son épaule, Noa se pointa alors du doigt tout en secouant la tête quelque peu effarée. « C’est à moi que vous parlez ? » - « Bah alors, on a trop fait la fête hier soir ? » Oui alors là, c’est ce qu’on appelle être légèrement malade. Comment pouvez-t-on la prendre pour quelqu’un d’autre ? De plus, le jeune homme avait l’air d’être persuadé qu’elle se prénommait Flora. « Je suis désolée mais vous vous trompez de personne ! » - « Cela dit, Flora/Noa on peut se planter. » - « Mais tu vas la boucler toi ! » Tonna la petite blonde en faisant la moue. « Encore une fois, je suis désolée, mais vous faites une erreur ! » Continua Noa à l'intention de ce parfait inconnu. « Je suis tout de même capable de reconnaître ma cousine, allez quoi, il y a un problème ? » Demanda le jeune homme penaud. Se sentant alors quelque peu coupable, elle se contenta de secouer la tête sans vraiment savoir quoi dire. « Bon Sherlock, si on te dit qu’il y a une erreur c’est qu’il y en a une, alors t’es mignon, t’es sympa mais de l’air ! » Voilà. Ça c’était la méthode Dana. En attendant, la jeune femme restait toujours autant stupéfaite devant cette scène plus qu’improbable et puis d’abord, c’était qui cette Flora.