(✰) message posté Lun 19 Jan 2015 - 15:40 par Invité
“ The wrongdoer is more unfortunate than the man wronged. Evil people once suffered too much . I realised I was afraid of loving beyond power.” ✻ Le sol se dérobait sous mes pas incertains. Plus je m’enfonçais dans le long couloir de sa majesté, et plus je sentais l’étreinte chaleureuse de l’obscurité se resserrer contre mon cœur. Il y’ avait bien des supplices, et bien des plaisances dans cette immense salle de bal. Les valses romantiques s’enchainaient tout autour de mon regard meurtri, mais seules les lèvres tremblantes d’Eugenia captivaient mon attention. Je l’observais se pencher lentement en direction de son cavalier avant de succomber aux plaisirs de l’oubli. Je l’avais sommé de me quitter un million de fois, j’avais désiré son bonheur et ma perdition, mais je réalisais avec la pointe amère de la déception, et la dualité meurtrière de l’esprit, que ma lutte acharnée n’était qu’un enchainement grotesque de malchances. Je fermai les yeux avant de glisser le long des murs glacés. Mes démons me narguaient ; suffisants et autoritaires. Ma colère s’élevait au sommet du désespoir afin de retrouver les voussures du ciel . Je n’avais plus la force de continuer, je n’avais pas la force de prétendre. Le visage livide d’Athénaïs se brouillait devant moi afin de laisser place au vide incommensurable. Je restais immobile au milieu des ruines et des cendres. Je n’étais qu’un corps inerte parmi les décombres. L’orphelin désabusé. Le journaliste troublé. Le presque écrivain. Ma bouche se serra, et jusqu’à bout de forces je me mordis l’intérieur des joues. Je gardais le poing fermé sur les débris de verre et de champagne, écrasant ma vanité contre ma plaie suintante pour me créer l’illusion d’une douleur physique. Les ténèbres se fermaient sur mon visage, je n’avais nulle part où m’égarer. Je n’avais nulle part où aller. Je vacillais comme un condamné à mort avant de courber mes doigts endoloris.
_ Vous devriez nettoyer votre main. M’annonça un serveur en croisant mon regard. J’acquiesçai d’un signe de la tête avant de me redresser avec difficulté. Mes jambes flageolantes avaient du mal à me porter au bout de l’allée. Je m’accrochai aux parois sombres avant de reprendre ma figure impénétrable. Je venais de franchir la ligne de non-retour ; et j’étais incroyablement chagriné par les chemins contradictoires de nos destins. Je déglutis, ravalant mes illusions et ma salive rouillée.
L’eau coulait le long de ma paume rougeoyante mais j’étais incapable d’effectuer le moindre geste. Je restais figé. Le vent avait cessé de souffler dans ma direction. Eugenia Je ne voulais pas la blesser, pourtant mon âme me suppliait de l’écraser complètement de ma mémoire. Je fronçai les sourcils en faisant volteface. Les silhouettes qui croisaient mon chemin n’étaient que les ombres affables de mes pensées. Il n’y avait pas d’absolution. Il n’y avait pas d’espoir. Je fis quelques enjambées avant de tomber nez à nez avec Samantha. Mon expression se crispa avant de s’étirer avec désinvolture.
« Samantha. » Articulai-je avec lenteur, en prenant soin d'appuyer chaque lettre pour le seul plaisir de l'irriter. « Tu te caches de Rhys ? » Me moquai-je. « Jolie robe. Je ne t’avais pas reconnu de dos, je t’ai presque trouvé sexy. » J’esquissai une ébauche de sourire avant de mordre la lèvre inférieure avec impudence.
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(✰) message posté Ven 30 Jan 2015 - 0:58 par Invité
. YOU'VE NEVER CHANGED. AND NOW IT'S TOO LATE. I TRIED TO BE EVERYTHING FOR YOU, BUT I WASN'T. AND I LOST MY WAY TRYING TO HELP YOU FIND YOURSELF, BUT NOT ANYMORE. I JUST WANTED YOU. I WANTED TO BE CHOSEN . Cette soirée virait au désastre. Elle s'y était attendue, finalement. Elle n'était pas à sa place dans ce lieu rempli de richesses, qui, même avec une belle robe, la faisait se sentir comme une souillon. Elle n'appartenait pas à ce monde, et son appartement miteux aux murs délabrés lui manquaient. Elle admirait les dorures, retenait son souffle face au cristal des verres, mais au fond elle aurait aimé quitter tout ça. Elle aurait voulu s'échapper, partir d'ici, loin, plus loin que la ville. Et être elle-même. Enlever ces talons ridicules, déchirer cette robe qui lui coupait la respiration, être libre. Ne plus faire attention aux apparences. Ne plus sourire lorsqu'il n'y avait aucune raison particulière pour le faire. Elle étouffait entourée de toutes ces personnes. Elle en aimait certaines, ne connaissait pas les autres. Et pourtant ils faisaient tous corps et attendaient qu'elle flanche. Elle terminait d'une traite sa cinquième coupe de champagne et faisait mine d'écouter le sujet de discussion dont Rhys débattait avec une femme. La brune était prisonnière d'une soirée interminable dont elle ne souhaitait que s'échapper. Il y avait d’abord eu la découverte de son cavalier, puis elle avait aperçu Lior, et enfin elle était tombée sur Julian. L’ensemble de ses démons étaient réunis dans une même pièce et elle n’avait pas la force de les combattre. Elle n’avait plus la force. Sam regardait le fond de son verre d’un air perdu alors que les paroles de son cavalier se faisaient lointaines. Pendant les semaines où elle n’avait pas croisé son premier amour, la brune avait presque cru que tout cela n’avait été qu’un songe, que jamais il n’était revenu. Elle avait enterré les quelques mois qu’ils avaient ensemble, les avaient rangé et scellés dans un coin de son âme, si loin qu’aujourd’hui la réalité l’avait giflé avec force. La douleur s’était apaisée, certes, mais elle persistait. Elle persisterait. C’était dans l’ordre des choses. Peut-être qu’un jour elle oublierait simplement, mais cette fois sans même le vouloir. Mais à cet instant, l’image de Julian et de sa cavalière était imprégnée dans son esprit et rendait ses jambes dangereusement faibles. Elle voulait tout lâché, mais elle avait un rôle à tenir, un masque à arborer. Alors elle relevait la tête et elle souriait, encore et encore, bien qu’il n’y ait aucune raison pour. Elle n’avait aucune raison de sourire ce soir. Et puis lorsque ce fut trop dur, elle s’excusa auprès de Rhys et de ceux qu’il tentait d’impressionner et elle déposa sa coupe sur un plateau avant de traverser la salle. Elle avait besoin de respirer, de retirer ses chaussures ridicules, de déchirer sa robe. Besoin d’oublier, pour recommencer à vivre. Sa gorge était nouée et ses jambes la portaient à peine jusqu’au long couloir plus frais qui lui permettait de reprendre du souffle. Là, loin de l’agitation de la grande salle, elle appuyait ses deux mains contre le mur frais, avant de se reculer pour laisser son dos venir se plaquer contre le mur d’en face. Les yeux clos, elle reprenait enfin son souffle, celui qu’elle avait perdu longtemps auparavant. Sa poitrine montait et descendait à un rythme fou alors que les couples passants lui jetaient des regards interloqués. Elle faisait le vide, avant de considérer qu’il était temps d’avancer. Avancer. Un pas après l’autre. C’est ce qu’elle fit, avant de percuter une silhouette familière. Le visage de Julian se dessina sous ses yeux azur alors reculait d’un pas. « Samantha. » Elle ne s’habituait toujours pas au retour de sa voix dans son monde. Une boule restait coincée en travers de sa gorge, l’empêchant de répondre. Il n’y avait rien à répondre. « Tu te caches de Rhys ? » Il n’avait pas tord. Les relations qu’elle entretenait avec son cavalier étaient pour le moins tendues, et n’importe qui aurait pu le remarquer. Mais le fait que Julian connaissait personnellement Rhys l’agaçait. Il était inlassablement relié à son monde. « Pas que de Rhys à vrai dire. » Elle ne prenait pas la peine de sourire, elle en avait marre de le faire. Et elle n’avait plus envie de faire semblant face à lui. « Jolie robe. Je ne t’avais pas reconnu de dos, je t’ai presque trouvé sexy. » Il se moquait d’elle et elle leva les yeux au ciel, heureuse de voir qu’il n’avait pas changé. Sam n’avait jamais été la copine la plus sexy, la plus féminine, la plus précieuse auquel un homme pouvait espérer. Mais elle était ce qu’elle était, et la brune n’aurait changé pour personne. À un moment de sa vie, elle avait cru le vouloir, elle avait cru que changer pouvait le faire la choisir. Mais il avait toujours appartenu à une autre. Et elle l’acceptait finalement. Après avoir croisé ses bras sur sa poitrine, elle finit par le détaillé. « Merci. Toi en revanche tu as une mine affreuse. » Il avait une mine terrible, une main ensanglantée, et elle ne mit pas longtemps à trouver qui en était le cause. « Laisse-moi deviner… » Elle s’écarte pour poser de nouveau son dos contre le mur. Elle fit mine de réfléchir avant de prononcer le prénom qu’elle avait tant maudit. « Eugenia. » Un sourire en coin se traça sur ses lèvres alors qu’elle baissait les yeux. Il s’agissait toujours d’Eugenia, il avait toujours s’agit d’elle et il s'agirait toujours d'elle. Leur monde à deux avait toujours tourné autour d'une troisième personne.
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(✰) message posté Ven 30 Jan 2015 - 16:38 par Invité
“ The wrongdoer is more unfortunate than the man wronged. Evil people once suffered too much . I realised I was afraid of loving beyond power.” ✻ Je pris une grande inspiration en croisant mon reflet dans le miroir ; les cernes qui contournaient mes yeux profondément troublés me donnaient des grands airs de penseur. Je n’étais pas un grand de ce monde – pas encore, mais je me plaisais à prendre l’identité du philosophe, du paria, de l’écrivain, et parfois même du méchant. J’étais insouciant des autres parce qu’il était plus facile d’avancer sans attaches. Je me plaisais à taire la vérité sur mes pensées, et les vestiges de bonté qui subsistaient encore dans l’abysse noir où j’avais élis domicile. J’avais banni Eugenia de mon cœur ; pour moi notre amitié n’était qu’une longue et éprouvante mascarade. Le romantisme idéaliste n’existait pas ; l’amour était à l’image de celui qui le ressentait. Le mien était sale, corrompu, et égoïste. J’avais eu trop peur de sacrifier quelques fragments de ma personne, ou d’abandonner mon ambition. Ma carrière était un dernier hommage à la mère (journaliste) que j’avais perdu trop jeune. Je voulais reprendre le pouvoir sur les déceptions de mon père, et les miennes. Je voulais trop de choses à la fois qu’il me semblait parfois sombrer dans le chaos. Je me mordis la lèvre inférieure avant de lâcher une longue plainte douloureuse. Toutes mes désillusions s’embrumaient devant moi, j’avais toutes les raisons du monde d’être abattu : Robin m’en voulait d’avoir dévoilé la vérité sur les mensonges d’Ana, c’était la première fois qu’il m’abandonnait sans un mot.- Eugenia avait tourné la page comme je lui avais ordonné, elle était étincelante dans sa robe toute en paillettes et en fantaisies. -Athénaïs s’était plié à mes exigences de liberté, elle m’avait accordé une dernière danse et une révérence théâtrale avant de disparaitre dans la foule inconnue. Je me sentais seul, mais je n’osais pas plaindre mon destin. Quelque part, je revivais mes longs exodes spirituels ; la tristesse était la plus belle source d’inspiration au monde. Je crispai mes doigts autour de ma plaie suintante avant de quitter la salle de bain.
Je fis quelques enjambées dans le long couloir impérial. L’air humide était porteur d’allégresse et de renouveau. Je fis le tour sur les portraits des grands monarques du pays avant de laisser mon regard se balader dans l’immense palais et son architecture singulière. J’avais déjà visité des châteaux en France et un peu partout en Europe, mais le raffinement de ces lieux et la beauté de ses murs était une vraie fascination. Je souris en me postant en face de l’énorme baie vitrée, devant les buissons et les roseraies fleuris en toute circonstance ; malgré le froid et la neige. Mes cils battaient, captivés par les jardins du domaine et le cœur de la fontaine glacée. Il y’ avait longtemps que je n’avais pas pris le temps d’observer la nature, je regrettais mes penchants pour la frénésie, et la poésie. Je regrettais tout ce temps perdu à aspirer à la perfection. J’haussai les épaules avant de me retourner pour croiser Samantha. Je refusais de me l’avouer mais elle était d’une beauté captivante, l’éclat terni de ses iris contrastait avec les dorures de sa robe et de ses bijoux – et c’était justement ces nuances mélancoliques qui la rendaient aussi magnifique. Samantha, était comme moi, elle avait le bonheur triste et le cœur en miettes. Elle devait se sentir étrangère dans une telle ambiance, mais elle se trompait. Parmi les royautés, il y’ avait bien plus de tristesses que de lumières. « Pas que de Rhys à vrai dire. » Répondit-elle sans le moindre sourire. Je sentais une pointe de lassitude traverser sa voix, et je ne pu m’empêcher de me pencher discrètement, humant son parfum ; mélange de fragrances boisées et sucrées. « Ne me dis pas que tu m’évites aussi, tu me ferais trop d’honneur. Tu connais mon égo démesuré et mes interprétations loufoques. » Soufflai-je en crispant la mâchoire. C’était notre première rencontre depuis la rupture, et aussi affligeant que cela puisse paraitre, je réalisai que sa présence dans ma vie me manquait. Après tout, Sam n’avait jamais été qu’une simple conquête à mes yeux. Nous avions appris à devenir amis avant de nous briser, et je la tenais secrètement en estime pour tout le réconfort et l’affection qu’elle m’avait accordée. Je crispai mes doigts autour des pans de ma veste en songeant à nos dernières paroles échangées. Je l’avais poussé à bout pour qu’elle puisse se dérober plus facilement de mon emprise. Ma colère, et très certainement mes sentiments pour elle, m’avaient rendu fébrile et indélicat. Mais je restais convaincu qu’elle avait besoin de me détester pendant quelques temps – c’était ma punition. « Merci. Toi en revanche tu as une mine affreuse.» Fit-elle remarquer. J’émis un rire mauvais sans la quitter des yeux, elle n’avait rien perdu de son répondant. « Laisse-moi deviner … Eugenia. » Ni de sa perspicacité d’ailleurs. Mon expression se figea, et je restai silencieux durant quelques instants, imprimant le son de sa voix dans mon esprit. Elle m’avait poussé vers mon premier amour auparavant, mais j’avais été trop lâche pour saisir ma chance. A présent j’étais démuni mais ce n’était pas plus mal. « Je ne sais pas. Peut-être que j’ai finalement réussi à échapper aux incantations de la sorcière. » M’amusai-je d’un air évasif. « Tu es très coquette ce soir mais tu ne m’en voudra pas si je défi les règles de bienséances - je t’inviterais certainement pas à danser. » Je souris, charmeur. « Mais je peux t’offrir à boire à la place. » J’ouvrais ma veste en grimaçant à cause de ma blessure, avant de sortir trois mignonnettes Whisky Glendronach. « C’est moins élégant qu’une coupe, mais aux grands maux, les grands moyens. » Je lui tendis une bouteille.
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(✰) message posté Dim 22 Fév 2015 - 18:27 par Invité
. YOU'VE NEVER CHANGED. AND NOW IT'S TOO LATE. I TRIED TO BE EVERYTHING FOR YOU, BUT I WASN'T. AND I LOST MY WAY TRYING TO HELP YOU FIND YOURSELF, BUT NOT ANYMORE. I JUST WANTED YOU. I WANTED TO BE CHOSEN . Avec le temps, Sam avait appris à quel point le coeur était un objet facilement influençable, et difficilement réparable. Elle avait joué avec tout au long de sa vie et aujourd’hui il n’en restait plus grand chose. Un trou dans sa poitrine, un vide qu’elle ne parvenait pas à combler. Le scotch et la colle ne suffisaient plus, elle avait poussé son coeur trop loin et aujourd’hui elle ne le sentait plus. Elle était devenue cette femme faite de glace qui ne ressentait plus, ou du moins, ne voulait plus ressentir. Elle chassait les sentiments, enterrait les émotions. Elle avait déjà tant souffert, son corps disait stop. Il était temps d’arrêter. Temps de renoncer. Elle se laissait aller au plaisir de ne rien ressentir, et pour le moment c’était suffisant. La brune savait qu’elle ne pourrait pas vivre une vie ainsi, mais c’était la seule chose qui la rassurait pour l’instant. La peine avait passé, la douleur s’était atténuée, et à présent elle s’évertuait à maintenir cet état proche du néant sentimental. C’était un état qui ne la dérangeait pas, elle finissait par s’y accommoder. Ne rien ressentir était mieux que d’avoir mal. C’était ce qu’elle s’était promis, mais les traits de Julian sous ses yeux l’avait frappé en plein coeur, comme une vieille blessure qui cicatrisait mal. Elle cicatrisait, au moins. Mais moins vite que la brune ne l’avait espéré. Il était apparu comme le diable au milieu de la pièce et son souffle s’était coupé, ses rêves envolé. Elle revivait leurs derniers instants, la dureté de ses paroles, la fraicheur de ses regards. Il l’avait abandonné une seconde fois et elle s’était retrouvée seule au milieu d’un millier de personnes. Il l’avait brisé deux fois, et elle le lui pardonnait. Elle lui pardonnait ses fautes, ses mots, parce qu’il n’y avait rien d’autre à faire. Il n’était coupable que d’en aimer une autre, et elle avait cherché cet amour en vain. Elle marchait dans les longs couloirs, le manque d’air se faisant de plus en plus pressant. Sa robe était comme une prison dont elle ne parvenait pas à se libérer. Elle s’appuyait contre l’un des murs frais du couloir, reprenant peu à peu son souffle. Elle posait une main sur son ventre avant de réouvrir ses yeux océans. Le visage de Julian se dessinait face à elle et la brune ne voyait aucune issue. Elle était condamnée à l’avoir dans sa vie, il était temps de l’accepter. « Ne me dis pas que tu m’évites aussi, tu me ferais trop d’honneur. Tu connais mon égo démesuré et mes interprétations loufoques. » Le mur frais n’avait plus aucun attrait et sa peau la brûlait. Elle voulait tenir, être fière, ne pas céder. Pas face à lui. Ses sourcils étaient froncés mais la colère s’apaisait. Sa voix lui parvenait tel un lointain écho, celui de leur histoire passée, une histoire enterrée. « Je les connais trop bien, malheureusement. » Son ton était sec et sa voix ne cillait pas. C’était une autre histoire pour son corps. Sa peau s’échauffait et ses jambes se faisaient lourdes. Mais elle ne perdait pas la face ; il ne pouvait pas gagner à chaque fois. Et puis elle remarqua son regard. Il était vide, absent, comme si ses yeux criaient à eux-seuls une lente complainte. C’était vrai, elle le connaissait trop bien. Elle connaissait ce regard, ce malheur, en connaissait la cause. Un fardeau qu’elle avait autrefois partagé avec lui. Elle prononçait le prénom de son malheur, et le visage de Julian se figea. Elle touchait un point sensible, leur point sensible. « Je ne sais pas. Peut-être que j’ai finalement réussi à échapper aux incantations de la sorcière. » Elle n’en croyait pas un mot mais silencieusement, elle l’espérait. Pas pour elle-même, ni pour le plaisir de le savoir mal, mais simplement parce qu’il méritait mieux qu’un amour à sens unique. Malgré tout, elle le pensait encore. Elle se contenta d’un pâle sourire tout en regardant le fond du couloir. La fête battait toujours son plein et ils étaient tous les deux en retrait. « Tu es très coquette ce soir mais tu ne m’en voudra pas si je défi les règles de bienséances - je t’inviterais certainement pas à danser. » Il lui souriait et elle haussa un sourcil, feignant l’intérêt. Il n’avait rien perdu de ses habitudes. « Ce n’est pas comme si tu étais bon danseur. » Elle le taquinait, après tout ils pouvaient bien baisser les armes un court instant. « Mais je peux t’offrir à boire à la place. » Il sortit trois petites fioles de whisky de sa veste, et elle n’en fut même pas étonnée. Elle se mordit la lèvre inférieure, elle pour qui l’alcool devenait un problème. Pour sa soeur elle voulait refuser, pour elle elle voulait s’améliorer. « C’est moins élégant qu’une coupe, mais aux grands maux, les grands moyens. » Il lui tendait une bouteille et elle mit un temps fou à se décider, avant de finalement attraper la fiole qu’il lui tendait. « Il n’y a jamais vraiment eu d’élégance entre nous de toute façon. » Elle appuyait son regard dans le sien tout en débouchant la bouteille. Sans le quitter des yeux, elle trinquait dans la sienne et avala une première gorgée de whisky qui lui piqua à peine la gorge. L’habitude surement. Elle finit par décoller son dos du mur et passa tout près de Julian -elle n’avait pas perdu son côté tentatrice non plus- avant de le dépasser et découvrir le jardin au bout du couloir. Elle but autre gorgée du breuvage avant de descendre de ses hauts talons et de les jeter plus loin. Elle ne se souciait de rien, et elle finit par rejeter ses boucles brunes dans son dos pour regarder son premier amour. « Bon alors, tu viens ? »
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(✰) message posté Jeu 26 Mar 2015 - 20:48 par Invité
“ The wrongdoer is more unfortunate than the man wronged. Evil people once suffered too much . I realised I was afraid of loving beyond power.” ✻ Etais-ce une erreur ou un signe du destin ? Je la regardais avec mes yeux profonds sans parvenir à trouver une explication à nos étoiles contraires. Samantha était si belle et pourtant si inatteignable. Je pouvais sentir son cœur de glace s’enfermer dans la solitude. Elle me devait certainement ses plus grandes peines en amour. J’étais le pire de tous et pourtant je l’estimais secrètement au-delà des espérances. Le mur qui surplombait sa silhouette lui donnait l’apparence d’une œuvre d’art et je me surpris à penser que sa beauté sauvage pouvait finalement se conformer à l’inertie de l’art. Tu vois, tu es aussi précieuse et émouvante que tous les autres. Je retins ma respiration en comptant les souffles du vent qui nous entourait. C’était étrange mais je croisais son chemin à chaque fois que ma frustration était extrême, comme si elle était l’incarnation d’une sauveuse ou qu’elle avait le don de panser toutes mes blessures. Foutaises ! Je me redressai avec nonchalance en gardant la même expression figée sur le visage. «Je les connais trop bien, malheureusement. » Répondit-elle dans un murmure. Elle devait certainement regretter d’avoir exploré les méandres de mon âme, et pourtant elle ne prenait pas la fuite. Elle était toujours là, plus resplendissante que jamais – prisonnière de la coupe moulante de sa longue robe de princesse. Ses longues boucles brunes voilaient ses yeux abyssaux d’une élégance qui lui ceignait parfaitement. « Malheureusement … » Répétai-je après elle. Le son de ma voix grave raisonnait comme une note de musique orpheline dans le long couloir. Nous étions seuls face aux souvenirs, et je me réjouissais de cette trêve intemporelle. Je ne savais pas si j’avais encore le droit de la troubler, en tout cas, elle s’amusait à pointer mes faiblesses sans que je ne puisse résister à la tentation d’exploser de colère. Elle connaissait l’étendue de ma misère. Elle savait plus que qui conque que le chaos que je portais était infini. Je vivais constamment avec l’impression de ne pas me suffire à moi-même. Eugenia était paraplégique et je ne pouvais rien y faire. Je connaissais ce sentiment d’injustice indicible d’avoir aimé une personne qui aurait pu, si le destin n’était pas aussi mesquin, m’aimer en retour. Elle m’a aimé en retour. Je me mordis la lèvre inférieure. Les sifflements de ma conscience m’interrompaient sans cesse. Je serrais les poings en essayant de calmer mes ardeurs. «Ce n’est pas comme si tu étais bon danseur.» Je déglutis en riant doucement à sa moquerie. Je n’étais pas un danseur exemplaire mais je me débrouillais avec un genou défaillant. Ma langue claqua contre mon palais tandis que je me penchais dangereusement vers elle. « Je serais tenté de te contredire. » J’arquai un sourcil avant de m’éloigner avec lenteur. L’alliance de feu qui nous unissait menaçait de consumer le fil de mes pensées, et sans doute est-ce là toute la contradiction et l’ironie de nos échanges. Elle me détestait sur un fond de douceur brûlante, et je lui rendais son dépit afin de ne pas sombrer dans la folie. Elle saisit une mignonnette en me regardant avec insistance. C’était un mélange de passion et de folie, de tristesse et de d’exaspération. «Il n’y a jamais vraiment eu d’élégance entre nous de toute façon. » J’acquiesçai de la tête en imitant ses gestes, mais contrairement à elle, je bu ma fiole d’une traite. La liqueur empoisonnée circulait le long de mon œsophage avant de se longer au creux de mes flancs. Eugenia avait embrassé Lior, bordel ! Je fermais les yeux afin de chasser cette vision d’horreur. Sam se détacha de son perchoir afin de flotter comme une légère brise sous mon nez. Elle s’éloigna vers les grands jardins du palace avant de se retourner vers moi. Bon alors, tu viens ?» Elle avait retiré ses chaussures et voguait au loin comme une âme libertine. J’enviais son insouciance et son éloquence de vénale. Je la rejoignis comme un automate posant un pied devant l’autre dans une lenteur maladive. Elle me propulsait dans une réalité parallèle, à mille lieux des mensonges et des trahisons. Je souris en fauchant une bouteille de champagne disposée sur l’un des nombreux plateaux destinés aux invités. Je m’avançai sur la pelouse la bouche dégoulinant d’alcool et de frénésie, puis je la pris par le bras. « Alors je viens. » Déclarai-je avant d’éclater de rire. Nous n’avions pas été complices depuis des mois mais je n’avais pas encore réalisé à quel point son absence m’avait pesé. C’était la première fois depuis notre rupture que je la retrouvais enfin. Il y avait deux moments particuliers dans la vie ; celui où l’on distingue les choses précieuses et magnifiques, et celui où on tend les bras afin de les saisir à n’importe quel prix. J’étais le genre d’homme à distinguer sans jamais rien acquérir. J’avais perdu toutes mes petites amies pour une raison qui me dépassait encore, probablement l’effroyable maladie de l’esprit poète comme le disait Artaud. J’altérais ma soif afin d’oublier le passé et ses ratures, et lorsque l’ivresse aura enfin pris tout le contrôle sur mon corps, je consentirais peut-être à fixer l’une des formes de l’amour aussi imparfaite soit-elle. « Tu n’as pas le droit de courir. » Murmurai-je en la lâchant. Tu ne peux pas t’éloigner car je sais que je ne pourrais pas m’élancer à ta recherche. Ce soir, je ne veux pas que tu parles. Samantha Bower-Oswald, soyons seuls à deux.