« Maman, il est où mon papa ? » Une question que Mary redoutait tant. Âgée de cinq ans, la petite voyait bien ses amis à l'école avoir un papa et une maman. Elle n'avait jamais vu le sien et sa curiosité enfantine prenait le pas. Mary était mère célibataire et élevait donc seule sa seule et unique fille. La jeune maman sourit à son enfant et lui répondit
« Ton papa ne peut pas être là pour toi, mais je suis sure qu'il pense à toi très fort. » Comment expliquer à sa fille que son père était marié mais avec sa mère ? Qu'il avait sûrement fondé une famille sans jamais savoir qu'il avait eu une fille... Et aux yeux de Mary, aux yeux d'une maman aimante, sa fille n'avait pas besoin de savoir qu'elle était née d'un adultère. Comment pourrait elle vivre et grandir sereine à cette pensée ? Mieux valait donc pour elle, croire que son père reviendrait un jour. Le temps qu'elle comprenne.
Vivre au cœur de Londres en étant mère célibataire n'était pas ce qui avait de plus facile. Mary travaillait comme secrétaire dans une grande entreprise, elle ne gagnait pas des milles et des cents mais elle faisait tout pour que Margaret ne manque de rien. Bien qu'évidemment, elle ne pouvait pas lui offrir la lune ou l'inscrire dans les grandes écoles du Royaume. Mais calme et consciente de la situation dans laquelle elles vivaient, Margaret n'osa jamais demandé des biens matériels chers à sa mère. Voyant qu'elle était toujours plus fatiguée que les autres mamans, elle comprenait qu'elle travaillait dur pour satisfaire les besoins de sa fille. Pour cela, la jeune anglaise préférait de loin un abandonnement à la bibliothèque que les derniers jeux à la mode. Toutefois lorsqu'elle avait six ans pour son anniversaire, Margaret osa demanda un cadeau particulier et qui savait que cela coûterait plus cher à sa mère. Elle rêvait de jouer du violon. Elle regardait très souvent la télévision et elle était tombée sur un opéra lors d'un solo de violon. Elle était subjuguée par cet instrument, par la mélodie mais il lui fallait plusieurs semaines pour qu'elle prenne son courage à deux mains pour demander ce cadeau à sa mère. Mary fut heureuse de voir que quelque chose intéressait Margaret. C'était une petite fille très sociale à l'école, curieuse qui avait soif d'apprendre mais qui n'osait jamais grand chose. Beaucoup trop coincée dans un cadre dont elle avait peur de sortir. La musique lui ouvrirait l'esprit, elle sortirait de l'école et de chez elle pour rencontrer de nouvelles personnes.
La musique fut une véritable passion pour Margaret. Un exutoire indispensable au fil des années. Le solfège n'était pas ce qu'il y avait de plus amusant mais les cours de violon était un véritable plaisir. Du moins pour Margaret et tout de suite beaucoup moins pour Mary. Si vous n'avez jamais entendu quelqu'un jouait mal du violon, demandez à Mary ou aux voisins des Wagner. C'est à s'en taper la tête contre les murs ou à lui casser l'archer en deux, tellement le son strident est insupportable. Et Margaret ne comptait pas arrêter avant qu'elle ne réussisse à jouer correctement. ll fallut quelques années pour que Margaret joue sans aucun problème, ne faisant plus aucune fausse note et s'amusant à jouer les partitions des plus grands comme Vivaldi, son compositeur favoris. Mary n'en pouvait plus d'entendre l'Eté en boucle pendant des heures. Mais malheureusement pour la jeune fille, la musique et le violon n'étaient pas les seules choses qu'elle devait faire. Ses études, et surtout sa réussite scolaire, lui tenait beaucoup à coeur, sachant très bien que si elle voulait réussir dans la vie, ce n'était que par ses propres moyens, elle n'avait aucune solution de secours possible. Surtout que l'idée de voir son père… Margaret avait fait une croix dessus. Le mensonge de sa mère quand elle était enfant ne prenait plus. Elle savait très bien ce qu'il s'était passé. Ils avaient couché une fois ensemble et c'était tout. Elle était née et fin de l'histoire. Par respect pour cet homme qui n'avait sûrement rien demandé et qui ignorait son existence, elle préféra ne jamais entamer des recherches. Même si elle en avait une forte envie à une époque, elle avait déjà une mère qui faisait tout pour elle, cela la suffisait amplement.
Elle obtient son A-Level sans aucun soucis et quand il fallut savoir ce qu'elle voulait faire ensuite, c'était autre chose. Margaret n'avait toujours eu qu'une seule passion, la musique. Elle rêva alors d'entrer au Royal College of Music mais avec sa vie modeste, pouvait elle vraiment espérer entrer dans cette école ? Sa mère l'incita à remplir un dossier d'inscription, elle n'avait qu'à se soucier de réussir à entrer. Elle passa alors l'examen, jouant du violon devant un jury. Et quand elle reçut la lettre où elle fut admise, elle sauta de joie dans les bras de sa mère. Elle avait obtenu une bourse et n'aurait aucun soucis pour pouvoir faire ses études. Les trois années qu'elle passa au Royal College of Music furent les meilleures de sa vie. Elle perfectionna plus que jamais sa technique au violon, apprit l'histoire de la musique en long en large et en travers et surtout, elle eut le loisir de pouvoir choisir et apprendre d'autres instruments. Margaret se contenta de rester dans les cordes, s'essayant à la guitare, préférant tout de même fortement le piano. Elle testa également la flute traversière. Mais à ses yeux, rien ne valait le violon. Le travail pour rester à cette école était conséquent mais Margaret n'avait jamais été aussi heureuse. C'est alors que se profila ce qu'elle voulait faire. Elle souhaitait entrer au English National Opera pour y devenir violoniste soliste. Elle mit toutes les chances de son côté pour essayer d'avoir une place mais c'est le genre de chose où il y a beaucoup d'appelés et peu d'élus. Margaret ne rêvait pas et elle n'eut pas la place qu'ils proposaient.
Mais elle n'allait pas rester sans rien faire et à attendre que ça se passe. A son école, ils proposaient aux élèves pour s'inscrire dans des actions humanitaires. Margaret réfléchit un instant, elle supportait déjà énormément la cause animale en ne mangeant pas de viande, elle pourrait bien donner de son temps pour les humains. Elle alla alors se renseigner pour apporter son aide au Kenya. Elle s'envola alors avec une simple valise et son violon. Les au revoir avec sa mère furent déchirant mais elle avait vraiment envie de le faire. Elle s'envola donc pour une année entière en Afrique. Elle aida principalement à la construction d'une école et une fois achevée, les compétences de Margaret en musique fit qu'on lui demanda d'apprendre les base de la musique aux enfants. Ils avaient amené plusieurs flutes à bec et la jeune anglaise prit énormément de plaisir à leur apprendre les bases de la musique. Ils étaient tous tellement attentifs, prêts à boire le moindre mot qui sortait de sa bouche. C'est une sensation que Margaret n'oubliera jamais. Et en rentrant en Angleterre, sa vision des choses changea totalement. Pas la vision basique du « Nan mais attend ! Nous on a tout et on se plaint alors que, ils n'ont rien. On est que des matérialistes pourris. » Non ça allait beaucoup plus loin que ça. C'est sa perspective de carrière qui changea. Elle s'était découvert un plaisir d'enseigner sa passion aux autres. De transmettre quelque chose. En rentrant à Londres, elle n'essaya pas de rentrer dans une compagnie mais elle postula pour devenir professeur de musique dans un lycée. Depuis elle a un poste où elle s'épanouie pleinement.
Mais Margaret est encore jeune, elle ne compte pas se contenter d'une route boulot, dodo. La jeune britannique profitait pour sortir, notamment dans un bar musical où de nombreux groupes ou musiciens montaient sur la petite scène. Margaret passait de nombreuses soirées au bar à discuter avec le gérant. Entre passionnés de musique, ils pouvaient passer des heures à discuter des personnes qui jouaient, etc. Elle lui dit un jour qu'elle jouait du violon depuis qu'elle était toute petite et il lui dit alors qu'elle devrait faire une représentation un soir. Elle n'accepta pas tout de suite, elle venait surtout pour boire un coup et pas pour jouer devant tout le monde mais cependant il finit par la convaincre et un soir, elle se retrouva devant tous les clients avec son violon. Elle prit énormément de plaisir à faire ce petit show, ne pensant pas que le violon intéresserait beaucoup de monde. Et pourtant… A la fin de cette soirée, elle rencontre un petit groupe qui avait adoré et qui lui proposait de les rejoindre. Margaret n'hésita pas un instant et accepta de se joindre à eux. C'était plutôt sympa de pouvoir jouer en groupe plutôt que seule chez elle. Même si pour elle c'était plus un passe temps qu'autre chose. Elle ne rêve pas de gloire et pourtant qui sait...