Dirty old town ♧ libre

Samedi 17 mars 2018

Je pensais pas revenir ici. Quand j'ai emménagé à Londres pour tourner la page l'an dernier, j'avais clairement pas dans l'idée de retourner tout de suite sur la terre de mes ancêtres. Enfin dans l'idée... Je crois pas que ma famille soit originaire de Dublin, et mes voyages d'enfance ici ne me laissent que des souvenirs trop flous. Ça n'a pas vraiment d'importance, de toute façon, je ne suis pas là pour un retour aux sources, simplement pour changer d'air et fêter la Saint Patrick comme il se doit. Et il faut bien avouer que l'ambiance festive et la bonne humeur générale a tendance à être communicative, même pour moi.

Je me suis baladée toute la journée dans les rues de la ville, un sourire insouciant sur les lèvres. Il y a une éternité que je ne m'étais pas sentie comme ça, presque sereine, mais je ne me fais aucune illusion quant au fait que ça ne soit que temporaire. Quand je rentrerai chez moi, je sais bien que l'euphorie du moment s'estompera. J'en profite cependant tant qu'il m'est donné de le faire, et je me laisse emporter par ce groupe de femmes qui me grime le visage, un shamrock sur la joue. Je me maquille quasiment jamais et j'ai envie de dire quand je vois mon reflet, les remercie chaleureusement - une fois n'est pas coutume là non plus - avant de poursuivre ma route.

Le soir commence à teinter le ciel de lavande malgré le gris nuageux quand je pénètre dans un pub au petit bonheur la chance, me faufile jusqu'au comptoir avec l'aide d'un jeune homme brun qui rejoint visiblement son petit-ami dans la foulée, et je commande une bière brune, avant de me retourner pour observer la foule, l'atmosphère effervescente de ce jour de fête.

- Vous n'êtes pas d'ici, n'est-ce pas ? me demande mon bouclier humain de l'entrée.

J'apprendrai plus tard qu'il est de retour aux sources, fait découvrir à son ami son pays. Je suis surprise de le voir raisonnable, se contentant de softs alors que je descends doucement ma pinte mais je ne pose pas de question.

- J'ai des origines irlandaises mais non en effet je ne suis que de passage.

On s'est trouvé un drôle de point commun dans le shamrock d'argent pendant à nos cous, et j'ai fini par prendre leurs numéros, leur promettant sans savoir si je m'y tiendrai réellement de les recontacter plus tard. Ciarán et Tristan ont fini par prendre congé, et je me disais que j'allais rentrer à mon hôtel, incapable de déterminer le nombre de verre que j'avais payés et vidés, quand ma maladresse légendaire couplée à mon taux d'alcoolémie m'a jetée dans les bras d'un(e) inconnue. Et le contenu de ma dernière pinte a fini sur mon pull aux couleurs de l'Irlande et mon jean délavé... ainsi que sur l'inconnu(e)...

Vendredi 20 juillet 2018

Je suis venue ici il y a près de quatre mois, et je sais pas trop ce que j'espère en revenant dans les mêmes rues, le même hôtel, et ce soir, en me rendant au même bar. Retrouver le petit couple gay pour discuter avec eux comme si on se connaissait depuis toujours ? M'excuser à nouveau face à la personne sur laquelle j'avais renversé mon verre à la Saint-Patrick ? Ou retrouver par hasard l'écrivain de Londres dans un autre pub, dans une autre ville comme s'il était justement écrit qu'on se retrouverait ainsi attablés ? Aucune idée. Je me suis juste installée à une table un peu dans un coin, une pinte de bière rousse à la main en observant les allées et venues dans ce pub, une fois de plus. Les tenues sont plus estivales que la fois précédente, l'ambiance peut-être un peu plus décontractée comme les vacances d'été sont bien entamées. Je ne saurais pas trop dire ce qui change, je ne me sens simplement pas tout à fait dans la même ambiance. Et peut-être un peu trop seule, aussi, et un soupir m'échappe malgré moi...