(✰) message posté Dim 9 Aoû 2015 - 17:41 par Invité
go ahead and break my heart, why don't you ?
ASHFORD & THEO
Il y avait des jours comme ça, où Theo se sentait de devenir l'être le plus paresseux du monde. Ça arrivait souvent l'été, lorsque ses amis quittaient Londres pour les vacances, lorsqu'il n'avait pas vraiment envie de socialiser et qu'il avait une série ou deux à rattraper dans son programme. La seule personne qu'il avait envie de voir, en ce moment, mis à part April, Lorelei et compagnie, c'était son petit-ami. Ils avaient plein de choses à prévoir, comme leurs vacances, par exemple, car il y avait encore des détails à finioler. Seulement Ashford était occupé à jongler avec ses deux jobs malgré les vacances d'été, aussi, Theo devait prendre son mal en patience.
Avoir un petit-ami qui faisait de la radio était un gros avantage, dans ce genre de moment ; même si Ashford lui manquait et qu'il n'était physiquement pas présent, Theo pouvait se consoler en écoutant sa voix à travers les ondes. Il savait que l'émission qu'il était en train d'écouter via la page web de la radio n'était pas en direct car elle avait été enregistrée plus tôt, que Ashford n'était pas réellement derrière le micro, en direct, mais c'était quand même bien lui qui parlait. Qui racontait des idioties, avec ses collègues, un peu tout et n'importe quoi afin de faire sourire les auditeurs. Et ça marchait plutôt bien, considérant le fait que Theo souriait malgré la tâche qu'il s'était infligé en ce jour d'été - à savoir, ranger son bureau. Ce n'était pas une mince affaire, considéré tous les papiers plus ou moins inutiles qu'il avait accumulé en quelques semaines (ou plutôt quelques mois, disons). Ashford était fait pour les métiers à voix. Animateur de radio, en l’occurrence – ou rockstar, peut-être. Ce n'était pas si bête, tiens. Le bouclé se demanda un instant si le rôle de groupie lui irait, à lui. Il n'avait sûrement pas le talent requis pour faire partie d'un groupe, ou quoique ce soit du genre - il était plus à l'aise entre deux caisses de soutifs et petites culottes, pour être honnête.
Il en était à là dans ses réflexions, entre deux papiers administratifs, une photo de lui et sa meilleure amie (c'était donc là qu'elle s'était cachée, cette fameuse photo !) et un éclatement de rire de la voix pré-enregistrée de Ashford quand il releva la tête brusquement, comme piqué au vif par la soudaine information que lui imposait son cerveau. Il fronça légèrement les sourcils, pris d'une mauvaise impression. L'instinct.
Theo avait toujours eu la vague impression que la voix de Ashford lui était familière. Son timbre de voix, le ton, l'accent, évidemment... Il avait même soufflé l'idée à Ashford, mais ils ne s'étaient jamais attardés là-dessus et le sujet n'était jamais revenu sur la table. C'était une question qui s'était glissée dans un coin de sa tête pendant de longs mois, et à laquelle il ne pensait même plus, pour tout dire.
Le rire de Ashford résonna de plus belle à la radio, et Theo tourna la tête vers son écran. Il n'y avait jamais repensé jusqu'à aujourd'hui mais il n'était pas fou ; ce rire, c'était celui de Ashford, évidemment, mais il l'avait déjà entendu quelque part. Ailleurs. La voix de Ashford se lançait dans une conversation animée avec sa collègue, Theo ne suivait plus vraiment ; il était trop perturbé pour ça. Quelque chose le dérangeait. La voix, sa voix... Quelque chose... Il commença à fouiller dans le bazar sans fin de son bureau ; il gardait toujours une partie à peu près rangée avec des post-it importants, des noms de bouquins à acheter pour ses cours, des numéros de téléphone qu'il avait tout le temps sous la main... un numéro spécial. Complètement idiot. Il fixa un instant le numéro sous ses yeux, alors que la voix de Ashford annonçait le programme de l'émission en arrière-plan. Ce qu'il s'apprêtait à faire était totalement absurde et dénué de sens, c'était idiot et malsain de soudainement émettre ce genre de doutes. Ce n'était pas son genre mais pour tout dire, il ne réfléchissait même pas à ses gestes ; il était déjà en train de taper le numéro de la ligne de téléphone rose sur le clavier tactile de son téléphone.
Lorsque l'hôtesse de la ligne rose décrocha, il demanda à parler à son hôte favori, le seul qu'il connaissait, en fait : Edward. Il attendit un instant, juste le temps que la communication ne s'établisse, de quoi laisser le temps à ses méninges de s'activer. Peut-être qu'il était juste con, que Ash lui manquait juste un peu plus que la normale et qu'il hallucinait, qu'il faisait des rapprochements idiots entre deux choses qui n'avaient rien à voir. Peut-être qu'il avait trop joué à Sherlock Holmes quand il était petit, avec son frère, et qu'il voyait depuis des connexions là où il n'y en n'avait pas ; peut-être qu'il était juste fatigué et qu'il ferait mieux de sortir s'aérer l'esprit. Ou d'appeler Ashford et lui raconter toute cette histoire en riant un bon coup, puis de prévoir une soirée take-out et film ou quelque chose. Ou peut-être aussi qu'il avait raison et - c'est là qu'Edward décrocha le téléphone, tandis que la voix de Ashford continuait de circuler dans l'air. Et Theo s'arrêta de respirer une demi-seconde.
C'était tellement, ridiculement évident qu'il aurait pu se gifler pour ne pas s'en être rendu compte avant aujourd'hui. C'était tellement idiot - non, il était idiot. Il était vraiment idiot même, complètement con, tellement naïf, putain, qu'il aurait pu se gifler sur le champs et raccrocher. La voix qui émettait de son téléphone était plus suave, plus grave, plus sensuelle aussi que celle qu'il entendait à la radio, mais elle restait la même. C'était les mêmes intonations, la même chaleur dans la voix - il connaissait trop bien la voix de son petit-ami pour fermer les yeux là-dessus et prétendre qu'elles n'avaient rien à voir. Chaque détail prenait son sens et lui était incapable de parler.
Vous savez, ce sentiment qui vous prend lorsque votre cerveau semble faire tilt et mettre en relation deux choses qui n’ont à priori rien à voir ensemble ? Lorsque vous êtes dans votre lit, ou en salle d’examen, et que vous vous rappelez soudainement où vous avez vu cette personne croisées il y a un mois et demi, aux alentours d’un Tesco ? On se dit alors, mais oui, c'est ça ! C'est tellement évident. Eh bien c’était ça. Exactement ça. Au fond, pendant tout ce temps, Theo avait indirectement fait le rapprochement entre la voix d’Ashford et celle d’une autre personne, mais il n’arrivait pas à se rappeler qui, il n'arrivait pas à faire le rapprochement. Jusqu’à aujourd’hui. Edward.
Edward était Ashford. Ashford était Edward. Ashford…. Theo senti son cœur se pincer très fort, lorsqu'il se souvint que le principe même du téléphone rose, c’était du sexe au téléphone. Lui ne l'utilisait jamais à ces fins, les fois où il appelait Edward – Ashford. Mais il n’était pas idiot, merci bien – il savait très bien qu’il faisait partie de ce nombre infimes de clients qui n’appelaient pas pour du sexe. Ni même du flirt – putain, il ne flirtait jamais avec Edward, plus depuis qu’il était avec Ashford en tout cas. Et dire qu’il comptait le lui dire. Qu’il se sentait mal, qu’il avait l’impression de lui mentir en lui cachant passer de rares coups de fil à la ligne rose. Alors que depuis le début... Respire.
Theo ? Il raccrocha tellement vite qu'il failli en faire tomber son téléphone. La manière dont Edward venait de prononcer son prénom - ce n'était pas Edward, c'était Ashford, qui parlait. Inquiet ? Oh, mon. Dieu. Tout bourdonnait dans sa tête, et son coeur se mit à battre plus vite que la normale - il fallait qu'il s’assoit. Qu'il prenne dix secondes pour lui, voire une minute, juste de quoi se calmer car il ne pouvait certainement pas faire face à tout ça si il ne prenait pas le temps de calmer la crise qui menaçait d'arriver. Mais faire face à quoi ? Au fait que Ashford lui mentait depuis le début de leur relation ? Qu'il n'était pas honnête, car Ashford était en réalité Edward ? Edward, hôte de téléphone rose. Edward, qui vendait du sexe à travers un combiné à des inconnus.
Il fallait qu’il appelle Ashford. Non, mieux, il devait le voir. Maintenant. Ça ne pouvait pas attendre. Il devait se lever de sa chaise et foncer chez lui, demander - non, exiger - des explications et tirer les choses au clair. Il y avait trop de non-dits dans leur relation, et c'était le moment où ils leurs retombaient dessus, de plein fouet.
Il laissa tout en plan : son bordel, son pseudo rangement, il laissa même son ordinateur ouvert sur la page de la radio sans même prendre le temps de l'éteindre, et il fila attraper ses clés de voiture, dévalant les escaliers au passage. Il roula si vite qu'il arriva chez Ashford en à peine un quart d'heure comparés aux 25 minutes habituelles, et c'est seulement en traversant le hall de son immeuble qu'il se sentit faiblir. L'espace de trente secondes, il se demanda s'il n'en faisait pas trop, si il n'y avait pas une explication, un détail qu'il ratait. Peut-être qu'il était trop fatigué, que de binge-watcher toutes ces séries plus idiotes les unes que les autres le rendait lui-même idiot. Ou qu'il en faisait vraiment trop, oui. Il s'arrêta un instant, le temps de prendre sa respiration, et décréta que rien de tout ça n'était inutile. Qu'il ne voulait pas d'une relation basée sur le mensonge, peu importe de quel sorte. Il décréta qu'il valait mieux que ça.
Il monta les marches de l'escalier deux à deux, sans s'arrêter - il allait vraiment faire une crise, à ce stade-là. Il n’avait strictement aucune idée de ce qu’il dirait, une fois la porte ouverte – il avait l'impression d'avoir déjà joué ce scénario des dizaines de fois. Il finissait toujours de la même manière, et Theo en avait ras-le-bol.
C’était peut-être ça, ce sentiment qui l’avait empêché de dire à Ashford qu’il était amoureux de lui – qu’il l’aimait, putain – l’autre soir : la peur du mensonge. Des non-dits. Il reprit son souffle, prit une bouffée d'air et toqua brièvement à la porte de l’appartement de Ashford. Deux coups très brefs, avant qu’il ne se défile. Avant qu’il ne décide de fermer les yeux et de faire semblant, parce que c’était probablement moins douloureux et qu’il avait envie de l’aimer encore un peu.
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(✰) message posté Sam 15 Aoû 2015 - 18:14 par Invité
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THEO & ASHFORD
Ash s’accorde une grasse matinée au lendemain d’une longue semaine passée au studio ; après des heures passées devant le micro dans les bâtiments de Wired, il estime le mériter. L’émission a pris longtemps à préparer, encore plus à mettre sur pied, mais le résultat final, qu’il a écouté la veille sur la table de mixage, est fichtrement satisfaisant, et il se sent encore sur un petit nuage d’avoir réussi à assurer le job d’animateur principal de l’émission pour la première fois. Ce n’est qu’un test, bien entendu, pour voir s’il a ce qu’il faut pour passer d’invité occasionnel à collaborateur permanent, mais il dirait que ça s’est bien. Il a envoyé un message à Theo la veille, pour lui donner l’heure de diffusion et lui demander ce qu’il en pense, et il attend avec impatience de connaître son avis – même s’il était nul, il ne doute pas que Theo saurait le lui annoncer avec douceur, ou le distraire de son jugement final par une petite attention gentille. Bien sûr, Theo n’est pas vraiment doté d’un tact exceptionnel, et il a tendance à parler plus vite qu’il ne réfléchit sous le coup de l’excitation, mais Ash est convaincu que dans des circonstances aussi graves, le jeune homme ne se risquerait pas à faire un commentaire hasardeux. Il est même certain que Theo se creuserait les méninges pour réfléchir à un discours pertinent qui lui remettrait les idées en place avec délicatesse. Ca prendrait probablement du temps à son petit ami de trouver les bons mots, cependant, raison pour laquelle Ash a décidé de ne pas retrouver avec Theo aujourd’hui – si sa prestation a été, de l’avis du jeune homme, catastrophique –, il ne veut pas le harceler de questions et risquer d’entendre une réponse un peu brute de décoffrage.
Même s’il ne fait pas grand-chose aujourd’hui ne signifie pas qu’il est totalement improductif, cependant. Son téléphone a sonné toute la matinée, mais cela n’a pas suffi à doucher son enthousiasme et il se distrait en regardant du coin de l’œil une ribambelle d’épisodes issus d’une téléréalité quelconque. Il ricane silencieusement quand l’une des dindes qui participe à l’émission claque une porte de façon théâtrale, mais son rire est couvert par une nouvelle sonnerie de son téléphone, et il décroche machinalement, portant l’appareil à son oreille. Virginie, l’opératrice, lui annonce un dénommé Theo, et Ash fronce les sourcils. Ce n’est pas que Theo n’est pas un pseudonyme inhabituel – avant de les rediriger vers un opérateur, les employés de la centrale d’appels récoltent systématiquement quelques renseignements pour fournir à leurs clients un service optimal : leur prénom (ou celui qu’ils ont choisi d’adopter cette fois-ci), leurs requêtes et fantasmes, et, bien sûr, leurs coordonnées bancaires. Bien sûr, Theo est loin d’être le prénom le plus utilisé, loin derrière les James, John, Henry et William, mais Ash a déjà parlé avec plusieurs « Theo. » Cependant, il ne connaît qu’un seul Theo qui appelle sans autre souhait particulier que celui d’être mis en relation avec Edward, et ce Theo n’appelle plus vraiment depuis quelque temps – quelque chose dont Ashford se félicite. En levant les yeux vers l’horloge, il s’aperçoit que son émission tourne encore, et une partie de lui est un peu blessée à l’idée que son petit ami puisse préférer appeler une ligne de téléphone rose quand Ash a passé tant de temps à bavasser sur l’importance de cette transmission. Cette réaction est inexcusable, égoïste, injuste et injustifiée, mais Ash ne peut s’empêcher de ressentir un petit pincement au cœur. Il fait bonne figure, cependant, et décroche avec son enthousiasme habituel pour réciter son message d’accueil. Il attend la réponse, mais celle-ci tarde à venir. Il entend le bruit d’une respiration dans le combiné, un souffle presque difficile. Encore une fois, ce n’est pas totalement hors de l’ordinaire – nombreux sont ceux qui se dégonflent et raccrochent avant d’avoir dit un mot – mais un mauvais pressentiment se faufile comme un serpent froid sous la peau d’Ash.
- Theo ? demande-t-il, et la panique s’empare de lui quand il s’aperçoit que sa langue a fourché, que sa voix est trop… Ashford, pas assez Edward, que sa façade a flanché une seconde sous le coup de l’incertitude.
A l’autre bout du fil, on raccroche, et Ash ne peut qu’entendre le son de la tonalité, pas assez fort pour couvrir les battements désordonnés de son propre cœur. Il sent son sang palpiter dans ses tempes, s’étrangle un peu alors qu’il tente de reprendre sa respiration, tousse. Il tâche de se calmer, de se raisonner, car cette situation n’a rien d’inhabituel. Ce n’est rien d’autre qu’une coïncidence. Pourquoi, alors, ne peut-il pas se sortir de la tête le son étouffé d’un souffle erratique et celui de sa propre voix. « Theo ? » « Theo ? » « Theo ? » « THEO ? » Le souvenir de ce simple mot est comme un hurlement dans son cerveau, et il se lève un peu trop vite dans sa quête d’un verre d’eau. Sa tête tourne un peu et sa vision se trouble, mais il se sent mieux aussitôt après avoir pris une gorgée d’eau glacée. L’espace d’un instant, il considère appeler Theo, pour s’assurer que tout va bien, que ce n’est que son imagination – sa paranoïa – qui lui joue des tours, mais il en est incapable, n’en a pas le cœur. Il est presque revenu à son état normal quand quelqu’un toque à sa porte, et il manque de lâcher son verre. Il passe rapidement à la salle de bains, se passe de l’eau sur le visage et une main dans ses cheveux pour être sûr d’être présentable et revient vers la porte d’entrée.
Il ne devrait pas être surpris, non. Mais cela ne l’empêche pas de sentir son cœur tomber comme une pierre dans sa poitrine lorsqu’il voit Theo, avec sur le visage une expression qui ne lui dit rien qui vaille.
- Euh… Salut, réussit à bredouiller Ash, dans une tentative désespérée de paraître nonchalant, parfaitement à l’aise, comme s’il n’avait rien à se reprocher, comme s’il n’était pas à deux doigts de faire une crise d’hystérie. Tu, hum. Tu en fais, une tête. L’émission était… si mauvaise que ça ?
Sa voix tremble, et ses mains aussi. Il ferme le poing et le cache derrière son dos en même temps qu’il s’écarte pour laisser Theo entrer. Son téléphone se met à sonner sur la table où il l’a posé, vibre sur la surface de bois jusqu’à ce que l’appel soit redirigé, et Ashford ne peut se résoudre à lever les yeux vers Theo.
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(✰) message posté Mar 18 Aoû 2015 - 2:44 par Invité
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ASHFORD & THEO
Quelle merde. Quelle merde. QUELLE MERDE. Il n'était pas assez lâche pour se dire qu'avoir cette conversation au téléphone aurait été mieux, car plus facile que de confronter son petit-ami en face à face. Mais lorsque Ash lui ouvrit la porte, Theo su instantanément que la conversation allait être encore plus difficile que prévue. Il n'avait pas encore tous les éléments en main pour être bien sûr de comprendre ce qu'il se passait exactement, mais il en voulait déjà à Ashford pour leur imposer une telle dispute. Imposer, littéralement, c'est comme ça que l'australien voyait la chose. Evidemment, comme tout couple qui se respecte, ils avaient leurs moments de désaccord mais rien d'insolvable, jusqu'ici. A la limite, peut-être qu'ils donnaient à Ash l'envie de le secouer un peu et à Theo l'envie de rouler des yeux au ciel, mais rien de grave pour être honnête. Là, le pressentiment de Theo était si gros et si mauvais qu'il comprenait très bien que Ash n'ose même pas le regarder. Lui aussi devait le sentir, mais lui devait surtout savoir ce qu'il se passait réellement. Alors que Theo, lui, n'était pas encore sûr d'avoir tout les éléments en main.
Theo rentra dans l'appartement de Ashford comme une feuille d'arbre arrivée par hasard par une fenêtre, poussée par le vent. Si d'habitude il l'embrassait à la porte, l'enlaçait ou lui montrait tout simplement de l'affection en général, aujourd'hui il n'en n'était rien. Son cerveau bourdonnait trop, il n'était pas serein. Et si son pressentiment était vrai, il n'était même pas sûr d'en avoir envie de toute manière.
Il ne savait même pas quoi lui dire. Il attendit que Ash ne ferme la porte derrière lui pour le regarder. Il y eu un silence, beaucoup trop pesant contrairement à d'habitude ; ce n'était pas un genre de silence complice ni même confortable. Theo aurait presque voulu que la scène se passe dans un café ou dans n'importe quel autre lieu public rempli de monde ; l’avantage était qu'il y avait toujours du bruit pour couvrir le silence et les pensées. Theo détestait ça, détestait penser comme ça. Pas avec Ashford, putain.
« L'émission était... bien. » Non, c'était faux. C'était plus que bien, et ça le tuait intérieurement de ne pas pouvoir s'étendre plus longuement sur le sujet car Ashford avait fait un travail formidable sur cette émission, il avait un talent incroyable et Theo savait à quel point cette émission en particulier était importante pour lui. Jusqu'à ce matin encore il lui en avait parlé, et Theo avait été tellement impatient à l'idée de raconter à Ash à quel point il avait été bon. Qu'il ne fallait pas qu'il lâche ses efforts, car il avait vraiment du talent, une voix (bordel) faite pour ça. Sa bonté le perdrait probablement, et sa lâcheté peut-être, aussi ; mais il ne pouvait pas se résoudre à garder tout les commentaires positifs qu'il avait en tête pour lui, pas quand il savait à quel point son indifférence pourrait blesser Ashford. Putain, il se maudissait presque de ne pas lui être indifférent même dans ces moments-là. « T'étais vraiment super. Vraiment. » Il y avait tant de sincérité dans sa voix que même lui eu envie de se donner une claque pour tant se soucier du blond. Peut-être que leur relation allait prendre un sacré coup aujourd'hui, mais Theo n'avait pas envie que cela affecte la réussite ou l'ambition de Ashford. Si tant est que son opinion comptait pour lui - non, c'était méchant ça, et petit, car il savait très bien que son avis comptait pour Ash. Il ne lui en aurait pas tant parlé, sinon.
Il valait probablement mieux ne pas s’embarrasser de déclarations triviales et aller direct au point. Il n'était pas venu le féliciter pour son travail ; même si c'est ce qu'il aurait voulu faire, ce soir, quelques heures après l'émission. Ou du moins prendre le temps de lui téléphoner et lui rabâcher les oreilles toute la soirée, en lui racontant en long, en large et en travers, comme il était drôle et que sa voix était sexy et qu'il était tout simplement bon.
Ashford devait le savoir, maintenant, avec le temps ; Theo ne savait pas garder ses sentiments pour lui. Il ne savait pas les cacher, non plus, tant il était expressif. Ses gestes, son visage, sa voix étaient sans équivoque, le trahissait trop facilement ; il avait d'ailleurs trop souvent la mauvaise impression de pouvoir être lu comme un livre ouvert. Ash savait aussi qu'il était du genre à commencer avec lenteur, en essayant de prendre de la distance ; le temps de mettre ses idées en place, trouver ses mots, de calmer sa voix bien souvent tremblante. Et puis il suffisait d'un mot, d'une phrase, d'une réaction pour qu'il réagisse et qu'il y aille vraiment. Un peu comme cette fois au coffee shop, en septembre dernier ; il n'avait pas tout de suite abordé le sujet fâcheux avec Ash (quelle ironie, en y repensant), ça lui avait prit quelques minutes, mais dès que Ashford avait lancé le sujet, visiblement étonné que Theo ne soit pas plus direct, le bouclé ne s'était pas fait prier et n'y était pas allé de main morte. C'était peut-être handicapant mais c'était comme ça que fonctionnait Theo lors de disputes, il devait juste trouver un moyen d'échapper à la règle aujourd'hui. Car faire traîner le moment de la confrontation n'aiderait en rien.
Le problème était qu'il ne savait pas par où commencer. Il y avait tant de choses à dire... Il leva la main de manière à faire signe à Ashford de ne pas lui parler, de ne pas l'interrompre. Il devait commencer quelque part mais pour ça, il avait besoin de mettre un minimum d'ordre dans ses pensées. Le geste n'était pas méchant et Ash en avait l'habitude, c'était quelque chose que Theo faisait souvent lorsqu'il était en pleine réflexion et avait besoin qu'on le laisse se concentrer (chose qui était assez difficile pour lui). Combien de fois Lorelei s'était contentée de lui lancer un coussin en plein visage pour se venger du silence qu'il lui imposait à l'aide de ce geste ? Il passa sa main dans les boucles de ses cheveux, cherchant le regard de Ashford. Evidemment il l'évitait, et Theo ne pu s'empêcher de rouler des yeux car ça, non, il n'était pas d'accord. Lui non plus ne voulait pas être là, mais c'était lui qui les avait mit dans cette situation alors la moindre des choses, c'était de le regarder. Il y avait bien un moyen de le faire relever des yeux, ceci dit. « Edward. »
La légende raconte que Theo aurait voulu se cacher dans un coin de la pièce et pleurer comme un enfant car le prénom et sa nouvelle signification, était soudainement trop douloureuse. Et putain, comme il aurait aimé que Ashford ne réagisse pas à la prononciation de ce prénom.
« Mais je suis tellement con. »
Ça y est. This is it. C'était ça, la réaction qui allait lancer Theo. Il n'avait plus besoin de mettre ses idées en place ou de réfléchir, il avait juste vu Ashford réagir en entendant le prénom sortir de sa bouche et c'était ce qu'il fallait pour que Theo se lance. Il s'éloigna tout de suite de la porte d'entrée, dont il était ironiquement resté assez proche, et par conséquent de Ashford - l'appartement n'était de toute façon pas très grand, il n'avait pas à faire beaucoup de pas pour se retrouver dans le salon, slash chambre du garçon. « Je culpabilisais car je pensais que je n'étais pas honnête, parce que je passais parfois un coup de fil à, à, à Ed- à une ligne rose. Et je - oh mon dieu, Ashford, tu - » Il reprit sa respiration, « J'allais te le dire ! »Et voilà que je découvre que Edward, c'est en fait toi, et que tu travailles pour cette compagnie. Que c'est à toi que je parlais depuis le début. Il tourna un peu sur lui-même, une main perdue dans les cheveux, comme s'il cherchait un endroit où s'asseoir afin de processer l'information qui passait en boucle dans son cerveau. Il resta debout. Ce n'était pas un enfant, ce n'était plus un enfant. Et si il voulait régler les choses de manière correcte, il ne pouvait pas se comporter comme tel. Alors il resta debout.
« Dis-moi juste que je suis idiot et que je ne comprends rien, que tu n'es pas - que tu ne - » C'était ridicule mais il n'arrivait pas à le dire à haute voix. Et il parlait vite, trop vite, et son cœur commençait à batte trop vite lui aussi et il fallait qu'il se calme parce que même s'il n'avait pas tant haussé la voix que ça, il était à bout de souffle. « Edward - travaille pour une compagnie qui vend du sexe au téléphone, à des vieux ventripotent pour la plupart. » énonça-t-il aussi calmement que possible - il était grand, adulte, mature, il pouvait gérer ça. Il avait géré un petit-ami qui l'avait trompé avec tout ce qui bouge, une amie proche partie trop vite. Il avait géré une mère qui l'avait abandonné et un frère dont il ne savait plus rien. Il avait vécu le rejet, le mensonge, la tromperie. Ce n'était en fin de compte qu'une nouvelle crise à rajouter à sa petite vie bien rangée, après tout. Il pouvait gérer ça. Il allait gérer ça. « Toi, tu fais de la radio. Je veux dire, tu ne pourrais pas combiner les deux. Si ? Non. » Il faisait là un état des lieux, au lieu de poser la question qui lui brûlait les lèvres. Putain putain putain.« Tu ne pourrais pas ne pas me le dire. » Il fallait qu'il se taise et qu'il laisse parler Ashford, maintenant, parce que sinon évidemment il n'aurait pas de réponse à ses (nombreuses) questions. Peut-être qu'au fond, il parlait autant parce qu'il savait ce qu'il allait entendre et qu'il n'en n'avait pas envie. « Dis-moi juste que tu ne m'as pas menti. »
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(✰) message posté Mar 1 Sep 2015 - 14:52 par Invité
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THEO & ASHFORD
La voix de Theo sonne faux. Ash peut y déceler un infime tremblement, comme s’il était à deux doigts de l’hystérie tout en tentant de sauver les apparences, et il sait que dans ce tremblement, c’est son monde qui est en train de s’effondrer. Le jeune homme qui franchit le pas de sa porte semble se forcer à garder un ton léger, à entretenir une conversation futile. Il parvient même à glisser un compliment qu’Ashford n’entend pas, qui aurait une valeur inestimable en toute autre circonstance mais qu’il balaie d’un vague mouvement, moitié hochement de tête, moitié haussement d’épaules. Il est très prudent dans la façon dont il regarde Theo, se tient à une distance respectable de près d’un mètre, comme pour tenter inutilement de se protéger de l’ouragan qui ne va pas tarder à souffler.
Ce n’est pas un ouragan qui s’abat sur lui comme une massue, cependant. Ce n’est pas un ouragan, ni même un cri, d’ailleurs. C’est un simple mot, prononcé du bout des lèvres, presque un murmure, mais nettement audible dans le silence inhabituel qui s’est imposé entre eux, assourdissant. « Edward. » Ash sait. Il le sait depuis qu’il a décroché cet appel de Theo un quart d’heure auparavant, depuis qu’il a entendu le son d’une respiration laborieuse dans l’écouteur, depuis qu’il a entendu Theo toquer à sa porte, deux coups brusques, loin du joyeux tambourinement que le jeune homme affectionne. Il le sait, a eu quelques minutes pour se préparer, et pourtant, ce simple mot et tout ce qui en découle manquent de l’entraîner comme une coulée de boue. Il sent une vague de froid descendre sur ses épaules jusqu’au creux de son estomac, éprouve une brève sensation de vertige, comme si son cerveau venait de se figer, et le silence est si pesant à présent que le seul son qu’il perçoit est celui du souffle irrégulier de Theo et les battements affolés de son cœur. Il soupçonne d’être devenu très rouge plutôt que d’avoir pâli comme il s’y serait attendu. Ses jambes semblent tout d’un coup avoir du mal à supporter son poids, et il s’appuie contre la porte qu’il vient de refermer le temps de reprendre contenance.
C’est un seul mot, et pendant une seconde, il espère que ce sera tout, qu’il va avoir l’opportunité de s’expliquer, mais c’est comme si une digue venait de se briser quelque part en Theo, comme s’il avait décidé d’abandonner les faux-semblants et de déverser ce qu’il a sur le cœur. Sa voix est fêlée, à mi-chemin entre la fureur et le ton blessé, et c’est cette note de détresse, d’accusation et d’incompréhension dans la voix de Theo qui retourne l’estomac d’Ash bien plus que la simple et juste colère. Dans ce petit jeu d’ombres, Ash a parié bien plus qu’il n’avait à perdre, et c’est Theo, à présent, qu’il a blessé au passage, par inadvertance ; dans son empressement de préserver le jeune homme, il a entretenu son sentiment de culpabilité, a amené Theo à se sentir en tort, mais tout du long, c’est Ashford qui a menti, Ashford qui a caché, inventé des prétextes et des excuses.
Il aimerait pouvoir dire à Theo qu’il fait erreur, qu’il ne s’agit que d’une simple coïncidence. Il aimerait de tout son cœur pouvoir le détromper en toute sincérité. Mais il y a déjà trop de mensonges et de non-dits entre eux pour qu’il puisse songer à en ajouter un de plus à cette pile déjà chancelante. Il y a beaucoup de choses qu’il aimerait dire, des corrections qu’il aimerait faire, expliquer à Theo que certes, il est hôte de téléphone rose, mais ce n’est pas ce qu’il croit, que ça n’a rien de la dimension sordide qu’on peut s’imaginer.
A la place, toujours hébété, il se redresse, se décollant de la porte contre laquelle il était avachi. Il s’avance prudemment, une main tendue pour l’inciter au calme, comme s’il essayait d’approcher un fauve meurtri et qu’il craignait une morsure.
- Je voulais te le dire mais je… je ne savais pas comment en parler, et… et je ne savais pas comment tu réagirais.
Il a souvent imaginé avouer à Theo la teneur d’un de ses jobs étudiants, a épuisé tous les scénarios depuis la discussion calme aux hurlements et aux jets d’assiette, a envisagé tous les dénouements, de la rupture théâtrale au sexe passionné, en passant par un simple éloignement et un disloquement forcé d’une relation tombée en déchéance. Mis devant le fait accompli, cependant, il se rend compte que rien de ce qu’il n’a à dire n’apaisera le feu qui brille dans les yeux du jeune homme, et sa main retombe mollement le long de son corps au lieu d’effleurer l’épaule de Theo, comme il le voudrait tant.
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(✰) message posté Jeu 3 Sep 2015 - 1:46 par Invité
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ASHFORD & THEO
La débâcle des sentiments. Le plus compliqué était probablement d'avoir à gérer toutes ces émotions en même temps. C'était trop d'un coup. Theo était en colère, évidemment, et confus avec ça. Frustré de ne pas comprendre, aussi, fatigué d'avoir l'impression de ne pas savoir faire durée une relation sans se faire avoir par sa naïveté. La déception était grande, ce soir.
Il devrait laisser à Ashford le temps de s'expliquer, d'en placer une, mais il savait que son petit-ami allait tenter de se dédouaner de ce qui lui était reproché et sa propre réaction risquait d'être trop mauvaise. Il ne pu cependant pas s'empêcher de répliquer, lorsque Ash dit avoir déjà voulu évoquer le sujet par le passé (encore heureux, pense une partie du cerveau de Theo).
« Mais tu savais que moi-même j'appelais, depuis le début ! Evidemment que je ne t'en n'aurai pas autant voulu si tu avais été honnête dès le départ, et tu le sais. » Le ton était accusateur, volontairement. Jamais il n'aurait jugé Ash ou du moins, il n'aurait pas tant été sur la défensive que maintenant ; que son petit-ami en ai visiblement douté était tout autant blessant.
Si Ashford lui avait parlé plus tôt de la teneur de son job étudiant, plutôt que de le lui cacher pendant si longtemps, Theo aurait été mille fois plus réceptif et ouvert d'esprit qu'il ne l'était maintenant. Il aurait écouté l'explication qu'il avait peut-être à lui donner, et même si la nouvelle aurait été déroutante dans tous les cas, jouer cartes sur table dès le début de leur relation n'aurait que pu jouer en sa - leur - faveur. A la place, Ashford avait visiblement jugé utile de ne rien dire et d'attendre que Theo découvre le pot-au-rose par lui-même. Ce qui, clairement, rendait le tout deux fois plus dur à avaler. Le sentiment de trahison qui animait Theo était grand et profond ; car plus il y réfléchissait, plus il comprenait que le but du téléphone était bien de vendre du sexe au téléphone à des inconnus, ce qui dans sa tête, revenait un peu au fait de faire l'amour, de coucher avec la dite personne. C'était un concept qui échappait un peu à Theo, mais l'idée lui donnait le tournis.
« Je ne comprend pas. » Y avait-il réellement quelque chose à comprendre, de toute façon ? Il voulait surtout savoir pourquoi. Pourquoi il ne lui avait rien dit plus tôt, si c'était si innocent qu'il ne le laissait paraître et pourquoi, ce job-ci en particulier ? D'accord, il y avait une différence de moyens financier évident entre les deux jeune hommes, la preuve était que Ash était obligé de jongler entre plusieurs jobs différents afin de ne pas être dans le rouge à la fin du mois. Theo était au courant, mais savait-il réellement à quel point c'était difficile ? Lui ne connaissait pas ce problème, ne l'avait jamais connu et avec un peu de chance, n'y ferait jamais face. Il ne lui était donc jamais venu à l'esprit que Ashford ait besoin de se tourner vers ce genre de boulot afin de s'en sortir décemment, financièrement parlant. Peut-être qu'il aurait pu le voir venir, s'il avait été plus attentif ?
Il eu comme un flash : il se revoyait sur son canapé, tous deux les joues bien rouges, légèrement essoufflés, le jour où ils avaient eu cette fameuse conversation, celle-là même où Ashford lui disait vouloir attendre un peu avant que du sexe ne se glisse dans leur histoire. Theo avait été particulièrement attentif et depuis, d'une patience légendaire (et assez inhabituelle, lorsqu'on le connaissait) après que Ash ne lui ai dit qu'il préférait attendre car c'était, en plus, sa première fois - Respire. Il ne pouvait pas respirer, putain, Ashford se foutait de lui depuis le début. Non ? Il lui mentait. Et lui était trop idiot pour s’en rendre compte plus tôt. En vérité, il ne voulait pas coucher avec lui car il couchait avec d’autres. Virtuellement. Virtuellement ? C’était tromper, ça ? Et si en fait, il ne suffisait tout simplement pas à Ashford ?
« Je comprends pas ! » Sa voix dérailla légèrement. Il avait un peu de mal à rester d'un calme stoïque avec toutes les idées qui lui venait en tête. « Pourquoi ce job-là, en particulier ? Tu.. tu me dis que tu ne veux pas coucher avec moi, tu ne veux pas entendre parler de sexe - et, d'accord, je n'ai aucun problème avec ça et tu le sais, ce n'est pas ça le problème. D'un côté j'ai cette version mais de l'autre, tu appelles des gens et tu... couches avec eux ? Au téléphone ? » Ça sonnait presque égoïste, dit comme ça - il ne manquerait plus qu'il passe pour un petit con qui n'était avec lui que pour le sexe. Ce qui n'était évidemment pas le cas. S'il avait voulu une relation pour du sexe, il ne se serait jamais lancé avec Ash, pour commencer. Mais il fallait qu'il aborde la question car il avait la désagréable sensation d'être trompé à nouveau et ce n'était pas acceptable - il s'était juré que c'était l'unique et dernière fois qu'il se faisait avoir de cette manière, peu importe les sentiments qu'il pouvait avoir pour la personne en question. Il releva ses yeux afin de regarder Ashford, qui lui-même le regardait sans visiblement savoir quoi dire pour l'apaiser. Cette simple pensée rendait Theo un peu plus triste encore ; eux qui étaient habituellement si confortable l'un autour de l'autre, ils se retrouvaient aujourd'hui incapable de se regarder sans savoir quoi dire, ou quoi faire.
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(✰) message posté Dim 13 Sep 2015 - 15:25 par Invité
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THEO & ASHFORD
On dit qu’il ne faut comparer que ce qui est comparable ; Ashford ne se réfugie pas souvent dans les maximes communes, mais cette fois, comme souvent, les adages illustrent bien la réalité, et la réalité est, malheureusement, beaucoup plus brutale que Theo ne veut le croire.
- Ce n’est pas la même chose, raisonne Ash, tâchant de garder la tête froide et de faire preuve de patience. Tu appelles par désœuvrement, parce que… tu t’ennuies. Moi, le téléphone rose, c’est mon travail.
Theo a appelé quelques fois, par curiosité d’abord, et après simplement pour le plaisir d’avoir une conversation qui est souvent tombée dans un agréable compte-rendu routinier des dernières semaines, une enfilade de petites anecdotes légères ponctuée, au début, d’un soupçon de flirt innocent. Ce n’est rien, absolument rien par rapport au fait qu’Ash est un opérateur régulier, dont le rôle consiste à fournir des dizaines de prestations téléphoniques par semaine. Pour Theo, le téléphone rose est un passe-temps anodin, une petite once de folie pour pimenter le quotidien sans aller trop loin. Pour Ash, cela fait partie intégrante de sa vie.
Le choc de Theo, et la réaction qui en découle, ne devraient pas surprendre Ashford, mais ses joues le brûlent, non seulement de honte mais aussi de… colère ? Theo a tous les droits d’être blessé, de faire une scène, mais Ash ne peut s’empêcher de se hérisser face aux préjugés qu’il émet. C’est la réaction qu’Ashford a toujours craint, la raison pour laquelle il n’a cessé de repousser ce moment : la peur d’être jugé à la hâte par quelqu’un qui n’a de connaissance de son milieu professionnel que quelques coups de fils innocents et l’image préfabriquée et sordide – vendeuse – véhiculée par la société.
- Ce n’est pas… tu vois, je savais que tu penserais que ça tourne autour du sexe, que c’est ça, l’essence du problème ! Parce que peu importe la façon dont je pourrais essayer de présenter mon job, c’est tout ce que les gens retiennent : le côté sexuel ! Mais soyons clairs : je ne couche avec personne, ça n’a rien à voir avec… avec nous. Sans compter que ce sont mes clients qui m’appellent, pas l’inverse, comme tu devrais le savoir, mais ce n’est qu’un point de détail. Mais les gens semblent toujours penser qu’être opérateur téléphonique pour une ligne rose fait de moi un genre de pute, et c’est pour ça que je n’avais pas spécialement hâte de t’en parler.
Il se passe une main sur le visage, faisant un effort pour adoucir son ton défensif, presque agressif. Ce n’est pas de la prostitution, ce n’est pas du sexe, ça n’a rien d’intime ou même de réel. C’est virtuel, chimérique, une contrefaçon, une illusion, une parodie mise en place pour satisfaire les fantasmes inassouvis au même titre que les sites pornographiques disponibles en ligne, mais il ne voit pas comment faire comprendre cela à Theo, lui expliquer que c’est un job quelconque qui ne compromet en rien son intégrité, qui ne fait pas de lui un objet, ne l’amoindrit ni le change en tant que personne, que porteur d’une valeur humaine.
- Ce qu’on a, tous les deux, ce qu’on partage et qu’on… est en train de construire, c’est vraiment… c’est génial. Et je ne voulais pas qu’un truc idiot et hors de propos comme mon job vienne tout bouleverser, ajoute-t-il sur un ton qui se veut d’excuse, mais qui donne plus l’impression d’être un soupir découragé.
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(✰) message posté Ven 25 Sep 2015 - 0:34 par Invité
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ASHFORD & THEO
Le problème de Theo, c'est aussi qu'il n'était pas patient. Il avait beau essayer, et y mettre toute la bonne volonté du monde, le ton défensif qu'employait Ashford avait le don de l'énerver un peu plus. L'espace d'un instant, à l'écouter, on aurait presque dit que c'était de sa faute à lui si ils en étaient arrivés là. Il ne pouvait s'empêcher de penser que c'était du sexe, malgré tout, peu importe qu'il y prenne plaisir ou pas, et le fait que Ash ne semble pas comprendre l'idée ou ne serais-ce que de voir le problème que cela posait, n'aidait pas vraiment. Le ton défensif qu'employait Ashford avait en plus de ça, le don d'énerver Theo qui secoua la tête une nouvelle fois, toujours en se tenant de lui à une distance raisonnable.
« Donc maintenant, c'est de ma faute ? C'est toi qui ne comprend pas. Je n'ai jamais dis que tu étais une pute, ou peu importe, j'ai juste dis que je ne comprenais pas. Et tu ne sembles même pas comprendre comprendre que ça puisse être extrêmement frustrant pour moi de me rendre compte qu'au final si tu refuses ne serais-ce que du dirty talk avec moi, c'est parce que depuis le début tu te charges de faire ça avec d'autres ? Des inconnus, en plus de ça ?! Ash ! Qu'est-ce que tu pensais que j'allais dire ? A quoi tu t'attendais ? Tu pensais vraiment que je serais heureux d'entendre ça ? Et que je dirais rien, parce que je suis si naïf que ça à tes yeux ? »
Le surnom qu'il avait employé lui brûlait la langue. Il avait trop d'affection pour lui, il l'aimait déjà trop. Theo se sentait à nouveau blessé par les paroles qu'avait prononcé Ash ; il se sentait visé par cette phrase, "les gens semblent penser (...) que ce la fait de moi un genre de pute". Theo n'était pas ce genre de personne, et Ashford le savait probablement plus que n'importe qui (ah et parce qu'en plus, il y avait apparemment d'autres personnes au courant avant lui, bien. Tout allait pour le mieux aujourd'hui dans la vie de Theo, vraiment, tout était parfait, merci de vous en soucier). Ashford ressemblait à un enfant pris sur le fait après une grosse grosse bêtise, et qui n'assumait pas celle-ci. Comme un enfant, il réagissait comme piqué à vif, clamant haut et fort que ce n'était pas lui le problème, de toute façon. Sauf que ni l'un ni l'autre n'avait l'âge pour ce genre d'enfantillage, malgré la différence d'âge entre eux qui se résumait à trois petites années.
« Et c'est vraiment injuste de ta part de faire comme si j'étais coupable de cette situation de merde dans laquelle tu nous mets, parce que au final c'est toi qui me ment depuis le début, Ashford, alors arrête de te poser en victime cinq minutes, tu veux. »
Au moins c'était clair. Les mots étaient plus violents et le ton plus sec que ce dont Ashford avait l'habitude avec Theo mais la patience de ce dernier arrivait clairement à sa limite. Il trouvait la réaction de Ashford complètement immature (c'était peut-être de son âge, en fait) mais surtout inadaptée à la situation. C'était quand même culotté de sa part, d'insinuer que c'était la faute de Theo, s'il n'était pas aussi ouvert d'esprit que ce qu'il fallait. Il ne semblait même pas comprendre ce qui lui posait problème, au-delà du genre du job, c'était le mensonge qui ne passait pas. Même si cette histoire de sexe... bon sang. Cette histoire lui restait en travers de la gorge, et avec un certain arrière-goût de culpabilité pour couronner le tout. « Et dire que je pensais ne pas être honnête avec toi, parce que je ne te disais pas que je... que je t'appelai. Toi. J'arrive pas à y croire. »
« Et si la première fois que je t'avais appelé, ça avait été pour du sexe ? Pour coucher ? Et si j'avais continué, depuis ? Là aussi tu ne m'aurais rien dis ? Je suis désolé Ashford, mais ce que tu fais, c'est vendre du sexe au téléphone, peu importe ce que tu penses. Sauf quand il s'agit de moi, bien entendu, parce que je suis assez con pour appeler ce genre de ligne et me contenter d'une simple conversation anodine. »
Le cœur de Theo se serra lorsque Ash évoqua leur relation, leur relation à eux. Oui, c'était génial. Et Theo voulait que cela reste comme ça. Ça faisait quelque chose au petit cœur du brun, quand même, d'entendre son blondinet parler d'eux dans ses termes, parce qu'ils n'en parlaient pas vraiment entre eux. L'entendre poser des mots sur ce qu'ils partageaient lui brisait un peu plus le cœur. Il comprit tout à coup pourquoi Ashford s'était montré si distant pendant les premières semaines, au moment de leur rencontre, au Ministry, puis à l'université. Mais ce n'était pas une raison pour se servir de leur lien comme d'une excuse à son mensonge. Lui aussi était découragé, soudainement. Fatigué. En voulant protéger ce qu'ils avaient, Ashford avait en réalité fait tout le contraire et c'était... triste. D'une telle tristesse.
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(✰) message posté Ven 2 Oct 2015 - 21:01 par Invité
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THEO & ASHFORD
La situation lui échappe – enfin, elle lui échapperait s’il avait eu le contrôle à un moment donné, mais ni l’un ni l’autre ne semble avoir jamais eu la maîtrise de la conversation, et les choses empirent encore, chargeant l’atmosphère de reproches qu’Ashford trouve plus facile à assumer que des regrets, des remords, de la culpabilité. Il a repris son téléphone et le fait tourner frénétiquement entre ses mains, la vibration occasionnelle d’un appel comme un tremblement de terre autour duquel semble s’effondrer tout ce qu’il a entrepris de bâtir avec Theo.
Mais les faits sont là, accablants, et Theo les lui jette à la figure les uns après les autres, inébranlables, indéniables, indiscutables, et il s’en veut, il s’en veut terriblement de ne jamais avoir abordé le sujet de force, d’avoir laissé leur situation se dégrader à ce point, d’avoir repoussé l’échéance jusqu’à ce qu’elle soit inévitable. Un gâchis, un tel gâchis, et tout est de sa faute.
Il essaie d’en vouloir à Theo, de se convaincre qu’il est dans son bon droit, que Theo réagit de façon exagérée à un élément qui n’est somme toute qu’une interférence mineure. Mais Ashford n’a jamais été capable de percevoir son activité avec le recul nécessaire pour comprendre qu’un observateur extérieur pourrait penser – notamment parce qu’il sait que le jugement ne serait pas flatteur. Pour Ashford, ce n’est guère plus qu’un job, un fond sonore un peu agaçant mais dont on apprend à faire abstraction, un peu comme il ne remarque plus le bruit que fait son frigo la nuit ou le vrombissement de son chauffage électrique lorsqu’il se met en marche ; mais pour d’autres, la réalité de son job est insurmontable, et il a beau le savoir, il ne comprend pas.
- Je n’ai jamais dit que je ne voulais pas coucher avec toi !
Ses joues sont brûlantes – ce n’est pas exactement la vérité, car il y a plusieurs mois, c’est lui qui a expliqué à Theo qu’il n’était pas prêt à aller plus loin, qu’il avait besoin de temps, qu’il n’avait jamais… Ne serait-ce que se remémorer cette embarrassante conversation est une torture, et plus encore le fait d’avouer à quel point la pensée, finalement, l’a obsédé au cours des dernières semaines pendant une conversation aussi animée, violente, inappropriée à une telle déclaration.
- Et ce n’est pas… je t’ai dit, ce n’est pas vraiment du sexe, ce que je fais au téléphone ! C’est plutôt… je ne sais pas, nom de Dieu, tu m’appelles, pas vrai, tu sais comment ça fonctionne ! Ce n’est pas comme si je te… comme si je te trompais, ou quelque chose du genre. Et je ne te préfère certainement pas un tas d’inconnus !
Il se tord les mains, le ton implorant, suppliant presque Theo de comprendre son point de vue. Les réponses amères qu’il a sur le bout de la langue, il les retient, essaie de calmer le jeu.
A la vérité, si Theo avait appelé pour obtenir une prestation téléphonique standard, Ashford aurait pris la fuite en le reconnaissant ce soir-là au Ministry of Sound. Mais c’est justement sa candeur qui a retenu son attention, les conversations idiotes sur la recette idéale des spaghettis qui l’ont séduit, l’ont convaincu de donner une chance à Theo. C’est sa conversation inhabituelle, rafraîchissante, qu’Ashford a gardée en mémoire, alors que son cerveau ne se donne même pas la peine de sauvegarder ce qu’il a répondu machinalement à un autre client. C’est ce qui fait que Theo est unique à ses yeux – et à ses oreilles, et que le travail d’Ashford a, de son point de vue, si peu à faire avec le sexe.
Il a envie de le dire à Theo, de lui faire comprendre sa perspective, de lui partager sa vision des choses, de lui montrer à quel point il n’a rien d’un idiot, à quel point Ashford, depuis le début, l’a trouvé exceptionnel au point d’accepter la folie qu’était son invitation à prendre un verre. Le dire maintenant, cependant, donnerait l’impression qu’il essaie de le manipuler sentimentalement, et il se mordille le pouce plutôt que de se lancer.