somebody I used to know - norma.

Luna lui dit que s’il continue de se goinfrer toute la journée, il perdra bien vite le corps qu’il aime tant montrer aux jolies filles. Elle lui a même dit qu’il a un peu grossi, et qu’il a peut-être pris des fesses depuis qu’ils sont arrivés à Londres. Roxane approuve ses dires et semble même stupéfaite de voir comme il a changé. Milo en est encore tout retourné. Après avoir tenté de se convaincre que c’était des conneries, il a hurlé et s’est enfermé dans sa chambre en claquant la porte comme si elle l’avait interdit de sortie pour les trois prochaines semaines. Un peu plus et il criait qu’il la détestait. Probablement que ça lui aurait fait trop plaisir, alors il s’est abstenu au dernier moment. Elle le prenait déjà assez pour une diva comme ça, en rajouter ne l’aurait pas aidé. Il n’a jamais caché son amour pour la nourriture, mais il aime aussi pouvoir plaire aux femmes. Si ses muscles disparaissent à cause de sa gourmandise, il n’est pas sûr de pouvoir s’en remettre. Ce sera la destruction d’un long travail sur soi, et il en est hors de question. Son corps est sacré. Il a pris du temps à le sculpter et à faire croire à ses amis que tout était parfaitement naturel chez lui. Il disait que c’était morphologique, qu’il avait beau manger pour quatre, rien ne changerait jamais. Ça en faisait des envieuses, et des jaloux, et faut avouer que c’est quelque chose de génial. Alors s’il continue à se laisser aller, ils commenceront à se poser des questions. Et puis, ça prouve quand même qu’il ne fait pas « rien » de la journée. Il est fier de pouvoir prouver que ouais, monsieur n’est pas si fainéant, en plus d’avoir obtenu son diplôme avec une belle mention, il prend soin de lui… même si on ne le dirait pas comme ça, au premier abord.

Il s’est donc décidé à remédier à ce petit coup de mou. Il a mis un short, ses chaussures de sport, et il a quitté Luna après qu’elle lui ait dit qu’il reviendrait très certainement d’ici quinze minutes en se rendant compte qu’il ne tenait plus la route et qu’il lui ait répondu par un doigt d’honneur. Reprendre après une longue pause est compliqué, mais finalement, les habitudes reprennent le dessus. Il s’arrête cependant plusieurs fois, mais ne démord pas à sa parole, surtout qu’il est certain que Luna l’attend de pied ferme. D’un autre côté, c’était très certainement pour le motiver, mais si c’est le cas, elle a bien une drôle façon de le faire. Elle le connait, suffit de lui répéter qu’il n’y arrivera pas pour le persuader à faire le contraire. Elle joue avec lui, et ça marche tout le temps, parce que Milo, il aime bien pouvoir la contredire (même si au fond de lui, il commence à comprendre sa technique de communication). Il traverse les petites rues de Londres, remonte jusqu’à Westminster, et se dirige vers St James’ Park, l’endroit étant sans doute plus adapté pour son entrainement. Il remarque que du monde y est déjà. Il fait tellement beau que tout Londres semble être sorti. Certains courent, d’autres se prélassent sur l’herbe entre amis ou en couple pour profiter des quelques rayons de soleil. Y’en a qui se baladent, d’autres qui sont simplement assis sur des bancs. Ca le motive encore plus. S’il s’arrête, il aura l’impression qu’on jette des coups d’œil vers lui en se demandant s’il est déjà fatigué.

Après un premier tour, la fatigue gagne la partie. Lorsqu’il arrive à l’une des entrées du parc, il remarque une blonde qui lui lance un signe de la main. Il passe pourtant outre, persuadé qu’elle s’adresse sans doute à quelqu’un d’autres. Déjà prêt à repartir, ses écouteurs en place, ce n’est que lorsqu’elle se dirige vers lui qu’il reconnait ses traits. Elle a gardé sa longue chevelure blonde et ses yeux pétillants – même s’ils ne le sont plus autant qu’auparavant. Même dans ses souvenirs, elle n’était pas aussi belle qu’aujourd’hui. Il a l’impression que ça fait une éternité qu’il ne l’a pas recroisé. La sensation est étrange. Il ne sait pas s’il est heureux, ou profondément irrité par le fait qu’elle soit, elle aussi, à Londres. Quand il arrive à sa hauteur, il ôte ses écouteurs, un peu hésitant. Doit-il lui faire la bise ? La prendre dans ses bras ? Ne serait-ce pas hypocrite après leur dernière confrontation ? Alors, à la place, il ne fait rien, et lui laisse l'initiative de faire un possible pas vers lui. « Norma à Londres. En voilà une surprise. » Bonne ou mauvaise, à elle de lui dire. Il passe une main dans ses cheveux, et réalise qu’il n’est pas sous son meilleur jour, il est transpirant et collant. Peut-être qu'avec ça, il réussira à la faire fuir. « Tu viens prendre des vacances ? » Sans doute, c’est bien la période. Il balaie les alentours du regard, à la recherche du troisième ancien mousquetaire. Il est peut-être là, lui aussi. Ils se sont peut-être remis ensemble, depuis le temps. « Avec Simone ? » Il tente de ne rien montrer de sa nervosité, mais c’est un peu raté. L’amertume se lit sur son visage, et s’entend dans le son de sa voix. Il était bien, loin d’elle.

Salut Milo, qu’elle dit. Et rien d’autre. Rien ne sort d’autre de sa bouche qu’une simple salutation, comme s’ils s’étaient quittés hier. Qu’aurait-elle pu dire ? A sa place, il n’aurait sans doute pu trouver mieux que de commencer la conversation ainsi. Y’en a des choses à dire pourtant, des choses qu’il répète toutes les nuits dans ses rêves depuis qu’il a quitté Rome, mais ce n’est plus aussi facile quand on se retrouve devant la personne. Des mots qu’il avait imaginé échanger avec elle, comme s’il espérait secrètement que tout devienne soudainement plus facile. Pourtant, la facilité, ce n’est pas vraiment quelque chose qu’ils connaissent tous les deux. Elle lui dit qu’elle a décroché un boulot à Londres. Vraiment ? Ses yeux s’ouvrent en grand, interloqué par sa réponse. Il ne savait pas qu’elle cherchait aussi loin. Il pensait qu’elle appréciait assez Rome pour y faire sa vie. Ils en avaient parfois parlé, s’étaient imaginés leur futur là-bas. Evidemment, Milo a changé d’opinion après la soirée un peu mouvementée qu’ils avaient tous les deux passés, mais cela n’avait été que de son point de vue. Faut croire qu’il n’est pas à avoir changé d’avis. « Et qu’est-ce que tu vas faire alors ? » Demande-t-il, curieux d’en savoir plus sur ce fameux job qu’elle a décroché par ici et toujours aussi surpris par la nouvelle. C’est bien sa veine, lui qui pensait pouvoir souffler un peu, loin de ses amis qui se déchiraient en permanence devant lui, c’était raté. Il semblerait qu’ils ne puissent se disputer sans lui. Simone risque surement de se pointer lui aussi à présent qu’ils sont tous les deux à Londres. A moins que cela soit déjà le cas et que selon les dires de Norma, aucun d’eux ne soit encore au courant. Ce serait la surprise de l’année et le pire, c’est que ce serait très réussi. Simone ne se laissera pas oublier si facilement, il en est certain. Il passe une main dans ses cheveux, un peu nerveux. Elle ne le fait peut-être pas intentionnellement, mais il décèle dans ses mots une pointe d’amertume. Voilà les reproches qui commencent doucement à s’immiscer dans la conversation. Elle parvient à le faire culpabiliser alors qu’il devrait être celui qui lance des sous-entendus sur son comportement douteux. « Luna avait besoin de moi, » se justifie-t-il tant bien que mal. Forcément, l’occasion était trop bonne pour pouvoir quitter Rome et penser à autre chose. « Alors tu ne lui as rien dit ? » Il détourne le véritable sujet vers elle, histoire de n’avoir à plus en dire sur lui-même. Si elle ne lui a rien dit à propos de son départ, cela veut surement dire qu’ils ne sont plus en très bons termes. Pas assez du moins pour qu’elle lui avoue quitter l’Italie pour l’Angleterre. Ils se sont peut-être à nouveau disputés et comme à son habitude, Norma a agi trop vite en rejoignant Londres. Les trois mousquetaires ne sont plus ce qu’ils étaient autrefois. Elle cherche à faire la conversation. Il aperçoit son léger sourire, et s’il se surprend à l’observer plus longtemps que prévu, ses mots l’agacent plus que de raison. Elle ne peut pas revenir dans sa vie et penser que tout reviendra comme autrefois. Elle ne peut pas réapparaitre au milieu de nulle part, lui lancer des politesses comme deux amis le feraient après un long moment passé en imaginant que Milo passera l’éponge. « J’ai l’air en forme, tu dis… ? Sérieusement… ? » Il fronce des sourcils. Ca ne veut absolument rien dire. Est-ce qu’il l’est vraiment, ou est ce qu’elle essaye simplement de détendre l’atmosphère ? Est-ce que c’est vraiment ce qu’on dit à son meilleur ami après l’avoir embrassé quelques mois plus tôt ? Elle ne peut pas lui lancer un truc pareil, aussi banal que des paroles qu’on dirait à une simple connaissance après tout ce qui s’est passé entre eux. « Norma... » gronde-t-il en roulant des yeux. « Est-ce qu’on va vraiment faire mine que rien ne s’est passé ? » Parce que ça ne ressemble en rien à ce qu’il s’était imaginé. Finalement, la conversation est aussi triste que leur relation. Elle ne mène à rien, comme leur amitié. « Non parce que j’comprends pas ce que tu fais là. J’comprends pas ce que tu veux. » Elle aurait très bien passer son chemin. Ca aurait été difficile à accepter, mais au moins, l’idée aurait été très claire. Sauf qu’elle lui a fait signe, et qu’elle s’est montrée presque enthousiaste. Elle ne l’a quand même pas accosté pour parler du beau temps… si ?