"Fermeture" de London Calling
Après cinq années sur la toile, London Calling ferme ses portes. Toutes les infos par ici Steady eyes watching still ~ Darisolde 2979874845 Steady eyes watching still ~ Darisolde 1973890357
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Steady eyes watching still ~ Darisolde

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() message posté Mer 22 Mar 2017 - 21:23 par Invité
« Ca ferra un total de combien ?
-Tant.
-Tant ?
-Tant.
-Bon... Après une demi-seconde d'hésitation, Je peux payer en espèce.
-On n'accepte pas l'espèce pour un montant de tant, sauf sur présentation d'une carte d'identité. Il disait probablement ça parce que l'accent persan de Darius lui faisait peur.
-Oh. Darius sorti son passeport iranien de sa poche. C'était le seul document d'identité qu'il avait. Bordeaux aux écritures dorées, il mélangeait savamment l'anglais et le persan et contenait photo, tampons et empreintes digitales.
-Oh. Après une demi-seconde d'hésitation, Très bien, » fit le vendeur, qui décida que finalement il ferrait sans, mais désormais persuadé d'avoir à faire à un terroriste. Il notera d'ailleurs le nom de Darius Iqbal sur un post-it qu'il placera a côté de son écran, au cas où.

Quelques minutes plus tard, Darius sortait enfin du magasin, sa nouvelle acquisition entre les mains. Un smartphone ! Enfin ! Et avec une carte SIM prépayée en plus ! Et 20Go d'Internet, la totale !

On n'imagine plus ce que c'est de vivre sans téléphone, de ne pas avoir accès aux savoirs du monde entier rien qu'en sortant un petit objet rectangulaire de sa poche. Et Darius avait souffert de cela pendant un ou deux jours après son arrivée, et pendant les quatre jours qui avaient constitué son voyage jusqu'à Londres. Quatre jours perdus, gâchés, abandonnés à ne rien faire que se plaindre, geindre, gémir et se cacher. Compter ses sous, les surveiller, ne surtout pas les perdre, et dormir par terre avec son sac de vêtements comme unique oreiller, dans la peur que la police n'arrive récupérer le fugitif et le couper une nouvelle fois dans son envol.

Ce qui avait le plus manqué à Darius, et qui avait le plus joué sur son moral, c'était sa musique. Il ne lui restaient que des bruits de fonds, les gens qui discutent, les annonces à répétition, et l'absence de fond sonore agréable. On dit que la peinture occupe l'espace, et il s'avère que la musique occupe le temps. Ainsi, la première chose que Darius fit en sortant du magasin, c'était de brancher les écouteurs qu'il venait d'avoir avec son téléphone, filer sur Youtube écouter la chanson qu'il s'était chanté à lui-même pendant cette semaine terrible. Baleen, de The Swan Thief*. Il en avait besoin, il se reconnaissait dans cette chanson. On s'y plaignait, on avait peur, on avait besoin d'aide, on demandait à l'aide, et la chanson s'arrêtait là parce que la vie s'arrêtait souvent là. Et comme la chanson se terminait, on passait à autre chose et on demandait autre chose à quelqu'un d'autre.

Mais pour Darius la chanson n'était pas là de s'arrêter. C'était le premier son agréable après celui de l'eau de la douche qui venait bercer ses oreilles. Alors, dés que ces dernières notes résolues, agressives mais pas plus débrouillardes l'abandonnaient, il appuyait sur « Replay », et la routine recommençait. C'était parce que lui non plus n'était pas prêt de sortir de l'embarras dans lequel il se trouvait, et embarras était un bien piètre mot. Tant que Darius n'aurait pas un emploi stable, et un véritable logement, il ne se considérerait pas comme sorti de l'embarras. Son enveloppe d'argent s'épuisait de jour en jour, il fallait y remédier.

Cependant, aujourd'hui, c'était repos. Darius avait encore les yeux rougis par la fatigue et gonflés par toutes les larmes silencieuses qui y étaient passées, il voulait rien faire d'autre que se rouler en boule dans son lit et attendre que son tour vienne, mais puisque Dieu en avait décidé autrement il faudrait faire avec.
La prochaine étape, c'était un magasin de multimédia, n'importe lequel. Audiophile qu'il était, Darius ne pouvait se contenter de ses écouteurs de piètre qualité qui déformaient le son qui lui avait tant manqué.

Enfin cela ne l'empêchait pas d'appuyer une fois de plus sur « Replay » sur son téléphone, toujours sur la même vidéo Yout-...

Un impact, des cheveux roux libérés au vent, une femme seule qui venait de percuter Darius.
De qui était-ce la faute ? Darius n'avait pas vraiment regardé où il marchait, les yeux trop fermés pour pouvoir regarder son nouveau téléphone et ce qui se trouvait devant lui. Donc c'était un peu de sa faute. Mais en face, il avait une femme, seule.  Elle n'avait rien à faire seule. Et là c'était bien l'iranien en Darius qui se remit à penser, à parler, avec ses façons d'iranien et ses coutumes persanes si différentes des occidentales.
« Excusez-moi. Pure formule de politesse, mâchée par un accent exotique, habitude prise depuis longtemps, mais Darius n'était pas vraiment désolé. Après quelques secondes de silence, coupant probablement la parole de cette inconnue sans s'en inquiéter, Darius repris. Est-ce que vous allez bien ? Vous vous êtes perdue ? Vous êtes seule ? »
En Iran, une femme n'avait pas le droit de se déplacer seule. C'était étrange, mais c'était comme cela. Et c'était une habitude bien ancrée chez tout le monde, hommes comme femmes, jeunes ou non. Ainsi, lorsque Darius, en manque de sommeil et les yeux pas vraiment en face des trous percuta de plein fouet cette jeune femme seule, il ne put s'empêcher d'intervenir, selon une vieille habitude parmi celles qui devaient disparaître. Mais il ne faudrait pas que cette jeune femme se fasse arrêter parce qu'elle avait perdu l'homme qui l'escortait.
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() message posté Dim 2 Avr 2017 - 10:59 par Invité
Steady eyes watching still
Darius & Isolde

Marcher encore. Marcher toujours. Ses pas la guident, l’enlisent dans le fourmillement incessant de cette ville qui jamais ne dort et jamais n’accorde de répit aux indigents qui cherchent à l’apprivoiser. Il y a une forme de lassitude dans la mesure de ses pas qui foulent le sol. Elle s’est détachée de son assurance habituelle, de cette droiture qui maintenait élégamment son dos comme si sa tête était suspendue au bout d’un fil invisible. La canne qu’elle traîne partout dans son sillage, devenue comme une extension de son bras dès lors qu’elle doit se déplacer dans un endroit qu’elle ne connaît pas par cœur, cogne à droite, à gauche, marquant pierres et trottoirs de son rythme résolu. La tension qui émane de ses traits et de son corps la transfigure quelque peu, marque une ridule indistincte sur son front, entre ses sourcils. Si elle pouvait voir encore elle chercherait à se méfier, de tous ceux qui veulent la blesser. Mais les journalistes ne sont jamais revenus. Peut-être y-en-t-il un ou deux qui se sont aventuré dans la librairie en faisant mine de chercher un ouvrage quelconque, mais ils n’ont pas poussé le vice à l’interpeller comme l’avait fait Johnson, ce détestable personnage. Ils n’ont pas osé. Ils n’ont pas pu. Et leur quotidien a presque retrouvé sa saveur d’antan. Presque, parce que c’était sans compter les conséquences. Celles de l’absence, de la retraite, des doutes, des promesses, des injures, des douceurs aussi. Isolde avait l’impression que son existence ne tenait plus qu’à un fil de soie sur lequel elle devait marcher, funambule qui tremble au-dessus du précipice et n’attend qu’un signe pour y plonger toute entière. La fatigue et les pressions s’accumulaient tant et si bien qu’elle ne savait plus à quel rempart infaillible se raccrocher. Si le « scandale » avait été étouffé avant de prendre trop d’ampleur, cela n’avait pas empêché à son nom d’apparaître momentanément sur la toile, les bruits parvenant à courir jusqu’aux oreilles de sa famille (surtout sa mère, qui avait la fâcheuse manie de jouer les Sherlock Holmes dès lors qu’une sombre affaire touchait ses progénitures), et surtout de son éditeur (qui n’avait pas manqué de lui faire quelques remarques cocasses sur le sujet). Sur le papier, ils avaient fait d’elle une caricature ignoble : Isolde Swanson Mackenzie, écrivain presque de renom dans la sphère des moins de seize ans, mère a priori honorable, aveugle, personnage dégoulinant qui s’est entiché d’un rockeur à la réputation détestable. Quand elle y repensait cela la convulsait d’horreur, de se dire qu’ils avaient eu l’audace de l’enfermer dans tous les carcans qu’elle avait toujours mis un point d’honneur à rejeter en bloc. Ils avaient poussé l’injure jusqu’à titrer l’article « L’amour est aveugle », rendant l’humiliation absolue, presque larmoyante. « Ce garçon est un fléau. Un fléau. Il te détruira toi aussi. Il ne sait faire que cela ! » lui avait répété sa mère, lorsque outrée, elle lui avait téléphoné quelques jours plus tôt après être tombée (comme par miracle, n’est-ce pas ?) sur l’article en question. Isolde s’était bien gardée de lui formuler le fond de sa pensée pour ne pas paraître ingrate, mais elle n’en avait pas pensé moins. Et pourtant, au fond d’elle, une voix lui avait murmuré qu’elle avait peut-être raison … Qu’elle ferait mieux de l’écouter et de fuir une bonne fois pour toute, maintenant. Mais il était trop tard pour reculer à présent.

« Fhalbh ! » avait-elle juré dans un gaélique écossais guttural, ayant un mouvement de recul après que cet inconnu lui ait rentré dedans (à moins que ça n’ait été l’inverse, chose très plausible aussi). « Faites attention ! » Si plongée qu’elle était dans ses pensées, elle en avait oublié de se concentrer où elle mettait les pieds, avançant résolument en ligne droite sans forcément se soucier des autres passants. En général en voyant sa canne d’aveugle ils mettaient un point d’honneur à l’éviter. Quoiqu’il en soit à plusieurs reprises, Isolde cligna des yeux, comme pour s’assurer qu’elle n’avait rien. Elle avait lâché sa canne qui avait roulé  sur le côté, et désorientée qu’elle était à présent, c’est à la voix du distrait inconnu qu’elle se raccrocha. « A l’évidence je le suis oui. » Une pointe d’ironie teinta au fond de son timbre. Il n’y avait personne autour d’elle qui se souciait de son sort à part lui, signe qu’elle déambulait bien toute seule jusqu’alors. Chose qui avait l’air de le surprendre. Alors quoi, nous étions dans un pays libre, non ? « Je serais perdue seulement si vous ne m’aidez pas à retrouver ma canne … S’il vous plaît. » Humeur taciturne, voire sur la défensive, toute communication semblait tout à coup lui arracher les lèvres. C’était comme si elle avait été prise en traitre, ou en défaut. « Votre accent … D’où est-il ? Turquie … Iran peut-être ? » L’interrogea-t-elle, piquée au vif tout d’un coup dans sa curiosité naturelle. Elle reconnaissait les notes chatoyantes d’un accent oriental. Mais lequel en revanche ? Vaste question.




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() message posté Dim 9 Avr 2017 - 1:40 par Invité
Elle était donc bel et bien perdue. Son voile noir sur la tête, tombant en cascade sur l'intégralité de sa silhouette, ne laissait voir que son visage. Ses longs cils noirs, sa peau basanée, ses yeux noisette et sa mine inquiète. Elle n'avait rien à faire ici, surtout seule. Les rues de Téhéran n'étaient pas faites pour les femmes esseulées. Il n'y avait rien d'interdit là-dedans, c'était tout simplement trop dangereux. Comme toujours, il suffisait d'une mauvaise rencontre pour que tout tourne au drame.
Fort heureusement, Darius ne se considérait pas comme une mauvaise rencontre et avait toujours mis un point d'honneur à ce que l'on soit d'accord avec lui. Alors il demanda à la jeune femme, timide sous ses habits noirs alors que tant de jeunes femmes de son âge s'amusaient à se cacher sous leurs hijabs colorés, si elle cherchait quelque chose en particulier, si tout allait bien ou si elle était perdue.

« A l’évidence je le suis oui. » De l'ironie et probablement un peu d'irritation dans cette phrase lancée à celui qui avait le culot de nous rentrer dedans pour ensuite nous poser des questions idiotes. Non, quand on percute quelqu'un de plein fouet on est rarement d'humeur à jouer à ce genre de jeu. Mais Darius s'en voulait déjà suffisamment comme ça, ce n'était pas la peine d'en rajouter, il faisait déjà de son mieux. Ce n'était pas beaucoup, mais c'était de son mieux, et mieux que rien surtout. Au moins lui s'inquiétait pour elle, c'était déjà plus que ce que les autres daignaient bien faire.

Le Soleil partait déjà se cacher derrière les montagnes de Téhéran, et cette fille se déplaçait seule, un air inquiet sur le visage. Darius, lui, rentrait de chez Salim, il n'avait pas tellement eu envie d'en partir mais il devait rentrer chez ses parents. Ainsi, il comprenait la situation dans laquelle cette jeune femme se trouvait, parce qu'elle aussi devait se dépêcher de rentrer chez elle si elle ne voulait pas que son père ne lui tombe dessus. Oui, en Iran on peut avoir bien plus de vingt ans et toujours habiter chez ses parents. Et qui dit vivre sous leur toit dit surtout vivre sous leurs règles. Voilà pourquoi Darius, plein d'empathie, proposa à la jeune femme de la raccompagner chez elle, par pure galanterie.

« Je serais perdue seulement si vous ne m’aidez pas à retrouver ma canne … S’il vous plaît. » Comme c'était aisé de faire agir Darius par pure galanterie. Lui qui n'aimait même pas les femmes était bien trop compatissant envers celles-ci. Il lui suffisait donc d'avoir l'air gentille et en détresse, et voilà qu'il sautait à leur secours, pour elle comme pour les orphelins.
« Ah, heu... Ah oui elle est là » fit Darius lorsqu'il cherchait ce qui pourrait bien ressembler à une canne sur le sol, et « La voilà » articula-t-il ensuite quand il plaça la poignée de l'objet dans la main de la malvoyante en faisant bien attention que leurs peaux ne se touchent pas. C'était un des principes de la galanterie à la perse : on ne se touche pas. Ce fut toujours très important.

Alors, sans se toucher, à une distance raisonnable l'un de l'autre, Darius et cette inconnue tout de noir vêtue marchaient en direction de là où elle habitait. Ils n'empruntaient que des rues larges et bien éclairées, et parfois quelques voitures les croisaient ou les dépassaient. Ils n'habitaient pas loin l'un de l'autre, ce n'était donc même pas un gros détour pour Darius qui, tout souriant, discutait avec cette jeune fille.
Elle était belle, intelligente, ne parlait pas pour ne rien dire, en plus était le portrait craché de la sœur ou de la mère de Darius. Petite, les traits fins et strictement encadrés par les étoffes noires et pudiques qui ne laissaient surtout rien de trop apparaître, même pas une mèche rebelle, même pas une racine noire sur sa tempe, elle était taquine aussi, et ne ratait pas une occasion de remettre Darius à sa place.
« Tu t'es vu ? Avec des cheveux aussi longs c'est toi qui devrait porter le voile » faisait-elle, riant discrètement. Et à Darius de répondre qu'elle était probablement jalouse parce que de eux deux, c'était lui qui les avaient les plus longs et qu'ils devraient comparer, voir qui de eux deux gagnerait ce duel capillaire.
Elle ne répondit pas tout de suite, parce que même si Darius n'y avait pas pensé parce qu'elle lui rappelait trop sa sœur, tous deux savaient bien ce que cela voulait dire pour une femme, de montrer ses cheveux à un homme. Même Darius n'avait plus vu ceux de sa sœur depuis sa majorité. C'était directement s'introduire dans son intimité que de proposer ce genre de chose.

Et c'était directement s'introduire dans son intimité que de poser ce genre de questions. « Ah, heu, Iran oui, c'est ça... Comment avez-vous fait pour deviner si facilement ? »
D'habitude, les gens avaient bien plus de mal à deviner. Très souvent, on essayait tous les pays de la région avant de tomber sur le bon, mais elle, cette femme de toute évidence aveugle, avait vu juste. Elle était perspicace, et c'était ça l'aiguille qui s'insinuerait sous sa peau, dans ses songes et ses mensonges afin de trouver ce qu'un iranien avait bien pu faire pour s'expatrier dans une telle urgence, un tel état, à Londres. Il n'existe aucune organisation qui puisse se protéger d'un grain de sable, et ce grain de sable semblait avoir une chevelure de feu et besoin d'une canne pour avancer.

Tout était devenu terriblement gênant. Avec cette inconnue Darius avait ouvert une porte qu'il était censé garder fermée, pour la simple et bonne raison qu'il n'aimait pas les femmes. Mais ça, il ne pouvait pas explicitement le dire pour barrer cette porte, parce qu'à Téhéran cela ne fonctionnerait pas. Fort heureusement, elle finit par en rire, et après seulement quelques minutes, ils arrivèrent devant sa maison. « Merci de m'avoir raccompagné, c'était gentil de ta part. Mais du coup je ne t'ai pas demandé. Comment tu t'appelles ? », Darius Iqbal répondit Darius Iqbal qui repartit une fois la porte d'entrée fermée, se disant que finalement il avait bien fait de venir en aide à cette jeune femme, parce que même s'il l'avait dragué, cela n'aurait jamais de véritable conséquence puisqu'ils ne se reverraient jamais.

Et malgré tout, Darius ne s'enfuirait pas de cette femme qui semblait être partie pour en savoir un peu trop sur lui. C'était clairement parce qu'elle était aveugle, qu'elle avait certainement besoin d'aide et que chaque coup de main comptait dans ce genre de situation. C'était un peu parce que Darius avait lui aussi besoin d'aide mais que personne ne pouvait l'aider. Alors, faire comme si tout allait bien et essayer d'aider les autres, c'était un peu un moyen de se sauver soi-même. Mais c'était surtout parce que la dernière fois qu'il avait rencontrée une inconnue dans le besoin, et qu'il avait été en capacité de l'aider, il ne l'avait pas fait.

« Vous... Vous voulez aller quelque part ? Vous voulez que je vous accompagne ? »
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() message posté Sam 15 Avr 2017 - 12:37 par Invité
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Darius & Isolde

La tête ailleurs, perdue dans le brouillard épais qui la tapisse, le corps ancré là pourtant alors que quelques bribes dans son esprit se raccrochent aux intonations chaleureuses de la voix grave de cet interlocuteur sans visage. Ils ont tous cessé de lui apparaître tels qu’ils étaient, faits de traits anguleux, de peaux libidineuses, de nez aquilins ou de paupières tombantes. Aujourd’hui ils ne sont plus que des ombres informes, tâches poisseuses qui se dessinent dans l’opacité de sa conscience qui oublie peu à peu les formes et reliefs de chaque chose. Passer de l’état de conscience à celui qui s’empare de l’esprit lorsqu’il divague a toujours tendance à la déstabiliser un peu, car dans sa condition il lui faut tout « voir », tout mémoriser du bout de cette canne infâme devenue indispensable, tout entendre pour ne pas perdre le fil du sillage qu’elle essaie de tracer. Trop de fois par le passé elle avait pris l’habitude de se montrer contemplative, laissant son esprit pérégriner dans sa tête, errer jusqu’à perdre tous ses repères du réel. Chaque fois qu’Isolde se laisse aller à ce penchant-là, cela n’a plus les mêmes conséquences. Elle se désoriente, ne sait plus où elle va ni ce qu’elle fait. Elle s’essouffle, s’époumone, pensant pouvoir s’échapper de sa prison de chaire noircie par le chagrin et l’aigreur. Les lueurs renaissantes s’affadissent dans sa tête au gré de ses humeurs taciturnes. Et de funambule qui avance sur un fil ténu, elle devient une ballerine qui ne sait plus bien sur quel pied il lui faudra danser. L’irritation qui transparaît dans le timbre de sa voix trahi la fragilité de ses nerfs à fleur de peau : la moindre incartade, remarque ou spontanéité l’atteint avec une précision chirurgicale, et comme un chat qui sent la menace en filigrane, c’est tous poils dressés et griffes au dehors qu’elle réagit, alors qu’au fond, il n’a pas mérité la froideur dont elle l’accable. De sa vie, de son quotidien, cet inconnu ne  sait rien. Et des doutes qui l’étreignent, il ne connaît pas l’issue non plus. Alors elle se rattrape malgré elle, stigmates de son éducation qui refont surface et la poussent à une politesse courtoise.

« Merci … C’est très aimable. » répond-elle sans savoir si elle le pense, ou si elle le feint. Dans tous les cas elle revêt l’apparence de la sincérité, et ses doigts se referment rapidement autour de l’objet de ses attentes. Par instinct plus que par habitude, elle tâtonne le bitume autour d’elle avec le bout de sa canne pour vérifier qu’elle n’a rien laissé tomber d’autre dans la bousculade. Méticuleuse, elle réajuste son sac à main sur son épaule. Aux réponses qu’il lui donne en contretemps, Isolde comprend que peut-être lui aussi s’est égaré dans des pensées dissolues. Contre toute attente cela apaise son humeur. Un long soupire silencieux la tance : sa voix lui paraît moins désagréable qu’au départ. A croire qu’elle s’habitue à sa présence, à cet intermède impromptu qui les a fait tous deux entrer dans une collision fortuite, et certainement sans conséquences.

« J’y suis allée … Autrefois. » avoue-t-elle dans un murmure, le hasard ayant malgré tout joué un rôle primordial dans cette découverte. Car autant l’admettre, son séjour en Iran remontait à plusieurs années à présent, et elle n’en avait gardé que des bribes de souvenirs confus. L’accent l’avait moins marquée là-bas que leurs us et coutumes. D’ailleurs, au regard des précautions qu’il prenait pour se maintenir à une distance raisonnable de son corps, en évitant tout contact physique, elle se demandait si les stigmates de son éducation n’étaient pas là, eux aussi. L’échange avait déjà trop duré, et la curiosité naissante qui transparaissait dans le fond de son regard éteint ne devait pas être étanchée. Ses vieilles habitudes ressurgissaient souvent trop vite. Mais alors qu’elle était happée par une tristesse abyssale, cet échange, si anodin soit-il en vérité, lui redonnait du baume au cœur. Comme si parler simplement à quelqu’un qu’elle ne connaissait ni d’Eve, ni d’Adam, avait quelque chose de rassurant qui lui permettait de sortir de son quotidien pour emprunter le temps d’un instant celui d’un inconnu. Illusion fébrile mais néanmoins bienvenue, ouvrant son esprit calfeutré sur l’idée de perspectives nouvelles, même si fragiles.

« J’allais chercher ma fille à l’école … » Pourquoi lui dire ? Pourquoi le laisser s’immiscer ainsi dans l’intimité coutumière de sa vie ? Pourquoi lui répondre quand elle avait tant l’habitude de rejeter ceux qui cherchaient à faire partie de son existence, même le temps d’un soupire ? Elle ne subodorait pas de malveillance en lui, seulement peut-être un sentiment d’obligation envers elle, parce que laisser une femme se débrouiller par elle-même, surtout aveugle, ne devait pas faire partie de ses habitudes. « Je peux me débrouiller seule vous savez, je suis une grande fille. » ironisa-t-elle du bout des lèvres, son accent guttural écossais se faisant particulièrement entendre dans la mesure où elle ne faisait plus aucun effort à présent pour le dissimuler, ou le modeler comme une anglaise. « Vous avez sans doutes beaucoup mieux à faire que d’escorter une aveugle, surtout à une telle heure de la journée. » à savoir, en pleine après-midi, alors que le travail de chacun battait son plein. N’avait-il donc aucune obligation qui l’appelait quelque part ?





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() message posté Mar 2 Mai 2017 - 18:17 par Invité
Le soir même, elle l'ajoutait sur Facebook, d'elle-même, comme ça. Elle n'avait pas eu besoin d'énormément d'informations pour le trouver, seulement un peu de recherche à faire, et c'était d'ailleurs très étonnant qu'elle eut un compte Facebook. C'était aussi étonnant qu'elle ait osé faire le premier pas de la sorte, elle qui avait l'air si gentille et bien élevée, cette femme qu'il avait percuté puis raccompagné, faute d'avoir mieux à faire. Alors, pour se faire désirer parce que c'était facile et efficace, Darius attendit quelques heures avant de l'accepter. Autoriser quelqu'un à avoir un tel accès à sa vie après si peu de temps, surtout quand c'est une femme que l'on ne connaît pas, c'était à la limite de l'incorrection. Mais Darius ne se sentait pas correct, de toute manière, parce qu'il n'en avait que faire de la correction, des bonnes manières et de tout ce qui allait avec. Tout ce qu'il voulait, c'était que Salim lui dise si oui ou non il mangerait bien une pizza le lendemain soir, c'était même pour ça qu'il était sur Facebook, parce qu'il attendait sa réponse.

Et non pas le lendemain soir, mais bien des années plus tard, Darius aurait fait n'importe quoi pour avoir un ami, même sur Facebook, même quelqu'un qu'il ne connaissait pas. Et il ne se faisait pas d'illusions à vrai dire, il savait bien que la femme qu'il avait à ce moment-là en face de lui, aveugle, à Londres, n'avait pas de compte Facebook. De toute façon en arrivant dans cette ville, Darius avait supprimé son compte et celui de Salim. Accablés des messages qu'ils recevaient, des insultes et des menaces que l'on proférait à leur égard, leur rappelant sans-cesse qu'ils n'avaient que ce qu'ils méritaient et concluant de menaces divines, ils ne prolongeait que la peine de Darius. Alors, il supprima tout, et perdit définitivement contact avec sa sœur, son frère, son père, sa mère.
Mais en face de lui, il avait un être humain, réel, qui ne lui en voulait pas, ne le détestait pas. C'était la première fois depuis ce qui semblait être des semaines que Darius n'avait pas eu quelque contact positif, chaleureux, qui n'expirait pas l'haleine douceâtre mais fortement amère du rejet que l'on ose exprimer de vive voix. Et il ne savait vraiment qui blâmer. Était-ce parce qu'il était trop bronzé ? Parce qu'il n'avait que trop péché ? Ou parce que malgré ses efforts pour rester digne, il n'attirait que la pitié ?

Alors, quand elle expliqua qu'elle allait chercher sa fille à l'école et qu'elle pouvait bien se débrouiller seule, Darius ne put s'empêcher d'être triste, déçu que cette bonne chose ait une fin si prématurée. Malheureusement il n'avait pas vraiment le choix. Il n'allait pas non plus la forcer à être raccompagnée. Dans ce pays, loin loin au Nord, là où il pleuvait tout le temps et ou il était si facile de considérer comme une femme comme un objet, il était normal pour une femme de se débrouiller seule, et tant mieux d'un côté, parce que tout le monde y gagnait du temps. Mais il faudrait quand même du temps à Darius pour s'y habituer. Parfois, les habitudes revenaient au galop, et souvent tout ce dont il avait besoin c'était d'une excuse pour partager un petit bout de chemin.
« Oh rendre service, ça ne me dérange pas vraiment non plus, et en effet j'ai déjà des choses à faire... » ironisa-t-il dans un anglais courant mais accentué et encore peut habitué aux tournures de phrases que l'on attendrait d'un natif de la langue. Il lui faudrait certainement pas mal de temps avant de vraiment pouvoir progresser là-dessus... Surtout lorsque l'on voyait le nombre de personnes avec qui il s'entretenait depuis son arrivée (un indice ; c'est très proche de zéro).

« Mais du coup, comme je... Comme je viens d'arriver ici, il faut que j'aille m'ouvrir un compte bancaire... Vous sauriez à tout hasard où est-ce pourrai trouver une agence où ils ne sont pas trop mauvais ? »
Sourire gêné, main passée dans ses cheveux pour vérifier que son chignon tenait toujours, excuse un peu improvisée et mal trouvée. Bonjour madame, vous êtes aveugle mais je suis sûr que vous pourrez me guider sans aucun problème ! En échange, je vous empêche de vous jeter par accident sous une voiture, qu'en dites-vous ? Bravo Darius. Tu emménages dans la capitale européenne de la finance et tu sais pas où trouver une banque. Mais d'un autre côté, c'était vraiment une question qu'il fallait se poser à un moment ou un autre...

De toute façon, Darius ne savait pas vraiment quel était l'objectif profond de sa question. Outre savoir où obtenir une carte bleue à pas trop cher, est-ce qu'il cherchait un moyen d'escorter cette jeune femme en détresse évidente (elles étaient toutes en détresse dés qu'elles étaient seules, le fait que celle-ci soit aveugle n'était presque qu'un détail) ou simplement comment prolonger cette discussion qui était la première qu'il avait pu avoir depuis trop longtemps ? Aussi insignifiante que cette rencontre puisse paraître à la jeune femme, elle était peut-être la meilleure et la plus importante des choses que Darius ait pu faire de toute sa journée passée dans ce bas-monde.
Alors, il espérait trouver un moyen comme un autre de faire en sorte que ce moment dure un peu plus longtemps, juste le temps de servir de pansement au dessus de la peau à vif du jeune expatrié.

« Vous sauriez me montrer c'est par où? »
Encore une fois, langage approximatif, mais bon. Pour une fois il avait envie de parler, ce n'était vraiment pas rien, surtout qu'elle connaissait l'Iran, y avait déjà été, c'était beaucoup plus que l'entièreté des gens que Darius avait jusque là rencontré. Pouvoir parler de son pays natal à quelqu'un sans simplement en raconter les détails qui le rendent si différent de l'Angleterre, ce n'était pas rien.
Alors, intérieurement, il se disait que si elle accepterait, Dieu mériterait bien une prière supplémentaire une fois le soir venu.


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