(✰) message posté Lun 8 Juin 2015 - 12:57 par Invité
she has her head in her hands and never stops screaming. she carries her ghosts at the back of her throat and finds lips to spit them into. everything she sees is in black and white. ▴▴▴ Scarlet ne se souvenait pas à quel moment le mot avait germé dans son esprit. Elle savait qu’il avait été toujours tapi dans un coin de son esprit, depuis l’âge où elle avait eu un béguin pour sa voisine de classe en maternelle, avant qu’elle ne comprenne que ce n’était pas normal aux yeux de tous. Avant qu’elle ne comprenne que ce n’était pas attendu d’elle. Avant qu’on ne commence à lui demander si elle avait un amoureux et non une amoureuse. Elle avait toujours été là, cette certitude, jusqu’à ce qu’elle puisse lui donner un nom, jusqu’à ce qu’elle l’associe à la peur et à la honte. Gay. Lesbienne. Homo. Elle ne savait pas comment elle devait se qualifier, alors qu’elle l’avait enterré, l’avait balayé d’un geste de la main, persuadée que ça ne lui correspondait pas. Elle était sortie avec des garçons, parce que c’était ce que les autres faisaient, parce que c’était ce qui était normal. Elle était sortie avec des garçons, pas par envie mais par contrainte. Cette contrainte n’avait pas tardé à se transformer en moyen de se convaincre que c’était ce qu’elle voulait, en moyen de se convaincre qu’elle était comme le reste des personnes qui l’entouraient. Parce qu’il y avait eu Emery. Emery avait été celle à lui faire comprendre. Emery avait été celle à planter le doute dans son esprit. Emery avait été la première à mettre feu à son cœur et son esprit. Emery avait été la première à la terrifier. Scarlet n'avait rien dit. Elle n'y avait même pas pensé. Elle n'avait pas tenté d'interpréter ce qu'elle ressentait. Elle avait déversé son poison, sur elle aussi, parce que c'était tout ce qu'elle savait faire, parce que c'était devenu un mécanisme de défense. Elle avait déversé son poison la journée et le soir, elle s'était surprise à coucher sur papier la tempête qui faisait rage dans ses pensées. Elle s'était mise à écrire ses sentiments, sans chercher à les interpréter, sans chercher à les relire et les avait cachés sous son matelas, dans son esprit, enfermés au creux de son cœur. Elle avait attendu que les insultes fassent effet sur ses propres pensées. Elle avait attendu que celles-ci correspondent à ce qui sortait de sa bouche. Ce n'était jamais arrivé. Emery était restée sa victime, son moyen de décompression, son bouc émissaire. Emery était restée ce doute terrifiant, ces sentiments dévastateurs, ces mots enfermés au creux de son cœur. Elle n’avait rien fait. Elle avait attendu d’avoir terminé le lycée avant de pouvoir commencer à l’oublier, avant de pouvoir commencer à prétendre que ces sentiments n’avaient jamais agités son cœur. Emery avait été la seule. Aucune autre fille n’avait fait cette impression sur elle. Aucun garçon, non plus. Elle avait été la seule, avant Blake, avant que son cœur n’explose à nouveau. A partir de ce moment-là, Emery avait cessé d’avoir de l’importance. A partir de ce moment-là, il n’y avait eu que Blake, Blake qui l’avait aimée en retour, Blake qui avait été la première sur qui elle avait posé les mains. Blake, qui avait été son premier amour, son premier baiser, sa première fois, peu importe le nombre de copains et de conquêtes masculines qu’elle avait pu avoir. Ils ne comptaient pas, ne faisaient pas le poids, à côté de ce qu’elle éveillait au fond de son cœur. Ils n’avaient jamais vraiment compté et c’était ce qu’elle avait su depuis toujours. Elle l’avait su, depuis le jour où elle avait posé les yeux sur Emery, depuis le jour où elle avait posé les yeux sur Blake. Mais elle ne l’avait jamais admis, jusqu’à présent. Pas même lorsque les battements de son cœur avaient commencé à lui faire mal lorsque Blake posaient ses doigts sur sa peau, pas même lorsqu’elle avait compris que ce n’était pas qu’un jeu, entre elles deux. Elle ne l’avait jamais admis à qui que ce soit, jusqu’à ce qu’elle parle à sa sœur, jusqu’à ce que les mots passent enfin ses lèvres. C’était une vérité qu’elle avait gardé en elle bien trop longtemps, qu’elle avait été incapable de nier récemment, qu’elle avait été incapable d’étouffer comme elle avait si bien su le faire auparavant. C’était une vérité qu’elle voulait avouer à Eugenia, parce qu’elle était la seule à pouvoir l’aider à démêler ses pensées, parce qu’elle était la seule en qui elle avait véritablement confiance. « Scarlet, tu dis ça comme si c’était grave, » lui dit-elle finalement, doucement, une fois qu’elle eut fini de tout lui dire. Elle pu sentir son cœur se serrer dans sa poitrine. Elle savait qu’elle n’aurait pas dû douter de sa jumelle. Que s’il y avait une personne pour comprendre ce qui lui arrivait, c’était bien elle. Pourtant, elle avait tout de même eu peur, parce que les mots étaient restés enfouis en elle pendant des années, parce qu’elle n’avait jamais pris la peine de les analyser après avoir compris que cela suscitait le rejet de beaucoup de gens. Elle n’avait jamais appris à les accepter, jusqu’à ce qu’elle les prononce. « La normalité n’existe pas, Scarlet. Tout le monde est étrange. Personne ne correspond au schéma que la société nous impose. Tu… Tu aimes les filles et ce n’est pas grave. Ca ne fait pas de toi une paria. C’est ce qu’on tentera de te faire penser mais il faut que tu gardes en mémoire que les autres ont souvent pire à cacher. » Scarlet lui sourit, à travers ses larmes, submergée par le soulagement. Elle n’était pas sure de la croire. Elle n’était pas certaine d’avoir envie de le dire à qui que ce soit d’autre. Mais être acceptée par sa jumelle lui suffisait, du moins pour le moment. « Tu l’as trompé ? C’est pour ça qu’elle t’en veut ? » reprit finalement Eugenia et Scarlet hocha la tête. « Si on veut, » répondit-elle. Elle ne savait pas si c’était vraiment le cas, étant donné qu’elle s’était appliquée à dire qu’elle et Blake ne formaient pas un couple. Mais elle savait que les choses avaient changées lorsque la blonde lui avait promis de rompre avec Andrew. Cependant, elle ne savait pas si elle lui avait été infidèle, alors que Blake n’avait pas tenu cette promesse. « On était pas vraiment ensemble, » expliqua-t-elle finalement, « parce que je voulais pas que ce soit officiel. Parce que j’avais peur que ça le soit. » Elle savait pourtant déjà à l’époque qu’elle avait envie d’être avec elle, qu’elle n’aurait pas fait cela si ce n’avait été que physique. La brune déglutit, avant de reprendre. « Elle est fiancée et… Elle m’avait promis qu’elle annulerait son mariage. J’y ai cru, parce que j’arrivais plus à prétendre que je ne ressentais rien. » Scarlet marqua une pause, essayant de chasser le nœud de sa gorge. « Elle l’a pas fait. » Elle garda les yeux baissés sur ses mains, honteuse de la suite, honteuse de la manière dont elle avait réagit. « J’étais blessée, Ginny. J’ai pas réfléchi, » balbutia-t-elle. « J’ai couché avec son frère, c’est lui le père, » souffla-t-elle finalement, la vision de nouveau embuée. Elle releva les yeux, incapable cependant de soutenir le regard de sa sœur. « Je voulais me prouver que je m’en fichais. Que j’étais pas amoureuse d’elle et que j’étais pas… comme ça, » expliqua-t-elle, encore incapable de prononcer les mots qui l’avaient torturés pendant des années. Elle secoua la tête, essuyant ses joues, avant de finalement oser regarder sa sœur. « Ça n’a pas marché, » dit-elle avec un sourire sans joie, qui s’effaça immédiatement. Tout ce que cela lui avait été apporté était du regret et de la peine. Et à présent elle devait vivre avec les conséquences de ses erreurs, alors que la vie se développait en son sein.
(C) LITTLE WOLF.
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(✰) message posté Dim 21 Juin 2015 - 10:30 par Invité
Scarlet & eugenia — the loneliest people are the kindest, the saddest people smile the brightest. the most damaged people are the wisest. all because they do not wish to see anyone else suffer the way they do. ✻ ✻ ✻ Quelque part, je savais que j’avais eu de la chance. Que j’avais eu la chance de me trouver bien avant que les autres ne songent à ce qu’ils étaient au plus profonds d’eux-mêmes. Que j’avais eu la chance de n’avoir jamais eu à me poser de questions existentielles à propos de moi. Que j’avais eu la chance de savoir, oui. La chance de savoir qui j’étais et qui je ne serais jamais. Cela ne m’avait pas permis de m’accepter mais j’avais cessé de m’attacher à la norme et aux conventions quand d’autres avaient semblé s’y tenir. Cela m’avait poussé à me détacher du reste du monde, d’évoluer sans me préoccuper des remarques des autres. J’avais souffert des attaques dont j’avais été victime mais la conviction que je ne pourrais jamais changer m’avait permis de continuer. De continuer, quoi qu’il pouvait bien m’arriver. Peu importe ce que les autres faisaient pour tenter de me rabaisser. J’étais tombée amoureuse dans mes plus jeunes années, quand j’avais eu un peu plus de quinze ans. J’étais tombée amoureuse d’un seul et unique garçon, pour qui j’avais nourri des sentiments durant les années qui avaient suivi. Pour qui je continuais de nourrir des sentiments. Je n’avais jamais eu à me poser des questions sur ma sexualité ; face à Julian, tout m’avait semblé être une évidence. J’étais incapable de savoir où est-ce que j’aurais été si je n’avais pas croisé sa route, qui est-ce que j’aurais bien pu aimer, mais le destin avait fait les choses à sa manière ; je n’avais pas à me préoccuper de suppositions, d’hypothèses. J’avais rencontré Julian. J’étais tombée amoureuse. J’avais souffert plus que nécessaire. Puis, finalement, mes douleurs avaient été récompensées. Je n’avais pas eu à me demander si j’étais hétérosexuelle. Si j’étais bisexuelle. Si j’étais homosexuelle. C’avait été lui. Lui et seulement lui. Mais le reste du monde n’avait pas eu la même chance que moi. Scarlet n’avait jamais connu de telle évidence. Peut-être son mal-être m’avait-il dépassé ; j’avais accordé si peu d’importance aux différences des autres, me focalisant sur les miennes, que je n’avais pas compris, tout de suite, que certaines choses pouvaient être motif de rejet. Que certaines choses pouvaient encore retenir certaines personnes en arrière, comme l’homosexualité pouvait le faire Scarlet. Je me mordis l’intérieur de la joue, préoccupée, tentant d’assembler les morceaux du puzzle dans mon esprit. Elle préférait les filles. Elle était enceinte. Tout était si confus que certaines vérités refusaient de s’imposer à moi comme des évidences. « Si on veut, » répondit-elle quand j’émis l’hypothèse qu’elle avait trompée la personne pour qui elle avait des sentiments. J’avais l’impression que, même pour elle, l’histoire dans son intégralité n’avait pas beaucoup de sens. « On était pas vraiment ensemble. Parce que je voulais pas que ce soit officiel. Parce que j’avais peur que ça le soit. » J’hochai doucement la tête. Je ne savais même pas si je connaissais la jeune femme en question. Je ne savais même pas si Scarlet l’avait amené dans notre appartement ou si elle avait veillé à la cacher des yeux de tous, y compris des miens. Je ne pouvais pas lui en vouloir. Du moins, pas réellement. Nous étions peut-être soeurs jumelles mais nous avions le droit d’avoir nos secrets, chacune de notre côté. S’il était rare que je réussisse à lui taire des choses, je ne savais pas s’il en allait de même avec elle. J’estimais qu’elle avait le droit. Le droit de ne pas tout me dire. Le droit de prendre son temps quand elle avait besoin de réfléchir correctement. « Elle est fiancée et… Elle m’avait promis qu’elle annulerait son mariage. J’y ai cru, parce que j’arrivais plus à prétendre que je ne ressentais rien, » reprit-elle et je fronçai les sourcils. « Elle l’a pas fait. » Je réfléchis silencieusement pendant une poignée de minutes alors que je comprenais ce que ma soeur me confiait. Un nom vint flotter dans mes esprits mais je n’osais même pas le prononcer à voix haute de peur que ma soeur ne se demande comment je pouvais bien savoir. « Blake, » finis-je par murmurer. Elle était venue plusieurs fois à l’appartement, avait passé certaines soirées avec nous, pas au point que je fasse attention aux détails mais suffisamment pour que je fasse des recherches sur internet. J’avais été en pleine période de rééducation, après tout. J’avais été trop épuisée pour mener l’enquête de mes propres yeux et avait préféré me cacher derrière mon écran pour en apprendre plus sur l’éditrice de ma soeur. Et j’avais découvert qu’elle était une héritière Marshall, qu’elle était fiancée. Pendant une demi-seconde, je me demandais, même, si ce n’était pas lui, le père ; je demeurai interdite, mon coeur tambourinant dans ma poitrine. « J’étais blessée, Ginny. J’ai pas réfléchi. J’ai couché avec son frère, c’est lui le père. » Le soulagement coula dans mes veines avant que mon visage ne perde de nouveau de ses couleurs. J’hochai la tête en silence. « Je voulais me prouver que je m’en fichais. Que j’étais pas amoureuse d’elle et que j’étais pas… comme ça. Ça n’a pas marché. » Un sourire triste pris place sur mes lèvres et je penchai la tête pour observer le visage dévasté de ma soeur. Se rendait-elle compte que j’avais l’intime conviction de ne pas être à la hauteur pour toutes ses révélations, pour toutes ses vérités ? J’avais l’impression que tout me glissait entre les doigts. Que je n’avais plus aucun contrôle, plus aucun contrôle sur rien. « Bien entendu que ça n’a pas marché… Parce que ça ne sert à rien de lutter, Scar, » finis-je par dire, sachant pertinemment que cela n’était pas si simple. « Tu vas simplement t’épuiser. » C’était la vérité, au fond. A tenter d’être quelqu’un d’autre, on finissait par ne plus être fidèle à ce qu’on était. On finissait par se perdre. Se perdre dans l’immensité du monde. Pire encore ; on finissait par se dénaturer et ne devenir qu’une pâle copie supposée perfectionnée de l’individu qu’on était dans un premier temps. On finissait par devenir qu’une succession de mensonges. « Tu es encore trop perdue pour te rendre compte que ce n’est pas si grave d’être homosexuelle, » repris-je, prononçant le mot à voix haute sans un battement de cils, sans l’ombre d’une hésitation. « Pour ce qui est du reste… Tu t’es défendue comme tu as eu l’habitude de te défendre, j’imagine. En ignorant le problème. En tentant de faire comme s’il n’existait pas. » Je n’étais pas une experte en relation, je n’étais pas une experte concernant le monde et ses habitants. Je ne comprenais qu’à moitié les personnes qui gravitaient autour de moi ; j’avais l’impression d’être ridicule en prétendant pouvoir donner des conseils mais j’avais l’impression que je devais au moins essayer pour elle. Pour Scarlet. « Je ne dis pas que tu es totalement innocente et que Blake est fautive… Après tout, je ne sais pas tout ce qu’il s’est passé. Vous avez toutes les deux votre part de tort dans l’histoire. Maintenant… J’imagine que vous allez devoir discuter sérieusement. Et que, toi, tu vas devoir assumer. » J’étais presque désolée de ne lui offrir qu’une réponse incomplète, que des conseils dans le vent. J’espérais qu’elle voyait dans mon regard à quel point je lui présentais toutes mes excuses. A quel point je pouvais l’aimer même si je ne parvenais pas à être à la hauteur.
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(✰) message posté Ven 10 Juil 2015 - 14:45 par Invité
she has her head in her hands and never stops screaming. she carries her ghosts at the back of her throat and finds lips to spit them into. everything she sees is in black and white. ▴▴▴ Elle ne savait pas quel avait été son plan en s’asseyant pour parler sa jumelle. Elle ne savait pas ce qu’elle comptait faire ensuite. Elle avait simplement eu l’impression de plus réussir à tenir, de plus réussir à supporter le poids qui pesait sur ses épaules. Elle avait simplement eu besoin de sa sœur, peu importe les conséquences, peu importe ce que cela voudrait dire pour son avenir. Les mots étaient sortis maladroitement de sa bouche, trahissant à quel point ses pensées étaient emmêlées. Ils avaient été maladroits mais au moins ils étaient sortis. Au moins, elle avait réussi à tout lui dire, à se débarrasser du fardeau que représentaient les secrets qu’elle avait accumulé. Elle n’avait au fond jamais rien voulu lui cacher. Cependant, elle savait très bien qu’elle avait eu tord également ne n’avoir jamais voulu rien lui dire. Elle avait tout gardé pour elle, persuadée qu’il était égoïste de sa part de parler de ses problèmes à Eugenia alors que celle-ci vivait un calvaire quotidien. Elle n’avait jamais pensé que ses problèmes soient suffisamment importants pour cela, elle n’avait jamais pensé pouvoir un jour arriver à se plaindre sans se sentir coupable. Eugenia n’avait pas eu le choix, elle. Elle avait été forcée de faire face à ce qui lui arrivait, elle avait été forcée de voir sa vie gâchée par sa propre jumelle. Scarlet, au contraire, avait tout eu pour elle. Et pourtant, elle avait réussi à tout gâcher, délibérément. Personne ne l’avait forcée à recommencer à boire. Personne ne l’avait forcée à coucher avec Clarence. Personne ne l’avait forcée à se mettre dans un pétrin pareil et même à présent qu’elle avait le soutient de sa sœur, elle ressentait cette même culpabilité. Elle ne pouvait s’en prendre qu’à elle-même, elle le savait. Elle n’était pas réellement en droit de se lamenter sur son sort, pas alors qu’elle pouvait arranger les choses, alors qu’Eugenia n’aurait jamais cette chance, elle. Pourtant, elle lui dit tout. Pourtant, elle oublia la culpabilité quelques instants pour prétendre qu’elles étaient une paire de jumelles ordinaires, que l’une n’avait pas détruit la vie de l’autre. « Blake, » dit finalement Eugenia, dans un souffle. Scarlet hocha faiblement la tête, pas vraiment surprise qu’elle ait pu le deviner aussi facilement. Elle savait de toutes manières que si elle voulait être honnête, elle ne pouvait pas lui cacher de qui il s’agissait. D’une main tremblant légèrement, elle essuya une nouvelle fois ses joues, essayant de chasser le nœud dans sa gorge, alors qu’elle pouvait sentir les larmes menacer de couler à nouveau à la moindre pensée. Elle tenta de lui expliquer du mieux qu’elle le pu. Elle tenta de se justifier et pourtant, elle savait qu’elle n’avait pas à le faire. Elle savait que lorsqu’il s’agissait d’Eugenia, elle n’avait pas à lui expliquer ses actions. Elle savait qu’elle avait toujours eu un cœur naturellement bon, qu’elle n’avait jamais eu besoin d’explications pour lui pardonner la moindre de ses fautes. Elle n’en avait pas besoin, parce que d’une certaine manière, elle savait déjà pourquoi Scarlet faisait ce qu’elle faisait. Elle savait déjà qu’est-ce qui déclenchait quelle réaction chez elle. Scarlet n’avait pas besoin de lui traduire ses pensées car Eugenia lisait déjà en elle comme dans un livre ouvert. « Bien entendu que ça n’a pas marché… Parce que ça ne sert à rien de lutter, Scar. Tu vas simplement t’épuiser. » Scarlet reporta son regard sur elle mais n’eut pas le courage d’acquiescer. Elle savait à présent que ce sentiment ne s’en irait jamais. Elle savait à présent que non, elle ne pouvait pas lutter. Mais elle avait encore du mal l’accepter entièrement. Elle avait encore du mal à se dire que ce n’était pas grave, que cela ne changeait rien, car il s’agissait d’elle-même. Elle savait qu’elle aurait toujours peur du regard des autres. Elle savait qu’elle aurait toujours peur d’être rejetée. « Tu es encore trop perdue pour te rendre compte que ce n’est pas si grave d’être homosexuelle, » lui dit doucement Eugenia. « Pour ce qui est du reste… Tu t’es défendue comme tu as eu l’habitude de te défendre, j’imagine. En ignorant le problème. En tentant de faire comme s’il n’existait pas. » Scarlet hocha la tête, le cœur au bord des lèvres. Elle avait toujours pensé qu’en l’ignorant suffisamment, tout problème finirait par s’en aller. Cela avait marché pour sa relation avec Blake. Cela avait marché pour son problème avec l’alcool. Elle avait réussi à ignorer ce qui posait problème. Elle avait continué à s’enfoncer sans se préoccuper de réparer ce qu’elle détruisait sur son passage. Cela avait marché pendant un temps mais elle savait parfaitement qu’elle ne pouvait pas ignorer sa grossesse. Elle savait parfaitement qu’elle avait une date limite, qu’au bout de neuf mois sa vie changerait probablement et qu’elle ne pourrait pas faire machine arrière. Elle savait qu’elle pouvait avorter mais elle n’aimait pas cette solution. Elle n’aimait pas l’idée de prétendre que ce bébé n’avait jamais existé. Elle n’aimait pas l’idée que cela lui donne excuse pour sombrer de nouveau. « Je ne dis pas que tu es totalement innocente et que Blake est fautive… Après tout, je ne sais pas tout ce qu’il s’est passé. Vous avez toutes les deux votre part de tort dans l’histoire. Maintenant… J’imagine que vous allez devoir discuter sérieusement. Et que, toi, tu vas devoir assumer. » Assumer. C’était quelque chose qu’elle avait bien eu du mal à faire jusqu’à présent mais qui était inévitable désormais. « Elle veut même plus m’adresser la parole, » finit-elle par souffler. « Et je peux pas continuer de lui courir après alors que je sais toujours pas ce que je vais faire de ce bébé. » Son temps était compté, d’une certaine manière et ses options étaient de plus en plus limitées. Elle finit par secouer la tête, essayant de remettre dans l’ordre dans ses pensées. « Mais je vais en parler à Clarence, il faut qu’il soit au courant, » admit-elle finalement. Elle savait désormais qu’elle ne pouvait jamais construire une vie avec lui, que cela ne serait même plus envisageable pour elle. Mais si elle décidait de garder son enfant, il était en droit de le savoir. Il était en droit d’être son père, même s’ils n’étaient pas ensemble. Le cœur lourd, Scarlet finit par se pencher en avant, se calant une nouvelle fois contre le torse de sa sœur, passant ses bras autour de sa taille. « Merci de m’avoir écoutée, » souffla-t-elle, tout bas. « Je sais pas ce que je ferais sans toi, » ajouta-t-elle avec un petit rire, bien qu’elle soit parfaitement sincère. Eugenia était la seule, au fond, à réussir à mettre de l’ordre dans ses pensées de cette manière. Elle était la seule à ne pas la juger, elle était la seule à la soutenir peu importe les circonstances.
(C) LITTLE WOLF.
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(✰) message posté Mer 11 Nov 2015 - 20:49 par Invité
Scarlet & eugenia — the loneliest people are the kindest, the saddest people smile the brightest. the most damaged people are the wisest. all because they do not wish to see anyone else suffer the way they do. ✻ ✻ ✻ Il y avait eu une période dans nos vies durant laquelle nous nous étions pas réellement parlés. Durant laquelle nous n’avions presque rien partagé, quasiment rien échangé. Nos deux mondes avaient été trop différents, sans doute, l’un venant s’opposer à l’autre ; elle avait passé sa jeunesse à sortir, à passer du temps avec ses amis de lycée pour boire et profiter, alors que je m’étais obstinée à rester dans ma chambre, à m’enfermer entre les quatre murs de cette pièce où je m’étais sentie chez moi, en sécurité. Elle avait été le leader de son groupe tandis que j’avais été l’inlassable solitaire. Elle avait passé son temps à parler haut et fort tandis que j’avais fait de mon mieux pour m’effacer, de mon mieux pour disparaître. Nous n’avions pas connu ce lien que les autres soeurs jumelles semblaient connaître ; les feuilletons et les films avaient semblé narrer des histoires bien loin de ce que j’avais connu à cette époque-là. Nous avions fait partie d’une autre norme, d’une autre réalité. Nous n’avions pas été deux éléments complémentaires mais deux âmes opposées. Je n’avais jamais réellement su si Scarlet voulait avoir quelque chose avoir avec moi ; j’avais suivi le rythme de ses pulsions, le rythme de ses envies. J’avais su endurer les critiques des autres sans qu’elle ne dise quoi que ce soit pour me défendre tout comme j’avais apprécié sa présence à mes côtés lors de notre anniversaire. Elle avait été celle à mener la danse, quelque part. J’avais été trop discrète pour lui imposer ma présence ou pour rejeter la sienne ; j’avais souffert, à ma manière, mais j’avais été beaucoup trop reconnaissante de ses petites marques d’attention pour lui en vouloir d’une quelconque façon. Peut-être avait-ce été de l’inconscience. Peut-être avait-ce été de la bêtise. J’avais toléré l’affection de celle qui avait pu s’apparenter à mon bourreau et je ne savais pas si notre lien de sang était suffisant pour rendre cela explicable. Je savais que Julian lui en voulait pour toutes ces choses que j’avais subi par sa faute, même si elle n’avait pas été impliqué dans chacune des humiliations que j’avais connu ; pour lui, cela lui suffisait qu’elle ait laissé tout cela se passer. Pour lui, le fait qu’elle ait regardé faire sans rien dire la rendait coupable de tous les crimes. J’étais trop attachée, trop sentimentale, trop aimante, sans doute, pour penser comme lui. Au contraire, j’avais toujours pensé que ma soeur jumelle avait des raisons de ne rien dire, de ne rien faire ; j’avais toujours été suffisamment innocente et candide pour lui chercher des excuses. Et, au fond, peut-être en existait-il. Des excuses. Scarlet ne fonctionnait pas comme le reste du monde. Moi non plus. Nous n’étions que des ratures. « Elle veut même plus m’adresser la parole, et je peux pas continuer de lui courir après alors que je sais toujours pas ce que je vais faire de ce bébé, » m’expliqua-t-elle et j’hochai doucement la tête sans savoir quoi dire. Je ne pouvais pas l’influencer dans un sens ou dans l’autre ; la décision lui revenait, à elle et elle seule. Je ne désirais même pas émettre le pour et le contre de peur qu’elle ait l’impression que je ne la soutienne pas dans un sens ou dans l’autre. Alors, je me tus. Je me tus en espérant que cela lui suffisait. Je me tus en étant désolée de ne pas savoir quoi faire. Je me tus parce que je n’étais pas encore suffisamment à l’aise avec le monde tout entier pour savoir quelles étaient les bonnes réactions à adopter. « Mais je vais en parler à Clarence, il faut qu’il soit au courant, » reprit-elle. Clarence, le frère de Blake, le père de son enfant. Clarence, cet homme avec qui elle avait couché en ayant le coeur brisé. Je ne pouvais pas la blâmer pour de tels gestes. J’avais fait comme elle. J’avais tenté d’oublier Julian en me tournant vers d’autres personnes qui n’avaient pas autant compté que lui dans mon coeur. « Merci de m’avoir écoutée. Je sais pas ce que je ferais sans toi. » Elle s’était penchée en avant pour reposer sa tête contre ma poitrine et passer ses bras autour de ma taille. J’esquissai un sourire triste en la serrant contre moi. Ma gorge était serrée, mes pensées, quant à elles, étaient presque douloureuses ; ma respiration était sifflante dans ma poitrine et je peinais encore à remettre toutes les informations dans l’ordre. Tout me paraissait si irréel. Tout me paraissait si lointain. Pourtant, je savais en mon fort intérieur qu’il s’agissait de la vérité vraie. « Je n’ai pas fait grand chose, tu sais, » répondis-je doucement. Après tout, je ne lui avais apporté aucune solution, je ne lui avais montré aucune marche à suivre. J’avais été inutile, d’une certaine façon. J’avais simplement été là. Là pour l’écoutée. Là pour la rassurer. Là pour lui rappeler que les différences n’existaient pas. « Mais ça va aller, d’accord ? Et puis, je pense que tu peux appeler maman. Lui raconter. Elle ne dira rien, » finis-je par ajouter. « Parce que ça change rien pour elle non plus. Parce qu’elle veut simplement que tu te sentes bien. » Je m’arrêtai. « Bien entendu, elle risque de se faire du soucis, aussi, tu sais, pour ta grossesse par exemple… Mais elle n’en aura rien à faire que tu préfères les princesses aux princes. Tu la connais. » J’esquissai un sourire, guère convaincue que Scarlet envisage cela de la même manière que moi. Je n’avais pas peur, non. Pas réellement. Parce qu’au moins, nous étions à deux.