Brockwell Park | Une histoire de chiens...

« Brockwell Park » Jeremiah & Sloan

Quand deux jeunes hommes promènent leurs chiens aussi tarés l'un que l'autre, voici ce que ça donne. Attention, âmes sensibles s'abstenir.

« Kiba ! Bon sang, salop'rie de corniaud, veux-tu bien laisser la dame tranquille ? »

La jeune victime de l'akita inu hurlait, presque en larmes, s'accrochant éperdument à un arbre et secouant sa jambe dans tous les sens. Rien à faire. Le chien japonais se trémoussait l'arrière-train, en avant, en arrière, en avant, en arrière, sourd au supplice bruyant de la demoiselle. Son joli membre rouge et boursouflé dégainé et se frottant allègrement sur son mollet nu. La pauvre en resterait traumatisée... Cool. Kiba lui faisait gagner des nouveaux patients. Il devrait peut-être lui donner sa carte de visite, au cas où... ?

« Bon, maintenant, ça-suf-fit ! »

Sloan agrippa à deux mains le collier de son taré de chien et tira de toutes ses forces. L'animal lâcha enfin prise et, une fois loin de la fille, rattaché en laisse, il se mit à battre la queue, langue pendue, le regard sombre illuminé d'une joyeuse perversité. Il semblait ravi. On ne pouvait pas en dire autant de la jeune femme. Elle abandonna l'arbre, le souffle court, jeta une œillade effarée à Kiba avant de lever les yeux sur son maître. Là, des éclairs vinrent frapper durement Sloan, qui aurait presque pu croire mourir sur place. Des yeux-revolver, ça vous dit quelque chose ?

« Pauvre con ! » lâcha la fille en jupette, avant de s'éloigner à grands pas pressés, un filet blanchâtre glissant à partir de son genou droit. Répugnant.

Sloan avait l'habitude de ce genre de scènes. Enfin, pas l'habitude, vu que c'était assez récent, en fait. Depuis que Kiba avait la possibilité d'avoir une progéniture, il ne se sentait plus de vivre et étalait sa sexualité à peu près partout, tant que cela vivait. Quoique, même quand ça n'avait pas de vie, il essayait de niquer le... le truc, la chose, le machin qui était à sa portée. Depuis quand un chien pouvait-il s'accoupler à un divan ? Sloan n'en savait rien. Il ne comprenait pas trop ce que Kiba avait dans son petit crâne de clébard. Il était psy pour humains, pas pour les chiens. En désespoir de cause, il avait appris à ignorer les insultes des gens dans la rue, victimes de l'appétit sexuel de son chien. Il avait tout de même pris une précaution non négligeable : il ne lâchait plus Kiba dans SON quartier, mais bien plus loin, histoire de ne pas croiser de proches voisins. Et ne pas avoir, ainsi, des ennuis. Il n'allait jamais dans le même parc. Ce n'était pas si mal, ça lui évitait d'avoir une routine ennuyeuse mais aussi de recroiser les mêmes personnes. Il n'allait pas s'en plaindre, du coup. Voilà un peu la philosophie de Sloan : toujours voir le positif des choses. Et relativiser. Il aurait pu avoir un chien mangeurs d'enfants...

Kiba tenu en laisse quelques mètres, Sloan décida de le relâcher. Il fallait bien que ce cochon de première se défoule, quand même. Kiba se mit à renifler partout, comme un forcené, à faire des pipi tous les mètres, bref, à faire sa vie de chien qui découvrait qu'il avait des couilles et qu'il en était sacrément fier. Au loin, Sloan vit un autre homme arriver, avec également un chien, tout blanc. Il allait rattacher Kiba, pour éviter un énième problème, mais cet abruti d'animal avait déjà foncé vers l'autre chien... Sloan jura et se mit aussitôt à courir après Kiba, tout en criant son nom, en vain.