Y’a des jours sans. Comme celui là où il faut croire que tout va mal : t’as mal dormi à cause d’une sacré gueule de bois, tu ne t’es pas réveillée au moment venu mais deux bonnes heures plus tard, ni du bon pied tant que nous y sommes. T’as fini pas réussir à être prête. Plus qu’une tâche et tu pouvais filer travailler l’esprit tranquille. Une fois la porte fermée, tu n’as pas besoin de faire dix mètres pour que les ennuis commencent. La petite bestiole qui est à tes pieds – et que tu adores en temps normal – ne cesse de japper comme à son habitude avant de tirer comme une brute sur sa laisse pour finalement partir comme une voleuse cherchant à fuir quelque chose qui t’échappe.
« Juuuuuulieeeeeeeeeeeeeeet ! »
Oui, hurler après elle est ton premier réflexe avant de te mettre à la poursuivre : une mère dont la fille vient de faire une sacré connerie. Malheureusement, elle ne semble pas y prêter la moindre attention et continue sa course folle. En temps normal, ce n’est pas cette petite saucisse sur pattes qui pourrait te battre au jeu de la course poursuite. Parce que déjà, elle se dandine plus de façon « rapide » (et c’est un grand mot déjà) que de foncer telle une flèche et qu’en plus, elle n’était pas une adepte du skate contrairement à ce que l’on peut apercevoir sur des vidéos de Youtube… Mais voilà, fallait pas compter sur tes talons pour arranger les choses. D’ailleurs, il ne manquerait plus qu’une jupe crayon au tableau, vous savez du genre plutôt étroite, pour couronner le tout. Toute cette histoire parce que tu étais pressée et qu’il fallait tout de même sortir mademoiselle avant de filer au bureau. Tu adores cette petite (peste), mais là tu ne sais pas quelle mouche l’a piquée ce matin, ce qui t’exaspère. T’as cette allure de folle derrière son chien, faisant tout son possible afin de ne pas te faire distancer tout en restant un tant soit peu descente « vestimentairement » parlant. Du moins, c’est ce que les regards de certains passants te laissent croire. Au bout d’une centaine de mètres, tu cèdes à la douleur de ta voute plantaire. Non, tu ne comptes pas abandonner Juliet de la sorte, mais tu préfères retrouver un peu de confort en terminant ta course escarpins aux mains et pieds nus sur le bitume du trottoir.
Ce n’est que cinq minutes et un croisement de rue plus tard que ce cirque matinal prend fin. Tu es presque essoufflée pendant que cette chère Juliet est toute contente aux pieds d’un parfait inconnu. Maintenant que tu es d’ores et déjà bien en retard comme il se doit, tu décides de prendre ton temps, notant dans un coin de ta tête cette obligation de prévenir qui de droit (prétextant un début de rhume ou quelque chose comme ça) une fois sur le chemin du bureau. Au passage, tu profites de l’occasion pour remettre tes escarpins, ainsi que tes quelques mèches rebelles afin d’avoir l’air un brin plus présentable.
« Toutes mes excuses si elle vous a bousculé ou je ne sais quoi. »
À vrai dire, la demoiselle paraît bien plus paisible que toute à l’heure : calmée, elle s’est même mise à faire ces bruits étranges typique des bouledogues français. Tu lèves les yeux au ciel, alors qu’elle te regarde avec ces grands yeux d’heureuse et sa langue qui pendouille. C’est à se demander qui est la plus soumise de vous deux.