Il fallait s’appeler Simon pour oublier de vérifier les stocks de café en fin de semaine et se retrouver un matin, les réserves vides et son lieu de travail prêt à ouvrir un peu plus d’une heure plus tard. Le brun avait beau retourner tout la petite pièce qui lui servait de fourretout, il était tout bonnement incapable de mettre la main sur un sachet de grains de café. Et ne pas pouvoir servir de café dans un coffee shop semblait plutôt ironique. Encore pas très réveillé, le gérant soupirant un grand coup pour réfléchir calmement. Il fallait voir le côté positif des choses – si on pouvait dire ainsi – et se dire qu’en une heure il était encore possible de trouver une solution à son problème. Appeler son fournisseur maintenant était cause perdue, il risquait au mieux de se faire traiter de fou et de recevoir la marchandise en fin de journée. Loin de vouloir ouvrir sans son produit de vente principal, Simon retourna toutes les solutions possibles et imaginables dans son esprit avant de songer à une solution toute simple. Presque si simple qu’elle ne lui était pas apparue à l’esprit plus tôt.
Sans prendre gare à la pluie qui tombait à l’extérieur, Simon quitta le café uniquement vêtu de son jean noir, de son tee-shirt blanc et de ses baskets blanches. Grave erreur qu’il regretta aussitôt que les gouttes lui tombèrent dessus. Faire demi-tour pour attraper une veste ou bien un parapluie était impensable dans son timing serré, aussi continua-t-il sa course jusqu’au bout de la rue, jusqu’à arriver au supermarché. Il n’avait maintenant plus qu’à prier. Les pieds trempés, il parcourut les allées, ne prêtant aucune attention aux regards interloqués que les gens lui portaient. Oui, il était mouillé, un peu. Ce ne fut qu’après quelques minutes qu’il trouva finalement le rayon de ses désirs où les différents cafés étaient exposés. Les capsules ça ne l’intéressait pas, et le café en poudre encore moins. Très attentif, il observa les différents produits avant de tomber sur des gros sachets de café en grains. Bingo, il était sauvé. Trop heureux pour se retenir de sourire, le brun laissa échapper un soupir de soulagement et attrapa une dizaine de sachets. Si d’ordinaire le jeune homme était plutôt du genre à laisser passer les gens devant lui à la caisse, l’état d’urgence de la situation l’obligea à courir et à griller le tour d’un homme.
« Je suis désolé je suis très pressé, je vais faire vite » lui lança-t-il réellement navré de devoir être malpoli. Visiblement loin de se soucier de ce genre de détails, la caissière s’occupa de lui et le laissa ainsi sortir rapidement du supermarché.
Déçu de constater que la pluie torrentielle continuait à tomber dehors, le musicien prit son courage à deux mains et affronta le froid et l’eau, courant le plus vite possible pour regagner son café. Même s’il lui restait un peu de marge avant l’ouverture, il valait mieux éviter de ruiner tous les grains avec la pluie. Cependant son attention fut attirée par une scène sur son trajet. Voir une jeune femme se sacrifier pour aider une personne âgée était de plus en plus rare, ce qui ne manqua pas de lui faire plaisir. Un léger sourire aux lèvres, Simon l’observa faire avant de constater que malgré sa bonne intention, elle aussi semblait avoir besoin d’aide. Alternant un coup d’œil vers son sac de course et la jeune femme qui avait du mal à s’en sortir, il décida de faire une bonne action et se dirigea vers elle en hâte.
« Laissez-moi vous aider » Sans vraiment lui laisser le choix, le brun lui prit le caddie des mains mais ne voyant pas son gobelet de café dans l’autre, le renversa d’un geste brusque.
« Et merde, je suis désolé » Gêné de sa gaffe, il se gratta la tête et lança un regard confus vers l’inconnue.
« Okay je vais vous proposer un marché. J’amène le caddie au monsieur de l’autre côté de la route et ensuite je vous invite à vous sécher dans mon café et je vous offre une boisson pour me faire pardonner d’avoir ruiné celle là. » Tout en lui proposant son offre, Simon avait montré du doigt l’établissement en question, à quelques boutiques de là. Et parce qu’il fallait bien bouger de là avant qu’ils ne fondent sous la pluie, il tira l’objet jusqu’au trottoir opposé où le vieil homme les attendait à l’abri, sous le porche d’un magasin. Complètement trempé, Simon se retourna vers la jeune femme.
« Et voilà. Prête à courir jusque-là bas maintenant ? » l’interrogea-t-elle dans un sourire amusé.