(✰) message posté Mar 31 Mar 2015 - 19:17 par Jake O. Cavendish
No, they didn’t date. Technically, she wasn’t an ex-girlfriend. But she was an ex-something, an ex-maybe. An ex-almost. ✻✻✻ Un énième signe au barman, trop occupé ce soir, Jake commence à s’impatienter. Nerveux aussi, ça n’aide pas. Ce soir, il a laissé le travail à la maison, il a tout laissé derrière lui. Il y a longtemps qu’il n’est pas venu dans ce bar situé juste à côté d’Oxford. Depuis la fin de ses études en fait. Mais rien n’a changé depuis. Peut-être un peu la déco, les photos affichées ont été remplacées par des plus récentes mais la même ambiance se dégage. C’est étrange de se retrouver ici à nouveau. Il finit par réussir à passer commande auprès du barman. Deux bières, aussi simplement. Le pire, c’est que leur bière n’est pas géniale mais il compte respecter la tradition jusqu’au bout, ce soir. La tradition qu’ils avaient avec Chase à l’époque où ils étudiaient encore le journalisme ensemble. Tous les mardis soir, le bar organisait une soirée karaoké qui, contre toute attente, cartonnait. Encore une chose qui n’a pas changé. L’endroit est bondé ce soir. Chase et Jake venaient ici, buvaient des chopes de bières jusqu’à plus soif, parlaient de leurs vies et se défiaient mutuellement de monter sur la petite scène improvisée dans le coin. Aucun d’eux n’aimait chanter – ou était doué pour ça d’ailleurs – mais ça ne les empêchait pas de revenir à chaque fois, presque sans exception. Et ces soirées font partie des meilleurs souvenirs qu’a Jake de l’université. Aujourd’hui, ils sont bien loin des étudiants insouciants qu’ils étaient à l’époque. Ils ont grandi, tous les deux. Il voulait devenir journaliste papier, il est reporter pour la télévision. Elle voulait être photographe de terrain, elle travaille dans l’édition. Aucun n’est ce qu’il pensait devenir à l’époque de l’université. Leurs rêves ont changés, se sont adaptés aux situations qu’ils ont traversées. Mais ce qui a le plus changé, c’est le lien qui les unit. Tout a changé, sans qu’ils parviennent à le contrôler, à empêcher les dégâts. Ils ont essayé pourtant. De gérer la tempête, de protéger ce qu’il restait à sauver. Mais la tornade est venue et n’a pas laissé grand-chose. Et aujourd’hui, ils n’ont plus rien à voir avec ce qu’ils étaient à l’université. Avec ce qu’ils étaient quand ils étaient gosses. C’est en souvenir de tout ce qu’ils ont vécu ensemble qu’ils ne veulent pas abandonner. Laisser tomber, ça serait stupide, ça serait foutre en l’air leur amitié qui dure depuis aussi longtemps qu’ils se souviennent. Jake veut retrouver cette petite fille qui vivait en face de chez lui. Jake veut retrouver la jeune femme avec qui il faisait la fête sans même se poser de questions. Jake veut retrouver Chase. Sa Chase. C’est la raison pour laquelle ils doivent se retrouver ici ce soir. Il est arrivé en avance, nerveux contrairement à son habitude. Mais il n’est pas rare que Chase fasse ressortir des côtés de lui qu’il ne connaissait pas. Il a pu le constater à de nombreuses reprises. Une jalousie incontrôlable quand il la voyait avec un autre. Une incompréhension totale quand elle changeait d’avis sans prévenir. Et plus récemment, une nervosité étrange et surtout une culpabilité qui ne cesse de le ronger. Elle finit par entrer dans le bar. Il reconnaîtrait cette chevelure blonde, digne d’une lionne, n’importe où. Il lui fait un signe pour qu’elle le voit et le rejoigne. « Hello Chase ! » Il s’approche d’elle et l’enlace, un peu maladroitement, avant de déposer un baiser sur sa joue. Cette gêne entre eux, c’est aussi nouveau et il déteste ça. Il voudrait la serrer dans ses bras sans que son geste paraisse bizarre. Il se détache d’elle pour lui tendre une chope de bière. Il rêverait que les choses s’arrangent d’elles-mêmes. Il rêverait qu’ils redeviennent comme avant. Quand il n’y avait aucun silence entre eux et qu’ils pouvaient passer des heures l’un avec l’autre, simplement à parler et à rire. « On se cherche une table ? » Il est presque obligé de crier tellement le bar est bruyant. Le karaoké a déjà commencé et un étudiant est en train de massacrer ce qui ressemble à du Beyonce. Ou bien une autre chanteuse du genre, ce n’est pas vraiment le genre musical dont raffole Jake. Sa main posée dans le dos de Chase, ils se frayent un chemin parmi les fêtards. Ils sont sans doute les plus âgés dans le bar. Ça fait bizarre, ça aussi. Finalement, ils trouvent une table ronde dans un coin, qui vient miraculeusement d’être libérée par ses précédents occupants, et s’y installent. Il prend une gorgée de sa bière avant de saisir le livret contenant les chansons proposées. Peu de changements. Quelques ajouts de succès récents mais sinon les chansons sont presque toutes les mêmes qu’à leur époque. « Alors ? La grande Chase Sullivan va-t-elle nous faire l’honneur de chanter sa chanson culte ? » Pourquoi est-ce que chanter ensemble, comme avant, arrangerait les choses ? Jake ne peut s’empêcher d’y croire. Parce que lorsqu'ils se retrouvaient tous les deux sur cette scène, ils avaient une alchimie incroyable. Peu importe qu’ils ne chantaient pas forcément bien, peu importe ce qu'ils chantaient, ils s’éclataient et y repenser suffit à faire sourire Jake. Ils se doivent d’essayer. Pour sauver ce qu’ils partageaient, ce qu’ils n’auraient jamais dû cesser de partager. Le bar n’a pas changé, ce sont eux qui sont différents. Jake espère que cet endroit saura opérer de sa magie pour reconstruire un passé disparu. Un passé qui lui manque chaque jour.
(✰) message posté Jeu 2 Avr 2015 - 0:33 par Invité
. DO YOU SEE WHAT WE’VE DONE ? WE’VE GONE AND MADE SUCH FOOLS OF OURSELVES. HOW DID WE GET HERE WHEN I USED TO KNOW YOU SO WELL ? . Elle hésitait, changea trois fois de robes. C'était ridicule de se mettre dans un état pareil pour si peu. Une bête soirée, une parmi une panoplie impressionnante. Ce n'était pas comme si c'était un rendez-vous ou une soirée spéciale. C'était une tradition perdue, une habitude qu'ils avaient perdu en route. Rien de plus logique. Ils avaient grandi, ils avaient vécu, et certaines choses avaient changé. Beaucoup, en fait. Mais elle ne préférait pas y penser. Elle ne voulait pas se faire une liste de toutes les choses qui lui manquaient, de tous ces petits détails qui avaient rendu sa vie si belle autrefois. Jake était ce corps formé de tous ces petits détails ; rien n'avait jamais été simple entre eux, et c'était ce qui avait fait le charme de leur amitié. C'était ce qui lui avait plu. Tout était toujours un obstacle. Ca avait été ce fossé entre leurs deux fenêtres étant enfants, puis des amourettes cultivant leur jalousie, avant que l'obstacle ne devienne infranchissable le jour où elle avait posé un pieds en Afghanistan. Elle avait voulu le retrouver, elle pensait qu'ils pouvaient y parvenir, loin de la ville, loin de chez eux. Elle y avait cru, un instant, avant qu'il ne piétine ses vains espoirs. L'Afghanistan avait été leur cercueil, et en jetant la troisième robe sur son lit, elle se dit qu'elle se rendait à leurs propres funérailles. La blonde dégagea finalement un jean et un pull de son armoire encombrée et laissa ses cheveux tomber négligemment sur ses épaules. Un coup d'oeil à sa montre lui prouva qu'elle était encore dans les temps pour attraper son train. Elle en fut presque déçue. Elle voulait arranger les choses, elle voulait faire l'effort de retrouver ce qu'ils avaient, mais son coeur était plus difficile à convaincre. Il craignait que les choses n'empirent. Après tout, cela faisait tellement longtemps. Non sans un soupire, elle remonta la fermeture éclair de ses bottines à talons avant d'enfiler son manteau le plus chaud. Elle n'eut pas de peine à héler un taxi pour l'occasion, et eut tout le temps de se mordiller les lèvres durant le trajet. Elle serrait son billet de train entre ses doigts, trop fort, peut-être qu'il ne passerait pas dans la machine. Mais il passa, et elle se surprit elle-même à apprécier ce long trajet familier. Elle prenait ce même train autrefois pour se rendre à l'université. Elle pouvait encore voir les élèves plongés dans les devoirs qu'ils n'avaient pas eu le temps de terminer pendant le week-end, et ceux qui profitaient du trajet pour échanger de longs regards amoureux. Elle avait été tant de fois assise là, à regarder la vie passer sous ses yeux, sans vraiment prêter attention à la sienne. Un fin sourire naquit sur ses lèvres à la pensée de ces années qu'elle chérissait encore. La nuit était tombée et elle arrivait devant ce vieux bar qui tenait pourtant encore debout. Elle s'arrêta un instant, laissant passer des dizaines d'étudiants excités. Elle était étonnée du succès de ce taudis, mais il restait son taudis favoris. En passant la porte, le poids qui pesait déjà sur son coeur semblait s'alourdir un peu plus alors que ses yeux cherchait une silhouette familière. Une qu'elle reconnaitrait entre mille pour l'avoir détaillée des années durant. Jake apparut devant elle et elle du feindre son plus beau sourire pour ne pas trancher avec sa bonne humeur. Elle sembla soulagée un instant, soulagée de le voir, de voir qu'il était venu, que lui aussi voulait arranger les choses. À deux ils y parviendraient peut-être. « Hello Chase ! » Elle ouvrit la bouche avant de la refermer sous le coup de son étreinte. C'était maladroit, gênant, ce qui n'était pas normal. Elle voulait pouvoir lui rendre son étreinte sans que cela ne paraisse déplacé, sans que son corps ne veuille faire demi tour directement. Mais rien n'était plus pareil. « Jake… » Elle souffla son prénom tout en tentant de lui rendre une étreinte convaincante. Elle était mal à l’aise, et il ne tarderait pas à le voir. Il la connaissait mieux que personne, mieux qu’elle-même. Mais elle ne voulait pas faire semblant non plus ; il savait que beaucoup de choses avaient changé. « On se cherche une table ? » Il lui tendit une chope de bière et, face au bruit environnant, elle se contenta d’hocher la tête et de parcourir comme lui la salle des yeux. Le bar était bondé, et elle ne put que repenser à toutes les soirées qu’ils avaient passé ici, heureux d’être ensemble, tout simplement. Ils se rendaient à ces soirées karaoké, chantaient sans être doués, buvaient, discutaient. Cette époque lui manquait. Perdue dans ses pensées, elle ne vit pas la table se libérer mais laissa Jake l’entrainer jusqu’à celle-ci. Elle dépose son manteau sur le dossier de la chaise avant de prendre une gorgée de sa bière et de lire le livret qui contenait les chansons proposées ce soir. Elle fut contente de voir que la plupart des chansons qu’elle avait l’habitude de chanter étaient toujours là. Elle n’avait pas forcément envie de chanter, mais l’avait-elle déjà eu ? Autrefois, ils voulaient simplement s’amuser. Elle doutait qu’un retour dans le passé suffise à réparer ce qu’ils avaient cassé. « Alors ? La grande Chase Sullivan va-t-elle nous faire l’honneur de chanter sa chanson culte ? » Elle relève les yeux du livret et croise le regard de Jake. Il voulait vraiment retrouver ce qu’ils avaient. Elle espérait que ce soit possible. « Seulement si tu m’accompagnes. » Les mots se faisaient étonnamment francs, comme une réplique qu’elle avait l’habitude de sortir à chacune de leur soirée. C’était vrai, ils montaient ensemble sur scène avant. Mais elle n’était pas certaine qu’ils y parviendraient ce soir. Ils avaient tellement changés. Peut-être trop. Mais ça valait le coup d’essayer. Il valait le coup. Elle décida de changer de sujet pour l’instant, histoire de détendre l’atmosphère avant le spectacle. « J’ai l’impression d’être une retraitée entourée de bambins. Gosh, si on m’avait dit que vieillir faisait si mal… » Elle lui sourit doucement, tout en appuyant ses coudes sur la table, l’air malicieuse. Elle ne feintait pas, elle n’avait pas besoin. Elle était prête à essayer de recoller les morceaux. Prête à oublier les actes passés, à pardonner, peut-être. Prête à essayer de pardonner l’impardonnable.
Jake O. Cavendish
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(✰) message posté Jeu 2 Avr 2015 - 14:26 par Jake O. Cavendish
No, they didn’t date. Technically, she wasn’t an ex-girlfriend. But she was an ex-something, an ex-maybe. An ex-almost. ✻✻✻ Les choses ne sont plus comme avant. Il faudrait être stupide pour ne pas s’en rendre compte. D’amis, ils sont passés à amants, sans passer d’autre étape. Et retour à la case départ. Pas exactement. Une case départ beaucoup plus gênée, maladroite. Pourtant Jake ne veut pas abandonner leur amitié aussi facilement. Il ne veut pas tirer un trait sur des années où ils étaient tout l’un pour l’autre. Que ça soit quand ils étaient enfants ou à l’université. Chase a toujours été une constante dans sa vie. Celle qui était toujours là, même quand elle ne l’était pas physiquement. Celle qui était toujours là, que tout aille bien ou non. Celle qui était toujours là dans toutes les situations. S’ils s’étaient retrouvés séparés pendant le lycée, ils ne s’étaient pas fait de soucis, conscients qu’ils se retrouveraient. Et ç’avait été le cas. Une chance qu’aucun d’eux n’ait décidé de changer d’orientation. Mais Jake est persuadé qu’il aurait retrouvée Chase dans tous les cas. Il ne pouvait imaginer sa vie sans elle et c’est la raison pour laquelle il allait si mal pendant qu’elle était emprisonnée dans un pays en guerre. Elle n’a aucune idée de l’état dans lequel il était parce qu’ils n’en ont jamais vraiment parlé. Comment pourrait-il lui raconter ? Elle a vécu bien pire, ça serait égoïste de sa part de se plaindre. De plus, il ne saurait pas comment expliquer son état d’esprit à l’époque. Son inquiétude dépassait les mots. Sa culpabilité le rongeait alors qu’elle vivait les pires moments de son existence. Peut-être que c’est à cause de tout ça que le fossé s’est créé entre eux. Ou s’est élargi plutôt. Ils n’ont plus été les mêmes depuis son retour d’Irak. Mais ils souhaitent tous les deux arranger les choses. Sinon ils ne seraient pas là ce soir. Assis autour d’une table dans un bar bondé, c’est comme s’ils étaient retournés dans le passé. Sauf que le passé est révolu. Peut-être peut-il encore sauver le présent. C’est ce que Jake espère. « Seulement si tu m’accompagnes. » Il sourit en se remémorant leurs duos dans ce même bar. Chantant des classiques ou des chansons plus récentes, ils avaient sûrement utilisé tout le répertoire disponible sur le karaoké. Ils chantaient sûrement faux la plupart du temps et devaient agacer les barmans mais ils s’en fichaient pas mal. Dans ces moments, il n’y avait plus qu’eux. Eux. Chase et Jake. Ils étaient dans leur monde. Ce monde qu’ils s’étaient inventé et duquel ils ne parvenaient pas à sortir. « Ça serait un grand honneur. » Il sourit avant de boire une nouvelle gorgée. Il ne sait pas comment faire pour que ses paroles semblent naturelles, pour que cette gêne disparaisse. Si on pouvait lui proposer une formule magique, ça serait avec plaisir qu’il l’utiliserait. Il ne sait pas vers quelle étape de leur relation il souhaiterait revenir. Avant qu’ils foutent tout en l’air. Avant que tout devienne plus compliqué. Mais quand est-ce que ça ne l’avait pas été ? Quand ils étaient gamins peut-être. Au début de leurs études aussi, avant qu’une jalousie qu’ils ne comprenaient pas s’installe lorsqu’ils voyaient l’autre avec d’autres personnes. « J’ai l’impression d’être une retraitée entourée de bambins. Gosh, si on m’avait dit que vieillir faisait si mal… » Elle a cet air heureux dans le regard, légèrement moins brillant qu’avant mais il le reconnait. Qu’est-ce qu’il ne donnerait pas pour le voir sans interruption ? « Ah ouf, j’avais peur d’être le seul à avoir cette impression. » Il fait mine de s’essuyer le front, amusé. Elle a raison, ils font tâche dans le décor. Même les personnes derrière le bar doivent être plus jeunes qu’eux. Jake ne s’est même pas rendu compte du moment où ils étaient passés de l’autre côté. Du moment où ils étaient devenus plus vieux. L’ambiance universitaire qu’ils ont quitté il y a déjà quelques années ne doit pas aider. « Pourtant, ça fait pas si longtemps qu’on était là. » Pas si longtemps mais ça lui parait une éternité. Il s’en est passé des choses depuis qu’ils ont obtenu leurs diplômes. « Vingt-sept ans, c’est encore jeune, va pas nous faire ta crise de la quarantaine en avance. » Il rit alors que, lui-même, vit assez mal le fait de se rapprocher des trente ans, sans qu’il comprenne la raison. La crise de la trentaine, personne n’en parle. Il voudrait sans doute rester jeune pour toujours. Il voudrait aussi que sa relation avec Chase s’arrange naturellement. Qu’elle redevienne l’amie à qui il pouvait tout dire sans aucune gêne. L’amie avec qui il faisait les quatre cents coups. L’amie qui était évidemment plus qu’une amie. « Et puis, ils font moins bien la fête que nous. » Il hausse les épaules avec un sourire. Il n’est pas sûr et certain que ça soit vrai mais c’est une façon comme une autre de se rassurer. Ils savent encore faire la fête et peuvent très bien le prouver. Après quelques verres, ça sera sans doute mieux, histoire de se chauffer le sang pour mettre l’ambiance comme ils le faisaient avant.
(✰) message posté Mar 7 Avr 2015 - 22:39 par Invité
. DO YOU SEE WHAT WE’VE DONE ? WE’VE GONE AND MADE SUCH FOOLS OF OURSELVES. HOW DID WE GET HERE WHEN I USED TO KNOW YOU SO WELL ? . Son voyage l'avait changé. L'Afghanistan l'avait changé. La guerre l'avait changé, tout comme elle avait changé son père. Elle avait sillonné le désert pour marcher dans ses pas, pour comprendre, apprendre, mais elle n'avait rien accompli de tel. Elle avait souffert, elle avait enduré, elle avait cru périr pour finalement retrouver le calme et la sérénité de quatre murs, d'un lit, d'une table, d'une douche. Le pays l'avait changé, et elle avait cru que c'était pour le bon. Elle pensait qu'elle avait grandi, qu'elle avait suffisamment vu pour se faire une idée du monde, pour se faire une idée de son monde. Mais son monde ne tournait plus rond depuis longtemps. Elle n'aurait pas su dire depuis quand exactement, mais cela faisait bien longtemps que tout n'était plus parfait dans le monde merveilleux de Chase Sullivan. Car elle savait qu'il avait un jour été merveilleux. Il y avait eu cette période où son coeur avait été léger, où son sourire masquait toute marque de fatigue éventuelle, toute blessure sciemment camouflée. Son départ pour l'Afghanistan l'avait changé, avait retourné son monde merveilleux, avait bousculé ses habitudes. Mais elle avait fait une grave erreur. Il n'y avait pas qu'elle qui avait changé. Ils avaient changé, ensemble mais séparément. Il était rentré, elle était restée. Et c'était peut-être à cet instant qu'elle avait compris que leur monde ne tournait plus simultanément. Ils étaient séparés par des milliers de kilomètres, par des océans, des déserts, des forêts. Il était si loin, et pourtant elle avait cru pouvoir le garder à ses côtés. Elle avait cru que la guerre ne les tuerait pas. Mais c'était peut-être elle qui les avait tué un beau jour de printemps où elle lui avait tendu son billet d'avion. C'était peut-être ça le fameux moment. L'instant précis où leurs chemins s'étaient séparés. Ils partaient ensemble, mais au fond, aucun n'avait voulu être là. Il ne voulait pas venir, elle le savait. Il voulait lui faire plaisir. Et elle le savait. Mais elle avait continué. Elle avait peut-être fait erreur. Restait encore à trouver la faille. Elle cogitait, le regard perdu qui tentait pourtant de se concentrer sur la liste de chansons qui défilait sous ses yeux. Elle voulait faire un effort, leur donner cette chance, être totalement concentrée sur eux, sur leur histoire, ou du moins ce qu'il en restait. Elle leur devait bien ça. Mais son esprit était ailleurs, encore perdu entre les villages brûlés et les sourires paisibles des habitants. Elle pensait à tout ce qu'il avait manqué, à tout ce qu'il leur avait privé de voir ensemble. De partager. Et ce soir il voulait se rattraper. Partager de nouveau. Être ensemble. Chase et Jake. Un duo qui lui semblait autrefois inébranlable. Ils avaient surmonté chaque tempête, sans jamais flancher. Mais aujourd'hui ils tanguaient dangereusement. Depuis un moment déjà. Elle devait faire un effort. Elle lui proposait une chanson, comme au bon vieux temps, sans vraiment savoir si elle honorerait sa promesse. Elle pouvait essayer. « Ça serait un grand honneur. » Elle le regarde prendre une gorgée de ses grands yeux et sourit pour elle-même. Il avait l'air heureux d'être là. Heureux de retrouver ce qu'ils avaient un jour partager dans ce bar. Mais ce temps lui paraissait bien loin. Elle pouvait encore distinguer leurs silhouettes en haut du podium, chantant à tue-tête sans se soucier du reste du monde. Ils avaient beau chanter faux, lorsqu'ils se retrouvaient ensemble avec ce micro, rien ne comptait. Ils étaient dans leur bulle. Une bulle que tant d'autres avaient tenté de percer. Au final, ils avaient eux-mêmes détruit cette bulle. Et d'autres se retrouvaient à leur place, aussi proches, aussi complices, aussi forts. Des étudiants comme ceux qu'ils avaient été. Oui, elle avait l'impression que ça faisait une éternité. « Ah ouf, j’avais peur d’être le seul à avoir cette impression. » Elle souriait doucement fasse à ces gestes qui avaient l'habitude de la faire rire, avant de prendre à son tour une gorgée de cette bière qui n'était même pas extraordinaire. Mais ils avaient toujours su l’apprécier. Son regard balayait la foule du même temps et constatait qu’ils étaient sûrement les plus âgés. Elle ne s’était pas trompée. « Il faut dire que ça nous rajeunit pas. » Elle désignait rapidement du menton une bande de filles écervelées qui papillonnaient un peu plus loin. Elle avait été l’une d’elles autrefois, une fille simple, seulement guider par ses envies et ses désirs d’un soir. Elle ne se prenait pas la tête, n’écoutait que la musique résonner dans son corps. Elle ne pensait plus être comme ça aujourd’hui. Du moins, elle ne pensait pas être exactement la même. « Pourtant, ça fait pas si longtemps qu’on était là. » Les bancs de l’université n’étaient pas si lointains, mais elle avait l’impression que ces années-là appartenaient à une autre vie. À d’autres personnes. Des personnes qui n’avaient rien à voir avec celles qui étaient aujourd’hui à cette table. « Tu as raison… » Elle marmonnait doucement ses mots, le regard toujours posé sur ces étudiants tout simplement heureux. Ca paraissait si simple à cette époque. Elle espérait pour eux que cela perdure. « Vingt-sept ans, c’est encore jeune, va pas nous faire ta crise de la quarantaine en avance. » Elle riait malgré elle, le suivait. Elle savait qu’il redoutait autant qu’elle les jours qui défilaient, les années qui passaient. Celles qui les séparaient toujours plus. Elle aimerait que certaines reviennent, elle aimerait se retrouver des années en arrière, lorsque tout était simple. Lorsqu’ils n’étaient pas gênés, bizarres. Elle n’aimait pas ce malaise, mais le supportait. « Tu faisais déjà ta crise de la quarantaine alors que tu venais tout juste d’acquérir l’âge à deux chiffres. » Elle penchait la tête, le regard empli de malice. Se plonger dans le passé lui plaisait. Elle aimait repenser à ces journées où ils couraient dans les couloirs des immeubles, sonnaient aux portes avant de s’enfuir, finissaient allongés dans l’herbe à se faire des confidences. « Et puis, ils font moins bien la fête que nous. » Elle ne peut qu’acquiescer à ses propos tout en vidant sa choppe de bière. Ils en avaient fait des folies. Ils en avaient fait des soirées. La belle époque. Une époque qu’elle pouvait encore apercevoir derrière le bar, là où un large tableau en liège recevait chaque année de nouvelles photos. Elle était presque certaine qu’il restait certaines de leurs frasques sur ce tableau. « En même temps on a placé la barre très haut. » Elle se lève pour se faufiler entre la foule sans dire un mot de plus à Jake, le laissant seul un instant à leur table. Elle s’appuya sur le bar jusqu’à ce qu’un serveur passe à son niveau et s’arrête pour lui demander ce qu’elle désirait. Elle ne mit pas longtemps à trouver ce qu’elle cherchait et lui fit un joli sourire afin d’obtenir ce qu’elle voulait. Il ne tarda pas à lui donner une photo légèrement abimée par le temps et les vapeurs d’alcool environnantes mais c’était bien celle-la. C’était bien eux, bras dessus bras dessous sur cette même scène. Elle était dater de leur deuxième année de fac, et Chase fit marche arrière, un sourire fière collé aux lèvres. Elle cacha la photo derrière son dos avant de réapparaitre sous les yeux de Jake et de lui mettre la photo sous le nez. « Tiens regarde, la preuve. » Elle souriait largement, heureuse de retrouver une trace de leur passage. Comme quoi, ils avaient tout de même marquer les esprits, même si ceux qui tenaient le bar n’étaient plus les mêmes propriétaires. Leur duo existait encore quelque part.
Jake O. Cavendish
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(✰) message posté Mer 8 Avr 2015 - 17:35 par Jake O. Cavendish
No, they didn’t date. Technically, she wasn’t an ex-girlfriend. But she was an ex-something, an ex-maybe. An ex-almost. ✻✻✻ Le point de non-retour entre eux s’était sans doute effectué durant leur temps passé ensemble en Afghanistan. Pourtant, ils y étaient ensemble et ça allait entre eux. Sauf que, pour une raison qu’il ne s’explique toujours pas, Jake ne se plaisait pas là-bas. Il avait accepté de suivre Chase dans le but de renouer avec elle. Et une expérience supplémentaire n’était jamais de trop alors il avait embarqué dans l’avion avec elle. Il l’avait suivie, pas à l’autre bout du monde mais presque. Si Chase semblait s’épanouir dans cet environnement meurtri par les horreurs de la guerre, c’était le contraire pour Jake. Il comprenait pourquoi elle avait besoin de ça, il l’avait entendue parler des centaines de fois de son père. De son héros. Mais Jake, il n’appartenait pas à ce monde. Il avait essayé pendant plusieurs mois, pour elle. Espérant sans doute qu’elle décide de rentrer avant qu’il n’y soit contraint. Il avait fini par revenir en Angleterre tout seul, la laissant sans personne au beau milieu d’une guerre qui ne les concernait même pas. A l’époque, il avait pensé qu’ils s’en relèveraient, qu’elle comprendrait son geste quand elle reviendrait, elle aussi. Sauf qu’elle n’était pas revenue. Du moins pas directement et pas de son propre chef. Et c’était un acte qui ne dépendait d’aucun d’eux qui avait fini de creuser le fossé entre les deux amis. Son enlèvement l’avait changée. Il avait changé Jake aussi. Et ils n’avaient jamais été capables d’en parler. Incapables de parler de ces quelques mois qui avaient paru des années, de ce qui avait tout changé. Ils se disaient tout et voilà qu’une gêne s’était installée entre eux. Plusieurs fois, il avait failli évoquer le sujet mais s’était toujours ravisé, se sentant déjà suffisamment coupable sans en rajouter. Peut-être ne voulait-elle pas en parler, tout simplement. Alors ils étaient tous deux restés dans le silence, regardant leur amitié se dissoudre petit à petit. Sauf qu’ils n’étaient pas prêts à laisser tomber. Tant qu’il resterait un semblant d’amitié, l’espoir pouvait persister. Assis là, dans ce bar chargé de souvenirs, on pourrait presque croire que rien n’a changé. Ils s’évertuent à maintenir les apparences, en espérant que les apparences deviennent la réalité. Pourquoi ne pourraient-ils plus être comme avant ? Ils sont toujours Chase et Jake. Ils sont toujours ces deux amis qui faisaient tout ensemble, de leurs études aux fêtes pour se détendre. Ils doivent pouvoir retrouver ça. Ce qui semblait tellement naturel à l’époque. « Il faut dire que ça nous rajeunit pas. » Jake suit le regarde de Chase vers une groupe de filles qui rient bruyamment. Il devait déjà y avoir des filles comme ça il y a quelques années, sauf qu’il ne trouvait pas leurs rires agaçants. Même s’il est nostalgique de cette époque, Jake est heureux dans la vie qu’il s’est construit. La seule chose qui manque réellement, c’est sa relation avec Chase. Leur complicité, la facilité qu’ils avaient à passer un excellent moment. « Tu faisais déjà ta crise de la quarantaine alors que tu venais tout juste d’acquérir l’âge à deux chiffres. » Il rit, amusé de sa remarque et aussi soulagé qu’ils puissent encore plaisanter comme avant. Plaisanter aux dépends d’autres personnes, se taquiner mutuellement. C’était souvent ainsi entre eux et, même si c’était de moins en moins le cas, ça pourrait le redevenir. « Eh pas ma faute, j’étais très bien avec mes neuf ans, j’voulais pas changer ! » En réalité, à l’époque, il avait hâte de grandir, de faire comme les grands comme tous les gamins de son âge. Quand ils avaient neuf ans, ils couraient partout, faisaient des blagues aux voisins et faisaient tout pour énerver leurs parents. Il y avait eu des punitions, bien sûr mais Jake a préféré se souvenir des bons moments. De la fois où ils avaient appelé la vieille voisine presque sénile en se faisant passer pour un chien, puis pour un livreur de pizza et enfin pour son mari décédé. A y réfléchir maintenant, c’était sans doute méchant mais ce n’étaient que des blagues innocentes de deux gamins qui cherchaient tous les moyens possibles de s’amuser. « En même temps on a placé la barre très haut. » Dit-elle en se levant et en s’éloignant sans rien ajouter. Jake la regarde retourner vers le bar, ne parvient à voir que ses longues jambes pendant quelques instants avant qu’elle revienne vers lui peu après. Ses mains cachées derrière son dos, un sourire malicieux sur les lèvres, Jake a l’impression de retrouver cette Chase qu’il adorait. Celle qui était pleine de vie en permanence. Arrivée devant lui, elle lui montre sa trouvaille. Une photo d’eux deux. « Tiens regarde, la preuve. » Ils ont l’air tellement jeunes et insouciants sur cette photo. Pourtant, on les reconnait facilement. A en juger leurs joues rosies et leur air essoufflé, ils devaient avoir descendu pas mal de bières ce soir-là et ils venaient de chanter ensemble. On pourrait penser que la photo aurait disparu depuis le temps, remplacée par d’autres plus récentes. Elle est simple mais on voit tout ce qu’ils ont perdu depuis. Ils s’amusaient, sans même se poser de questions. Ils n’avaient besoin de rien d’autre pour passer une soirée mémorable. Si mémorable que leur photo était restée accrochée dans un bar où ils n’avaient pas mis les pieds depuis des années. « Houla, t’avais trop bu ce soir-là ! » Dit-il en riant. Ils n’essayaient même pas un tout petit peu de se contrôler quand ils sortaient. Les verres s’enchaînaient sans qu’ils s’en aperçoivent. Bien sûr, les lendemains n’étaient jamais faciles mais ils s’en fichaient. « T’as vu, t’avais encore ta cicatrice de la fois où on avait essayé mon vélo dans les escaliers. » Il désigne de l’index le coin de son œil. Cette cicatrice s’est effacée avec le temps et n’est presque plus visible. Il se relève pour s’approcher de son visage. Son pouce glisse sur le côté de son œil droit, cherchant une marque. « Je la sens à peine, c’est dingue quand même. T’es passée sous le bistouri, avoue ! » Il se souvient encore des cris de la mère de Chase après leur accident. Un voyage aux urgences et il s’était avéré que ce n’était pas si grave en fait. Juste une coupure sur le visage de Chase, quelques bleus et une cheville tordue pour Jake. Autant dire que ça ne les avait pas empêché de continuer à faire des bêtises du genre. Il la regarde un peu trop longtemps avant de retirer sa main et de détourner le regard vers la photo. « J’étais quand même canon, pas étonnant que t’aies fini par me sauter dessus. » Dit-il en riant. Ça ne s’était pas exactement passé comme ça mais peu importe, elle sait qu’il plaisante. Même si leur semblant d’histoire n’a pas été souvent un sujet de plaisanterie entre eux. Plutôt un autre tabou. Un autre non-dit entre eux.
. DO YOU SEE WHAT WE’VE DONE ? WE’VE GONE AND MADE SUCH FOOLS OF OURSELVES. HOW DID WE GET HERE WHEN I USED TO KNOW YOU SO WELL ? . Ils ne parlaient pas de l'Afghanistan. Ils ne parlaient pas de ce qu'il s'était passé là-bas. Il ne savait rien, et d'un côté, c'était mieux ainsi. Il avait connu chacune de ses cicatrices, avait même été témoin de certaines, mais celles-ci lui restaient inconnues. Il était toujours difficile d'imaginer ce qui avait bien pu se passer pendant onze mois, même pour elle. La blonde avait volontairement fait l'impasse sur certaines journées, certaines qui étaient si dures que la mémoire avait su faire son travail pour l'aider à avancer. Elle se plaisait à croire qu'un jour, elle finirait par retrouver une vie normale, sa vie d'avant. Cette utopie dans laquelle elle avait vécu lui paraissait si loin, alors que Jake était à ses côtés. En rentrant, rien n'avait changé. Sa mère était toujours sa mère, ses frères étaient toujours ses frères, Jake était toujours Jake, et Londres tenait encore debout. Egoïstement, elle avait cru qu'une pierre avait pu bouger, que son absence avait pu bouleverser un monde. Elle qui croyait ne jamais pouvoir fouler de nouveau les rues londoniennes avait été décontenancée de voir à quel point une absence ne valait rien. Tout lui avait manqué, mais cette ville n'avait pas eu le temps d'être en manque. Il y aurait d'autres filles maladroites, d'autres passionnées de journalisme, d'autres Chase. Une vie s'était écoulée pendant son absence, et la sienne lui semblait avoir été rangé dans un vieux carton "affaire classée". Elle n'aurait jamais du revenir, elle n'aurait jamais du être encore en vie. Ce n'était pas dans l'ordre des choses. Ce n'était pas ce qui était prévu. Et pourtant, elle était là, en vie. Il lui arrivait de le vérifier, de placer ses doigts contre son poignet, cherchant un pouls. Son coeur battait, bien qu'un bout soit resté là-bas. Elle avait vécu l'enfer, mais ne pouvait regretter son voyage. Elle ne pouvait pas regretter ce qui faisait d'elle ce qu'elle était. Revoir cette photo lui foutait un sacré coup. Elle détaillait chaque détail avant de retourner à la table, passant ses doigts sur leurs visages innocents. À l'époque, ils n'avaient rien vécu. Ils ne savaient pas ce qu'était la vie, ses défis, ses peines. Ils étaient ensemble, rien d'autre ne comptait. Mais elle se rendait compte à présent que d'autres facteurs entraient en jeu, des facteurs qu'elle n'avait pas su voir à l'époque. Il ne pouvait pas y avoir que Jake et Chase. Ils ne pouvaient pas vivre au dépend de l'autre, comme si rien d'autre ne comptait. D'autres choses comptaient. Ils ne les voyaient simplement pas à l'époque. Ils n'auraient pas pu. L'avenir leur tendait les bras. Les choses étaient encore si simples, et aujourd'hui tout n'était qu'un gros noeud impossible à démêler. La blonde n'était même pas certaine d'avoir cherché à le démêler. Peut-être ne faisaient-ils que repousser l'instant où il faudrait s'y mettre. Où tout explosera. Il était temps maintenant, cela faisait presque vingt ans. Ils avaient eu leurs différends, ils avaient eu leurs disputes, mais jamais rien n'avait semblé aussi insurmontable que les derniers mois passés ensemble. Ils s'étaient retrouvés, oui, mais rien de ce qu'ils faisaient ne leur ressemblait. Ils étaient venus dans ce bar, mais étaient de parfaits étrangers. Seule cette photo les ramenait encore à l'époque où ils étaient unis par ce lien indescriptible que très peu avaient su comprendre. Aujourd'hui, elle ne voyait plus ce lien. « Houla, t’avais trop bu ce soir-là ! » Elle avait sautillé jusqu'à la table, lui tendant la fameuse photo légèrement abimée par les années. Elle sourit en réponse à son rire, tout en prenant un air consterné qu'elle savait si bien magné. Elle lui donnait une légère tape sur l'épaule, écourtant au plus vite ce contact avant de croiser les bras sur sa poitrine telle une enfant boudeuse qu'elle avait souvent été. « Fais attention à ce que tu dis, je te signale que ce n’est pas moi qui ais fini allongé sur le comptoir ce soir-là. » En se remémorant la dite soirée, une large sourire traversa ses lèvres. Ils avaient eu de bons moments, des moments mémorables. Ce genre de moment dont sa mémoire ne faisait pas le tri, simplement parce qu'elle était attachée à tous les garder. Elle avait gardé en mémoire chaque instant, chaque fou rire, allant de leur première véritable rencontre à la dernière fois qu'elle avait croisé son regard avant qu'il ne quitte l'Afghanistan. Tout était là, des années d'amitié, des années d'ambiguité mal placée qu'ils n'avaient jamais su gérer. Les choses étaient différentes aujourd'hui, tout ça n'était plus permis. « T’as vu, t’avais encore ta cicatrice de la fois où on avait essayé mon vélo dans les escaliers. » Elle reposait son attention sur la photo, fronçant les sourcils pour apercevoir une cicatrice disgracieuse au dessus de son oeil droit. Elle avait presque oublié. Pourtant, c'était un moment mémorable. Elle se souvenait des cris de sa mère, elle qui les avait privé de se voir pendant près d'une semaine. Ils avaient tenus bon, pour la forme, mais s'était retrouvés par la suite encore plus déterminés à faire toutes les bêtises imaginables. Les souvenirs traversent son regard avant que le contact de la peau de Jake sur la sienne ne la fasse revenir au temps présent. Elle aurait tellement voulu rester à cette époque éloignée. « Je la sens à peine, c’est dingue quand même. T’es passée sous le bistouri, avoue ! » Son doigt glisse là où la cicatrice avait un jour été voyante, et son rythme cardiaque, élevé depuis qu'elle avait quitté son appartement, sembla ralentir un instant. Ce contact avait quelque chose de réconfortant, quelque chose d'ancien, quelque chose qui n'avait pas duré bien longtemps. Ils restaient là, face à face, et les deux inconnus qui étaient entrés dans le bar quelques instants plus tôt semblaient se retrouver l'espace d'un instant. Un geste autrefois si simple qui aujourd'hui la mettait mal à l'aise. Pour briser le malaise, elle décide de rire alors que Jake retire sa main. Après lui, elle passe un doigt sur la cicatrice effacée avant que sa voix un peu trop fluette ne se fasse entendre. « J’avais complètement oublié cette histoire, comme quoi ! » Menteuse. Mais ils n’avaient jamais vraiment été honnêtes l’un envers l’autre de toute façon. Elle finit par détourner le regard avant d’attraper sa chope de bière et d’en reprendre trois bonnes gorgées. Il lui en faudrait plus pour supporter l’atmosphère pesante de cette soirée. Elle était heureuse d’être là, heureuse de le voir, heureuse d’essayer, mais tout ça sonnait faux. Toute cette soirée sonnait comme un souvenir qu’ils tentaient maladroitement de ramener dans le présent. « J’étais quand même canon, pas étonnant que t’aies fini par me sauter dessus. » Il avait le regard toujours fixé sur la photo et elle n’eut pas besoin d’y jeter un coup d’oeil pour vérifier ses propos. Elle l’avait toujours trouvé beau, le lui avait souvent dit pour lui faire plaisir, et le lui avait montré lorsqu’ils avaient dérapé. Ce n’était pas un sujet dont ils discutaient facilement ; ils n’en avaient même jamais parlé. Pour les sauver, peut-être. Pour leur éviter de tomber de haut un peu trop tôt. Le mensonge était décidément leur spécialité. « Je te signale que c’est toi qui m’a arraché mes fringues le premier. N’inverse pas les rôles. » Elle le pointe rapidement du doigt comme pour le réprimander, mais surtout pour cacher le rose qui montait à ses joues à chaque fois qu’elle se rappelait leur possible histoire d’amour. Ca ne s’était pas fait, et au final, c’était peut-être la meilleure décision qu’ils avaient prise. C’était peut-être ‘dans l’ordre des choses’. « Cette robe m’avait coûté une petite fortune. » Elle marmonnait dans sa barbe tout en tentant de se souvenir de son motif. Bof, une des rares robes qu’elle avait porté, au moment où elle voulait plaire à la gente masculine. Elle secoua légèrement la tête en souriant, repensant à leurs folles années universitaires et où tout semblait possible. Même eux. Un ‘eux’ semblait possible. Après un silence, elle finit par plonger ses yeux verts dans les siens, un vague sourire toujours aux lèvres. « On l’a échappé belle, pas vrai ? » Il saurait de quoi elle veut parler. Il saurait qu’elle parlait de cette matinée où ils s’étaient dit qu’ils seraient ensemble le soir-même. Il saurait qu’elle parlait aussi de cette autre nuit au fin fond d’un village afghan, où ils avaient une nouvelle fois dépasser les limites. Elle s’était enfuie la première, il avait fait de même la deuxième. C’était peut-être ça le fin mot de l’histoire. Ils l’avaient échappé belle.
Jake O. Cavendish
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(✰) message posté Mar 28 Avr 2015 - 16:00 par Jake O. Cavendish
No, they didn’t date. Technically, she wasn’t an ex-girlfriend. But she was an ex-something, an ex-maybe. An ex-almost. ✻✻✻ Cela faisait longtemps que plus rien n’était simple entre eux. Malgré leurs efforts, malgré leurs espoirs, ils n’y parvenaient plus. Ce soir en était l’exemple parfait. Ils avaient beau être là, tous les deux ensemble, rien n’était comme avant. Leurs sourires autrefois sincères sont un peu forcés. Leurs gestes autrefois naturels sont gênés. Ils ne sont plus les mêmes mais refusent de le voir. Refusent d’abandonner. Vingt ans qu’ils sont amis, ça ne peut pas s’arrêter ainsi. Jake refuse d’imaginer un monde dans lequel il n’aurait pas Chase à ses côtés. Il l’a déjà vécu. Pendant onze longs mois, elle n’avait plus été là. Disparue de sa vie. Disparue du monde. Et tout avait paru plus vide. Moins intéressant. Il n’était plus qu’inquiétude et il avait détesté ça. Alors, même s’ils ne sont plus tout à fait comme avant, il s’en contente. C’est mieux que rien. Mieux que la perdre. Mieux que ne plus l’avoir dans sa vie. Ils peuvent toujours parler, évoquer le passé et rire ensemble. Tant pis si les choses ne sont plus les mêmes. Il espère toujours qu’elles le redeviendront. Il n’a jamais vraiment su comment ils en étaient arrivés là. Qu’est-ce qui avait été le moment qui avait tout changé ? Il n’y en avait peut-être pas eu. Peut-être que c’était l’accumulation de petites choses qui avaient effrité petit à petit leur belle amitié. Et voilà qu’aujourd’hui, ils se retrouvent avec les morceaux restants, incapables de reconstituer le puzzle parce qu’il manque trop de pièces. Parce qu’ils les ont perdues en cours de route. Parce qu’ils ne savent plus comment faire. Pourtant la situation, le lieu où ils se trouvent, se prête à des retrouvailles véritables. L’endroit où ils ont passé la plupart de leurs soirées arrosées à l’université. L’endroit où ils riaient sans réfléchir au reste. Peut-être que c’était ça aussi. Ils avaient grandi. Ils avaient vécu des choses qu’on ne peut pas oublier simplement. Des choses qui changent les gens, sans retour possible. Rire sans s’inquiéter de rien, ils ne savent plus le faire. Que ça soit l’un avec l’autre ou avec d’autres personnes. Ils sont adultes et avec l’âge adulte viennent les problèmes. Les problèmes qui empêchent de s’amuser sans penser au lendemain. A l’époque, le plus important pour eux, c’était leurs examens à venir. Le stage à trouver. Le cadeau à offrir pour un anniversaire. Des choses qu’ils trouvaient compliquées à l’époque et pourtant, Jake voudrait bien retrouver de tels problèmes. Sans doute qu’il envie ces étudiants qui sont encore innocents, qui n’ont encore rien vécu et qui ne sont jamais inquiets. Il était peut-être plus heureux à cette époque. Plus désinvolte. A l’époque, s’il y avait une petite gêne entre Chase et lui, il suffisait d’une plaisanterie, d’un verre ou d’une chanson pour oublier tout ça. Pas besoin de se forcer, c’était naturel. Elle retrouve une vieille photo d’eux, de quand ils venaient dans ce bar tout le temps pendant leurs études. Sur la photo, on les reconnait facilement et pourtant, ils ne sont plus réellement les mêmes. Leurs sourires sont pleins de vie, de bonheur simple, à l’état pur. Ils riaient, sans doute pour une bêtise dite deux secondes avant le flash. Ils se fichaient du lendemain. Se fichaient du regard des autres. Se fichaient de tout. Aujourd’hui, leurs sourires ne sont plus les mêmes. Sincères parfois mais jamais aussi joyeux. Jake n’a jamais autant regretté le passé que ce soir, en regardant cette photo. « Fais attention à ce que tu dis, je te signale que ce n’est pas moi qui ais fini allongé sur le comptoir ce soir-là. » Il rit, se souvenant un peu de cette histoire. Il devait avoir pas mal bu et il serait bien incapable de dire si c’était arrivé le soir de la photo ou non. Toutes les soirées se mélangeaient, se ressemblaient. Toutes aussi bonnes les unes que les autres. Ils n’avaient même pas besoin de se poser la question. Dès qu’ils voulaient sortir, ils venaient ici et ils savaient qu’ils allaient passer une soirée géniale. Ils auraient pu s’amuser n’importe où, du moment qu’ils étaient ensemble. « Au moins, moi je ne dansais pas sur ledit comptoir. » ça n’était pas arrivé souvent. Deux ou trois fois peut-être. Et bien sûr, ça ne l’avait pas dérangé de voir ça. Il avait ri en la regardant se déhancher au rythme de la musique avant de se faire virer par le patron. Une fois, elle avait même voulu le faire monter aussi mais, au lieu de ça, ils étaient tous les deux tombés à la renverse. Mais c’est une autre chute qu’il évoque. Bien plus vieille et qui avait laissé une cicatrice à Chase. Cicatrice presque invisible désormais. Il n’avait même pas remarqué qu’elle avait disparu avant de revoir une ancienne photo. « J’avais complètement oublié cette histoire, comme quoi ! » Dit-elle en venant toucher sa peau à son tour. Jake ne se souvient que peu de la chute en elle-même. Il se souvient surtout de l’inquiétude de leurs parents et de la punition qui avait suivie après. Ensemble, ils avaient tenté toutes les bêtises possibles et imaginables. Les punitions, ils s’en fichaient. Ils auraient préféré ne pas en avoir, bien sûr mais ça ne les empêchait pas de faire n’importe quoi. Sans le réaliser avant d’avoir prononcé les mots, il brise un certain tabou entre eux. Ils n’ont jamais réellement parlé des nuits qu’ils ont passées ensemble. Des fois où ils ont été plus que de simples amis mais moins qu’un couple. Ils en avaient parlé, le lendemain matin, la première fois. Ils avaient parlé futur. Ils avaient parlé couple. Mais ça ne s’était pas concrétisé. Elle avait préféré qu’ils restent amis et c’était sans doute la meilleure décision. Jake s’était toujours demandé ‘et si ?’. Et s’ils avaient finalement sauté le pas ? Et si l’amitié avait laissé place à autre chose ? Et s’il n’avait pas tu ses sentiments lorsqu’elle avait pris la décision pour eux deux ? Mais rien ne sert de se poser ces questions. Peut-être qu’ils auraient été heureux. Peut-être pas. Peu importe. Ils en sont là où ils en sont aujourd’hui. « Je te signale que c’est toi qui m’a arraché mes fringues le premier. N’inverse pas les rôles. » Ils plaisantent, comme ils pouvaient le faire autrefois. Rire, narguer l’autre. Finalement, le sujet n’avait peut-être pas de raison d’être tabou. Ils sont adultes, ils peuvent en parler après tout. « Ta mémoire marche vraiment comme ça t’arrange hein. J’me souviens très bien de comment tu m’avais sauté au cou. » En vérité, il ne saurait dire qui d’eux avait commencé. Peut-être que c’était ses vêtements à elle qui étaient tombés les premiers. Peut-être que c’était elle qui l’avait embrassé en premier. Ils n’avaient pas réfléchi à tout ça cette nuit-là. Ils s’étaient simplement laissé guider par leur désir. Même s’il n’en a jamais vraiment parlé à personne, cette nuit fait partie de celles qui sont inoubliables pour lui. Peu importe ce qui avait suivi, il s’en souviendra toujours. Et, malgré tout, il ne parvient pas à regretter. C’était ce qu’il voulait et la nuit entière avait été magique. Le retour à la réalité n’en avait été que plus difficile mais il gardait ce souvenir. « Cette robe m’avait coûté une petite fortune. » Robe qu’il avait déchirée donc. Il se souvient de ça en effet. Moins que de la suite mais tout de même. Elle lui allait bien cette robe, c’est vrai. Tout lui allait bien et tout lui va toujours bien. Dommage qu’elle ne porte pas plus souvent de robe, pense-t-il une seconde. Lorsqu’il quitte enfin la photo du regard, il se rend compte que Chase le regarde. Il soutient son regard, perdu dans les souvenirs que lui ramènent ses grands yeux. « On l’a échappé belle, pas vrai ? » Décontenancé par ses paroles, il détourne le regard. Il avait imaginé qu’elle pensait la même chose que lui. Qu’elle gardait aussi un bon souvenir de cette nuit, malgré tout. Mais après tout, c’était elle qui avait souhaité qu’ils restent seulement amis. Qu’ils n’aillent pas plus loin. Il finit par la regarder à nouveau, sans trop savoir que penser. « En effet, ouf ! » Dit-il en forçant un petit rire. Plus facile d’être d’accord avec elle que de poser la question qui pourrait finir de tout gâcher. Les choses sont comme elles sont, pas la peine de revenir sur le passé. Surtout si elle pense ainsi. « Bon on va chanter ou quoi ? Sauf si t’as peur d’avoir perdu la main. » Il change de sujet, voyant une gêne s’installer. Il reprend le programme sur la table et le regarde sans le regarder. « Time of my life, comme toujours ? » Un simple délire entre eux. La mère de Jake étant fan de la comédie musicale, Chase et Jake connaissaient la chanson par cœur, sans pour autant aimer. Ça n’empêche qu’ils s’amusaient toujours à chanter cette chanson à tue-tête, que ça soit dans la rue ou dans ce bar.
✻✻✻
CODES LITTLE WOLF.
Spoiler:
1000ème message pour Chake, we did it love you
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(✰) message posté Lun 25 Mai 2015 - 22:21 par Invité
. DO YOU SEE WHAT WE’VE DONE ? WE’VE GONE AND MADE SUCH FOOLS OF OURSELVES. HOW DID WE GET HERE WHEN I USED TO KNOW YOU SO WELL ? . Durant sa captivité, elle avait eu le temps d'y penser. Elle avait eu le temps de penser à Jake, à eux, à ce qu'ils avaient été, ce qu'ils étaient, et ce qu'ils aimaient prétendre être. Elle avait eu des nuits et des jours, toutes ces heures qui se mélangeaient sans jamais qu'elle ne sache quel jour défilait sous son regard vide. Elle s'était demandée ce qu'ils étaient vraiment. Un homme et une femme. Des enfants, aussi. Mais elle n'avait jamais été satisfaite de les qualifier d'amis. Ils l'avaient été, oui, mais au fur et à mesure qu'ils grandissaient, autre chose s'était installé. Quelque chose en plus, quelque chose qui avait de la valeur pour elle, quelque chose qui l'avait même poussé à espérer plus d'eux. Elle avait voulu plus que ces deux nuits dérobées, elle avait voulu que les lendemains soient moins maussades. Elle pouvait s'attacher la faute pour la première nuit qu'ils avaient passé ensemble, car la décision de s'en tenir à cette unique expérience avait été la sienne. Elle ne lui avait pas laissé le choix, et ne lui avait pas laissé le temps de la contredire. Son coeur disait pourtant autre chose. Elle aurait aimé lui dire qu'elle ne regrettait pas les mots qu'ils avaient échangé dans la nuit, mais les mots étaient sortis autrement de ses lèvres. Elle l'avait vu, lui et sa copine de l'époque. Il n'y avait pas de tendresse dans les gestes qu'il avait eu pour elle, Chase était sûre qu'il l'aurait quitté pour tout tenter avec elle. Cette fille n'avait pas compté, elle l'avait su. Mais c'était autre chose qui l'avait poussé à prendre cette décision. Elle avait imaginé sa vie sans lui. Certes, ils auraient vécu leur histoire, mais jusqu'à quand ? Jusqu'à ce qu'ils découvrent chacun les terribles défauts de l'autre ? Jusqu'à ce que cela ne suffise plus ? Elle avait eu peur de le perdre avant même de l'avoir. Elle avait préféré la solution de faciliter, elle avait préféré le garder près d'elle, quitte à souffrir de le voir avec une autre. Elle n'avait jamais vraiment été heureuse en ménage, quand bien même elle avait plusieurs fois réussit à en aimer un autre. Alors, lorsqu'ils avaient de nouveau déraper lors de ce voyage, elle avait pensé que c'était leur chance. Que ce n'était pas le fruit du hasard, que quelque chose les poussait l'un vers l'autre. Mais elle avait eu tord. Il était parti et le sujet n'était jamais revenu à la surface. Elle avait cru mourir là-bas, et que ce sujet resterait clos. Et malgré son retour, il l'était resté. Cette nuit faisait partie des dossiers non-élucidé qu'elle gardait dans un tiroir, et dont elle ne voulait pas discuter, pas même avec Jake. Ils ne pouvaient plus discuter de grand chose, d'ailleurs. Ils essayaient de se revoir, organisaient ces soirées remplies de non-dits et de moments gênants, mais continuaient. Ils ne lâchaient pas prise alors que c'était pourtant la seule chose à faire. Elle ne savait pas bien où ils s'étaient perdus, si cela était récent ou si cela remontait justement à plus longtemps. Elle aurait donné cher pour revivre l'époque où ils s'étaient trouvés. « Au moins, moi je ne dansais pas sur ledit comptoir. » Elle écarquillait les yeux comme si elle ne se souvenait plus de cette image. Au contraire, c'était justement ce dont elle se rappelait en premier lorsqu'elle émergeait d'un long sommeil de lendemain de soirée. Et à chaque fois, elle se maudissait d'être aller si loin, d'avoir autant bu. Chase n'avait pas pour habitude d'être la fille la plus extravagante qui soit, mais l'alcool avait des effets notoires sur elle et sur sa perception de la réalité. Elle qui, sobre, aurait dévisagé la fille qui montait sur le comptoir en était la plus fière une fois alcoolisée. Elle rougit donc, honteuse de ses frasques nocturnes. « Ça c’est petit, Monsieur Cavendish. » Elle lui donne un rapide coup de coude avant de reposer les yeux sur la photo. Qui sait quelle bêtise elle avait fait lors de cette soirée. Elle avait l’air heureuse, en tout cas. Ils l’étaient. Elle pouvait lire dans leurs yeux qu’à cette époque, tout allait bien. Même si elle se souvenait mal de cette soirée parmi toutes les autres, elle savait que tout allait alors bien. Elle avait ce sourire qui n’existait plus à présent, et il la regardait avec ces yeux qu’il n’avait plus. La photo avait capturé un moment. Ils ne posaient pas, riaient, naturellement. Ca les définissait bien à l’époque. Un moment capturé à la volée, et pourtant, il reflétait parfaitement ce qu’ils vivaient à l’époque. Tout n’était qu’insouciance, rires, frasques et moments parfaits. Il avait été son pilier, le seul à pouvoir la faire sourire dans les moments les plus difficiles. Il aurait pu arriver n’importe quoi, elle savait qu’elle ne risquait rien tant qu’il était là. Mais aujourd’hui elle pouvait craindre de tout, maintenant qu’il était si loin. Il avait été si loin lorsqu’elle avait été enlevée. Et elle ne parvenait pas à lui pardonner cette absence. « Ta mémoire marche vraiment comme ça t’arrange hein. J’me souviens très bien de comment tu m’avais sauté au cou. » Elle sent ses joues chauffées à nouveau alors qu’ils évoquent un de leurs sujets tabous. Ils n’avaient pas pour habitude de reparler de cette nuit-là. C’était comme un grand point d’interrogation dans les vingt dernières années qu’ils avaient passé ensemble. Comme une erreur, le genre d’instant dont on ne voulait pas reparler de peur que tout devienne plus réel. C’était pour ça qu’elle n’aimait pas en parler. Parce qu’alors, tout ça serait réel. Cette nuit-là, la suivante, et les onze mois qui s’en était suivi. Elle ne voulait pas que cela devienne réel. Elle préférait vivre dans ce monde parallèle où ils restaient amis sans trop l’être, et où ces soirées gênantes se terminaient sans jamais avoir vraiment commencées. « Ça ne me ressemble pas du tout. » Elle garde les yeux baissés de peur de voir son expression. Ça ne lui ressemblait pas, mais elle n’aurait su dire si il avait tord. Elle ne se souvenait pas tout à fait de cette nuit-là, mais elle savait qu’elle aurait été capable de tout. Elle aurait pu tout faire avec lui, elle n’avait pas peur. Elle ne s’était pas sentie jugée ou même regardée, juste aimée. Et c’était une sensation qui avait tendance à lui manquer. Et puis, elle lance ce joli mensonge. Cette phrase qu’elle savait blessante, qui terminerait de rendre cette soirée définitivement gênante. Elle lui posait la question sans savoir la réponse. Elle ne savait pas si ils l’avaient échappé belle. Elle ne savait pas si, justement, c’était en ne se mettant pas en couple qu’ils avaient tout gâché. Elle ne savait pas si elle avait eu tord, il y avait dix ans de cela. « En effet, ouf ! » Il rit et elle se force à faire de même tout en quittant ses yeux. Elle était blessée sans savoir pourquoi. Peut-être avait-elle voulu une autre réponse de sa part, un mot qui lui aurait laissé croire que cette mascarade ne servait à rien. Mais ils étaient déterminés à garder ces rôles préfabriqués. « Bon on va chanter ou quoi ? Sauf si t’as peur d’avoir perdu la main. » Il passe à autre chose et elle fait de même. Elle repose son regard sur lui tout en reprenant confiance, tout en reposant ce masque ridicule sur son visage. Son masque spécial Jake. « Je m’entraine nuit et jour pour ce moment, prépare-toi à être étonné par mes progrès. » Elle lui lançait un regard de défis alors qu’elle ne savait pas si c’était vrai. Elle n’avait jamais chanté mal, ou, en tout cas, on ne le lui avait jamais dit. Elle n’était pas non plus Beyoncé, mais sa colocataire appréciait souvent ses élans musicaux sortis de nul part. Il reprend le programme et elle se doute de ce qu’il va choisir. « Time of my life, comme toujours ? » Un classique pour eux. Elle se souvient encore des après-midi qu’elle passait chez lui enfant, et où sa mère écoutait l’album en boucle. C’était là-bas qu’elle avait appris la chanson par coeur, sans vraiment avoir le choix de savoir si elle l’aimait ou non. « Je vais réglé ça. » Alors elle le laisse s’approcher de la scène pour attendre que les deux filles éméchées terminent de reprendre un tube des spics girls et se dirige quant à elle vers le bar. Elle retourne voir celui qui lui avait donné la photo et lui redonne par la même occasion, pour ne pas passer pour une voleuse. Elle lui demande la chanson et il ne parait même pas étonné. Sûrement un classique pour d’autres également. Il acquiesce et elle repart aussi vite qu’elle était venue pour rejoindre Jake. Ce fût leur tour et ils montèrent la scène étroite. C’était étrange de revivre cette sensation. C’était comme si ils étaient revenus à l’époque de la photo, à l’instant précis où elle avait été prise, mais que leurs expressions étaient différentes. Elle ne riait pas, souriait à peine. Elle tenait mollement le micro alors que la mélodie commençait. Elle laissait Jake commencer, comme toujours. Pourtant, elle n’était pas sûre de savoir aligner une seule parole à cet instant. C’était peut-être trop, finalement. La comédie qu’ils jouaient avait peut-être durée trop longtemps.
Jake O. Cavendish
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(✰) message posté Mar 26 Mai 2015 - 21:33 par Jake O. Cavendish
No, they didn’t date. Technically, she wasn’t an ex-girlfriend. But she was an ex-something, an ex-maybe. An ex-almost. ✻✻✻ Au moment où la photo avait été prise, il était presque certain qu’ils n’avaient pas encore couché ensemble. Que la nuit qui avait tout changé entre eux n’avait pas encore eu lieu. Jake a du mal à resituer exactement la nuit de la photo. Il semble n’y avoir aucune gêne entre eux, juste leur belle amitié pas encore écornée. On voit le bonheur dans leurs yeux. Un bonheur simple. Un bonheur qu’ils n’avaient aucun mal à trouver à l’époque. Un bonheur qui parait bien loin désormais. Sans doute que tout n’était pas non plus parfait sur cette photo. Rapidement après leur arrivée à l’université, les choses étaient devenues bizarres entre eux. Ils avaient mis longtemps à comprendre ce qui n’allait pas. Pourquoi ils se disputaient parfois pour rien. Pourquoi ils n’aimaient pas voir l’autre avec d’autres personnes. Ça avait toujours été là, entre eux. Pas quand ils étaient gamins mais dès l’université, il y avait eu ce truc en plus. Ce truc sur lequel ils n’avaient jamais mis de nom et dont ils ne parlaient pas de toute façon. La seule fois où ils en avaient un peu parlé, c’était après cette fameuse nuit. Jake avait pensé qu’ils avaient un avenir. Que c’était peut-être l’évolution logique de leur relation. Bien sûr, dire que ça ne lui avait pas fait peur aurait été mentir. Peur de perdre son amie. Peur que tout ne se passe pas comme prévu. Mais au final, ils s’étaient détruits malgré tout. C’était peut-être même la cause de tout ça. Et ils n’en ont jamais reparlé. Ont préféré éviter le sujet pour espérer retrouver une amitié normale. Mais c’est sans doute déjà trop tard. Ils continuent d’essayer, encore et toujours, sans changer la manière. S’acharnent toujours d’une façon vouée à l’échec. Et aucun n’est prêt à changer ça. Ils n’en sont pas réellement conscients ou vivent dans le déni. Ils savent bien que tout a changé mais ne veulent pas l’accepter. Ils voudraient retrouver un passé parti depuis bien trop longtemps. Alors qu’ils évoquent cette fameuse nuit sans réellement en discuter, pour la première fois malgré tout, elle semble gênée par le sujet. Ils l’avaient enfoui sous terre pour ne plus jamais en reparler. Comme si rien ne s’était passé. Comme si ça n’avait pas tout changé. « Ça ne me ressemble pas du tout. » Murmure-t-elle, sans le regarder. Il comprend alors qu’il a eu tort d’en parler. Que ça ne fait que rendre les choses plus embarrassantes entre eux. S’ils n’en parlent pas, ça doit être pour une raison. Alors il change tout simplement de sujet, ramenant la raison de leur présence ici. S’ils ne chantent même pas, alors leur venue ici n’aura servi à rien. Chanter ramènera peut-être leur ancienne amitié pendant quelques minutes. Quelques minutes plongées dans le passé. Quelques minutes grappillées, auxquelles ils n’ont plus droit. « Je m’entraine nuit et jour pour ce moment, prépare-toi à être étonné par mes progrès. » Le sourire, le regard rempli d’audace. Un instant, c’est la Chase d’avant qui est de retour. La Chase de l’université. La Chase de Jake. Il est content de voir ça et espère malgré tout que ça durera. Que ça fonctionnera et que ça suffira à les sauver. Malgré les quelques moments étranges de cette soirée. Peut-être que ça peut marcher, sans parler des réels problèmes. En agissant comme si tout va bien alors que tout semble s’effondrer. « Je suis impatient de voir ça. » Ils n’ont jamais été des artistes, loin de là. Mais peu importe. Il sait que Chase peut très enflammer la salle. C’était ce qu’elle faisait à chaque fois, en duo avec lui ou seule. Elle était tellement pleine de vie et de bonheur à partager. Elle entrait dans sa bulle et chantait comme si sa vie en dépendait. Et les moments où ils chantaient ensemble étaient parmi les préférés de Jake. Il y avait toujours eu une alchimie particulière entre eux dans ces moments. Une alchimie indestructible et qui leur donnait l’impression que le monde n’avait aucune limite. Qu’ils pouvaient tout faire. Le choix de la chanson est simple. Un classique entre eux. Un délire alors qu’ils n’apprécient pas forcément la chanson ou le film d’ailleurs. « Je vais réglé ça. » Il se dirige vers la scène alors qu’elle va vers le comptoir pour demander à avoir la prochaine place sur scène. Sur cette scène se trouvent deux jeunes femmes, sans doute étudiantes, qui chantent une vieille chanson des Spice Girls. Comme quoi, certaines chansons restent cultes, qu’importe la génération. Chase le rejoint rapidement et, une fois les deux filles descendues de la scène, c’est leur tour. Jake a beau se sentir vieux dans ce bar, ça n’a pas l’air de choquer les fêtards qui les applaudissent comme tout le monde. Les stéréos commencent la musique alors que Jake monte le micro devant la bouche. « Now I've had the time of my life no I never felt like this before ! » Commence-t-il avant de se tourner vers Chase pour prendre sa main. Il la regarde dans les yeux, espérant recréer l’ambiance qu’il y avait avant. L’alchimie qu’ils partageaient. « Yes I swear it's the truth and I owe it all to you » Cette fois, avec plus d’entrain. Il pensait que ça reviendrait plus naturellement que ça. Peut-être qu’une fois qu’elle sera dedans avec lui, ça marchera. Qu’à eux deux, ils pourront tout recréer. Ils sont Chase et Jake après tout. Toujours les deux mêmes qui chantaient sur cette scène il y a quelques années. Et même s’ils ne retrouvent ça que pour un temps, Jake y tient. Pour ne pas perdre totalement espoir. Pour voir une lumière au bout du tunnel. Pour penser qu’ils vont pouvoir surmonter tout ça. Surmonter des années de problèmes et de non-dits.
(✰) message posté Lun 8 Juin 2015 - 20:01 par Invité
. DO YOU SEE WHAT WE’VE DONE ? WE’VE GONE AND MADE SUCH FOOLS OF OURSELVES. HOW DID WE GET HERE WHEN I USED TO KNOW YOU SO WELL ? . Cette soirée faisait remonter à la surface les souvenirs qu'elle avait voulu enfouir en elle pendant si longtemps. Elle n'avait pas voulu oublier Jake, elle n'avait voulu l'oublier lui, les oublier, mais il était parfois plus simple de faire l'impasse sur toute une époque pour avancer. Elle avait fait l'impasse sur une grande partie de sa vie, voyant là la seule solution pour aller de l'avant et réapprendre à vivre normalement. Elle avait souhaité défaire ses attaches, se libérer des liens qui l'avaient si longtemps retenus, oubliant presque l'essentiel. Elle avait été construite sur ces liens, et sans eux, elle semblait flancher. Elle perdait l'équilibre qui l'avait si longtemps maintenu sur les rails. Elle pensait l'avoir perdu pendant ces onze longs mois, mais peut-être avait-elle eu tord. Peut-être que cela durait depuis plus longtemps. Peut-être que la nuit qu'ils avaient passé ensemble avait tout remis en question. Peut-être qu'ils se voilaient la face depuis ce jour. Mettre un doigt sur la date exacte où tout avait commencé semblait difficile. Il y aurait aussi bien pu y avoir le lycée, où la jalousie de Chase avait émergé sans qu'elle ne la laisse exploser au grand jour. Pour cela, elle avait attendu que Jake fasse de même. L'université avait été la période où leur amitié s'était troublée pour devenir un vrai champ de mine. Leurs seuls instants de paix résidaient dans ceux qu'ils passaient seuls à seuls, ou sur ce genre de scène. Les moments où rien autour ne comptait plus que leur amitié. Les moments que Chase avait mis du temps à balayer. Il y avait toujours eu ce petit quelque chose, ce truc en plus qui avait fait qu'elle n'avait pas tardé à se rendre compte qu'il ne s'agissait pas d'une simple amitié. Ils étaient plus, tout en voulant être moins. Ils étaient fusionnes tout en souhaitant pouvoir survivre séparément. Et ils avaient essayé. En vain. Elle s'évertuait pourtant à retenter l'expérience, redoutant leurs entrevues et évitant le moindre contact. Et elle ne lui donnait rien, aucune explication, aucun moyen. Elle ne voulait rien lui donner, parce qu'il avait déjà tant pris. Elle gardait en elle cette colère refoulée, cette douleur sans début ni fin, cette rancoeur obsolète. Elle gardait tout en elle pour ne pas oublier qu'elle devait lui en vouloir, pour se souvenir et apprendre à vivre sans lui, comme il avait su vivre sans elle. « Je suis impatient de voir ça. » Il savait qu'elle n'était pas Beyoncé ou Rihanna, mais elle se débrouillait tout de même. Pas par la voix, ni par l'attitude, mais par l'énergie qu'elle dégageait à prendre autant de plaisir à chanter avec lui. Mais cela faisait si longtemps à présent. Ce temps lui paraissait si loin. Elle n'était plus sûre de savoir chanter avec lui. Elle n'était plus sûre de savoir bien chanter maintenant qu'ils étaient brisés. Elle s'évanouissait dans la foule pour demander la chanson de Dirty Dancing au barman, qui ne sembla pas étonné du choix. C'était la chanson que 95% des jeunes chantaient au moins une fois dans ce bar, mais ils avaient été les premiers à imposer le jeu. Du moins, c'est ce qu'elle se disait le soir avant de s'endormir. Elle rejoignait ensuite la scène où Jake avait pris place et s'emparait du micro. Sous le feu des projecteurs, le silence se fit dans la salle pour accueillir ce nouveau duo. Leur duo. Celui qu'elle avait pensé balayé, qu'elle avait voulu balayé. Elle le voulait peut-être encore. La mélodie débute mais ses pensées floues restent, alors que Jake entame la première partie du couplet. « Now I've had the time of my life no I never felt like this before ! » Son regard se perd dans la foule alors qu'elle sent une main se glisser dans la sienne. Sa main. Ce contact. Puis celui de ses yeux qui cherchent visiblement les siens. Mais elle ne peut pas lui donner ça. Elle ne peut pas lui donner plus. « Yes I swear it's the truth and I owe it all to you » Les paroles de la chanson s'ancraient dans son esprit comme si c'était leur histoire. Comme si ce n'était pas un hasard, comme si ils avaient toujours chanté cette chanson, au final. Perdue, elle rate la phrase qu'elle était censée chanter, reprenant au mauvais moment. Tout comme leur histoire. Elle était arrivée au mauvais moment. « Cause I’ve had the time of my life… » Elle pouvait sentir le regard pesant de Jake sur son visage voilé de mèches. Il attendait la suite, il attendait qu’elle le dise. Mais les mots restaient bloqués dans sa gorge. Elle ne le lui devait pas. Elle ne lui devait qu’un partage équitable entre peine et joie. Et ce soir, la peine l’emportait sur le reste. Après tout, elle avait balayé la joie. Sans qu’elle ne termine sa phrase, elle repose le micro sur l’estrade avant d’en descendre, attrapant au passage le manteau qu’elle avait laissé sur le dos de sa chaise. Elle étouffait, compressée entre les souvenirs et le présent, le bar et la musique, les rires et les anciennes folies. Tout ce qu’elle n’était plus. Elle quittait la chaleur de la salle pour retrouver l’air frais du dehors, respirant enfin à pleins poumons, les mains posées sur ses cuisses. Elle respirait maintenant que Jake n’était plus là à la regarder, à attendre quelque chose d’elle, quelque chose qu’elle n’avait plus. Rien n’était plus comme avant. Il n’était plus son oxygène. Elle ne pouvait plus être le sien.