Recevoir un message de la part de Remy avait été pour le moins inattendu. Et encore, le mot n’était pas assez fort, cela relevait d’un euphémisme. Pas qu’ils ne s’envoyaient jamais de textos (c’était cependant rare) mais c’était surtout le contenu qui avait surpris Clark. Un message bref, clair, concis et empli d’un mystère sans précédent : Urgent, retrouve-moi devant l’Hôtel Hilton à vingt-et-une heures. Première réaction, urgent ? Really ? Le jeune homme n’avait jamais été du genre à refuser de porter un coup de main à une personne, mais de là à ce que Remy fasse appel à lui, c’était étonnant. En quoi pouvait-il lui être utile, mis à part pour apprendre à nager – quoiqu’on pourrait presque lui reprocher d’inciter ses potentiels élèves aux stéroïdes – ou bien pour porter des sacs de ciment lourds ? Deuxième réaction, l’hôtel Hilton ? Par tous les saints, cet endroit était l’un des plus chics restaurants de Londres, et accessoirement, l’un des plus chers. Clark avait eu l’occasion d’y dîner une ou deux fois pour se faire plaisir avec l’équipe de natation, et jamais il n’oublierait la note de la facture salée qu’il avait du payer. Tout ça pour manger une quantité ridicule d’hors d’œuvres qui ne suffit pas à être calé, et pour être servi par des serveurs à l’accent posh. A la limite, acheter un fish and chips à sept livres lui suffisait amplement. Ou peut être qu’il avait fini par avoir cette mentalité depuis qu’il avait remarqué que ses économies baissaient considérablement en quelques semaines. Clark n’était pas encore en situation précaire, mais il s’attendait au pire. C’était honteux, comme situation. Il refusait de le dire à sa famille et ses amis parce qu’il ne souhaitait pas qu’on l’aide ou pire, qu’on le prenne en pitié, mais au fond, tout le monde savait que dans quelques temps, le jeune homme risquait de traverser la ligne rouge. L’espace d’un instant, il hésita, se demandant s’il devait rejoindre Remy ou pas. D’un côté, sa raison lui disait non, parce que merde, c’était Remy. Clark avait beau être fichtrement naïf et aventureux, il était suffisamment lucide pour s’apercevoir que parfois, tous deux allaient trop loin. Mais en dépit de son esprit, son cœur lui disait de se rendre au point de rendez-vous, rien que pour assouvir sa curiosité qui se retrouvait maintenant titillée. Qu’est-ce qu’elle lui voulait donc ? Finalement, après une poignée de secondes d’hésitation (parce que ouais, clairement, il était maintenant trop curieux), l’ancien nageur sortit de son appartement et se pointa en quelques minutes devant l’hôtel restaurant, se tenant à une distance confortable de la frénésie du lieu. Des couples qui sortaient de voitures conduites par des chauffeurs privés, des hommes bien habillés accompagnés de leurs femmes perchées sur de hauts talons. Clark exagérait, mais il avait presque l’impression que l’établissement couvait la même atmosphère que celle du bal organisé par Buckingham Palace lors du nouvel an dernier. A l’exception que ces gens y étaient des habitués. A présent, il avait presque la nausée à la vue de toutes ces personnes dont l’argent gonflait à bloc leur égo, et d’une façon, ça le confortait dans l’idée que malgré sa carrière sportive qui lui avait permis d’acquérir une certaine notoriété, il n’avait jamais appartenu à ce monde. Il était vingt-et-une heure passée, la nuit était déjà tombée sur la capitale londonienne. Plissant les yeux en distinguant vaguement la silhouette frêle d’une jeune femme qui se dirigeait à pas décidés vers lui, Clark fourra machinalement ses mains dans ses poches en reconnaissant Remy. « J’ai hésité à te poser un lapin, mais je crois bien que je suis trop gentleman pour ça. Cela dit, j’espère que ‘l’urgence’ en vaut la chandelle. » Mmh, son petit doigt lui disait que finalement, la blonde n’avait pas l’apparence de quelqu’un en situation de détresse. Quoiqu’il en soit, c’était trop tard, il s’était déplacé, la perspective de devoir immédiatement rentrer chez lui ne l’enchantait guère. « Est-ce que tu comptes me séquestrer toute la soirée ? Que j’annule mes plans parce qu'évidemment, tu as toujours le chic pour m’appeler à la dernière minute. » ajouta-t-il en se saisissant son cellulaire, mi-sérieux, mi-taquin. En réalité, il devait surtout prévenir Hazel qu’il ne passerait pas la voir puisque ce matin, ils avaient vaguement évoqué l’idée de passer la soirée ensemble. Inutile de le lui rappeler, Clark était le pire des petits amis. Il en était conscient.
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(✰) message posté Ven 10 Avr 2015 - 16:28 par Invité
Elle admire la vue, un brin émerveillée par les lumières de la ville et l'agitation sous ses pieds. C'est le moment que Remy préfère. L'ambiance de la nuit, les virées tard le soir. Ça lui donne un sentiment de liberté qu'elle ne retrouve ni dans son travail, ni en plein jour. Et ce soir, elle n'a aucune envie que ça s'arrête, ni même de rentrer à son appartement. Alors, elle reste assise, ici, sur le toit de l'immeuble qui fait face au royal Hôtel Hilton. Perchée à plus de quinze mètres au-dessus du sol, elle contemple la jolie vue que peuvent s'offrir les londoniens ayant un salaire qui contient un chiffre et quelques zéros derrière. Bien sûr, ça ne vaut pas le charme de Hammersmith. Remy n'en démord pas, son quartier, c'est le meilleur. Plus tôt dans la soirée, elle avait envoyé l'adresse de l'hôtel, ainsi qu'une heure de rendez-vous à Clark, pour qu'il la rejoigne ici. Elle ne s'est pas inquiétée de ne pas recevoir de réponse. L'habitude, sûrement. Leurs échanges sont toujours brefs. Pendant un moment, elle a même hésité à convier Milan à se joindre à eux pour la soirée. Puis elle s'est ravisée, tout simplement. Elle balance sa cascade de cheveux blonds dans son dos avant de refermer la fermeture de ses bottines. Sa main se saisit de sa veste en cuir qui repose sur le bord et elle s'en va rejoindre le bas de l'immeuble. Vingt-et-une heure. Clark arrivera bientôt. Elle s'autorise à flâner dans la rue, prenant tout son temps pour rejoindre le point de rendez-vous. Et lorsqu'elle y arrive, Clark est déjà là, les mains dans les poches, affichant toujours sa tête de paumé. Il a cet air de naïf qui lui colle à la peau et qui le rend terriblement craquant. Remy ne peut s'empêcher de sourire tandis qu'elle s'approche pour venir à sa rencontre. Il n'y a rien de bien entre eux, mais l'australienne s'en fout, terriblement soulagée de le retrouver. Et de pouvoir passer sa soirée avec lui. « J’ai hésité à te poser un lapin, mais je crois bien que je suis trop gentleman pour ça. Cela dit, j’espère que ‘l’urgence’ en vaut la chandelle. » Elle le détaille, lui et son allure nonchalante. Mais ils savent tous les deux qu'il restera. Par envie et non par contrainte comme il veut le laisser penser. « Remy s'ennuie. C'est une situation d'urgence. » Son air mi-boudeur, mi-amusé collé sur le visage, elle se rapproche de Clark. Être inactive a le don de la rendre complètement folle. « Est-ce que tu comptes me séquestrer toute la soirée ? Que j’annule mes plans parce qu'évidemment, tu as toujours le chic pour m’appeler à la dernière minute. » Même pas un brin désolée. Concrètement, dans l'univers de Remy Baldwin, Clark ne peut pas avoir de plan. Ou accessoirement, autant qu'une huître sur son rocher. « Des plans ? Quels plans ? » Ça l'intéresse de savoir ce qu'il peut faire lorsqu'ils ne sont pas ensemble. Rien d'intéressant probablement. Il doit sans doute attendre que Remy vienne le distraire. « Ils rediffusent Downton Abbey le lundi soir. Si tu t'inquiètes de louper ton épisode. » Elle lui laisse une minute pour partir mais il n'a pas l'air franchement motivé à retourner à ses occupations. C'est que du pipeau tout ça, elle le sait. Il est comme tous les autres finalement. A prétendre ne pas vouloir d'elle mais à rester quand même. Clark revient toujours et il reste à chaque fois. Il reste, vraiment, le temps d'une nuit, de quelques heures et il suit Remy, dans toutes ses folies. Elle prend place face à Clark. Le jeu peut reprendre là où il s'est arrêté la dernière fois qu'ils se sont vus. Elle le fixe, de ses grands yeux bleus, un sourire presque doux sur les lèvres. Sourire qu'on ne lui connait pas. « Tu vois le couple derrière moi ? » Elle devine facilement le voiturier qui s'avance pour ouvrir la portière de la femme, et le conducteur qui viendra lui remettre ses clés. C'est le même manège chaque soir. Elle attend qu'il approuve. Mais qu'il ne s'imagine pas qu'ils vont jouer au faux couple ce soir et dîner dans cet endroit trop luxueux. Elle lui demande alors, si il a vu l'homme remettre les clés au voiturier. Ce n'est qu'un détail, certes, mais il faut qu'il comprenne ce qu'elle va l'envoyer faire. L'australienne attend qu'il approuve une nouvelle fois et ne peut s'empêcher d'enregistrer les expressions qui traversent le visage de Clark. « Un autre couple va bientôt arriver. Je veux que tu prennes leur voiture. » Elle veut, elle veut... Et elle ne lui laisse pas vraiment le choix. Après tout, ce n'est pas si compliqué que de se glisser avec les autres voituriers et de choper une clé. « Fais pas cette tête, on en a besoin pour se déplacer ce soir. » Et de toute évidence, Clark n'a pas pris la sienne, de voiture. Avec malice, elle laisse ses doigts remettre correctement le col de sa veste. Et sa main glisse sur son torse avant qu'elle ne fasse un pas en arrière.
Clark fronça les sourcils à la réponse de la blondinette. Lors de leur première rencontre, c’était ça qui l’avait le plus frappé chez elle : son culot, et son égocentrisme. Remy avait un truc, elle dégageait quelque chose qu’il peinait à cerner complètement, mais qu’il enviait depuis toujours. Elle semblait libre. « Est-ce que tu veux dire par là que je suis ton bouche-trou ? » s’enquit-il d’un ton faussement dépité. Oser évoquer son ennui comme un cas d’extrême urgence, c’était juste du Remy Baldwin. Immédiatement, il comprit qu’il s’était (encore une fois) fait roulé dans la farine. Elle n’avait aucun problème. Elle cherchait juste une distraction. En soi, cela ne dérangeait pas vraiment Clark, ce n’était pas non plus comme s’il était un homme terriblement occupé, mais sur le principe, il était un peu plus gêné. A force, elle allait finir par croire qu’il était à sa disposition et Clark avait beau être courtois, il ne voulait pas non plus qu’elle finisse par penser qu’il pouvait être son esclave personnel. « Raté, ils rediffusent Downton Abbey le mercredi soir. » En réalité, il n’en savait strictement rien puisqu’il n’avait jamais suivi cette série, mais c’était seulement pour contredire Remy. Il avait sûrement deux chances sur deux de se faire prendre à son propre piège, mais il espérait secrètement qu’elle ne soit pas une accro de la télévision pour se rendre compte qu’il mentait. « J’avais des plans… Des plans dont tu n’as même pas idée. Et crois-moi, t’as pas envie de le savoir. » répondit-il malicieusement, ses traits se fronçant en une mine à mi-chemin entre la candeur et l’espièglerie. Oh ça oui, c’était sûr que la blonde n’aurait pas voulu savoir qu’il avait en réalité une copine et qu’il avait au départ prévu de passer la soirée avec elle… D’un rapide coup de tête, il chassa l’image d’Hazel de son esprit, puis posa son regard sur Remy. Remy et son sourire étrange. « Quoi, qu’est-ce-que t’as ? Arrête de me regarder comme ça, tu me fais flipper. » Et pourtant, il savait qu’elle avait déjà une idée en tête pour occuper leur soirée. Il ne savait pas s’il devait soupirer, arborer le même sourire qu’elle, ou bien commencer à paniquer. Parce qu’avec la blonde, si c’était drôle au début, il y avait toujours quelque chose derrière qui venait dépasser la limite du raisonnable. Clark n’avait jamais été un enfant de chœur, c’était un fait. On le disait naïf, influençable, et c’était souvent à cause de cela qu’il avait fini par commettre bon nombre d’erreurs. Mais avec Remy, les erreurs semblaient se transformer en défis, en jeu pervers dont il était prisonnier bien malgré lui. Il ne s’en rendait pas encore réellement compte. Pourtant, il savait qu’un jour ou l’autre, lui et Remy finiraient par définitivement aller trop loin. Il hocha la tête la tête lorsqu’elle lui parla du couple, de la voiture et tout le tralala, plissant néanmoins ses lèvres avec incrédulité. Où voulait-elle en venir ? La réponse ne mit pas longtemps à arriver. Il écarquilla les yeux, réalisant alors ce qu’elle lui demandait de faire. C’était ça, leur méfait de la soirée ? Voler une voiture ? « Mais t’es tombée sur la tête ou quoi ?! T’as qu’à la prendre toi-même si tu la veux tant que ça, cette bagnole. » A cette instant, tout ce à quoi Clark pensait fut sa tête derrière les barreaux, implorant les policiers d’être cléments avec lui, comme s’il était dans le couloir de la mort. Il avait beau vouloir profiter au maximum de sa vie, voler une voiture ne faisait pas partie de sa liste de choses à faire avant de mourir. En plus, il avait déjà une caisse ; certes, elle n’était pas aussi luxueuse que les Porsches luisantes garées devant ce restaurant, mais il en était cependant très satisfait. « T’aurais dû me dire de prendre ma voiture, au lieu de me faire tout ce cinéma. » bourgeonna-t-il, les yeux toujours rivés vers les voituriers. Il ne bougea pas lorsqu’elle posa sa main sur son torse, même pas étonné qu’elle soit tactile. Il l’avait remarqué dès le début, et elle restait fidèle à elle-même. En fait, il était toujours un peu dans la lune, réfléchissant une nouvelle fois à la proposition de Remy. D’un côté, c’était tentant parce qu’il rêvait de conduire une voiture pareille, juste une fois dans sa vie. De l’autre côté, c’était dangereux, mal, bref, il y avait de quoi aller directement se confesser juste après. « Mmh, tu penses qu’on est considérés comme des braqueurs si on se fait attraper ? » Il n’avait pas encore dit oui, ni non. C’était juste une simple question, mais tout laissait maintenant à penser que Clark allait accepter. Fichue Remy. « Ok, je pense que c’est le bon moment, là. Sors ton décolleté au cas où, moi je fais le ninja pour prendre la clé. » Ce plan s’annonçait foireux, foireux, foireux.